B. LE SANS-DOMICILISME DES ENFANTS : UN MAL EN DÉVELOPPEMENT

Depuis la crise sanitaire, les associations constatent une augmentation du nombre d'enfants sans domicile. Entre 2020 et 2025, le nombre d'enfants en situation de demande non pourvue (DNP) est passé de 927 à 2 159, soit une augmentation de 132,9 %, sans compter le non recours. Parmi eux, on dénombre respectivement 368 et 503 enfants de moins de trois ans. La part des familles avec enfant(s) dans le public hébergé est également en hausse, passant de 22 % à 35 % entre 2013 et 2021. En 2025, 70 000 enfants sont hébergés et 22 000 mineurs bénéficient de l'intermédiation locative.

Le sans-domicilisme exerce des effets délétères sur la santé physique et mentale des mineurs, en lien direct avec leur environnement et souvent en corrélation avec l'état de santé de leurs parents. En 2013, 19,2 % des enfants hébergés étaient suspectés de présenter des troubles de santé mentale, contre seulement 8 % dans la population générale. Parmi les enfants sans domicile de moins de six ans, 80,9 % présentent un retard de développement cognitif. Ces écarts s'accentuent avec l'âge : plus l'enfant est âgé et a passé de temps dans la rue, plus son développement est affecté. Plusieurs facteurs aggravants ont été identifiés (niveau d'éducation des parents, carences alimentaires, accès aux soins, faible poids à la naissance).

Stade de développement cognitif des enfants hébergés de moins de six ans en 2013 sur l'échelle VABSS II

Source : Commission des affaires sociales, d'après Bruno Falissard et al., « Adaptive Behavior of Sheltered Homeless Children in the French ENFAMS Survey », American Journal of Public Health, 2018

Pour les enfants sans domicile, l'école constitue à la fois le principal lieu de sociabilisation et un véritable point d'ancrage. Elle leur garantit plusieurs conditions essentielles à la vie en société : l'accès à une alimentation équilibrée, la constitution d'un cercle d'amis et la participation à des activités extrascolaires. Cependant, ces enfants rencontrent de nombreux obstacles qui fragilisent leur parcours scolaire. L'instabilité résidentielle les contraint souvent à changer d'établissement ou à supporter des trajets longs : en 2013, 10,2 % des enfants hébergés âgés de six à douze ans étaient déscolarisés, en grande partie à cause de cette instabilité. Pour ceux qui poursuivent leur scolarité, les conditions d'hébergement, souvent exiguës, compliquent le travail à domicile et réduisent le soutien parental. Les temps de trajet prolongés affectent également le sommeil : 18,2 % des enfants de 8 à 12 ans effectuent plus d'une heure et demie de trajet pour se rendre à l'école, et 25 % dorment moins de neuf heures, contre 3,5 % des enfants du même âge scolarisés dans leur commune. Ces difficultés se traduisent par un redoublement fréquent : 16,4 % des enfants hébergés ont redoublé, proportion qui atteint 25 % pour les plus de huit ans.

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