M. Olivier Paccaud. Dans des arrière-boutiques !
Mme Laurence Rossignol. Non ! Je n'ai jamais vu un processus aussi transparent que les discussions qui ont eu lieu entre les députés et le Gouvernement – Mme la ministre peut en témoigner. Tout le monde a pu suivre les débats, en temps réel.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !
Mme Laurence Rossignol. J'ai été beaucoup interrompue, monsieur le président !
Je conclus en rappelant, quitte à susciter encore un petit plus d'animation dans cet hémicycle, que la majorité sénatoriale n'a cessé de prétendre que notre leitmotiv aurait été : « Dépensez, dépensez, nos enfants paieront ! »
Elle ne devrait pas oublier pourtant qu'elle a voté la loi Duplomb, visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur, dont le leitmotiv était : « Polluons, polluons, nos enfants se débrouilleront ! »... (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky s'abstiendra sur cette motion. Nous l'avons dit, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale nous semble mauvais et tous les moyens sont bons pour le contrecarrer.
Nous devrions tous, me semble-t-il, faire en sorte d'élever le débat. Nos concitoyens attendent en effet davantage que des petits compromis ou des petites astuces. Ils veulent un vrai débat de société.
Madame la rapporteure générale, vous nous parlez beaucoup des générations futures, mais je constate que vous n'offrez pour seul horizon à ces générations que des économies pour réduire la dette – encore et toujours des économies pour réduire la dette ! On a connu des projets de société plus enthousiasmants.
M. Olivier Paccaud. C'est mieux que des dettes !
Mme Céline Brulin. Le problème, surtout, c'est qu'en tenant ce raisonnement, vous renoncez à tout regard critique sur les causes : vous ne cherchez plus à comprendre pourquoi nous en sommes là.
Or, depuis plusieurs années, et particulièrement sous la présidence Macron, l'État comme la protection sociale se sont démunis de ressources. Je ne m'y attarderai pas aujourd'hui : le temps de parole qui m'est imparti ne me le permet pas.
Désormais, pour combler des déficits créés par des baisses d'impôts sur les plus hauts patrimoines, par des diminutions de cotisations sociales, et ainsi de suite, on demande aux Français de faire des efforts tout en refusant de mettre à contribution celles et ceux qui disposent des revenus et des patrimoines les plus élevés.
Ayons la lucidité et l'honnêteté de le dire : les dépenses de santé ne diminueront pas. L'allongement de l'espérance de vie est une bonne nouvelle, mais le vieillissement démographique entraîne nécessairement une hausse des dépenses.
Il convient donc de trouver de nouvelles ressources. Nous avons fait des propositions en ce sens, mais vous les avez systématiquement refusées. Et ce refus accélère la logique de privatisation et de financiarisation de notre système de protection sociale, déjà à l'œuvre.
Soyez-en certains : nous combattrons résolument cette évolution.
M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.
M. Laurent Somon. Madame la ministre, ce n'est pas parce que le Gouvernement a renoncé à l'article 49.3 que nous renoncerons à la motion tendant à opposer la question préalable.
Nous estimons que le projet de loi de financement de la sécurité sociale, tel qu'il est issu de l'Assemblée nationale, n'est pas un bon budget. Tout le monde, me semble-t-il, le reconnaît. Je ne comprendrais donc pas que, sur telle ou telle travée, on ne vote pas cette motion.
Le parti socialiste nous donne des leçons sur l'Ondam. Il était sous-estimé, nous en avons tous convenu. Pourtant, je me rappelle que, sous le mandat d'un certain président de la République, l'Ondam a été fixé, pendant des années, à 1,8 %, alors que l'on savait pertinemment que les dépenses augmentaient, dans les faits, de 3 % ou de 4 % par an...
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. C'est vrai !
M. Laurent Somon. Il me semble difficile de donner des leçons aujourd'hui, lorsque l'on n'a pas fait mieux hier ! (Protestations sur des travées du groupe SER.)
En outre, le Premier ministre avait annoncé que la discussion aurait lieu au Parlement et que nous voterions sur le texte qui en résulterait. Or, madame la ministre, vous n'avez pas discuté avec le Sénat. Vous n'avez discuté qu'avec le groupe socialiste de l'Assemblée nationale, particulièrement avec M. Faure.
