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Table des matières



Hommages à Alain Anziani, Jean Boyer, Roland Courteau et Ambroise Dupont, anciens sénateurs

Questions d'actualité

Quel cap pour le Gouvernement ?

Mme Maryse Carrère

M. Sébastien Lecornu, Premier ministre

Suspension de la réforme des retraites

M. Patrick Kanner

M. Sébastien Lecornu, Premier ministre

Budget pour 2026 (I)

M. Pascal Savoldelli

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics

Vol au Louvre (I)

M. Laurent Lafon

Mme Rachida Dati, ministre de la culture

État de droit et indépendance de la justice

M. Guy Benarroche

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux, ministre de la justice

Budget pour 2026 (II)

M. Jean-François Husson

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics

Vie chère en outre-mer

M. Frédéric Buval

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics

Métayage franc en Champagne

Mme Vanina Paoli-Gagin

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire

Politique de l'immigration

Mme Jacqueline Eustache-Brinio

M. Laurent Nunez, ministre de l'intérieur

Budget pour 2026 (III)

M. Thierry Cozic

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics

Vol au Louvre (II)

Mme Agnès Evren

Mme Rachida Dati, ministre de la culture

Épizootie de dermatose nodulaire contagieuse

M. Jean-Michel Arnaud

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire

Différence de DGF entre communes rurales et urbaines

M. Bruno Belin

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation

Collecte de la taxe d'aménagement (I)

Mme Nicole Bonnefoy

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics

Pollution aux PFAS dans les Ardennes

Mme Else Joseph

Mme Monique Barbut, ministre de la transition écologique, de la biodiversité et des négociations internationales sur le climat et la nature

Collecte de la taxe d'aménagement (II)

M. Daniel Fargeot

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics

Avis sur des nominations

Rappel au règlement

Mandat d'élu local (Deuxième lecture - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 17

Rappel au règlement

Discussion des articles (Suite)

Article 17 bis (Supprimé)

Article 18

Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure de la commission des lois

M. Cédric Vial

M. Pierre-Alain Roiron

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation

Article 18 bis A

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure de la commission des lois

M. Cédric Vial

Mme Cathy Apourceau-Poly

Article 18 bis

Article 19

M. Simon Uzenat

Article 20

Après l'article 22

Article 23 (Suppression maintenue)

Article 24 bis

M. Pierre Jean Rochette

M. Thomas Dossus

Article 25

Article 31

Article 39

Article 40 (Supprimé)

Intitulé de la proposition de loi

Vote sur l'ensemble

Mme Maryse Carrère

M. Bernard Buis

M. Pierre-Alain Roiron

M. Louis Vogel

Mme Cécile Cukierman

M. Jean-Marie Mizzon

M. Guy Benarroche

Mme Marie Mercier

M. Laurent Somon

M. Jean-Michel Arnaud

Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation

Conférence des présidents

Ordre du jour du jeudi 23 octobre 2025




SÉANCE

du mercredi 22 octobre 2025

5e séance de la session ordinaire 2025-2026

Présidence de M. Gérard Larcher

La séance est ouverte à 15 heures.

Hommages à Alain Anziani, Jean Boyer, Roland Courteau et Ambroise Dupont, anciens sénateurs

M. le président.  - (Mmes et MM. les sénateurs et membres du Gouvernement se lèvent.) Permettez-moi d'évoquer la mémoire de quatre de nos collègues qui nous ont quittés.

Alain Anziani, socialiste de la première heure, avocat de formation, fut une figure incontournable de la vie politique girondine. Conseiller régional d'Aquitaine de 1992 à 2010, il devint maire de Mérignac en 2014, avant d'être élu président de Bordeaux-Métropole. Sénateur de 2008 à 2017, il siégea bien sûr au sein du groupe socialiste. Il fut membre de la commission des lois, dont il devint vice-président. Son rapport, notamment sur les conséquences de la tempête Xynthia en 2010, marqua notre assemblée. Il devint questeur du Sénat de 2011 à 2014. Homme de conviction, cet infatigable travailleur aura incarné jusqu'au bout un sens de l'engagement empreint à la fois de lucidité et de courage.

Jean Boyer, agriculteur, s'engagea très vite en politique dans son département, la Haute-Loire, dont il deviendra une figure emblématique. Maire de Blanzac, il sera conseiller général du canton de Saint-Paulien, puis vice-président du conseil général en 1985. Élu sénateur en 2001, il siégea au groupe de l'Union centriste, dont il devint vice-président. Il fut un membre éminent de la commission des affaires économiques, où il put mettre pleinement à profit ses compétences, notamment dans le domaine agricole, puis il fut membre de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication en 2011. Durant ses deux mandats, Jean Boyer mit toute son énergie au service des territoires ruraux et de l'agriculture de montagne.

Roland Courteau a marqué son département de l'Aude en devenant à 37 ans l'un des plus jeunes sénateurs. Au Sénat, il sera pendant près de quatre décennies l'un des membres les plus actifs de la commission des affaires économiques - je peux en attester - et l'un des porte-parole du groupe socialiste en son sein. Il fut à l'origine de la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs. Vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques de 2012 jusqu'à la fin de son mandat, Roland Courteau s'est passionnément investi dans les questions de transition énergétique et de protection de l'environnement. Enfin, je n'oublie pas son combat pour l'agriculture et singulièrement la viticulture audoise.

Ambroise Dupont, fervent ambassadeur du Pays d'Auge et de ses produits du terroir, amoureux des chevaux, fut un ardent défenseur de la ruralité et du monde agricole. Maire de Victot-Pontfol et conseiller général du canton de Cambremer, pendant près de quarante ans, il s'était notamment appliqué à défendre, avec succès, l'obtention du label AOC Cidre du Pays d'Auge. Sénateur de 1989 à 2014, membre des groupes Républicains Indépendants puis UMP, il siégea à la commission des affaires culturelles dont il devint vice-président en 2001. Grand serviteur du Calvados - dans les deux sens (sourires) -, il marqua notre assemblée par sa simplicité et son dévouement à la chose publique.

Nous serons aussi par la pensée aux côtés des proches de Gilbert Bouchet vendredi prochain, à Tain-l'Hermitage.

Au nom du Sénat tout entier, je veux présenter nos condoléances les plus attristées aux familles de nos collègues disparus. En leur mémoire, je vous propose d'observer un moment de recueillement. (Mmes et MM. les sénateurs et membres du Gouvernement observent un instant de recueillement.)

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

La séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et au temps de parole.

