Mandat d'élu local (Deuxième lecture - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi visant à encourager, à faciliter et à sécuriser l'exercice du mandat d'élu local, à la demande du Président du Sénat.

Discussion des articles (Suite)

Article 17

M. le président.  - Amendement n°89 rectifié de M. Masset et alii.

M. Michel Masset.  - La proposition de loi supprime l'accord formel du médecin pour poursuivre son mandat en cas de maladie. Mais nous devons protéger la santé de nos élus locaux ! Nous proposons donc que le médecin se prononce sur la possibilité pour l'élu d'exercer son mandat pendant son arrêt de travail.

Nous proposons également l'extension des dispositions sur les congés de paternité, maternité et d'adoption aux travailleurs indépendants et aux non-salariés agricoles.

M. le président.  - Amendement identique n°174 rectifié de Mme Doineau et alii.

M. Olivier Henno.  - La proposition de loi permet à un élu local en arrêt maladie de poursuivre son mandat, même sans avis explicite de son médecin. Pourtant, cet avis est essentiel à la protection de la santé de l'élu. Conservons une cohérence avec le droit applicable aux autres assurés sociaux. Le médecin peut autoriser, au cas par cas, certaines activités compatibles avec la guérison. C'est l'objet de cet amendement, qui étend par ailleurs les dispositions relatives aux congés de paternité, de maternité et d'adoption aux non-salariés agricoles et aux travailleurs indépendants -  c'est une question d'égalité de traitement.

M. le président.  - Amendement identique n°248 du Gouvernement.

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.  - Défendu.

M. le président.  - Sous-amendement n°264 rectifié de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure de la commission des lois.  - Rédactionnel.

Le texte permet aux élus salariés en arrêt maladie de poursuivre leur mandat, sans risque de devoir reverser leurs indemnités journalières à la sécurité sociale. Avis favorable à ces trois amendements qui étendent son bénéfice aux non-salariés agricoles et aux travailleurs indépendants. L'élu en congé maladie pourra continuer à exercer son mandat tant que le médecin ne s'y oppose pas.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Je salue la pertinence de ces amendements et du sous-amendement : avis favorable.

Le sous-amendement n°264 rectifié est adopté.

Les amendements identiques nos89 rectifié, 174 rectifié et 248, ainsi sous-amendés, sont adoptés.

L'article 17, modifié, est adopté.

Rappel au règlement

M. Guy Benarroche.  - L'article 33 de notre règlement interdit toute attaque personnelle et toute interruption lors de nos débats. Mais lors des questions d'actualité au Gouvernement, les interventions intempestives des uns et des autres m'ont empêché d'aller au bout de mon intervention. Le temps de parole de mon groupe en a été réduit.

Acte en est donné.

Discussion des articles (Suite)

Article 17 bis (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°205 de M. Benarroche et alii.

M. Guy Benarroche.  - Cet amendement rétablit l'article 17 bis afin qu'en cas de congé de maternité ou d'adoption, une élue municipale puisse recourir à un pouvoir de vote. Mon amendement n°212 a le même objet, restreint au seul congé de maternité.

Le pouvoir de vote est autorisé en cas de maladie, mais la formulation générale du code général des collectivités territoriales (CGCT) ne mentionne ni la maternité ni l'adoption. Levons toute ambiguïté !

M. le président.  - Amendement n°88 rectifié de M. Masset et alii.

M. Ahmed Laouedj.  - Un conseiller municipal ne peut donner pouvoir à un collègue pour plus de trois conseils consécutifs qu'en cas de maladie. Nous proposons de lever toute ambiguïté s'agissant des élues enceintes ou jeunes mères. Levons les freins à la participation des femmes à la vie publique !

M. le président.  - Amendement identique n°212 de M. Benarroche et alii.

M. Guy Benarroche.  - Défendu.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure.  - Le CGCT permet aux élus en congé maladie de donner pouvoir pour plus de trois séances consécutives.

L'Assemblée nationale a introduit cet article 17 bis pour viser explicitement les élues en congé maternité. Pour la commission, cela est satisfait par le droit en vigueur et nous n'avons pas connaissance de difficultés d'application.

Toutefois, dans un esprit de compromis avec l'Assemblée nationale, nous émettons un avis de sagesse sur les amendements identiques nos88 rectifié et 212. Avis défavorable à l'amendement n°205, qui étend la mesure au congé d'adoption.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - La grossesse n'est pas une maladie, au contraire.

Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois.  - C'est une belle chose de la vie !

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Certes, nous n'avons pas connaissance de difficultés - mais c'est une clarification, et cela favorise une forme d'entente cordiale avec l'Assemblée nationale. Avis favorable.

M. Guy Benarroche.  - Je remercie Mme la ministre de son avis favorable et la rapporteure de son avis de sagesse. Mais pourquoi la commission refuse-t-elle d'étendre la disposition à l'adoption ?

Mme Lana Tetuanui.  - En Nouvelle-Calédonie, comme en Polynésie française, les élus ne disposent d'aucune couverture sociale. Or ce sont des agents de l'État et leurs indemnités sont alignées sur le droit commun. Il est grand temps de lever cette ambiguïté et que nos élus communaux bénéficient, eux aussi, d'une couverture sociale.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - La Polynésie française est régie par l'article 74 de la Constitution. À chaque fois que nous adoptons des dispositions générales, nous prévoyons leur adaptation aux collectivités d'outre-mer. Nous étudierons avec attention le point que vous évoquez.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure.  - Je tiens à vous rassurer : nous avons pris soin d'étendre toutes les dispositions envisagées par cette proposition de loi à la Polynésie française.

Mme Patricia Schillinger.  - Je ne comprends pas, madame la rapporteure, vos réticences sur l'adoption.

L'amendement n°205 n'est pas adopté.

Les amendements identiques nos88 rectifié et 212 sont adoptés et l'article 17 bis est rétabli.

Article 18

Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois .  - La question de la prise illégale d'intérêts soucie les élus, qui ne doivent pas être poursuivis lorsqu'ils agissent pour l'intérêt public.

Permettez-moi de vous éclairer sur les effets réels des deux amendements de la commission. Le dispositif qui résulterait des articles 18 et 18 bis A tels qu'amendés par les rapporteurs traiterait trois situations d'élus.

