EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale.

En conséquence, sont considérés comme rejetés les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 6 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de Mme Vanina Paoli-Gagin et M. Jean-François Rapin, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

M. Claude Raynal, président. - Nous terminons nos travaux par l'examen du rapport spécial de nos collègues Vanina Paoli-Gagin et Jean-François Rapin sur la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». - Au cours des cinq dernières années, les crédits dédiés à l'enseignement supérieur ont augmenté de 1,92 milliard d'euros, pour atteindre 18,8 milliards d'euros.

Les crédits consacrés à l'enseignement supérieur par la France sont légèrement inférieurs à la moyenne des pays de l'OCDE. Néanmoins, la dépense totale liée à cet enseignement représentait 1,63 % de notre PIB en 2021, soit une proportion supérieure à celle de la moyenne de l'OCDE et largement supérieure à celles de l'Italie (0,98 %) ou de l'Allemagne (1,32 %). Ces éléments de comparaison sont importants pour nous aider à comprendre que ce qui nous plombe, ce sont, comme souvent, les frais de gestion et les coûts de fonctionnement.

À périmètre constant, les crédits dédiés aux établissements d'enseignement supérieur progressent de 245 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 155 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

Les deux principales mesures expliquant la hausse des crédits demandés pour 2026 sont, d'une part, la reprise d'une partie de la trajectoire fixée par la loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 (LPR) et, d'autre part, la compensation partielle du nouveau relèvement de 4 points du taux de contribution employeur au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ».

L'an dernier, cette hausse du taux de contribution ne devait s'accompagner d'aucun moyen supplémentaire. Cependant, la commission mixte paritaire avait finalement choisi de la compenser intégralement. La hausse prévue pour 2026 ne devrait être que partiellement compensée, à hauteur de 81 millions d'euros sur un coût total de 190 millions d'euros.

Le projet de loi de finances (PLF) prévoit 87,1 millions d'euros au titre de la LPR pour 2026, alors qu'un montant de 107 millions d'euros était prévu par la trajectoire adoptée par la loi. En tenant compte du retard cumulé par rapport à cette trajectoire, les crédits liés à la LPR sont inférieurs de 55 millions d'euros au niveau qui aurait dû être atteint en 2026.

De plus, 44,5 millions d'euros, soit plus de la moitié des crédits prévus au titre de la LPR, sont reliés au déploiement des nouveaux contrats d'objectifs, de moyens et de performance (Comp). Le fait d'intégrer dans le périmètre de la LPR un dispositif nouveau paraît discutable et ne saurait masquer le fait que les mesures liées à la loi de programmation, hors dépenses salariales, ne sont pas plus financées en 2026 qu'elles ne l'étaient en 2025.

J'ai eu l'occasion de vous présenter les Comp et leurs limites, à l'issue de mes travaux de contrôle budgétaire, en juin dernier.

La situation des établissements d'enseignement supérieur doit nous interpeller. Alors qu'ils ont dû absorber la forte croissance du nombre d'étudiants, ces établissements ont dû avancer une partie des coûts découlant des mesures générales de la fonction publique. Sauf à envisager une croissance continue et exponentielle des financements accordés par l'État, il semble indispensable que les universités puissent développer leurs ressources propres. À cet égard, je proposerai d'adopter un amendement permettant de tenir compte des revenus des étudiants ou de leur foyer pour relever les droits d'inscription des plus favorisés.

Quant aux moyens consacrés à la vie étudiante, ils diminuent de 23,7 millions d'euros en AE, comme en CP.

L'intégralité de cette diminution sera supportée par la baisse des montants prévus au titre des bourses allouées sur critères sociaux, liée à la baisse anticipée du nombre d'étudiants boursiers.

Les boursiers sur critères sociaux représentaient 35,8 % des inscrits dans l'enseignement supérieur en 2024-2025, soit 662 000 étudiants. Le ministère de l'enseignement et de la recherche indique que cet effectif n'avait pas été aussi faible depuis la rentrée 2015. De plus, le pourcentage de boursiers est à son niveau le plus bas depuis 2012.

