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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Modification de l'ordre du jour

Candidature à une commission d'enquête

Rappel au Règlement

Condamnés terroristes et lutte antiterroriste

Discussion générale

M. François-Noël Buffet, auteur de la proposition de loi

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur de la commission des lois

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

M. Guy Benarroche

M. Ian Brossat

M. Michel Masset

Mme Patricia Schillinger

Mme Corinne Narassiguin

M. André Reichardt

M. Aymeric Durox

M. Louis Vogel

M. Philippe Bonnecarrère

M. Francis Szpiner

Discussion des articles

Article 1er

Article 1er bis

Article 1er ter

Article 2

Après l'article 2

Article 3

Article 7

Article 7 bis

Article 7 ter

Article 7 quater

Article 8

Après l'article 8

Article 9

Article 10

Article 10 bis

Article 11

Article 11 bis

Article 12

Article 15

Après l'article 15

Article 15 bis

Article 15 ter

Après l'article 15 ter

Accompagnement humain des élèves en situation de handicap

Discussion générale

M. Cédric Vial, auteur de la proposition de loi

Mme Anne Ventalon, rapporteure de la commission de la culture

Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

M. Gérard Lahellec

M. Bernard Fialaire

Mme Samantha Cazebonne

Mme Marie-Pierre Monier

M. Philippe Mouiller

Mme Laure Darcos

Mme Annick Billon

Mme Monique de Marco

M. Christian Bruyen

Mme Else Joseph

Discussion des articles

Article 1er

M. Max Brisson

Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Mme Annick Billon

Mme Françoise Gatel

Article 2

Vote sur l'ensemble

M. Cédric Vial, auteur de la proposition de loi

M. Max Brisson, au nom de la commission de la culture

Ordre du jour du mercredi 24 janvier 2024




SÉANCE

du mardi 23 janvier 2024

54e séance de la session ordinaire 2023-2024

Présidence de M. Dominique Théophile, vice-président

Secrétaires : Mme Nicole Bonnefoy, M. François Bonhomme.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Modification de l'ordre du jour

M. le président.  - Compte tenu du nombre d'amendements déposés sur la proposition de loi instituant des mesures judiciaires de sûreté applicables aux condamnés terroristes et renforçant la lutte antiterroriste, nous pourrions, en accord avec les commissions concernées et le Gouvernement et après concertation avec les groupes politiques, être amenés à siéger ce soir, afin de terminer l'examen des textes inscrits à notre ordre du jour.

Toutefois, je vous propose de poursuivre nos débats jusqu'à vingt et une heures s'il paraît possible d'épuiser notre ordre du jour dans ce délai.

Il en est ainsi décidé.

Candidature à une commission d'enquête

M. le président.  - J'informe le Sénat qu'une candidature pour siéger au sein de la commission d'enquête sur l'impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier a été publiée.

Cette candidature sera ratifiée si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre règlement.

Rappel au Règlement

Mme Nathalie Goulet.  - J'interviens sur le fondement de l'article 29 de notre Règlement.

Mohammad Ghobadlou : ce nom ne vous dit sans doute rien. C'est celui d'un jeune Iranien pendu ce matin, exécuté, parmi beaucoup d'autres, pour avoir participé aux manifestations du mouvement « Femme, vie, liberté ».

Notre commission des affaires européennes et notre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ont chacune adopté une résolution appelant à renforcer les sanctions contre le régime iranien. Les rapporteurs ont estimé qu'il n'était pas temps d'inscrire les Gardiens de la révolution sur la liste des organisations terroristes.

Depuis lors, la République islamique a contribué au pogrom du 7 octobre orchestré par le Hamas, ainsi qu'aux exactions commises par les Houthis en mer Rouge. Je forme le voeu que les résolutions de nos deux commissions soient inscrites à notre ordre du jour.

Dire que l'Iran préside la commission des droits de l'homme de l'ONU : je ne sais dans quel monde nous vivons... (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; MM. Joshua Hochart et Ian Brossat applaudissent également.)

M. André Reichardt.  - Très bien !

Acte est donné de ce rappel au Règlement.

Condamnés terroristes et lutte antiterroriste

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi instituant des mesures judiciaires de sûreté applicables aux condamnés terroristes et renforçant la lutte antiterroriste, présentée par M. François-Noël Buffet, à la demande du groupe Les Républicains.

Discussion générale

M. François-Noël Buffet, auteur de la proposition de loi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce texte nous paraît indispensable pour faire face à une menace terroriste qui se maintient à un niveau très élevé et prend des formes nouvelles.

Plus difficiles à combattre sont les actions menées par des loups solitaires, comme les récents attentats d'Arras et de la station Bir-Hakeim, dont les auteurs ne s'étaient pas rendus dans la zone syro-iraquienne. Les réseaux djihadistes recentrent leur action sur l'endoctrinement via les réseaux sociaux.

Il est ardu de surveiller ces individus isolés, dont le passage à l'acte est imprévisible. Le recel d'apologie du terrorisme n'étant pas puni, ils sont dans un angle mort du droit pénal. Les remises en liberté - 486 depuis 2018 - contribuent au maintien de la menace à un niveau élevé ; la moitié des personnes en fin de détention restent radicalisées. Ce phénomène s'accentuera avec les prochaines remises en liberté de détenus condamnés à de lourdes peines.

Nous ne devons pas éluder non plus le problème des mineurs radicalisés. L'année dernière, dix-neuf mineurs ont été déférés pour association de malfaiteurs en vue d'une entreprise terroriste. Cette évolution vers des profils plus jeunes, avec des projets d'attentat plus aboutis, est préoccupante.

Comme à son habitude, le Sénat entend agir avec sang-froid et responsabilité, sans renoncer à son rôle traditionnel de gardien des libertés publiques. Nous ne proposons pas une révolution, qui serait peu judicieuse, voire dangereuse, à six mois des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP). Notre approche est pragmatique et s'appuie sur les besoins exprimés par les acteurs de terrain. Il s'agit de combler les défauts et lacunes du dispositif actuel pour donner aux forces de sécurité tous les moyens juridiques de combattre les nouvelles expressions de la menace terroriste.

Dans cet esprit, notre proposition de loi rénove d'abord le régime des mesures judiciaires de sûreté applicable aux terroristes en fin de détention. La récente mesure de prévention de la récidive terroriste ayant accouché d'une souris, nous instaurons une mesure hybride mêlant suivi et surveillance judiciaires et aux critères de prononcé assouplis. La proposition de loi étend aussi le champ d'application de la rétention de sûreté en raison de troubles psychiatriques graves aux criminels terroristes et crée un nouveau régime de rétention de sûreté réservé aux condamnés terroristes encore engagés dans une idéologie radicale. L'objectif est d'éviter les « sorties sèches » de condamnés n'ayant pas renoncé à leur projet mortifère.

Ensuite, nous prenons à bras-le-corps la question de la prise en charge des mineurs radicalisés autour d'un principe : accompagnement autant que nécessaire, sanction dès que nécessaire. L'article 3 renforce ainsi l'arsenal à la disposition des juges des enfants dans les dossiers à caractère terroriste. En matière d'accompagnement, le texte reprend une proposition formulée en 2017 par nos anciennes collègues Esther Benbassa et Catherine Troendlé : la poursuite de la prise en charge des jeunes par la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) à leur majorité.

Par ailleurs, la proposition de loi met en adéquation la législation antiterroriste avec les nouveaux modes opératoires. Nous estimons incontournable l'introduction d'une nouvelle forme de délit de recel d'apologie du terrorisme, d'une peine complémentaire de bannissement numérique et d'une interdiction de paraître autonome.

Ces instruments redonneront aux services des marges de manoeuvre face à des individus très dangereux. La régulation de l'accès à l'espace numérique de condamnés terroristes est également une mesure de bon sens.

Enfin, notre proposition de loi ajuste plusieurs dispositifs antiterroristes à l'épreuve de la pratique. Je pense notamment à la procédure d'autorisation d'achat de fourniture sous pseudonyme, dont les lourdeurs limitent l'efficacité, et à l'adaptation des critères de dissolution des associations ou groupements de fait.

Je remercie le rapporteur, Marc-Philippe Daubresse, pour l'important travail qu'il a mené. Les amendements adoptés sur son initiative ont renforcé la robustesse juridique de certains dispositifs, et les articles additionnels complètent utilement notre proposition.

Je crois que nous partageons tous le même objectif. La commission des lois et le Sénat tout entier ont toujours répondu présent pour réformer la législation antiterroriste. Il est vrai que nous nous sommes parfois heurtés à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est embêtant...

M. François-Noël Buffet.  - ... et que l'équilibre entre proportionnalité des mesures et efficacité de la lutte antiterroriste n'est pas toujours aisé à tenir. Nous avons tenu à impliquer au maximum les acteurs de terrain et à prendre en compte les indices laissés par le Conseil constitutionnel dans ses décisions antérieures.

Je salue le travail du rapporteur, qui a réussi, je le crois, à trouver un chemin pour passer la rampe du juge constitutionnel. Je pense notamment à l'intégration d'un nouveau délit réprimant la détention de représentations de crimes terroristes, mais aussi à la sécurisation du dispositif facilitant l'achat de fournitures par des enquêteurs agissant sous pseudonyme.

L'intensité de la menace terroriste et ses évolutions nous imposent de rester unis et de prendre nos responsabilités pour permettre à nos services de remplir leur mission.

Il serait souhaitable que l'urgence soit déclarée sur ce texte, afin qu'il puisse entrer en vigueur avant les événements de l'été, pour protéger tous ceux qui se trouveront sur notre territoire à cette occasion. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Philippe Bonnecarrère et Joshua Hochart applaudissent également.)

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur de la commission des lois .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Cette proposition de loi a été déposée par le président de la commission des lois, mais aussi par les présidents Retailleau et Marseille. À la lumière des tragiques attentats d'Arras et de la station Bir-Hakeim, elle comble plusieurs lacunes de notre droit et donne aux pouvoirs publics de nouveaux moyens pour agir.

La commission des lois a accueilli favorablement ce texte nourri d'échanges avec les acteurs de terrain. Notre arsenal se concentre sur les menaces exogènes et sur les peines plus que sur le suivi des condamnés à l'issue de la détention.

Or le procureur antiterroriste rappelle la menace que représentent les individus sortant de prison. Et, aujourd'hui, la menace est surtout endogène, liée à des loups solitaires dont le passage à l'acte est imprévisible.

Les individus condamnés pour terrorisme sont les plus suivis en détention, mais les moins accompagnés après leur libération : nous ne pouvons nous satisfaire de ce paradoxe. Les loups solitaires adoptent des comportements mal appréhendés par le droit pénal : autoradicalisation en ligne, détention de centaines d'images faisant l'apologie du terrorisme... Nos outils judiciaires et administratifs sont inadaptés à ces enjeux.

Les mesures proposées sont rendues d'autant plus indispensables par l'approche des jeux Olympiques et Paralympiques, événement mondial particulièrement exposé à une menace terroriste.

Le texte ne bouleverse pas les équilibres construits depuis trente ans. Il consolide notre édifice juridique en remédiant aux lacunes judiciaires et administratives récemment apparues.

Convaincue de la nécessité d'améliorer l'efficacité et l'opérationnalité de nos dispositifs, la commission a approuvé l'économie générale de la proposition de loi. Nous avons toutefois porté une attention particulière à l'équilibre entre opérationnalité et efficacité, d'une part, et garantie des droits et libertés constitutionnels, d'autre part. Nous avons ainsi veillé à ce que les services de sécurité puissent s'appuyer sur des instruments efficaces ne portant que des atteintes strictement nécessaires à l'exercice des libertés fondamentales.

S'agissant des mesures judiciaires de sûreté, nous avons apporté au texte trois modifications pour en assurer la constitutionnalité et l'opérationnalité.

Compte tenu du bilan non concluant de la prévention de la récidive terroriste, il m'est apparu indispensable de garantir son adéquation aux profils des individus. Nous avons reformulé les critères exigés pour viser une probabilité élevée de récidive et une adhésion avérée à une idéologie ou à des thèses incitant au terrorisme.

Pour ne pas fragiliser le dispositif éprouvé des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (Micas), nous avons contrebalancé cet élargissement par l'ajout de plusieurs garanties : renforcement du volet réinsertion et accompagnement, exclusion de trois mesures de surveillance particulièrement attentatoires aux libertés - interdiction de paraître en certains lieux, obligation d'établir son domicile en un lieu donné et interdiction de port d'une arme. La commission a aussi limité les mesures de rétention de sûreté aux personnes condamnées à plus de quinze ans de prison.

Dans le même esprit, nous avons maintenu l'autorisation judiciaire préalable obligatoire pour les achats effectués par des enquêteurs sous pseudonyme, en aménageant les modalités de sa délivrance lorsque les produits sont licites.

Par ailleurs, nous avons substitué à l'interdiction de paraître dans les transports en commun dans le cadre d'une Micas une interdiction de paraître autonome, moins attentatoire aux libertés, mais aux critères de prononcé plus souples. Cette mesure paraît particulièrement opportune dans la perspective des JOP.

En ce qui concerne la dissolution des associations et groupements, il nous est apparu opportun de consacrer au niveau législatif la récente définition de la provocation énoncée par le Conseil d'État.

En matière pénale, la commission s'est attachée à renforcer la cohérence du texte et à renforcer la pénalisation de comportements particulièrement dangereux.

Nous avons modifié l'infraction de détention de contenus apologétiques afin d'en assurer la constitutionnalité. Plus précisément, nous avons restreint le champ d'application de ce délit en introduisant un critère de gravité particulièrement restreint et un élément intentionnel. Nous avons ainsi tiré les conséquences d'une décision antérieure du Conseil constitutionnel.

La commission a aussi introduit des mesures additionnelles, intégrant par exemple au délit d'apologie du terrorisme la diffusion de contenus apologétiques sur les réseaux privés de communication. Je pense aussi au renforcement de l'information des préfets sur les soins délivrés sans consentement à des personnes radicalisées.

Je vous proposerai plusieurs amendements visant à consolider ces avancées, notamment pour systématiser l'information des procureurs en cas de demande de changement de nom d'un condamné terroriste.

Je donnerai un avis favorable aux amendements de nos collègues Eustache-Brinio, Marseille et Goulet favorisant une lutte plus efficace contre tous les visages du terrorisme.

Face au terrorisme, le Sénat a toujours fait preuve de responsabilité. Dès 2014, la commission des lois a pris l'initiative de plusieurs évolutions qui ont renforcé considérablement notre arsenal, dans le respect des libertés individuelles. C'est dans le même esprit que nous vous invitons à approuver ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC ; M. Louis Vogel applaudit également.)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Partisans d'une « haine sans espoir ».

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice.  - Malraux !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - C'est ainsi que Malraux, en effet, décrivait les terroristes.

La menace terroriste demeure très élevée, alors que la France s'apprête à accueillir les JOP - ce qui n'arrive qu'une fois par siècle -, mais aussi les commémorations des débarquements de Normandie et de Provence.

Depuis 2012, la France a subi 25 attaques, qui ont fait 273 morts et des centaines de blessés. Depuis que je suis ministre de l'intérieur, douze attentats djihadistes ont été déjoués, ainsi que six liés à l'ultradroite et six à l'ultragauche.

L'année 2023 a été meurtrière : après dix-neuf mois sans attentat, les attaques d'Arras et de la station Bir-Hakeim nous ont rappelé la réalité de la menace. Le reste de l'Europe, notamment la Belgique, n'a pas été épargné, notamment dans le contexte du conflit entre Israël et le Hamas, propice aux attentats.

La menace actuelle est, d'abord, endogène : des Français, souvent établis sur notre sol depuis longtemps, abreuvés de propagande islamiste, très autonomes, risquent de passer à l'acte. On observe aussi, depuis un an, un regain d'affiliations à des organisations comme l'État islamique (EI).

Nous passons de la radicalisation dans des lieux de culte à la radicalisation en ligne, qui nourrit un séparatisme plus insidieux. Les réseaux sociaux mobilisent des profils jeunes au-delà de la mouvance radicale traditionnelle. Plus de la moitié des personnes impliquées ont moins de 20 ans. Souvent isolés socialement, mais très connectés virtuellement, ces jeunes, scolarisés la plupart du temps, sont entraînés par de mauvaises fréquentations et, pour un tiers d'entre eux, sont psychologiquement instables. Les théories du blasphème ou de la prétendue islamophobie plongent dans la radicalité des personnes peu visibles, et les drames connus par les musulmans dans le monde servent à justifier le passage à l'acte.

Le garde des sceaux le sait : les lieux d'incarcération sont un foyer de radicalisation, parfois pilotée depuis l'étranger. S'ils n'en ont sans doute pas les moyens, les terroristes ont l'intention de reproduire les attentats de 2015 et 2016. La résurgence du conflit israélo-palestinien est largement exploitée, et l'EI appelle à cibler les Juifs partout en Europe.

