M. le président. La séance est reprise.

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Attentat terroriste en Australie

M. le président. Madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, l'Australie a été frappée hier par un terrible attentat terroriste lors de la célébration d'une fête juive, Hanoukka, la fête des lumières, qui se tenait sur la plage de Bondi, à Sydney. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme et M. le ministre se lèvent.)

Le bilan humain est très lourd : au moins quinze personnes sont mortes et quarante-deux autres sont hospitalisées.

Parmi les victimes figure notre compatriote Dan Elkayam, âgé de 27 ans, mort sous les balles des terroristes, à plus de 16 000 kilomètres de sa famille et de ses proches.

Au nom du Sénat tout entier, je souhaite, en cet instant, exprimer aux victimes, à leurs familles et à leurs proches notre solidarité et présenter nos plus sincères condoléances et notre solidarité au peuple australien, durement éprouvé.

Une fois de plus, une fois de trop, cet événement tragique nous rappelle que le terrorisme ne connaît pas de frontières et que nous ne devons jamais, en aucun cas, abaisser notre vigilance face à la haine, à la violence, à l'antisémitisme et au rejet de l'autre.

Madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je vous invite à observer un instant de recueillement en hommage aux victimes de cette attaque. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme et M. le ministre, observent un instant de recueillement.)

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Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi modifié

Vote sur l'ensemble

M. le président. L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote à la tribune du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale (projet n° 138, rapport n° 139, avis nos 140 à 145).

La parole est à Mme Ghislaine Senée, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Ghislaine Senée. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, j'irai droit au but : nous ne pouvons dire que M. le rapporteur général et la majorité sénatoriale aient recherché le compromis au Sénat, que ce soit avec le Gouvernement ou avec les membres de l'opposition.

Il est clair que les suppressions de recettes, le rejet irrationnel de toute mesure de justice fiscale et les coupes relativement indifférenciées dans les dépenses ont dominé nos travaux. Le résultat ? Une copie sénatoriale caricaturale, qui compromet une réunion de commission mixte paritaire (CMP) conclusive et nécessitera de forts réajustements des recettes, si l'objectif est bel et bien que ce texte soit voté.

Tout cela risque de susciter, une fois encore, incompréhension et confusion chez les acteurs économiques et nos concitoyens.

Je m'en explique.

Pour ce qui est des recettes, ce projet de loi de finances (PLF) poursuit, voire amplifie la trajectoire gouvernementale d'appauvrissement de l'État. Il se caractérise par une accélération de la disparition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), la division par deux du taux de la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises, la suppression de la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR), la réduction du rendement de la taxe sur les holdings et le rejet en bloc de toute mesure de rééquilibrage fiscal entre les ultrariches et le reste des Français.

La copie du Sénat entraîne donc une perte sèche pour nos recettes publiques de 8,8 milliards d'euros par rapport au texte initial, à laquelle s'ajoutent 5,7 milliards de dépenses nouvelles, dont un tour de passe-passe de près de 2 milliards d'euros, voté dans la soirée de jeudi, sans oublier 3,1 milliards d'euros au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) voté à l'Assemblée. Nous atteignons donc un déficit de plus de 5,3 % du PIB, contre 4,6 % dans la version initiale du texte du Gouvernement. Or toute recette refusée, c'est de la dette pour nos enfants, pour reprendre vos mots, mes chers collègues.

Dans ces conditions, comment comprendre votre choix ?

Naomi Klein a rappelé que « seule une crise – qu'elle soit réelle ou perçue – produit un véritable changement ». La dette publique est aujourd'hui instrumentalisée selon ce même mécanisme : présentée comme une menace existentielle, elle devient le prétexte à une remise en cause méthodique de l'État social. En effet, rappelons-le, la dette résulte non pas d'un excès de protection sociale ou d'investissements pour notre avenir, mais d'un manque persistant de recettes. En fabriquant un récit alarmiste sur la dette, vous créez une urgence artificielle qui sert à légitimer des politiques d'austérité, à rebours des urgences climatique et sociale.

Or nous sommes dans une impasse majeure : notre système fiscal est profondément inadapté face à l'explosion des richesses. Aussi, défendre les 1 % les plus riches, qu'il s'agisse des entreprises ou des ménages, et légitimer une contribution de leur part qui se situe à un niveau inférieur à celui de tous les autres n'est plus acceptable. C'est contraire à l'esprit de notre Constitution, qui appelle tous les citoyens à contribuer « en raison de leurs facultés », c'est aller à contre-courant de toute unité, à l'opposé de la volonté de faire Nation.