Quel cap pour le Gouvernement ?

Mme Maryse Carrère .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Bernard Buis applaudit également.) Le RDSE s'associe à l'hommage rendu à nos collègues disparus.

Monsieur le Premier ministre, 180 jours sans Gouvernement cette année ; le Parlement a tout juste repris ses travaux, mais pour combien de temps ? Dans ce brouillard, une seule certitude : s'il y a échec, la responsabilité sera collective, car les Français souffrent d'être privés d'un cap clair. Tenir jusqu'en 2027, ce n'est pas un projet pour la France.

Sans espoir pour notre pays, nos concitoyens épargneront toujours plus, les acteurs économiques investiront moins ; sans réformes équitables et cohérentes, les marchés nous épingleront et notre économie stagnera.

Le budget est la première urgence. Maîtriser des finances publiques avec un objectif de justice fiscale est une priorité pour le RDSE.

Pour la réforme des retraites, qui décide ? La Constitution est claire : le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation. Alors, suspension ou décalage ?

Et après ? Quel calendrier pour les textes sur l'accompagnement de la fin de vie, attendus par 80 % des Français ? Face à la crise du logement, à quand une véritable planification ? En matière de souveraineté industrielle et alimentaire, à quand des politiques de soutien mieux ciblées ?

Les collectivités locales ont elles aussi besoin d'un cap. Est-ce le bon moment pour un nouveau chapitre de la décentralisation ? Les élus locaux réclament stabilité, visibilité, souplesse et pause institutionnelle. Pouvez-vous préciser vos projets, monsieur le Premier ministre ? (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe SER)

M. Sébastien Lecornu, Premier ministre .  - Au nom du Gouvernement, je m'associe à l'hommage rendu à plusieurs figures du Sénat.

Nous partageons tous l'urgence à se mettre au travail. Votre question m'invite à préciser l'agenda du Gouvernement, dans le respect du bicamérisme.

L'urgence, c'est le budget, c'est-à-dire le rétablissement de nos finances publiques et les cibles de nos déficits. La question des retraites est celle de la démographie, du partage des efforts et du travail dans la société. La suspension n'a de sens que si ces questions sont posées. Seul le débat parlementaire permettra d'avancer, dans le respect de la démocratie sociale.

Fiscalité, économies, mais aussi emploi et croissance, sans lesquels rien n'est possible - autant de sujets sur lesquels il faut revenir.

La proposition de loi sur la fin de vie a débuté son parcours il y a plusieurs mois. Le débat doit avoir lieu jusqu'au bout. L'ensemble des membres du Gouvernement bénéficieront d'une liberté de parole totale sur un texte qui touche à l'intime. Nous revenons à la liberté que nous connaissions jadis.

J'en viens à la décentralisation : le Sénat a alimenté la réflexion, notamment avec la proposition de loi statut de l'élu, porté par Mme Gatel.

M. Rachid Temal.  - Ce n'est pas fini !

M. Sébastien Lecornu, Premier ministre.  - Il faut évidemment aider les élus locaux. La navette doit se poursuivre, et idéalement aboutir avant le congrès des maires. Retraite, protection juridique : le Sénat a beaucoup travaillé sur ces sujets.

Derrière se posera la question de la décentralisation et de la réforme de l'État. Un texte sera présenté en conseil des ministres au mois de décembre. Le Sénat en sera saisi en premier, mais je souhaite que l'avant-projet soit alimenté bien avant pour une réflexion la plus aboutie. Avec les municipales et les sénatoriales à venir, le moment, historique, c'est maintenant : je n'imposerai rien à marche forcée, mais il faudra travailler à un bon rythme.

Le Parlement doit bien sûr se pencher sur le dossier calédonien - auquel, quoi qu'on en dise, le peuple français a toujours été mêlé, que ce soit par référendum ou par la voix de ses représentants - sans oublier le projet de loi sur la vie chère en outre-mer, très attendu car la question économique et sociale est un préalable indispensable à toute discussion institutionnelle. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du RDSE ; M. Louis Vogel applaudit également.)

Suspension de la réforme des retraites

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Agendas personnels, règlements de compte : nous nageons en pleine confusion, alors que notre pays a besoin de clarté. Voyez la droite (murmures à droite) du socle qui n'a plus rien de commun, qui prend les Français à témoin de sa guerre des chefs. (Mme Sophie Primas s'exclame.) Voyez le président de la République, qui fait perdurer l'illusion qu'il est au centre du jeu. Nous n'attendons plus rien de la parole présidentielle, prononcée ici ou à l'étranger.

Grâce à notre détermination, 3,5 millions de Français ne paieront pas de nouveaux impôts sur la vie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; murmures à droite) Nous avons arraché la lettre rectificative au projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cela a déterminé notre choix de non-censure - pour cette fois. Car nous n'aurons pas la main qui tremble ; nous agirons. (Exclamations ironiques à droite)

Notre inquiétude demeure, pour les dix millions de Français plongés dans la pauvreté, pour les cinq millions de travailleurs au Smic, pour les jeunes, sacrifiés des politiques publiques. Pour tous ceux-là, votre ruissellement a été un assèchement. Tous s'alarment notamment de votre projet d'année blanche, du doublement des franchises médicales, quand, en face, rien ne renforce leur pouvoir d'achat.

Il y a quatre-vingts ans, nous avons créé la sécurité sociale. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe SER)

Les Français ne sont pas responsables du cataclysme dont vous êtes comptable, en avez-vous conscience ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Sébastien Lecornu, Premier ministre .  - Vous posez la question de la juste répartition de l'effort, de comment réduire notre déficit public, défendre notre modèle de protection sociale, retrouver croissance et emploi. On ne peut pas parler retraite sans parler travail, sans parler démographie. Le débat aura lieu au Parlement.

Le projet de budget comporte bien des mesures pour protéger les plus fragiles : doublement de la niche Coluche, augmentations de crédits pour l'aide sociale à l'enfance ou l'hébergement d'urgence. Il faudra être attentifs aux effets de bord lors de la navette...

Nous convergeons sur les objectifs. Comment les atteindre ? Vous souhaitez un débat sur la fiscalité, notamment celle des 0,01 % les plus riches ; l'amenuisement de la progressivité à ce niveau est indéniable. Mais si la pression fiscale est trop forte, nous pénaliserons l'emploi. C'est pourquoi je suis opposé à la taxe Zucman et à tout ce qui touche aux outils de production. En l'absence de 49.3, nous irons au bout du débat.

Mme Cécile Cukierman.  - Ou pas...

