SÉANCE
du lundi 15 décembre 2025
40e séance de la session ordinaire 2025-2026
Présidence de M. Xavier Iacovelli, vice-président
La séance est ouverte à midi.
Projet de loi de finances pour 2026 (Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale. Nous allons procéder aux coordinations sur les articles 49, 51, 48 et sur l'article liminaire.
Je rappelle au Sénat que, aux termes de l'article 43, alinéa 3, du règlement, la discussion ne peut porter que sur la nouvelle rédaction proposée.
Discussion des articles
Article 49 - État B (Régimes sociaux et de retraite - Coordination)
M. le président. - Amendement n°COORD-1 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué chargé de la fonction publique et de la réforme de l'État. - Les quatre premiers amendements tirent les conséquences de la suppression à l'article 44 du PLFSS de la non-indexation des prestations sociales et de retraites, ainsi que de la suspension de la réforme des retraites. Deux autres amendements portent sur les transferts entre l'État et la sécurité sociale. Un autre traduit les mesures adoptées par le Sénat à la mission « Travail ». Enfin, deux amendements de coordination corrigent l'article liminaire et l'article d'équilibre.
Le présent amendement augmente les crédits de 84 millions d'euros en AE et en CP en conséquence du dégel des pensions de retraite.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. - Ces amendements de coordination laissent un goût d'amertume, d'inachevé, et nous plongent même dans une forme de désarroi. Le seul qui tire les conséquences des votes du Sénat est un amendement d'économies de 56 millions d'euros sur la mission « Travail ».
Pour le reste, ces amendements font du PLF la victime collatérale d'une loi de financement de la sécurité sociale négociée entre le Gouvernement et l'Assemblée nationale portant le déficit des administrations de sécurité sociale de 17,5 milliards d'euros à 24 milliards d'euros !
Dans une note, le Gouvernement avertissait que le déficit pourrait déraper jusqu'à 30 milliards d'euros si le PLFSS n'était pas voté. Vous avez fait la moitié du chemin ! Vous majorez les transferts de l'État à la sécurité sociale : quel triste tour de passe-passe. Les dépenses nettes de l'État augmenteraient ainsi de 6,3 milliards d'euros.
À l'article d'équilibre, le déficit est de 135,7 milliards d'euros, soit 11,4 milliards d'euros de plus que le texte transmis au Sénat. C'est considérable ! Cette hausse n'est due aux votes du Sénat que pour 5,1 milliards d'euros, contre 6,3 milliards dus à la loi de financement de la sécurité sociale. Il faudra y remédier en CMP.
On ne peut pas demander au Sénat de compenser la dégradation des finances publiques. Mais je ne souhaite pas que notre assemblée se rende responsable d'une aggravation du déficit.
À l'article liminaire, le déficit, toutes administrations publiques, atteindra 5,3 %, bien au-delà des 4,6 % prévus dans le plan budgétaire et structurel de moyen terme (PSMT) ou des 4,7 % prévus dans le PLF initial. Les votes de l'Assemblée nationale aggravent le déficit public de 0,3 point de PIB. Les votes du Sénat l'aggravent de 0,1 point de PIB.
La commission des finances émet donc un avis favorable à l'amendement n°COORD-6, qui résulte des votes du Sénat.
Sagesse pour tous les autres amendements - à titre personnel concernant l'amendement n°COORD-9, qui a été rectifié marginalement après la réunion de la commission.
M. David Amiel, ministre délégué. - Vous avez raison, monsieur le rapporteur général : les textes initiaux proposaient un déficit de 4,7 %. À l'issue de l'examen de la première partie du PLF par le Sénat, le déficit était de 5,1 %. Notre amendement tire les conséquences du vote du PLFSS à l'Assemblée nationale, ainsi que des mesures adoptées par le Sénat. Le déficit passe à 5,3 %. Il reste donc beaucoup de travail à faire en CMP pour atteindre un déficit à 5 %. (Murmures à droite)
L'amendement n°COORD-1 est adopté.