L'historien Romain Huret nous enseigne que, face à une concentration extrême des richesses, les démocraties n'ont qu'un seul levier cohérent : taxer davantage les plus fortunés et se battre pour la progressivité réelle de l'impôt. Aussi, loin de toute volonté de spoliation, contrairement à ce que la droite et l'extrême droite ont voulu faire croire, la taxe Zucman, que la gauche a défendue, est une proposition de repli. Il s'agit simplement de faire revenir les ultra-riches dans le droit commun en matière d'impôts.

En refusant cette justice fiscale, vous contribuez à diviser le pays en deux blocs : d'un côté, ceux qui paient plein pot ; de l'autre, ceux qui, grâce à des voies détournées, échappent à une part croissante de la juste contribution qu'ils devraient acquitter.

Par une ironie amère, les plus fortunés se tournent aujourd'hui vers l'extrême droite pour défendre et sanctuariser leurs privilèges. Dans ce mouvement, c'est non seulement la justice fiscale qui s'effrite, mais encore la démocratie elle-même.

Pour ce qui est de la seconde partie du texte, relative aux dépenses, le constat est tout aussi inquiétant. Ainsi, le budget, tel qu'il a été voté, est l'histoire d'une lente dégradation : on ne réforme pas, on ne protège pas et on renonce à préparer l'avenir alors que les inégalités explosent et que nous atteignons des niveaux assez inédits de pauvreté.

Les besoins en logements sociaux et très sociaux sont, dans ce contexte, toujours plus élevés, sans que vous y consacriez les moyens dans ce PLF. Pis, vous sacrifiez le tissu associatif, alors que c'est lui qui agit là où l'État n'est pas, ou n'est plus, pour soutenir les plus précaires de nos compatriotes.

En matière d'éducation, vous osez prévoir la suppression de 4 000 postes d'enseignants, tout en déplorant, fatalistes, le déclassement scolaire de notre pays. Or la réussite scolaire mérite mieux qu'un petit calcul comptable fondé uniquement sur la baisse démographique.

La mission « Écologie, développement et mobilité durables » devient véritablement la variable d'ajustement budgétaire. Ainsi, les crédits pour la transition agroécologique ont quasiment disparu en deux ans et les opérateurs de la transition se sont vu sabrer des crédits par le Sénat : c'est le cas de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), de l'Office français de la biodiversité (OFB), de l'Office national des forêts (ONF), du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema). Bref, tous y passent !

Et quel loupé sur la recherche ! L'année où Philippe Aghion reçoit le prix Nobel d'économie grâce à ses travaux démontrant que la croissance d'un pays dépend de ses investissements dans l'enseignement, la recherche et l'innovation, vous effectuez une coupe de 1 milliard d'euros dans le plan France 2030, ce qui entraînera une véritable année blanche pour les nouveaux projets d'innovation et l'abandon de la trajectoire, jusqu'ici respectée, de la loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur (LPR).

J'en viens à la situation des collectivités locales, qui est tout aussi alarmante. Finalement, ce budget reflète un choix politique clair : privilégier les grands acteurs économiques au détriment de la puissance publique locale. Entre le gel de la dotation globale de fonctionnement (DGF), malgré les charges nouvelles, la division par cinq des crédits du fonds vert en deux ans, la nouvelle hausse des cotisations employeur à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), ou encore les baisses de recettes au titre des variables d'ajustement, les collectivités se retrouvent, une fois de plus, prises à la gorge.

En outre, la reconduction du dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico), qui a certes été réduit, aboutira à la ponction illégitime d'une partie de leurs recettes. Les quelques mesures correctrices introduites constituent davantage un saupoudrage qu'un véritable soutien.

À la fin de l'examen du PLF au Sénat, l'effort demandé aux collectivités devrait se situer entre 4 milliards et 5 milliards d'euros. C'est à la fois colossal et gagne-petit, pour la chambre des territoires que nous sommes censés être. Pourtant, les collectivités sont notre échelon de proximité et les plus à même de répondre aux besoins quotidiens des Français.