M. Sébastien Lecornu, Premier ministre.  - Nous irons jusqu'au bout.

La suspension de la réforme des retraites permet à la démocratie sociale de redémarrer. Le Sénat a toujours accompagné le paritarisme. Profitons de ce moment pour débattre du partage de la valeur en entreprise. Le Président de la République -  c'est sa prérogative  - a lâché le mot « référendum » ; le peuple français doit être associé à cette question centrale.

Quant au forfait de responsabilité pour l'accès aux soins, c'est un principe de contribution : que les plus riches participent à l'achat de leur boîte de médicaments ne saurait choquer ceux qui plaident pour plus de justice fiscale... Quelque dix-huit millions de Français sont exemptés ce forfait : mineurs, femmes enceintes, bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (C2S). Ayons ces débats.

Le Gouvernement, sans être apolitique, se tient bien loin des querelles politiques. Il est à la disposition du Parlement pour débattre dans la dignité. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur plusieurs travées du RDSE et du groupe INDEP ; Mme Annick Jacquemet applaudit également.)

M. Patrick Kanner.  - Justice fiscale, sociale et écologique : vous êtes d'accord sur ces principes, nous vous jugerons sur votre capacité à agir. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Budget pour 2026 (I)

M. Pascal Savoldelli .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K ; « Ah ! » à droite) Notre groupe a soutenu la censure du Gouvernement. Vos projets budgétaires sont minoritaires, vous êtes cacophoniques sur les retraites. Dont acte. « Nous proposons, vous débattez, vous votez », dites-vous. Mais la représentation nationale sera-t-elle vraiment souveraine ? L'abandon du 49.3 ne le garantit pas.

M. François Patriat.  - On va le remettre, alors !

M. Pascal Savoldelli.  - Je crains l'affichage.

Vous engagez-vous à déplafonner les autorisations de crédit, à augmenter les recettes en taxant les plus riches et à accorder les moyens nécessaires aux services publics ? À renoncer aux ordonnances, qui sont un super 49.3, démocratiquement illégitime ? À renoncer à la CMP, non publique ? (Protestations à droite ; MM. Roger Karoutchi et Laurent Burgoa s'indignent.)

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Où est le respect du Parlement ?

M. Pascal Savoldelli.  - Mes camarades de droite hurlent, bien sûr, car la droite et la macronie y sont surreprésentées. (Mêmes mouvements)

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Et la Constitution ?

M. Pascal Savoldelli.  - Le débat budgétaire ne doit pas être un faux-semblant, visant à sauvegarder un pouvoir solitaire !

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Nous connaissons les règles et procédures du débat budgétaire : nous attendons maintenant d'étudier des amendements. Le Gouvernement donnera au cours des débats des éclairages sur les conséquences de telle ou telle mesure.

Notre travail collectif est désormais de bâtir un compromis. Aujourd'hui, le pouvoir politique est partagé, d'abord parce que le pouvoir exécutif s'en remet au pouvoir législatif pour trouver un budget, ensuite parce qu'aucun parti n'a la majorité absolue à l'Assemblée nationale. (M. Fabien Gay s'exclame.)

Mme Cécile Cukierman.  - Certains ont perdu, quand même !

Mme Amélie de Montchalin, ministre.  - Nous travaillons pour les Français, pour les entreprises, qui veulent savoir ce qui les attend au 1er janvier. (M. François Patriat renchérit.)

Je ne suis pas présidente du Conseil constitutionnel et ce Gouvernement n'a pas prévu de réécrire la Constitution. Nous nous en tiendrons aux règles que nous connaissons. Les Français attendent que les politiques se mettent d'accord et agissent pour leur logement, leur épargne, leur travail, leurs enfants. (Protestations sur les travées des groupes CRCE-K et SER)

M. Fabien Gay.  - Avec quelle légitimité ?

M. Yannick Jadot.  - Cela fait huit ans que vous êtes au pouvoir...

Mme Amélie de Montchalin, ministre.  - Nous avons l'humilité qui découle de la situation politique. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe CRCE-K et sur quelques travées du groupe Les Républicains) Le Premier ministre a dit renoncer au 49.3. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Pascal Savoldelli.  - La ministre n'a pas répondu.

M. Rachid Temal.  - Quelle surprise !

M. Pascal Savoldelli.  - Vous n'avez pris aucun engagement ! Le Gouvernement a gardé tous les leviers pour mettre le Parlement sous tutelle. Nous ne pourrons pas débattre des 211 milliards d'euros d'aides aux entreprises...

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Faux chiffre !

M. Pascal Savoldelli.  - ... garantir la fin de la réforme des retraites, rétablir la justice fiscale. Nous n'accepterons pas d'être privés de débat. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, du GEST et sur quelques travées du groupe SER)

Vol au Louvre (I)

M. Laurent Lafon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Jean-François Husson applaudit également.) Dimanche matin, des pièces d'une valeur inestimable ont été dérobées au Louvre. Ce vol rocambolesque a suscité l'émoi - et de nombreuses interrogations sur la sécurité du musée.

La direction du Louvre affirme que les protocoles ont été respectés, qu'il n'y a pas eu de défaillance. Dans ce cas, comment expliquer un tel vol ? La vidéosurveillance est-elle suffisante ? Et les forces de sécurité ?

Le Louvre a vieilli, mal vieilli ; selon le pré-rapport de la Cour des comptes, les insuffisances de sécurité pourtant connues n'ont pas été résolues. Un schéma directeur de sécurité a été élaboré en 2019, mais le premier appel d'offres vient seulement d'être lancé que cette année : pourquoi de tels délais ? Des arbitrages internes ont-ils été rendus au détriment de la sécurité ? Voilà les questions que nous poserons à Laurence des Cars dans quelques instants.

Ce fait n'est pas isolé : le Muséum d'histoire naturelle, le musée Jacques Chirac, le musée national Adrien Dubouché à Limoges ont fait l'objet de vols. La réflexion à mener dépasse le seul Louvre.

Madame la ministre, vous avez diligenté une enquête administrative alors qu'il n'y a eu, selon la direction, aucune défaillance : avez-vous un doute sur les procédures mises en oeuvre ?

Après l'incendie de Notre-Dame, le Gouvernement a lancé un plan d'action « Sécurité cathédrales ». Ferez-vous de même pour les musées ? (Applaudissements sur les travées des groupeUC et Les Républicains)

Mme Rachida Dati, ministre de la culture .  - Ces questions méritent effectivement des réponses précises.

