Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Thomas Dossus. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici parvenus à la fin de l’examen de la première partie du projet de loi de finances.
Cette première partie du PLF est le symbole d’une méthode gouvernementale dans l’impasse : tandis qu’un seul député a voté pour le premier volet de ce budget, ici, la majorité sénatoriale a réduit drastiquement les recettes.
Après huit ans à vider les caisses, les trois derniers Premiers ministres se sont retrouvés face au gouffre de nos comptes publics, et deux d’entre eux y sont déjà tombés.
Vous vous entêtez, mes chers collègues, à refuser de mettre à contribution celles et ceux qui ont le plus profité de la politique, inefficace, de l’offre. Résultat : affaiblissement écologique, économique, démocratique, fragilisation de nos collectivités locales, de nos capacités d’innovation et de nos solidarités.
Face à ce constat, qu’a fait le Sénat durant ces journées de débats budgétaires pour corriger la donne ? La majorité sénatoriale, c’est-à-dire Les Républicains et l’Union Centriste, a aggravé la situation de nos finances publiques en renonçant à faire contribuer à leur juste hauteur les plus hauts patrimoines et les grands groupes.
L’exemple le plus frappant est la suppression de la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises : de 4 milliards à 6 milliards d’euros se sont ainsi volatilisés. En supprimant cette contribution exceptionnelle, la majorité a profondément affaibli la parole de son propre camp. En effet, le gouvernement Barnier avait prévu initialement, c’est-à-dire l’an dernier, qu’elle soit levée sur deux ans.
L’IFI, au lieu d’être élargi, a été dévitalisé.
La taxe sur les holdings patrimoniales a été transformée dans un sens qui relève moins de la justice fiscale que de la protection de quelques grandes structures familiales.
Au lieu de flécher de nouveau vers les collectivités ce qu’il reste de la CVAE, la droite, main dans la main avec le Gouvernement, a privé définitivement nos collectivités de 1 milliard d’euros de recettes supplémentaires. Tout le monde fait le constat que, sous la présidence Macron, la fin de l’autonomie des collectivités et la recentralisation se sont accélérées. La droite sénatoriale y aura encore contribué ces derniers jours.
Enfin, dans son élan réactionnaire, la majorité a malmené la fiscalité environnementale : suppression de la taxe sur les emballages plastiques ; réduction de la redevance pour pollutions diffuses des industriels ; augmentation de la fiscalité sur le gaz sans aucune progressivité. Autant de reculs sur l’écologie et de retards pour la transition de notre économie.
Le bilan ? Un volet de recettes profondément déséquilibré, qui renforce les inégalités, affaiblit l’État et dégrade in fine notre capacité d’action publique au travers tant des missions classiques de l’État que des politiques d’avenir.
Dans ce paysage, quelques avancées et corrections montrent qu’un autre chemin était possible : l’indexation de la première tranche de l’impôt sur le revenu, même limitée ; l’augmentation de la durée de détention minimale des actions pour bénéficier du pacte Dutreil ; l’application du taux réduit de TVA à 5,5 % pour les opérations de réparation ; le maintien de certaines dépenses dans l’assiette du FCTVA. Tout cela va, timidement, dans le bon sens. Malheureusement, ces points positifs restent marginaux face au déséquilibre général du texte.
Et comment ne pas évoquer nos conditions d’examen dégradées, du fait des délais imposés par la gestion gouvernementale chaotique ? De ces débats, peu lisibles en dehors de cet hémicycle, le Parlement ne sort pas grandi !
J’en viens au sujet du logement.
Les groupes de gauche du Sénat, notamment le groupe écologiste, ont appelé à faire un pas en avant pour faciliter la situation des bailleurs privés, pour les aider, raisonnablement, à relancer la construction sur ses deux piliers, le public et le privé.
Il est impératif que le Gouvernement respecte son engagement de baisser la réduction de loyer de solidarité (RLS) pour les bailleurs sociaux de 700 millions d’euros, et non pas seulement de 200 millions d’euros, comme cela semble se profiler. Un accord est intervenu à l’Assemblée nationale, qu’il faut respecter ; or nous avons l’impression que le Gouvernement souhaite s’en affranchir.