En conclusion, comme vous l'aurez compris, parce que ce texte budgétaire va aggraver encore les inégalités, fiscales comme sociales, parce qu'il ne peut que fragiliser davantage notre État social et les services publics, dont dépend la cohésion du pays, parce qu'il incarne une nouvelle étape dans le renoncement de la France à ses engagements climatiques, parce que l'horizon de notre jeunesse s'assombrit toujours davantage et que ce budget ne lui offre aucune perspective, enfin parce que nous jugeons qu'il tourne insidieusement le dos à deux des piliers de notre devise nationale, l'égalité et la fraternité, les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires voteront résolument contre. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER. – Mme Marianne Margaté applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Christopher Szczurek, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

M. Christopher Szczurek. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, comme chaque année, le Sénat examine le projet de loi de finances dans un contexte toujours plus incertain et contraint, marqué par l'affaiblissement progressif de nos marges de manœuvre budgétaires et par une situation politique profondément instable.

Comme nous n'avons eu de cesse de le répéter, ce budget est le dernier de la Macronie. Il illustre, s'il le fallait encore, l'échec économique, financier et, in fine, institutionnel des deux derniers quinquennats.

En 2017, la Macronie triomphante entamait cinq années d'un pouvoir sans partage. Le Gouvernement disposait d'une majorité pléthorique à l'Assemblée nationale et le Parlement en était réduit au rôle de chambre d'enregistrement, validant sans coup férir toutes les prétendues réformes et les abandons assumés. Seules les révoltes sociales, puis la crise sanitaire ont troublé cette domination. Dans le même temps, le Rassemblement national voyait ses résultats électoraux s'améliorer inexorablement.

À cette époque, la dette publique s'élevait à 2 000 milliards d'euros et l'on s'inquiétait déjà de son poids. La Ve République paraissait encore dotée de l'architecture institutionnelle la plus solide du monde occidental, tandis que les vieux partis, pétris d'orgueil et de conformisme, semblaient promis à une disparition annoncée.

Mme Marie-Arlette Carlotti. Il n'en a rien été !

M. Christopher Szczurek. Près de dix ans plus tard, où en sommes-nous ?

Depuis trois ans, le pays n'a plus de majorité, plus de gouvernement, presque plus d'État. Des apparentements électoraux iniques ont brisé la belle mécanique institutionnelle héritée du général de Gaulle. Les tensions s'accumulent, les conflits menacent, la France est surendettée, économiquement atone et socialement fracturée.

Il faudrait évidemment parler du budget sur lequel nous sommes appelés à nous prononcer aujourd'hui, de l'obstination, jamais démentie, de la majorité sénatoriale, de son refus de voter le moindre amendement, même tendant à abaisser des dépenses publiques, dès lors qu'il est proposé par le Rassemblement national.

Mais enfin, nous connaissons le caractère factice de cet exercice. Sitôt le texte adopté, il reviendra sur le bureau d'Olivier Faure, qui opérera son tri en vertu d'un vague pouvoir de circonstance, totalement disproportionné eu égard au poids électoral du parti socialiste. Plus de gouvernement, plus de Parlement, plus d'État : seuls demeurent des arrangements de couloir entre un gouvernement sans cap et un parti socialiste trop heureux de surseoir à la sanction électorale que lui infligeront sans doute bientôt les électeurs.

Alors, entre l'entêtement des uns et la bassesse des autres, notre choix est très clair : bien évidemment, nous voterons contre ce texte. (MM. Aymeric Durox et Joshua Hochart applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Raphaël Daubet, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE – M. Marc Laménie applaudit également.)

M. Raphaël Daubet. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, nous voici parvenus au moment de nous prononcer sur la version sénatoriale du projet de loi de finances pour 2026, que nous allons ensuite soumettre au dialogue bicaméral.

Au Sénat, le débat démocratique est donc allé jusqu'à son terme, grâce au travail de M. le rapporteur général et de nos services. Je tiens à les remercier, au nom de mon groupe, le plus vieux de notre institution ; un groupe, comme je l'ai déjà dit, qui est fondamentalement attaché au bicamérisme, convaincu qu'une responsabilité particulière pèse sur notre chambre, et profondément inquiet de l'instabilité politique actuelle.

En effet, depuis trois ans, le régime confine à l'ingouvernabilité. Or le moment budgétaire est celui où le risque de blocage institutionnel est à la fois le plus fort et le plus dangereux pour la situation financière de la France.

Dans ce contexte singulier, nous conservons la haute idée que nous nous faisons de l'exercice démocratique. Nous pensons qu'il est bon qu'il y ait une majorité et une opposition, ce qui manque à l'Assemblée nationale. De même, il est bon que la majorité tienne compte des observations de l'opposition, ce qui n'est pas toujours le cas au Sénat.

