TROISIÈME PARTIE
SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE
ET TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

I. LE COÛT DES COMPENSATIONS DE L'ÉTAT AUX PRODUCTEURS D'ÉLECTRICITÉ RENOUVELABLE AUGMENTE FORTEMENT

Les charges de service public de l'énergie (CSPE) correspondent aux compensations financières des obligations de service public assignées aux entreprises du secteur de l'électricité et du gaz par le code de l'énergie. La Commission de régulation de l'énergie (CRE) a pour mission d'évaluer chaque année le montant de ces charges. Jusqu'en 2024, ces compensations étaient intégralement financées par des crédits budgétaires inscrits sur le programme 345 « Service public de l'énergie ».

À compter du 1er août 2025, l'article 20 de la loi de finances pour 202553(*) a procédé à une réforme du modèle de financement des CSPE relatives au dispositif de péréquation des tarifs de l'électricité bénéficiant aux zones non interconnectées (ZNI). Depuis cette date, ces charges, à l'exception de celles constatées dans les iles de Saint-Martin et Saint-Barthélémy, ne sont plus financées par des crédits budgétaires du programme 345 mais par l'affectation d'une fraction du produit de l'accise sur les énergies appliquée aux consommations de combustibles de chauffage et d'électricité. Dans le prolongement de cette réforme et selon la même logique, l'article 42 du présent projet de loi de finances prévoit qu'à compter du 1er mai 2026, les CSPE relatives au soutien à l'injection de biométhane ainsi qu'à la cogénération soient financées par l'affectation d'une fraction du produit de l'accise sur les énergies appliquée aux consommations de carburants.

Il est à signaler qu'au plus fort de la période de crise des prix de l'énergie, du fait de la hausse extrêmement sensible des prix de l'électricité sur les marchés de gros, pour certaines filières, les dispositifs de soutien à la production d'électricité à base d'énergies renouvelables ont généré des recettes exceptionnelles au profit de l'État en raison des primes négatives dues par les producteurs. Ces recettes exceptionnelles ont représenté un total de 5,5 milliards d'euros54(*). À partir de 2024, en raison de la baisse rapide des prix de l'électricité sur les marchés de gros, les CSPE sont redevenues des dépenses significatives pour l'État55(*).

Le rapporteur constate cependant qu'une part très significative de ces recettes, environ 2,5 milliards d'euros, a été perçue sur la base d'une disposition législative qui a été déclarée contraire à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2024-1119/1125 QPC du 24 janvier 202556(*). Ces recettes sont ainsi suspendues aux dispositions prévues par l'article 69 du présent projet de loi qui proposent d'instituer un dispositif de plafonnement partiel des primes négatives de certains des contrats prévus par ces dispositifs de soutien public. Une disposition semblable, prévue par l'article 38 de la première loi de finances rectificative pour 202257(*), avait été elle-même été déclarée contraire à la constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2023 1065 QPC du 26 octobre 2023. Le Conseil constitutionnel avait alors sanctionné une incompétence négative du législateur. Des ajustements apportés aux dispositions concernées par l'article 69 du présent projet de loi entendent apporter une réponse au motif d'inconstitutionnalité soulevé en 2023 par le Conseil constitutionnel. Le commentaire détaillé de cet article 69 est présenté infra.

A. EN 2025, LE COÛT POUR L'ÉTAT DES CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE DEVRAIT S'ÉTABLIR À 11,6 MILLIARDS D'EUROS

Dans sa délibération du 10 juillet 202558(*), la CRE a réévalué le total des CSPE pour 2025 à 11,6 milliards d'euros, soit une hausse de 4,4 milliards d'euros (+ 61 %).

Évaluation par la CRE des compensations de charges de service public
de l'énergie au titre de l'année 2025

(en millions d'euros)

ZNI : zones non interconnectées.

Source : commission des finances du Sénat, d'après la délibération n° 2025-180 de la CRE du 10 juillet 2025

Si globalement l'ensemble des catégories de charges59(*) ont contribué à la hausse constatée en 2025, de par leur poids dans l'ensemble constitué par les CSPE, les dispositifs de soutien à la production d'électricité renouvelable en métropole expliquent l'essentiel de l'évolution. Le coût de ces derniers a en effet augmenté de 3,3 milliards d'euros (+ 114 %) entre 2024 et 2025. En 2025, l'ensemble des filières de production, y compris l'éolien terrestre, sont redevenues des charges nettes pour l'État.

Évaluation par la CRE des compensations de charges de service public
de l'énergie résultant des dispositifs de soutien à la production d'électricité
renouvelable en métropole au titre de l'année 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après la délibération n° 2025-180 de la CRE du 10 juillet 2025


* 53 Loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025.

* 54 Délibération n° 2025-180 de la Commission de régulation de l'énergie du 10 juillet 2025 relative à l'évaluation des charges de service public de l'énergie à compenser en 2026 et à la réévaluation des charges de service public de l'énergie à compenser en 2025.

* 55 Seule la filière de l'éolien terrestre a encore généré cette année-là des recettes pour l'État à hauteur de 69 millions d'euros.

* 56 Avec un effet différé au 31 décembre 2025.

* 57 Loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

* 58 Délibération n° 2025-180 de la CRE du 10 juillet 2025.

* 59 À l'exception des charges relatives aux effacements de consommation.

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