B. CRISE EN ÉLEVAGE - UNE PRODUCTION MISE EN GRAND DANGER ET LA NÉCESSITÉ DE SOUTENIR LES VÉTÉRINAIRES RURAUX
a) Le coût colossal de la lutte contre les épizooties et ses conséquences économiques
En matière de crise en élevage, le P149 est mobilisé pour financer les dispositifs d'indemnisation, quand le P206 vise à financer les dispositifs de prévention tels que la vaccination. Les données fournies par le ministère aux rapporteurs permettent d'apprécier le coût considérable, depuis 2020, des crises sanitaires en élevage. Ainsi, la crise de l'influenza aviaire a coûté, entre 2020 et 2024, 717 M€ rien que pour le volet indemnisation. Le ministère note que « depuis la mise en oeuvre de la vaccination fin 2023, l'intensité des crises IAHP [influenza aviaire hautement pathogène] est très faible », puisque neuf foyers seulement sont connus pour la saison 2025-2026, contre 757 foyers par crise en moyenne. Le rapport d'août 2024 du CGAAER relatif à la rénovation du financement du sanitaire dans le domaine animal estime que le coût total des principales épizooties survenues depuis 2020, se situe entre 1,6 et 2,1 Mds€.
Ceci démontre bien l'efficacité de la prévention, dont le coût est autrement plus faible que celui de l'indemnisation, évitant le dépeuplement d'élevages entiers et le traumatisme associé à ces mesures radicales pour les éleveurs, mais aussi pour les vétérinaires.
Comme l'ont souligné les représentants de la profession vétérinaire, entendus par les rapporteurs, l'anticipation est essentielle : concernant la fièvre catarrhale ovine de stéréotype 3 (FCO 3), l'État avait bel et bien commandé les vaccins, mais ceux-ci sont arrivés une semaine après l'arrivée de la maladie.
Il ressort en outre des auditions des rapporteurs que les assises du sanitaire animal, qui doivent permettre d'améliorer la gouvernance et d'aborder l'épineuse question du financement, semblent à l'arrêt, alors même que le spectre de la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) plane sur l'élevage bovin français, ayant conduit à l'abattage de plus de 2 600 bovins.
C'est d'ailleurs à ce titre que la commission des affaires économiques a lancé une mission d'information sur les enseignements à tirer de la gestion de la crise sanitaire de la DNC.
b) Un soutien aux vétérinaires ruraux à renforcer
Les rapporteurs ne peuvent que constater, d'une part, la qualité du travail et l'engagement des vétérinaires ruraux en faveur de l'élevage français, et, d'autre part, la faiblesse des moyens alloués au soutien au maillage vétérinaire rural. Comme l'ont rappelé le Conseil national de l'ordre des vétérinaires (Cnov) et le syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral (SNVEL) auditionnés, de même que la ministre lors de son audition, c'est bien la clairvoyance d'un vétérinaire, face à la présence de nodules chez un bovin, qui a permis l'identification très précoce, en Savoie, de la présence de la DNC sur le sol national.
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Nombre de vétérinaires exerçant auprès des animaux de rente pour la zone nord de la Gironde et sud de la Charente |
L'exercice du métier de vétérinaire en milieu rural, faiblement rémunéré au regard des coûts et des contraintes afférentes, est mis en danger depuis de nombreuses années par une reconnaissance trop faible de l'importance de ses professionnels. Les rapporteurs rappellent que s'il faut se féliciter de l'augmentation observée du nombre d'étudiants en école vétérinaire, conformément à l'ambition de la LOA, cette augmentation ne saurait pas induire mécaniquement le maintien d'un maillage rural fort et absolument indispensable à la détection et à l'intervention rapide en cas de maladie comme la DNC.
Selon les informations, peu explicites, communiquées aux rapporteurs lors de l'audition du cabinet de la ministre de l'agriculture, dans le cadre des éventuelles conclusions des assises du sanitaire, une enveloppe de 10 M€ serait budgétée, à l'action 2 du P206, relative à la lutte contre les maladies animales, dans le but de répondre à la demande légitime de soutien aux cabinets ruraux. La profession demande en effet la mise en place d'une rémunération forfaitaire destinée à compenser, en partie, les coûts inhérents à la pratique en milieu rural.
La demande paraît en effet légitime et son coût proportionné : 168€ par élevage. Les 10 M€ budgétés permettraient de financer 2,1 actes médicaux vétérinaires (AMV) par élevage (8,8 M€ HT), soit un peu plus de 28€ par élevage. Les rapporteurs proposent de trouver un compromis entre la demande des vétérinaires et le dispositif qui pourrait être proposé par l'État, en portant l'aide à environ 84€ par élevage. Pour ce faire, ils proposent un amendement de 15 M€ à l'action 2, pour porter l'effort global à 25 M€.
Amendement 4 : Augmenter l'action 2 du P206 de 15 M€ dans le but de financer la mise en place d'une rémunération forfaitaire des cabinets exerçant en milieu rural.
c) Lutte contre la prédation : maintenir un minimum de crédits pour faire face à une pression croissante
Alors que la présence du loup est attestée dans de très nombreux territoires, que le nombre d'attaques augmente, et que le plan national d'action (PNA) 2024-2029 doit permettre la sécurisation des activités pastorales, le PLF 2026 ne dote la sous-action « Pastoralisme et lutte contre la prédation » de moins de 13 M€, contre un peu plus de 14 M€ l'année dernière. Certains acteurs auditionnés se sont montrés inquiets de cette baisse, dont le ministère semble indiquer aux acteurs qu'elle aurait vocation à être compensée par les crédits européens. Or, les crédits de la politique agricole commune n'ont pas vocation à financer des dispositifs de réintroduction d'une espèce et de lutte contre ses conséquences. Les rapporteurs proposent donc de maintenir les crédits pour 2026 à un niveau proche de ceux de 2025, considérant que les fonds agricoles européens doivent venir financer l'agriculture.
Amendement 5 : augmenter de 1 M€ la sous-action « Pastoralisme et lutte contre la prédation » de l'action 24 du P149.