C'est à l'aune de toutes ces considérations que les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen ont soupesé cette copie budgétaire, sur laquelle nous ferons trois remarques.

Premièrement, l'enjeu central était de faire d'un texte fragile le fruit d'un consensus parlementaire. Or la réponse sénatoriale, qui s'est construite en réaction aux initiatives de l'Assemblée nationale et aux compromis négociés avec le Gouvernement, nous éloigne, hélas ! d'un point d'équilibre qu'il faudra pourtant atteindre pour doter le pays d'un budget.

La logique même sur laquelle repose cette version sénatoriale, qui est de renoncer à plusieurs milliards d'euros de recettes en pariant sur la maîtrise de la dépense publique, ne nous paraissait initialement ni solide, ni souhaitable, ni soutenable. D'ailleurs, cela se vérifie : la trajectoire d'un retour à l'équilibre n'est pas tenue dans ce texte. Au contraire, celui-ci dégrade sévèrement les finances du pays.

Au fond, la question des recettes se posait sous la forme d'un triangle, entre ressources suffisantes, justice fiscale et acceptabilité économique. Or nous avons échoué à en trouver le centre de gravité ; les négociations entre les deux chambres ne manqueront pas d'achopper sur ce désaccord.

Deuxièmement, notre économie est malade et nous ne sommes pas lucides sur la situation. L'exercice budgétaire commande donc de tendre tous les ressorts permettant d'activer le redressement productif du pays, de privilégier les investissements publics au fonctionnement bureaucratique, de miser sur la recherche et l'innovation, de soutenir les filières industrielle, agricole et artisanale, qui font vivre les territoires et produisent des richesses, au moyen de nos politiques d'aménagement, d'emploi, de formation, de commerce extérieur, ou encore d'énergie.

La suppression d'un milliard d'euros de crédits d'investissement stratégique alloués au plan France 2030, quoi que l'on en dise, témoigne de l'absence de vision qui sous-tend la logique comptable.

La dette remplace, chaque année, ce que notre économie ne produit plus. De fait, elle finance l'effondrement de la production française, alors que le véritable problème est le déficit commercial. Cependant, au lieu de s'y attaquer, on incrimine la dépense publique ou le modèle social.

Le redressement de notre économie passera également et nécessairement par une solution au problème du logement, qui, à lui seul, agrège les défis de la relance économique, de la révolution écologique et de la cohésion sociale. Or on y apporte une réponse timide, alors qu'il aurait fallu oser un choc puissant.

Troisièmement, cet exercice budgétaire reposait sur une contradiction majeure : comment concilier des priorités stratégiques fortes avec la nécessité de maîtriser le déficit public ?

En effet, l'autonomie stratégique de la France ne peut attendre une hypothétique embellie budgétaire. Ainsi, Jean-Pierre Chevènement, sur nos travées, disait déjà en 2009 : « nous nous sommes résignés à confier aux États-Unis le soin d'exercer la défense non pas de la France, mais de l'Europe. […] Or il se pourrait bien que les États-Unis […] se désintéressent un jour de l'Europe. […] La France risque d'être isolée en Europe par la conjonction du réalisme américain et du pacifisme européen. » Nous y sommes !

Or l'autonomie stratégique, chère à mon groupe, comprend le soft power que nous tirons de nos partenariats internationaux. Quelle erreur – quelle erreur ! – de se laisser tenter par le repli, alors que notre place devrait être à l'avant-garde de la recomposition du cadre multilatéral, que les puissances illibérales font voler en éclats.

En outre, notre autonomie stratégique s'appuie sur nos outre-mer, qui composent l'ADN de mon groupe. L'effort d'investissement en leur direction nous paraît donc indispensable.

Voilà l'essentiel de ce que nous retenons de cette copie budgétaire. Nous aurions pu, certes, relever certaines avancées, notamment la réduction de l'effort demandé aux collectivités. Mais on n'en attendait pas moins du Sénat, lequel demeure, fort heureusement et fidèlement, la chambre des territoires.

Ce texte a sans doute le mérite d'exister, mais il s'agit d'un budget de repli, qui aggrave le déficit public, ne répond pas au décrochage économique et technologique de la France et affaiblit la voix du pays à l'international.

La logique serait de s'y opposer, mais, par esprit de responsabilité, nous nous abstiendrons majoritairement, en attendant les apports issus de la CMP. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Marc Laménie applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Canévet. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, qu'ont voulu faire les membres du groupe Union Centriste, lors de l'examen de ce projet de loi de finances ?

