Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La vie de rapporteure générale de la commission des affaires sociales n’est pas très facile – et sur cet article, moins encore. L’obstacle ne me fait pas peur, mais j’ai l’impression de danser un tango argentin ! (Sourires.)
Évidemment, je suis favorable au Nutri-score, qui est un moyen d’éduquer sur les produits. Toutefois, en tant que rapporteure générale, j’ai souligné en commission que cet article posait deux problèmes : d’une part, la création d’une taxe qui s’applique si le fabricant ou le producteur ne respecte pas l’affichage du Nutri-score ; d’autre part, l’anticonventionnalité. Malheureusement, j’ai été battue et cet article a été adopté.
Mme Frédérique Puissat. Quelle erreur !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Voilà qui explique les avis favorables que j’ai émis au nom de la commission sur les amendements identiques. En revanche, je réitère l’avis défavorable sur le sous-amendement : dresser une liste nous enferme. Je conseille donc son rejet.
Pour le reste, faites au mieux, mes chers collègues !
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1802 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 15 rectifié et 1344 rectifié quater, modifiés.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote sur l’article.
M. Bernard Jomier. Certains des arguments avancés sont intéressants et je comprends les craintes qui sont exprimées.
Il n’est pas question de demander à un fermier qui fabrique du pâté d’en calculer le Nutri-score ! Il est tout à fait possible de l’en exempter : c’était déjà le cas avec les amendements identiques, cela le sera encore plus maintenant que nous avons adopté le sous-amendement. Il n’y a donc aucun problème, puisque c’est prévu. Madame la rapporteure générale a en revanche raison, il n’est pas utile d’énumérer toutes les exemptions dans la loi.
Le Nutri-score n’a pas vocation à viser les légumes ! Imagine-t-on calculer le Nutri-score des poireaux, pour ne prendre que cet exemple ? Ce n’est pas l’objectif !
Il s’agit bien d’exempter les IGP, les AOP ou autres pour les protéger. J’ai bien entendu les craintes concernant les produits fabriqués en petites quantités à la ferme et vendus de manière artisanale. Ils pourront être exclus du dispositif. Ces craintes ne sont donc pas fondées.
On ne va pas tourner autour du pot, vous avez bien compris que le Nutri-score visait l’industrie agroalimentaire qui met sur le marché des produits ultratransformés. C’est elle qui, depuis la création du Nutri-score, fait pression pour qu’il ne soit pas généralisé et pour que l’information que réclament les consommateurs, une information transparence et efficiente en termes de santé publique, ne devienne pas obligatoire.
Les comportements ont changé. À la suite de la modification du mode de calcul du Nutri-score, une marque de céréales pour enfants très populaire, que parents et enfants connaissent et qui est la plus consommée, a dû revoir leur composition pour les rendre moins sucrées et moins grasses !
Tels sont les objectifs que nous partageons. C’est cela le virage de la prévention.
Il a fallu créer une taxe pour raccrocher cette mesure au projet de loi de financement de la sécurité sociale. S’il faut en réduire le taux lors de la commission mixte paritaire, il n’y a pas de problème. Si nous ne votons pas cet article, en revanche, il n’y a plus rien.
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote sur l’article.
Mme Frédérique Espagnac. Certains peuvent à juste titre s’interroger sur les circuits courts.
Contrairement à Bernard Jomier, je ne pense pas que l’adoption des amendements identiques suffise à protéger les produits transformés fermiers. Paradoxalement, c’est le cas du sous-amendement. De ce point de vue, je tiens à rassurer : les produits labellisés étaient déjà protégés, les produits fermiers que l’on trouve sur les marchés en circuit court le seront aujourd’hui grâce à ce vote.
Cela vient d’être rappelé, c’est bien l’industrie agroalimentaire qui est visée ; nous protégeons les produits fermiers et leurs producteurs.
Les produits labellisés et les produits fermiers en circuit court seront donc exemptés de la taxe. Il est important de ne pas laisser croire que les produits AOP, IGP et fermiers ne sont pas de bonne qualité parce qu’ils sont gras.