M. Laurent Somon. Nous n'avons pas eu ici les discussions que le Sénat était en droit d'attendre.
Par conséquent, nous allons voter la motion tendant à opposer la question préalable. Les choix que vous avez faits ne sont pas les bons.
Il n'y a ni cap ni capitaine, or il appartient au Gouvernement de donner des orientations. Renoncer ou du moins reporter la réforme des retraites est un échec, car le Président de la République s'était justement engagé à maintenir cette réforme ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour explication de vote.
Mme Anne-Sophie Romagny. Comme l'a souligné Olivier Henno, cette motion n'est ni un renoncement ni une esquive.
Manifestement, ce PLFSS ne convient à personne, pas même aux socialistes, puisque nous venons d'entendre Mme Rossignol nous expliquer qu'ils n'étaient pas satisfaits de ce texte non plus. C'est la nouvelle de la journée ! Voilà la preuve que ce budget ne plaît à personne, puisqu'il était pourtant censé convenir particulièrement aux socialistes. Tout le monde devrait donc être d'accord pour voter cette motion.
M. Patrick Kanner. Vous avez refusé le compromis !
Mme Anne-Sophie Romagny. Madame la ministre, vous avez dit être prête à siéger avec nous nuit et jour, s'il le fallait, pour achever l'examen de ce texte. Nous l'avons fait : nous avons travaillé nuit et jour, pendant soixante-sept heures, pour que la commission mixte paritaire le rejette finalement en quinze minutes !
Ce n'est donc pas parce que nous ne voulons plus travailler que nous voterons cette motion : au Sénat, nous savons travailler avec sérieux. Mais nous le voyons bien : aujourd'hui, nous sommes dans une impasse. Il faut donc en tirer les leçons. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. La première marche que nous avons ratée, malheureusement, c'est la première lecture du PLFSS.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, il n'y a pas eu de vraies discussions, de vrais compromis. Ces derniers n'étaient sans doute pas possibles : est-ce parce que les demandes de la gauche étaient trop fortes ? ou bien parce que la position de la droite était trop rigide ? Peut-être est-ce dû un petit peu aux deux…
Si nous avions su trouver un compromis, faire preuve d'un petit peu plus de souplesse, nous aurions donné une chance à la CMP d'être conclusive et nous aurions évité de donner le dernier mot à l'Assemblée nationale. Nous savions tous très bien ici – j'y insiste : tous – ce qui allait se passer. Dès lors pourquoi jouer maintenant les Calimero, en reprochant au Gouvernement, pour la droite, d'avoir parlé avec la gauche ou, pour la gauche, de ne pas l'avoir suffisamment écoutée ?
Mes chers collègues, en quoi est-ce choquant qu'un Gouvernement, particulièrement dans les conditions politiques actuelles, essaie de parler avec tout le monde ? Songez au contexte qui prévalait il y a quatre-vingts ans : les difficultés n'étaient pas moindres, mais nos prédécesseurs ont su les surmonter pour créer la sécurité sociale. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
M. Martin Lévrier. Compte tenu des difficultés que connaît le pays actuellement, sur le plan politique notamment, le débat aurait mérité de prendre un peu plus de hauteur.
Il est encore temps ; c'est pour cela que je vous invite à ne pas voter cette motion.
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 117 :
| Nombre de votants | 343 |
| Nombre de suffrages exprimés | 288 |
| Pour l'adoption | 182 |
| Contre | 106 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 est rejeté.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures dix-neuf, est reprise à onze heures vingt.)
M. le président. La séance est reprise.
2
Loi de finances pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
SECONDE PARTIE (suite)
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale (projet n° 138, rapport n° 139, avis nos 140 à 145).
Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Culture
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Culture ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Éblé, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le montant global des crédits demandés pour la culture pour 2026 s'élève à 3,7 milliards d'euros, soit une diminution de 292 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 170 millions d'euros en crédits de paiement (CP) par rapport à 2025.
