M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Guy Benarroche. En conclusion, une intégration moins réussie et une absence de progrès face à l’immigration irrégulière, le tout sous le prétexte du leurre idéologique consistant à prétendre stopper les mouvements migratoires mondiaux : tout cela explique que nous ne voterons pas ces crédits.
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Mme Nathalie Goulet et M. Guislain Cambier applaudissent.)
M. Laurent Nunez, ministre de l’intérieur. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure spéciale, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, après l’examen samedi des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui ceux de la mission « Immigration, asile et intégration ».
J’en suis satisfait, car le projet de loi de finances pour 2026 traduit deux priorités majeures : la sécurité des Français et le renforcement de la présence de l’État dans les territoires. Il place à ce titre la politique migratoire au cœur de nombreux défis, qu’il s’agisse du respect de nos obligations européennes, de l’accroissement des capacités de rétention ou de la poursuite des actions engagées en faveur de l’intégration et de l’accueil des demandeurs d’asile.
Ce projet de loi de finances prévoit de porter le budget du ministère à 24,5 milliards d’euros l’an prochain, soit une hausse de 587 millions d’euros. C’est pourquoi l’adoption de ce texte est essentielle : elle conditionne l’octroi des ressources nécessaires à nos forces de sécurité et de secours.
S’agissant spécifiquement de la mission « Immigration, asile et intégration », ses crédits atteindront 2,16 milliards d’euros, en progression de 80 millions d’euros par rapport à 2025.
Cette enveloppe se répartit comme suit : 1,79 milliard d’euros pour le programme 303 « Immigration et asile », en hausse de 77,5 millions d’euros, et 368,5 millions d’euros pour le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité », en augmentation de 2,5 millions d’euros.
Ces crédits permettront la mise en œuvre de la loi Immigration et Intégration, ainsi que des deux lois du 11 août 2025, la première visant à faciliter le maintien en rétention des personnes condamnées pour des faits d’une particulière gravité et présentant de forts risques de récidive ; la seconde portant programmation pour la refondation de Mayotte.
Ces moyens accompagneront également la transposition du pacte européen sur la migration et l’asile dont l’entrée en vigueur, prévue en juin 2026, constitue un enjeu financier majeur.
Ce nouveau cadre juridique, porté par la France, réforme en profondeur la politique migratoire européenne ; il vise à sécuriser les frontières extérieures de l’Union et à rendre la gestion de l’asile plus efficiente, en tendant vers une harmonisation des conditions d’accueil afin de limiter les mouvements secondaires au sein de l’Union.
Concrètement, il instaure une procédure d’asile aux frontières extérieures, assortie d’une capacité adéquate de places d’hébergement mobilisables, et réforme le règlement de Dublin. Il prévoit également un nouveau mécanisme de solidarité, l’adaptation des conditions matérielles d’accueil et la refonte du système d’information Eurodac. Il implique un effort budgétaire significatif estimé à plus de 72 millions d’euros en crédits de paiement sur la mission en 2026.
En outre, la création de 150 nouvelles places en zone d’attente est budgétée pour se conformer aux nouvelles procédures.
En matière d’immigration, la stratégie de l’État se concentrera sur l’amélioration des contrôles, sur la lutte contre la fraude documentaire – notamment par l’utilisation proportionnée de la biométrie –, les détournements de procédures et les filières, sur le renforcement des contrôles aux frontières, ainsi que sur la dynamisation de la politique d’éloignement.
À cette fin, les crédits consacrés à la lutte contre l’immigration irrégulière se maintiennent à un niveau supérieur à 170 millions d’euros en crédits de paiement, hors immobilier.
Dans ce cadre, l’investissement important se poursuivra pour concrétiser le plan ambitieux d’ouverture de places en centre de rétention administrative prévu par la Lopmi, dit plan CRA 3000. Deux nouveaux centres seront livrés en 2026, à Bordeaux et à Dunkerque, tandis que la construction de deux autres sera engagée à Béziers et à Nantes. De plus, les capacités d’accueil de plusieurs centres, notamment à Rennes et à Metz, seront renforcées.