La première situation concerne les élus membres de deux collectivités territoriales -  ou d'une collectivité et d'un groupement de collectivités. Quand la première collectivité se prononcera sur une affaire intéressant la seconde, le seul fait que l'élu siège aux deux n'entachera pas -  en soi  - d'illégalité la délibération. Il n'y aura donc ni conflit d'intérêts ni prise illégale d'intérêts.

Deuxième situation : l'élu est membre d'une collectivité territoriale et d'un organisme public ou privé, mais il ne touche ni rémunération ni avantage particulier. Sa participation à une délibération de la première collectivité concernant la seconde structure ne sera pas considérée comme illégale de ce seul fait. Il n'y aura donc pas d'obligation de déport ni de risque de prise illégale d'intérêts.

La loi prévoira toutefois un cas précis de déport obligatoire, quand une des structures est candidate à un marché public de l'autre : l'élu ne pourra alors participer ni à la commission d'appel d'offres, ni à la commission d'examen des candidatures, ni à la décision d'attribution du marché.

Troisième cas : l'élu siège dans une collectivité et dans un organisme de droit public ou privé, mais touche une rémunération -  une indemnité de fonction, par exemple  - ou un avantage particulier. Dans ce cas, le droit commun ou des dispositions spécifiques s'appliqueront.

Nous avons aussi souhaité améliorer le droit commun. Si l'intérêt poursuivi dans les deux structures est public, il n'y aura pas de prise illégale ou de conflit d'intérêts. Et si l'élu ne peut faire autrement pour répondre à un motif impérieux d'intérêt général, il sera exonéré de responsabilité pénale. Exemple : en cas de tornade, si le seul charpentier disponible pour étanchéifier le toit de l'école est un autre élu, le maire ne sera pas poursuivi.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure de la commission des lois .  - Le délit de prise illégale d'intérêts doit être mieux défini, afin de réprimer les cas avérés d'atteinte à la probité, sans mettre en cause les élus de bonne foi.

Notre amendement propose trois modifications. D'abord, il exclut les intérêts publics du périmètre de la répression pénale, ce qui mettra fin à presque toutes les poursuites litigieuses. Ensuite, il prévoit que l'intérêt en cause doit « altérer » et non plus « compromettre » l'impartialité, l'objectivité ou l'indépendance du décideur public : nous passons ainsi d'une notion potentielle à une notion effective. Enfin, nous affirmons le caractère intentionnel de l'infraction : la prise illégale d'intérêts doit avoir été commise « en connaissance de cause ».

Afin que la rédaction retenue soit inattaquable en droit, nous rappelons un certain nombre d'exemptions, qui doivent être prises en compte par les juridictions pénales ; afin d'éviter tout risque d'insécurité juridique, nous avons supprimé la rédaction adoptée en commission sur les liens affectifs susceptibles de constituer un intérêt au sens pénal.

Enfin, s'agissant de l'urgence, la notion de « motif impérieux d'intérêt général », proposée par l'Assemblée nationale, est intéressant mais son périmètre est trop large. Nous proposons que ce motif ne soit retenu que si le décideur public concerné est contraint par les circonstances, c'est-à-dire s'il n'y a pas d'autre solution que celle qui a été prise.

M. Cédric Vial .  - Merci à la commission des lois pour sa rédaction qui règle un grand nombre de problèmes.

Les élus souhaitent éviter qu'une interprétation malheureuse ne les conduise devant les tribunaux. En vertu du principe de précaution, de nombreuses collectivités demandent à leurs élus, suivant l'avis de leur déontologue, de se déporter, ce qui complique la tenue de nos assemblées.

Demeure un irritant : les notions de rémunération et d'avantage. Qu'est-ce qu'un avantage ? Être remboursé d'un frais, par exemple ? Y a-t-il une différence entre rémunération et indemnité ? Le flou perdure...

M. Pierre-Alain Roiron .  - Bien sûr, ceux qui fautent doivent être condamnés. Mais nous avons trouvé un chemin. Je me réjouis de cette avancée, tardive mais bienvenue. Les élus locaux servent leur territoire. Il ne s'agit pas de se servir de son territoire pour faire avancer ses propres intérêts !

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation .  - Cet article est essentiel pour permettre aux élus de remplir la mission pour laquelle ils ont été élus. Nous savions qu'il faudrait un texte spécial pour traiter le problème. Le Sénat a beaucoup travaillé et le rapport Vigouroux a permis d'avancer.

Je remercie la présidente Jourda et Mme Eustache-Brinio pour la clarté de leurs propos, auxquels je souscris pleinement. Il s'agit de sécuriser l'élu dans l'exercice de son mandat, mais sans le soustraire à la loi. Je remercie aussi tous les présidents de groupe pour le travail considérable et exigeant que nous avons fait ensemble. Je remercie également le Premier ministre et le garde des sceaux pour leur contribution.

Hier matin, nous n'avions toujours pas d'accord. Aujourd'hui, nous avons trouvé non pas un compromis, mais un accord exigeant, avec lequel les associations d'élus sont en phase. Merci à tous pour votre bonne volonté, sans complaisance.

M. le président.  - Amendement n°68 rectifié ter de Mme Havet et alii.

Mme Nadège Havet.  - Les exécutifs de nos collectivités territoriales doivent être sécurisés.

M. le président.  - Amendement identique n°178 rectifié bis de M. Roiron et du groupe SER.

M. Pierre-Alain Roiron.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°265 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Avis favorable à ces amendements. Merci pour ce travail collectif, notamment à ceux qui ont retiré ou rectifié leurs amendements.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Avis favorable. Je vous adresse ma gratitude républicaine pour ce travail collectif.

Les amendements identiques nos68 rectifié ter, 178 rectifié bis et 265 sont adoptés et l'article 18 est ainsi rédigé.

Les amendements nos66, 70 rectifié,81 rectifié ter, 136 rectifié ter, 209, 220 rectifié sexies,224 rectifié ter et 108 rectifié quinquies n'ont plus d'objet.

Article 18 bis A

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure de la commission des lois .  - En commission, nous sommes revenus sur certains dispositifs, en raison de leur rédaction insuffisamment aboutie. Adopter un amendement de rétablissement dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale fermerait l'article, et ces insuffisances rédactionnelles risqueraient de se retourner contre les élus. Nous avons donc sécurisé la rédaction.

Je remercie les groupes qui ont retiré leur amendement ou l'ont rectifié pour le rendre identique à celui de la commission.

L'exemption de la prise illégale et du conflit d'intérêts pour les élus qui représentent leur collectivité au sein d'un organisme extérieur repose sur un critère : cette désignation doit intervenir en application de la loi. Mais cette formulation floue pose de nombreuses difficultés.

