MISSION « POLITIQUE DES TERRITOIRES » ET COMPTE SPÉCIAL « FINANCEMENT DES AIDES AUX COLLECTIVITÉS POUR L'ÉLECTRIFICATION RURALE » - Mme Frédérique ESPAGNAC, rapporteure spéciale

I. APERÇU GÉNÉRAL DE LA MISSION EN 2013

A. UNE MISSION PLUS HOMOGÈNE MAIS QUI CONSERVE D'IMPORTANTES SPÉCIFICITÉS

1. Une architecture stabilisée

L'architecture actuelle de la mission « Politique des territoires », stabilisée depuis 2008 133 ( * ) repose sur deux programmes :

- d'une part, le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » (dénommé PICPAT) , dénomination en vigueur depuis 2008 à l'initiative du Sénat, et piloté depuis 2012 par le ministère du logement et de l'égalité des territoires 134 ( * ) ;

- d'autre part, le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (désigné PITE), dont le pilotage, par délégation de gestion du Premier ministre, reste assuré par le ministère de l'intérieur.

2. Une cohérence qui reste perfectible

La mission « Politique des territoires » a peiné à trouver sa cohérence interne. En effet, cette mission procédait avant 2008 d'une juxtaposition artificielle de programmes marquée par l' hétérogénéité des secteurs concernés (aménagement du territoire, urbanisme, tourisme...). De ce point de vue, le recentrage de la mission sur l'aménagement du territoire a représenté une avancée notable. Toutefois les singularités de la mission restent fortes.

Tout d'abord, les deux programmes de la mission s'avèrent fortement déséquilibrés : les trois quarts des crédits de la mission se rattachent ainsi au PICPAT , qui regroupe les crédits affectés à la délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR), fusionnée en 2014 avec le secrétariat général du comité interministériel des villes (SGCIV) et l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSÉ) au sein d'un nouveau Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET).

Ensuite, la faible cohérence et l'instabilité de la mission résultent des spécificités du PITE . D'abord conçu comme expérimental, ce programme retrace des actions indépendantes les unes des autres et d'une inscription au budget limitée dans le temps. Il regroupe quatre plans gouvernementaux multisectoriels pilotés par le ministère de l'intérieur, et concernant des territoires spécifiques (Bretagne, Corse, marais poitevin et Martinique-Guadeloupe).

Par ailleurs, bien que la mission ait été recentrée sur l'aménagement du territoire depuis 2008, il convient d'observer que le niveau des crédits consacrés par l'État à l'aménagement du territoire, excède - de loin - celui des crédits de la mission. En effet, les actions de l'État participant à l'aménagement du territoire représentent, chaque année, environ 5 milliards d'euros, soit quinze fois les enjeux financiers de la mission 135 ( * ) .

3. Des dépenses fiscales au coût élevé et à l'efficacité incertaine

Enfin, le coût des dépenses fiscales rattachées à la mission, supérieur au montant des crédits budgétaires de cette dernière, est à souligner.

En effet, le montant des dépenses fiscales de la mission, toutes rattachées au PICPAT et réparties entre 24 dispositifs, est évalué à 456 millions d'euros dans le RAP 2013, soit une hausse de 25 millions d'euros par rapport à l'évaluation fournie dans le RAP 2012, qui était déjà elle-même en augmentation de 25 millions d'euros par rapport au RAP 2011 (à ces montants, il faudrait ajouter le coût des dix dépenses fiscales qui font l'objet d'une simple évaluation - de l'ordre de 0,5 million d'euros chacune - ou ne sont tout simplement pas chiffrées). Cette hausse est d'autant plus notable que trois dépenses fiscales ont cessé en 2013 d'être rattachées à la mission et que la LFI pour 2014 prévoit encore une augmentation de 41 millions d'euros .

Votre rapporteure spéciale réitère les interrogations dont elle a fait état concernant le « saupoudrage » que représentent ces dépenses fiscales et les effets qui peuvent en être attendus. Elle s'inquiète également du résultat des évaluations issues du rapport, rendu public en septembre 2011, du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, présidé par Henri Guillaume. Ce rapport s'est, en effet, montré très critique sur ces dispositifs, jugés quasi systématiquement inefficaces : sur vingt-et-une mesures évaluées, dix-huit ont le score le plus faible (zéro). Il convient d'observer qu'en octobre 2010, le Conseil des prélèvements obligatoires avait, déjà, évoqué des dispositifs à « l'efficacité incertaine ».


* 133 Les programmes 113 « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique » et 159 « Information géographique et cartographique » ont été, en 2008, rattachés à la mission « Écologie, développement et aménagement durables », et le programme 223 « Tourisme » a été rattaché à la mission « Économie ». Cette dernière mesure répondait à des critiques régulièrement formulées, notamment par la Cour des comptes. En effet, la politique du tourisme, fondée surtout sur des interventions et des dépense fiscales, ne contribue qu'indirectement à l'aménagement du territoire.

* 134 Il s'agissait en 2009 du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire et en 2010 du ministère de l'espace rural et de l'aménagement du territoire puis du ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

* 135 Depuis 2008, l'aménagement du territoire fait l'objet d'un document de politique transversale (DPT), qui a remplacé l'annexe traditionnelle (« jaune » budgétaire). Le DPT joint au PLF 2014 a ainsi évalué à 5 milliards d'euros l'ensemble des crédits destinés à la politique d'aménagement du territoire.

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