C. LA PLATEFORME NATIONALE DES INTERCEPTIONS JUDICIAIRES : UNE SOURCE D'ÉCONOMIES POUR LE BUDGET DE LA JUSTICE
Les interceptions judiciaires correspondent à plusieurs catégories de prestations :
- les réquisitions de données : l'enquêteur demande par exemple le détail des appels entrants et sortants sur une ligne ou l'identification de l'utilisateur à partir de son numéro d'appel ;
- les interceptions proprement dites, comme l'enregistrement vocal d'un appel entre deux appareils ;
- les géolocalisations : il s'agit de connaître, en temps réel, la position géographique d'un téléphone mobile.
Leur coût a été de 81,3 millions d'euros en 2024, soit 11,3 % du coût total des frais de justice (716 millions d'euros).
Alors que ces prestations étaient traditionnellement réalisées par des sociétés privées, sollicitées par les officiers de police judiciaire, la croissance des besoins a suscité à partir de 2005 le développement par l'État d'une plateforme nationale d'interceptions judiciaires (PNIJ), aujourd'hui gérée par l'Agence nationale des techniques d'enquêtes numériques judiciaires (ANTENJ)41(*).
Si le développement a été lent, le rapporteur spécial, qui s'est rendu au siège de l'ANTENJ au mois de septembre dernier, constate que la plateforme a aujourd'hui atteint un point où elle peut satisfaire la plupart des demandes qui lui sont adressées dans le cadre des enquêtes.
L'une des dernières fonctionnalités importantes qui faisaient défaut était la prestation de géolocalisation, fournie depuis quelques années et pour laquelle la PNIJ détient désormais une part de marché proche de 100 %, selon ce qui a été indiqué au rapporteur spécial.
Le développement des techniques d'enquêtes numériques judiciaires et du système d'information les mettant en oeuvre (SITENJ), dont fait partie la PNIJ, bénéficierait en 2026 de 85,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et 50,1 millions d'euros en crédits de paiement.
Ces crédits sont importants, mais le rapporteur spécial considère qu'il s'agit d'un exemple de « dépense qui rapporte de l'argent », car le développement de la plateforme est un investissement qui évite, par la suite, des dépenses annuelles auprès de prestataires externes, sur un marché peu concurrentiel.
Les économies brutes en frais de justice réalisées grâce au déploiement de la PNIJ entre 2010 et 2024 ont été estimées à près de 572 millions d'euros, soit de l'ordre de 200 millions d'euros d'économies nettes si l'on soustrait les coûts de développement et de maintenance de la plateforme42(*). De fait, la dépense en interceptions judiciaires est l'un des rares postes des frais de justice qui tend à diminuer, de 2,0 % par an en moyenne depuis 2017.
Le rapporteur spécial souligne toutefois que l'ANTENJ a la responsabilité, vis-à-vis des magistrats et des officiers de police judiciaire, de poursuivre le développement d'une plateforme à la fois riche en fonctionnalité et d'une ergonomie adaptée aux besoins des utilisateurs, alors que les criminels, eux, ne cessent de gagner en maîtrise des techniques numériques.
* 41 L'ANTENJ n'est pas un opérateur au sens budgétaire, mais un service à compétence nationale du ministère de la justice.
* 42 La maîtrise des frais de justice, rapport d'une mission conjointe Inspection générale des finances - Inspection générale de l'administration - Inspection générale de la justice, mai 2025, publiée le 28 octobre 2025.