Je rappelle que l’AOP répond à un cahier des charges extrêmement strict, qui suppose souvent dix ans de travail. C’est donc, je tenais à le dire, un gage de très bonne qualité au regard de la santé publique.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je veux le redire, mesdames, messieurs les sénateurs, voter contre cet article ne signifie pas que l’on est contre le Nutri-score, contre la prévention et contre l’information. Je regrette que la Commission européenne n’ait pas voulu récemment avancer sur la création d’un Nutri-score européen, car cela aurait permis de répondre à la question que vous soulevez et d’envisager éventuellement, pour le coup, une obligation.
Je maintiens qu’il existe un véritable risque d’incompatibilité avec le droit européen. Je comprends très bien les raisons qui vous ont amenés à vouloir exempter les AOP et l’ensemble des produits dont nous avons parlé, car ils sont source de plaisir et font vivre nos territoires.
Malgré tout, en cas de contentieux, la France serait placée devant ses contradictions : alors qu’elle invoquerait l’argument de la prévention et des motifs de santé publique, on lui opposerait le fait d’avoir exempté de l’obligation du Nutri-score un certain nombre de produits.
Il est à mon sens essentiel de poursuivre sur la voie de l’information du consommateur, afin de lui permettre de choisir, parmi les produits transformés, ceux sur lesquels figurent le Nutri-score. Le Nutri-score est un bon levier pour inciter beaucoup plus fortement les industriels à agir.
Je le répète, il y a un risque à voter cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote su l’article. (Murmures.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Rassurez-vous, madame la présidente, je ne serai pas longue ! (Sourires.)
Heureusement que Mme la ministre de la santé n’a qu’une objection de nature juridique à formuler, à savoir la compatibilité avec le droit européen. De ce point de vue, elle indique indirectement qu’en tant que ministre de la santé elle ne s’oppose pas à la mesure proposée.
Il va falloir très vite penser à faire une foire aux questions sur le Nutri-score pour s’y retrouver. S’il ne s’applique pas aux fruits et légumes et ne concerne pas les produits du marché, sans doute faut-il tout de même un support informationnel sur les produits emballés de l’agroalimentaire.
Je voulais surtout dire que la seule objection qui soit entendable, et que nous ne retenons pas, est celle de la compatibilité avec le droit européen.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 11 ter, modifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 40 :
| Nombre de votants | 344 |
| Nombre de suffrages exprimés | 329 |
| Pour l’adoption | 117 |
| Contre | 212 |
Le Sénat n’a pas adopté.
5
Mise au point au sujet de votes
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Lors du scrutin n° 37 sur l’amendement n° 606 tendant à supprimer l’article 9 bis du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, le groupe RDPI souhaitait voter contre.
Lors du scrutin n° 38 sur les amendements identiques nos 610 et 1005 tendant à supprimer l’article 9 septies de ce même projet de loi, ma collègue Nadège Havet souhaitait voter contre.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point. Elle figurera dans l’analyse politique des scrutins concernés.
La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Je rappelle à mes collègues que la commission se réunira à la suspension dans la salle 213.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures dix.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures quarante, est reprise à vingt-deux heures dix, sous la présidence de Mme Sylvie Vermeillet.)
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Vermeillet
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
6
Mise au point au sujet de votes
Mme la présidente. La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Lors du scrutin n° 37 sur l’amendement n° 606 tendant à supprimer l’article 9 bis du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, mes collègues Annick Billon et Guislain Cambier ont été enregistrés comme ayant voté pour, alors qu’ils souhaitaient voter contre.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.
7
Financement de la sécurité sociale pour 2026
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 11 quater.
Article 11 quater (nouveau)
Après le premier alinéa de l’article L. 137-27 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les établissements titulaires d’une autorisation de jeux mentionnée à l’article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure, seules les dépenses de publicité afférentes à l’activité de jeux d’argent sont incluses dans l’assiette de la contribution prévue au présent article. »
Mme la présidente. L’amendement n° 1772 rectifié, présenté par M. Bonneau, Mmes Guidez, Antoine et Perrot, MM. Levi, Dhersin, Kern et Menonville et Mme Patru, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Nous entendons supprimer l’article 11 quater, introduit à l’Assemblée nationale par l’adoption d’un amendement du groupe LIOT.
