M. Pierre-Alain Roiron. C'est réussi !

M. Thierry Cozic. En l'espace d'un an, nous avons eu droit à trois chutes de Premier ministre, à des gouvernements d'une durée de vie de moins de quatorze heures et à des demandes de démission du Président de la République en cascade !

M. Xavier Iacovelli. À cause de qui ?

M. Thierry Cozic. Et nous avons une coalition censée représenter la stabilité qui vole en éclats en un tweet. C'était bien la peine de barrer la route à la gauche… (M. Olivier Paccaud s'esclaffe.)

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C'est la gauche qui s'est barrée !

M. Thierry Cozic. … pour donner un aussi piètre spectacle, alimenté aujourd'hui par une droite sénatoriale plus soucieuse de son positionnement partisan que de l'intérêt des Françaises et des Français !

Le recours à la loi spéciale, dont la durée de mise en œuvre dépendra des événements politiques de la rentrée, est simplement l'aveu législatif du fait que le Gouvernement, dans lequel il y a – je le rappelle – six ministres LR, est minoritaire et qu'il ne peut donc pas avoir de majorité sur un budget macroniste.

Pour mémoire, l'an dernier, la loi spéciale avait duré six semaines. Je sais que d'aucuns sont favorables à ce que ce texte ait une durée de vie supérieure – je pense notamment à Laurent Wauquiez, pour ne pas le citer –, car un tel texte effacerait de facto tous les nouveaux impôts et bloquerait toute hausse de dépenses de l'État. (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.) C'est exactement la ligne défendue par les députés DR, mais je sais que la droite est responsable… Elle l'a d'ailleurs prouvé en aggravant le déficit. (Sourires sur les travées du groupe SER.) De plus, Laurent Wauquiez est trop éloigné des petits calculs politiciens pour s'adonner à un tel jeu. (Sourires sur les mêmes travées.)

M. Loïc Hervé. Il n'est pas sénateur !

Mme Christine Lavarde. Il n'est pas ici !

M. Christian Cambon. Les socialistes n'y sont pour rien, évidemment…

M. Thierry Cozic. C'est pour cela que je rappelle à ceux qui seraient tentés par une telle voie que la loi spéciale est très bloquante pour un très grand nombre de politiques publiques ; je pense à toutes celles qui passent par des dotations d'investissement discrétionnaires, comme la recherche, l'économie, le logement. Surtout, elle est très bloquante pour les dotations d'investissement aux collectivités territoriales.

Car ce sont encore une fois les collectivités territoriales qui feront les frais d'une telle situation. Les maires, les présidents de département et de région verront leurs capacités amputées, leurs projets retardés, parfois abandonnés ! (Mme Sophie Primas s'exclame.)

Derrière les lignes budgétaires gelées, il y a – je tiens à le souligner – des écoles qui ne se rénovent pas, des transports qui n'avancent pas, des logements qui ne se construisent pas. Voilà la réalité très concrète de cette loi, que l'on qualifie pudiquement de « loi spéciale » !

Pour revenir à l'actualité nationale, je rappelle qu'à l'heure où la Russie se fait de plus en plus menaçante, il est impérieux d'augmenter les moyens de la défense. Or, avec cette loi spéciale, nous pouvons dire adieu aux 6,7 milliards d'euros de crédits supplémentaires prévus par le ministère des armées (Mmes Marie-Claire Carrère-Gée et Sophie Primas s'exclament.), ce qui poserait un énorme problème pour assumer le paiement des investissements lancés les années précédentes. Tous les nouveaux projets d'investissement seraient également gelés.

Vous l'aurez donc compris, cette loi spéciale, que nous voterons, n'est qu'une rustine et doit aboutir à la rentrée à la reprise des négociations sur le budget.

C'est de ces négociations que je souhaite que nous parlions désormais.

Car, alors que la majorité sénatoriale a déjà soigneusement empilé les chiffons rouges…

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Aucun !

M. Thierry Cozic. … sous le nez du Premier ministre – durcissement de l'aide médicale de l'État, passage à trois jours du délai de carence pour les fonctionnaires, non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, mais aussi suppression de la contribution exceptionnelle sur les grandes entreprises, réécriture d'articles sur les holdings et de l'impôt sur la fortune immobilière pour en éviscérer le rendement –, il ne faut pas croire qu'au nom de la sacro-sainte stabilité, nous serons enclins à accepter n'importe quoi.