La sécurité de notre patrimoine est une priorité. Depuis 2017, le budget du patrimoine a augmenté de plus de 27 %, dont une partie est consacrée à la sécurité. Je vous remercie, ainsi que Mme Drexler et MM. Rambaud et Vial, d'avoir soutenu mon amendement rehaussant de 300 millions ces crédits dans le PLF 2025. Une partie de ces crédits va au schéma directeur de sécurité et de sûreté.

Les dispositifs de sécurité interne au Louvre ont-ils fonctionné ? Oui.

M. Ian Brossat.  - N'importe quoi !

Mme Rachida Dati, ministre.  - L'alarme de la fenêtre a-t-elle fonctionné ? Oui. (Murmures et marques d'ironie à gauche)

M. Ian Brossat.  - Quelle blague !

Mme Rachida Dati, ministre.  - L'alarme de la vitrine a-t-elle fonctionné ? Oui. (M. Stéphane Ravier s'exclame.) Les agents ont-ils respecté le protocole de mise à l'abri des visiteurs ? Oui. (Mêmes mouvements) Est-ce un succès ? Non, sinon les joyaux seraient encore là. (Marques d'ironie sur toutes les travées) Mais je refuse la mise en cause des agents chargés de la sécurité du musée. (On se récrie à gauche.)

M. Ian Brossat.  - Assumez !

Mme Rachida Dati, ministre.  - C'est pourquoi j'ai lancé une enquête administrative et confié une mission au député Patrier-Leitus ; vos auditions permettront d'améliorer les dispositifs qui sont effectivement à renouveler. (Protestations sur les travées du groupe CRCE-K ; M. François Patriat applaudit.)

État de droit et indépendance de la justice

M. Guy Benarroche .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Je vais parler d'un ancien Président de la République condamné par une justice indépendante. (Murmures à droite) Alors que les institutions démocratiques et la règle de droit sont attaquées partout dans le monde, réjouissons-nous que notre justice travaille de façon sereine et indépendante.

Qu'un ancien Président de la République soit accusé de tels délits, voilà ce qui est alarmant pour notre République - pas que la justice fasse son travail.

M. Olivier Paccaud.  - Et le « mur des cons » ?

M. Guy Benarroche.  - Certains signaux envoyés vont à l'encontre de l'indépendance de la magistrature, garante de nos libertés. Le procureur général près la Cour de cassation, Rémy Heitz, s'en est ému hier. Au-delà du président Macron, qui trouve normal de recevoir l'ancien Président de la République à l'Élysée dans ce contexte, vos récentes déclarations, monsieur le garde des sceaux, entretiennent la confusion des genres. Vous rendez-vous compte que vous remettez en cause la séparation des pouvoirs ? (Applaudissements sur les travées du GEST, du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE-K)

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Puisque vous parlez de principes, en voici un : tant qu'une personne n'est pas définitivement condamnée, elle est présumée innocente. (Bravos et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP et sur quelques travées du groupe UC) Cela vaut pour Nicolas Sarkozy comme pour tout citoyen.

Aux termes de l'article 111 du code pénitentiaire, « le service public pénitentiaire est assuré par l'administration pénitentiaire sous l'autorité du ministre de la justice. »

Y a-t-il confusion, attaque à la séparation des pouvoirs, lorsqu'un parlementaire visite des détenus en prison pour s'assurer de leurs conditions de détention ? Mme Souyris et vous-même avez visité le quartier d'isolement et le quartier dit VIP de la Santé il y a une semaine - avec RTL, puis avec les journalistes de l'AFP et de France Info. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP) Était-ce du voyeurisme carcéral ?

M. Guy Benarroche.  - Sincèrement !

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux.  - Vous n'imaginiez pas que le président Sarkozy n'irait pas au quartier dit VIP...

Vous-même avez rendu visite à plusieurs reprises - c'est votre droit le plus strict - à Ouaihid Ben Faïza, condamné à vingt-neuf ans de prison pour association de malfaiteurs et évasion en bande organisée (bravos et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP), ou à Henocq Zehaye, condamné à dix-sept ans de prison pour détention d'armes, séquestration, enlèvement. (Huées à droite)

M. Yannick Jadot.  - Et les victimes du DC-10 ?

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux.  - J'ai peur, monsieur le sénateur, que vous confondiez justice et vengeance politique. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP)

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Jeu, set et match !

M. Guy Benarroche.  - Comme d'habitude, vous ne répondez pas aux questions mais inventez une histoire.

M. Stéphane Ravier.  - Et il ose reprendre la parole !

M. Guy Benarroche.  - La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 (on ironise à droite) consacre la séparation des pouvoirs. Personne ne cherche à entraver vos liens personnels avec un détenu. C'est mon rôle de parlementaire de visiter les prisons. Nous avons appris ce matin que le ministère de l'intérieur assurait la sécurité de l'ancien chef de l'État avec des moyens exceptionnels. Reste la confusion des genres de vos annonces...

M. le président.  - Il faut conclure.

M. Guy Benarroche.  - Notre inquiétude est partagée par beaucoup de syndicats... (Brouhaha à droite ; l'orateur s'interrompt en attendant le silence, mais son micro est coupé, le temps de parole étant écoulé.)

Budget pour 2026 (II)

M. Jean-François Husson .  - (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Hervé Maurey applaudit également.) Monsieur le Premier ministre, votre déclaration de politique générale a été marquée par un triptyque : le Gouvernement proposera, nous débattrons, vous voterez. Rassurez-vous : le Sénat n'a pas attendu ce slogan pour voter ! (On s'en amuse sur certaines travées à droite.) Quant à débattre avec le Gouvernement, encore nous faudrait-il savoir ce qu'il propose...

Or il ne propose rien de bien clair, notamment dans les textes financiers. Ainsi, proposez-vous un objectif de déficit de 4,7 ou 5 % ? La suspension, le report ou le décalage de la réforme des retraites ? La stabilité fiscale ou une flopée d'impôts nouveaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées des groupes UC et INDEP)

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Le Sénat a déjà joué un rôle prépondérant dans la construction du budget 2025, grâce notamment aux compromis trouvés en début d'année.

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Cela va continuer !

Mme Amélie de Montchalin, ministre.  - Nous avons déposé un projet de budget - il s'agit bien d'un projet. Le budget sera celui du Parlement. Je serai avec vous jour et nuit pour trouver des compromis. (Marques d'ironie sur certaines travées à droite et à gauche)

Nous proposons un déficit de 4,7 %. Vis-à-vis de nos partenaires européens comme des Français, nous devons chercher à stabiliser notre dette au plus tôt, en atteignant un déficit de 3 % au plus en 2029. Pour y parvenir, nous devons être résolument en dessous de 5 % en 2026.