M. Rachid Temal. Couper des missions !

M. Michel Canévet. Nous avons voulu, tout d'abord, tenir une trajectoire crédible des finances publiques et favoriser le développement économique, donc la création d'emplois et de richesses ; prendre des mesures de justice fiscale, ensuite ; tenir compte de la situation des collectivités territoriales, enfin, auxquelles nous sommes particulièrement attachés.

Premièrement, nous devons respecter nos engagements européens s'agissant de la trajectoire de nos comptes publics. C'est une question de crédibilité à l'égard de l'ensemble de nos partenaires. Nous avons beaucoup d'efforts à faire de ce point de vue.

Pour les membres du groupe Union Centriste, pour atteindre cet objectif, il faut de la croissance, car c'est elle qui permet d'accroître les recettes de notre pays. Il faut également – disons-le clairement – baisser les dépenses publiques, comme le réclament nos concitoyens, et mettre fin à celles qui ne sont pas exemplaires. Par conséquent, nous regrettons que les décisions prises lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale aient singulièrement dégradé le déficit public.

Il faut ensuite favoriser le développement économique. C'est tout simplement indispensable si l'on veut que notre pays aille mieux et que des emplois soient créés. Comme vous le savez, nos entreprises réclament de la stabilité fiscale, sans laquelle elles hésitent à investir dans notre pays. Or nous avons vraiment besoin de ces investissements.

La semaine dernière, le quotidien Les Échos faisait état du niveau record des prélèvements publics dans les pays de l'OCDE. Selon vous, qui détient la palme de la fiscalité en Europe ? À la première place, on trouve le Danemark, la France occupant la deuxième place. Ainsi, notre pays fait partie de ceux qui ponctionnent le plus les entreprises, mais aussi les particuliers. Il nous faut donc mieux maîtriser nos dépenses publiques, de façon à éviter des prélèvements obligatoires supplémentaires.

Je sais que certains souhaitent une hausse des prélèvements, mais nous voyons les choses différemment. Il nous semble au contraire nécessaire de continuer à réduire les charges de nos entreprises. Il y va de leur compétitivité à l'échelon international. Nous le voyons bien, la balance commerciale de notre pays est dégradée depuis un certain temps déjà. Il faut donc que les entreprises retrouvent des marges de manœuvre.

Deuxièmement, il faut prendre des mesures de justice fiscale. Plusieurs textes visant à en instaurer ont été examinés avant le projet de loi de finances. Notre collègue Nathalie Goulet a formulé de nombreuses propositions sur ce sujet, dont elle est la spécialiste au sein du groupe Union Centriste.

Nous sommes convaincus que, grâce notamment au contrôle fiscal, des recettes supplémentaires peuvent être engrangées pour l'État. Il est absolument nécessaire de lutter contre ceux qui ne paient pas d'impôts.

Nous avons également soutenu la taxation des petits colis, car nous voyons qu'ils sont utilisés pour contourner la TVA. Il est nécessaire de remédier à cette situation.

Notre groupe est également ambitieux en matière de lutte contre l'évitement fiscal. Il est important, notamment, de resserrer le cadre du pacte Dutreil, du plan d'épargne retraite (PER) et du régime de la possession. Toutes ces mesures, qui s'ajoutent à la taxe sur les holdings, dans sa version issue de l'Assemblée nationale, contribuent à lutter contre ces stratégies d'évitement.

Par ailleurs, nous partageons la proposition, initialement formulée par M. le président du Sénat, de ramener à 2 milliards d'euros l'effort demandé aux collectivités territoriales. Il est, certes, légitime qu'elles participent à l'effort de réduction des déficits publics, mais elles doivent le faire de façon mesurée, ce que prévoit la rédaction du Sénat.

Le groupe Union Centriste a formulé de nombreuses propositions sur le volet dépenses du projet de loi de finances. Par exemple, notre collègue Michel Laugier a souhaité renforcer le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER) ; Dominique Vérien a agi pour conforter le soutien en direction des femmes isolées, au moyen de « l'aller-vers » ; Pierre-Antoine Levi a proposé de maintenir l'aide à l'apprentissage dans les entreprises de moins de cinquante salariés ; Sonia de La Provôté a entendu soutenir les registres locaux des cancers du réseau Francim ; Franck Dhersin a suggéré de compenser, pour les universités, le relèvement du taux des cotisations dues par les employeurs ; Annick Billon a demandé d'accroître l'offre de services civiques ; ...