Article 49 - État B (Solidarité, insertion et égalité des chances - Coordination)
M. le président. - Amendement n°COORD-2 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Cet amendement augmente les crédits de 317 millions d'euros aux programmes 157 et 304 de la mission « Solidarités, insertion et égalité des chances » en conséquence du dégel de plusieurs prestations - allocation aux adultes handicapés (AAH), prime d'activité, RSA...
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sagesse.
L'amendement n°COORD-2 est adopté.
Article 49 - État B (Travail, emploi et administration des ministères sociaux - Coordination)
M. le président. - Amendement n°COORD-3 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Nous augmentons les crédits du programme 103 de 3,1 milliards d'euros en AE et en CP afin de compenser à la sécurité sociale des exonérations de cotisation.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sagesse.
L'amendement n°COORD-3 est adopté.
M. le président. - Amendement n°COORD-4 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Cet amendement augmente les crédits de 2,1 milliards d'euros en AE et en CP, toujours sur le programme 103, pour compenser les gains de la réforme des allègements généraux.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sagesse.
L'amendement n°COORD-4 est adopté.
M. le président. - Amendement n°COORD-5 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Nous rehaussons de 32 millions d'euros les crédits des programmes 102 et 103, au titre du dégel des prestations sociales.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sagesse.
L'amendement n°COORD-5 est adopté.
M. le président. - Amendement n°COORD-6 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Cet amendement réduit les crédits de la mission « Travail, emploi et administration des ministères sociaux » de 56 millions d'euros, afin de tirer les conséquences des amendements adoptés par le Sénat sur les articles 80 et 81.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis favorable.
L'amendement n°COORD-6 est adopté.
Article 51 - État D (Pensions - Coordination)
M. le président. - Amendement n°COORD-7 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Cet amendement de coordination augmente de 603 millions d'euros en AE et en CP les crédits du CAS « Pensions » pour tirer les conséquences du dégel des pensions et de la suspension de la réforme des retraites.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sagesse.
L'amendement n°COORD-7 est adopté.
Article 48 - État A (Coordination)
M. le président. - Amendement n°COORD-8 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Nous actualisons l'article d'équilibre pour prendre en compte la dégradation de 3,7 milliards d'euros par rapport au solde établi à la fin de l'examen de la première partie par le Sénat, et de 11,4 milliards par rapport au texte initial.
Cette dégradation résulte des mouvements suivants : 7,7 milliards d'euros en moins résultants de vos votes de première partie, 2,5 milliards d'euros en plus résultant de vos votes de seconde partie et 6,3 milliards en moins résultant de la coordination avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. Pascal Savoldelli. - C'est un moment extrêmement important, très politique. Le rapporteur général dit que les votes du Sénat aggravent le déficit de 5,1 milliards d'euros.
C'est vrai uniquement grâce à cet amendement qui prend en compte le sous-amendement de crédits évaluatifs à hauteur de 1,8 milliard d'euros, déposé vendredi soir à minuit vingt-huit et voté à minuit trente - sans réunion de la commission des finances. En réalité, le déficit dû à la majorité sénatoriale n'est pas de 5,1 milliards d'euros, mais de 6,9 milliards d'euros !
Vous avez voté 4 milliards d'euros de cadeaux fiscaux pour les grandes entreprises, 800 millions d'euros pour les holdings, sans parler des 800 millions d'euros pour les Gafam. Franchement, ni le Gouvernement ni la majorité sénatoriale n'ont de leçons à donner à l'Assemblée nationale. Nous voterons contre cet amendement.
M. Rémi Féraud. - Même vote pour les mêmes raisons ! Le sous-amendement présenté vendredi soir est évaluatif : de l'aveu même du Gouvernement vendredi soir, ce 1,9 milliard d'euros n'existe pas, en tout cas pas sur cet exercice ! Le déficit dû à vos votes approche plutôt des 7 milliards. La majorité sénatoriale a déposé un sous-amendement d'affichage, voilà ce qui nous plonge dans le désarroi, monsieur le rapporteur général...
