B. UN OPÉRATEUR PARTICIPANT À LA MAITRISE DES DÉPENSES PUBLIQUES

En 2015, la dotation du ministère de la santé s'est élevée à 38,8 millions d'euros, celle du ministère de la recherche, transitant par l'agence nationale de la recherche (ANR), à 38 millions d'euros. Les autres sources de financement, provenant notamment des contributions des membres du GIP, sont marginales.

En 2015, les dépenses de l'Institut se sont élevées à 97,8 millions d'euros , en augmentation de plus de 10 millions d'euros par rapport à l'année précédente. Conformément aux missions dévolues à l'INCa de soutien à la recherche et de coordination des acteurs, plus des deux tiers ont bénéficié directement à des partenaires sous forme de subventions : le financement des projets sélectionnés dans le cadre des appels à projets ou de structures comme les cancéropôles, les centres labellisés INCa de phase précoce (CLIP) et les registres.

La nature des missions de l'INCa explique également le montant des engagements hors bilan , qui s'élève à 82 millions d'euros en 2015 , en hausse de 24 % par rapport à 2014 en raison du renouvellement de structures, avec la labellisation des cancéropôles pour la période 2015-2017, et le lancement du troisième plan cancer.

L'INCa participe à l'effort de réduction des dépenses publiques. Les subventions pour charges de service public du ministère de la santé ont été réduites à compter de l'exercice 2014. Ainsi, pour 2015, la subvention initialement prévue à 50,5 millions d'euros après application de la mise en réserve de 8 % sur le montant de 54,2 millions d'euros voté en loi de finances pour 2015, a fait l'objet de plusieurs décisions de réductions successives pour être finalement ramenée à 38,8 millions d'euros, soit une baisse totale de 11,7 millions d'euros.

L'analyse de l'évolution des subventions pour charges de service public versées par les deux ministères de tutelle met en évidence une divergence : alors que le ministère de la santé a initialement accru les crédits alloués à l'INCa jusqu'en 2011, le ministère de la recherche a maintenu sa subvention à un niveau constant depuis la création de l'Institut. De fait, l'exercice 2015 a conduit à un cofinancement équilibré entre les deux tutelles.

Évolution des subventions pour charges de service public

En millions d'euros

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Ministère de la santé

44,3

48,1

40

38,2

39,2

56,2

53

52,3

42,1

38,8

Ministère de la recherche

40

43

40

40

40

40

40

40

38

38

Total

57,5

84,3

91,1

80

78,2

79,2

96,2

93

92,3

80,1

76,8

Source : commission des finances du Sénat à partir des données des rapports annuels de performances successifs.

La dynamique de la subvention versée par le ministère de la santé à l'INCa s'inscrit dans le cadre global d'une réduction des subventions pour charges de service public portées par le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » de la mission « Santé », telle qu'inscrite dans le budget triennal 2015-2017. Les dotations aux opérateurs sanitaires ont en effet diminué de 4,4 % en 2015 par rapport à 2014. Si la diminution de la subvention versée à l'INCa en 2015 est supérieure à cette moyenne, cet écart traduit un effet de rattrapage, dans la mesure où la baisse est intervenue dans un second temps par rapport aux autres opérateurs sanitaires. De même, le plafond général d'emplois a diminué, passant de 165 ETP en 2013 à 158 ETP en 2015.

Face à cette baisse des dotations, l'INCa a mené des efforts de gestion, en augmentant le taux d'exécution des dépenses, passé de 90 % en 2013 à 97,3 % en 2015. De même, l'Institut a puisé dans son fonds de roulement, qui excédait le seuil prudentiel estimé par la direction du budget entre trente et quarante jours de fonctionnement. Le prélèvement sur fonds de roulement lors de l'exercice 2015 a atteint 11,8 millions d'euros, soit 12 % des dépenses réalisées.

Évolution des dépenses et du taux d'exécution 22 ( * )

En millions d'euros

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Dépenses (budget initial)

93,8

115,9

108,5

106,4

114,5

114

109,6

104,1

97,5

100,5

Dépenses (réalisées)

95,4

100,5

87,1

91,5

101,7

104,6

97,8

93,7

86,8

97,8

Taux d'exécution

102 %

87 %

80 %

86 %

89 %

92 %

89 %

90 %

89 %

97 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des données transmises par la direction du budget.

Évolution du fonds de roulement et des réserves de trésorerie

En millions d'euros

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016 (BI)

Fond de roulement

30,2

37,6

43,4

38,5

25

28,7

34,8

42,4

43,9

32,1

28,1

Réserves de trésorerie

57,2

59,2

72,9

35,7

38,6

34,8

41,6

46,2

47,2

32,5

-

Source : commission des finances du Sénat à partir des données transmises par la direction du budget.

Les mauvais taux d'exécution lors des exercices précédents, ainsi que les niveaux élevés du fonds de roulement et de la trésorerie pouvaient traduire un surfinancement ou une insuffisante capacité d'absorption des moyens alloués. Quoique ponctionné de façon régulière par la direction du budget, le fonds de roulement a tendance à se reconstituer. À la fin de l'exercice 2015, le niveau du fonds de roulement demeure à un niveau élevé, représentant 3,9 mois de fonctionnement.