Le bilan de la première étape de la réforme des bourses sur critères sociaux est pourtant positif, puisque les modes de calcul antérieurs étaient obsolètes. La réforme a permis à 30 000 étudiants supplémentaires de devenir boursiers et a entraîné un gain moyen de 54 euros par mois pour chacun d'eux.

Cependant, les effets positifs de la réforme sont siphonnés par l'absence d'une réévaluation du barème d'éligibilité. Le nombre de boursiers a reculé de 2,6 % entre les rentrées 2023 et 2024. Ce mouvement, qui concerne tous les échelons de bourses, est appelé à se prolonger à la rentrée 2025.

La deuxième étape de cette réforme, la linéarisation du mode de calcul des bourses, a été malheureusement repoussée, du fait de la situation budgétaire. Cependant, cette étape ne doit pas être perdue de vue si l'on ne veut pas annuler rapidement les bénéfices de la première vague de la réforme.

Au-delà de la question des bourses, les crédits alloués au réseau des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous) augmentent légèrement. En effet, les Crous sont sous grande tension, tant pour la restauration que pour l'hébergement.

Pourtant, le réseau bénéficie d'un fort taux de recettes propres, ces dernières représentant 60 % des recettes globales en 2025, soit 848,1 millions d'euros. Cependant, les dépenses du réseau connaissent une évolution sans commune mesure puisqu'elles ont augmenté de 16 % entre 2024 et 2025. Les achats de denrées alimentaires représentent à eux seuls 9 % des dépenses, soit 158 millions d'euros. Le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (Cnous)  met en avant une « hyperpression » des usagers, le nombre de repas servis ayant augmenté d'un quart entre 2022 et 2024.

Enfin, les Crous font face à une demande continue de logements, alors qu'ils logent environ 150 000 étudiants par an. Le réseau dispose en moyenne chaque année de 2 000 nouveaux logements et de près de 3 000 logements réhabilités.

Le Gouvernement a engagé un nouveau plan pluriannuel pour le logement étudiant, qui porte sur la construction et la mise en service de 45 000 nouvelles places sur trois ans. Néanmoins, les expériences passées appellent à la prudence quant à notre capacité à atteindre ces objectifs.

Au-delà de ces remarques, je vous propose d'adopter les crédits pour les programmes liés à l'enseignement supérieur, modifiés par mes amendements.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». - Pour compléter les propos de Vanina Paoli-Gagin, mes observations porteront sur les crédits de la mission liés à la recherche, en insistant sur trois aspects saillants du texte que nous examinons.

En premier lieu, dans le domaine de la recherche, le budget présenté par le Gouvernement n'est pas un budget d'austérité. Si je commence par cette remarque, ce n'est pas pour minimiser l'importance de conserver une intervention forte de la puissance publique dans le financement de la recherche.

Je suis profondément attaché au fait que nos organismes publics de recherche soient suffisamment financés pour atteindre les objectifs ambitieux que nous nous fixons en la matière. Je suis particulièrement attentif à la défense du métier de chercheur en France, qui constitue l'un des principaux axes de la loi de programmation de la recherche (LPR) adoptée en 2020, que j'ai largement soutenue lors de son examen.

Enfin, je suis intimement convaincu que les dépenses de recherche sont des investissements d'avenir et que nous avons le devoir de préparer, dès aujourd'hui, des réponses aux problèmes qui se poseront demain à nos concitoyens.

Pour autant, il faut avoir l'honnêteté de dire que, depuis le vote de la LPR, un chemin très important a été parcouru pour réarmer budgétairement nos organismes de recherche.

Ainsi, entre la loi de finances initiale pour 2021, premier budget adopté après l'entrée en vigueur de la LPR, et le PLF pour 2026, le montant total des crédits du périmètre « Recherche » a augmenté de plus de 1 milliard d'euros.

Le programme 172, principal programme piloté par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche pour financer la recherche publique pluridisciplinaire, a vu son budget augmenter de 15 % en CP entre 2021 et 2026, ce qui correspond à une hausse de 1 milliard d'euros en cinq ans.