On peut y ajouter la suppression de 1 milliard d'euros de crédits pour France 2030, qui ne correspond à rien de concret : nous sommes donc plus proches de 8 milliards d'euros.
Contrairement à notre habitude, nous voterons contre cet amendement de coordination et contre l'article liminaire, car l'affichage n'est ni réel ni sincère.
M. Marc Laménie. - Selon cet article d'équilibre, les ressources s'élèvent à 329 milliards d'euros nets et les dépenses à 453 milliards d'euros, avec une augmentation du déficit d'environ 7 milliards. Monsieur le ministre, ma question porte sur les autorisations d'emploi - ces moyens humains très importants, car il faut soutenir la présence humaine dans nos territoires.
Vous faites état de 2,16 millions d'ETPT, sans oublier 400 000 emplois pour les opérateurs de l'État. Ces derniers font-ils partie du chiffre global ? Nous suivrons l'avis du rapporteur général.
M. Thomas Dossus. - Nous voici à l'heure des comptes. Dans la première partie, à force de protéger les plus hauts revenus et les grands groupes, la droite sénatoriale a aggravé la trajectoire du déficit. (Mme Sophie Primas proteste.) Résultat : dans la deuxième partie, elle a dû trouver le moyen de corriger le tir et l'a fait de la manière la plus cavalière.
Vendredi soir, elle a déposé tardivement un sous-amendement, cosigné par les présidents des deux groupes les plus nombreux. Le ministre, qui était présent, a déclaré que ce sous-amendement était artificiel, puisqu'il ne portait pas sur le bon exercice.
Cet amendement qui le prend en compte est donc insincère, puisqu'il met sous le tapis l'impéritie de la majorité sénatoriale sur le volet recettes.
Mme Christine Lavarde. - Sur la forme, ce sous-amendement a en effet été déposé tardivement. Sur le fond, il tire les conséquences de la suppression en première partie de la surtaxe de l'impôt sur les sociétés.
Cet impôt est versé par acomptes. Résultat : il peut y avoir des dégrèvements et des remboursements au sein d'une même année. Les crédits ouverts par le PLF 2025 ont été sous-estimés par rapport au décaissement nécessaire, compte tenu de cette surtaxe.
La majorité sénatoriale ayant supprimé cette surtaxe cette année, il était logique d'en tirer les conséquences avec ces 1,8 milliard d'euros.
M. Vincent Capo-Canellas. - Le texte sort du Sénat avec moins de fiscalité et plus de sincérité. Chers collègues de gauche, vous pouvez essayer de faire diversion ; mais les 6,3 milliards de déficit supplémentaire sont bien dus à des demandes de votre camp en PLFSS ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains ; UC, INDEP et du RDSE)
Nous avons pris nos responsabilités en en tirant les conséquences.
Le déficit est au-delà de 4,7 %, même de 5 %. Nous avons du travail pour l'établir à 5 %, voire un peu en dessous. Cessons de nous renvoyer la balle et mettons-nous au travail.
M. David Amiel, ministre délégué. - Je maintiens mes propos : la suppression de la surtaxe de l'impôt sur les sociétés aura des conséquences, surtout en 2027.
Nous n'avons pas intégré cette modification dans l'article liminaire, pour ne pas préempter les débats en CMP. Le Parlement décidera ce qu'il veut faire de l'impôt sur les sociétés pour l'année 2026.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sagesse.
L'amendement n°COORD-8 est adopté.
Article liminaire (Coordination)
M. le président. - Amendement n°COORD-9 rectifié du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Cet amendement arrête la prévision de déficit public à 5,3 % du PIB, en l'état actuel des discussions budgétaires. Je le répète : la CMP doit travailler pour réduire le déficit à 5 %.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sagesse.
L'amendement n°COORD-9 rectifié est adopté.
La séance est suspendue à midi vingt-cinq.
Présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 14 h 30.