Au total, plus de 266 millions d’euros en autorisations d’engagement et 156 millions d’euros en crédits de paiement sont inscrits sur le volet immobilier des CRA.
Par ailleurs, la construction d’une zone d’attente est prévue à Mayotte, tout comme celle d’unités de vie familiale, conformément à la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
En matière d’intégration, la loi du 26 janvier 2024 a modifié significativement l’approche en substituant une obligation de résultat à une obligation de formation. Son article 20 dispose que, au plus tard le 1er janvier 2026, les étrangers sollicitant une carte de séjour pluriannuelle devront avoir atteint le niveau de langue A2 et réussi un examen civique.
Il en ira de même pour les demandeurs d’une carte de résident, qui devront avoir atteint le niveau de langue B1. La France se met ainsi au même niveau d’exigence que la plupart des pays européens. Un décret du 15 juillet dernier étend ces procédures à l’accès à la nationalité, qui, dès le 1er janvier 2026, sera conditionnée à l’atteinte d’un niveau de langue B2.
Les crédits pour 2026 intègrent l’adaptation, en conséquence, des formations linguistiques et civiques délivrées par l’Ofii dans le cadre du contrat d’intégration républicaine.
En ce qui concerne les bénéficiaires de la protection internationale, le déploiement sur l’ensemble du territoire hexagonal du programme d’accompagnement global et individualisé des réfugiés, dit Agir, s’est achevé à la mi-2025.
Ce nouveau guichet départemental contribue à améliorer l’accès aux droits, à l’emploi et au logement des personnes réfugiées grâce à une meilleure coordination de l’ensemble des acteurs locaux de l’intégration – services publics de l’emploi, de l’hébergement, du logement, de l’insertion, acteurs associatifs. Il doit également s’articuler de manière plus pertinente avec les dispositifs de droit commun et les programmes spécialisés, de manière à améliorer l’efficacité de ces derniers et à éviter les redondances, notamment les doubles financements.
Les objectifs fixés sont donc atteints, mais ces premiers résultats positifs doivent être consolidés. Les efforts doivent en particulier être amplifiés en matière d’accès au logement et à l’emploi.
Une « file active » de 25 000 à 26 000 personnes peut actuellement bénéficier du programme. Les crédits prévus permettront de maintenir cette capacité d’accueil en 2026, année au cours de laquelle un nouvel accord-cadre sera lancé pour consolider le dispositif.
Enfin – j’en terminerai par là –, les crédits alloués au déploiement du programme d’administration numérique pour les étrangers en France, de France-Visas (FV) et le programme frontières sécurisées et fluides (PFSF), seront portés à plus de 82 millions d’euros, soit plus de 8 millions d’euros qu’en 2025, afin de moderniser et de rendre plus accessible le service public aux usagers, mais aussi de faciliter et de renforcer les contrôles par les agents des préfectures, des forces de sécurité intérieure et des douanes.
En investissant dans les dispositifs destinés à corriger la vulnérabilité des titres et à améliorer les contrôles ciblant les filières d’immigration clandestine, nous renforçons donc la lutte contre l’immigration irrégulière.
Comme vous pouvez le constater, mesdames, messieurs les sénateurs, ce budget pour 2026 traduit pleinement la politique que le Gouvernement entend conduire en matière migratoire. S’inscrivant dans la continuité de la politique portée par mes prédécesseurs, celle-ci repose sur deux piliers : humanité et fermeté.