Dans ces conditions, il ne serait pas de bonne foi de parler d'austérité dans la recherche. Pour autant, les objectifs fixés par la LPR étaient plus ambitieux encore, puisqu'ils prévoyaient une hausse de 1,6 milliard d'euros des crédits du programme 172 entre 2021 et 2026. Le montant proposé pour 2026 est donc inférieur de 6 % à la cible établie.

Cependant, dans un contexte de crise aiguë des finances publiques, le fait le plus significatif me semble être la préservation de la dynamique des dépenses de recherche enclenchée par la LPR, plutôt que la légère sous-exécution de la cible fixée pour 2026.

Le budget proposé n'est donc pas un budget d'austérité et je salue le choix du Gouvernement, qui n'a pas souhaité cibler en priorité les organismes de recherche dans le cadre des réductions de dépenses proposées.

En deuxième lieu, j'aimerais attirer votre attention sur l'impérieuse nécessité dans laquelle se trouve notre pays de faire des choix.

Bien sûr, la France est un pays de rang mondial, à la fois sur le plan économique et sur le plan scientifique. Le mois dernier, la remise des prix Nobel de physique et d'économie à Michel Devoret et Philippe Aghion a offert une nouvelle illustration de l'excellence de la recherche française.

Pour autant, j'aimerais poser une question faussement naïve : un pays qui représente 0,8 % de la population mondiale et 2,8 % du PIB mondial peut-il raisonnablement espérer être la première nation mondiale à la fois dans l'intelligence artificielle, dans les technologies quantiques, dans les batteries électriques, dans les semiconducteurs et dans le champ des sciences humaines et sociales ?

Il ne s'agit pas de minimiser le potentiel de notre recherche, qui est immense, mais de mettre en perspective la nécessité pour notre pays d'identifier certains domaines précis d'excellence et d'y investir en masse les sommes nécessaires, afin d'atteindre les premiers rangs mondiaux dans ces domaines.

Le sens de ma deuxième remarque est donc le suivant : nous devons collectivement apprendre à faire des choix.

À ce titre, je souligne qu'il est préoccupant de constater que le PLF prévoit un ralentissement dans le financement de la recherche dirigée dans deux secteurs stratégiques pour notre pays : l'énergie nucléaire et les études spatiales.

Dans le domaine de l'énergie nucléaire, le Gouvernement propose de réduire de 15 millions d'euros les crédits de recherche du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Cette décision intervient à contretemps, compte tenu de notre stratégie nationale de relance du nucléaire, qui vise notamment à soutenir le maintien en condition des réacteurs du parc actuel et le développement de technologies innovantes pour la prochaine génération de réacteurs, les petits réacteurs modulaires (SMR).

Dans le domaine spatial, le montant de la contribution triennale de la France à l'Agence spatiale européenne (Esa), qui sera annoncé avant la fin du mois à l'occasion de la conférence ministérielle de Brême, sera le vrai révélateur du niveau d'engagement du Gouvernement. Nous serons attentifs au niveau de l'engagement français qui sera annoncé, étant donné que les derniers arbitrages n'avaient pas été rendus au moment de nos auditions et que nous n'avons pas pu prendre connaissance du montant de souscription à venir.

Pour autant, en attendant cette annonce, force est de constater que le financement du Centre national d'études spatiales (Cnes) connaît un recul, ses crédits baissant de 13 millions d'euros dans le budget 2026.

En troisième et dernier lieu, je voudrais insister sur une situation que j'avais déjà évoquée l'an dernier et qui n'a pas évolué : le retard inacceptable de la France en matière de captation des aides du programme Horizon Europe.

Le budget de l'Union européenne comprend un important programme-cadre pluriannuel, dont l'enveloppe totale atteint 89 milliards d'euros. Alors que la France fait partie des premières nations européennes dans le domaine de la recherche, il est incompréhensible qu'elle ne soit pas un pays « bénéficiaire net » des aides de ce programme.

La recherche est un secteur dans lequel nous avons hérité d'un avantage compétitif et d'une longue tradition d'excellence, que nous devons faire fructifier pour capter au moins autant d'aides européennes que nous n'en finançons.

