N° 238

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 décembre 2025

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1) sur les propositions
de règlement et de directive relatives aux
petites entreprises
à
moyenne capitalisation,

Par MM. Vincent LOUAULT et Michaël WEBER,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Rapin, président ; MM. Alain Cadec, Ronan Le Gleut, Mme Gisèle Jourda, MM. Didier Marie, Claude Kern, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Teva Rohfritsch, Mme Cathy Apourceau-Poly, MM. Cyril Pellevat, Louis Vogel, Mme Mathilde Ollivier, M. Ahmed Laouedj, vice-présidents ; Mme Marta de Cidrac, M. Daniel Gremillet, Mmes Florence Blatrix Contat, Amel Gacquerre, secrétaires ; MM. Georges Patient, Pascal Allizard, Jean-Michel Arnaud, Bruno Belin, François Bonneau, Mmes Valérie Boyer, Sophie Briante Guillemont, M. Pierre Cuypers, Mmes Karine Daniel, Brigitte Devésa, MM. Jacques Fernique, Christophe-André Frassa, Mmes Pascale Gruny, Nadège Havet, MM. Olivier Henno, Bernard Jomier, Mme Christine Lavarde, M. Dominique de Legge, Mme Audrey Linkenheld, MM. Vincent Louault, Louis-Jean de Nicolaÿ, Mmes Elsa Schalck, Silvana Silvani, M. Michaël Weber.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le 10 mars dernier, à l'initiative de MM. Olivier Rietmann, président de la délégation sénatoriale aux entreprises, et Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes, le Sénat adoptait, sur le rapport1(*) de MM. Vincent Louault et Michaël Weber, une résolution européenne sur la reconnaissance par l'Union européenne de la catégorie des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Le rapport de la commission des affaires européennes soulignait la prise de conscience intervenue au niveau de l'Union européenne de mieux prendre en compte la situation de ces entreprises, essentielles au dynamisme de l'économie européenne car les plus créatrices de valeur. Elle insistait également sur l'urgence d'adopter une définition ambitieuse des ETI, prélude à la conception de politiques publiques et normes adaptées et proportionnées à la taille des entreprises et à leurs spécificités.

Dans la droite ligne des recommandations formulées par le Sénat, et dans le cadre de la mise en oeuvre de la politique de simplification décidée par la Commission européenne pour rétablir la compétitivité des entreprises européennes, celle-ci a dévoilé, fin mai dernier, un nouvel « omnibus » dédié aux « petites entreprises à moyenne capitalisation », ou SMC (small mid-capitalization), qui constitue une première étape, très limitée par rapport aux attentes exprimées par le Sénat, sur la voie de la reconnaissance des entreprises de taille intermédiaire.

Ce nouveau paquet législatif de simplification constitue la traduction de la volonté exprimée dans le cadre du train de mesures de soutien aux PME, publié par la Commission européenne le 12 septembre 2023. Il avait alors été annoncé que la Commission européenne « élaborerait une définition harmonisée des petites entreprises à moyenne capitalisation, élaborerait un ensemble de données fondé sur cette définition et évaluerait les mesures possibles pour soutenir ces entreprises dans leur croissance (y compris, l'éventuelle application, sous forme adaptée, de certaines mesures en faveur des PME) ».

Concrètement, cet « omnibus IV » introduit en droit européen une définition harmonisée des petites entreprises à moyenne capitalisation, qui ne reproduit pas la définition utilisée dans les règles régissant les aides d'État, mais doit servir de base à un « soutien stratégique ciblé qui puisse aider les entreprises à se développer dans des secteurs pertinents et importants ». La Commission européenne a d'ailleurs souligné que sa proposition n'a pas d'implications financières.

La définition des petites entreprises à moyenne capitalisation fait l'objet d'une recommandation de la Commission européenne. Celle-ci a été publiée en même temps que les deux propositions de texte qui constituent l'omnibus IV pour sa partie relative à ces entreprises : une proposition de règlement, qui modifie six règlements existants et une proposition de directive, qui modifie deux directives existantes.

Sur le plan juridique, ces textes étendent aux petites entreprises à moyenne capitalisation certaines dispositions actuellement appliquées aux PME. Ils proposent également des mesures générales de simplification qui bénéficieront à ces entreprises comme à l'ensemble des entreprises sans leur être spécifiques.

Au total :

- un règlement et deux directives sont modifiés uniquement par extension aux SMC de mesures déjà en place pour les PME ;

- deux règlements sont modifiés au seul titre de la poursuite de la simplification ;

- trois règlements sont modifiés à la fois par des dispositions d'extension et de simplification.

I. L'INTRODUCTION D'UNE DÉFINITION DES PETITES ENTREPRISES À MOYENNE CAPITALISATION : UNE PREMIÈRE ÉTAPE À CONFORTER

A. LA PROPOSITION DE LA COMMISSION EUROPÉENNE : UNE RECONNAISSANCE TRÈS LIMITÉE DE LA CATÉGORIE DES ENTREPRISES DE TAILLE INTERMÉDIAIRE

En 2003, la Commission européenne avait déjà publié une recommandation concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises. En revanche, il n'existait pas, jusqu'à présent, de définition harmonisée des entreprises de taille intermédiaire. En outre, la définition des petites entreprises à moyenne capitalisation fixée à l'article 103 sexies du Règlement (UE) n°651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur concernait un segment réduit de l'éventail des entreprises : une petite entreprise à moyenne capitalisation est, dans ce cadre, « une entreprise dont le nombre de salariés n'excède pas 499 [...], dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 100 millions EUR ou dont le bilan annuel n'excède pas 86 millions EUR ». Mais cette définition, au demeurant restrictive, n'était pas partagée par l'ensemble des intervenants économiques et financiers, la Banque européenne d'investissement (BEI) prenant, par exemple, en compte les entreprises employant de 250 à 2999 personnes.

La Commission européenne franchit aujourd'hui une nouvelle étape : considérant que « dans le contexte économique actuel, afin de mieux accompagner l'expansion des entreprises et d'englober un plus grand nombre de sociétés », elle recommande que la catégorie des petites entreprises à moyenne capitalisation recouvre les entreprises dont la taille est trois fois supérieure à celle des PME. En pratique, il s'agirait des entreprises comptant donc moins de 750 salariés et dont le chiffre d'affaires serait inférieur ou égal à 150 millions d'euros ou le total de bilan inférieur ou égal à 129 millions d'euros.

Tout en ajoutant une strate à la répartition des entreprises, la Commission européenne recommande que celle-ci fasse l'objet d'une utilisation commune par la Commission, les États membres, la Banque européenne d'investissement (BEI) et le Fonds européen d'investissement (FEI).

Cette proposition, qui constitue une première avancée sur la voie de la reconnaissance des entreprises de taille intermédiaire, est toutefois très limitée et restrictive. Une telle approche ne surprend pas les rapporteurs, qui avaient déjà souligné, dans leur rapport précité sur la proposition de résolution européenne relative à la reconnaissance par l'Union européenne de la catégorie des entreprises de taille intermédiaire, la frilosité des services de la Commission européenne.


* 1 Rapport n° 307 (2024-2025), déposé le 5 février 2025.

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