Cet article limite la contribution sur la publicité des jeux d’argent aux seules dépenses publicitaires liées aux jeux des casinos.
Or même si la publicité d’un casino n’évoque que les activités de restauration ou de loisirs, l’établissement en lui-même propose des jeux, la finalité étant d’attirer les joueurs d’argent.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’article 11 quater précise justement le champ d’application de la taxe sur les dépenses de publicité en faveur des jeux d’argent et de hasard, que nous avions d’ailleurs votée lors de l’examen du précédent projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Je rappelle que cette taxe s’inscrit dans une optique de santé publique et qu’elle vise précisément les jeux d’argent et de hasard. Il n’est donc pas logique d’y soumettre les activités tierces développées par certains opérateurs, comme la restauration ou les spectacles, qui sont des activités importantes, pour les casinos notamment.
Le champ de la taxe doit être en rapport avec son objet. Tel est le sens de l’article 11 quater. C’est pourquoi nous sommes défavorables à cet amendement de suppression.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l’autonomie et des personnes handicapées. Même avis, madame la présidente.
Mme Jocelyne Guidez. Je retire l’amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 1772 rectifié est retiré.
L’amendement n° 620, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
argent
insérer les mots :
et de hasard
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 11 quater, modifié.
(L’article 11 quater est adopté.)
Après l’article 11 quater
Mme la présidente. L’amendement n° 879, présenté par M. Dossus, Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 2° de l’article L. 137-27 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sont également comprises dans l’assiette de la contribution les dépenses engagées par les opérateurs de jeux d’argent et de hasard au titre du parrainage ou du sponsoring d’événements, de clubs ou de compétitions sportives. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement a été proposé par M. Dossus.
Les paris sportifs sont aujourd’hui la deuxième forme de jeux d’argent la plus pratiquée en France, juste après les jeux de loterie. C’est surtout la seule catégorie dont la prévalence a augmenté ces dernières années, les mises ayant été multipliées par presque trois en cinq ans.
Depuis l’ouverture à la concurrence en 2010, les stratégies promotionnelles se sont intensifiées, portées notamment par de nombreux influenceurs sur les réseaux sociaux.
Addictions France, dans un rapport publié en septembre 2025, qui est à l’origine du dépôt de cet amendement, a recensé près de 2 300 contenus promouvant les paris sportifs sur les réseaux sociaux pour la seule année 2024. Ces formats, peu ou pas régulés, inondent l’espace numérique et ciblent particulièrement les jeunes.
Les résultats sont préoccupants : on compte 24 millions de joueurs aujourd’hui, dont 350 000 joueurs quotidiens ; le produit brut des jeux s’est élevé à 1,8 milliard d’euros en 2024 ; enfin, 20 % des garçons de 17 ans ont parié dans l’année.
Cette stratégie agressive crée un terreau propice à l’addiction, qui peut entraîner des conséquences financières et sociales dramatiques : perte d’argent, dette, isolement, précarisation, dépression, anxiété.
Nous avons la responsabilité d’agir pour limiter ces dérives et protéger les publics les plus vulnérables. Tel est l’objet de cet amendement.
L’article L. 137-27 du code de la sécurité sociale taxe les dépenses publicitaires classiques des opérateurs de jeux d’argent, mais laisse un vide s’agissant du parrainage et du sponsoring sportif. Or ces partenariats sont la pierre angulaire du marché des paris et constituent un vecteur de promotion majeur.
Nous proposons d’inscrire clairement dans le texte que les dépenses engagées dans le parrainage ou le sponsoring d’événements, de clubs ou de compétitions sportives entrent dans l’assiette de cette contribution et qu’elles sont soumises au même taux de 15 %.