M. Olivier Paccaud. Négociation ou chantage ?

M. Thierry Cozic. Nous avons de nombreuses questions en suspens.

La première est politique. Comment comptez-vous maintenir un semblant de cohésion entre votre bloc central avec Les Républicains, alors que M. Retailleau s'est érigé en premier procureur de votre gouvernement, qu'il a validé, puis quitté de manière pour le moins colérique ? (Mme Marie-Carole Ciuntu proteste.)

La deuxième est donc plus juridique. Au mois de janvier, nous allons reprendre les débats, mais, entre la règle de l'entonnoir et le principe de non-rétroactivité de la loi fiscale, comment allez-vous nous garantir des marges de manœuvre budgétaires sur la partie recettes ?

Plus concrètement, comment allez-vous corriger une copie qui divise par deux, en la ramenant de 10 milliards d'euros à 5 milliards d'euros, la contribution demandée aux plus aisés de notre pays par rapport au budget Barnier de l'an dernier ? C'est votre capacité à répondre sérieusement à ces questions qui conditionnera l'adoption d'un budget juste, équitable et sérieux pour 2026.

En attendant et en responsabilité, nous voterons en faveur de ce projet de loi spéciale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Madame la présidente, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, l'urgence ne saurait tenir lieu d'amnésie démocratique. Si nous en sommes là aujourd'hui, c'est parce qu'un choix clair a été fait depuis 2024, celui de gouverner contre le verdict des urnes, celui d'imposer des projets minoritaires, socialement rejetés et chaque jour plus illégitimes dans le pays. Contre vents et marées, ce gouvernement, comme ceux qui l'ont précédé, défend bec et ongles le projet de société ultralibéral du président Macron, promouvant une société où les plus riches vivent cachés, mais heureux, pendant que l'immense majorité supporte les privations.

Cette fracture démocratique s'est manifestée avec éclat lors de l'échec de la commission mixte paritaire, vendredi dernier : des forces politiques battues aux élections s'y sont retrouvées en situation de décider, pour finalement ne rien décider. Cet épisode ne dit pas seulement l'échec d'une méthode ; il révèle surtout un divorce entre légalité institutionnelle et légitimité démocratique.

Quand même ! Un budget soutenu par 8 % des Français ?

M. Francis Szpiner. C'est la démocratie.

M. Pascal Savoldelli. L'assise majoritaire du socle politique que vous invoquez n'a jamais existé, ni dans le pays ni à l'Assemblée nationale. Elle n'est apparue qu'à huis clos ou lorsqu'elle fut artificiellement reconstituée à coups de 49.3.

Ce sont des choix politiques minoritaires – ceux des rabots aveugles, couplés à des budgets sans recettes –, encouragés à l'extrême par la majorité sénatoriale, qui nous conduisent dans cette crise.

La majorité sénatoriale a par exemple accordé 6 milliards d'euros d'allègements ciblés aux grandes entreprises, aux holdings patrimoniales et aux hauts patrimoines. Mais, mes chers collègues de la majorité sénatoriale, qui dans le pays vous l'a demandé ? Quelle revendication avez-vous traduite politiquement par de tels votes dans cet hémicycle ? J'insiste : qui vous a fait cette demande ? (M. Thomas Dossus renchérit.) Personne, ou presque !

Dans ce contexte, la loi spéciale apparaît comme le seul recours face à votre échec politique, un échec estampillé « toutes droites confondues ». Ce projet de loi, nous le voterons, non par adhésion – soyez-en sûrs –, mais par responsabilité, afin de garantir la continuité de l'État et des services publics.

Je le disais au début de mon propos : pas d'amnésie politique ! Votre gouvernement a défendu un projet de budget comprenant initialement 35 milliards d'euros d'efforts visant à compenser la hausse structurelle des dépenses pour 2026. Et deux tiers de ces 35 milliards d'euros d'efforts reposaient sur le rationnement des dépenses publiques. Voilà la vérité dite !

Nous donnons l'alerte : la loi spéciale ne doit ni devenir une loi de finances initiale déguisée ni servir de prétexte à une austérité par défaut.

Vous l'avez reconnu vous-même, madame la ministre : l'an dernier, les dépenses ont reculé de 5 % entre janvier et mars. Ici se loge un choix politique opéré sans mandat du Parlement.