Les crédits de la mission ont été relativement stables entre la loi de finances initiale pour 2024 et celle pour 2025, grâce à l'adoption d'amendements au Sénat qui ont été conservés par la commission mixte paritaire. L'épisode de ce fameux amendement « patrimoine » ne devrait malheureusement pas se reproduire cette année…
Je rappelle que soixante-douze opérateurs sont rattachés à la mission « Culture ». Le total de leurs budgets s'élève à 2,5 milliards d'euros. Il s'agit aussi bien de grands établissements parisiens que de petits opérateurs implantés en région.
Les opérateurs du programme ont la particularité de bénéficier d'un taux élevé de ressources propres, dans la mesure où il s'agit bien souvent d'établissements accueillant un public qui paie son entrée.
Ainsi, le montant cumulé de leurs ressources propres atteignait 1,2 milliard d'euros en 2024, une somme à peu près équivalente à celle qu'a versée l'État, qui a financé ces établissements à hauteur de 1,3 milliard d'euros.
J'en viens aux crédits du programme 175, « Patrimoines ». Inspirés par l'actualité, de nombreux amendements portent sur le renforcement des moyens consacrés à la sécurité dans les musées.
D'autres amendements portent plus spécifiquement sur le musée du Louvre.
Je voudrais m'y arrêter quelques instants : au-delà des enjeux de sécurité, que nous avons tous été amenés à constater, le musée doit faire face à de très nombreux défis à court et à moyen terme.
Le budget du Louvre se caractérise par un poids assez faible des financements publics dans son budget : ils n'ont représenté que 28 % de ses recettes en 2025. Cette proportion est d'ailleurs en constante diminution. La part des recettes propres de l'établissement, qui doit s'élever à 68 % en 2026, est l'une des plus élevées parmi les opérateurs concernés.
En conséquence, le grand projet de refonte du musée, qui doit être mis en œuvre d'ici à 2034, dénommé Louvre - Nouvelle renaissance, devrait être en grande partie financé sur ses recettes propres. L'État ne devrait l'abonder qu'à hauteur de 10 millions d'euros par an.
Ce projet vise à accueillir les spectateurs dans de meilleures conditions et à mieux protéger les œuvres. La fréquentation du musée est en effet stable depuis une dizaine d'années : il accueille environ 9 millions de visiteurs par an. Ce nombre ne peut plus augmenter, en raison de l'instauration de quotas. En conséquence, l'augmentation de 8 millions d'euros des recettes liées à la billetterie, entre 2024 et 2025, découle en grande partie de la hausse des tarifs d'entrée.
J'en viens au sujet plus large de la mise en place de tarifs différenciés pour les visiteurs hors Union européenne, qui sera expérimentée à partir de janvier prochain dans les établissements patrimoniaux les plus fréquentés.
En 2023 et en 2024, le nombre de visiteurs accueillis par l'ensemble des opérateurs du programme 175 a atteint 44 millions. Depuis 2022, le nombre de visiteurs a crû de 13 %. Si ces chiffres constituent une bonne nouvelle et témoignent de la vitalité de l'intérêt du public pour notre patrimoine, une fréquentation élevée met également les établissements sous tension.
Les hausses tarifaires dans les quatre monuments les plus fréquentés devraient permettre de dégager plus de 23 millions d'euros de recettes supplémentaires dès 2026. Rien que pour le Louvre, cette augmentation devrait rapporter plus de 15 millions d'euros.
Un tel mécanisme existe déjà dans de nombreux pays. Devant le besoin criant d'investissements, nous ne devons pas nous priver de ce levier. De ce point de vue, il me semble, à titre personnel, que le budget n'est pas à la hauteur des enjeux. Les crédits de l'action n° 01, « Monuments Historiques et patrimoine monumental », devraient diminuer de 34 % en AE et de 21 % en CP par rapport à 2025.
Ces diminutions sont souvent problématiques, parce que la plupart des travaux s'inscrivent dans la durée. Certains ne s'achèveront que bien plus tard et supposent la mobilisation de moyens considérables.
Je pense notamment au schéma directeur du château de Fontainebleau : les crédits qui y sont alloués baisseront de près de 4 millions d'euros l'année prochaine, alors que les besoins d'investissement sont continus. N'oublions pas, madame la ministre, que la problématique est d'améliorer la sécurité et la sûreté de ce monument.