Il existe aussi un risque terroriste lié à d'autres idéologies. Je pense au terrorisme d'ultradroite, qu'il soit le fait de cellules subversives dépendant de mouvements mondiaux ou d'acteurs isolés. Les mouvements accélérationnistes et survivalistes sont préoccupants. L'ultradroite est très armée, très connectée et instrumentalise les crises internationales.

Le risque vient aussi de l'ultragauche - le nier serait une erreur. Les projets d'attentat sont moins nombreux, mais nul n'est à l'abri. Sur la voie publique, l'ultragauche instrumentalise les causes sociales et environnementales, et le risque de passage au terrorisme est réel.

Tel est l'état de la menace : principalement islamiste, mais aussi d'ultradroite et, bientôt peut-être, d'ultragauche.

Notre arsenal juridique a déjà été renforcé : la loi de 2021 adapte la loi de 2017 dite Silt, facilitant le travail de l'administration. La gestion du 31 décembre dernier, de la Coupe du monde de rugby et de la récente visite du Saint-Père à Marseille en atteste.

La loi d'août 2021 contre le séparatisme renforce la lutte contre le repli communautaire, qui favorise la radicalisation. Monsieur Buffet, je serai heureux de vous en présenter l'application : prêcheurs expulsés, contrôle des médecines alternatives, de la non-scolarisation et des idéologies radicales.

Quant à la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, elle prévoit des moyens accrus : le budget de la DGSI a doublé en un mandat, et ses effectifs atteignent 5 000 personnes - il y en aura 500 de plus au moment de l'emménagement sur le site unique de Saint-Ouen.

L'éloignement des étrangers fichés S atteint un record : 999 étrangers radicalisés ont été expulsés depuis 2017, dont 131 l'an dernier. Nous espérons que la loi Immigration contribuera à cette dynamique.

La proposition de loi de M. Buffet s'inscrit dans ce contexte. Son article 6 facilitera le travail des services avec l'enquête sous pseudonyme. L'interdiction de paraître est pertinente dans la perspective des JOP. L'élargissement des motifs de dissolution d'une association ou d'un groupement respecte la jurisprudence du Conseil d'État, et le délit de diffusion de contenus apologétiques répond à un objectif de longue date.

J'ai toutefois deux réserves sur la version initiale du texte. La première concerne la circonstance aggravante au délit d'apologie d'actes terroristes quand il est commis dans le cadre de l'exercice du culte. Le Conseil d'État s'est déjà prononcé défavorablement sur des mesures similaires, comme en 2020 sur le projet de loi Séparatisme. La loi de 1905 prévoit que le lieu de culte aggrave la circonstance pour les victimes, mais pas pour les auteurs.

La seconde porte sur l'interdiction de paraître dans les transports publics, qui est comprise dans l'interdiction générale de paraître. En outre, les agents de transports n'ont pas accès au fichier des personnes recherchées - notamment parce qu'une partie d'entre eux en fait partie... (Sourire à droite) Voilà qui mériterait une réécriture.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - C'est ce que nous avons fait.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Je salue le travail de la commission des lois. En particulier, une Micas ne sera plus suspendue pendant l'appel pour ne pas risquer de perdre de vue la personne surveillée, et l'ouverture du pourvoi en cassation au préfet apporte un équilibre entre les parties. Le suivi des personnes placées en soins sans consentement sera utile, de même que la modification des critères de prolongation de la détention en centre de rétention administrative (CRA).

Le délit d'apologie du terrorisme sur les réseaux privés de communication lorsqu'ils sont assimilables à des réseaux publics est également bienvenu. Adhérer à une boucle Telegram faisant l'apologie du terrorisme ou de la pédophilie n'est aujourd'hui pas un délit, alors que ces boucles rassemblent parfois des dizaines de milliers de personnes. Les services de renseignement et de police judiciaire ont toutes les difficultés à les suivre.

Votre proposition de loi limite un des effets indésirables de la loi Vignal : l'opposition possible au changement de nom est de bon sens.

Ce texte n'est certes pas une révolution - M. Buffet l'a dit -, mais une belle évolution. Je forme le voeu que nous trouvions une rédaction conforme à la Constitution, car il y a urgence, à 200 jours de la cérémonie d'ouverture des JOP à Paris - qui se produit une fois tous les 3 000 ans, puisqu'elle ne s'est jamais produite hors stade... (Sourires)

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Il faut la même urgence à l'Assemblée nationale !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Le terrorisme islamique est un fléau pour nos sociétés occidentales et démocratiques, un fléau que nous devons combattre de toutes nos forces.

Nous n'avons pas à rougir des mesures prises. Notre dispositif antiterroriste est l'un des plus complets au monde.

Il a été considérablement renforcé depuis 1986 : les actes terroristes ont été érigés en infractions autonomes assorties de peines aggravées, d'une instruction et d'un jugement centralisés et d'enquêtes et de peines placées sous un régime dérogatoire, plus efficace. En outre, leur prise en charge pénitentiaire est spécifique. Le Parlement a renforcé ce dispositif par la création, en 2019, du parquet national antiterroriste (Pnat).

La proposition de loi soumise à votre examen est complémentaire de cet arsenal. Je salue le travail de François-Noël Buffet. Si les ajustements qu'elle prévoit sont bienvenus, certaines dispositions doivent être retravaillées, pour des raisons de constitutionnalité ou d'opérationnalité.

La règle de droit est ce qui distingue la civilisation de la barbarie. N'en déplaise aux populistes, de plus en plus nombreux, l'État de droit n'est pas un obstacle à la lutte contre le terrorisme ; il en est l'instrument. Dans son oeuvre normative, le législateur doit ainsi concilier la lutte contre le terrorisme et la défense de nos valeurs.

Ce texte crée de nouvelles mesures judiciaires de sûreté applicables aux personnes condamnées pour terrorisme lorsque leur peine arrive à son terme. Nos établissements pénitentiaires travaillent à contrer la radicalisation et le prosélytisme. La remise en liberté de détenus radicalisés s'accompagne de mesures de surveillance, que nous renforçons depuis 2017. Le suivi sociojudiciaire peut aller jusqu'à trente ans, voire durer toute la vie. La mesure judiciaire de prévention de la récidive et de réinsertion permet un réexamen de situation par la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté. Les personnes concernées font l'objet d'un accompagnement resserré et sont inscrites au fichier des auteurs d'infractions terroristes.

S'ajoutent à cela des mesures administratives, dont la Micas, créée par la loi Silt. L'autorité administrative s'articule parfaitement avec l'autorité judiciaire.

La proposition de loi remplace la mesure judiciaire de prévention du terrorisme et de réinsertion en prévoyant un dispositif proche de la Micas. Cette superposition fragiliserait l'ensemble du dispositif. Le droit actuel distingue les finalités des mesures administratives et judiciaires : surveillance et prévention de la récidive. Confondre les deux nuirait à l'efficacité de l'action de l'État.

La proposition de loi prévoit aussi la rétention de sûreté de personnes sans troubles de la personnalité médicalement constatés, sur un soupçon de dangerosité. L'article IX de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen prévoit que la liberté ne saurait être entravée par une rigueur qui n'est pas nécessaire - le Conseil constitutionnel a plusieurs fois rappelé ce principe. Ne laissons pas penser que nous serions prêts à une justice prédictive, négation de l'idée même de justice.

Le délit de détention d'images terroristes a déjà été jugé contraire à la Constitution : la seule adhésion, sans apologie, à une idéologie ne caractérise pas la volonté de commettre un acte terroriste. En revanche, la condamnation de l'apologie du terrorisme sur des réseaux privés va dans le bon sens.

La commission des lois a apporté des améliorations aux Micas et renforcé l'information des préfets sur les soins psychiatriques dispensés aux personnes radicalisées.

Les mesures relatives au placement sous bracelet électronique des mineurs, le contrôle judiciaire des mineurs de 13 à 16 ans, la prolongation d'un placement pénal avec un suivi par la PJJ après 18 ans ou la révocation du sursis probatoire vont dans le bon sens, même si elles doivent faire l'objet d'ajustements techniques.

Ce texte vise un objectif louable. Toutefois, nous devons respecter les exigences constitutionnelles : ce texte doit donc être amélioré pour consolider un édifice déjà robuste en matière de lutte contre le terrorisme.

M. Guy Benarroche .  - À l'écoute des interventions précédentes, je partage plutôt vos constats, mais il est paradoxal de constater que la grande majorité des articles proposés ne résout pas les problèmes que vous avez vous-même identifiés. C'est un énième texte sécuritaire, sans impact réel.

Bien évidemment, l'État de droit est crucial. Nous devons combattre sans relâche le terrorisme pour défendre les droits de l'homme ; en protégeant les droits de l'homme, nous nous attaquons aux causes profondes du terrorisme.

Vous auriez pu prévoir d'autres solutions, mais cette proposition de loi participe de l'inflation législative constatée ces dernières années sans contribuer à un apaisement. Certes, la menace terroriste se situe à un niveau élevé, mais les propositions des auteurs témoignent d'une surenchère. L'opérationnalité et la constitutionnalité des mesures, leur efficacité, ne sont pas démontrées.

Les difficultés de prise en charge psychologique, l'imprévisibilité des loups solitaires ou la radicalisation des mineurs sont des réalités, mais ce texte n'y répond pas ; pis, il affaiblit les principes fondamentaux de notre droit.

Le GEST, dès la loi pour la confiance dans l'institution judiciaire, a dénoncé le fait de rogner les droits de la défense ou d'empêcher les juges de juger.

L'autoradicalisation ne peut se juguler sans prendre en compte l'isolement social et les problèmes psychologiques. La radicalisation des mineurs ne peut être prise en charge par la seule surveillance.

La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) a rappelé que le système judiciaire français se fondait sur un fait prouvé, et non sur la prédiction aléatoire d'un comportement futur, source d'arbitraire.

Nous déplorons l'absence de mesures de prévention de la radicalisation, notamment des mineurs : le traitement de leur dossier est transféré de l'aide sociale à l'enfance (ASE) vers la PJJ.

Selon l'Institut français des relations internationales (Ifri), en 2018, la majorité des actes terroristes sont commis par des personnes sans antécédents judiciaires. La pauvreté et l'isolement sont des facteurs propices à la radicalisation. Rien à ce propos dans ce texte, que le GEST ne votera pas.

M. Ian Brossat .  - La lutte contre le terrorisme est une priorité indiscutable ; nous devons collectivement assurer la sécurité de nos concitoyens. Nous devons être vigilants et ne pas céder au terrorisme. La société française a refusé de tomber dans les pièges, comme les États-Unis avec Guantánamo -  c'est heureux. Le terrorisme, tel un poison, cherche à nous faire changer de modèle.

Notre droit n'a pas été conçu uniquement pour les temps calmes : il vaut pour tous les temps. Réfléchissons sur ce que peut notre État de droit pour combattre légalement ceux qui balaient la légalité sans tomber dans le déni, l'indifférence ou la surenchère. Le rôle du politique est ici crucial, pour protéger et réparer.

Les attentats de 2015 - que les procès ont rappelés récemment à notre souvenir - ont bouleversé notre pays. La politique pénale a connu un durcissement considérable. Les prisons sont sous pression, mais l'administration pénitentiaire peine à prendre en charge les personnes incarcérées pour terrorisme.

Les sortis de prison sont-ils définitivement irrécupérables ? Notre société choisit-elle de neutraliser indistinctement ces causes perdues ? La répression seule ne peut être la réponse complète. Attaquons-nous aux causes profondes en prenant en charge les détenus radicalisés. Il faut professionnaliser le travail pour obtenir des résultats concrets.

Le monde carcéral est le talon d'Achille de la société pour le traitement des radicalisés : il manque considérablement de moyens.

La psychiatrie est cruciale, comme en témoigne le profil de l'assaillant de Bir-Hakeim.

La proposition de loi renvoie certains mineurs à la PJJ, dont l'action est louée. Nous nous en réjouissons, mais lors des débats budgétaires, nous avions proposé d'augmenter ses moyens humains - la majorité sénatoriale avait refusé de les augmenter.

Ainsi, ce texte élude des questions essentielles et se distingue par des ajouts éloignés de l'ambition initiale.

Nous sommes inquiets de voir apparaître des dispositions allant au-delà du terrorisme. Ainsi en est-il du régime des dissolutions administratives d'association, déjà révisé par la loi confortant le respect des principes de la République. Par amendement, il nous est proposé de définir la provocation justifiant cette dissolution ou de créer un régime de transfert des biens des associations dissoutes...

L'article 6 justifie l'achat de produits illégaux par les enquêteurs sous pseudonyme.

Une inconduite notoire deviendrait un motif de révocation d'un sursis probatoire et d'un suivi sociojudiciaire.

Nous espérons que nos amendements seront adoptés pour modifier ces mesures préoccupantes. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K ; MmeMarie-Pierre de La Gontrie et Colombe Brossel applaudissent également.)

M. Michel Masset .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Cette proposition de loi prétend être une réponse aux attentats terroristes. Quelle direction le Sénat veut-il donner aux politiques de sécurité ?

Il n'y a pas lieu d'apposer un blanc-seing à ce texte ni de s'y opposer par principe. Nos concitoyens attendent des réponses face aux attaques commises sur notre sol. L'endoctrinement rendu possible par les réseaux numériques propage ces idéologies mortifères.

Des personnes détenues en France pour terrorisme sortiront de détention prochainement. L'islamisme radical persiste, de même que des groupuscules fascisants.

Tous les groupes du Sénat veulent travailler ensemble pour garantir la sécurité des Français.

J'appelle à l'équilibre. Les principes cardinaux de notre droit pénal sont issus des Lumières : proportionnalité et individualisation des peines, impossibilité d'être condamné deux fois pour les mêmes faits, autant de protections de notre État de droit. M. Szpiner a rappelé ce capital moral.

Le Sénat ne doit pas voir le contrôle de la loi par le Conseil constitutionnel comme un empêchement, mais comme un outil de sauvegarde des droits et des libertés. À nous de trouver cet équilibre entre liberté et sécurité.

Certaines mesures répondent à ces remarques, éclairées par la commission des lois.

L'article 1er bis introduit la notion d'inconduite notoire comme motif de retrait d'un sursis probatoire. Cela existe déjà dans le code de procédure pénale comme motif de révocation à la liberté conditionnelle, mais cette nouvelle disposition pâtit d'un flou important.

L'article 11 bis doit être revu au regard de la protection de la vie privée.

Enfin, le renforcement de l'arsenal judiciaire s'appliquant aux mineurs de moins de 16 ans mérite toute notre vigilance.

Comme le disait Cesare Beccaria, le moyen le plus sûr, mais le plus difficile, de prévenir les délits est de perfectionner l'éducation. Avant de judiciariser les mineurs, il faut s'assurer que tous les moyens sociaux et éducatifs ont été prévus. Notre responsabilité envers notre jeunesse est immense.

Le RDSE se maintiendra dans une dynamique d'équilibre au service de la sécurité des citoyens. (Applaudissements sur les travées du RDSE)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ça, c'est de la périphrase !

Mme Patricia Schillinger .  - Cette proposition de loi fait écho aux attentats d'Arras et du pont de Bir-Hakeim. La menace terroriste reste prégnante.

Nous pensons aux victimes et à leurs familles. Nous pensons aux forces de l'ordre et aux services de renseignement luttant activement contre la menace terroriste ; leur action a permis de déjouer 43 attentats.

Nous avons considérablement renforcé notre arsenal depuis 2017, avec la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), la création du Pnat...

Nous avons considérablement renforcé les moyens judiciaires et administratifs pour lutter efficacement contre le terrorisme ; c'est une préoccupation constante de la majorité présidentielle.

La menace terroriste a cependant considérablement évolué depuis 2015, avec des détenus ayant déjà purgé leur peine, des attaques plus imprévisibles en raison du profil des personnes radicalisées -  les loups solitaires, parfois très jeunes. Les mineurs se radicalisent sur les réseaux sociaux, hors de tout lieu de socialisation.

L'arsenal pénal actuel ne permet pas d'appréhender ces évolutions ; le texte vise à pallier ces lacunes.

Comme les auteurs du texte, nous voulons garantir la sécurité des Français, notamment lors des jeux Oympiques et Paralympiques (JOP). Mais cela ne peut se faire que dans le respect de l'État de droit ; à ce titre, nous avions des réserves sur le texte initial. Nous saluons le travail du rapporteur, qui a recherché un équilibre entre opérationnalité et efficacité des mesures et garantie des droits et libertés constitutionnels.

Les mesures judiciaires de sûreté sont mieux encadrées : leur champ se limite aux seuls condamnés pour terrorisme à 15 ans d'emprisonnement, ou 10 ans en cas de récidive ; une prise en charge adaptée est également prévue.

La substitution d'une interdiction de paraître autonome à l'interdiction de paraître dans les transports est moins attentatoire aux libertés individuelles ; sous réserve des observations en séance, elle est opportune pour les JOP.