En matière de fiscalité, nous proposons que les prélèvements obligatoires rapportés au PIB restent inférieurs au niveau de 2019, juste avant le covid, année où la sécurité sociale était à l'équilibre et le déficit largement inférieur à 3 %.

Que proposons-nous ? De financer ce qui est stratégique et le quotidien. D'un côté, 6,7 milliards d'euros supplémentaires pour nos armées, 600 millions d'euros de plus pour la lutte contre le narcotrafic et la criminalité organisée et 200 millions d'euros en plus pour la justice. De l'autre, 5 milliards d'euros de plus pour la santé et l'autonomie, un investissement dans la formation de nos enseignants et la préservation de l'apprentissage comme politique essentielle.

Financer le stratégique, y compris l'écologie, sans sacrifier le quotidien : voilà notre choix. (M. Marc-Philippe Daubresse ironise.) Mais si nous ne réduisons pas le déficit, nous ne ferons aucun des deux et, dès lors, nous manquerons à nos responsabilités. (Applaudissements sur des travées du RDPI ; M. André Guiol applaudit également.)

M. Jean-François Husson.  - Pour moi, c'est toujours le grand flou...

Hier, vous baissiez le taux de l'impôt sur les sociétés. Vous proposez aujourd'hui une surtaxe d'impôt sur les sociétés.

Hier, vous supprimiez l'ISF. Vous proposez aujourd'hui une taxe sur le patrimoine des holdings.

Hier, vous instauriez le prélèvement forfaitaire unique. Vous proposez aujourd'hui de proroger une contribution différentielle complexe.

Hier, vous supprimiez la CVAE, mesure finalement reportée. Vous proposez désormais un étalement.

Tout cela n'aurait qu'une cause : l'instabilité. Mais d'où vient-elle, sinon de la décision funeste de dissoudre l'Assemblée nationale ? Depuis, 163 ministres ont participé à cinq gouvernements - triste record.

J'ai mal à ma France, mais je ne me résigne pas. Comptez sur le Sénat - sa majorité et, j'espère, au-delà - pour participer au redressement de notre situation financière : c'est la mission essentielle que nous nous donnons, pour la France et les Français. (« Bravo ! » et applaudissements nourris sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Véronique Guillotin et MM. Vincent Delahaye, Marc Laménie et Louis Vogel applaudissent également.)

Vie chère en outre-mer

M. Frédéric Buval .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Il y a urgence en outre-mer. Dans tous les territoires, la situation économique est explosive. Un engagement total de l'État est indispensable.

Le premier sujet de préoccupation est la vie chère. Je suis corapporteur, avec Micheline Jacques, d'un projet de loi très attendu un an après la crise qui a secoué la Martinique. Malgré les nombreuses avancées prévues en matière de transparence, des inquiétudes demeurent sur ses effets à long terme, comme sur les risques pour le petit commerce de proximité. Comment le Gouvernement entend-il lutter durablement contre la vie chère, restaurer la confiance entre la population et les distributeurs et favoriser la production locale ?

Par ailleurs, fragiliser le dispositif Lodéom serait dangereux : il bénéficie à plus de 316 000 salariés et plus de 50 000 entreprises, principalement des PME. Ce n'est pas un privilège, mais un outil de survie économique pour les outre-mer, compte tenu de leurs surcoûts structurels. Amputer la Lodéom de moitié représenterait pour nos PME un effort dix fois supérieur à celui demandé dans l'Hexagone. Ce serait la fin de toute ambition d'un développement endogène. Quelles garanties pouvez-vous apporter en la matière ? (Applaudissements sur de nombreuses travées du RDPI)

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Oui, il y a urgence à agir pour nos concitoyens ultramarins, pour leur emploi et contre la vie chère. Le Gouvernement dans son ensemble en a conscience. La République est unie, et nos politiques publiques doivent fonctionner partout.

S'agissant de la Lodéom, la garantie, c'est que vous, parlementaires, par vos votes, déciderez du budget. Naïma Moutchou et moi-même reprendrons avec vous un travail approfondi pour trouver le bon curseur : certains dispositifs sont nécessaires, d'autres peuvent être trop compliqués, d'autres encore sont peut-être à ajuster.

Je salue le travail que vous menez avec Mme Jacques sur la vie chère. Nous avons de premiers résultats : les prix ont baissé de 10 % à la suite des mesures prises après le dernier comité interministériel des outre-mer. La solution durable, c'est une capacité de production dans ces territoires ; elle suppose des investissements et des outils économiques bien calibrés, que nous devons construire ensemble.

Nous avons fait des propositions ; les décisions appartiennent au Parlement. (Applaudissements sur certaines travées du RDPI)

Métayage franc en Champagne

Mme Vanina Paoli-Gagin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Madame la ministre de l'agriculture, lors de votre déplacement dans l'Aube, en juin dernier, vous avez rencontré des exploitants viticoles producteurs de champagne. Cette question, à laquelle s'associe Cédric Chevalier, sénateur de la Marne, porte sur le métayage franc auquel les exploitations familiales recourent depuis plus d'un siècle.

Ce type de bail est une spécificité locale, à la fois économique et patrimoniale. Il couvre plus du tiers de nos vignes et contribue au maintien et à la transmission des petites exploitations.

Or ce modèle est menacé par un changement de doctrine de la Mutualité sociale agricole (MSA), qui rendrait incompatibles perception des revenus de ce bail et pension de retraite agricole. En effet, c'est cette hybridation qui rend le dispositif opérant. Le bailleur, ne participant ni aux dépenses ni à la direction et ne fournissant aucun travail, ne peut être qualifié d'exploitant actif : il peut donc cumuler retraite et revenus du bail.

La décision de la MSA menace un équilibre historique et risque de déstabiliser les exploitations familiales et de compliquer les transmissions.

Le Gouvernement est-il prêt à reconnaître le particularisme du bail à métayage en Champagne, marqueur identitaire de nos vignobles ? Vous engagez-vous à nous sortir au plus vite de l'ambiguïté actuelle ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire .  - Ce problème, que le Syndicat général des vignerons de Champagne m'a exposé, est bien identifié. Un groupe de travail s'y penche depuis plusieurs semaines, réunissant mes services, ceux de la MSA et le syndicat. L'objectif est de conserver ce modèle original et patrimonial.