Certains collègues ont proposé de substituer à ce critère celui de la perception d'une indemnité de fonction : c'est une idée bienvenue, mais peu sécurisante, la notion d'indemnité de fonction n'étant pas légalement définie.

Nous proposons plutôt la notion de « rémunération ou d'avantages particuliers », dont la portée est bien connue. Il n'y aura donc plus d'exigence de déport pour les délibérations relatives à l'octroi d'une aide ou d'une garantie financière. Seuls seraient maintenus, comme dans le texte de l'Assemblée nationale, les déports pour les délibérations liées à la commande publique.

Nous conservons enfin la disposition qui prévoit que le seul fait pour un élu de détenir deux mandats locaux lorsqu'une collectivité prend une délibération qui concerne l'autre ne pose pas de difficulté. Nous sécurisons la rédaction et l'étendons à toutes les strates de collectivités.

Ces évolutions sont attendues par les élus.

M. Cédric Vial .  - Nous ne pouvons pas voter sans éclaircissement. Madame la rapporteure, vous remplacez la notion d'indemnité par celle de rémunération. Mais une indemnité de fonction est-elle une rémunération, comme l'a dit Muriel Jourda ? Si oui, l'élu devra se déporter. Vous avez aussi introduit la notion « d'avantages particuliers », mais comment la définir ?

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Les élus locaux, très inquiets, attendent ce texte. Nous devons éviter toute suspicion généralisée à leur égard. Nos assemblées locales ne doivent pas se transformer en théâtres, avec des élus qui sortent un par un, de peur d'être suspectés d'un conflit d'intérêts imaginaire.

Oui, il faut éviter les conflits d'intérêts, mais aussi faciliter l'exercice des mandats. L'interdépendance des mandats est une réalité : les élus de toutes les collectivités travaillent ensemble, au service de l'intérêt général.

La probité, ce n'est pas la méfiance systématique, mais la responsabilité assumée. Nous avons besoin d'un droit clair et cohérent, qui sécurise les élus et n'en fait pas l'objet de soupçons. Prévenons les dérives, mais avec discernement.

M. le président.  - Amendement n°65 de M. Buis et du RDPI.

M. Bernard Buis.  - Je rends mon amendement identique à celui, oecuménique, de la commission.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°65 rectifié.

M. le président.  - Amendement identique n° 67 rectifié bis de Mme Havet et alii.

Mme Nadège Havet.  - Je rectifie également mon amendement pour le rendre identique à celui de la commission.

M. le président.  - Il devient l'amendement n°67 rectifié ter.

M. le président.  - Amendement identique n°82 rectifié bis de Mme Micouleau et alii.

Mme Nadine Bellurot.  - Je salue le travail réalisé et retire mon amendement.

L'amendement n°82 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°195 rectifié de M. Sautarel et alii.

Mme Nadine Bellurot.  - Je retire également celui-ci.

L'amendement n°195 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°210 de M. Benarroche et alii.

M. Guy Benarroche.  - Retiré !

L'amendement n°210 est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°222 rectifié de M. Delcros et alii.

M. Bernard Delcros.  - Je rectifie mon amendement pour le rendre conforme à celui de la commission.

M. le président.  - Il s'agit donc de l'amendement n°222 rectifié bis.

M. le président.  - Sous-amendement n°239 rectifié bis de M. Michallet et alii.

M. Cédric Vial.  - Il me semble que le dérouleur n'est pas à jour, car je ne vois plus mon sous-amendement...

Quant à ce sous-amendement n°239 rectifié bis, que j'ai cosigné, n'aurait-il pas dû tomber, l'amendement n°195 rectifié, qu'il visait à modifier, ayant été retiré ?

Le sous-amendement n°239 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°179 rectifié bis de M. Roiron et du groupe SER.

M. Pierre-Alain Roiron.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°266 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Défendu.

Avis favorable à tous les amendements rendus identiques à celui de la commission ; je remercie leurs auteurs de les avoir rectifiés.

M. le président.  - Sous-amendement n°267 de M. Vial.

M. Cédric Vial.  - Il s'agit de supprimer l'alinéa mentionnant la rémunération et les avantages particuliers. Je pense par exemple à un conseiller régional désigné pour siéger au sein d'un parc naturel régional.

Mme Cécile Cukierman.  - Par exemple...

M. Cédric Vial.  - Avec notre nouvelle règle, plus besoin de se déporter. Au sein des parcs naturels régionaux, des postes de vice-présidents sont réservés à des représentants du département ou de la région, qui toucheront une indemnité. Ainsi, ils ne pourront pas participer aux délibérations relatives audit parc : c'est idiot !

Et dès qu'un élu se fera rembourser ses frais de déplacement -  une avancée que nous avons votée hier  - , il sera considéré comme ayant reçu un « avantage particulier »...

Je n'ai pas eu de réponse, en dépit de mes trois interpellations.

M. le président.  - Votre sous-amendement devient un sous-amendement des cinq amendements identiques.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - M. Vial propose de revenir sur le critère de rémunération proposé par la commission.

Il s'agit donc de circonscrire l'exclusion du conflit d'intérêts, soit les situations dans lesquelles les élus désignés pour représenter leur collectivité dans un organisme extérieur sont exemptés de prise illégale et conflit d'intérêts du fait de leur désignation en vertu de la loi. Un consensus existe pour reconnaître que le droit actuel est insécurisant. C'est pourquoi nous proposons, à l'instar des députés, de fixer un critère lié à la rémunération, déjà prévu dans le CGCT.

La plus grande précision s'impose ici. Aujourd'hui, l'élu ne sera exempté de prise illégale d'intérêts que du fait de sa désignation. Une fois désigné, le fait de percevoir une rémunération risquerait de le placer en situation de conflit d'intérêts, et certains actes qu'il pourrait accomplir pourraient être fragilisés.

Gardons-nous d'adopter des dispositions qui donneraient aux élus un sentiment de fausse sécurité, mais en définitive se retourneraient contre eux.

Par ailleurs, s'agissant des élus qui représentent leur collectivité au sein d'une société d'économie mixte, le cadre applicable est inchangé : ils sont exemptés de prise illégale et conflit d'intérêts du fait de leur désignation au sein de ces sociétés en tant que membres ou présidents de conseil d'administration ou de surveillance.

Nous sommes donc très défavorables à votre sous-amendement.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Le Gouvernement est favorable à l'amendement de la commission et aux amendements identiques.