Cela permettrait d’harmoniser le traitement fiscal entre publicité et sponsoring, d’éviter un canal non taxé qui expose encore davantage les jeunes et de dégager des recettes supplémentaires, estimées à 6,75 millions d’euros sur la base des prévisions de dépenses de 2025.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous avons discuté, voilà près d’un an, de cette taxe sur la publicité visant les opérateurs de jeux. Nous avions alors choisi d’exclure de cette même taxe le sponsoring et le parrainage. Nous savons combien ces recettes sont importantes pour la vie même de tous ces clubs implantés dans nos territoires et qui sont parfois non professionnels.
Dans le prolongement du débat que nous avions déjà eu sur le précédent PLFSS, nous émettons un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je reprendrai les arguments de Mme la rapporteure générale. À l’occasion du débat qui s’est conclu en février dernier, voilà dix mois, un équilibre avait été trouvé : il doit perdurer.
Avis défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 522 rectifié bis, présenté par Mme Pantel, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj, Masset et Roux et Mme Girardin, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre V du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Taxation des publicités relatives aux jeux d’argent et de hasard
« Art. L. 245-17. – I. – Est instituée une taxe sur les dépenses de publicité portant des jeux d’argent et de hasard.
« II. – Sont redevables de cette taxe :
« 1° Pour le pari mutuel, les sociétés de courses qui les organisent dans les conditions déterminées par l’article 5 de la loi du 2 juin 1891 ayant pour objet de réglementer l’autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux et, pour les paris hippiques en ligne, les personnes mentionnées à l’article 11 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne ;
« 2° Pour les paris sportifs, les sociétés qui les organisent dans les conditions fixées par le I de l’article 137 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises ;
« 3° Pour les paris sportifs en ligne, les sociétés qui les organisent dans les conditions fixées par l’article 12 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne ;
« 4° Pour les jeux de cercle en ligne, les sociétés qui les organisent dans les conditions fixées par l’article 14 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne.
« III. – La taxe est assise sur les frais d’achats d’espaces publicitaires, quelle que soit la nature du support retenu et quelle que soit sa forme, matérielle ou immatérielle, ainsi que sur les frais d’événements publics et de manifestations de même nature.
« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 3 % du montant hors taxes sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au I.
« V. – Les modalités du recouvrement sont instaurées par décret.
« VI. – Le produit de la contribution sociale exceptionnelle créée par le présent article est affectée à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale.
« VII. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2026. »
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Cet amendement, proposé par ma collègue Guylène Pantel, vise à taxer les publicités sur les jeux d’argent.
Actuellement, 40 % du chiffre d’affaires des opérateurs provient de joueurs en situation de pratique excessive. Ce taux atteint 60 % pour les paris sportifs, pour lesquels l’addiction est la plus forte. Derrière ces données, il y a des vies abîmées : surendettement, isolement, troubles anxieux ou dépressifs, conduisant parfois au suicide.
Malgré ces constats alarmants, les opérateurs continuent d’inonder l’espace public de publicités toujours plus agressives. Leur budget explose. Ces publicités ciblent en particulier les jeunes et les publics vulnérables, notamment lors des grands événements sportifs, l’enthousiasme des spectateurs étant utilisé comme levier commercial.
Avec cet amendement, nous proposons une contribution sur ces dépenses publicitaires afin de réguler un secteur devenu incontrôlable et de renforcer les moyens de la sécurité sociale pour prévenir et accompagner les addictions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, la proposition que vous formulez est moins-disante que celle que nous avions faite l’année dernière. Vous voulez soumettre les courses hippiques à cette contribution, alors que nous nous étions mis d’accord, une fois de plus, pour les en exonérer.
Par conséquent, l’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. En complément de ce qu’a dit Mme la rapporteure générale, j’ajouterai que l’adoption de votre amendement, madame la sénatrice, aurait pour effet de soumettre les paris sportifs en réseau physique ou en ligne, ainsi que les jeux de cercle en ligne, à deux taxes sur la publicité.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.
Mme Annie Le Houerou. Je me saisis de l’examen de cet amendement pour en défendre un autre, déclaré irrecevable au prétexte que la création de taxe visée n’était pas affectée.
En 2023, l’Autorité nationale des jeux, dans son rapport d’activité, soulignait une reprise particulièrement solide du secteur. Jamais les marchés des jeux d’argent et de hasard n’avaient atteint un tel niveau.