M. Rachid Temal. Nous sommes aux César ! À chacun son prix.

M. Michel Canévet. Olivia Richard nous a invités à former les agents consulaires à l'étranger sur le sujet des violences envers les femmes ; Jean-Michel Arnaud a souhaité anticiper les études techniques nécessaires pour que les Jeux olympiques de 2030 soient un grand succès ; enfin, Amel Gacquerre, quant à elle, a soutenu le régime du bailleur privé.

J'insiste sur ce point, mes chers collègues, parce que la question du logement est très importante. Il convient d'apporter des réponses crédibles aux problèmes de logement dans notre pays. À cet égard, la proposition de notre collègue Amel Gacquerre va dans le bon sens et permettra de relancer l'activité de ce secteur. Or qui dit relance du logement, madame, monsieur les ministres, dit aussi rentrées de TVA, ce qui est crucial pour les recettes de l'État.

Les membres du groupe Union Centriste, dans leur grande majorité, voteront le projet de loi de finances dans sa version issue du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP.)

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme Vanina Paoli-Gagin. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, lors de la discussion générale sur le projet de budget que nous nous apprêtons à voter, mes collègues ont présenté la position du groupe Les Indépendants – République et Territoires. Celle-ci procède d'un constat sans cesse renouvelé, qui s'est mué, malheureusement, en évidence : la France est asphyxiée par les impôts, les taxes, les cotisations et les redevances.

M. Rachid Temal. C'est cela, la Macronie !

Mme Vanina Paoli-Gagin. Trop longtemps, une partie de cet hémicycle a expliqué aux contribuables qu'on ne pouvait atteindre le bonheur que par la fiscalité. Chaque augmentation devait nous permettre de nous approcher un peu plus du Valhalla des services publics.

La conséquence, nous la connaissons : nous sommes champions de l'OCDE en matière de prélèvements obligatoires, vice-champions en matière de dépenses publiques.

Pour autant, la promesse de Valhalla des services publics n'était qu'un mirage. Hormis quelques secteurs où nous excellons, nous sommes en retard dans de nombreux domaines.

Notre argent est donc trop prélevé et souvent mal dépensé depuis des décennies. Il l'est d'autant plus que s'ajoute à ce taux d'imposition trop élevé un important déficit structurel. Pour financer ce dernier, nous nous endettons chaque année davantage sur le dos des générations à venir, afin de satisfaire les caprices de certaines formations politiques. Je pense notamment à la suspension de la réforme des retraites.

Augmenter les impôts ne sert plus à rien.

M. Rachid Temal. Même pour les plus riches ?

Mme Vanina Paoli-Gagin. Nous avons épuisé la poule aux œufs d'or, dans une sorte d'incantation magique, en attendant qu'elle ponde des œufs d'autruche, ce dont elle paraît incapable. (M. Rachid Temal s'exclame.)

M. Emmanuel Capus. Excellent !

Mme Vanina Paoli-Gagin. Désormais, chaque augmentation d'impôt est suivie d'une baisse de nos recettes fiscales. Or les deux seuls moyens d'augmenter les recettes publiques sont la croissance de l'activité économique et la baisse de la fiscalité.

Dans le grand bain de la compétition économique mondiale, nos chefs d'entreprise sont contraints de nager avec des chaussures de ski, tant ils sont imposés. Ceux qui appellent à les matraquer fiscalement davantage estiment que nos entrepreneurs devraient nager avec les skis aux pieds, en plus des chaussures. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Patricia Schillinger applaudit également.)

Nous devons aux Français la vérité : seule la baisse des dépenses publiques nous permettra d'éviter le pire, c'est-à-dire une crise budgétaire. L'écrasante majorité des Français l'ont d'ailleurs bien compris : ils préfèrent une baisse des dépenses publiques à une nouvelle augmentation des impôts.

Pour baisser nos dépenses, il faut recentrer l'État sur ses missions régaliennes.

M. Emmanuel Capus et Mme Sophie Primas. Très bien !

Mme Vanina Paoli-Gagin. Il faut aussi le recentrer sur la préparation du futur. Je pense aux dépenses d'enseignement, de recherche ou de décarbonation, financées notamment par le plan France 2030.

À cet égard, je regrette vivement le vote de la majorité sénatoriale, qui a grandement compromis notre capacité à penser le temps long et à soutenir nos entreprises de haute technologie, et donc notre industrie de demain. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Dans un contexte de fort décrochage européen, ce coup de rabot ne va vraiment pas dans le sens de l'histoire.

Mme Frédérique Puissat. C'est le cas chaque année !