La pratique de certaines caisses consistant à ne pas affilier les bailleurs à métayage champenois au motif d'une assimilation au fermage est contraire au code rural, selon un arrêt de 2008 de la Cour de cassation.

Il s'agit de rétablir des règles d'affiliation ne remettant pas en cause le modèle champenois sans risquer d'entraîner des pertes d'assurés pour le régime agricole en permettant la désaffiliation de bailleurs à métayage correctement affiliés en dehors de la Champagne. C'est un problème d'une redoutable complexité, mais le groupe de travail a dégagé plusieurs pistes juridiques, dont les avantages et inconvénients doivent être soigneusement soupesés.

Je ne manquerai pas de revenir vers vous pour que nous réglions ensemble cette situation. En effet, des dispositions législatives seront très probablement nécessaires. (Applaudissements sur des travées du groupe INDEP)

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Dans un contexte international tendu et alors que la financiarisation et la concentration progressent, encourageons la préservation du foncier et le renouvellement générationnel. (Applaudissements sur des travées du groupe INDEP)

Politique de l'immigration

Mme Jacqueline Eustache-Brinio .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Dans la récente déclaration de politique générale, nous nous attendions à entendre les priorités du Gouvernement Lecornu II, en espérant qu'elles répondraient, au moins en partie, aux attentes largement partagées par les Français.

Parmi ces attentes prioritaires, et même ces urgences, l'immigration, l'insécurité et l'entrisme islamiste. (Murmures sur certaines travées à gauche)

Mme Laurence Rossignol.  - Et pas la justice fiscale ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Or rien de tout cela n'a été abordé, alors que près de huit Français sur dix estiment que la politique migratoire devrait être durcie.

Vos propos récents, monsieur le ministre de l'intérieur, ne sont guère rassurants. Ce matin, vous avez tout de même admis que plus de 700 000 personnes étaient en situation irrégulière sur notre territoire. Votre prédécesseur, Bruno Retailleau, avait défini une ligne claire en matière de lutte contre l'immigration illégale. (On ironise sur certaines travées à gauche.) Employer les bons mots est un devoir quand on veut être entendu et respecté, et il est trop facile de se réfugier derrière la volonté de ne pas polémiquer pour masquer la réalité.

Face à ce flou sur vos intentions, deux questions simples. Remettrez-vous en cause les circulaires, décrets et arrêtés de Bruno Retailleau, qui a fait davantage en un an que ses prédécesseurs, sans avoir peur de déplaire ni de bousculer ? (Murmures désapprobateurs et marques d'ironie sur certaines travées à gauche) Et poursuivrez-vous sa politique de fermeté en matière d'OQTF non seulement pour les délinquants, mais pour tous ceux qui ont forcé nos frontières et que la France ne peut pas assimiler ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Laurent Nunez, ministre de l'intérieur .  - Nous nous connaissons depuis longtemps : je pense que vous n'avez aucun doute sur l'homme de fermeté et d'autorité que je suis.

Bien sûr, je poursuivrai la politique de fermeté de Bruno Retailleau et, avant lui, de Gérald Darmanin. Je n'ai jamais dit le contraire les jours derniers.

Oui, nous poursuivrons la lutte contre les filières d'immigration illégale ; j'espère en démanteler encore plus que mes prédécesseurs. Oui, nous continuerons à reconduire de manière forcée les étrangers en situation irrégulière. Je respecterai le plan qui prévoit 3 000 places supplémentaires en CRA. Nous prioriserons les retenus les plus dangereux, comme Gérald Darmanin l'avait décidé. J'appliquerai la loi de janvier 2024 proposée par ce dernier. Et je ne remettrai en cause aucune des mesures prises par Bruno Retailleau.

Chacun se construit avec son histoire personnelle. Moi, j'ai grandi dans les quartiers nord de Bourges : je n'ai connu que la diversité et que des personnes respectueuses des principes et valeurs de la République. Oui, il y a des termes que j'assume de bannir. Ainsi, je préfère parler d'intégration que d'assimilation. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du RDSE et sur des travées du groupe SER)

M. Xavier Iacovelli.  - Bravo !

M. Laurent Nunez, ministre.  - En quoi cela nuirait-il à ma fermeté ? Ferme, je le serai autant que mes prédécesseurs, tout en menant, comme l'a demandé le Premier ministre, une politique d'humanité ; l'intégration sera ainsi un pan important de ma politique. (Applaudissements sur des travées du RDPI et des groupes UC et SER)

Budget pour 2026 (III)

M. Thierry Cozic .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) L'examen du budget a enfin commencé, mais le compte n'y est pas. Pour pallier huit ans d'incurie budgétaire macroniste, on demande un effort démesuré à nos concitoyens, mais rien ou presque pour mettre à contribution les plus aisés. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Le maintien de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus est une timide première mesure, mais comme elle ne touche pas les patrimoines, elle rate sa cible. La création d'une nouvelle taxe de 2 % sur le patrimoine des holdings ne trompe personne : tous les trous possibles et imaginables ont été insérés dans la raquette pour la rendre inopérante.

J'ai pris acte que la donne avait changé à l'Assemblée nationale. Désormais, l'extrême droite, toute affairée à séduire les milieux d'affaires, sacrifie les rares dispositions sociales que son électorat appelle pourtant de ses voeux. Avec une telle trahison, exit les irritants sur l'économie. Nos collègues Les Républicains n'en demandaient pas tant. Ce renoncement ouvre opportunément la voie à l'union des droites : de M. Karoutchi à M. Bellamy, en passant par M. Retailleau, tous sont prêts à franchir le Rubicon. (M. Francis Szpiner proteste.)

M. Jean-François Husson.  - Vous avez déjà fait le NFP !

M. Thierry Cozic.  - De Gaulle partout, gaullisme nulle part ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST ; protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Les 86 % de Français qui demandent de taxer les plus aisés n'ont pas de réponse. Quelles mesures prendrez-vous pour rétablir un minimum de justice fiscale après huit ans de macronisme ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Aux termes de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de la Constitution, chacun doit payer selon ses moyens.

M. Rachid Temal.  - Ce n'est pas le cas.

Mme Amélie de Montchalin, ministre.  - Nous avons l'un des systèmes les plus redistributifs. Avant impôt, l'écart entre les 10 % les plus modestes et les 10 % plus riches est de 1 à 18 ; après impôt, il passe de 1 à 3.

Le Premier ministre l'a dit, nous voulons de la justice fiscale, pas de symbole fiscal. Nous sommes prêts à corriger les dispositifs, mais avec deux limites. Première limite : cela doit être efficace. Une mesure confiscatoire, sans rendement, qui aboutit au départ de nos entrepreneurs n'a aucun intérêt.