Or, d'après les dernières données du ministère, les équipes de recherche françaises ont obtenu 9,5 % des aides du programme en 2024, sachant que notre contribution au budget de l'Union s'élève à 17,2 %. Par conséquent, la différence entre notre financement du programme Horizon Europe et les aides reçues donne un solde contributeur net de 783 millions d'euros.

Compte tenu de la crise actuelle du déficit public, personne ne peut se satisfaire de constater que nous laissons sur la table plus d'un demi-milliard d'euros par an, en ne captant pas suffisamment les aides de ce programme.

Ma troisième remarque est donc la suivante : avant d'envisager une hausse des dépenses de recherche qui affecterait directement le déficit du budget de l'État, nous devons mobiliser les crédits européens pour renforcer notre recherche.

Enfin, j'aimerais présenter un amendement de crédit visant un double objectif : contribuer au redressement de nos comptes publics et préserver un domaine stratégique de notre recherche dirigée, qui a été négligé dans le projet de budget 2026.

L'amendement FINC.1 a pour objectif principal de réduire le montant de l'enveloppe annuelle de l'Agence nationale de la recherche (ANR) pour le fixer à 1,18 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE). Ce niveau reflète déjà une hausse dynamique sur les dernières années. Ainsi, même en adoptant mon amendement, l'enveloppe de l'ANR aura augmenté de 54 % par rapport à 2019.

Dans une période de nécessaire consolidation de nos dépenses publiques, chaque mission doit se montrer exemplaire et contribuer à la réduction du déficit. Je ne vois pas d'autre chemin si nous voulons atteindre l'objectif très ambitieux de stabilisation du déficit sous les 3 % à l'horizon 2029.

L'amendement permet à ce titre de dégager des économies à hauteur de 150 millions d'euros en AE et de 30 millions d'euros en CP. Je propose d'utiliser une fraction de ces crédits pour revenir sur le choix du Gouvernement de baisser de 15 millions d'euros les crédits alloués au CEA, qui est un partenaire clé des industriels dans la filière de l'énergie nucléaire.

Je vous propose donc d'adopter mon amendement, qui permet à l'échelle de la mission d'économiser 135 millions d'euros en AE et 15 millions d'euros en CP.

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. - L'amendement de crédits FINC.2 est une conséquence de l'amendement de lettres FINC.3.

La France se caractérise par une extrême modicité des droits d'inscription à l'université. Il suffit de nous comparer à nos voisins européens pour constater que ce modèle n'est plus adapté, à l'heure de la massification de l'accès à l'enseignement supérieur. Le coût extrêmement faible de l'accès à cet enseignement, sans aucune prise en compte des revenus, revient à faire peser sur le budget de l'État le caractère anti-redistributif du système.

L'amendement FINC.3 prévoit une exonération de frais d'inscription pour les étudiants boursiers ainsi qu'une modulation des frais d'inscription, selon les revenus du foyer fiscal auquel l'étudiant est rattaché. Ce modèle, déjà appliqué dans des établissements publics comme les instituts d'études politiques (IEP), met les étudiants à contribution à raison de leurs facultés. Il répond à la fois à une exigence de justice sociale et à la nécessaire reconnaissance de la valeur du service public de l'enseignement supérieur et des diplômes qu'il délivre.

Toutes les universités n'accueillant pas des étudiants du même profil, un correctif sera nécessaire. L'amendement prévoit donc un mécanisme de péréquation, qui tient compte de la proportion d'étudiants boursiers au sein de chaque université.

L'inspection générale des finances (IGF) prévoit qu'une telle modulation permettra de rapporter environ 500 millions d'euros en année pleine, qui offriront des marges de manoeuvre pour améliorer la situation de notre enseignement supérieur.

L'amendement FINC.2 vise à réinjecter au budget de l'État une partie de ces ressources dégagées par la hausse modulée des frais d'inscription. Je propose donc de diminuer les dépenses des universités de 75 millions d'euros pour la période de septembre à décembre 2026.

