B. LE SUCCÈS DU DÉPLOIEMENT DU LOGEMENT ADAPTÉ
Les plans « Logement d'abord » ont mis un terme à la logique « en escaliers » de l'accès au logement, fondée sur l'idée que l'on pouvait prédire si une personne serait capable de gérer un logement. Ils ont fait de l'insertion par le logement un axe prioritaire de l'accompagnement vers la sortie de la rue, en déployant des dispositifs innovants ayant eu des résultats probants.
L'intermédiation locative est un des dispositifs phares du logement adapté. Elle repose sur un mécanisme simple : un logement est loué par un propriétaire à un tiers social agréé par la préfecture, qui devient locataire et garantit le paiement des loyers. Ce tiers sous-loue le logement à un ménage en situation de précarité, pour une durée maximale de 18 mois avec un loyer plafonné. Depuis 2018, le dispositif connaît une croissance soutenue : le nombre de places a augmenté de 118 % entre 2018 et 2022, et une progression supplémentaire de 40 % est attendue sur la période 2023-2027. En dépit d'une tension accrue sur le parc privé et de l'interdiction de location des passoires thermiques, les créations annuelles de places dépassent les objectifs fixés. En juin 2025, près de 90 000 places sont ainsi gérées par les organismes gestionnaires, logeant entre autres 22 000 mineurs. Il convient de noter que les logements captés en renouvellement du stock ne sont pas comptabilisés dans les nouvelles places : les objectifs du plan « Logement d'abord » ne prennent en compte que les créations nettes, tandis que le maintien du parc repose sur une enveloppe socle dédiée. Le coût annuel d'une place, estimé à 2 375 euros, inclut notamment des dépenses liées à l'accompagnement social.
Les pensions de famille et les résidences accueil constituent le fer de lance pour la réinsertion des personnes sans domicile parmi les plus éloignées du logement, souvent marquées par des passages longs et répétés à la rue ou en hébergement. Destinées à des personnes capables de vivre de manière autonome tout en partageant une vie collective, ces structures proposent un habitat mixte associant espaces privatifs et espaces communs, moyennant une redevance mensuelle. Elles offrent un accompagnement social et médical renforcé, assuré notamment par la présence quotidienne d'un hôte. Les résidents disposent d'un bail mensuel tacitement reconductible, sans limitation de durée, offrant ainsi un véritable chez-soi pérenne. Malgré une volonté forte de l'État de développer ces structures, la création de nouvelles places peine à atteindre les objectifs affichés. Entre janvier 2023 et juin 2025, seules 3 058 places ont été ouvertes, soit 60 % de la cible. En juin 2025, le parc compte environ 25 700 places, réparties dans près de 1 050 pensions de famille ou résidences accueil. Les réticences des collectivités territoriales sont parmi les principaux freins au développement de ces structures. Les associations soulignent par ailleurs le caractère fragile du modèle économique, avec un tarif journalier d'environ 19 euros, jugé insuffisant. En sus, des barrières administratives ralentissent le développement de ces projets. Le rapporteur insiste sur la nécessité d'accompagner la montée en puissance de ce dispositif.
Le dernier pilier de la réinsertion par le logement est l'attribution de logements sociaux aux personnes sans domicile. Depuis 2018, 195 000 logements sociaux ont été attribués, profitant à 380 000 personnes sans domicile dont 150 000 enfants. L'attribution d'un logement social est le vecteur d'une sortie pérenne du sans-domicilisme. En 2025, la part de logements sociaux attribuée à des personnes sans domicile devrait atteindre 8 % des attributions totales contre 3,9 % en 2017, soit une hausse de 105 %. En valeur absolue, cette augmentation est de 56 % entre 2017 et 2024 en raison de la faible rotation du parc social et de la baisse du nombre d'attributions totales de logements sociaux. Seule une relance de la construction de logements pourrait améliorer la situation.
Évolution de l'attribution de logements sociaux entre 2017 et 2024
Source : Commission des affaires sociales, d'après la Dihal et l'Ancols