M. Vincent Éblé.  - Cela ne s'est jamais vu...

Mme Amélie de Montchalin, ministre.  - Deuxième limite : préserver l'outil professionnel. Nous ne pourrons pas réduire le déficit d'ici à 2029 avec moins d'investissements, moins d'emplois et moins d'initiatives.

En commission des finances à l'Assemblée nationale, les propositions sont nombreuses. Le consensus se bâtira en séance, à l'Assemblée, puis ici, puis en CMP, conclusive ou non... Notre boussole doit être le pacte républicain.

M. Pascal Savoldelli.  - Avec quelle légitimité ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre.  - Il faut de la justice dans l'effort, mais sans mettre à mal notre économie.

Autre élément clé de ce pacte républicain, la lutte contre la fraude. Un projet de loi de lutte contre la fraude fiscale et sociale a été déposé en même temps que le PLF et le PLFSS.

M. Jean-François Husson.  - Il y en a un tous les ans. Soyez ambitieuse !

Mme Amélie de Montchalin, ministre.  - La fraude touche tous les secteurs, tous les services publics ; elle est une entrave dans ce que la République doit à nos concitoyens. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI ; MM. Marc Laménie et Bernard Fialaire applaudissent également.)

Vol au Louvre (II)

Mme Agnès Evren .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le Louvre a été cambriolé. Les Français sont meurtris, sidérés, indignés. Meurtris de voir disparaître les joyaux de la couronne, trésors de notre culture, splendeurs de notre mémoire, témoins de notre histoire. Sidérés que ce vol ait pu se dérouler au coeur de Paris, en plein jour, à deux pas de la préfecture de police. Indignés d'assister au concours de la défausse et de la déresponsabilisation. Ce ne serait la faute de personne...

Je salue l'enquête administrative que vous avez diligentée, madame la ministre. La maire de Paris s'est contentée d'un post désinvolte sur Instagram, sans aucune émotion, sans assumer la responsabilité de la sécurisation du centre de la capitale. (Protestations à gauche)

M. Ian Brossat.  - Si ça, ce n'est pas de la défausse !

M. Vincent Éblé.  - C'est n'est pas sérieux !

M. Rachid Temal.  - Qui gère le Louvre ?

Mme Agnès Evren.  - Notre patrimoine est ce qui nous rend fiers, ce qui fait que la France est la France, un grand pays, une grande histoire, une grande culture.

Ma question est double. Qui est responsable ?

M. Rachid Temal.  - L'État ! La ministre de la culture !

Mme Agnès Evren.  - On ne peut donner l'impression que personne n'est responsable. Quelles leçons tirez-vous ? Quelles mesures envisagez-vous pour protéger notre patrimoine, à Paris et partout en France ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Franck Menonville applaudit également.)

Mme Rachida Dati, ministre de la culture .  - Vous avez raison de rappeler l'émotion et la sidération des Français. Je le redis, les dispositifs de sécurité internes au Louvre ont fonctionné. (Marques d'ironie à gauche ; murmures à droite)

M. Rachid Temal.  - C'est rassurant !

Mme Rachida Dati, ministre.  - Je refuse que l'on mette en cause les agents engagés pour la sécurité du Louvre. Oui, nous devons améliorer les dispositifs, d'où l'enquête administrative, les auditions diligentées par le président Lafon, la mission confiée au député Patrier-Leitus et l'instruction que j'ai cosignée avec Laurent Nunez.

Vous avez raison de souligner l'irresponsabilité de certains élus de Paris qui refusent de sécuriser les sites sensibles au moyen de la vidéoprotection. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; huées à gauche) Nous le ferons ensemble, madame Evren ! Mme Hidalgo, M. Brossat et M. Grégoire ont oublié le spectaculaire vol du musée d'Art moderne, avec un butin de 100 millions d'euros, jamais retrouvé. (La voix de Mme la ministre est couverte par les huées à gauche.) Aucune mesure n'a été prise depuis. (Huées à gauche ; plusieurs sénateurs du GEST frappent sur leur pupitre.)

M. Rachid Temal.  - Démission !

Mme Rachida Dati, ministre.  - Je vous remercie de votre engagement et des propositions que vous m'avez faites en tant qu'ancienne vice-présidente chargée de la culture de la plus grande région d'Europe. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Pierre Jean Rochette et François Patriat applaudissent également.)

Épizootie de dermatose nodulaire contagieuse

M. Jean-Michel Arnaud .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La France a récemment été touchée par une épizootie de dermatose nodulaire contagieuse, maladie virale qui ne se transmet qu'entre bovins.

Si les foyers haut-savoyards et savoyards avaient été contenus, de nouveaux cas sont apparus dans le Jura, l'Ain, en Franche-Comté et en Occitanie. Le 17 octobre, madame la ministre, vous avez pris plusieurs mesures pour limiter la propagation du virus - sont interdits les rassemblements festifs de bovins et leur sortie du territoire métropolitain.

Toutefois, les éleveurs sont inquiets. La suspension des exportations risque d'entraîner une baisse des prix de vente, sans compter les conséquences économiques et psychologiques pour les petits exploitants.

Envisagez-vous des enquêtes approfondies sur les derniers cas ? Quels dispositifs d'accompagnement pour les éleveurs ? Dans quels délais peut-on espérer sortir de cette épizootie, avec nos partenaires européens, et rouvrir nos exportations ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien.

Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire .  - Ce 22 octobre, nous nous réjouissons de la levée de la zone réglementée dans les Savoie, preuve de l'efficacité de notre stratégie, dans un délai record.

Plusieurs cas de dermatose sont apparus dans des zones indemnes, ce qui a jeté le trouble auprès de nos partenaires européens. Pour commercer, il faut rétablir la confiance, c'est fondamental.

Grâce aux mesures prises, très sévères, j'en conviens - et je mesure les difficultés de nos éleveurs qui exportent des broutards -, nous avons évité que nos partenaires européens n'optent pour la clôture totale du marché français à l'export pour une durée pour une durée indéterminée.