Nous sommes globalement favorables à ce texte, malgré des réserves : l'ajout du critère d'inconduite notoire comme motif de révocation du sursis probatoire est flou et nuit à la visibilité des dispositifs. L'imprécision juridique nous fait craindre un risque d'arbitraire.

Nous souscrivons pleinement à l'objectif du texte, mais certaines mesures semblent difficilement conciliables avec l'État de droit.

Nous serons attentifs aux arguments des uns et des autres, et en particulier à votre avis, monsieur le garde des sceaux. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Corinne Narassiguin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Depuis vingt ans, les législations sur le terrorisme se sont succédé : elles sont plus nombreuses que celles relatives à l'immigration...

En 2009, Robert Badinter déclarait : « S'agissant du terrorisme, tout attentat aveugle, dirigé contre des civils anonymes, par définition innocents, pour semer la terreur et la dévastation est un crime contre l'humanité. »

La fermeté s'impose, mais nous devons agir dans le cadre de l'État de droit. Face aux attentats terroristes, le débat sur l'adaptation du droit existant est légitime.

Quand nous étions aux responsabilités, nous avons fait évoluer notre droit : en 2014, nous avons créé de nouvelles infractions afin de permettre la judiciarisation de personnes n'étant pas encore passées à l'acte. En 2015, la loi relative au renseignement a permis à nos services de détecter les risques sur notre territoire. La loi du 3 juin 2016 a introduit la peine complémentaire de suivi sociojudiciaire, imposant des mesures de surveillance pour éviter la récidive.

Nous sommes donc favorables à la modification du droit existant pour gagner en efficacité, mais en assurant toujours l'équilibre entre sécurité et respect des libertés fondamentales et individuelles.

Les terroristes veulent s'en prendre à ce que nous sommes : notre État de droit, nos valeurs, notre justice. Chaque fois que nous fragilisons nos principes fondamentaux, nous reculons face au terrorisme.

La loi instaurant des mesures de sûreté du 10 août 2020 a été largement censurée par le Conseil constitutionnel, estimant qu'elle contrevenait à la liberté d'aller et de venir, à la protection de la vie privée et au droit à mener une vie familiale normale - le Conseil a jugé que le texte n'était pas adapté pour prévenir des actes terroristes.

La loi du 30 juillet 2021 a instauré une nouvelle mesure judiciaire de prévention et de réinsertion, la mesure judiciaire de sûreté.

Le projet de loi Immigration a fait céder de nombreuses digues, comme la responsabilité du législateur. Désormais, de la droite jusqu'à l'Élysée, jouer avec la Constitution est un nouveau mode opératoire... (Exclamations à droite)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Eh oui !

Mme Corinne Narassiguin.  - Il est inconcevable que le Parlement adopte des dispositions inconstitutionnelles.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Il faut relire Le Coup d'État permanent !

Mme Corinne Narassiguin.  - Nous dénonçons ce bricolage législatif à des fins politiques. (Marques d'approbation sur les travées du groupe SER)

La création d'une nouvelle mesure de sûreté, la notion d'inconduite notoire, la rétention de sûreté en cas de troubles psychologiques, l'interdiction de paraître dans les pouvoirs publics et l'omniprésence du pouvoir administratif posent problème.

La rétention de sûreté, mesure exceptionnelle, concerne un nombre restreint de crimes graves. En l'élargissant à la sortie de prison, vous créez une nouvelle peine après la peine, pour un acte pouvant avoir potentiellement lieu selon des critères imprécis.

Nous refusons la justice prédictive, digne de science-fiction dystopique. (MÉric Dupond-Moretti apprécie la formule.)

Vous ne menez aucune réflexion de fond : rien n'est fait sur la prévention en détention, dont vous faites l'alpha et l'oméga de la peine. Pas à pas, vous fragilisez notre système pénal et notre État de droit.

En 2008, lors de l'examen de la loi relative à la rétention de sûreté, Robert Badinter estimait que notre système de justice pénale reposait sur le principe de la responsabilité, entendu comme contrepartie de la liberté. Vous répondez de vos actes selon les principes de l'État de droit. À partir du moment où vous gardez en prison des personnes au vu de crimes que celles-ci pourraient commettre, vous changez de système. Comment vous défendre alors que vous n'êtes accusé de rien ? Vous souhaitez nous faire passer d'une justice de liberté à une justice de sûreté, renouant avec des théories du XIXe siècle sur les crimes commis par des individus ataviques et amoraux, faisant fi de la présomption d'innocence, du principe de non-rétroactivité et de non-cumul des peines. Ce texte marque le renoncement à nos principes fondamentaux de droit pénal.

Vous niez ce que les statistiques révèlent : la récidive n'a pas lieu en cas de réinsertion.

Notons deux articles qui nous interpellent : les articles 9 et 10, qui ne sont autres que les articles 9 et 23 du projet de loi Immigration. (On le déplore à gauche.) Que font-ils ici ?

Ou bien ils sont constitutionnels, et ils seront dans le texte promulgué ; ou bien ils ne le sont pas : voulez-vous nous faire adopter des dispositions anticonstitutionnelles ? Nous déplorons aussi le recours à une proposition de loi, sans avis du Conseil d'État.

Nous partageons l'objectif du texte, mais il faut plutôt privilégier le renseignement, la prévention et une application proportionnée du droit existant. Le groupe SER restera très vigilant quant au respect de notre État de droit. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. André Reichardt .  - Pas de sécurité sans sûreté. Notre sécurité collective nécessite des moyens de fermeté et des mesures de sûreté. Cette proposition de loi est donc indispensable.

Dès avant les attentats de 2015, nous avons produit collectivement, au Sénat, une connaissance de nombreux aspects du terrorisme. Nous mesurons toute sa singularité : son hybridité, civile et armée, politique et religieuse, nécessitant des moyens eux-mêmes nouveaux et hybrides.

Cette proposition de loi aborde un aspect essentiel : le suivi des condamnés pour terrorisme, qui ne doit pas être exclusivement répressif ou préventif, est donc indispensable.

Avec Nathalie Goulet, nous avions constaté dès 2015 qu'il n'est de terrorisme qui ne soit dissimulé. Nombre de décisions judiciaires révèlent toujours des stratégies de dissimulation, des discours incohérents, des indices d'allégeance et de loyauté occultes...

On ne peut lutter efficacement contre le terrorisme qu'à l'aide de mesures de suivi et de peines complémentaires. Ce texte assurera donc la sécurité de tous dans nos transports, nos fêtes, nos célébrations - par des mesures de sûreté à l'égard de quelques-uns.

Il s'agit donc de lutter contre les discours de radicalisation touchant des esprits simples ou des jeunes par le biais des nouvelles technologies. Nous avons renforcé en 2022 la prévention de contenus à caractère terroriste en ligne. Ancien rapporteur pour la commission des lois, je me réjouis que la loi ait enfin reçu son décret d'application. Les canaux électroniques favorisent, souvent, l'isolement des mineurs et, parfois, leur radicalisation.

Les condamnés pour terrorisme présentent tous une dangerosité particulière. Si imprécise soit-elle, cette notion ne peut être ignorée. Comment ignorer que des actes sont commis après une radicalisation en prison, un fichage S et 30 condamnations ? Le sénateur d'Alsace que je suis se souvient d'un tel profil : le terroriste qui avait frappé Strasbourg en plein marché de Noël - en plein coeur.

Mon intervention ne serait pas complète sans l'évocation d'un point qui semble être passé entre les mailles de ce texte : les acteurs en contact étroit avec les jeunes, notamment les enseignants et les éducateurs sportifs, à même de les suivre. Pourtant, dès 2014, un rapport sénatorial recommandait des formations obligatoires de ces acteurs au repérage de la radicalisation. (Mme Nathalie Goulet le confirme.) Malgré la création de référents au ministère de l'éducation nationale notamment, l'offre de formation continue des agents publics pourrait donc être complétée, sans surcoût pour les finances publiques. Mais mes deux amendements dans ce sens n'ont pas résisté à l'article 40 - alors que ces budgets existent déjà.

Nous voterons ce texte, dont les moyens de fermeté contre le terrorisme sont indispensables. Il apporte une importante contribution, en combinant sécurité, sûreté et fermeté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Philippe Bonnecarrère et Louis Vogel applaudissent également.)

M. Aymeric Durox .  - Depuis 2012 et les tueries immondes de Merah, 50 actes de terrorisme ont fait 272 morts et 1 200 blessés selon la DGSI.

Le législateur doit donner au peuple français les armes pour qu'il puisse se défendre. Ce texte va dans le sens d'un réarmement, pour reprendre un mot à la mode. Depuis des années, c'est le point de vue du Rassemblement national sur les terroristes, qui ne veulent pas être réinsérés dans une société qu'ils combattent et détestent. Les mesures de sûreté correspondent donc au principe de précaution inscrit dans la Constitution.

Mais il faut aller plus loin. Nous préconisons l'expulsion automatique des étrangers condamnés pour terrorisme, afin d'éviter tout risque de récidive sans coût supplémentaire. Nous voulons aussi déchoir de leur nationalité tous les condamnés français, et expulser ceux qui ont une double nationalité. Une Franco-turque a été ainsi déchue pour avoir projeté un attentat en 2017 - sans que le Conseil d'État y trouve à redire. Une vingtaine de telles déchéances ont eu lieu, mais il reste impossible de déchoir des personnes nées françaises : la loi devrait le permettre.

Hormis deux Français convertis, tous les terroristes sont à plus ou moins long terme issus de l'immigration et de pays musulmans, selon Le Figaro. (MMGérald Darmanin et Éric Dupond-Moretti le contestent vivement.) D'après le chercheur Jean-Baptiste Meyer, le nier empêcherait d'expliquer le phénomène.

La lutte contre le terrorisme islamique passe donc par une maîtrise totale des flux migratoires. (M. Joshua Hochart applaudit ; MM. Gérald Darmanin et Éric Dupond-Moretti continuent à contester les propos de l'orateur alors que celui-ci regagne son siège.)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Et l'ultradroite ?

M. Louis Vogel .  - La France est une cible privilégiée du terrorisme ; l'assassinat de Dominique Bernard nous l'a rappelé tragiquement. Les JOP accroissent encore les risques, déjà renforcés par l'évolution du profil des terroristes. La menace est devenue endogène. Bien que nos services aient déjoué de nombreux projets - je les salue -, il faut adapter notre droit pour répondre à ces évolutions.

Nous avions voté en 2021 une proposition de loi portant diverses mesures de sûreté à l'encontre des personnes condamnées pour terrorisme, qu'il faut compléter. C'est ce que fait ce texte, avec un élargissement des mesures que le juge peut prononcer, un suivi élargi et une extension des mesures de sûreté aux auteurs d'actes terroristes.

Il faut modifier le contrôle judiciaire et l'assignation à résidence, et nous sommes pleinement favorables à l'expulsion des terroristes étrangers, qui ne méritent pas de rester sur notre sol.

Nous étions plus réservés à l'égard de la notion d'inconduite notoire. Je salue la proposition du rapporteur, qui la remplace par la notion plus précise de « comportement contraire aux valeurs de la République ». Ainsi, le juge pourra sanctionner des manquements précis, sans équivoque.

La création d'un nouveau délit d'adhésion à une idéologie terroriste est intéressante, mais délicate à manier. La commission a amélioré le dispositif, mais il demeure à la limite de la légalité. Nous espérons que notre travail l'améliorera encore.

Le texte corrige plusieurs erreurs, notamment sur la procédure liée au changement de nom : il s'agit de rendre les dispositifs plus opérationnels.

En conséquence, cette proposition de loi renforce utilement notre arsenal tout en respectant l'État de droit - qui n'est pas nécessairement un État faible. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

M. Pierre Jean Rochette.  - Excellent !

M. Alain Chatillon.  - Bravo !

M. Philippe Bonnecarrère .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le terrorisme est toujours présent en France. Avons-nous tout fait pour lutter contre ? Faute de certitude, l'exécutif et le législatif ont l'obligation de faire le maximum. Nous devons donc supprimer les angles morts, comme l'a dit le rapporteur. Il ne s'agit pas de communication politique, madame Narassiguin.

Depuis l'état d'urgence, les textes se sont succédé sur cette question - comprenant notamment la sanctuarisation des Micas -, montrant la difficulté de la tâche d'un point de vue juridique autant qu'opérationnel et constitutionnel.

Les garanties proposées permettent-elles de franchir le test de constitutionnalité ? L'évolution de la menace ne ferait-elle pas évoluer l'évaluation de la proportionnalité par le Conseil et la nécessité des mesures envisagées ? Je pense que oui. Le loup solitaire, l'autoradicalisation par l'imam Google dénoncée par les responsables de la communauté musulmane, la sortie de personnes condamnées à des peines longues pour terrorisme, un taux important de troubles psychiatriques le justifient.

Je ne vois pas là de justice prédictive, et la loi de sûreté de 2008 est loin de ce qui nous occupe : il est difficile d'appliquer des citations de l'époque. Ainsi, les deux nouvelles mesures de rétention de sûreté vont dans le bon sens.

Nous approuvons que soit retravaillé le délit de recel d'apologie du terrorisme, pour concilier respect des libertés et principe de légalité d'une infraction et l'objectif d'ordre public, de valeur constitutionnelle. Le fait doit être traité : si à l'occasion d'une visite domiciliaire, est révélée la détention d'un matériel de propagande terroriste, que fait-on ? Rien ? Ce serait inacceptable. Il faut donc prendre un risque tout en étant attentif à la qualité de la rédaction de cette disposition.

J'ai un faible pour la créativité de notre rapporteur sur la diffusion, au sein des réseaux sociaux, de contenus faisant l'apologie du terrorisme. L'autoradicalisation sévit tout particulièrement sur WhatsApp, Instagram et autres : fréquenter cet environnement vous isole et fournit un substrat mortifère.

Je suis un peu plus réservé sur le bannissement numérique comme peine complémentaire, qui vise les mineurs : rien n'empêche de créer successivement de nouveaux profils. Même chose sur l'interdiction de paraître dans les transports en commun ; mais la navette y pourvoira.

La référence à l'inconduite notoire m'a fait tiquer.

Mme Nathalie Goulet.  - Ah !

M. Philippe Bonnecarrère.  - L'article 733 du code de procédure pénale y fait effectivement référence, ce qui montre que le droit pénal peut comporter des surprises. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Louis Vogel applaudit également.)

M. Francis Szpiner .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le terrorisme, c'est un venin inoculé à la démocratie qui essaie de nous faire perdre nos valeurs, pour nous placer dans le même rapport de non-droit et de violence. On sait ce qu'il en est advenu pour la démocratie américaine à Guantánamo.

Ce texte respecte l'État de droit, qui n'est pas l'état de faiblesse. Le rapporteur a fait un point avec les acteurs de la lutte antiterroriste. C'est la question centrale.

La rétention, mesure la plus contestée, nous ne l'avons pas inventée, pas plus que M. le garde des sceaux avec la justice prédictive ! Vous êtes tout de même extraordinaires : cette disposition existe dans le code de procédure pénale.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce n'est pas ce que nous avons fait de mieux...

M. Francis Szpiner.  - Elle concerne les violeurs, les pédophiles, les assassins, entre autres. Nous ne faisons qu'ajouter les terroristes à cette liste. (Applaudissements à droite)

Mme Sylvie Goy-Chavent.  - Très bien !

M. Francis Szpiner.  - Cela vous choque d'ajouter à cette liste ceux qui sèment la terreur et qui tuent ? Relisez l'article 706-53-13 du code : la mesure, exceptionnelle, est subordonnée à certaines conditions.

Vous vous inquiétez de la dissolution d'associations. Mais le terrorisme est une chaîne : celui qui tue, celui qui fournit l'appartement, celui qui fournit la voiture, l'arme... et il y a les agences de voyages pour la Turquie, la Syrie. Ces dissolutions, monsieur le ministre de l'intérieur le sait, se font sous le contrôle de la justice administrative, à qui il arrive de ne pas partager ses analyses.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est même fréquent !

Je ne vois pas en quoi ces dispositions portent atteinte à l'État de droit.

Quand un mineur radicalisé de plus de 13 ans est en prison, ce n'est pas pour un péché véniel. Les gamins qui ont dénoncé - vendu ! - Samuel Paty à son assassin ont été condamnés à quelques mois de prison, dont une partie avec sursis. (On renchérit sur les travées du groupe Les Républicains.) On ne met en prison que pour des raisons impérieuses et nécessaires.

J'en viens au délit de recel d'apologie du terrorisme. Le Père Hamel a été tué parce que ses assassins se sont rencontrés en 48 heures sur une boucle WhatsApp pourtant suivie par le renseignement territorial. Si ce texte avait existé, on aurait pu intervenir. Dans un monde parfait, on pourrait sonder les coeurs et les reins et sauver tout le monde - mais l'efficacité commande de nous donner les moyens de lutter contre le terrorisme, en partant de l'expérience de terrain.