Il est rare qu'une mesure de justice sociale puisse également entraîner des économies pour l'État.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avec ces amendements, Vanina Paoli-Gagin propose une forme de pari sur l'avenir et je souhaiterais que l'État soit au rendez-vous de l'effort proposé, en matière de responsabilité et de transparence. Cependant, je rappelle que nous sommes en train de payer les pots cassés d'années de dérive des comptes publics, et que cette dérive est largement due à l'accroissement des dépenses de l'État.

Je soutiens l'idée du pari, mais il faut identifier de quelle manière l'État peut associer davantage le Parlement pour trouver des solutions et suivre le devenir des moyens supplémentaires proposés. Il faut changer de manière de faire et d'état d'esprit, pour que le pari soit gagnant-gagnant.

Par ailleurs, il est stupéfiant de constater que nous pourrions obtenir plus d'un demi-milliard d'euros de financements supplémentaires du programme Horizon Europe. On ne peut pas demander plus de moyens à l'État alors qu'on se prive de la possibilité de ces financements. Il s'agit d'une faute technique et budgétaire, mais aussi d'une faute politique et d'un aveu de l'insuffisance de notre organisation. Si l'on veut rester un pays influent en Europe, il faut le justifier à tous les niveaux. Nous devons démontrer que nous faisons le pari du financement et de l'investissement et que nous faisons au moins au mieux de nos potentialités.

M. Antoine Lefèvre. - La population estudiantine a dépassé pour la première fois le seuil des 3 millions pour l'année scolaire 2024-2025, ce qui représente une augmentation de 1,4 % par rapport à l'année précédente et de 20 % sur quinze ans. Cette trajectoire sera appelée à stagner à l'horizon 2030 et le nombre d'étudiants devrait commencer à baisser à partir de 2033. Quels leviers le législateur peut-il actionner de façon prioritaire afin de répondre au défi de la démographie universitaire ? Une meilleure autonomie de gestion pourrait-elle offrir une piste ?

M. Marc Laménie. - Quels sont les effectifs de la mission ? Comment se répartissent-ils entre enseignement supérieur et recherche ? Ces moyens humains sont-ils stables ?

Les travaux d'investissement dans l'immobilier connaissent-ils une progression ?

M. Michel Canévet. - Concernant l'amendement proposé par Vanina Paoli-Gagin, qui vise à assurer une forme de redistribution supplémentaire, ne devrait-on pas laisser une certaine autonomie aux universités dans la définition du montant des frais de scolarité ?

S'agissant des Crous, la France n'est pas à la hauteur de la situation. Nous manquons de logements et ce n'est pas le cas en Allemagne par exemple, où les étudiants, y compris étrangers, n'ont aucun mal à se loger parce que des institutions financières ont investi dans le logement étudiant. Pourquoi ne pas faire la même chose ? La Caisse des dépôts et consignations ou de grandes institutions, qui ont de l'argent à placer compte tenu du niveau de leur épargne, pourraient investir davantage dans nos campus.

Je m'interroge aussi sur la gestion du réseau des Crous ; une plus grande territorialisation devrait avoir lieu en la matière.

Enfin, la recherche est-elle suffisamment appliquée dans le domaine agricole ? Nous imposons une contrainte de non-recours aux produits chimiques à nos agriculteurs, mais la recherche ne semble pas avancer sur les produits de substitution.

M. Jean-Marie Mizzon. - Jean-François Rapin a évoqué le programme Horizon Europe, en soulignant la nécessité d'être plus offensifs pour obtenir des retours de crédits moins mauvais. J'ai auditionné cette année le secrétaire général des affaires européennes (SGAE). Bien conscient de notre retard en la matière, il m'a indiqué avoir mis en place une cellule entièrement dédiée à cet objectif : bénéficier davantage des programmes spécifiques européens.

Mme Florence Blatrix Contat. - Quand on connaît les grandes difficultés auxquelles font face les étudiants, il semble regrettable que les crédits alloués à la vie étudiante soient en baisse de 0,79 %.

J'en viens à l'amendement qui vise à fixer le montant des droits d'inscription en fonction des revenus des parents. Les enfants n'auront qu'à sortir du foyer fiscal de leurs parents pour que les revenus de ces derniers ne soient pas pris en compte. Par ailleurs, une telle mesure ne pose-t-elle pas un risque d'endettement pour les étudiants ?

