3. Une forte mobilisation après le tsunami de Sumatra

Suite au tsunami qui a dévasté l'océan Indien le 26 décembre 2004, la France a pris plusieurs initiatives pour protéger ses côtes d'un éventuel tsunami.

a) La création de la Délégation interministérielle post-tsunami

Le tsunami de Sumatra a suscité une mobilisation importante en France, aussi bien au niveau de la population et des organisations non gouvernementales (312 millions d'euros ont été récoltés sous forme de dons) que des autorités publiques (ministères et collectivités territoriales).

Une structure interministérielle a été mise en place dès la mi-janvier 2005 pour la phase de réhabilitation et de reconstruction : la Délégation interministérielle post tsunami (DIPT), devenue à partir de juillet 2005, la coordination post tsunami (CPT). S'appuyant sur le ministère des affaires étrangères, la DIPT a assuré la coordination des initiatives interministérielles, la coordination avec les collectivités locales et les ONG, ainsi que l'attribution des fonds publics aux différents projets de reconstruction.

Le rôle de la Délégation interministérielle post-tsunami (DIPT)

Créée le 19 janvier 2005 pour coordonner les actions de la France, cette institution fait suite à d'autres tentatives institutionnelles type « Mission Fauroux » pour les Balkans. Physiquement logée au sein des locaux du ministère des affaires étrangères, la Délégation interministérielle était une structure interministérielle directement reliée au Premier ministre. Le dispositif mobilisé pour créer la DIPT a eu un poids politique important et une efficacité réelle. Elle a fonctionné avec une équipe comportant à la fois des diplomates et des représentants des divers ministères concernés autour d'une architecture fortement soutenue par la DGCID (direction générale de la coopération internationale et du développement). Les procédures de consultations interministérielles se sont très vite mises en place afin d'assurer la qualité des avis et la transparence des processus.

L'information sur la mise en place de la DIPT et du système « guichet unique » a été diffusée rapidement à travers le système de réunions interministérielles régulières autour du secrétaire d'Etat aux affaires étrangères.

Trois concepts importants ont présidé au fonctionnement stratégique de la DIPT :

- les budgets sont alloués sur une année budgétaire ; c'est le concept du «one shot » ;

- les budgets doivent être dépensés rapidement pour avoir un effet visible et important pour les populations pendant que les lourdes mécaniques bilatérales et multilatérales sont encore an cours de mobilisation ;

- les budgets alloués doivent avoir un effet levier en permettant d'accéder à d'autres financements (européens, onusiens).

L'étape de décision sur les projets à retenir a fortement bénéficié tant en rapidité qu'en qualité de la mise en place de cette dynamique interministérielle assez innovante.

Une série de critères arbitrés de façon interministérielle a été retenue après les premières missions interministérielles :

- les critères géographiques qui ont mis l'accent sur l'Indonésie et le Sri Lanka, mais sans exclusivité (des programmes ont aussi été financés en Inde et aux Maldives) ;

- Les critères thématiques : les thématiques d'intervention initiales (enfance et éducation, santé, eau et assainissement, prévention des risques et gestion des crises) ont aussi été revues avec un accent mis sur les aspects de relance économique.

Six types d'acteurs ont été mobilisés :

- les ONG françaises avec lesquelles des réunions de coordination ont eu lieu en moyenne toutes les trois semaines ainsi qu'avant et après chaque mission de terrain ;

- les institutions françaises de recherche ou de santé ;

- des structures publiques nationales et locales des pays touchés ;

- les ONG locales (via des processus d'appels à proposition pour des micro-projets en Indonésie et Sri Lanka) ;

- les Nations Unies, notamment les agences d'urgence de l'ONU ;

- le Comité International de la Croix Rouge dans la phase d'extrême urgence.

Chaque institution qui souhaitait proposer un projet a pu le faire via cinq « portes d'entrée » à savoir la délégation à l'action humanitaire du ministère des affaires étrangères, la direction générale de la coopération internationale et du développement, les ministères impliqués, les ambassades sur place et la DIPT. Les projets ont systématiquement été remontés à la DIPT puis redistribués pour évaluation (avis à rendre sous 8 jours) aux personnes compétentes sur le sujet concerné. Ce système à flux tendu a permis de ne pas perdre de temps sur l'allocation des ressources. Sur un total de 200 propositions de projets, près d'une centaine ont été retenues par la DIPT. Le délai d'analyse et de révision éventuelle des projets a duré de trois à quatre semaines. Les ONG rencontrées semblent ensuite avoir attendu entre un et quatre mois avant de recevoir les fonds, ce qui est assez rapide.

Pour ce qui est du suivi des programmes, la DIPT s'est appuyée principalement sur les services de coopération et d'action culturelle (SCAC) des ambassades dans les pays concernés. Ce suivi s'est opéré sous différentes formes :

- un suivi quotidien à travers les SCAC. Ces derniers ont eu à travailler dans les conditions difficiles en terme de personnel disponible et de logistique ;

- des échanges réguliers avec la fondation de France et les acteurs internationaux tels que les Nations Unies , qui font leur propre suivi ;

- des missions de la DIPT sur le terrain afin de mieux comprendre les problèmes, les réalités du terrain.....

La DIPT a été dissoute en juillet et remplacée par la Coordination post-tsunami (CPT), instance ad hoc qui a elle-même disparu à la fin de l'année 2005. Le suivi des dossiers post-tsunami est alors revenu aux services de coopération et d'action culturelle et à la coopération internationale.