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », figurant à l’état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Immigration, asile et intégration |
2 239 363 408 |
2 160 935 708 |
Immigration et asile |
1 870 879 406 |
1 792 471 706 |
Intégration et accès à la nationalité française |
368 484 002 |
368 464 002 |
M. le président. L’amendement n° II-1556 rectifié, présenté par MM. Canévet, Longeot, Folliot, Delahaye, Menonville, Cambier et Maurey, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
TOTAL |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
SOLDE |
-10 000 000 |
-10 000 000 |
||
La parole est à M. Guislain Cambier.
M. Guislain Cambier. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteur spécial. Le dispositif proposé est assez général.
Par ailleurs, à l’heure où nous demandons des efforts particuliers en matière de régalien, nous nous félicitons de l’augmentation des crédits de la présente mission.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Nunez, ministre. L’adoption de cet amendement obérerait significativement le déploiement des politiques que je viens d’exposer.
Je demande donc également le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, pour explication de vote.
M. Guislain Cambier. S’agissant d’une compétence régalienne, j’estime qu’il faut soit l’assumer complètement, soit la transférer via une délégation de service public, non seulement pour en assurer un traitement approprié, mais aussi par cohérence.
Par ailleurs, il ne suffit pas de répéter combien notre État est impécunieux : encore faut-il consentir des efforts.
Je maintiens donc cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-1556 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-725, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
286 680 000 |
|
286 680 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
TOTAL |
|
286 680 000 |
|
286 680 000 |
SOLDE |
-286 680 000 |
-286 680 000 |
||
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Au regard des difficultés financières que rencontre l’État, il est impératif de procéder à des économies généralisées. Celles-ci doivent concerner tous les secteurs, y compris la gestion des demandes d’asile.
Par cet amendement, nous proposons donc de rationaliser les dépenses publiques relatives à l’accueil des demandeurs d’asile, en réduisant de 5 % le budget alloué à l’allocation pour demandeur d’asile et de 30 % des crédits finançant l’hébergement des demandeurs d’asile, lesquels sont du reste en augmentation de 42 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2025.
M. le président. L’amendement n° II-717, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
|
|
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
100 000 000 |
|
100 000 000 |
TOTAL |
|
100 000 000 |
|
100 000 000 |
SOLDE |
- 100 000 000 |
- 100 000 000 |
||
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Les demandes d’asile dans notre pays sont actuellement enregistrées et traitées sur le territoire national, ce qui emporte des coûts substantiels, notamment d’établissement de la situation administrative des demandeurs. Ces démarches pourraient être prises en charge en grande partie dans les pays d’origine, au sein des ambassades et consulats français. Cela contribuerait à rationaliser les dépenses publiques.
Je rappelle que les autorisations d’engagement programmées pour 2026 sont en augmentation de 22 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2025.
M. le président. L’amendement n° II-712, présenté par MM. Szczurek, Hochart et Durox, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
25 200 000 |
|
25 200 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
TOTAL |
|
25 200 000 |
|
25 200 000 |
SOLDE |
- 25 200 000 |
- 25 200 000 |
||
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-1582, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
60 000 000 |
|
60 000 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
60 000 000 |
|
60 000 000 |
TOTAL |
60 000 000 |
60 000 000 |
60 000 000 |
60 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, de même, du reste, que les années précédentes, la baisse des crédits finançant l’allocation pour demandeur d’asile est un non-sens.
Au-delà du démenti que l’accueil des Ukrainiens a apporté aux intentions présidant à cette diminution, je rappelle que l’ADA est un droit : celui de toute personne sollicitant la protection de la France de pouvoir vivre dignement le temps de l’examen de sa demande.
Comme le rappelait notre collègue Brossat, derrière ces crédits, il y a des femmes, des hommes, des familles, souvent sans hébergement, qui dépendent de ce soutien minimal pour se nourrir, se déplacer et accéder aux soins. Réduire ces crédits reviendrait à fragiliser davantage des vies déjà marquées par la précarité et à dégrader les conditions d’accueil que notre nation s’est engagée à garantir.
La France ne peut pas construire sa politique d’asile sur l’austérité et la défiance ; elle doit rester fidèle à l’esprit du droit d’asile.