Notre groupe a participé à l’obtention de quelques avancées : la suppression du mécanisme du travail réputé acquis ; la clause anti-abus ; le rehaussement du plafond du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique et de celui du crédit d’impôt en faveur de la préservation des haies bocagères ; la sécurisation de la participation des bailleurs de fonds pour les aides à la pierre ; l’augmentation de la taxe sur les petits colis ; la majoration de l’affectation aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) des recettes du quota carbone ; le renforcement des moyens des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) ; l’instauration d’une forme de taxe générale « amont » sur les activités polluantes (TGAP) ; la sortie du cannabidiol (CBD) et des produits non nicotiniques du nouveau dispositif d’accise.
Il s’agit, certes, d’avancées et de corrections utiles sur de nombreux sujets, mais qui sont insuffisantes pour compenser un texte globalement injuste, incohérent et politiquement affaibli.
Toutes les politiques structurantes – ISF climatique, impôt plancher sur la fortune, taxe sur les transactions financières, diversification des ressources des collectivités – ont été balayées.
Ici, au Sénat, les choses sont claires pour la droite : dans le budget de la sécurité sociale, ce sont les plus fragiles, notamment les allocataires des minima sociaux, qui contribuent au redressement des comptes publics, tandis que, dans le budget général de l’État, les ultrariches et les grands groupes sont épargnés !
Nous ne pouvons pas soutenir un budget qui affaiblit l’État face aux défis climatiques, géopolitiques et sociaux, qui aggrave les inégalités et qui fragilise le contrat social de la Nation. C’est pourquoi le groupe écologiste votera contre la première partie du projet de loi de finances. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
Mme la présidente. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2026.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 81 :
| Nombre de votants | 345 |
| Nombre de suffrages exprimés | 303 |
| Pour l’adoption | 198 |
| Contre | 105 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. David Amiel, ministre délégué auprès de la ministre de l’action et des comptes publics, chargé de la fonction publique et de la réforme de l’État. Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens, au nom du Gouvernement, à vous remercier de ce vote qui va nous permettre de continuer à examiner le projet de loi de finances pour 2026.
Chacun le sait, en l’absence de budget, nous serions tous condamnés au pire, c’est-à-dire à assister impuissants, d’une part, à l’explosion des déficits, et, d’autre part, à l’impossibilité de financer les réponses aux urgences du pays. Cet esprit de gravité et de responsabilité devra continuer à nous animer lors de l’examen de la deuxième partie de ce projet de budget.
Je salue également M. le rapporteur général de la commission des finances, Jean-François Husson, pour la clarté et la précision de ses explications, ainsi que pour les amendements qu’il a proposés, dans un esprit toujours constructif.
Enfin, j’adresse mes remerciements à M. le président de la commission des finances, Claude Raynal, et, encore une fois, à vous tous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour la grande qualité de nos débats, qui répond, par-delà nos différences, aux attentes des Français, lesquels nous regardent. (M. Thani Mohamed Soilihi applaudit.)
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Merci à vous, monsieur le ministre !
Mme la présidente. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures vingt-huit.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Mes chers collègues, nous en sommes parvenus aux dispositions de la seconde partie du projet de loi de finances.
SECONDE PARTIE
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
Mme la présidente. Nous allons maintenant entamer l’examen des différentes missions.
Sport, jeunesse et vie associative
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme il est d’usage, je commencerai par vous exposer les grandes caractéristiques et les principales évolutions de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2026.
La mission voit ses crédits diminuer de 17,5 %, pour atteindre 1 235,9 millions d’euros. Bien qu’il s’agisse d’une « petite » mission du budget de l’État par le volume de ses crédits, elle est celle qui, en proportion, contribue le plus à la réduction du déficit public.
Ces baisses de financement pèsent principalement sur le programme 163 « Jeunesse et vie associative », qui perd plus d’un quart de ses financements, avec une baisse de 26,1 %.
Le service civique voit ses crédits diminuer de 114,4 millions sur 579,4 millions d’euros. Par conséquent, une cible de 110 000 jeunes a été retenue pour 2026, en diminution de 40 000 par rapport à celle des années précédentes, qui était donc de 150 000 jeunes.
Je regrette vivement cette décision. La dernière fois que l’objectif avait été fixé à 110 000 jeunes, c’était il y a dix ans. À la suite des attentats du 13 novembre 2015, la cible du service civique avait été rehaussée à 150 000, afin de répondre par l’engagement citoyen aux attaques prenant pour cible la France et ses valeurs.