Source : direction générale de la coopération internationale et du développement

En outre, la DIPT a permis de définir et de financer la contribution française au système d'alerte en construction dans l'océan Indien. Après les réunions de la commission océanographique internationale sur la définition d'un système d'alerte dans l'océan Indien à Paris en mars 2005 et à l'île Maurice en avril 2005, l'architecture dudit système avait été arrêté sous la forme d'un réseau coordonné de centres nationaux et la France s'était engagée à créer un centre à la Réunion.

Sous l'impulsion de la DIPT, plusieurs rencontres ont été organisées entre les partenaires de ce projet 51 ( * ) afin de définir les actions à réaliser et le montant des crédits nécessaires. Le projet initial arrêté était ambitieux puisqu'il prévoyait la mise en place d'un centre d'alerte national à vocation multirisque (tsunami, cyclone, vague atypique) capable de gérer les alertes aux tsunamis locaux et lointains.

Dans ce cadre, 1,59 million d'euros avait été attribué pour financer les priorités suivantes :

- l'équipement du centre de Météo France à La Réunion pour le rendre opérationnel dans le cadre de l'alerte aux tsunamis lointains (20.000 euros). Météo France est le seul organisme français dans cette région disposant d'une permanence 24h sur 24, 7 jours sur 7, il a donc été désigné comme point focal : il reçoit les messages du PTWC et de JMA et alerte le cas échéant l'Etat major de zone et de protection civile de l'océan Indien et le sous-préfet de permanence. Dans le projet initial, le centre Météo France avait vocation à générer ses propres alertes au tsunami à travers l'installation d'un système TREMORS et une étroite collaboration avec l'IPGP qui aurait analysé les données sismiques et aurait fourni une expertise scientifique ;

- la mise à niveau des stations sismologiques du réseau GEOSCOPE et la transmission des données en temps réel à Djibouti, Canberra, Hyberabad, La Réunion, Kerguelen, Dumont d'Urville et sur l'île d'Amsterdam et l'installation d'une nouvelle station à Madagascar (511 000 euros) ;

- la mise à niveau des marégraphes français à La Réunion et dans l'île de Kerguelen ainsi que le déploiement de deux marégraphes neufs à Mayotte et à Madagascar (91.000 euros) ;

- la réalisation par le CEA/DASE d'une étude d'exposition au risque de tsunami pour les régions situées le long des côtes de Madagascar et du Sri Lanka ainsi que pour certains petits états insulaires de la région (50 000 euros) ;

- la réédition de la brochure « Tsunami, les grandes vagues » initialement produite pour le Pacifique, adaptée aux besoins de la région de l'océan Indien (20 000 euros) ;

- l'équipement par Météo France de Madagascar, du Kenya et de la Tanzanie en systèmes météorologiques 52 ( * ) (157 000 euros), l'installation d'une station météorologique à Madagascar (40 000 euros) et la réalisation d'une mission d'expertise au Yémen, en Somalie et à Djibouti pour évaluer les besoins de ces pays en terme de mise à niveau des moyens de télécommunications liés au système mondial de télécommunication (SMT) (40 000 euros).

Ces dernières mesures s'inscrivent dans une approche multirisque. Leur objectif immédiat est d'améliorer les performances des services météorologiques de ces pays en les dotant de systèmes de communication et en systèmes de prévision météorologique. Toutefois, dans la mesure où ces systèmes météorologiques sont connectés au réseau mondial de l'Organisation Météorologique Mondiale désigné pour véhiculer les alertes aux tsunamis, les services météorologiques qui seront équipés desdits systèmes seront capables de recevoir les alertes en temps réel.

De même, la station météorologique installée à Toamasina, capitale provinciale de l'Est de Madagascar régulièrement touchée par les cyclones tropicaux, a également vocation de servir de centre d'alerte aux tsunamis. Ce centre est ainsi équipé d'un système Retim-Transmet-Synergie, d'une station d'observation météorologique et d'un marégraphe.

Par ailleurs, 420 000 euros ont été directement versés au CEA/DASE pour la numérisation des données des stations analogiques indonésiennes, l'installation de 3 systèmes TREMORS adaptés aux stations indonésiennes, la formation du personnel des centres d'alerte régionaux, la mise à niveau d'une station sismique en large bande et la simulation des performances du réseau indonésien.

24 000 euros ont également servi à financer la formation de Thaïlandais aux systèmes d'alerte par le LGD/Pamatai.

Enfin, 50 000 euros ont été attribués au comité français de la COI pour financer des missions d'experts français dans l'océan Indien, des missions de techniciens locaux venant se former à La Réunion ou en métropole ainsi que la participation de scientifiques locaux à des campagnes scientifiques.

* 51 Ont ainsi participé à ce projet Météo France, l'IPGP, l'EOST, le SHOM, la Direction Départementale de l'Equipement de Mayotte, le CNRS/INSU/LEGOS, le CEA/DASE, l'Institut Paul Emile Victor, l'Administration des Terres Australes et Antarctiques Françaises, le Comité national de la COI

* 52 Concrètement, il s'agit du commutateur de message « Transmet », du système de diffusion par satellites de données météorologiques « Retim » et du système de prévision météorologique « Synergie ».

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