Outre l'amélioration de l'exécution budgétaire, la stratégie suivie par l'INCa pour accompagner la baisse des subventions pour charges de service public a visé à rationaliser l'allocation de ses moyens, avec une revue des principaux postes de dépenses de fonctionnement et d'intervention afin de les mettre en cohérence avec les objectifs du troisième plan cancer. Les dépenses immobilières ont ainsi été réduites de plus de 2,8 millions d'euros sur la période 2011-2015 dans le cadre de son schéma pluriannuel de stratégie immobilière approuvé par le conseil d'administration en 2011 et soumis aux ministres de tutelle ainsi qu'à France domaine. Il s'est notamment traduit par la renégociation du loyer pour ses locaux de Boulogne-Billancourt et une libération des surfaces excédentaires pour atteindre le ratio cible de 12 mètres carrés par agent, et par la renonciation du site de Lyon à compter de décembre 2011. De nouvelles économies ont été réalisées sur les baux en 2015. En outre, les missions des cancéropôles ont été recentrées en 2015 sur un socle de sept axes, avec une réduction de leurs dotations de 20 % au niveau national.

Le prochain budget triennal, qui sera élaboré au printemps 2017 pour les années 2018 à 2020, devrait s'inscrire dans la continuité du précédent et de l'objectif de maîtrise des moyens alloués aux opérateurs. La ponction du fonds de roulement ne pourra suffire. Par conséquent, il importe de définir de nouvelles sources d'économies afin de maintenir les marges de manoeuvre de l'INCa pour son coeur de métier. Le risque à terme serait de devoir remettre en cause certaines des activités de l'Institut, et donc une partie du troisième plan cancer. Or l'INCa assure principalement un rôle de coordination, pour lequel sa force réside dans sa capacité à soutenir financièrement des actions et des structures. Réduire sa capacité de financement obérerait son rôle dans la lutte contre le cancer. La caractéristique principale de l'INCa, telle que mise en évidence par la nature de ses dépenses et le poids de ses engagements hors bilan, réside dans l'intervention : en tant qu'organisme de soutien à la recherche sur le cancer, l'Institut s'engage sur une longue période. Il convient donc qu'il dispose des moyens nécessaires à l'accomplissement des missions dont la loi l'investit.

Les efforts internes doivent en ce sens être poursuivis. Outre le constat que l'INCa se caractérise par des rémunérations supérieures à celles des agences sanitaires, notamment pour les postes d'encadrement ou d'expertise scientifique, l'enjeu principal réside dans la fonction immobilière. Le ministre de la santé de l'époque, par une lettre du directeur de cabinet du 10 décembre 2008 avait déclaré que « l'implantation à Boulogne-Billancourt ne sera pas définitive » , compte tenu de l'engagement que « l'INCA se rapproche, à partir de 2012, d'autres agences sanitaires situées en Seine Saint Denis » . La stratégie suivie a finalement privilégié l'abandon de sites annexes et une renégociation des baux, permettant d'enregistrer des économies.

Néanmoins, la question du maintien de l'INCa dans ses locaux de Boulogne-Billancourt peut être posée, alors que le bail expire au 31 décembre 2017. Le choix de localisation de l'INCa était motivé par des raisons de contexte aujourd'hui disparues. La pertinence de cette localisation peut être doublement interrogée, dans la mesure où aucune raison d'aménagement du territoire ne la justifie, et où les agences sanitaires se concentrent principalement sur deux pôles géographiques, en Seine-Saint-Denis et à Saint-Maurice dans le Val-de-Marne 23 ( * ) . Selon les estimations de la direction du budget, une installation à proximité des autres agences sanitaires en Seine-Saint-Denis permettrait une économie comprise entre un et deux millions d'euros par an. En ce sens, et conformément à la réponse de la direction générale de la santé aux recommandations formulées par le rapport Bur de 2011 sur les agences sanitaires 24 ( * ) selon laquelle « le regroupement des agences situées à Saint-Denis sera étudié à l'occasion du renouvellement des baux » , un déménagement des locaux de l'INCa vers un de ces deux pôles géographiques pourrait être étudié. Il participerait de l'accentuation des mutualisations entre agences sanitaires.

Recommandation n° 2 : saisir l'opportunité de la fin du bail de location des locaux occupés par l'INCa à Boulogne-Billancourt au 31 décembre 2017 pour étudier les modalités d'un rapprochement vers l'un des deux pôles géographiques où se situent les autres agences sanitaires, comme préalable au renforcement des mutualisations de fonctions support entre opérateurs.

Toutefois, outre les efforts internes de gestion de l'Institut, les économies pouvant être réalisées résultent aussi du pilotage stratégique des tutelles, afin de permettre à l'INCa, malgré la baisse des subventions, de conserver des marges de manoeuvre pour remplir ses missions.


* 22 L'écart entre le montant cumulé des subventions pour charges de service public et le montant des dépenses réalisés s'explique par l'existence de ressources annexes : contributions des autres membres du GIP, autres subventions et ressources propres.

* 23 La Haute Autorité de santé, l'Agence de biomédecine et l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé se situent à Saint-Denis ; l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail se situe à Maisons-Alfort, à proximité de la nouvelle Agence nationale de santé publique, implantée à Saint-Maurice.

* 24 Rapport d'information déposé par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale en conclusion des travaux de la mission sur les agences sanitaires présenté par Yves Bur le 6 juillet 2011.

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