La complexité juridique de ces questions requiert une expertise très fine. Je salue la grande pédagogie de Mme la rapporteure.

Notre objectif est de donner aux élus locaux la possibilité d'accomplir la mission pour laquelle ils ont été désignés par leur collectivité sans se retrouver en difficulté. La convergence des analyses des uns et des autres prouve que nous l'avons atteint.

Monsieur Vial, je vous remercie pour votre vigilance, mais votre proposition aurait pour effet de réduire la protection des élus. J'y suis donc défavorable.

M. Cédric Vial.  - Madame la ministre, ce n'est pas notre premier désaccord.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Cela ne me gêne pas.

M. Cédric Vial.  - Je maintiens ma position, quitte à être battu. Je n'ai pas été convaincu, faute de clarifications sur la notion d'avantage particulier et la différence entre rémunération et indemnité. Par ailleurs, je ne vois pas dans quel cas un conseil municipal pourrait désigner un élu dans une instance en dehors de tout cadre législatif ou réglementaire.

Dans mon exemple du parc naturel régional, je maintiens que le représentant désigné par la région n'aura pas le droit de participer aux décisions autour de l'attribution de la subvention, à peine de conflit d'intérêts.

Vous dites qu'on protège les élus ; je pense, moi, le contraire. Avec mon sous-amendement, j'écarte le risque lié à la notion d'avantage particulier, qui me paraît impossible à cerner : il ne pourra y avoir conflit d'intérêts par le seul fait de la désignation.

Le sous-amendement n°267 n'est pas adopté.

Mme Cécile Cukierman.  - On en apprend tous les jours... J'ai fait preuve d'un grand calme ces derniers jours, parfois contre mon naturel, alors que nous assistions à une crispation autour de la réécriture des articles 18 et 18 bis A. Les élus nous attendent sur une forme de consensus : pas un consensus mou, mais la capacité à travailler ensemble.

La commission des lois propose des mesures qui semblent convenir à tout le monde, puisque certains se sont crus obligés de conformer leur amendement au sien plutôt que de simplement le retirer. Nous actons ainsi de nouvelles manières de travailler. Ce n'est pas grave, mais nous en tirerons les conséquences.

Chacun s'est ému de l'évolution de ce texte, adopté dans le consensus l'année dernière. Veillons à ne pas trop en faire, au risque de dégoûter celles et ceux que nous entendons servir. Nous voterons les amendements identiques. (M. Pierre Jean Rochette renchérit.)

M. Simon Uzenat.  - Sylvie Robert et moi souhaitons une précision à propos des élus siégeant au sein de sociétés d'économie mixte (SEM), de sociétés d'économie mixte à opération unique (Sémop) et de sociétés publiques locales (SPL) et qui ne sont pas rémunérés : bénéficieront-ils de la réduction de la liste des déports dans la rédaction proposée par la commission ?

M. Jean-Michel Arnaud.  - Ce débat a suscité beaucoup de tensions dans l'hémicycle, beaucoup d'interrogations aussi sur la fluidité des relations avec certaines associations représentatives d'élus, mais aussi avec le Gouvernement.

Nous avons dépassé ces difficultés en praticiens et avec le souci de protéger les élus contre un certain nombre de procédures et de risques. Notre capacité à trouver ces voies de passage fait honneur à la Haute Assemblée et à la responsabilité de chacun d'entre nous, sur quelque travée qu'il siège.

J'ajoute que la clarification demandée par M. Uzenat est nécessaire ; nous souhaitons que la ministre dissipe toute ambiguïté.

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Je salue le travail de clarification des rapporteurs. Au-delà de la légalité des délibérations des collectivités, c'est la sécurité pénale des élus qui est en jeu. Les questions de M. Vial ne sont pas purement rhétoriques : la notion d'avantage particulier n'est pas assez précise. Je ne voudrais pas que les élus soient tributaires d'une casuistique jurisprudentielle. Pourquoi ne définissons-nous pas nous-mêmes cette notion pour éclairer les juges ? Les remboursements de frais de déplacement, par exemple, sont-ils concernés ?

M. Marc Laménie.  - Je n'avais pas prévu d'intervenir, mais je rebondis sur les propos de Mme Cukierman, sans toutefois reprendre le terme « dégoûter » : veillons à ne pas casser les bonnes volontés.

Je suis élu dans un village de 170 habitants - à mon élection, j'ai été frappé par le fait que j'avais le même temps de parole que le maire de Marseille ou de Lyon ! Élus de proximité, nous sommes en première ligne. Pour voter une subvention de 50 euros à une association, si on est membre du bureau de celle-ci, il faut sortir de la salle... Mais, en pratique, les mêmes personnes sont souvent actives dans plusieurs associations. Il faut vraiment simplifier. Quant aux frais de déplacement, combien de maires prennent leur voiture et ne demandent rien ?

J'appuie la position de la commission des lois, dont je salue le travail. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe CRCE-K)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Dans les sociétés d'économie mixte, monsieur Uzenat, notre dispositif ne change rien aux règles de déport en matière de rémunérations. S'agissant des élus qui président une telle structure, nous ne remettons pas non plus en cause leur place.

Les amendements identiques nos65 rectifié, 67 rectifié ter, 222 rectifié bis, 179 rectifié bis, 266 sont adoptés et l'article est ainsi rédigé.

Les amendements nos216 rectifié bis, 217 rectifié bis et 223 rectifié n'ont plus d'objet.

Article 18 bis

M. le président.  - Amendement n°221 de Mme Florennes.

Mme Isabelle Florennes.  - Je propose de préciser qu'un élu contraint de se déporter ne doit pas être considéré comme membre en exercice pour le calcul du quorum. Restreindre la non-prise en compte pour le quorum au seul cas prévu à l'article L. 1111-16 du CGCT serait source de difficultés.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Nous demandons l'avis du Gouvernement sur cet amendement, de même que sur les deux suivants.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Retrait de l'amendement n°221 : il est satisfait par les modifications apportées à l'article 18, qui s'appliquent aux règlements intérieurs.

L'amendement n°221 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°219 de Mme Florennes.

Mme Isabelle Florennes.  - Les règles de prévention des conflits d'intérêts doivent s'appliquer aux commissions permanentes des conseils départementaux et régionaux.

M. le président.  - Amendement n°218 de Mme Florennes.

Mme Isabelle Florennes.  - Même objet que le précédent.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Si le Sénat adopte la proposition de loi, vous serez satisfaite. Retrait des amendements nos219 et 218 ?