Les réductions de crédits prévues pour 2026 devraient concerner les dépenses déconcentrées et les opérations prévues dans des monuments en région. Si les effets de la hausse consentie en 2025 devraient continuer de se faire sentir, grâce à l'engagement des moyens prévus en 2025, la diminution des AE en 2026 est susceptible d'avoir des conséquences sur les travaux prévus les années suivantes. Comme de nombreux amendements ont été déposés sur ce sujet, nous aurons, mes chers collègues, l'occasion d'en débattre dans quelques instants.
En conclusion, je rappelle que la commission des finances propose d'adopter les crédits de la mission.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais d'abord revenir sur les moyens globalement accordés à la culture dans ce projet de loi de finances.
L'année 2026 devrait connaître la première baisse de crédits enregistrée depuis de nombreuses années.
La stabilité observée entre 2024 et 2025 s'inscrivait en effet dans une trajectoire de progression des crédits depuis plusieurs années. Je rappelle ainsi que, depuis 2022, les crédits de la mission ont augmenté de 105 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 136 millions d'euros en crédits de paiement.
Plus de 1 milliard d'euros sont prévus pour le patrimoine en 2026, et autant pour le spectacle vivant. En particulier, les crédits consacrés au spectacle vivant ne diminuent que de 0,7 % en AE et de 3,25 % en CP par rapport à 2025.
Plusieurs postes budgétaires bénéficient de l'ouverture de nouveaux crédits : 45 millions d'euros, par exemple, seront alloués à la rénovation du Palais de Tokyo. Les moyens du plan Mieux produire, mieux diffuser, dont l'objectif est d'inciter à davantage diffuser les spectacles, continuent eux aussi d'augmenter, pour la troisième année consécutive.
Je souhaite maintenant revenir plus précisément sur les moyens alloués, dans ce projet de loi de finances, à l'éducation artistique et culturelle (EAC) ainsi qu'à l'enseignement supérieur culturel.
Nous avions alerté l'année dernière sur la situation d'Universcience, connue également sous le nom de Cité des sciences et de l'industrie de la Villette. L'établissement devrait recevoir 120 millions d'euros de subventions de l'État en 2026, ce qui en fait le premier opérateur de la mission, loin devant l'Opéra de Paris et le musée du Louvre.
Les ressources propres de la Cité sont limitées : seulement 20 millions d'euros en 2024. Cette année-là, la fréquentation du site était encore largement inférieure à celle de 2019, contrairement à ce qui s'est produit pour les autres opérateurs de la mission.
En parallèle, l'établissement fait face à un lourd besoin en investissement. Une première estimation faisait état d'un besoin supérieur à 1 milliard d'euros pour les dix prochaines années. Ce chiffre ahurissant – cela donne le vertige – a entraîné le déclenchement d'une mission de trois inspections générales, encore en cours, qui devrait permettre de dégager un horizon de travaux plus réaliste.
Se pose également la question de la réimplantation d'Universcience au Grand Palais. L'établissement a déjà engagé 20 millions d'euros de travaux, alors que la situation est aujourd'hui gelée par la tutelle et que la réouverture du Palais de la découverte a été reportée sine die. Madame la ministre, la tutelle doit prendre une décision rapide concernant l'achèvement du chantier, sous peine de fragiliser encore plus Universcience.
J'en viens maintenant au pass Culture.
Le PLF prévoit une dotation de 127,5 millions d'euros pour le volet individuel du dispositif. Le montant prévu dans le projet de loi de finances pour 2025 était de 210,5 millions d'euros, mais la commission mixte paritaire avait réduit ces crédits. L'économie supplémentaire prévue en 2026 s'élève à 43 millions d'euros par rapport à ce qui avait finalement été adopté en loi de finances pour 2025.
Le pass Culture a été complètement réformé en février dernier. Il est désormais recentré sur les jeunes de 17 et 18 ans et son montant est ramené de 300 à 150 euros par personne. Le bénéfice n'est toujours pas accordé sous condition de ressources, même si une bonification est prévue pour les jeunes les plus en difficulté. Cette réforme n'atteindra son plein effet budgétaire qu'en différé, puisque les jeunes qui acquièrent des droits au pass Culture peuvent ensuite les mobiliser pendant les trois années suivantes.