M. Claude Raynal, président. - Je voudrais aussi revenir sur cette mesure. De manière générale, on ne sait plus où on en est entre le paiement de l'impôt et le droit de bénéficier de certains services sous réserve de ce paiement. Payer un montant élevé d'impôt oblige à payer encore à bien d'autres guichets, et l'amendement accentuerait ce constat, ce qui ne me semble pas souhaitable. La redistribution doit s'opérer en amont, avec le prélèvement d'un impôt progressif.

Monsieur Rapin, vous demandez 15 millions d'euros supplémentaires pour le CEA, mais rien pour le Cnes, ce qui m'étonne, connaissant votre intérêt pour le sujet et les besoins en la matière.

Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. - Monsieur le président, ce que nous tentons de faire ici n'est effectivement pas très satisfaisant dans l'esprit, nous devons assumer les conséquences des politiques passées. Quand on hisse une classe d'âge aussi importante jusqu'au niveau du baccalauréat, il est normal que des millions d'étudiants arrivent dans l'enseignement supérieur, dont la vocation n'est pas de recevoir des élèves ayant obtenu un diplôme de bien faible valeur. Je ne propose de recourir à un tel mécanisme qu'en désespoir de cause, parce que nos universités ne savent plus comment faire.

Quand un étudiant n'est plus rattaché au foyer fiscal de ses parents, ces derniers ne bénéficient plus de la réduction d'impôt liée à la scolarité d'un enfant dans le supérieur, qui s'élève à 183 euros. Depuis plus de vingt ans, on gagne plus en réduisant ainsi ses impôts qu'en payant des droits d'inscription à l'université. Selon la Cour des comptes, le rattachement aux parents coûte 2,1 milliards d'euros. Si les étudiants choisissent de ne pas se rattacher au foyer de leurs parents, l'État fera des économies.

La grande population estudiantine résulte à la fois de la volonté de donner le baccalauréat à tout le monde et du baby-boom des années 2000. Cette tendance commencera à s'infléchir à partir de 2030.

Notre commission s'est penchée à plusieurs reprises sur le sujet du patrimoine immobilier des universités ; il n'est pas incongru de penser qu'une plus grande décentralisation ferait partie de la solution.

La maille départementale semble plus adaptée pour gérer certains sujets. À cet égard, pour revenir au dispositif prévu par mon amendement, le mécanisme basique pourra être adapté par les universités, en fonction de leurs besoins et de la rédaction choisie par le décret auquel l'amendement renvoie.

Les Crous ne me semblent pas manquer de compétence en matière de gestion. Ils sont en revanche confrontés à un afflux massif de demandes de prestations, combiné à une hausse des prix de tous les produits, notamment des denrées alimentaires. Sur le logement, je partage l'avis de Michel Canévet : la situation française n'est pas normale. Il faudrait que la Banque des territoires et la Caisse des dépôts et consignations procèdent à une action massive pour investir dans ces hébergements ; il s'agit de préparer notre avenir.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. - La question du président de la commission est pertinente, même si l'on peut s'interroger sur le fait d'opposer souveraineté énergétique et souveraineté spatiale.

Il est indéniable que la recherche spatiale présente un intérêt stratégique. Pour autant, comme l'a confirmé le président du Cnes lors de son audition, nous sommes actuellement dans un moment d'incertitude qui ne permet pas d'identifier clairement un besoin documenté d'augmentation de la dotation budgétaire du Cnes.

Le principal sujet à court terme, me semble-t-il, est de savoir quel budget la France va engager à la fin du mois lors de la réunion au niveau ministériel du conseil de l'Agence spatiale européenne à Brême. Il ne s'agit pas de quelques millions d'euros, mais d'un montant compris probablement entre 3 et 4 milliards d'euros.

En revanche, si vous proposez un amendement de réduction des crédits de l'Agence nationale de la recherche (ANR) pour augmenter le budget du Cnes, et avec un avis favorable du Gouvernement, nous serions tout à fait disposés à l'adopter.