Les amendements nos219 et 218 sont retirés.

M. Simon Uzenat.  - Il y a quelques instants, Mme la rapporteure n'a pas répondu à ma question. En ce qui concerne les SEM, Sémop et SPL, leurs modalités de contrôle sont visées par l'article 1524-5 du CGCT. Ma question portait précisément sur les élus siégeant au sein de ces structures et qui ne sont pas rémunérés. Il serait bon de clarifier leur situation assez rapidement, car de nombreux élus sont inquiets.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Les dispositions particulières aux SEM et SPL ne changent pas. Il reste une règle de déport en cas d'octroi d'aides à ces sociétés. Je vous suggère, si vous continuez d'avoir un doute, de poser au Gouvernement une question écrite.

L'article 18 bis est adopté.

Article 19

M. Simon Uzenat .  - La loi du 21 mars 2024 a conduit à un certain nombre d'avancées, mais le Sénat n'a pas obtenu gain de cause sur l'allongement des délais de prescription. Nous n'avons pas pu déposer d'amendements sur ce sujet, du fait de l'article 45 de la Constitution. Je tiens à souligner que c'est une demande récurrente des élus face au sentiment d'impunité, notamment en cas d'injure ou de menace les visant. Il est urgent d'y revenir, car c'est l'un des fléaux qui conduisent de nombreux élus à ne pas se représenter, quand ce n'est pas à démissionner.

M. le président.  - Amendement n°110 de Mme Florennes.

Mme Isabelle Florennes.  - Cet article étend à tous les élus l'octroi automatique de la protection fonctionnelle, créée par la loi du 21 mars 2024. Depuis son entrée en vigueur, de nombreuses difficultés ont été remontées : il faut donc mieux sécuriser ce mécanisme. Plusieurs corrections y ont été apportées par nos collègues députés. La rédaction de la commission des lois de l'Assemblée nationale opère ainsi certaines corrections pour les élus régionaux et départementaux, mais pas municipaux. Je propose de réparer cet oubli.

M. le président.  - Amendement identique n°258 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Amendement de coordination.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Précision pertinente : avis favorable.

Les amendements identiques nos110 et 258 sont adoptés.

M. le président.  - Amendement n°56 de Mme Senée et alii.

Mme Ghislaine Senée.  - Le GEST se félicite de l'octroi automatique de la protection fonctionnelle à tous les élus. Toutefois, un garde-fou paraît opportun, car il n'y a pas de limite à la prise en charge des frais de justice par la collectivité. Nous craignons une multiplication des procédures bâillons. Prévoyons le remboursement des frais lorsqu'un élu est définitivement condamné ou débouté dans le cadre d'une procédure l'opposant à un autre élu de la même collectivité.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Nous comprenons l'intention d'assurer le bon emploi des deniers publics, mais l'amendement semble inutile. L'élu doit déjà rembourser ces frais au titre des règles liées au retrait d'une décision créatrice de droits. Au surplus, il s'agit ici de la protection demandée par un élu victime de violences ou de menaces du fait de ses fonctions : je vois mal comment cet élu serait condamné dans une procédure l'opposant à un collègue. Avis défavorable, comme en première lecture.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Le Sénat a souhaité que tous les élus bénéficient de la protection fonctionnelle. Imaginez : vous êtes conseiller municipal et votre voisin, mécontent à la suite du changement d'horaire de la collecte des déchets, vous agresse verbalement, voire physiquement. Cet exemple illustre la pertinence d'élargir la protection fonctionnelle aux conseillers municipaux.

Vous pointez un risque d'abus. La protection fonctionnelle peut être retirée à tout moment si le maire considère que l'affaire n'a rien à voir avec le mandat. Je préfère considérer que tout élu doit être protégé par principe. Faisons confiance aux élus. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Ghislaine Senée.  - Je pense à une commune qui a engagé vingt et une procédures en diffamation... Parfois on peut faire confiance, parfois non. Reste que je retire l'amendement.

L'amendement n°56 est retiré.

L'article 19, modifié, est adopté.

Article 20

M. le président.  - Amendement n°259 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

L'amendement de coordination n°259, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 20, modifié, est adopté.

Les articles 21 et 22 sont successivement adoptés.

Après l'article 22

M. le président.  - Amendement n°188 rectifié ter de M. Rochette et alii.

M. Pierre Jean Rochette.  - En érigeant la transparence en absolu, nous avons glissé vers une société du soupçon. Publier des informations personnelles relatives à nos familles, ce n'est pas de la transparence : c'est du voyeurisme. Je suis favorable au contrôle des élus, mais ne veux pas que mes enfants soient exposés ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Les règles relatives aux personnes politiquement exposées résultent du droit européen : nous ne pouvons les modifier d'un coup de baguette magique. Retrait, sinon avis défavorable

Mme Françoise Gatel, ministre.  - « Je voudrais bien, mais je peux point », selon la formule célèbre de la bonne du curé... Ces dispositions relèvent en effet de directives européennes.

M. Pierre Jean Rochette.  - C'est nul !

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Avis défavorable.

M. Dany Wattebled.  - Quand on veut, on peut ! (M. Éric Kerrouche proteste.) J'aime bien le droit européen, mais nous sommes encore en France ! Votons cette excellente proposition.

L'amendement n°188 rectifié ter n'est pas adopté.

Article 23 (Suppression maintenue)

Article 24 bis

M. Pierre Jean Rochette .  - Mon amendement relatif aux fichés S a été déclaré irrecevable. Donc, on peut mettre en prison un ancien Président de la République alors que bon nombre de Français considèrent, à tort ou à raison, que le dossier est fragile, mais on peut être fiché S et élu ! Où est la cohérence républicaine ? (M. Thomas Dossus s'exclame.) Tous les fichés S doivent être inéligibles. Le rejet de mon amendement ne sert pas la cause des élus.

M. Thomas Dossus .  - La différence entre les situations dont vous parlez, c'est qu'un juge a pris une décision. Une décision de l'administration prise de façon discrétionnaire n'est pas comparable. Vous proposez ni plus ni moins que le retour des lettres de cachet ! (Applaudissements sur les travées du GEST et sur certaines travées du groupe SER)

M. le président.  - Amendement n°247 du Gouvernement.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Nous abordons la HATVP - je sens votre intérêt grandir... (Sourires)

Il arrive qu'à l'occasion d'une déclaration de patrimoine, les élus découvrent qu'ils sont propriétaires, qui d'un compte postal ouvert par sa grand-mère sur lequel il y a 30 euros, qui d'un terrain en indivision dans une forêt de l'Allier. « Pourquoi n'en ai-je pas été informé avant ? », se demandent-ils.