Par cet amendement, nous demandons donc que les crédits de l’ADA soient a minima portés au même niveau que l’an dernier.
M. le président. L’amendement n° II-890 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, MM. Féraud, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Kanner et Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
40 000 000 |
|
40 000 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
40 000 000 |
|
40 000 000 |
TOTAL |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement, similaire à celui que M. Benarroche vient de présenter, vise lui aussi à augmenter l’enveloppe allouée à l’ADA, de manière à la porter à un niveau conforme aux besoins.
Je rappelle du reste qu’il nous faut prendre en compte la mise en œuvre, à compter de juin 2026, du pacte européen sur la migration et l’asile : compte tenu du nombre croissant de demandeurs d’asile qui ne bénéficieront pas d’hébergement, le montant de l’allocation qui leur sera versée sera plus élevé.
M. le président. L’amendement n° II-885 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, MM. Féraud, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Kanner et Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
93 100 000 |
|
93 100 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
93 100 000 |
|
93 100 000 |
TOTAL |
93 100 000 |
93 100 000 |
93 100 000 |
93 100 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Le présent PLF prévoit la suppression d’environ 2 000 places, qui s’ajouteront aux 6 500 places supprimées l’année dernière. En tenant compte de l’indispensable création de 500 places d’hébergement pour les demandeurs d’asile à Mayotte, le parc devrait donc se contacter de 1 400 places cette année.
Cette diminution ne nous permettant pas de répondre aux besoins, nous proposons de relever les crédits alloués au parc d’hébergement des demandeurs d’asile.
M. le président. L’amendement n° II-1579, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
45 000 000 |
|
45 000 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
45 000 000 |
|
45 000 000 |
TOTAL |
45 000 000 |
45 000 000 |
45 000 000 |
45 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Par cet amendement, nous entendons remédier aux difficultés, pointées lors de l’examen de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et rappelées tout à l’heure, relatives au nombre de places d’hébergement d’urgence disponibles.
Les gouvernements successifs paraissent en effet se rejoindre sur un point : dégrader les conditions de l’accueil d’urgence, qui seules permettraient de garantir qu’aucun demandeur d’asile ne dorme dans la rue.
Je n’apprendrai rien à personne en rappelant que le Samu social est saturé, que, hiver comme été, trop de personnes précaires ne trouvent pas d’endroit pour s’abriter et que seuls 65 % des demandeurs d’asile ont été hébergés en 2024.
Le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, à l’écoute des acteurs de terrain comme la Fédération des acteurs de la solidarité, souhaite donc rétablir les 6 429 places d’hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile supprimées par la loi de finances pour 2025.
Nous ne pouvons pas, en effet, accepter que l’on compte sur les places d’hébergement d’urgence de droit commun pour répondre aux besoins des demandeurs d’asile. Les conséquences d’un tel calcul, que j’estime cynique, pèseraient beaucoup trop sur un système déjà structurellement saturé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteur spécial. L’avis est défavorable, pour l’ensemble des raisons invoquées par différents orateurs lors des interventions liminaires.
Muriel Jourda a notamment rappelé que les moyens humains de l’Ofpra ont été renforcés, puisque le nombre d’ETP, qui a déjà été relevé l’année dernière, sera de nouveau rehaussé cette année, de sorte que l’augmentation sur deux ans s’établira à près de 80 ETP. C’est suffisamment exceptionnel pour être souligné.
Si l’objectif n’est pas encore atteint, la stabilisation des délais d’instruction des demandes d’asile permet de réaliser les économies nécessaires.
En réponse à votre couplet sur la maltraitance, mes chers collègues, je rappelle par ailleurs que, même si nous votons ce budget, les allocations continueront d’être perçues par les demandeurs d’asile, qui n’en subiront donc aucune conséquence.
Je vous invite également à bien examiner les crédits de la présente mission : l’hébergement d’urgence étant transféré dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada), les crédits qui lui sont alloués se maintiennent à un niveau substantiel.