Mais, je le répète, l'enjeu principal, c'est notre intégration ou non dans les programmes spatiaux européens et notre capacité à demeurer une partie prenante sérieuse dans l'Esa.

Pour répondre au rapporteur général et à Jean-Marie Mizzon sur les crédits européens, oui, le secrétaire général des affaires européennes, que je vois régulièrement, a pleinement conscience du problème. Nous avions alerté sur cette question l'an dernier, car il manquait alors environ 500 millions d'euros. Cette année, c'est encore plus... Nous pouvons certes être déçus, mais le fait de tirer la sonnette d'alarme lui a sans doute permis de s'organiser pour stimuler les opérateurs de recherche, au travers de la création d'une cellule dédiée. Il faut toutefois souligner que les grands opérateurs, comme le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ou l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), sont performants pour aller chercher des crédits européens. Le problème se pose plutôt pour les petits laboratoires, qui n'ont pas la capacité administrative nécessaire. L'amendement que nous avions proposé l'an dernier et qui visait à bonifier, avec des crédits nationaux de l'ANR, ceux qui bénéficiaient de crédits européens n'a pas été appliqué, mais nous referons le point l'année prochaine sur la capacité de persuasion du SGAE en la matière et sur le suivi de ce dossier par les opérateurs.

Monsieur Laménie, les plafonds d'emplois des opérateurs du programme 172 s'élèvent à 62 900 équivalents temps plein travaillé (ETPT) dans le PLF pour 2026, contre 62 830 en 2025, soit une baisse de 70 ETPT.

Monsieur Canévet a posé une question sur la recherche agricole, en ciblant l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae). Ses crédits s'élevaient à 19 millions d'euros pour 2025 ; ce montant est stable pour 2026. Nous devons associer à cela d'autres opérateurs, dont notamment ceux de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ». Sur cette question, tout le monde est mobilisé dans le sens de la souveraineté alimentaire.

Article 49 (état B)

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. - L'amendement II-31 (FINC.1) a pour objet de contribuer au redressement des comptes publics en ramenant l'enveloppe annuelle de l'ANR à un niveau de 1,18 milliard d'euros en autorisations d'engagement, soit une baisse de 150 millions d'euros. On voit au fil des ans que les autorisations d'engagement de l'ANR dépassent largement ses capacités d'utilisation en crédits de paiement, ce qui risque de poser problème. Je souligne aussi que l'ANR dispose aujourd'hui d'une trésorerie prévisionnelle estimée à 186 millions d'euros en fin d'année, qui ne correspond pas véritablement à un fonds de roulement, car ses frais de fonctionnement sont limités.

M. Claude Raynal, président. - Je suis étonné, car Bercy est en général très attentif à ce genre de choses...

L'amendement n°  II-31 (FINC.1) est adopté.

M. Claude Raynal, président. - L'amendement n°  II-32 (FINC.2) vise à tirer les conséquences de l'amendement portant article additionnel rattaché à la mission et tendant à prévoir une modulation des frais d'inscription selon les revenus du foyer fiscal auquel est rattaché l'étudiant. Il est demandé aux universités de mobiliser une partie de la hausse de leurs ressources propres pour contribuer à l'effort de réduction de la dépense publique, en minorant de 75 millions d'euros les crédits du programme 150.

L'amendement n°  II-32 (FINC.2) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

EXAMEN D'UN AMENDEMENT PORTANT ARTICLE ADDITIONNEL RATTACHÉ À LA MISSION

Après l'article 78

M. Claude Raynal, président. - L'amendement n°  II-33 (FINC.3) vise donc, comme je viens de l'indiquer, à moduler les frais d'inscription dans les universités selon les revenus du foyer fiscal auquel est rattaché l'étudiant.

L'amendement n°  II-33 (FINC.3) portant article additionnel est adopté.

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Réunie à nouveau le mercredi 26 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Action extérieure de l'État », « Aide publique au développement », « Cohésion des territoires », « Culture », « Immigration, asile et intégration », « Investir pour la France 2030 », « Monde combattant, mémoire et liens avec la nation », « Sport, jeunesse et vie associative », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.

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