Le service civique est l’une des dernières politiques de grande ampleur qui porte entièrement sur la mobilisation de la jeunesse. Son efficacité est largement reconnue, y compris par la Cour des comptes, et il représente un véritable soutien pour le monde associatif.
La commission des finances a donc voté un amendement visant à rehausser de 40 millions d’euros les financements du service civique. Avec les 15 millions d’euros qui viennent d’être adoptés dans le projet de loi de finances de fin de gestion, il est possible de limiter la baisse du nombre de missions. Cet amendement est porté en commun avec le rapporteur général, que je remercie vivement.
Je précise par ailleurs que je demanderai au Gouvernement de lever le gage de cet amendement sur le programme « Sport ».
Le dispositif des « colos apprenantes » a également fait les frais de la politique d’économies. Ce programme, lancé après la pandémie de covid-19, permettait de subventionner des séjours en colonie de vacances à hauteur de 500 euros par enfant.
Je regrette la fin de cette politique, dont j’avais soutenu la mise en place depuis plusieurs années. Les colonies de vacances sont un maillon essentiel de l’éducation populaire, et il s’agissait selon moi d’une politique plus efficace et moins coûteuse que le service national universel pour renforcer la mixité sociale.
Je donnerai donc un avis de sagesse sur un amendement visant à maintenir 10 millions d’euros pour cette politique, à destination des enfants qui en ont le plus besoin.
Le programme « Sport » enregistre, quant à lui, une diminution de 6,5 % de ses crédits de paiement, qui s’explique principalement par la division par deux des crédits du Pass’Sport.
Je suis également préoccupé par le plan « 5 000 équipements sportifs – Génération 2024 ». Celui-ci n’aura pas permis de financer les 500 équipements sportifs structurants promis, car ce sont des projets de plus faible ampleur qui ont été finalement privilégiés.
C’est la raison pour laquelle la commission des finances a donné un avis favorable à un amendement prévoyant de rehausser les financements des infrastructures des collectivités territoriales de 50 millions d’euros : il s’agit de faire en sorte que ce plan soit conforme à ses ambitions initiales.
Quant aux jeux Olympiques d’hiver de 2030, ils sont encore en phase d’amorçage. Il est trop tôt pour donner une trajectoire pluriannuelle des financements de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) 2030, mais, à ce stade, le pacte des financeurs prévoit que l’ensemble des concours publics alloués au financement des investissements des projets de la maquette devrait être de 800 millions d’euros, hors réserves et dépenses de fonctionnement.
Les enjeux environnementaux seront par ailleurs encore plus importants pour les Jeux de 2030 qu’ils ne l’étaient pour ceux de 2024. Il conviendra donc de s’assurer que l’organisation soit exemplaire de ce point de vue.
Vous aurez compris que la version initiale de la mission ne me satisfaisait pas. Toutefois, je n’avais pas proposé son rejet en commission, dans l’espoir que la copie puisse être améliorée en séance publique. Au regard à la fois de l’amendement de la commission et des amendements qui sont aujourd’hui proposés, j’ai bon espoir que nous puissions améliorer, autant que faire se peut, le budget du sport, de la jeunesse et de la vie associative.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le Gouvernement nous dit que le budget du sport diminue de 4,6 %. Mais cette présentation est en réalité trompeuse : en effet, les crédits du programme 219 « Sport » baissent de 6,5 %, et même de 9 % hors dépenses de personnel.
S’agissant des deux taxes affectées à l’Agence nationale du sport (ANS), le plafond d’affectation que nous avions obtenu pour 2025 est reconduit, mais sans prise en compte de la dynamique des paris sportifs.
Le déplafonnement supplémentaire de 50 millions d’euros que nous avons obtenu en première partie du projet de loi de finances est d’autant plus nécessaire que le rendement de la taxe sur les droits de retransmission audiovisuelle des événements sportifs, dite taxe Buffet, est, lui, très incertain, du fait de l’évolution des droits audiovisuels sportifs, en particulier du football.
Le plafond fixé pour cette taxe est fictif ; il permet au Gouvernement d’afficher un montant stable, et donc une diminution limitée du budget du sport, qui ne correspond pas à la réalité.