J’estime toutefois que notre politique migratoire doit s’adapter aux moyens que nous pouvons lui consacrer, contrairement à vous, qui estimez que la politique migratoire doit consister à laisser entrer tout le monde et à ne pas s’efforcer de faire sortir quiconque de notre territoire, et que, en conséquence, les moyens doivent s’adapter à la demande. Telles ne sont pas nos options.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Nunez, ministre. En ce qui concerne les crédits alloués à l’ADA, 48 ETP supplémentaires étant affectés cette année à l’Ofpra, après l’augmentation de 29 ETP intervenue l’année dernière, j’estime moi aussi que nous devrions être en mesure de réduire les dépenses, grâce à une gestion plus fine.
Pour ce qui est des places d’hébergement d’urgence, je souscris aux propos de la rapporteure spéciale, auxquels j’ajouterai que le nombre de places financées est tout de même passé de 82 762 en 2017 à 113 258 dans la loi de finances pour 2025. Je rappelle par ailleurs que les demandeurs d’asile qui ne bénéficient pas d’un logement peuvent voir leur allocation majorée de 7,40 euros par jour.
Je précise, monsieur Benarroche, que les crédits alloués à l’ADA inscrits dans la présente mission sont établis sur la base des facteurs sous-jacents conduisant à la demande de cette allocation, ainsi que des estimations que nous réalisons, en intégrant notamment les efforts de gestion que j’évoquais.
Je suis donc défavorable à l’ensemble de ces amendements.
M. le président. L’amendement n° II-798 rectifié bis, présenté par Mme Briante Guillemont, M. Masset, Mmes N. Delattre et M. Carrère et MM. Fialaire, Gold, Grosvalet, Laouedj, Roux, Daubet et Guiol, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement vise à accroître les capacités d’hébergement en Cada et en centre d’accueil et d’orientation (CAO), afin de remédier aux tensions persistantes pesant sur le dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile (DNA).
De nombreux demandeurs n’accédant pas à un hébergement spécifique, ils sont orientés vers des structures d’hébergement d’urgence déjà très sollicitées, si bien que certains se retrouvent sans solution. Cette situation complique la gestion des procédures, fragilise la mise en œuvre du droit d’asile et accroît la précarité des personnes concernées.
Un renforcement des capacités d’hébergement n’est donc plus seulement souhaitable : il est indispensable pour garantir un accueil digne et une gestion efficace des demandes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteur spécial. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-798 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° II-888 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, MM. Féraud, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Kanner et Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
12 500 000 |
|
12 500 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
12 500 000 |
|
12 500 000 |
TOTAL |
12 500 000 |
12 500 000 |
12 500 000 |
12 500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à rétablir les crédits destinés à financer le parc d’hébergement des bénéficiaires de la protection temporaire, autrement dit, des personnes ayant fui la guerre en Ukraine. Ces crédits ont été largement amputés ces deux dernières années, avec des conséquences très concrètes pour les réfugiés ukrainiennes et ukrainiens.
Ce parc d’hébergement mis en place à partir de 2022 pour faire face à l’arrivée de personnes fuyant la guerre en Ukraine a compté jusqu’à 30 000 places. Alors qu’il comptait encore 8 000 places à la fin de 2024, il n’en compte plus que 4 000, et sous prétexte de « s’adapter aux besoins réels », une nouvelle baisse est annoncée pour 2026.
Nous savons pourtant qu’à mesure que les places sont supprimées, des Ukrainiens de plus en plus nombreux sont confrontés à des difficultés d’hébergement – la presse quotidienne régionale s’en fait régulièrement l’écho sur l’ensemble du territoire.
Afin de mettre un coup d’arrêt à cette situation indigne dans notre pays, cet amendement vise donc à doubler les crédits alloués à l’hébergement des réfugiés ukrainiens.