C'est pourquoi je reste favorable au pré-remplissage de la déclaration d'intérêts. Toutefois, je ne suis pas sûre que le pré-remplissage puisse être effectif d'ici aux élections de mars prochain.

N'oublions pas que les candidats ne sont remboursés de leurs frais de campagne qu'une fois la déclaration d'intérêts remplie. J'imagine au printemps prochain une question d'actualité passablement énervée : « on l'a dit, pourquoi ne l'a-t-on pas fait ? »

Je ne renonce pas à l'objectif, mais ce sera au Parlement de continuer à travailler sur le sujet en bonne intelligence avec la HATVP.

Pour l'heure, cet amendement s'inspire du principe « dites-le-nous une fois ». Pour les élus qui ont déjà rempli une déclaration d'intérêts, il n'y aura qu'un ajustement à faire, pas une nouvelle déclaration. Cela vous paraîtra sans doute insuffisant, mais ne promettons que ce que nous sommes en mesure de réaliser. Il s'agit d'un premier progrès, et la HATVP fera de son mieux pour que ce dispositif soit opérationnel dès les prochaines élections municipales.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Avis défavorable, malgré la prestation de la ministre... Cet amendement porte uniquement sur les anciens élus ; les nouveaux auront tout à faire. L'attitude de la HATVP nous agace quelque peu. Nous avons entendu ses questions, notre amendement y répond.

Mme Cécile Cukierman.  - Nous voterons les deux amendements. Dix ans après, nous aurions intérêt à nous pencher sur la révision de la loi Transparence - lorsque le temps politique sera plus calme, s'il l'est un jour. Sinon, nous continuerons de nourrir la suspicion à l'encontre des élus.

J'ai rencontré le président de la HATVP : lui aussi voudrait bien, mais peut point... (Sourires) Or toute personne déclarant du patrimoine est assujettie à la taxe foncière - même s'il s'agit d'un bien hérité d'une vieille tante. Il s'agit de savoir si nos administrations sont en mesure de compiler ces informations. (M. Pierre Jean Rochette renchérit.)

Si c'est un problème législatif, légiférons. Si c'est un problème réglementaire, que le Gouvernement fasse le nécessaire. Si c'est un problème de personnes, nous en tirerons les enseignements.

L'argument de la HATVP selon lequel le remboursement des comptes de campagne serait fragilisé est inacceptable. Je rappelle à cet égard que le remboursement est dû dès lors que le candidat fournit un récépissé de dépôt de sa déclaration - dépôt, pas validation.

M. Pierre Jean Rochette.  - Je me félicite de ce débat. En première lecture, j'avais déposé un amendement, adopté à l'unanimité malgré deux avis défavorables. Mme Cukierman a raison : l'administration française est capable de fournir les informations sur les intérêts et le patrimoine. Nous remettons en cause non pas la HATVP, mais le système de saisie. Dès qu'on oublie un centime, on nous rappelle. Il faut mettre en oeuvre enfin le pré-remplissage !

M. Pierre-Alain Roiron.  - Le pré-remplissage serait en effet un progrès. À l'époque, madame la ministre, si ma mémoire est bonne, vous n'y étiez pas défavorable.

M. Pierre Jean Rochette.  - En effet !

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Je n'ai pas changé d'avis.

M. Vincent Louault.  - Madame la ministre, vous avez fait un pas vers nous : merci. L'administration, elle, fait des petits pas quand elle le souhaite. Pour elle, le législateur va toujours trop loin, trop vite, trop fort.

J'ai fait l'expérience : en un clic, le directeur départemental des finances publiques de mon département a accès à tout mon patrimoine. Pour ma part, j'ai mis cinq mois à m'en sortir dans ma déclaration. Et le seul moyen de connaître la valeur d'une entreprise, c'est de la vendre ! Il faudrait un expert comme mon collègue Vogel pour réaliser une expertise qui me coûterait 20 000 euros... (Sourires) On marche sur la tête.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Notre amendement est plus large que celui du Gouvernement : il concerne tous les élus. Si l'amendement n°247 est adopté, celui de la commission devient sans objet. Avis défavorable à l'amendement n°247.

L'amendement n°247 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°260 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Il s'agit de décaler la mesure à 2027.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Sagesse. (« Ah » ! sur plusieurs travées ; M. Michaël Weber applaudit.)

L'amendement n°260 est adopté.

L'article 24 bis, modifié, est adopté.

Article 25

M. le président.  - Amendement n°172 rectifié de M. Bilhac et alii.

Mme Maryse Carrère.  - Être maire, c'est gérer des finances et du personnel. Nous proposons que les élus ayant accompli un mandat complet bénéficient des acquis de la VAE sans devoir produire une multitude de justificatifs ni passer devant un jury.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure.  - La VAE se fait en plusieurs étapes : dépôt du dossier, identification des compétences et certifications, examen du dossier. Votre amendement ne serait pas applicable. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Même avis.

Mme Maryse Carrère.  - Soit. Mais il faudra simplifier les procédures de VAE, longues et complexes.

L'amendement n°172 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°245 du Gouvernement.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Mon ministère est chargé d'établir la liste des compétences correspondant à l'exercice d'un mandat électif. Cela nécessite un travail interministériel avec les ministres chargés de la formation professionnelle et de l'enseignement supérieur. S'il doit y avoir équivalence de dipôle, le processus doit être sécurisé.

Cet amendement permet d'associer l'ensemble des administrations compétentes ; un travail devra être réalisé en amont avec les associations d'élus.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure.  - Avis favorable.

L'amendement n°245 est adopté.

L'article 25, modifié, est adopté.

M. le président.  - Les articles 26 et 27 ont été précédemment examinés.

Article 31

Mme Lana Tetuanui.  - L'article 38 de la Constitution donne au Gouvernement un délai pour légiférer par ordonnances.

La loi du 21 mai sur les élections municipales prévoit un nouveau mode de scrutin pour les communes de moins de 1 000 habitants. Une ordonnance est prévue pour les dispositions relatives à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française. Madame la ministre, aurez-vous le temps de la prendre ?