S’agissant des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030, traditionnellement, les jeux d’hiver sont de moindre ampleur que les jeux d’été, mais ils comportent une part supérieure de financement public. Le récent rapport de la Cour des comptes sur l’organisation des jeux de 2024 doit nous inciter à la vigilance, car les coûts de ces jeux en matière de sécurité ou de transport sont pour le moment invisibles.
Sur le fond, ce budget accorde peu d’importance au « sport pour tous », le sport du quotidien, dans un contexte de questionnement sur la gouvernance du budget du sport – je pense, par exemple, à l’avenir de l’Agence nationale du sport.
Les équipements sont délaissés. Or l’existence d’infrastructures sportives rénovées est un préalable indispensable au développement des pratiques. Ainsi, 75 % des équipements sportifs ont plus de 20 ans et de nombreuses fédérations n’ont pu faire face à la demande accrue de nouveaux licenciés potentiels. Ont été ainsi refusées 40 000 demandes de licence pour le volley, et 100 000 pour le handball.
Si la politique de mutualisation des équipements scolaires est utile, elle ne sera pas suffisante. Une politique nationale de maillage du territoire en équipements structurants rénovés est nécessaire. Évidemment, l’enjeu est non pas seulement sportif, mais aussi social et sanitaire.
Par ailleurs, deux politiques en faveur de la pratique des jeunes sont sacrifiées : d’une part, les deux heures supplémentaires de sport au collège ; d’autre part, le Pass’Sport, qui exclut désormais la tranche des 6-13 ans. Plusieurs fédérations ont déjà constaté une diminution de la pratique de cette catégorie d’âge. L’État se désengage ainsi de plusieurs politiques sportives, pour un bénéfice immédiat en termes budgétaires. La grande cause nationale de l’année 2024 paraît bel et bien oubliée.
Au même moment, près de la moitié des collectivités locales déclarent réduire leurs investissements en matière sportive. L’incertitude est encore accrue par les annonces du Premier ministre concernant un futur grand acte de décentralisation.
Or le sport est à la fois un vecteur de cohésion sociale et un facteur d’influence au plan mondial. Sacrifier l’un des plus petits budgets de l’État, pourtant doté d’un fort effet de levier à plusieurs niveaux, est tout simplement incompréhensible.
Ces nombreux reculs et ces incertitudes persistantes ont conduit la commission de la culture à rendre un avis défavorable sur le budget du sport. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Yan Chantrel, rapporteur de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de la culture a examiné le programme 163 « Jeunesse et vie associative », qui ne dispose plus que de 626,6 millions d’euros pour 2026, soit 221,5 millions d’euros de moins qu’en 2025.
La suppression du service national universel (SNU) aurait pu être l’occasion de renforcer les politiques des programmes qui fonctionnent. Au contraire, le Gouvernement choisit de réduire encore les moyens consacrés à la jeunesse. Plus d’un quart des crédits votés l’an dernier disparaissent !
Le service civique en est la première victime. Le budget qui y est consacré diminue de 20 % : 25 000 jeunes en seront écartés en 2026 par rapport à 2025, alors même qu’il y a chaque année trois fois plus de candidatures que de missions. Et ce sont, comme toujours, les plus fragiles qui seront les premiers exclus.
Au-delà des jeunes eux-mêmes, ce nouveau coup de rabot viendra également fragiliser des associations déjà en grande difficulté : en 2025, certaines ont dû engager des plans de sauvegarde inédits pour faire face à la baisse, en cours d’année, du nombre de missions de service civique.
Le mentorat, lui aussi, voit ses crédits baisser : 24,5 millions y sont consacrés en 2026, contre 29 millions en 2025, alors que le plan « 1 jeune, 1 mentor » accompagne un nombre croissant de jeunes fragiles. Les résultats sont pourtant très prometteurs, notamment pour les collégiens et lycéens issus de milieux modestes.
En 2025, le nombre de jeunes provenant de lycées professionnels en bénéficiant a progressé de 47 % par rapport à 2023, tandis que le nombre de jeunes accompagnés par l’aide sociale à l’enfance (ASE) a progressé de 39 %. À l’heure où près d’un jeune actif sur cinq est au chômage, affaiblir ce dispositif est incompréhensible.
