B. L'ABERRANTE COMPLEXITÉ DU CHANTIER DE LA PORTABILITÉ DES DROITS DU RÉGIME DE LA RATP DANS LE CADRE DE L'OUVERTURE À LA CONCURRENCE

Le régime de la RATP est fermé depuis le 1er septembre 2023 mais continue de gérer des affiliés qui cotisent selon les règles spécifiques applicables au régime.

La transposition des décalages paramétriques progressifs prévus par la réforme de 2023 en matière d'âge d'ouverture des droits (AOD) et de durée d'assurance requise (DAR) n'a été mise en oeuvre que depuis le 1er janvier 2025 pour ce régime, lui offrant un sursis qui, comme l'a déjà affirmé la rapporteure spéciale l'an dernier, est à la charge de la solidarité nationale.

Cependant, la difficulté la plus grande, remontée lors des auditions menées par la rapporteure spéciale, tient à la mise en oeuvre de la portabilité des droits à la retraite des agents affiliés à la caisse de retraite du personnel de la RATP (CRP RATP) partant travailler dans des entreprises de la concurrence.

Issu des obligations de la loi d'orientation des mobilités (LOM) de 201949(*), l'ouverture à la concurrence des lignes de transports en région parisienne permet à certains agents de quitter la RATP pour des entreprises privées.

Cependant, le « sac à dos social » négocié lors de cette réforme, permet à ces agents de conserver l'intégralité de leurs droits spéciaux, même en n'étant plus employés par la RATP.

Par conséquent, les entreprises qui embaucheront d'anciens agents de la RATP devront composer avec, pour chacune, un niveau de rémunération et un niveau de cotisation qu'il faudra adapter pour s'assurer de la portabilité à l'euro près des droits issus de l'appartenance au régime spécial de la RATP.

Plusieurs difficultés de mise en oeuvre concrètes sont apparues lors des premiers transferts qui ont eu lieu le 1er octobre 2025 : 15 agents ont quitté la RATP pour Île-de-France Mobilités (IDFM) :

- les modalités de calcul des droits à la retraite impliquent de définir une nouvelle assiette et un taux personnalisé pour chacun des agents ;

les informations nécessaires au calcul équivalent à l'euro près à la pension qu'aurait eu un agent RATP s'il était resté dans la maison mère implique de mettre en oeuvre des transferts de données confidentiels, entraînant d'importants coûts informatiques ;

- de même, à partir de janvier 2026, c'est l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) qui sera chargée de recouvrer les cotisations des agents partis à la concurrence et non plus la CRP RATP, entraînant par-là même un nouveau développement de transfert de données coûteux en termes de logiciels ;

- les modalités de gouvernance de la CRP RATP doivent aussi être revues dans la mesure où des représentants du personnel de chacune des entreprises dans lesquelles des anciens agents de la RATP affiliés au régime devront siéger.

Ces difficultés, déjà prévisibles en amont, ont été constatées avec le départ de seulement 15 agents. Alors que jusqu'à fin 2026, plus de 15 000 agents de la RATP devraient partir vers la concurrence, la rapporteure spéciale questionne le choix qui a été fait de maintenir une portabilité absolue des droits de la RATP vers les entreprises de la concurrence.

La complexité de gestion remontée lors des auditions apparaît disproportionnée et risque d'aller croissante dans les années qui viennent.


* 49 Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités.

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