J'ai un point de divergence avec le rapporteur, sur l'inconduite notoire, notion qui existe en effet dans le code de procédure pénale. La chambre criminelle de la Cour de cassation - chambre qui porte parfois bien son nom - a estimé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre une QPC sur cette notion, sur laquelle le Conseil constitutionnel ne s'est donc pas prononcé. La nouvelle rédaction proposée ne me satisfait pas, mais dans l'ensemble, ce texte est efficace, utile et ne viole aucun principe juridique. Il doit être adopté. (L'orateur martèle son pupitre.)

M. le ministre de l'intérieur a regretté l'avis défavorable du Conseil d'État concernant les imams qui font l'apologie du terrorisme.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Dans les lieux de culte.

M. Francis Szpiner.  - Mais le Conseil d'État ne donne que des conseils ! Il ne dit pas la conformité à la Constitution. Être victime dans un lieu de culte serait une circonstance aggravante et donnerait droit à la considération du Conseil d'État, et y commettre un crime, à toute son indulgence ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. Gérald Darmanin, ministre.  - C'est un délit qui existe par ailleurs.

Discussion des articles

Article 1er

M. le président.  - Amendement n°31, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéas 11 à 16

Supprimer ces alinéas.

Mme Corinne Narassiguin.  - Sans remettre en cause le renforcement de l'accompagnement médical et psychiatrique, nous sommes opposés à une mesure de sûreté décidée à partir d'un risque de récidive et de l'adhésion à une idéologie incitant au terrorisme - d'autant que l'application en cas de simple réitération élargit bien plus le champ que la seule récidive. Or les infractions à caractère terroriste peuvent couvrir une multitude d'actes à la dangerosité et à la gravité variables.

C'est superflu et dangereux. En quoi une adhésion « avérée » est-elle plus aisée à qualifier qu'une adhésion persistante ?

De telles mesures doivent être strictement encadrées et ne sauraient s'appliquer que très exceptionnellement. Nous visons l'efficacité et l'opérationnalité.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable. Nous cherchons l'efficacité - Francis Szpiner l'a remarquablement dit. Le Pnat considère que c'est une bonne mesure, mais que la rédaction actuelle ne permet pas de caractériser la dangerosité. Nous ne faisons que reprendre la formulation qu'il suggère : probabilité « élevée » de récidive et adhésion « avérée ».

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Avis favorable. En l'état du droit, la mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste créée par la loi du juillet 2021 peut être prononcée à l'égard de personnes qui présentent à l'issue de leur peine « une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive et par une adhésion persistante à une idéologie ou à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ». Ces critères reprennent ceux qui sont applicables aux Micas. Ne multiplions pas les rédactions.

L'amendement n°31 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°47, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission.

Après l'alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé : 

...) Les deuxième et troisième alinéas et la seconde phrase du quatrième alinéa du I sont supprimés ;

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Rédactionnel.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Sagesse.

L'amendement n°47 est adopté.

L'article 1er, modifié, est adopté.

Article 1er bis

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Supprimer cet article.

M. Guy Benarroche.  - Le rapporteur a renoncé à la notion d'inconduite notoire du condamné, mais celle de « comportement qui manifeste qu'il ne respecte pas les principes de la République » est tout aussi floue et arbitraire.

Le sursis probatoire repose sur des obligations - de travail, de formation ou de soins, interdiction de paraître dans certains lieux - prononcées par le juge. Leur non-respect est un critère beaucoup plus objectif. Le contrôle est assuré par le juge de l'application des peines (JAP) et les conseillers des services pénitentiaires d'insertion et de probation (Spip) - qui attendent toujours une revalorisation de leur carrière. Réarmons ces services essentiels.

M. le président.  - Amendement identique n°28, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

M. Ian Brossat.  - Cet article complète les motifs de retrait d'un sursis probatoire et d'un suivi socio-judiciaire par la notion d'inconduite notoire. Sur la forme, il dépasse le cadre de la législation antiterroriste. Sur le fond, les nombreuses censures du Conseil constitutionnel incitent à légiférer avec précaution. La notion d'inconduite notoire est source d'insécurité juridique et est contraire à la lisibilité du droit.

M. le président.  - Amendement identique n°32, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Nous n'écrivons pas la loi sous la dictée du Pnat, monsieur le rapporteur ! Vous n'avez pas su défendre la notion d'inconduite notoire en commission : elle serait censurée par le Conseil constitutionnel, sur le critère de lisibilité de la loi. Je sais la majorité sénatoriale et le Gouvernement peu farouches en matière d'inconstitutionnalité, mais il faut se reprendre...

La nouvelle proposition du rapporteur n'est pas plus efficace. Une sanction aussi radicale exige des critères précis, car nous sommes en matière pénale.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Mon amendement n°48 s'inscrit dans ce débat.

Madame de La Gontrie, je n'amende pas sous la dictée du Pnat !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ne le citez pas, alors !

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - J'ai tenu compte des observations de chacun, du JAP, du Pnat, des tribunaux pour enfants, des professionnels du droit. Face à ce terrorisme endogène, comment être opérationnel et efficace, dans le respect des libertés ?

Facialement, des condamnés observent leurs obligations, mais ont, sur les réseaux sociaux par exemple, des comportements qui sont loin d'être exemplaires, pour dire le moins. L'inconduite notoire existe dans le code de procédure pénale, mais c'est une notion passablement sibylline, qui emporte des risques juridiques. Aussi ai-je proposé de la remplacer par les mots « lorsque le comportement manifeste qu'il ne respecte pas les principes de la République », tels que votés dans la loi Immigration.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Nous sommes rassurés !

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - De tels comportements peuvent être caractérisés.

Avis défavorable à ces amendements, en restant ouvert à une nouvelle formulation dans le cadre de la navette.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Sagesse. Madame de La Gontrie, le Pnat ne dicte pas la loi...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - À vous, peut-être pas...

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Il l'applique, comme tous les magistrats, qui sont la bouche de la loi. Mais il est utile de prendre son attache pour nous éclairer. Il a simplement répondu aux questions. Chacun est à sa place, le Pnat ne viole pas la sacro-sainte séparation des pouvoirs.

Les amendements identiques nos12, 28 et 32 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°48, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission.

I. - Alinéa 2 

Remplacer les mots : 

en cas d'inconduite notoire 

par les mots :

lorsque son comportement manifeste qu'il ne respecte pas les principes de la République

II. - Alinéa 3

Remplacer les mots : 

ou en cas d'inconduite notoire 

par les mots :

ou lorsque le comportement du condamné manifeste qu'il ne respecte pas les principes de la République

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Défendu.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Sagesse.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Dommage !

Mme Corinne Narassiguin.  - Lors du débat sur le projet de loi Immigration, nous avions déjà souligné les risques d'inconstitutionnalité d'une formulation aussi floue, qui fait courir un risque d'arbitraire, s'agissant des titres de séjour. Ici, il s'agit de renvoyer des gens en prison ! Nous voterons contre.

L'amendement n°48 est adopté.

L'article 1er bis, modifié, est adopté.

Article 1er ter

M. le président.  - Amendement n°46, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Corinne Narassiguin.  - Faire de la commission d'une nouvelle infraction un motif de révocation d'une surveillance judiciaire ou d'un suivi socio judiciaire dépasse largement la lutte contre le terrorisme. Va-t-on révoquer ces mesures à l'aveugle, sans prise en compte du contexte, de la personnalité ou du type d'infraction - routière, par exemple ?

Au demeurant, la juridiction de jugement qui décide de cette nouvelle condamnation peut déjà révoquer une surveillance judiciaire, après avis du JAP, ce qui est équilibré et fonctionnel.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°46 n'est pas adopté.

L'article 1er ter est adopté.

Article 2

M. le président.  - Amendement n°33, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéas 5 et 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Corinne Narassiguin.  - L'enfermement au-delà de la fin de la peine est déjà possible, à titre exceptionnel, en cas de dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive liée à un trouble grave de la personnalité, selon une causalité bien définie. Cette proposition de loi ajoute comme motif d'enfermement la probabilité très élevée de récidive et l'adhésion persistante à une idéologie terroriste.

Dans son rapport de 2020 sur le bilan de la loi Silt, M. Daubresse écrit que les conditions d'appréciation de la dangerosité et du risque de récidive reposent uniquement sur un examen clinique confié à des experts psychiatres. Or dans leur grande majorité, les condamnés terroristes ne présentent pas de troubles mentaux. Le Pnat regrette qu'on ne puisse dès lors prononcer une telle mesure, même quand la dangerosité paraît évidente - mais de quelle évidence parlez-vous ? Auriez-vous une prescience que n'ont pas les praticiens ? Avez-vous bien réfléchi aux conséquences de votre texte ?

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Vous avez raison de relire mes propos, chère collègue, mais avec cet amendement, vous reprenez les critères actuels justifiant une mesure de prévention de la récidive très restrictive, constitutive d'une infraction d'association de malfaiteurs terroristes. Vous allez très loin !

Je propose que quelqu'un qui a fait plus de quinze années de détention pour crime terroriste, qui a une probabilité de récidive très élevée, puisse être pris en charge dans une structure spécialisée de déradicalisation, selon une procédure pluridisciplinaire, incluant une expertise médicale, à condition qu'il n'existe aucune mesure moins stricte. Cela me semble garantir la proportionnalité. Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Sagesse. Je réponds à la philippique de Francis Szpiner, qui, de sa belle et grave voix (sourires), m'a reproché de ne pas accepter pour les terroristes ce que l'on prévoit pour les violeurs. Mais là n'est pas le problème !

M. Francis Szpiner.  - Si !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Je vous sais pourtant minutieux et scrupuleux, mais vous oubliez quelque chose : les troubles mentaux dûment constatés. Vous ne faites reposer votre rétention de sûreté que sur une dangerosité criminologique, et rien d'autre. La différence est de taille !

Cela me semble contestable sur le plan constitutionnel. À la sagesse du Sénat de s'exprimer.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Poursuivons le raisonnement du garde des sceaux. Nous sommes ici au coeur de la justice prédictive ! En matière d'infractions terroristes, nous sommes souvent incapables d'identifier des troubles mentaux. (M. Éric Dupond-Moretti le confirme.) Le Pnat fait le même constat. Voter ce dispositif, c'est mettre le doigt dans la justice prédictive.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - C'est sûr !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Vous considérez que toute personne condamnée récidivera ! C'est grave - et inconstitutionnel.

L'amendement n°33 n'est pas adopté.

L'article 2 est adopté.

Après l'article 2

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par Mme N. Goulet.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° La section 7 du titre III du livre premier est complétée par un article 137-... ainsi rédigé :

« Art. 137-....  -  La personne de nationalité étrangère qui ne bénéficie pas d'un titre de séjour régulier sur le territoire français ou qui fait l'objet d'une interdiction judiciaire de territoire français ou d'une décision administrative de quitter le territoire français ne peut bénéficier des mesures prévues aux sous-sections 1 et 2 de la présente section. » ;

2° Le second alinéa de l'article 729-2 est supprimé.

II.  -  Après l'article 132-1 du code pénal, il est inséré un article 132-1-... ainsi rédigé :

« Art. 132-1-....  -  Une personne de nationalité étrangère qui ne bénéficie pas d'un titre de séjour régulier sur le territoire français ou qui fait l'objet d'une interdiction judiciaire de territoire français ou d'une décision administrative de quitter le territoire français ne peut être condamnée à une peine nécessitant pour son exécution sa présence sur le territoire national, à l'exception de l'emprisonnement, la détention criminelle ou la réclusion criminelle effectifs au sein d'un établissement pénitentiaire.

« Aucun aménagement de peine nécessitant pour sa bonne exécution la présence du condamné sur le territoire français ne peut être accordé à une personne de nationalité étrangère qui ne bénéficie pas d'un titre de séjour régulier sur le territoire national ou qui fait l'objet d'une interdiction judiciaire de territoire français ou d'une décision administrative de quitter le territoire français.

« Les peines d'emprisonnement, de détention criminelle ou de réclusion criminelle des personnes visées à l'alinéa précédent ne peuvent être aménagées que selon les modalités prévues à l'article 729-2 du code de procédure pénale. »

III.  -  Le chapitre IV du titre IV du livre II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un article L. 264-... ainsi rédigé :

« Art. L. 264-....  -  Les décisions d'éloignement d'un étranger faisant l'objet d'une décision de l'autorité judiciaire dont l'exécution nécessite sa présence sur le territoire français ne peuvent être mises à exécution en l'attente de la fin des obligations mises à sa charge. »

Mme Nathalie Goulet.  - L'assassinat du père Olivier Maire, en Vendée, en 2021, a mis en exergue une incohérence de notre législation : la possibilité pour la justice de prononcer des mesures nécessitant la présence de la personne sur le territoire national alors qu'elle n'a pas le droit d'y être ou devrait le quitter.

Cet amendement tend à corriger cette incohérence, qui permet à une condamnation à une mesure d'intérêt général, par exemple, d'empêcher l'exécution d'une OQTF...

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Vous soulevez le problème de la conciliation entre procédure judiciaire et procédure d'éloignement. Lors de l'examen de la loi Séparatisme, nous n'avons pas souhaité faire primer la seconde sur la première, pour préserver la réparation des victimes. Les arguments restent les mêmes. Qu'en pense le Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Il est évident qu'on ne peut éloigner les gens avant qu'ils n'aient été jugés. Comment feraient les parties civiles ? (Mme Marie-Pierre de La Gontrie renchérit.) L'affaire que vous mentionnez étant en cours, je ne puis l'évoquer, mais le débat public a été tranché dans un sens favorable aux victimes. Qu'aurait-on dit si l'intéressé avait été éloigné ? Avis défavorable.

L'amendement n°1 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'opportunité de création de pôles judiciaires interrégionaux antiterroristes, juridictions spécialisées compétentes dans les affaires complexes liées aux infractions terroristes.

M. Guy Benarroche.  - Le pouvoir judiciaire est le parent pauvre de la lutte antiterroriste. Avec cet amendement d'appel, nous proposons de créer des pôles judiciaires interrégionaux antiterroristes, à l'image des juridictions interrégionales spécialisées en matière de criminalité organisée. Cela renforcerait le renseignement territorial, et donc la prévention des projets criminels.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable à cette demande de rapport.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis, sauf si c'est au ministère de l'intérieur que vous demandez le rapport... (Sourires)

L'amendement n°13 n'est pas adopté.

Article 3

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Supprimer cet article.

M. Guy Benarroche.  - Cet article étend la durée maximale de placement en centre éducatif fermé ou en détention provisoire des mineurs radicalisés sous main de justice, au mépris du principe de l'autonomie du droit pénal des mineurs délinquants.

Les Républicains n'ont de cesse de rapprocher la procédure pénale des mineurs de celle des majeurs, oubliant que les mineurs radicalisés et délinquants sont influençables et doivent être protégés. Pauvreté et isolation sociale sont propices à leur radicalisation, qui peut s'apparenter à une emprise. Le législateur a d'ailleurs prévu une incrimination d'incitation de mineurs à participer à un groupement terroriste.

Nous plaidons pour une justice pénale des mineurs spécifique, pour la primauté de l'éducatif sur le tout-répressif, pour la spécialisation des juridictions et des procédures. Arrêtons la surenchère répressive !

M. le président.  - Amendement identique n°34, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Laurence Harribey.  - Cet article est contraire à l'esprit qui doit gouverner la justice des mineurs, tel qu'exposé dans la note du ministère de la justice du 10 février 2017. Au cours d'une immersion de 48 heures au sein du Spip de Gironde, j'ai pu observer les caractéristiques de ce travail, dont l'efficacité repose sur la spécialisation.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis.

Les amendements identiques nos14 et 34 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par M. Reichardt, Mme Josende, M. H. Leroy, Mmes Berthet, Drexler et Muller-Bronn, MM. Burgoa, Pellevat, Frassa, D. Laurent, Belin, Chaize, Chatillon et Anglars, Mme F. Gerbaud, M. Reynaud, Mmes N. Goulet et Dumont, MM. Bouchet, Mizzon et Kern, Mme Schalck, M. Longeot, Mmes Herzog, Vermeillet, Borchio Fontimp, Sollogoub et Billon, M. Paccaud, Mme Jacquemet et M. Sido.

Après l'alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le 9° de l'article L. 331-2 du code de la justice pénale des mineurs, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° S'abstenir d'utiliser certains réseaux électroniques d'information ou de messagerie spécialement désignés par le juge des enfants, le tribunal pour enfants, le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention, ainsi que d'y maintenir une présence ou une activité, de quelque façon que ce soit. »

M. André Reichardt.  - Les juridictions doivent pouvoir interdire à certains mineurs faisant l'objet de mesures de contrôle judiciaire l'utilisation et l'accès aux réseaux sociaux, vecteurs de radicalisation.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Je comprends l'intention, mais cela serait difficilement opérationnel et fort restrictif. À l'article 14, nous avons déjà repris une peine complémentaire de bannissement numérique. Attention au principe de proportionnalité. Retrait ou avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis, d'autant que la CMP sur le projet de loi Espace numérique, dont l'objet est plus large, se tiendra prochainement.