J’aimerais également évoquer la situation des colonies de vacances. La suppression brutale des colos apprenantes intervient alors que le secteur n’a pas retrouvé son niveau d’avant-crise : 1,34 million de mineurs sont partis en 2023-2024, soit 100 000 de moins qu’en 2018-2019. Le Pass colo, trop limité et méconnu, ne compensera pas la disparition d’un dispositif qui bénéficiait à plus de 80 000 enfants chaque année depuis 2020. Il est urgent de relancer la dynamique du départ en vacances.
Je terminerai en évoquant la situation du monde associatif. Le secteur est au bord de la rupture : 30 % des associations employeuses ont moins de trois mois de trésorerie. Les financements publics continuent de s’éroder ; près d’une association sur deux a vu ses subventions baisser en 2025. Malgré cela, le projet de loi de finances pour 2026 ne prévoit aucun nouveau soutien.
Comme vous pouvez le constater, l’évolution des crédits du programme 163 ne répond pas aux défis que doivent relever les secteurs de la jeunesse et de la vie associative. C’est pourquoi la commission de la culture a donné un avis défavorable à l’adoption de ses crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Organisation des travaux
Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs et pour votre bonne information, je vous indique que 64 amendements sont à examiner sur cette mission. Je vous rappelle que la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures.
Compte tenu de l’organisation de la journée, nous pourrions prévoir quarante-cinq minutes de discussion supplémentaire pour terminer son examen aux alentours de dix-huit heures quinze et passer ensuite à la mission « Outre-mer ».
Au-delà de cet horaire, conformément à l’organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l’examen de cette mission sera reportée à dimanche.
En outre, la conférence des présidents, qui s’est réunie hier, mercredi 3 décembre, a décidé que, lorsque le nombre d’amendements déposés ne paraissait pas pouvoir garantir leur examen serein dans les délais impartis, les temps de parole seraient fixés, sur proposition de la commission des finances, à une minute.
S’agissant de la présente mission, même avec les marges que nous avons dégagées, le nombre d’amendements à examiner rapporté à la durée dont nous disposons aujourd’hui nous conduit à devoir observer un rythme de 35 amendements par heure, ce qui est élevé.
Aussi, afin de nous donner toutes les chances de terminer aujourd’hui l’examen de cette mission et en application de la décision de la conférence des présidents, les durées d’intervention seront fixées à une minute.
Sport, jeunesse et vie associative (suite)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote. Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Ahmed Laouedj. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Ahmed Laouedj. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, faire un budget, c’est faire des choix. Or, avec cette mission « Sport, jeunesse et vie associative », le Gouvernement fait le choix de l’austérité au détriment de celles et de ceux qui permettent à notre cohésion sociale de tenir encore debout : les jeunes et le tissu associatif.
Entre 2025 et 2026, les crédits de la mission donnent l’illusion d’une légère progression budgétaire, avec une hausse de 1,9 % en autorisations d’engagement. Mais cette façade masque une réalité beaucoup plus préoccupante : les crédits de paiement chutent de 17,5 %, passant de 1,49 milliard à 1,23 milliard d’euros.
L’État investit dans l’exceptionnel, mais se désengage du quotidien : soutien à la jeunesse, à la vie associative, à l’éducation populaire et au sport pour tous.
En ce qui concerne la jeunesse et la vie associative, la baisse de 26 % du programme 163 est particulièrement alarmante : suppression du SNU, réduction de plus de 100 millions d’euros pour le service civique, extinction des colos apprenantes.
La jeunesse n’est pas un coût : elle est un investissement. En la négligeant, on fabrique des renoncements et cela se traduira très concrètement.
Le service civique doit rester un levier d’engagement et d’émancipation, particulièrement là où les perspectives sont plus limitées.
En Seine-Saint-Denis, où les associations portent à bout de bras la solidarité, l’éducation populaire et l’accompagnement des jeunes, ces coupes auront un effet direct.
Déjà fragilisées par l’inflation, l’augmentation des charges et la précarité des financements, nombreuses sont les associations qui peinent à maintenir leurs actions : plus d’une sur trois a dû réduire son activité, alors qu’elles sont en première ligne face à des besoins croissants.
Ce n’est pas aux associations de payer la facture de l’austérité.
C’est pourquoi le groupe RDSE a déposé plusieurs amendements qui seront défendus au cours de notre discussion.