Ce matin, nous avons proposé une voie de sortie institutionnelle et politique : le dépôt d'un projet de loi d'urgence portant création de recettes nouvelles, décorrélé du budget. Vous savez comme moi qu'il n'y a là rien d'impossible ; vous avez pourtant qualifié cette proposition de « dangereuse ». Pour ce gouvernement, il serait dangereux de taxer les ultrariches, dangereux de simplement ouvrir un vrai débat sur la justice fiscale. Or ce n'est pas aux marchés financiers de faire la loi ni de fixer seuls l'horizon des choix collectifs.

Émile Zola écrivait : « Lorsque l'avenir est sans espoir, le présent prend une amertume ignoble. »

Le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky n'est pour sa part ni amer ni désespéré : il est mobilisé, parce qu'il existe des alternatives. Nous avons formulé 500 propositions représentant 70 milliards d'euros de recettes pour répondre aux besoins du pays. Ce que vous présentez comme dangereux, nous l'assumons comme nécessaire. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)

M. Michel Canévet. Et les économies ?

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Grégory Blanc. Madame la présidente, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, il est plus de vingt heures trente, nous sommes le 23 décembre et résonne plus fort que jamais le « tic-tac » du compte à rebours qui nous sépare du 31 décembre, date constitutionnelle limite pour l'adoption d'un budget.

M. Olivier Paccaud. C'est le son des clochettes ! (Sourires.)

M. Grégory Blanc. Les conditions n'étant pas réunies au Parlement pour qu'un tel délai soit tenu, il est nécessaire qu'une loi spéciale soit adoptée ; et nous la voterons.

Nous la voterons, car, nous en sommes convaincus, notre pays a besoin de stabilité. Il a donc besoin d'un budget, parce que, dans la situation de déstabilisation géopolitique que nous connaissons, il faut une Union européenne solide et une France assise sur un État fort.

Un État fort, qu'est-ce à dire ? C'est un État doté de finances saines, ramenant son déficit sous les 5 % du PIB en 2026 ; un État sachant investir pour l'avenir, dans les armées, évidemment, mais aussi dans les technologies du futur, et qui se montre surtout capable d'adapter concrètement nos infrastructures au dérèglement climatique ; un État qui anticipe et se donne les moyens d'aller de l'avant ; un État qui ne s'enferme pas dans une posture rabougrie.

L'heure devrait être au rassemblement des forces et à la cohésion du pays.

Aussi, pourquoi sommes-nous dans cette impasse budgétaire ? La question se pose.

Premièrement – nous l'avons vérifié, tous autant que nous sommes –, mal assis dans un théâtre délabré dont les portes claquent, nous assistons depuis la fin du mois d'août à une mauvaise pièce de boulevard. Le socle commun ne parvient pas à dégager une vision partagée, une direction commune. Il faut le dire simplement : ce sont vos problèmes, madame, monsieur les ministres, chers collègues du socle commun, qui ont conduit au dépôt si tardif d'un projet de budget, le 14 octobre – une première sous la Ve République. Comment pouvons-nous construire un compromis dans un calendrier si contraint et dans un tel contexte de fragmentation politique ? C'est impossible.

Deuxième raison : le refus de l'idée même de compromis. Le pays est en droit d'attendre des forces du Parlement qu'elles sachent construire des ponts plutôt que des murs. L'Assemblée nationale, depuis la dissolution de 2024, se retrouve dans une configuration d'éclatement connue de tous depuis un an. Dans cette situation, chacun pouvait espérer du Sénat qu'il joue pour deux la partition de la responsabilité : chacun pouvait espérer du Sénat qu'il rende possible les compromis, que les élus qui y siègent sachent dépasser leurs idéologies sans les renier. Un autre choix a été fait, celui de la radicalité. De ce point de vue, la copie de la majorité sénatoriale s'est avérée caricaturale.

Avec, au bout du compte, 5,3 % de déficit, et malgré des discours extrêmement musclés sur la chasse aux dépenses, la réalité est apparue aux yeux de tous : sans réforme structurelle, il n'est pas possible aujourd'hui de boucler le budget sans hausse de la fiscalité.