M. André Reichardt.  - Cet amendement me paraît proportionné. Il n'y a pas d'interdiction générale, le magistrat se prononcerait dans chaque affaire, pour chaque réseau. Ne nous privons pas de cette faculté complémentaire du bannissement numérique.

À l'issue d'une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°5 rectifié, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté, de même que les articles 4 et 6.

Article 7

M. le président.  - Amendement n°15, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Supprimer cet article.

M. Guy Benarroche.  - L'article 5 crée une nouvelle mesure administrative d'interdiction de paraître dans les grands événements, autonome des Micas, qui prévoient pourtant déjà des limitations de déplacement ou des obligations de signalement.

Cette énième mesure créera un risque d'arbitraire : elle est superflue et renforce la confusion. Multiplier les mesures administratives coercitives dans une logique prédictive menace notre État de droit.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°15 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 4

Remplacer les mots :

dans lesquels se tient un évènement exposé, par son ampleur ou ses circonstances particulières, à un risque de menace grave ou terroriste

par les mots :

par décret, dans lesquels se tiennent des grands événements et des grands rassemblements de personnes ayant pour objet d'assister à des événements exposés à un risque d'actes de terrorisme en raison de leur nature et de l'ampleur de leur fréquentation. Ce décret désigne également les établissements et les installations qui les accueillent ainsi que leur organisateur

Mme Corinne Narassiguin.  - Cette mesure d'interdiction de paraître s'inscrit ouvertement dans la perspective des jeux Olympiques. Il convient de définir précisément le type d'événements auxquels elle s'applique. Nous proposons qu'elle soit déterminée par décret, comme il est de coutume pour les grands événements. Évitons de voter un article d'application courante alors qu'il concerne un événement exceptionnel.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Limiter le champ aux seuls grands événements et rassemblements serait trop restrictif. Un exemple : le procès des complices des attentats de Trèbes et Carcassonne, qui se tient en ce moment, peut nécessiter des interdictions de paraître à l'encontre de certains individus. Votre amendement l'interdirait.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°35 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Alinéa 5, dernière phrase

Supprimer les mots :

Sauf urgence dûment justifiée,

M. Ian Brossat.  - Cet article permet de déroger à la notification d'une interdiction de paraître 48 heures avant son entrée en vigueur, en cas d'urgence. Or le juge du référé-liberté disposant de 48 heures pour statuer, il faut, en cohérence, garantir une notification systématique 48 heures avec l'entrée en vigueur d'une telle mesure, qui est autonome d'une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance.

Mme Cécile Cukierman.  - Très bien !

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Nous voulions être plus opérationnels, dans certains cas très limités et strictement nécessaires. Mais nous avons conservé la possibilité de contestation devant le juge des référés, dans les 48 heures. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°25 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°49, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission.

Alinéa 7

Remplacer les mots : 

même code

par les mots : 

code de justice administrative

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Rédactionnel.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°49 est adopté.

L'article 7, modifié, est adopté.

Article 7 bis

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Supprimer cet article.

M. Guy Benarroche.  - En rendant suspensif l'appel interjeté par le ministère de l'intérieur, l'article 7 bis donne un pouvoir disproportionné aux magistrats du parquet pour aller à l'encontre des décisions d'annulation du renouvellement d'une Micas, mesure pourtant particulièrement attentatoire aux libertés individuelles. Cette volonté de rogner sur les libertés individuelles sans apporter de garanties aux justiciables témoigne d'une dérive inquiétante vers une suspicion généralisée.

M. le président.  - Amendement identique n°36, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Corinne Narassiguin.  - Lorsque le tribunal administratif annule la mesure de renouvellement de la Micas, la surveillance de l'intéressé prend fin, y compris si le ministre de l'intérieur fait appel du jugement. Dans notre pays, ce sont encore les tribunaux qui décident !

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos16 et 36 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°50, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

Avant le dernier

par les mots :

Après le huitième

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Rédactionnel.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°50 est adopté.

L'article 7 bis, modifié, est adopté.

Article 7 ter

M. le président.  - Amendement n°45, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Corinne Narassiguin.  - Lorsqu'on légifère aussi souvent et aussi rapidement sur un tel sujet, il n'est pas étonnant que la loi comporte des malfaçons...

Le rapporteur souhaite une voie de recours contre le refus par le juge des libertés et de la détention (JLD) de l'exploitation de documents et de données saisies lors d'une visite domiciliaire. Vous n'avez de cesse de limiter l'office du juge, mais jusqu'où et jusqu'à quand ?

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°45 n'est pas adopté.

L'article 7 ter est adopté.

Article 7 quater

M. le président.  - Amendement n°17, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Supprimer cet article.

M. Guy Benarroche.  - Le Syndicat de la magistrature a dénoncé, lors de l'examen de la loi Renseignement, le fichage et la surveillance de personnes souffrant de troubles psychiatriques, au mépris du secret médical. Sans confiance des patients envers leur médecin, l'incitation à se soigner est dangereusement altérée. Nous nous opposons au renforcement de la transmission des informations.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°17 n'est pas adopté.

L'article 7 quater est adopté.

Article 8

M. le président.  - Amendement n°26, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Supprimer cet article.

M. Ian Brossat.  - Tel qu'il est rédigé, cet article relatif à la dissolution administrative d'une association dépasse largement le cadre de la lutte contre le terrorisme et vise toutes les associations ou groupements de fait. Si l'islamisme est la mouvance la plus concernée, avec 19 dissolutions d'associations sur 46 depuis 2012, aucune décision n'a été suspendue ou annulée en justice - seules quatre des 46 l'ont été, dont celle visant les Soulèvements de la terre. On ne saurait parler de gouvernement des juges... Dès lors, pourquoi vouloir renforcer le régime de dissolution administrative ?

Plus généralement, le récent rapport de l'Assemblée nationale sur l'activisme violent soulève plusieurs objections de principe.

M. le président.  - Amendement identique n°37, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Corinne Narassiguin.  - Ces dispositions vont bien au-delà de l'objet du texte.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos26 et 37 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°27, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Alinéas 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

M. Ian Brossat.  - Cet amendement de repli ne supprime que les dispositions touchant aux modalités de dissolution d'associations sans revenir sur celles créant un régime de dévolution des biens.

M. le président.  - Amendement n°51, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Constitue une provocation au sens des 1° , 6 ° et 7° , l'incitation explicite ou implicite, par propos ou par actes, à se livrer aux agissements qu'ils mentionnent ou la légitimation publique de ces agissements ou l'abstention à mettre en oeuvre des moyens de modération à disposition pour réagir à la diffusion d'incitations à commettre ces agissements. » ;

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Cette rédaction grave dans le marbre les termes de la jurisprudence du Conseil d'État sur les Soulèvements de la Terre, pour sécuriser l'action des services du ministère de l'intérieur. Avis défavorable à l'amendement n°27.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Favorable à l'amendement n°51, défavorable à l'amendement n°27.

L'amendement n°27 n'est pas adopté.

L'amendement n°51 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé : 

« S'agissant des provocations à la violence contre des biens, la décision de dissolution de l'association ou groupement de fait doit être adaptée, nécessaire et proportionnée à la gravité des troubles susceptibles d'être portés à l'ordre public au vu des effets réels qu'ont pu avoir ces provocations. » ;

M. Guy Benarroche.  - Le ministre de l'intérieur avait qualifié les manifestants de Sainte-Soline d'écoterroristes, et poursuivi de sa vindicte les Soulèvements de la Terre et la Ligue des droits de l'homme.

M. Laurent Burgoa.  - Il n'avait pas tort !

M. Guy Benarroche.  - Notre groupe a toujours défendu les libertés associatives et déploré l'acharnement disproportionné que subissent certaines associations.

Cet amendement limite l'arbitraire avec lequel l'État s'attaque à certaines manifestations, alors qu'il en minimise d'autres - ainsi de l'explosion qui a soufflé les bâtiments de la direction de l'environnement à Carcassonne ou du fumier déversé sur les voies ferrées à Agen...

Toutes les colères doivent pouvoir s'exprimer. La dissolution arbitraire d'associations de désobéissance civile qui ne commettent pas de violence envers les personnes pose problème. La latitude d'expression accordée aux agriculteurs doit bénéficier à tous, pas seulement à ceux qui sont soutenus politiquement par le pouvoir.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Autant il nous semble nécessaire de graver dans la loi la définition novatrice du Conseil d'État, autant votre amendement est superflu. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°18 n'est pas adopté.

L'article 8, modifié, est adopté.

Après l'article 8

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par Mme N. Goulet.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au second alinéa du I de l'article 4-2 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat, après le mot : « libéralités », sont insérés les mots : « , les parts de sociétés civiles immobilières ».

Mme Nathalie Goulet.  - Dans le projet de loi confortant le respect des principes de la République, le Sénat avait ajouté à la liste des biens à lister les parts de sociétés civiles immobilières (SCI) détenues par les associations - mesure supprimée en CMP. C'est une demande de Tracfin.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°2 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par Mme N. Goulet.

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa de l'article L. 561-2-3 du code monétaire et financier est supprimé.

Mme Nathalie Goulet.  - Nous avions également souhaité assujettir les cagnottes en ligne aux obligations de contrôle de Tracfin. Adoptée par le Sénat, supprimée en CMP, cette disposition a été réintroduite via une directive européenne, mais le contrôle est limité par l'article 561-2-3 du code monétaire et financier.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°11 est adopté et devient un article additionnel.

Article 9

M. le président.  - Amendement n°19, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Supprimer cet article.

M. Guy Benarroche.  - C'est le pompon ! L'article 9 vise à faciliter la levée des protections, comme dans la loi Immigration, en attente de la décision du Conseil constitutionnel. La majorité sénatoriale craindrait-elle une censure ? Bis repetita non semper placet (on apprécie sur plusieurs travées) : ce n'est pas parce que vous revotez ces dispositions qu'elles deviendront constitutionnelles ! Supprimons cet article.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Mens sana in corpore sano...

M. le président.  - Amendement identique n°29, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

M. Ian Brossat.  - C'est le même.

M. le président.  - Amendement identique n°38, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Corinne Narassiguin.  - Effectivement, il faut attendre la décision du Conseil constitutionnel. Monsieur le rapporteur, rien ne vous empêche de supprimer ces dispositions.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Rien ne m'empêche de les maintenir. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos19, 29 et 38 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°23 rectifié bis, présenté par Mme Eustache-Brinio, MM. Bazin, Pellevat, Karoutchi, Reichardt, Frassa et Burgoa, Mmes Di Folco, Goy-Chavent et Dumont, MM. Mouiller, Bouchet, H. Leroy et Panunzi, Mmes Belrhiti, Aeschlimann et Josende, M. Bruyen, Mmes Joseph, Garnier, Borchio Fontimp et Puissat, MM. Paccaud, Sol et Lefèvre, Mme Deseyne, MM. Rapin, Reynaud et Sido, Mme Imbert et MM. Brisson et Naturel.

Après l'alinéa 19

Insérer huit alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 632-2 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « dix » ;

b) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Si la commission décide, à la demande de l'étranger, de renvoyer pour un motif légitime l'examen du dossier à une date ultérieure, la nouvelle réunion ne peut avoir lieu plus d'un mois à compter de la décision accordant ce renvoi. » ;

c) Le troisième alinéa est ainsi modifié :

- Après la quatrième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « La commission rend son avis motivé dans un délai qui ne peut excéder sept jours à compter de la réunion. » ;

- Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Si l'avis n'est pas rendu dans le délai de sept jours à compter de la réunion, les formalités de consultation de la commission sont réputées remplies. » ;

d) Le dernier alinéa est supprimé ;

Mme Catherine Di Folco.  - Mme Eustache-Brinio souhaite fluidifier la procédure de consultation de la commission d'expulsion : le délai entre convocation et réunion de la commission serait réduit de quinze à dix jours et l'avis devrait être rendu sous sept jours.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Effectivement, les lourdeurs de cette procédure sont dangereuses. Avis très favorable à cette mesure de bon sens.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°23 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par M. Reichardt, Mme Josende, M. H. Leroy, Mmes Berthet, Drexler et Muller-Bronn, MM. Burgoa, Pellevat, Frassa, D. Laurent, Belin, Chaize, Chatillon et Anglars, Mme F. Gerbaud, M. Reynaud, Mmes N. Goulet et Dumont, MM. Bouchet, Mizzon et Kern, Mme Schalck, M. Longeot, Mmes Herzog, Vermeillet et Borchio Fontimp, M. Pointereau, Mmes Sollogoub et Billon, M. Paccaud, Mme Jacquemet et M. Sido.

Alinéa 27

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette durée est interrompue et reconduite en cas de retour sur le territoire français.

M. André Reichardt.  - Avec cet amendement, l'interdiction du territoire français (ITF) serait mieux appliquée. Des sanctions pénales et une nouvelle interdiction peuvent effectivement être prononcées, monsieur le rapporteur, mais il n'y a pas de reconduction automatique. Nous y remédions ici.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - L'intention est louable, mais le droit existant prévoit trois ans de prison et une nouvelle peine d'ITF pouvant aller jusqu'à dix ans. Votre amendement est donc satisfait. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°6 rectifié n'est pas adopté.

L'article 9, modifié, est adopté.

Article 10

M. le président.  - Amendement n°20, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Supprimer cet article.

M. Guy Benarroche.  - Nous voulons supprimer aussi cet article qui reprend l'article 73 de la loi Immigration de décembre 2023 et son dispositif de contradictoire asymétrique. Attendons la décision du Conseil constitutionnel. Le maintien d'une même disposition dans les deux textes nuirait à la lisibilité de la loi pénale. En outre, si elle n'était pas validée par le Conseil constitutionnel, elle serait attentatoire aux libertés individuelles...

M. le président.  - Amendement identique n°30, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

M. Ian Brossat.  - Défendu.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos20 et 30 ne sont pas adoptés.

L'article 10 est adopté.

Article 10 bis

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Supprimer cet article.

M. Guy Benarroche, rapporteur.  - L'article 10 bis prévoit d'allonger jusqu'à 210 jours la durée de rétention administrative dans certains cas. C'est un dévoiement qui l'assimile de plus en plus à de la détention. Les allers-retours entre CRA et prison se multiplient. Selon la Cimade, cette spirale s'autoentretient. Le CRA n'a pourtant pas de visée punitive !

M. le président.  - Amendement identique n°41, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Corinne Narassiguin.  - Arrêtons avec les procédures exceptionnelles. Progressivement, la rétention administrative est détournée de son usage et se substitue à la détention.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ça, c'est de l'argumentation !

Les amendements identiques nos21 et 41 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°24 rectifié bis, présenté par Mme Eustache-Brinio, MM. Bazin, Pellevat, Karoutchi, Reichardt, Frassa et Burgoa, Mmes Di Folco, Goy-Chavent et Dumont, MM. Mouiller, Bouchet, H. Leroy et Panunzi, Mmes Belrhiti, Aeschlimann et Josende, M. Bruyen, Mmes Joseph, Garnier, Borchio Fontimp et Puissat, MM. Paccaud, Sol et Lefèvre, Mme Deseyne, MM. Rapin, Reynaud et Sido, Mme Imbert et MM. Brisson et Naturel.

Remplacer les mots :

après le mot : « constatées, », sont insérés les mots : « dont

par les mots :

les mots : « pénalement constatées » sont remplacés par les mots : « , dont

Mme Catherine Di Folco.  - Cet allongement de la durée de rétention administrative ne concerne que les personnes dont les activités terroristes ont été pénalement constatées, alors que l'arrêté d'expulsion prévoit une constatation indépendante d'une condamnation pénale. D'où cet amendement de cohérence.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Mesure opérationnelle bienvenue : avis favorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°24 rectifié bis est adopté.

L'article 10 bis, modifié, est adopté.

Article 11

M. le président.  - Amendement n°22, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Supprimer cet article.

M. Guy Benarroche.  - L'article 11 consacre le délit de recel d'apologie du terrorisme, qui permet de sanctionner les individus qui détiennent des images apologétiques sans volonté de les diffuser. En 2017, le Conseil constitutionnel a censuré une telle disposition. La majorité la réintroduit en l'assortissant de quelques garanties, mais cela relève de l'affichage politique. Le Président Sarkozy disait que lorsqu'on consulte des images de djihadiste, on est un djihadiste, et on doit être jugé comme tel...

M. le président.  - Amendement identique n°39, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Corinne Narassiguin.  - En effet, le Conseil constitutionnel a été très clair : il s'agit d'une atteinte à la liberté d'expression et de communication. Ce n'est pas en multipliant les infractions relatives à l'adhésion idéologique qu'on rendra la loi plus protectrice.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Nous avons adapté le dispositif aux réserves du Conseil constitutionnel : avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

Les amendements identiques nos22 et 39 ne sont pas adoptés.