La croissance des opérateurs est continue, mais elle s’accompagne de risques bien réels, car cette dynamique s’appuie sur une stratégie publicitaire extrêmement agressive.
Les opérateurs multiplient les campagnes, notamment lors des grands événements sportifs, dans les transports en commun, à la télévision et dans l’espace public. Ces publicités sont omniprésentes, visibles par tous, y compris par les enfants et les adolescents. Selon les relevés effectués par Addictions France, elles peuvent représenter jusqu’à 40 % des affiches publicitaires dans certaines stations de métro parisiennes.
Pourtant, les signaux d’alerte sont clairs. L’association SOS Joueurs rappelle que, tous jeux confondus, 70,3 % des joueurs sont endettés auprès de leurs banques. Nous sommes donc face à un véritable enjeu de santé publique. Ces pratiques entraînent des formes d’addiction sévères et plongent nombre de nos concitoyens dans la précarité. Nous avons le devoir d’agir pour limiter les effets délétères de ces jeux et de ces paris.
Par ailleurs, les taxes sur les jeux d’argent constituent déjà des recettes utiles. La Cour des comptes souligne que les prélèvements affectés aux organismes sociaux – CSG, CRDS et taxes sur les paris sportifs ou le poker en ligne – représentent déjà près de 600 millions d’euros.
Dans un contexte de déficit, toute recette supplémentaire est précieuse. Elle renforce nos capacités d’action sans peser sur les ménages les plus fragiles. Mieux taxer les publicités pour les jeux d’argent et de hasard permettrait donc à la fois de mieux protéger les consommateurs et de mobiliser des ressources nouvelles en faveur de l’intérêt général.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.
Mme Marion Canalès. L’année prochaine, en 2026, se tiendra la Coupe du monde de football. L’augmentation des jeux à risque est une problématique que nous avons déjà abordée dans le cadre du PLFSS l’année dernière et même l’année d’avant, dans le prolongement de la Coupe du monde de rugby.
Nous le savons, la Coupe du monde de football constituera un moment essentiel pour le marketing autour des jeux d’argent. La population en général et la jeunesse en particulier seront de plus en plus exposées.
On observe une hausse continue du nombre de personnes prises en charge dans nos centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (Csapa). Au-delà du problème de santé publique, cela représente un coût réel pour notre système de protection sociale, qui grève notre budget et ne permet pas aux Csapa de faire face à toutes les addictions.
Par ailleurs, madame la rapporteure générale, je voudrais vous interroger sur un point : j’ai lu dans le rapport que les recettes attendues de la taxe que nous avons votée dans le dernier PLFSS seraient versées au profit de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam). Or nous n’avons aucune évaluation de leur montant. J’espère que nous pourrons connaître l’effet de levier obtenu et savoir si nous arrivons bien à recouvrer cette taxe. C’est d’autant plus important qu’avec la grande compétition sportive qui nous attend dans quelques mois nous allons assister à un marketing et à une publicité très offensifs en direction des jeux d’argent.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Voilà un sujet à aborder non seulement dans le PLFSS, mais également dans le projet de loi de finances (PLF). D’ailleurs, un précédent ministre des comptes publics avait organisé une table ronde sur ces jeux d’argent et ces casinos en ligne, qui posent des problèmes, non seulement d’addiction, mais aussi de blanchiment et de criminalité.
Il faut pouvoir travailler globalement sur le sujet en ayant une fiscalité qui soit adéquate et un contrôle qui le soit tout autant.
Je voulais donc profiter de cette discussion pour vous rappeler ces problèmes et d’addiction et de criminalité. Plus la publicité sera développée, plus l’attractivité de ces jeux sera grande, plus ce milieu va drainer des activités criminelles.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame Canalès, voici les éléments d’information que j’ai communiqués hier : la taxe sur les jeux a produit 1,3 milliard d’euros, dont 81 millions d’euros sont imputables aux mesures nouvelles. Cela ne correspondait toutefois qu’à une demi-année, puisque la mesure n’a été appliquée qu’à partir du 1er juillet 2025.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 522 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)