Or, je le dis très clairement, faisant suite aux échanges que nous avons eus en commission des finances ce matin, si le texte d'atterrissage du Gouvernement ne devait être qu'une synthèse restreinte au seul socle commun – diminution de la surtaxe Barnier d'impôt sur les très grandes sociétés, allègement de la taxe sur les holdings et de la fiscalité sur les très hauts patrimoines et, parallèlement, pression fiscale accentuée via l'impôt sur le revenu et sur les pensions de retraite –, il y aurait un gros problème : une telle « synthèse » reviendrait, au total, à faire porter l'effort sur les classes moyennes sans contribution des ultrariches.

Et si, au chapitre des dépenses, faute de réformes structurelles, puisque nous n'en avons plus le temps, l'effort portait une nouvelle fois sur l'investissement et sur la transition écologique, avec MaPrimeRénov', le fonds vert, la décarbonation de notre appareil industriel et les crédits du plan France 2030 pour variables d'ajustement, il y aurait là un deuxième gros problème, dont les répercussions politiques se diffuseraient par capillarité – ce serait mathématique.

Mme Sophie Primas. Arrêtez…

M. Grégory Blanc. Mes chers collègues, madame la ministre, monsieur le ministre, le texte du Gouvernement, non de compromis mais de consensus, faute, désormais, d'une autre issue possible, devra éviter ces deux écueils. C'est la clairvoyance et la lucidité qui nous conduisent à vous le dire, au moment où s'ouvre cette période propice à la réflexion.

Je vous souhaite à tous de bonnes fêtes de fin d'année. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER. – M. Pascal Savoldelli applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Roland Lescure, ministre. Je ferai bref, madame la présidente : la dernière fois que j'ai pris la parole au terme d'une discussion générale, j'avais peut-être été trop long, et les débats s'en étaient trouvés un peu bousculés. (Sourires.) Je serai bref, donc, pour dire deux ou trois choses.

À cette période de l'année – cela a été mentionné par un certain nombre d'entre vous –, on a tendance à faire le bilan des cinquante-deux semaines écoulées, mais aussi à commencer de se projeter vers l'année qui s'ouvre. J'ai bien conscience que ce soir nous sommes surtout revenus sur le bilan des derniers jours et des dernières semaines : nous n'avons pas encore vraiment commencé à nous projeter dans l'année à venir.

M. Rachid Temal. Nous sommes encore dans le calendrier de l'Avent !

M. Roland Lescure, ministre. Il y avait visiblement quelques comptes à régler, quelques coups à donner, peut-être, et un peu de frustration à évacuer. Pourquoi pas ? C'est de bonne guerre. Une fois que l'ensemble des – légitimes – frustrations qui ont à s'exprimer ici même aujourd'hui auront été évacuées, nous pourrons, je l'espère, passer à autre chose.

J'ai entendu quelques interventions qui visaient en quelque sorte – à la limite, je le comprends et je le respecte – à « refaire le match » de ces deux ou trois dernières semaines. Quant à moi, je ne souhaite en aucun cas le refaire. Je veux seulement vous faire part de la situation dans laquelle nous sommes aujourd'hui : un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui a été adopté, un projet de loi de finances dont la navette va se poursuivre et, dans cette perspective, une volonté réelle du Gouvernement d'avancer. Pour ce faire – d'autres solutions étaient possibles –, il vous propose, dans un premier temps, cette loi spéciale.

L'immense consensus que j'ai entendu s'exprimer autour de cette loi sur l'ensemble des travées de votre hémicycle témoigne de ce que tout le monde a envie de continuer à travailler, ce qui constitue à mes yeux un motif d'espoir.

Monsieur Canévet, la loi spéciale, ça ne peut pas durer. J'entends ce que vous dites : 50 milliards d'euros d'économies, pour un sénateur qui a passé tout l'examen du projet de loi de finances à en réclamer,…

M. Rachid Temal. Sans succès…

M. Roland Lescure, ministre.… je comprends que cela puisse faire rêver. Pour autant, tailler à la serpe 50 milliards d'euros d'économies dans tout ce qui est dépenses d'avenir, en laissant filer les dépenses de fonctionnement, avec une récession à la clef, ce n'est clairement pas une bonne manière de faire des économies, ni, d'ailleurs, de faire évoluer notre économie !

En revanche, cette loi nous donne un peu de temps, en effet, pour trouver un autre chemin.