L'article 11 est adopté.

Article 11 bis

M. le président.  - Amendement n°52, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

réseaux privés de communication lorsque ces réseaux 

par les mots :

espaces privés de communication électronique lorsque ces espaces

et les mots :

services de communication au public en ligne

par les mots :

espaces de communication ouverts au public

L'amendement rédactionnel n°52, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 11 bis, modifié, est adopté.

Article 12

M. le président.  - Amendement n°43, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Corinne Narassiguin.  - La provocation au terrorisme doit être punie, quel que soit le lieu où elle se manifeste. En outre, les magistrats n'ont pas besoin de nous pour appliquer la loi. Attention à l'inflation législative, qui peut déséquilibrer la loi pénale. La vocation du droit pénal est d'arriver après. Que proposerez-vous lorsque vous aurez porté toutes les peines à leur maximum ?

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Il s'agit de la reprise d'une préconisation issue d'un rapport de commission d'enquête sénatoriale. Il est hors de question de supprimer cette disposition : avis défavorable.

MM. Gérald Darmanin et M. Éric Dupond-Moretti, ministres, d'une seule voix  - Sagesse.

L'amendement n°43 n'est pas adopté.

L'article 12 est adopté.

L'article 14 est adopté.

Article 15

M. le président.  - Amendement n°44, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Corinne Narassiguin.  - Nous comprenons l'intention de cet article et sommes favorables à la protection des transports en commun. Mais on pourrait inventer à l'infini des peines complémentaires. Il y a d'autres manières de protéger ces espaces. Il n'y a pas des terroristes des transports et des terroristes de supermarchés. Supprimons cet article absurde !

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°44 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par M. Reichardt, Mme Josende, M. H. Leroy, Mmes Berthet, Drexler et Muller-Bronn, MM. Burgoa, Pellevat, Frassa, D. Laurent, Belin, Chaize, Chatillon et Anglars, Mme F. Gerbaud, M. Reynaud, Mmes N. Goulet et Dumont, MM. Bouchet, Mizzon et Kern, Mme Schalck, M. Longeot, Mmes Herzog et Vermeillet, M. Bruyen, Mme Borchio Fontimp, M. Pointereau, Mmes Sollogoub et Billon, M. Paccaud, Mme Jacquemet et MM. Sido et Maurey.

Alinéa 4

Remplacer les mots :

véhicule affecté au transport collectif de voyageurs

et les mots :

moyen de transport collectif de voyageurs

par les mots :

moyen de transport public

M. André Reichardt.  - Cet amendement clarifie la peine complémentaire d'interdiction de paraître dans les transports en commun en retenant l'expression « moyen de transport public », plus simple.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Nous avons déjà eu ce débat en 2021 et avons retenu une rédaction proportionnée. Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°8 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par M. Reichardt, Mme Josende, M. H. Leroy, Mmes Berthet, Drexler et Muller-Bronn, MM. Burgoa, Pellevat, Frassa, D. Laurent, Belin, Chaize, Chatillon et Anglars, Mme F. Gerbaud, M. Reynaud, Mmes N. Goulet et Dumont, MM. Bouchet, Mizzon et Kern, Mme Schalck, M. Longeot, Mmes Herzog, Vermeillet, Borchio Fontimp, Sollogoub et Billon, M. Paccaud, Mme Jacquemet et MM. Sido et Maurey.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Cette interdiction de paraître est inscrite au fichier des personnes recherchées.

M. André Reichardt.  - Nous souhaitons améliorer la sanction pour non-respect de l'interdiction de paraître dans les transports en commun en l'assortissant d'une inscription au fichier des personnes recherchées.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Cela renforce son opérationnalité : avis favorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°7 rectifié est adopté.

L'article 15, modifié, est adopté.

Après l'article 15

M. le président.  - Amendement n°9 rectifié, présenté par M. Reichardt, Mme Josende, M. H. Leroy, Mmes Berthet, Drexler et Muller-Bronn, MM. Burgoa, Pellevat, Frassa, D. Laurent, Belin, Chaize, Chatillon et Anglars, Mme F. Gerbaud, M. Reynaud, Mmes N. Goulet et Dumont, MM. Bouchet, Mizzon et Kern, Mme Schalck, M. Longeot, Mmes Herzog, Vermeillet et Borchio Fontimp, M. Pointereau, Mmes Sollogoub et Billon, M. Paccaud, Mme Jacquemet et M. Sido.

Après l'article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre III du livre III du code du sport est complété par un article L. 332-... ainsi rédigé :

« Art. L. 332-....  -  Lorsque les faits ont été commis dans un lieu accueillant des manifestations sportives, dans un équipement sportif ou un lieu d'accès à un équipement sportif au sens de l'article L. 312-2 du présent code, les personnes déclarées coupables soit d'un crime, soit des délits prévus aux articles 421-1 à 428-8 du code pénal, encourent également une peine complémentaire d'interdiction, pour une durée de trois ans au plus, de paraître dans tout ou partie des lieux et équipements sportifs déterminés par la juridiction.

« La peine est prononcée en tenant compte des impératifs de la vie privée, professionnelle et familiale de la personne condamnée. Elle peut être suspendue ou fractionnée en application du troisième alinéa de l'article 708 du code de procédure pénale.

« Lorsque l'interdiction de paraître accompagne une peine privative de liberté sans sursis, elle s'applique à compter du jour où la privation de liberté a pris fin.

« La violation de cette interdiction est punie des peines prévues à l'article 434-41 du code pénal.

« Le représentant de l'État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, communique aux personnes morales en charge de l'exploitation des équipements sportifs l'identité des personnes faisant l'objet de cette interdiction, dans des conditions précisées par voie réglementaire. »

M. André Reichardt.  - Nous créons une peine complémentaire d'interdiction de paraître dans des enceintes sportives - même en l'absence de grands événements comme les JOP.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - L'article 7 comporte une nouvelle disposition plus générale, plus facile à motiver. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

M. André Reichardt.  - M. le rapporteur m'a expliqué ce matin en commission des lois que les champs d'application des deux dispositifs étaient proches ; mais ils ne sont pas identiques.

L'article 7 ne permet pas d'interdire l'accès aux équipements sportifs en temps normal. Il pourrait pourtant être judicieux d'interdire l'accès aux matchs de championnat qui se tiennent au stade de la Meinau, par exemple. L'article 7 couvre-t-il bien un tel cas ?

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Oui, s'il y a un risque terroriste avéré. Attention à la proportionnalité de la mesure et au risque de chevauchement avec les Micas.

L'amendement n°9 rectifié est retiré.

Article 15 bis

M. le président.  - Amendement n°53, présenté par M. Daubresse, au nom de la commission.

Rédiger ainsi cet article :

I.- Le code civil est ainsi modifié :

1° L'article 60 est ainsi modifié :

a) A la première phrase du premier alinéa, après les mots : « Toute personne » sont insérés les mots : « dont l'acte de naissance est détenu par un officier de l'état civil français » ;

b) La dernière phrase du dernier alinéa est supprimée ;

c) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque le changement de prénom demandé est susceptible de constituer une menace pour l'ordre public en raison de la condamnation du demandeur pour l'une des infractions dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État, l'officier de l'état civil saisit sans délai le procureur de la République.

« L'officier de l'état civil informe le demandeur de la saisine du procureur de la République. Si celui-ci s'oppose au changement de prénom, le demandeur, ou son représentant légal, peut saisir le juge aux affaires familiales. » ;

2° L'article 61-3-1 est ainsi modifié :

a) A la première phrase du premier alinéa, les mots : « Toute personne majeure peut demander à l'officier de l'état civil de son lieu de résidence ou » sont remplacés par les mots : « Toute personne majeure dont l'acte de naissance est détenu par un officier de l'état civil français peut demander à cet officier de l'état civil » ;

b) Au quatrième alinéa, après les mots : « En cas de difficultés », sont insérés les mots : « ou, dans le cas prévu au premier alinéa, lorsque le changement de nom demandé est susceptible de constituer une menace pour l'ordre public en raison de la condamnation du demandeur pour l'une des infractions dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État, ».

II.  -  Après le sixième alinéa de l'article 706-25-7 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« 5° De déclarer tout changement de prénom ou de nom ».

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - La procédure simplifiée de changement de nom prévue par la loi Vignal a pu conduire à des abus. Nous élargissons le dispositif aux changements de prénom, prévoyons la saisine systématique du procureur de la République, garantissons l'unicité des documents d'identité et ajoutons l'obligation de signaler tout changement de nom ou de prénom pour les personnes inscrites au Fijait.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Avis favorable.

Mme Corinne Narassiguin.  - Nous n'y sommes pas opposés, mais ces dispositifs ne doivent pas faire obstacle à une volonté sincère de réinsertion. Ne partons pas du principe que toute personne condamnée va récidiver.

Mme Marie Mercier.  - Lors de l'examen de la loi Vignal, nous avions alerté sur la facilité de changer de nom. Francis Evrard, violeur multirécidiviste, a, depuis sa prison, pris le nom de sa mère et n'apparaît plus sur le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (Fijais). Nous voterons cet amendement.

L'amendement n°53 est adopté et l'article 15 bis est ainsi rédigé.

Article 15 ter

M. le président.  - Amendement n°40, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Corinne Narassiguin.  - Nous demandons la suppression de cet article, qui pourrait avoir des effets contreproductifs : lorsque vous informez un chef d'établissement, vous lui faites porter une responsabilité qui n'est pas la sienne. Et si l'un de ses élèves se rend coupable d'une infraction terroriste ? Prévoyez-vous un fichier, une déscolarisation de sûreté ? Soit on est condamné, soit on ne l'est pas. Vous brouillez tous les repères. Un rapport de M. Pillet nous met en garde contre de telles dérives.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°40 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°42, présenté par M. Durain et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Remplacer les mots :

des articles 138-2 et

par les mots :

de l'article

Mme Corinne Narassiguin.  - C'est un amendement de repli : sortons la mise en examen du champ de l'article 15 ter, car cela bafoue la présomption d'innocence.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°42 n'est pas adopté.

L'article 15 ter est adopté.

Après l'article 15 ter

M. le président.  - Amendement n°10 rectifié, présenté par M. Marseille, Mme N. Goulet, MM. Henno, Levi, Longeot et Menonville, Mmes Tetuanui et Guidez, MM. Laugier, Mizzon et Bleunven, Mme Jacquemet, MM. Pillefer, Duffourg, Bonnecarrère et Kern, Mme Herzog, M. Lafon, Mmes Vermeillet, de La Provôté, Florennes et Sollogoub et MM. Vanlerenberghe, Cazabonne, Capo-Canellas, Cigolotti, Maurey, S. Demilly et Chauvet.

Après l'article 15 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l'article L. 613-3 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° La première phrase du premier alinéa est ainsi modifiée :

a) Après le mot : « imagerie », sont insérés les mots : « ou de photographie numérique » ;

b) Après le mot : « millimétriques », sont insérés les mots : « ou centimétriques » ;

2° Le second alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après le mot : « images », sont insérés les mots : « produites par un dispositif d'imagerie utilisant des ondes millimétriques » ;

b) À la troisième phrase, après le mot : « image », sont insérés les mots : « produite par ondes millimétriques » ;

c) Après la troisième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « L'image produite par ondes centimétriques analyse les densités et non les formes, permettant la visualisation simultanée de la personne et de son image à travers une photographie numérique produite uniquement en cas de détection d'une substance ou d'un objet interdits. » ;

d) À la dernière phrase, après le mot : « images », sont insérés les mots : « produites par un dispositif d'imagerie ou de photographie utilisant des ondes millimétriques ou centimétriques ».

Mme Nathalie Goulet.  - L'imagerie par ondes millimétriques est autorisée dans les enceintes de plus de 300 spectateurs. Le président Marseille souhaite que l'on permette l'utilisation d'ondes centimétriques. Vous apprécierez cet amendement, rédigé au millimètre... (Sourires)

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur.  - Les ondes centimétriques, moins intrusives, rendent le dispositif plus opérationnel. Avis favorable.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Sagesse, dans l'attente d'éclaircissements de la part de M. le rapporteur...

L'amendement n°10 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

L'article 16 est adopté.

M. le président.  - Nous avons terminé l'examen des articles de ce texte. Je vous rappelle que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi auront lieu mardi 30 janvier.

La séance est suspendue quelques instants.

Accompagnement humain des élèves en situation de handicap

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant la prise en charge par l'État de l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap sur le temps méridien, présentée par M. Cédric Vial et plusieurs de ses collègues, à la demande du groupe Les Républicains.

Discussion générale

M. Cédric Vial, auteur de la proposition de loi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Annick Billon et Laure Darcos applaudissent également.) C'est un plaisir, un aboutissement, un honneur, une étape et une satisfaction d'être ici, ce soir.

Un plaisir : je porte cette proposition de loi depuis près d'un an.

Un aboutissement : elle résulte de la recommandation n°10 de mon rapport sur les modalités de gestion des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH).

Un honneur : le vote en commission a été unanime, et j'espère qu'il en sera de même ce soir.

Une étape : ce texte devra poursuivre sa route à l'Assemblée nationale, sous le regard que j'espère bienveillant du Gouvernement.

Une satisfaction, enfin : cette proposition de loi, on ne peut plus simple, réglera des problèmes complexes, que l'État a créés.

La loi de février 2005 - madame Vautrin, vous apparteniez au gouvernement de l'époque - a marqué une avancée importante pour le droit à la scolarisation en milieu ordinaire de tous les élèves en situation de handicap.

La loi de refondation de l'école de la République de 2013 l'a confirmé, sous la présidence de François Hollande, en créant les AESH. L'inclusion scolaire était ainsi gravée dans le marbre. Le code de l'éducation est clair : c'est à l'État de déployer tous les moyens concourant à la scolarisation des enfants en situation de handicap.

Mais après ces deux grands pas en avant, il y a eu un pas en arrière : la décision du Conseil d'État de novembre 2020, selon laquelle le législateur se serait trompé en estimant la prise en charge sur le temps méridien nécessaire à l'inclusion scolaire. Il convient donc de rétablir, par la loi, cet accompagnement. Rappelons au juge que c'est le Parlement qui fait la loi.

Depuis 2020, cette jurisprudence a créé bien des problèmes - comme si la vie des parents des élèves en situation de handicap n'était pas déjà assez complexe. Ses effets de bords sont considérables, à commencer par les ruptures dans la prise en charge des enfants et la multiplication des interlocuteurs.

Pour les collectivités, le coût financier est difficile à supporter et la responsabilité est lourde.

Dans l'enseignement privé, le forfait scolaire ne permet pas de financer cet accompagnement. Conséquences : déscolarisations, reports sur les établissements publics voisins, système D, voire maintien d'un financement par l'éducation nationale, pour ne pas faire de vagues...

La situation des AESH - temps partiels et multicontrats - a été aggravée par cette décision. Malgré ses avancées, la circulaire du 4 janvier 2023 demeure peu appliquée.

Ce texte ne résoudra pas tous les problèmes. L'inclusion mérite une révision de fond en comble de l'organisation, mais nous avons l'occasion de régler simplement des problèmes compliqués. Enseignants, AESH, parents et enfants attendent ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; Mme Laure Darcos, M. Bernard Buis et Mme Marie-Pierre Monier applaudissent également.)

Mme Anne Ventalon, rapporteure de la commission de la culture .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Annick Billon et Laure Darcos applaudissent également.) Aucune institution n'incarne mieux la promesse républicaine que l'école, si elle assume ses valeurs d'égalité et de fraternité.

Je remercie Cédric Vial pour son initiative. La dernière fois que nous avons abordé le sujet avec le ministre de l'éducation nationale, c'était en novembre dernier : nous dénoncions la volonté de transformer les pôles inclusifs d'accompagnement localisés (Pial) en pôles d'appui à la scolarité (PAS), sans concertation et en catimini.

Cette proposition de loi ne réglera pas tous les problèmes, mais elle est une première étape vers une prise en charge continue des élèves en situation de handicap.

Combien d'enfants en ont besoin ? Les données manquent : le ministère parle de 20 000 à 25 000 élèves en 2023 - sans doute une estimation basse. La décision du Conseil d'État du 20 novembre 2020 a perturbé des milliers d'enfants, de familles, d'AESH. Ces derniers ont vu leur emploi du temps malmené, avec deux employeurs, enchaînant les heures sans pause ni prise en compte des temps de trajet. Les communes ont dû assumer une charge indue. Enfin, des enfants sont restés sans accompagnant malgré les recommandations des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Pour autant, l'État a veillé à ne pas mettre en cause l'existant, en continuant de financer 60 % des accompagnements des élèves dans le périscolaire. Mais qu'en est-il des autres ? Cela a créé des différences de traitement.