M. Georges Naturel.  - Il y a effectivement urgence pour les communes de Polynésie française ou de Nouvelle-Calédonie, qui sont encore des collectivités de l'État.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Le ministre des outre-mer y travaille. J'entends votre alerte et la lui transmettrai.

L'article 31 est adopté.

Article 39

M. le président.  - Amendement n°263 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Il s'agit de supprimer l'article 39, une demande de rapport sur l'Ircantec.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°263 est adopté et l'article 39 est supprimé.

Article 40 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°204 de M. Benarroche et alii.

M. Guy Benarroche.  - Rien n'est prévu pour les artisans, les commerçants, les paysans, les médecins - bref, ceux qui ne sont ni salariés, ni fonctionnaires, ni retraités. « C'est compliqué », nous dit-on, en repoussant nos amendements. Soit.

Ici, je demande un rapport sur les travailleurs indépendants. J'ai vu certaines demandes de rapport « contre-nature » aboutir, notamment quand elles sont portées par le rapporteur... L'Assemblée nationale ne s'en prive pas, d'ailleurs. Adopter ce rapport nous aidera à trouver un compromis en CMP.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Vous connaissez l'avis de la commission sur les demandes de rapport : défavorable.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Je félicite le sénateur Benarroche pour son art oratoire. Le législateur a le droit d'investiguer et de contrôler. Le Parlement peut se saisir de ce sujet : vous avez toute liberté pour obtenir des informations. Avis défavorable.

L'amendement n°204 n'est pas adopté.

L'article 40 demeure supprimé.

Intitulé de la proposition de loi

M. le président.  - Amendement n°61 de M. Roiron et du groupe SER.

M. Pierre-Alain Roiron.  - Modifions l'intitulé de cette proposition de loi. Dans sa version initiale, nous souhaitions un statut de l'élu local. Cette version ne crée pas véritablement un statut, mais encourage, facilite et sécurise l'exercice d'un mandat local. Je vous renvoie à la proposition de loi de M. Kerrouche qui visait à créer un statut d'agent civique territorial.

Rien ne serait pire que de laisser croire aux élus locaux que nous créons un statut d'élu local. Revenons à l'intitulé adopté par l'Assemblée nationale.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Avis défavorable. Les termes de « statut de l'élu local » sont une demande forte des élus locaux. Il reflète nos travaux. Je souhaite remercier les services de la commission des lois. (Applaudissements)

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Nous allons, par le biais de l'article 5, écrire dans le CGCT le terme « statut ». C'est donc que nous l'avons créé.

Éric Kerrouche avait proposé, à l'instar d'autres pays, que le maire soit un fonctionnaire d'État avec un statut particulier ; nous n'avons pas retenu cette solution. Nous pensons qu'un citoyen peut s'engager librement sans dépendre d'un parti politique. « Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément. » Les élus désignent déjà ce texte avec cette expression.

Monsieur Roiron, vous avez sans doute raison, c'est un premier pas important qui valorise l'engagement des élus. Mais il y a le sens des mots, le pouvoir des mots et le travail que vous avez accompli.

M. Vincent Louault.  - Nous ne voterons pas cet amendement, car nous tenons à cet intitulé.

Mme Cécile Cukierman.  - J'entends l'argument de nos collègues socialistes. Ne laissons pas croire que nous mettons en oeuvre un véritable statut de l'élu. De nombreux champs sont encore à investiguer.

En février 2019, lors de l'examen de la proposition de loi de Pierre-Yves Collombat, la majorité sénatoriale expliquait qu'il ne fallait pas de statut de l'élu. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, mais attention aux girouettes !

La ministre à raison : quel que soit l'intitulé de ce texte, les élus le considèrent comme une véritable avancée ; là est l'essentiel.

L'amendement n°61 n'est pas adopté.

Vote sur l'ensemble

Mme Maryse Carrère .  - Nous arrivons à la fin de l'examen de ce texte essentiel. Je remercie Mme la ministre pour le travail réalisé, vous y teniez particulièrement. Je salue également le travail des rapporteurs.

C'est un premier pas important dans la valorisation du travail des élus, mais il reste beaucoup à faire. Les normes, les tracasseries quotidiennes seront difficiles à atténuer. Les maires reçoivent désormais des circulaires de plus de soixante pages ! Avec M. Darnaud, nous avons commis un rapport au sujet du mal des maires.

M. Bernard Buis .  - Depuis hier, nous avons fait oeuvre utile pour faciliter l'exercice du mandat local. Je salue le travail de la ministre. Le RDPI salue cette étape majeure. Nous espérons que la CMP sera conclusive. Bien reconnaître les élus locaux et leur statut, c'est renforcer la République.

M. Vincent Louault.  - Bravo !

M. Pierre-Alain Roiron .  - Je félicite les rapporteurs et les administrateurs pour le travail réalisé, un travail exigeant, dans un contexte politique instable. Nombre d'élus locaux ont renoncé entre-temps.

Après un an et demi de débat, c'est un pas important, mais mesuré. Il valorise l'engagement et sécurise l'action des élus, sans les placer au-dessus de la règle commune.

Sans créer un véritable statut de l'élu local, cette proposition de loi en pose les jalons.

Le Sénat a renoncé heureusement au serment républicain des élus, qui aurait été assez mal vécu. La loyauté à la République se prouve dans l'action, pas par un rituel.

Aux articles 18 et 18 bis A, un équilibre permet de sécuriser sans déresponsabiliser, en clarifiant le champ de la prise illégale d'intérêts. La réponse est concrète, fiable et politiquement utile.

À moins de six mois des municipales, nous adressons un signal de confiance aux élus.

M. Louis Vogel .  - Quand nous avons commencé nos travaux, j'avais cité le nombre important de démissions des maires, véritable appel à l'aide de leur part. Nous avons commencé à répondre à cette interpellation. Sur le terrain, on nous demande de faire ce statut de l'élu.

Madame la ministre, je vous remercie, ainsi que les rapporteurs qui ont trouvé un chemin parmi des demandes contradictoires. C'est possible au Sénat. Au nom de mon groupe, je vous en remercie. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; Mme Marie-Do Aeschlimann applaudit également.)

Mme Cécile Cukierman .  - Je me félicite de l'aboutissement de ce texte.

Nous pouvons voir les choses de plusieurs manières. Nous pourrions dire « que de temps perdu », ou « que de soubresauts en une semaine ».

On peut aussi se dire que, pour aboutir, il faut prendre du temps, exprimer parfois des désaccords. Les choses n'avancent pas forcément au travers d'un consensus béni-oui-oui, si je puis dire.