Plusieurs amendements, dont celui de la commission des finances, portent sur ce sujet. Nous allons avoir un débat sur la pertinence de la part individuelle dans quelques minutes, je n'irai donc pas plus loin à ce stade.
J'en viens maintenant à l'éducation artistique et culturelle proprement dite.
Les moyens prévus au programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » sont stables par rapport à 2025. De leur côté, les montants figurant au programme 131 « Création » doivent être mis en regard de l'effort global en faveur de l'éducation artistique et culturelle.
La Cour des comptes indique, dans un récent rapport, que l'effort public consacré à l'éducation artistique et culturelle s'est élevé en 2023 à 3,5 milliards d'euros, dont 3 milliards d'euros de la part de l'État et environ 600 millions d'euros des collectivités territoriales. Nous ne devons pas perdre cet aspect de vue lors des débats que nous allons avoir dans quelques instants.
Ce budget n'est pas parfait, mais il protège autant que possible les créateurs et les opérateurs du patrimoine et du spectacle vivant. La commission des finances propose par conséquent d'adopter les crédits de cette mission.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sabine Drexler, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'année 2026 marquera une rupture dans le financement des patrimoines. Après une progression constante entre 2017 et 2025, le programme 175 prendra sa part de l'effort d'économies visant au redressement des comptes publics.
La baisse de crédits conduira au lissage des grands projets et au report de nouvelles opérations d'investissement ; elle touchera fortement les opérateurs. Devant ce tableau d'ensemble, la commission de la culture appelle l'attention du Sénat sur plusieurs points.
D'abord, l'effondrement des crédits des monuments historiques se traduira par un recul de l'enveloppe d'intervention des directions régionales des affaires culturelles (Drac) et du fonds incitatif et partenarial (FIP), entraînant un report des chantiers dans les territoires.
Cette situation sera subie, en premier lieu, par les petites communes, qui concentrent la majorité des monuments sans disposer des moyens nécessaires à leur conservation. Le ralentissement des chantiers aura également un impact sur les métiers du patrimoine, qui constituent un tissu de petites entreprises, dont les emplois contribuent à la vie économique et à l'attractivité des territoires.
Je regrette par ailleurs que, faute de convergence interministérielle et peut-être d'un volontarisme suffisant, l'adaptation du diagnostic de performance énergétique (DPE) aux spécificités du patrimoine bâti soit encore une fois reportée.
La commission considère plus largement qu'en matière patrimoniale l'effort budgétaire ne pourra en réalité jamais être à la hauteur des besoins, tant le mur d'investissement qui se profile est important. L'actualité récente nous en offre des exemples frappants, qu'il s'agisse du palais du Louvre ou de l'aile François Ier du château de Chambord.
Ce difficile constat appelle à engager une réflexion visant à changer de paradigme. Plusieurs pistes ont récemment émergé, que ce soit autour de l'usage partagé des édifices religieux, de la mise en place d'un National Trust ou de la péréquation assurée par le Centre des monuments nationaux.
À ce titre, nous avons été interpellés par la situation du domaine de Chambord, dont les recettes couvrent l'intégralité du fonctionnement mais ne le prémunissent pas contre de fortes difficultés en matière d'investissement, et par celle de l'établissement public du Mont-Saint-Michel, qui remet en question l'affectation des recettes de l'abbaye, alors que le site exige d'importants investissements.
En ce qui concerne les crédits de l'ingénierie patrimoniale, dont nous saluons la préservation, la commission de la culture s'inquiète de la situation des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) et plaide pour la mise en œuvre des mesures d'urgence préconisées par la commission des finances.
Pour ce qui est des musées, le recul proposé ne nous paraît pas tenable, compte tenu de leur vulnérabilité face aux menaces pesant sur leur sûreté. Sur ma proposition, la commission a adopté un amendement visant à abonder à hauteur de 30 millions d'euros le fonds de sûreté annoncé par Mme la ministre.