Les élèves en situation de handicap scolarisés dans le privé sous contrat ont aussi été touchés : les établissements ont dû faire appel à des volontaires, des parents, des grands-parents, voire à des AESH non facturées. Quid de la responsabilité en cas d'accident du travail ?

Quelle a été la réponse du ministère ? Une note, de janvier 2023, rappelle les trois possibilités : le recrutement direct par les collectivités, le recrutement en commun, et la mise à disposition d'AESH par l'éducation nationale. Celle-ci est un progrès, mais demeure difficile à mettre en oeuvre faute de convention type. En outre, la question du coût demeure - une académie applique des frais de gestion de 5 %...

La situation est confuse, d'où cette nécessaire proposition de loi. Les impératifs de solidarité et d'intérêt de l'enfant ont incité la commission à l'adopter sans modification.

Les 60 heures de formation des AESH sont insuffisantes, car les gestes sur le temps méridien diffèrent de ceux du temps pédagogique.

Enfin, madame la ministre, j'attire votre attention sur les unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis) : certains élus refusent, lorsqu'elles sont hors de la commune de résidence, de prendre en charge le coût de l'AESH sur le temps périscolaire, ou refusent l'ouverture d'Ulis dans leurs écoles.

Il faut aussi renforcer l'accessibilité physique, matérielle et pédagogique, car l'accompagnement humain ne peut pas tout. (M. Jacques Grosperrin renchérit.)

La commission de la culture et le Sénat dans son ensemble sont mobilisés pour assurer le quotidien des 478 000 élèves en situation de handicap. Il y va de l'égalité des chances. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP ainsi que du RDSE ; Mme Marie-Pierre Monier applaudit également.)

M. Max Brisson.  - Très bien !

Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités .  - Nous sommes face à un défi historique de notre politique éducative. L'éducation nationale a déjà relevé le défi de la scolarisation obligatoire des 3-17 ans : il s'agit désormais de prendre en compte les besoins particuliers des élèves.

Monsieur Vial, votre proposition de loi, simple, règle des problèmes complexes. Nos concitoyens attendent le chemin le plus court entre problème et solution.

Qualité de l'enseignement, des relations entre élèves et professeurs et, surtout, de l'accueil de tous les élèves : nous devons accueillir chaque élève tel qu'il est et changer notre regard sur la vulnérabilité, éducative notamment. Elle a plusieurs visages, mais elle est particulièrement douloureuse lorsqu'elle provient d'un manque éducatif : ne pas assurer les mêmes chances à l'école, c'est ne pas le faire dans la vie. C'est une double peine et, surtout, une injustice.

Ces enfants ont le droit, comme les autres, à une scolarité sereine. Leur insertion est incontournable, alors que leur nombre a augmenté de 35 % par rapport à 2017 - 40 % de hausse pour le nombre d'AESH. Entre 2004 et 2022, nous sommes passés de 134 000 à 430 000 élèves scolarisés en milieu ordinaire, soit une augmentation de 220 %. Par leur nombre, les AESH sont devenus le deuxième métier de l'éducation nationale et notre Gouvernement a revalorisé leur salaire de 26 % entre août 2021 et janvier 2024 - soit 200 euros nets mensuels.

Nous demeurons en phase avec la loi de 2005. Votre proposition de loi apporte de la visibilité. Elle est un premier pas, mais doit s'accompagner d'une réforme de plus grande ampleur, concertée, pour assurer la continuité de l'accompagnement sur toute la journée. Le service public ne peut se faire en pointillés. C'est la continuité qui suscite la confiance, condition de la réussite de tout parcours scolaire.

Nous devons favoriser le bien-être et l'épanouissement de chaque élève, car il n'y a pas de réussite sans sérénité. Je suis déterminée à agir en ce sens, pour une école inclusive, juste et exigeante pour tous.

L'inclusion me tient particulièrement à coeur dans le ministère que j'occupe, qui accompagne toutes les vulnérabilités du premier au dernier jour de la vie. Le chemin est encore long vers une école pleinement inclusive, mais nous avançons dans la bonne direction.

Avec cette proposition de loi, le financement sera pris en charge à 100 % par l'État (M. Jacques Grosperrin s'en félicite). Le Gouvernement adopte sur ce texte une position de sagesse très bienveillante... (Applaudissements au centre et à droite)

M. Gérard Lahellec .  - L'école est la mère de toutes les batailles ; l'école inclusive en est partie intégrante.

La création de 4 500 postes d'AESH cette année est une avancée importante, mais elle ne règle pas tous les problèmes. Le statut de ces personnels - à 90 % des femmes - demeure précaire : succession de CDD et contrats de 24 heures seulement, permettant de gagner 800 euros par mois. La formation fait également défaut.

Cette proposition de loi ne prétend pas traiter tous les aspects de l'école inclusive ou du statut des AESH. Elle ne fait que résoudre un problème découlant d'un cadre réglementaire qui ne traite pas de façon identique le temps méridien et le temps scolaire.

Les AESH sont le deuxième métier, en nombre, de l'éducation nationale. Ces personnels attendent un cadre général cohérent, pas des bricolages successifs. Aujourd'hui, les rectorats consentent des mises à disposition, mais les refacturent aux communes, un vide juridique existe dans les établissements privés sous contrat...

Ce texte est un moyen simple et clair de régler une situation confuse. Mais ce n'est qu'une première étape. Notre groupe souhaite aller plus loin, à la lumière notamment des travaux de Michelle Gréaume. Il faut revaloriser le statut des AESH et les intégrer à la catégorie B de la fonction publique.

Dans l'immédiat, nous nous prononcerons en faveur de ce progrès concret.

M. Bernard Fialaire .  - Nous saluons cette proposition de loi et le travail de la rapporteure pour améliorer l'accompagnement des élèves ayant besoin d'AESH. Les disparités entre communes ou entre établissements publics et privés ne sont pas acceptables.

Il faut tout un village pour éduquer un enfant, dit la sagesse africaine. Notre sagesse rurale ajoute : chacun son métier, et les vaches seront bien gardées... (Sourires) Il est temps de replacer les enfants au coeur de nos préoccupations, sans nous perdre dans des débats de compétences. Que les communes continuent à assurer l'accueil, l'entretien des locaux, le recrutement des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem) ; et que les départements assument le médico-social, tout le médico-social.

La protection maternelle et infantile (PMI) suit les élèves en situation de handicap jusqu'à 6 ans. Au-delà, la médecine scolaire est malheureusement famélique. Or la santé, c'est aussi le bien-être psychique et social. La santé scolaire a davantage besoin de psychologues et d'assistantes sociales que de médecins et d'infirmiers.

Les MDPH évaluent les besoins d'accompagnement par un AESH. Donnons aux départements la pleine compétence dans ce domaine, avec une compensation financière par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et une péréquation entre départements. Cette répartition claire est pratiquée avec succès dans les cités éducatives et les territoires éducatifs ruraux - ces TER qui n'arrivent pas à très grande vitesse... (Sourires)

Le temps méridien n'est pas un temps anodin. La cantine est nécessaire pour les enfants des familles précaires. Nous saluons les collectivités territoriales qui s'engagent via une tarification sociale. L'éducation à l'équilibre alimentaire est aussi une priorité, pour remédier aux épidémies d'obésité et de diabète.

Madame la ministre, ne laissez pas votre collègue de l'éducation nationale gérer des situations lourdes pour les élèves en situation de handicap, perturbantes pour les autres élèves et épuisantes pour le corps enseignant. Il faut prévoir des places en nombre suffisant dans les instituts médico-éducatifs (IME).

L'école inclusive est un beau projet, mais qui manque de moyens. Il est urgent de le prendre à bras-le-corps. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du RDPI ; Mme Françoise Gatel applaudit également.)

Mme Samantha Cazebonne .  - Nous faisons un pas de plus vers une école toujours plus inclusive, avec cette proposition de loi issue du rapport de Cédric Vial.

Cette démarche s'inscrit aussi dans la continuité de la promesse faite par le Président de la République en 2022 sur les AESH. L'enjeu est d'importance pour les élèves en situation de handicap, les AESH et les collectivités territoriales. Si un élève n'est plus accompagné ou s'il l'est par une autre AESH, cette rupture le pénalise. Il arrive même que certains parents embauchent directement une AESH, sans contrôle par l'éducation nationale.

Cette proposition de loi permettra une simplification du statut des AESH, avec l'État pour seul employeur, et un lissage de leur emploi du temps. Nous ne connaissons que trop bien la situation de précarité dans laquelle beaucoup se trouvent. Tout ne sera pas résolu, mais ce texte marque une avancée.

Le Conseil d'État a jugé que la compétence de l'État ne portait que sur le temps scolaire, reportant la responsabilité des autres temps sur les collectivités territoriales, qui ont dû assumer une charge financière supplémentaire. Il en est résulté une rupture d'égalité entre les élèves en situation de handicap.

Le RDPI votera ce texte qui rétablit une solidarité nationale.

Mme Marie-Pierre Monier .  - Un an après la loi visant à lutter contre la précarité des AESH et des assistants d'éducation, je me réjouis que nous abordions de nouveau l'inclusion scolaire. La loi de 2005 pour l'égalité des droits et des chances a consacré le droit à une scolarisation ordinaire, puis la loi de 2013 pour la refondation de l'école de la République a renforcé la prise en compte du handicap.

Depuis 2006, le nombre d'élèves en situation de handicap pris en charge par l'enseignement scolaire a quadruplé, passant de 118 000 à 478 000. Mais cette prise en charge doit aussi être plus qualitative.

Les AESH, dont 93 % sont des femmes, portent à bout de bras cette inclusion. Récemment, une enseignante à bout de souffle - comme beaucoup - me disait : « sans AESH, nous ne tiendrions plus debout ».

La proposition de loi de Cédric Vial vise la prise en charge par l'État de l'accompagnement sur le temps méridien ; elle fait suite à sa mission d'information et revient à l'esprit des lois de 2005 et 2013, mis en cause par la décision du Conseil d'État de 2020.

Toutes les collectivités territoriales ne sont pas en mesure de financer ces AESH, dans un contexte budgétaire contraint. La dualité d'employeurs pénalise les AESH, au détriment de leur temps de pause, pourtant obligatoire. Quelque 20 000 à 25 000 élèves en situation de handicap seraient concernés par une rupture d'accompagnement sur le temps méridien : certains parents ont recours à des AESH privées, voire retirent leur enfant de l'école.

La circulaire du 4 janvier 2023 rappelle les trois possibilités de recrutement. Si la mise à disposition représente une avancée, son application sur le terrain est complexe. Dans la Drôme, toutes les AESH intervenant sur le temps périscolaire sont recrutées par les collectivités territoriales.

Au regard des fortes contraintes actuelles, nous partageons l'objectif de cette proposition de loi. Son coût est estimé à 31 millions d'euros : quelles garanties avons-nous que ces nouvelles dépenses ne pénalisent pas d'autres mesures d'inclusion scolaire ? Et quid du reste du temps périscolaire ?

Ce transfert doit constituer une avancée et ne pas dégrader les conditions de travail des AESH. Certaines communes sont plus généreuses que l'État : il ne faut pas que le moins-disant prévale.

Enfin, nous devons réfléchir plus globalement à l'école inclusive. En quelques années, les AESH sont devenues la deuxième catégorie de personnel de l'éducation nationale. Il est inacceptable qu'elles continuent à exercer leur travail dans des conditions précaires, avec un salaire inférieur au seuil de pauvreté. Ce manque de considération nuit à l'attractivité de la profession et entretient la pénurie.

Le ministère doit mettre en place des brigades de remplacement. Une AESH de mon département n'a pas été remplacée pendant les dix semaines de son arrêt maladie...

Le Gouvernement doit prendre à bras-le-corps la question de l'inclusion scolaire, avec comme seule boussole la scolarisation des élèves en situation de handicap dans les meilleures conditions, à rebours de la rationalisation budgétaire des PAS, heureusement censurés par le Conseil constitutionnel dans le projet de loi de finances pour 2024.

Le groupe SER votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Philippe Mouiller .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Président de la commission des affaires sociales et, pour quelques heures encore, du groupe d'études Handicap, je remercie Cédric Vial pour son rapport et cette proposition de loi. Je félicite la rapporteure pour la qualité de son travail.

Il était nécessaire de légiférer en raison de la décision du Conseil d'État du 20 novembre 2020, qui a transféré la charge financière des AESH vers les collectivités territoriales. Cette décision méconnaît l'esprit de la loi de 2005 et crée des difficultés financières, juridiques et organisationnelles multiples. La mesure proposée est donc une clarification bienvenue.

Voilà un an, le Sénat a adopté une proposition de loi pour lutter contre la précarité des AESH, prévoyant un CDI après plusieurs années de service. Il est urgent de leur donner un véritable statut, car le métier est complexe et peu attractif. De nombreux élèves en situation de handicap ne peuvent bénéficier d'un accompagnement, faute de personnel. Cette situation résulte de rémunérations insuffisantes, d'un manque de formation et de complexités administratives.

Je plaide pour un service d'accompagnement global des élèves en situation de handicap : mettons au centre l'enfant et son parcours de vie. Un jeune élève en situation de handicap peut avoir besoin d'un accompagnement le matin, puis pendant la pause méridienne et le soir en garderie. Il peut aussi avoir besoin d'être accompagné au centre de loisirs le mercredi ou pour participer à des activités sportives et culturelles. Réfléchissons à cet accompagnement global, intégrant aussi les transports.

J'en suis convaincu, nous pouvons faire mieux, avec les mêmes moyens financiers, pour un accompagnement de qualité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Laure Darcos .  - L'arrêt du Conseil d'État a suscité la consternation des parents d'élèves en situation de handicap. Alors que l'école inclusive est une réalité tangible, comment refuser un AESH sur la pause méridienne ?

Dans l'urgence, les familles ont dû s'organiser, mettant parfois leur vie professionnelle entre parenthèses. Les collectivités territoriales ont été placées dans une situation intenable, avec le devoir moral d'aider ces enfants.

Plusieurs communes de l'Essonne ont pris en charge le financement des AESH, charge financière malvenue alors qu'elles se débattent dans des difficultés budgétaires sans nom. Certains établissements privés sous contrat ont trouvé des financements tandis que d'autres ont dû laisser les familles assumer un coût bien trop important pour elles.

Les AESH, ce capital humain si précieux, ont été fragilisés au sein des Pial. Cette proposition de loi est donc particulièrement bienvenue.

Sur 478 000 élèves en situation de handicap scolarisés à la rentrée 2023, 20 000 à 25 000 ont besoin d'un accompagnement humain sur le temps périscolaire, nécessaire à leur inclusion.

Ce texte met un terme à la pluralité d'employeurs pour les AESH, qui était devenue la règle. Il renforce le droit des enfants à un parcours continu et adapté, dans l'esprit de la loi de 2005. Surtout, il met fin à une mesquinerie dont le Conseil d'État s'est rendu coupable. La solidarité nationale incombe à l'État, qui doit financer l'intégralité du salaire des AESH, sans distinguer le temps scolaire du temps périscolaire. L'État finance 86 500 équivalents temps plein travaillés (ETPT) : il peut donc financer ces AESH. Le texte reprend une recommandation du rapport de la commission de la culture à ce sujet.

Il est nécessaire de mener une réflexion globale : l'école inclusive est sur le point de rompre. Si notre regard a changé sur le handicap, les injonctions ne sont pas bonnes conseillères. Réfléchissons à l'école inclusive de demain. L'école ne peut pas accueillir tous les handicaps : il faut donc augmenter le nombre de places dans les IME.

La loi visant à lutter contre la précarité des AESH de 2022 ne peut s'envisager que comme une première étape. Le groupe Les Indépendants votera ce texte essentiel. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; MM. Laurent Lafon et Bernard Fialaire applaudissent également.)

Mme Annick Billon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; M. Bernard Fialaire applaudit également.) L'éducation nationale croule sous les sujets importants. Je salue le travail d'ampleur sur ce texte par l'auteur et la rapporteure. Depuis la loi pour l'égalité des chances, la prise en charge des élèves en situation de handicap sur le temps méridien n'a pas été traitée de manière satisfaisante. L'arrêt du Conseil d'État dispense l'État de le prendre en charge, au détriment des collectivités. D'après la direction générale de l'enseignement scolaire (Dgsco), 20 000 à 25 000 élèves seraient concernés. Avec leurs parents et leurs établissements, ils sont en grande difficulté. Des dizaines d'entre eux ont été déscolarisés. La circulaire de janvier 2023 ne remédie pas au problème.

Parents et établissements doivent donc bricoler, la situation étant variable. Dans certaines régions, il n'y a pas de prise en charge méridienne dans le second degré.

Il y a inégalité entre public et privé, où la solution est souvent de faire payer les familles, qui doivent débourser 400 euros. Toutes n'en ont pas la possibilité. En Loire-Atlantique, une mère a dû arrêter de travailler pour déjeuner avec son enfant dans sa voiture.