M. Pascal Savoldelli. C'est le guide qui n'est pas bon, pas le chemin !

M. Roland Lescure, ministre. Au vu de ce que j'ai entendu ce soir, je ne suis pas sûr qu'une telle issue soit parfaitement atteignable. Mais je suis convaincu que nous pouvons y arriver, en adoptant des méthodes différentes, et à condition de travailler ensemble.

Nous avons reçu hier, avec le Premier ministre, les représentants d'un certain nombre de groupes politiques du Sénat et de l'Assemblée nationale pour évoquer les points de convergence qui existent d'ores et déjà entre les votes respectifs des deux chambres. Il nous faut continuer à travailler en entamant l'année qui s'ouvre, je l'espère, forts d'une projection un peu plus positive sur les temps à venir.

Madame Lavarde, vous connaissez la devise de Jacques Cœur : « À cœur vaillant, rien d'impossible. » Soyons tous vaillants ! Donnons-nous tous la volonté d'aboutir. Je suis sûr que nous pouvons y arriver, monsieur le rapporteur général. Là où il y a une volonté, il y a un chemin ; je ne sais plus si cette formule est de Lénine, de Mao…

M. Rachid Temal. De Mitterrand !

M. Loïc Hervé. De Kennedy !

M. Roland Lescure, ministre. … de Kennedy, de Mitterrand ou de qui que ce soit d'autre, mais je suis convaincu que nous allons y arriver. Travaillons ensemble !

Reposons-nous un peu d'ici à la reprise des travaux – nous en avons tous besoin – et faisons en sorte que la France dispose d'un budget : non pas d'un texte comme celui que vous votez aujourd'hui – ce n'est pas un budget –, mais d'un vrai budget pour la France et les Français.

Merci à toutes et à tous ; bonnes fêtes et à très bientôt, quoi qu'il arrive.

M. Rachid Temal. Ce n'est pas fini !

Mme Cécile Cukierman. À l'année prochaine !

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

projet de loi spéciale prévue par l'article 45 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi spéciale prévue par l'article 45 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
Article 2

Article 1er

Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 2026, la perception des ressources de l'État et des impositions de toutes natures affectées à des personnes morales autres que l'État est autorisée conformément aux lois et règlements.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye, sur l'article. (Protestations sur les travées du groupe SER.)

M. Vincent Delahaye. Permettez-moi de prendre la parole sur l'article, mes chers collègues : c'est un droit que nous avons, même si j'entends qu'il y a des râleurs !

M. Vincent Éblé. On sait déjà ce que vous allez dire !

M. Vincent Delahaye. C'est la deuxième fois que le Sénat s'apprête à voter une loi spéciale. Nous en avons voté une pour 2025, nous allons en voter une pour 2026 et je puis d'ores et déjà vous annoncer que nous en voterons également une pour 2027 : nul besoin d'être grand clerc ni visionnaire pour l'affirmer.

Pourquoi recourons-nous à des lois spéciales ? Chacun le sait : tout le problème vient de la dissolution de 2024, cette idée de génie du Président de la République dont la conséquence directe est qu'il n'y a plus de majorité dans le pays. (M. Olivier Paccaud opine.) Dès lors, aucune majorité ne se dégage pour voter les textes, quels qu'ils soient. (M. Aymeric Durox s'exclame.)

Nous en constatons chaque jour les effets : le Gouvernement tente un grand écart permanent, sans parvenir à l'accomplir. Je ne sais pas ce qu'a dit le Premier ministre à la presse tout à l'heure alors que nous débutions l'examen de ce projet de loi spéciale, mais il n'a certainement pas expliqué la méthode permettant de réussir un tel exercice !

En réalité, on nous demande de valider ce qui se fait depuis des années, à savoir des pratiques qui ont conduit la France dans le mur sur le plan budgétaire : l'augmentation continue de la dépense et la hausse des impôts. Sur ce terrain, la gauche excelle, mesdames, messieurs : vous l'assumez d'ailleurs pleinement.

M. Rachid Temal. Cela devient risible !

M. Vincent Delahaye. Sur les 500 propositions communistes, aucune ne vise à réduire la dépense : toutes conduisent à l'accroître et à augmenter les impôts ! (Mme Cécile Cukierman proteste.)

Or c'est l'inverse qu'il faut faire. Il faut cesser d'augmenter les impôts. Les Français n'en peuvent plus. Ils expriment clairement leur lassitude face à l'alourdissement de la fiscalité et attendent une diminution de la dépense publique. (Protestations sur des travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

Mme Cécile Cukierman. Les Français veulent des écoles et des hôpitaux !