Sur l'archéologie préventive, enfin, alors que l'année qui s'achève a été marquée par plusieurs mouvements sociaux dans la profession, je regrette que la concertation qui devait être menée sur les services des collectivités territoriales n'ait pas encore eu lieu.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !
Mme Sabine Drexler, rapporteur pour avis. La commission de la culture a, en conséquence, émis un avis favorable, quoique très réservé, sur les crédits du patrimoine, afin de permettre l'adoption de l'amendement sur le fonds de sûreté des musées. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Karine Daniel, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances intervient à un moment charnière pour le secteur culturel, marqué par un repli inédit des budgets locaux.
Ce moindre engagement des collectivités, souvent contraint, parfois choisi, ouvre une brèche dans le pacte de coopération culturelle, dans sa dimension aussi bien financière qu'institutionnelle. La commission de la culture juge cette évolution préoccupante ; elle ne sera pas sans conséquence sur la diversité de l'offre artistique et sur l'équité d'accès à la culture dans les territoires.
C'est dans ce contexte de fragilisation du financement public de la culture que l'État décide, à son tour, d'infléchir son soutien. La baisse de 34 millions d'euros des moyens consacrés à la création en 2026 constitue un nouveau coup dur pour un secteur déjà éprouvé par des crises successives et dont le modèle économique est arrivé à un point de rupture.
Deux sujets nous inquiètent particulièrement.
Le premier est la diminution de 18 millions d'euros des crédits déconcentrés. Conjugué à la baisse des subventions des collectivités, cet affaiblissement de la capacité de soutien des Drac fait figure de double peine pour les acteurs culturels dans les territoires.
Le second est la sous-budgétisation chronique du fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps). Certes, sa pérennisation pour trois années supplémentaires est une bonne nouvelle, mais la question de son réabondement à hauteur des besoins demeure sans réponse.
Alors que le budget de la création se voit ainsi affaibli, la commission déplore une action ministérielle fragmentée, qui empile des dispositifs et saupoudre des crédits. Or les défis du secteur ne sont pas seulement budgétaires : ils requièrent une politique publique structurante, offrant visibilité et lisibilité aux acteurs culturels.
La situation de l'enseignement supérieur public artistique nous préoccupe tout autant. Malgré la relative stabilité de leur dotation, les écoles d'art et les écoles d'architecture sont toujours confrontées à d'importantes difficultés structurelles. Nous ne voyons toujours pas venir le plan global de réforme des écoles territoriales annoncé en mars 2024. Si nous partageons l'objectif de hausse des effectifs des écoles d'architecture d'ici à 2030, nous n'en voyons aucune traduction budgétaire dans ce projet de budget.
Enfin, la politique d'éducation artistique et culturelle, dont notre commission déplore régulièrement les carences, ne profite même pas des économies dégagées sur la part individuelle du pass Culture. Le pass maigrit, mais il fait toujours figure de totem.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission se dit défavorable à l'adoption des crédits de la création, de la transmission des savoirs et de la démocratisation de la culture. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Organisation des travaux
M. le président. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique, pour la bonne information de tous, que 49 amendements sont à examiner sur cette mission.
La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures trente. Compte tenu de l'organisation de la journée, nous pourrions prévoir trente minutes de discussion supplémentaire pour terminer son examen aux alentours de quinze heures cinquante, afin de commencer l'examen de la mission « Justice ».
Au-delà, conformément à l'organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission serait reportée à la fin des missions de la semaine.
En outre, la conférence des présidents réunie mercredi 3 décembre dernier a décidé que, lorsque le nombre d'amendements déposés ne paraît pas pouvoir garantir leur examen serein dans les délais impartis, les temps de parole seraient fixés, sur proposition de la commission des finances, à une minute.
En ce qui concerne la présente mission, même avec les marges que nous avons dégagées, le nombre d'amendements à examiner rapporté à la durée dont nous disposons aujourd'hui nous conduit à devoir observer un rythme de 35 amendements par heure, ce qui est élevé.
Aussi, afin de nous donner toutes les chances de terminer aujourd'hui l'examen de cette mission et en application de la décision de la conférence des présidents, les durées d'intervention seront fixées à une minute.
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