Ce n'est pas un véritable statut, mais la maison est hors d'eau, nous pouvons commencer le travail. Madame la ministre, nous avons encore beaucoup à faire. Il y va de la protection de la démocratie locale que de permettre à chacun d'être élu et de ne plus être un élu ensuite. Sécurisons l'accès à ce très beau mandat !

M. Jean-Marie Mizzon .  - Je remercie également la ministre, mes collègues et les rapporteurs. Ce travail va apporter à beaucoup, même s'il n'apportera pas à tous.

Hier soir, je vous ai interrogée sur les élus travailleurs frontaliers, madame la ministre. Votre réponse n'était pas suffisante - et l'Europe n'est pas en cause. Il faut engager des discussions bilatérales avec nos voisins pour que les élus français qui travaillent de l'autre côté de la frontière aient le même statut que les autres élus. Sinon, plus personne ne se présentera aux élections dans ces communes remplies de frontaliers ! Le travail n'est pas fini.

M. Guy Benarroche .  - Ce texte nous permet d'obtenir des avancées considérables, malgré certains manques. La crise démocratique que nous vivons n'est pas liée au seul statut de l'élu. Elle s'explique surtout par le manque de dynamisme de l'engagement citoyen, comme le rappelait une mission d'information du Sénat. C'est aussi lié au fait que certaines procédures n'ont pas encore été développées. Je l'ai montré dans le rapport que vous m'aviez confié au titre de la délégation aux collectivités territoriales : des communes ont développé, pour leur transition environnementale, des éléments de participation citoyenne, suscitant l'engagement des habitants. Il faut réussir à raconter un récit. C'est sur cette voie qu'il faut concentrer nos efforts.

Mme Marie Mercier .  - Le Sénat avait la volonté de défendre nos élus. Personne n'a oublié le hashtag #BalanceTonMaire. Nos communes sont de petites républiques qui font tenir la grande dans la proximité ! Continuons à les défendre et à défendre la proximité qui fait vivre la démocratie.

M. Laurent Somon .  - Ce texte est une forme de reconnaissance du travail des élus locaux. Il reconnaît la protection fonctionnelle. Le travail de la commission a été ardu.

Je remercie la commission des lois pour le travail réalisé, et la ministre qui a tenu ce projet à bout de bras depuis plusieurs années. Cela montre la qualité du travail sénatorial.

Ce texte ne règlera pas tout, car une loi n'est jamais parfaite. Mais elle ne désespérera pas ceux qui veulent s'engager.

À l'heure du Congrès des maires et des prochaines échéances électorales, elle effectue un pas important. Je me réjouis de cette volonté commune : nous avons abouti à un texte qui va dans le bon sens.

M. Jean-Michel Arnaud .  - Ce texte n'est pas une révolution. Mais les petits pas permettent de cheminer, d'atteindre des cols et de fixer de nouveaux horizons - je pense aux élections municipales à venir. Beaucoup de maires cherchent de nouveaux visages. Oui, nous avons veillé à attirer des jeunes, des femmes, des étudiants : de nouveaux visages. Les plus petites communes ont besoin d'indemnités à la hauteur. Nous avons aussi renforcé l'accompagnement et limité les risques de prises illégales d'intérêts.

De nombreux rapports sénatoriaux ont alimenté le travail, mené en profondeur. J'espère que le texte sera adopté définitivement avant les prochaines élections et donnera une bonne image du Parlement.

Je nous donne collectivement rendez-vous aux prochaines élections pour défendre une démocratie locale vivante. (Mme Annick Billon applaudit.)

Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois .  - Je me réjouis de la manière dont la démocratie fonctionne. Nos débats, malgré les oppositions, sont apaisés. Ce sont la discussion et le vote qui en constituent la règle. Nous avons respecté, aussi, le bicamérisme : le travail de l'Assemblée nationale n'a pas été défait par principe par le Sénat ; nous avons écouté des positions qui n'étaient pas les nôtres. En ces temps troublés, dans une France fracturée, je me réjouis de porter attention aux maires et aux élus ; le maillage territorial, voilà ce qui tient le pays !

Nous avons fait oeuvre d'intérêt public avec ce débat apaisé. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP ; Mme Cécile Cukierman applaudit également.)

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation .  - Dans nos vies d'élus, nous vivons des moments d'exception, des moments où l'on a fait progresser les choses. Cette proposition de loi transpartisane, ce travail issu de la délégation aux collectivités territoriales et de nombreuses commissions, malgré les turbulences, n'est ni plus ni moins que la capacité à mettre en oeuvre une promesse républicaine : chaque citoyen qui veut s'engager doit pouvoir le faire.

Sécuriser, conforter, nous l'avons fait, et ce n'est pas rien. Lors de la crise du covid, les crèches, les écoles, la voirie, l'éclairage public, tout cela a tenu grâce à l'engagement des élus locaux, tout comme lors des grands événements climatiques.

La République reconnaît l'engagement de ceux qui la servent. Nous leur exprimons notre gratitude et affirmons le rôle essentiel des élus municipaux dans la République. C'est pourquoi je tiens au mot de « statut » - ce même statut qu'ont les sapeurs-pompiers volontaires. Rappelons à chacun ce que nous devons aux maires.

Je suis assez émue. Que, dans ce moment tourbillonnaire de la vie politique et sociale, nous ayons su, dans cette chambre des territoires, débattre de la sorte, c'est l'honneur de la politique. Vous avez montré à nos concitoyens, qui parfois doutent de nous, que nous étions capables de dépasser les clivages. Nous construisons ensemble un chemin, celui de la démocratie.

Tout n'est pas fini, ce texte est une étape -  il nous faudra parler simplification, notamment.

Merci à la commission des lois et aux rapporteurs, à l'ensemble des groupes politiques, aux administrateurs du Sénat et aux collaborateurs du ministère, que je félicite. Merci au président du Sénat et à la présidente de l'Assemblée nationale, qui nous ont aidés. Merci au Premier ministre, (on ironise à droite ; M. Jean-Raymond Hugonet se montre dubitatif) : c'est lui qui a voulu que ce texte soit débattu au Sénat. Je salue enfin le travail de la Chancellerie -  et j'attends vos votes ! (Sourires et applaudissements)

À la demande de la commission des lois, la proposition de loi, modifiée, est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°368 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption 344
Contre     0

La proposition de loi est adoptée.

(Mme Françoise Gatel applaudit.)