C. UNE LÉGISLATION FRANÇAISE COMPLÉMENTAIRE
1. Une limitation de l'accès des jeunes aux sites inappropriés
La loi n° 2022-300 du mercredi 2 mars 2022 visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d'accès à internet oblige les fabricants d'appareils connectés à installer un dispositif de contrôle parental et à proposer son activation lors de la première mise en service.
En outre, le Parlement a adopté la loi du 7 juillet 2023 visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne, dite « loi Marcangeli », imposant notamment la vérification systématique de l'âge de l'utilisateur et le recueil du consentement parental pour les moins de 15 ans.
Toutefois, la France ayant notifié le projet de loi à la Commission européenne, l'exécutif européen a considéré que le texte imposait des obligations techniques susceptibles d'affecter le marché intérieur et plaidé pour une solution harmonisée au niveau communautaire. Le décret fixant la date d'entrée en vigueur de la loi n'a donc jamais été pris.
Enfin, la loi « Sécuriser et réguler l'espace numérique » (2024) a imposé aux plateformes et aux sites qui diffusent des contenus pornographiques en ligne l'obligation d'instaurer un système de vérification de l'âge de leurs utilisateurs afin de s'assurer que les mineurs n'y aient pas accès, sous le contrôle de l'Arcom, qui peut ordonner le blocage de ces sites par les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) s'ils ne mettent pas en place un tel dispositif de vérification d'âge.
La loi inclut également des dispositions visant à renforcer les actions de prévention du harcèlement dans les établissements scolaires, et des éléments de sensibilisation dans la formation initiale et continue de leurs personnels.
La question complexe de la fixation d'un âge minimal d'accès aux réseaux sociaux
Outre les distorsions de marché, la deuxième difficulté identifiée par la Commission européenne relativement à la loi « Marcangeli » tenait au fait qu'aucune technologie de vérification d'âge n'était alors suffisamment fiable, interopérable au niveau européen et pleinement conforme au RGPD.
Cette opposition de la Commission européenne a toutefois évolué à partir de l'été 2025, sous l'effet de deux facteurs :
- en juin 2025, la Commission a publié des lignes directrices détaillées sur l'application de l'article 28 du DSA relatif à la protection des enfants. Pour la première fois, l'UE a clarifié ce qu'elle attendait des plateformes en matière de réduction des risques pour les mineurs, ouvrant la voie à des mesures nationales plus strictes, dès lors qu'elles restaient proportionnées ;
- un second facteur important a été la présentation, en juillet 2025, d'un prototype européen de vérification d'âge, développé dans un consortium associant la Commission et plusieurs États pilotes (France, Danemark, Italie, Grèce, Espagne). Ce prototype répond à des exigences longtemps considérées incompatibles : fiabilité ; minimisation des données ; interopérabilité. Les travaux s'appuient sur les recherches du « European Digital Identity Wallet ».
Malgré ces avancées, la fixation d'un âge minimal pour l'accès aux réseaux sociaux au niveau national reste juridiquement complexe, notamment en raison de l'application du principe du pays d'origine, les plateformes numériques concernées se trouvant en général à l'étranger. Dès lors, la piste d'une interdiction qui ne serait pas appliquée à la plateforme elle-même serait actuellement étudiée.
Certains pays ont pris des initiatives dans ce domaine : l'Australie et, au sein de l'UE, le Danemark, ont annoncé aller vers une interdiction de l'accès aux réseaux sociaux aux moins de 15 ans.
Le Sénat, à travers la résolution européenne du 8 août 2025, s'est également exprimé en faveur de l'instauration, au niveau européen ou, à défaut, de chaque État membre, d'une majorité numérique pour l'accès aux réseaux sociaux
2. L'interdiction des portables à l'école et au collège
La loi n° 2018-698 du 3 août 2018, qui modifie l'article L. 511-5 du code de l'éducation, prévoit que l'utilisation des téléphones portables et de tout autre équipement terminal de communications électroniques est interdite aux élèves dans les écoles maternelles, les écoles primaires et les collèges, ainsi que lors des activités se déroulant à l'extérieur de l'établissement (sorties scolaires, voyages, etc.) liées à l'enseignement.
Le règlement intérieur de l'établissement doit préciser les modalités de mise en oeuvre de cette interdiction, notamment les exceptions et les sanctions ainsi que la confiscation de l'appareil en cas de non-respect de l'interdiction d'utilisation. Cette interdiction peut être levée dans certains cas, pour un motif de santé ou de handicap, ainsi que pour une utilisation par l'enseignant à des fins pédagogiques ou dans des circonstances spécifiquement définies par le règlement intérieur de l'établissement.
Par ailleurs, à la rentrée de septembre 2025, le gouvernement a annoncé la généralisation progressive du dispositif « Portable en pause » (ou « pause numérique ») dans l'ensemble des collèges, visant à s'assurer que les téléphones sont neutralisés (éteints et rangés dans des dispositifs comme des pochettes ou des casiers) pendant le temps scolaire. Toutefois, la mise en oeuvre effective de cette action dépend en réalité des conseils départementaux, compétents pour l'achat des équipements nécessaires. Départements de France souligne qu'un accord a été trouvé avec le ministère de l'éducation nationale reposant sur trois points : aucune obligation de financement pour les départements, nécessité d'une demande du chef d'établissement, pas de généralisation totale à l'ensemble des établissements. Environ 200 à 250 collèges publics sur les 5 200 ont équipé leurs élèves de pochettes individuelles « anti-ondes ».