Ces amendements visent : à garantir un nombre suffisant de missions de service civique, afin que l’engagement demeure une véritable opportunité pour nos jeunes ; à sécuriser le financement des petites associations, notamment dans les quartiers prioritaires ; à soutenir les collectivités locales dans la rénovation et la modernisation des équipements sportifs de proximité ; enfin, à assurer la stabilité du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) à hauteur de 50 millions d’euros, pour soutenir durablement la vie associative dans nos territoires.
Ces propositions ne bouleversent pas l’équilibre budgétaire, elles visent simplement à corriger les angles morts les plus criants et à ne pas laisser les acteurs de terrain devenir la variable d’ajustement des restrictions budgétaires.
Du côté du sport, les crédits reculent également, et la fin du plan « Génération 2024 » affaiblit la capacité des collectivités locales à entretenir les équipements qui permettent au plus grand nombre de pratiquer.
Exclure les 6-13 ans du Pass’Sport réduit l’accès à la pratique sportive dans les familles modestes, alors que le sport reste un enjeu de santé publique et d’inclusion.
En conclusion, la baisse brutale des crédits de cette mission révèle un choix politique que nous ne pouvons pas cautionner : un désengagement massif de l’État là où les besoins sont les plus criants. Cela signifie, très concrètement, moins de moyens pour accompagner, former, intégrer et prévenir.
En Seine-Saint-Denis, territoire jeune, populaire et riche d’initiatives, cette contraction budgétaire aura des conséquences directes : des projets annulés, des portes qui ferment, des opportunités manquées pour celles et ceux qui devraient être au cœur de nos priorités.
En l’état, si cette mission n’est pas sérieusement rééquilibrée, je voterai contre. Certains de mes collègues du groupe RDSE s’abstiendront, mais tous partagent le même constat : ce budget n’est pas à la hauteur de l’enjeu républicain que représente notre jeunesse.
L’avenir d’un pays se mesure d’abord à ce qu’il investit dans sa jeunesse. Je continuerai donc à défendre, avec constance, des politiques publiques qui accompagnent, qui protègent et qui émancipent. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Claude Kern. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, véritable quadrature du cercle, les arbitrages budgétaires à venir devront concilier ambition sportive, responsabilité financière et soutien aux dynamiques territoriales.
Le projet de loi de finances prévoit une baisse de 17 % des crédits du sport, de la jeunesse et de la vie associative, soit un budget en net recul pour ces deux missions. Pourtant, la période nécessite un signal fort, ainsi qu’un accompagnement prégnant de la puissance publique.
En ce qui concerne le budget consacré à la jeunesse et à la vie associative, la chute de 26 % des crédits de ce programme est particulièrement préoccupante.
Malgré la préservation des crédits en faveur des associations, celles-ci continuent de survivre dans un système à bout de souffle, qui réclame urgemment une refonte profonde : il faut sortir de la logique d’appels à projets et instaurer enfin des subventions pluriannuelles, stables et prévisibles, pour rendre le modèle économique plus performant sans obérer l’autonomie des collectivités territoriales.
Il est primordial de maintenir une solide politique de soutien à la vie associative et au bénévolat, véritable « marque de fabrique française », mais qui accuse aujourd’hui un tassement sans précédent.
Il faut capitaliser le formidable élan qu’ont provoqué les derniers jeux Olympiques en matière de volontariat et accompagner cette dynamique de l’engagement, tout en sécurisant le financement de la vie associative face aux baisses de subventions, notamment des collectivités territoriales qui, cette année, sont particulièrement touchées. Elles financent pourtant près de trois fois plus les associations que l’État.
C’est la vie même de nos territoires qui sera atteinte par les impacts délétères de ces mesures.
C’est grâce au bénévolat, qui est aujourd’hui en crise, et aux lourds investissements nécessaires à la réhabilitation des équipements sportifs structurants qu’il sera possible de développer efficacement et de démocratiser la pratique sportive.
Nous pouvons faire confiance aux collectivités territoriales qui sont inventives pour trouver des solutions : elles répondront présent, comme elles l’ont toujours fait. Néanmoins, cela ne vous exonère pas, madame la ministre, de votre responsabilité face à ce défi.
Quant aux jeunes, ils paient le prix fort de décisions qui semblent déconnectées de la réalité. Coupes massives dans le service civique et dans le plan « 1 jeune, 1 mentor », disparition des colos apprenantes : vous amputez substantiellement des leviers pourtant reconnus d’insertion, de mixité, de sociabilité.