M. Vincent Delahaye. De nombreux pays ont réussi à mener cette politique et s'en portent nettement mieux aujourd'hui.

Si nous voulons que la France s'en sorte, il faut absolument prendre cette direction. Il est dommage que l'on ne sente pas du tout cette volonté de la part du Gouvernement. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi spéciale prévue par l'article 45 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
Article 3 (début)

Article 2

Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 2026, les prélèvements opérés sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales sont évalués à 45 231 897 951 € et se répartissent comme suit :

 

(En euros)

Intitulé du prélèvement

Montant

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la dotation globale de fonctionnement

27 394 686 833

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs

4 253 232

Dotation de compensation des pertes de bases de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements

30 000 000

Prélèvement sur les recettes de l'État au profit du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

7 654 000 000

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

710 856 803

Dotation pour transferts de compensations d'exonérations de fiscalité directe locale

378 003 970

Dotation élu local

123 506 000

Prélèvement sur les recettes de l'État au profit de la collectivité de Corse

42 946 742

Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion

431 738 376

Dotation départementale d'équipement des collèges

326 317 000

Dotation régionale d'équipement scolaire

661 186 000

Dotation globale de construction et d'équipement scolaire

2 686 000

Dotation de compensation de la réforme de la taxe sur les logements vacants pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale percevant la taxe d'habitation sur les logements vacants

4 000 000

Dotation de compensation liée au processus de départementalisation de Mayotte

107 000 000

Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (communes)

187 975 518

Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (établissements publics de coopération intercommunale)

740 565 262

Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (départements)

1 204 315 500

Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (régions)

278 463 770

Dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de taxe professionnelle

214 278 401

Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires

6 822 000

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation des pertes de recettes liées au relèvement du seuil d'assujettissement des entreprises au versement transport

48 020 650

Prélèvement sur les recettes de l'État au profit de la collectivité territoriale de Guyane

27 000 000

Prélèvement sur les recettes de l'État au profit des régions au titre de la neutralisation financière de la réforme de l'apprentissage

122 559 085

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la dotation globale d'autonomie de la Polynésie française

90 552 000

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation de la réduction de 50 % des valeurs locatives de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation foncière des entreprises des locaux industriels

4 291 098 809

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation des communes et des établissements publics de coopération intercommunale contributeurs au fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) subissant une perte de base de cotisation foncière des entreprises

3 000 000

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation de la réforme de 2023 de la taxe sur les logements vacants pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale percevant la taxe d'habitation sur les logements vacants

33 366 000

Prélèvement sur les recettes de l'État en faveur des communes nouvelles

24 400 000

Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation et du lissage des pertes exceptionnelles de recettes de taxe foncière sur les propriétés bâties

3 300 000

Prélèvement sur les recettes de l'État compensant les pertes de recettes résultant du recentrage de l'assiette de taxe d'habitation sur les résidences secondaires

85 000 000

Prélèvements sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales

45 231 897 951

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, sur l'article.

M. Marc Laménie. Je suis très heureux que Vincent Delahaye soit intervenu sur l'article 1er.

Cet article 2 revêt une importance particulière, car le Sénat est la chambre des territoires. Il est donc essentiel pour nous de connaître la répartition des prélèvements opérés sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales jusqu'à l'entrée en vigueur de cette loi de finances pour 2026.

Je rappelle que cet article recense trente prélèvements sur recettes (PSR). Leur montant atteint 45,23 milliards d'euros. Le principal, chacun le sait, correspond à la dotation globale de fonctionnement (DGF), à hauteur de 27,3 milliards d'euros. Viennent ensuite le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), pour 7,6 milliards d'euros, ainsi que 4,2 milliards d'euros au titre de la compensation de la réduction de 50 % des valeurs locatives de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation foncière des entreprises des locaux industriels.

Les dotations de compensation de la réforme de la taxe professionnelle en faveur du bloc communal, des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), des départements et des régions représentent, quant à elles, 2,5 milliards d'euros. D'autres prélèvements atteignent plusieurs centaines de millions d'euros : les exonérations liées à la fiscalité locale, la dotation d'équipement des collèges, la dotation régionale d'équipement des lycées, la dotation « élu local ».

En tout état de cause, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera cet article.