Autre conséquence inacceptable : la mise en danger des enfants. Si les collectivités territoriales peuvent consulter le Fijais, les parents ne le peuvent pas, bien sûr. Les familles sont donc contraintes de renoncer à leurs droits.

Les auditions ont mis en avant qu'il y a plus de non-recours que de demandes d'embauches. Tous les acteurs sont en attente d'une solution. C'est donc avec enthousiasme que j'accueille ce texte.

Le rapport sénatorial indique que 288 000 élèves en situation de handicap ont besoin d'accompagnement. Or 140 000 AESH exercent, soit un pour deux élèves. Les AESH ne sont pas réparties uniformément sur le territoire. On compte deux à trois contrats d'AESH par enfant accompagné : temps scolaire, périscolaire, méridien. Et je ne parle pas du temps de travail. Ce métier exercé à 93 % par des femmes demeure précaire. Nos travaux ont permis d'améliorer la situation, comme la loi de 2022 - mais cela en appelle d'autres comme la prise en charge des frais de transport en septembre 2023. C'est une bonne chose, mais les AESH et les assistants d'éducation (AED) exerçant en milieu rural sont lésés.

Suivre un élève durant le temps méridien ne requiert pas les mêmes compétences que durant le temps scolaire : il faut donc muscler les 60 heures de formation initiale. En outre, le Gouvernement veut fusionner les AESH et les AED en vue de créer le métier d'accompagnateur à la réussite éducative, mais ces missions ne sont pas interchangeables.

Ce texte apporte une première amélioration, nécessaire. Une réflexion devrait être menée sur le temps périscolaire dans sa globalité. Le développement de cet accompagnement passe par une stabilité de la loi. En Vendée, 90 % des enfants seraient accompagnés. Mais le coût est important : pour le Finistère, c'est 500 000 euros - pour la seule école publique.

Nous avions voté contre l'article 53 du projet de loi de finances...

M. Max Brisson.  - Très bon rappel ! (Sourires)

Mme Annick Billon.  - ... finalement censuré par le Conseil constitutionnel.

Madame la ministre, je déplore que la ministre Oudéa-Castéra ne soit pas parmi nous : l'éducation nationale a besoin d'une ministre pleinement engagée. (M. Max Brisson renchérit.) Déléguer ce texte à la ministre de la santé et du travail que vous êtes est la marque que l'école est bel et bien malade ! (Sourires)

Le groupe UC votera ce texte avec enthousiasme. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; M. Bernard Fialaire et Mme Laure Darcos applaudissent également.)

Mme Monique de Marco .  - Avant même la création d'un ministère éléphantesque et les rebondissements de l'affaire Stanislas, la majorité présidentielle connaît un premier échec dans l'éducation nationale : je pense à la censure par le Conseil constitutionnel de l'article 53 du projet de loi de finances remplaçant les Pial par des PAS.

Comme nous le disions à votre prédécesseur, cette réforme était dépourvue de lien direct avec l'objet de la loi de finances ; elle méritait une étude d'impact et des auditions ; mais elle a finalement été réintroduite par le biais du 49.3.

Dans tous les territoires, la mise en oeuvre chaotique de l'école inclusive a généré des frustrations : des enseignants, privés de formation suffisante, des parents d'élèves, qui ne peuvent faire respecter les décisions des MDPH, des collectivités territoriales, obligées par le Conseil d'État à prendre en charge cette politique nationale, des AESH recrutées dans des conditions précaires.

La loi de 2022 a amélioré leur situation en favorisant le recrutement en CDI, mais cela ne concerne encore qu'un accompagnant sur deux. Ce métier, devenu le deuxième de l'éducation nationale, n'a pas de statut. Une formation spécifique et la valorisation de leur taux horaire seraient nécessaires. Certaines collectivités territoriales ont pris le problème à bras-le-corps en organisant de telles formations. Le Gouvernement a lancé de grandes idées en l'air, et nous, parlementaires, devons recoller les morceaux... C'est ce que fait cette proposition de loi.

Je ne crois pas que les moyens humains soient surabondants. Au contraire, ils ont été sous-estimés : le Gouvernement tente de faire porter le coût de son orthodoxie budgétaire aux collectivités territoriales, qui n'ont pas à se faire imposer des compétences nouvelles par un ministre contractualisant avec l'école catholique. N'était-ce pas le sens du protocole d'accord sur la mixité de mai 2023 ?

Nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Christian Bruyen .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Cette proposition de loi est de bon sens. Elle s'impose tant les conséquences négatives de la décision du Conseil d'État sont inacceptables : il y a des inégalités locales dans l'accompagnement, faute d'une capacité de financement, notamment. Nous devons considérer les collectivités comme des partenaires.

Ce ne sera qu'un début, qui nous invite à un nouveau travail pour rendre le métier d'AESH plus attractif et améliorer leur formation - je pense à l'aide au repas, qu'il faut envisager d'un point de vue médical. (Mme Anne Ventalon acquiesce.)

La pause méridienne fait partie de la scolarité inclusive. Depuis septembre 2020, les collectivités qui le peuvent ont passé des conventions. Mais cela est risqué : compte tenu du transfert de l'autorité de gestion, la responsabilité des collectivités est engagée en cas d'accident.

L'angoisse pèse sur les familles, les élus locaux et les enfants, qui ne peuvent pas comprendre ce qui les empêche d'améliorer leur bien-être. L'État doit donc devenir un facilitateur.

Cette dépense ne peut dépendre du département. Au-delà de la prestation de compensation du handicap (PCH), c'est d'éducation qu'il est question, comme pour l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH). Ces enfants ne remplissaient pas tous les critères de la PCH. Les allocations individuelles de solidarité (AIS) sont insuffisantes : 30 % pour le handicap seulement.

Il est impératif de corriger une approche négative sur ce sujet fondamental, la construction d'un parcours véritablement inclusif. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Anne-Sophie Romagny applaudit également.)

Mme Else Joseph .  - Ce texte est attendu par les familles et la société dans son ensemble.

C'est l'honneur de notre société d'aider les élèves en situation de handicap : le handicap est un domaine où la solidarité nationale est naturellement appelée à s'exercer, pour des exigences qui excèdent celles d'une vie ordinaire.

Dans une décision du 20 novembre 2020, le Conseil d'État avait écarté la responsabilité de l'éducation nationale pour le temps méridien. Cela a compliqué la vie des parents, mais aussi celle des collectivités territoriales, entraînant des ruptures dans les parcours des jeunes.

Les collectivités ont des ressources limitées et sont sans cesse sollicitées. Ce goulot d'étranglement supplémentaire crée une inégalité qui pèse sur des milliers de familles en plein désarroi.

Je n'oublie pas les difficultés dans la pratique : les emplois du temps à réorganiser, un nombre d'accompagnants qui se multiplie, créant inconfort et angoisse pour l'enfant.

Je me réjouis que soit reconnu dans le code de l'éducation le principe de la rémunération à la charge de l'État.

La loi de février 2005 est centrale - je salue l'action de Philippe Bas, alors ministre des affaires sociales ; elle prévoit que la scolarisation des élèves en milieu ordinaire relève de l'État.

La jurisprudence du Conseil d'État créait une certaine dissonance ; je ne jette pas la pierre au juge administratif, mais, en ce cas, il revient au législateur d'agir. Si, à l'avenir, les décisions de justice nous semblent inadaptées, nous devrons agir de nouveau. (Mme Frédérique Puissat renchérit.)

Je salue le travail de Cédric Vial qui, dans son rapport de 2023, avait appelé l'éducation nationale à être inclusive.

Cette proposition de loi démontre que le Sénat est la chambre des territoires, qui relaie avec réactivité les demandes de nos concitoyens. Nous ne sommes pas une maison opaque dont les sujets seraient déconnectés de ce que vivent les Français. Je remercie Anne Ventalon, qui a fait adopter ce texte à l'unanimité par notre commission.

Le handicap, c'est une part de nous-mêmes. Comment ne pas se souvenir de ces propos du général de Gaulle à l'égard de sa fille qui était atteinte d'une trisomie : « Anne m'a aidé à dépasser tous les échecs et tous les hommes. »

Le fondateur de nos institutions nous rappelle que la Ve République, c'est aussi ce devoir permanent d'humanité. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; M. Ludovic Haye applaudit également.)

Mme Frédérique Puissat.  - Bravo !

Mme Catherine Vautrin, ministre.  - Pour répondre à Mmes Monier et de Marco et MM. Lahellec et Mouiller, depuis 2021, les AESH ont bénéficié de 26 % d'augmentation - 200 euros par mois. Il fallait le signaler.

Monsieur Fialaire, votre idée de santé scolaire est intéressante. Je prends l'engagement de faire le lien avec le ministère de l'éducation nationale. Nous connaissons tous les conséquences du numerus clausus - nous y travaillons.

Je partage aussi votre analyse sur l'équilibre alimentaire : la prévention est un enjeu pour tous. L'heure du repas doit être un moment durant lequel on aide les enfants à se nourrir correctement.

J'ai bien noté vos commentaires sur les places en IME. Il n'y a pas qu'un enjeu financier ; il y a aussi un enjeu de formation.

Madame Billon, une réponse impertinente : ce n'est pas si mal d'avoir le ministre des solidarités et du travail devant vous, car au-delà de la rétribution financière, il y a la formation et les perspectives de carrières pour l'attractivité du métier. Le continuum gouvernemental a aussi son importance. (Sourires)

Philippe Mouiller a rappelé l'importance d'un service d'accompagnement autour de l'enfant, d'autant plus important qu'il répond aux attentes des parents - Else Joseph a raison : la multitude d'intervenants ne peut être bénéfique.

Laure Darcos insistait sur la prise en charge globale du handicap à l'école. Jusqu'où va l'école inclusive ? Nous sommes dans l'humain : il faut du doigté, de l'écoute et du respect.

Je connais l'expérience de président de conseil départemental de Christian Bruyen. Cette proposition de loi apporte une réponse concrète en matière d'accompagnement financier. L'accompagnement des enfants est aussi un acte d'éducation. Le Gouvernement aura un avis de sagesse très accompagnante. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Discussion des articles

Article 1er

M. Max Brisson .  - Le sujet est consensuel, c'est bien normal. L'article 1er porte sur l'article L. 211-8 du code de l'éducation, qui ne parle que d'éducation : les AESH seront désormais listés aux côtés des professeurs, des personnels d'administration et d'inspection. L'article traite des dépenses de fonctionnement pédagogique, des frais de reprographie : bref, il relève pleinement de l'éducation nationale - or c'est la ministre du travail qui est au banc !

L'école inclusive pourrait être abordée sous l'angle d'un partenariat interministériel, mais nous avons compris, lors du projet de loi de finances, que le ministre de l'éducation nationale reprenait la main. Faut-il déduire de votre présence au banc, madame la ministre, qu'il y a désormais un partenariat entre ministères pour l'accompagnement des élèves en situation de handicap, ou est-ce un simple accident d'agenda ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités .  - Mon décret d'attribution ne comprend pas la fonction publique, mais il comprend les solidarités et le handicap. Nos concitoyens ne cherchent pas à savoir qui est chargé de quoi, mais ce que le Gouvernement dans son ensemble fait pour répondre à leurs attentes. C'est le sens de mon engagement.

Mme Françoise Gatel.  - Bien sûr !

Mme Annick Billon .  - Le métier d'AESH est le deuxième de l'éducation nationale. Les problèmes sont connus -  les statistiques comme les propositions de loi sénatoriales en témoignent.

Madame la ministre, je veux toutefois vous remercier pour votre écoute et pour la qualité de vos réponses à chacun des orateurs. Peut-être un ministère XXL est-il la solution, cher Max Brisson ! (Sourires)

Mme Françoise Gatel .  - Merci à Cédric Vial pour cette proposition de loi pertinente. Toute la société doit se rassembler pour accompagner ces enfants.

Ce sont les MDPH, donc les départements, qui font les prescriptions d'accompagnement, mais ces prescripteurs ne sont pas les payeurs. Quand, en août, la MDPH prescrit des mesures lourdes, alors qu'il n'y a plus de budget, le département d'Ille-et-Vilaine finance l'école inclusive sur les fonds dédiés aux Ehpad... Cette absence de cohérence interroge.

Dans ma Bretagne, 40 % des enfants sont scolarisés dans le privé - la seule école dans de nombreuses communes. Il faut se pencher sur les dispositifs d'inclusion dans le privé sous contrat.

L'article 1er est adopté.

Article 2

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par M. Fialaire, Mme M. Carrère, M. Laouedj, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, MM. Guiol et Masset, Mme Pantel, M. Roux, Mme N. Delattre et MM. Daubet, Cabanel et Bilhac.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Lorsqu'ils sont amenés à travailler sur cette période, les accompagnants des élèves en situation de handicap disposent d'aménagements particuliers afin qu'ils puissent bénéficier d'un temps de repos.

M. Bernard Fialaire.  - Cet amendement d'appel porte sur le bien-être au travail des AESH. L'article 3 du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement du temps de travail dans la fonction publique de l'État impose une pause de vingt minutes après six heures de travail continu. Les professionnels demandent une hausse du temps de travail, dans une perspective de professionnalisation, mais les Pial demandent toujours plus de flexibilité... L'amélioration des conditions de travail n'est pas incompatible avec la qualité de l'accompagnement et participe à l'attractivité du métier.

Mme Anne Ventalon, rapporteure.  - Avis défavorable, même si je partage votre préoccupation. Avec le transfert de la compétence à l'État, il y aura un contrat unique et un employeur unique. Le code du travail s'appliquera : un temps de pause dès lors que le temps de travail atteint six heures. Or votre amendement ouvrirait droit à des aménagements même si l'intervention de l'AESH se limite au seul temps méridien.

Mme Catherine Vautrin, ministre.  - Même avis. L'article 3 du décret du 25 août 2000 est déjà mis en oeuvre pour les AESH intervenant durant la pause méridienne, qui n'est pas comptabilisée comme temps de travail sauf en cas d'accompagnement d'un élève. Si vous cumulez six heures continues de travail, vous bénéficiez d'une pause de vingt minutes décomptée de votre temps de travail, avant ou après le temps de restauration de l'élève - je cite le guide des ressources humaines des AESH. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Bernard Fialaire.  - Je suis satisfait d'avoir sensibilisé sur ce sujet et retire l'amendement.

L'amendement n°1 rectifié est retiré.

L'article 2 est adopté.

Vote sur l'ensemble

M. Cédric Vial, auteur de la proposition de loi .  - Ce texte simple va régler des problèmes complexes, comme celui qu'a soulevé Bernard Fialaire. Je remercie Anne Ventalon qui a su trouver un consensus, le président Larcher et le président Retailleau, Laurent Lafon et Max Brisson pour leur confiance et leur soutien, l'ensemble des orateurs ainsi que madame la ministre, dont la position marque un engagement nouveau.

Je forme le voeu que le Gouvernement se saisisse des dix-neuf autres propositions de mon rapport. Si votre méthode est plus respectueuse du travail parlementaire que lors du projet de loi de finances, vous pourrez compter sur mon engagement à vos côtés pour une meilleure prise en charge des élèves en situation de handicap. (Applaudissements)

M. Max Brisson, au nom de la commission de la culture .  - Cette proposition de loi traduit l'une des vingt recommandations du rapport de Cédric Vial. La commission de la culture est à votre disposition pour explorer les dix-neuf autres, madame la ministre ! Nous espérons que votre « sagesse accompagnante » fera aboutir rapidement le texte.

Reste le sujet des MDPH, de la politique globale d'accompagnement des élèves en situation de handicap. Cette maison n'a pas aimé le passage au forceps et à la sauvette, de l'article 53 du projet de loi de finances. Nous souhaitons remettre les choses à plat, sur la base du rapport de Cédric Vial, pour trouver des solutions, sans affrontement.

L'école inclusive nécessitera un partenariat entre le ministère de l'éducation nationale et le vôtre : finalement, vous étiez bien à votre place au banc du Gouvernement ce soir ! (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Mme Catherine Vautrin, ministre.  - Je vous remercie.

La proposition de loi est adoptée.

M. le président.  - À l'unanimité. (Applaudissements)

Prochaine séance demain, mercredi 24 janvier 2024, à 15 heures.

La séance est levée à 19 h 45.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 24 janvier 2024

Séance publique

À 15 heures et de 16 h 30 à 20 h 30

Présidence : M. Gérard Larcher, président, Mme Sophie Primas, vice-présidente

Secrétaires : M. Philippe Tabarot, Mme Véronique Guillotin

1. Questions d'actualité

2. Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à protéger le groupe Électricité de France d'un démembrement (texte de la commission n°248, 2023-2024)

3. Proposition de loi visant à mettre en place un décompte annuel des personnes sans abri dans chaque commune, présentée par M. Rémi Féraud et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n°244, 2023-2024)