Autant de signaux négatifs alors que la santé mentale des jeunes, pourtant grande cause nationale en 2025, continue à se dégrader dangereusement.
La cohésion autour des valeurs de la République et la mixité sociale doivent être repensées au sein d’une politique globale beaucoup plus ciselée pour la jeunesse dans son ensemble.
Nous attendons donc rapidement vos retours quant à vos futurs projets pour proposer une offre d’aide plus lisible, rationnelle et efficace en direction de la jeunesse.
Concernant le programme « Sport », en baisse de 18 % en autorisations d’engagement et de 6,5 % en crédits de paiement, hors taxes affectées, c’est clairement un réel mauvais coup : le compte n’y est pas, madame la ministre !
Le budget des prochains jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) qui va monter en puissance dans la perspective de 2030, ne doit pas occulter l’importance de nombreux sujets qui méritent une attention particulière.
Le fonctionnement de l’ANS mérite d’être examiné cinq, ans après sa création. Son action manque de lisibilité, ses conférences régionales sont quasi invisibles, et sa suppression a même été proposée dans un rapport sénatorial.
Nous devons donc nous concentrer de manière pragmatique sur les priorités : sport pour tous, santé, inclusion, pratique quotidienne et non pas uniquement recherche de performances. La gouvernance actuelle de l’ANS mériterait d’être repensée.
Il serait plus clair pour tout le monde et plus économe de privilégier une déconcentration des crédits à un échelon de proximité plus pertinent ; vous avez évoqué le département, nous approuvons cette proposition. Pouvez-vous vous y engager aujourd’hui ?
Il est aujourd’hui nécessaire de s’inscrire dans une politique sportive plus lisible et efficace et d’éviter les ambiguïtés entre missions de l’État, de l’ANS et des collectivités territoriales, lesquelles financent déjà l’essentiel du sport dans notre pays.
J’en viens au financement des équipements sportifs. Pendant que l’État se désengage, les budgets locaux s’effritent, les collectivités territoriales sont essorées et les besoins explosent. Certes, le plan « 5 000 équipements » paraît être un succès, et nous en saluons les résultats.
Néanmoins, si l’on n’apporte pas de garanties durables pour moderniser et rénover les infrastructures, ce sont des millions de pratiquants que nous laisserons tomber.
Il est crucial d’apporter des garanties aux collectivités territoriales pour faciliter la mise en œuvre d’une vision sportive dynamique ; nous attendons vos engagements…
Vous le savez, madame la ministre, ces enjeux sont essentiels pour la pratique du sport pour tous. Alors que dire des décisions récentes ? Une baisse de 60 % des crédits de cette action, la suppression des deux heures supplémentaires de sport au collège, l’exclusion des 6-13 ans du Pass’Sport… Comment prétendre démocratiser le sport après les Jeux de Paris tout en sabrant les moyens qui permettent d’en ouvrir l’accès ?
Loin d’être des ajustements, ces mesures sont des reculs sociaux, sanitaires, éducatifs. C’est un véritable coup dur pour l’avenir sportif et la cohésion sociale de notre pays. Résultat, on fait des économies de façade, mais l’impact délétère sera massif.
La stratégie nationale sport-santé a pourtant bien été lancée, mais que les décisions prises sont paradoxales, ce qui interroge quant à sa mise en œuvre effective.
Une évidence s’impose : les paris sportifs, qui génèrent des profits colossaux, doivent contribuer davantage.
Des solutions raisonnables permettraient d’augmenter les crédits alloués à ces programmes sans affaiblir d’autres secteurs : lutte contre le piratage sportif, réorientation de la taxe Buffet et de la taxe sur les paris sportifs, ou encore hausse du FDVA. Il est temps de se positionner courageusement et d’envisager des solutions qui auront réellement des conséquences sur tout le secteur.
Pour conclure, comme vous l’aurez compris, madame la ministre, nous suivrons avec attention la position du Gouvernement sur toutes ces questions. À moins de signaux forts de votre part en faveur d’une réelle préservation des objectifs et de leur cohérence, le groupe Union Centriste, au nom duquel j’interviens aujourd’hui, se ralliera aux conclusions défavorables des rapporteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)