C'est pour rester maîtres de notre destin que j'ai pris ces mesures temporaires - qui seront levées début novembre si tout va bien. Je remercie le ministre de l'intérieur : nous menons des contrôles très stricts car les efforts de tous peuvent être compromis par l'indiscipline de quelques-uns. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées des groupes Les Républicains et INDEP) Nous vaincrons la dermatose, mais cela suppose que tout le monde respecte les règles collectives. (Applaudissements sur quelques travées des groupes Les Républicains et UC et sur quelques travées du RDPI et du groupe INDEP

M. Jean-Michel Arnaud.  - Il faut être extrêmement rigoureux dans cette crise, car l'Europe nous regarde. Il faut traquer les fautifs qui peuvent mettre en cause toute une filière. Je vous remercie de votre engagement. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Différence de DGF entre communes rurales et urbaines

M. Bruno Belin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC) « Le un pour deux, ça suffit ! » Michel Fournier, nouveau ministre de la ruralité, ne cesse de dénoncer l'injustice dans l'octroi de la DGF entre communes rurales et communes urbaines : ces dernières touchent deux fois plus, au prorata du nombre d'habitants, que les premières ! Il l'a redit il y a quelques jours à Poitiers, lors du congrès de l'Association des maires ruraux de France (AMRF) : il faut revoir tout cela. On est d'accord.

Nous attendons le travail de Stéphane Sautarel et Isabelle Briquet sur le sujet, car les 88 % de communes rurales s'estiment lésées face aux 12 % de communes urbaines.

Quels correctifs Michel Fournier, avec toute son expérience, apportera-t-il dans du prochain PLF pour réduire l'écart ? (M. Rachid Temal ironise.)

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le sénateur Belin, je connais votre intelligence, votre habileté et votre département, la Vienne, où je me suis rendue à deux reprises. (On s'en amuse à gauche)

Vous traitez le problème de manière partielle : l'accompagnement de la ruralité ne se limite pas à la DGF. Certes, il y a un écart de DGF entre communes urbaines et rurales, mais nous ne cessons de le rétrécir. (M. Olivier Paccaud en doute.)

Lorsque j'étais sénatrice, nous avions tout bougé, en matière de ressources fiscales des collectivités, pour que rien ne change. Nous devons entreprendre une réforme de la DGF, ensemble, courageusement.

La ruralité doit être traitée à la mesure de sa valeur pour le pays.

Le Gouvernement oeuvre depuis plusieurs années en faveur de la ruralité. Nous avons fortement soutenu la solidarité territoriale : la DGF a augmenté ces trois dernières années, la dotation de solidarité rurale progressera de 150 millions d'euros dans le PLF pour 2026...

M. Bruno Belin.  - Alléluia !

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Le budget de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) est maintenu à 1 milliard d'euros. La dotation de soutien pour les aménités rurales est dotée de 110 millions d'euros.

M. le président.  - J'ai une tendresse particulière pour la ruralité, mais vous avez dépassé votre temps, il faut conclure. (Sourires)

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Enfin, Monsieur Belin, votre commune de Monts-sur-Guesnes fait partie du programme Villages d'avenir et bénéficie d'une maison France Services.

M. Bruno Belin.  - Merci, madame la ministre, de votre engagement pour la ruralité. Le Premier ministre est issu d'un territoire rural : c'est de bon augure.

Certes, les villes assument des charges de centralité, mais la ruralité assume aussi des coûts de sous-densité : voirie, bâtiments scolaires... La ruralité est un espace, elle doit rester une espérance. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Pierre Jean Rochette, Marc Laménie et Michel Masset applaudissent également.)

Collecte de la taxe d'aménagement (I)

Mme Nicole Bonnefoy .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Nous sommes nombreux à avoir interpellé les ministres de l'économie sur la désorganisation de la collecte de la taxe d'aménagement. Les recettes ont chuté de 40 % pour la seule part départementale ! En juin dernier, un rapport parlementaire a pointé les répercussions sur les conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE). Déstabiliser une offre gratuite et qualifiée d'ingénierie au service des territoires est inconséquent. Certains CAUE ont dû licencier, d'autres sont en liquidation judiciaire, comme dans la Manche.

Plus largement, toutes les politiques départementales de protection de la biodiversité sont menacées, sans parler des ressources des communes. Après huit ans de contraction budgétaire, c'est une nouvelle catastrophe pour nos finances locales : pas moins de 1,5 milliard d'euros de taxes non collectées !

Quelles mesures immédiates comptez-vous prendre ? Allez-vous renforcer les moyens humains et techniques pour assurer la perception de cette taxe et mettre en place une compensation ou une avance au bénéfice des collectivités ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. André Guiol applaudit également.)

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Il y a quatre raisons qui expliquent cette situation très préoccupante. Premièrement, la diminution des constructions et mises en chantier : moins 30 % de permis de construire entre 2022 et 2024. Deuxièmement, le décalage de la date d'exigibilité de la taxe à la fin des travaux et non plus au début. Troisièmement, des retards de déclaration des contribuables. Enfin, le transfert des directions départementales des territoires (DDT) à la DGFiP. Certains dossiers sont encore à traiter par les DDT ; j'ai demandé à la DGFiP que le processus soit simplifié et automatisé.

Jusqu'en 2022, un quart des sommes versées étaient ensuite remboursées : nous avons mis fin à ce système ubuesque, c'est un progrès. La DGFiP a échangé avec les associations d'élus pour faire la transparence sur la situation dans chaque territoire. Nous cherchons à fiabiliser le processus et à donner de la visibilité aux élus. Comptez sur ma détermination. (M. François Patriat applaudit.)

Mme Nicole Bonnefoy.  - Nous partageons le diagnostic. Trois commissions du Sénat se sont saisies du sujet. Désormais, il faut prescrire des remèdes. Il y a urgence, pour préserver cette ingénierie locale indispensable aux territoires, et pour nos finances locales.

Pollution aux PFAS dans les Ardennes

Mme Else Joseph .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC ; M. Marc Laménie applaudit également.) Au milieu de la chaleur de l'été, treize communes des Ardennes ont dû restreindre la distribution en eau potable à la suite d'une pollution aux PFAS (substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées). Les habitants ont dû consommer de l'eau en bouteille. Les maires sont déboussolés, les habitants désemparés. On redoute un scandale judiciaire et sanitaire.

Je salue les mesures prises par le nouveau préfet, qui a interdit tous les épandages, protégeant ainsi les captages.

L'origine de la pollution ? Une papeterie voisine dans la Meuse, et des épandages de boues pendant plus de vingt ans.

Les solutions techniques sont coûteuses et complexes. Cela demande de la souplesse administrative et un cadre juridique adapté. Il faudrait pouvoir déroger au taux maximal habituel des subventions et cumuler toutes les aides publiques. Les communes doivent-elles payer une redevance pour la performance des réseaux d'eau potable ? Il faut renforcer le dialogue entre les acteurs.

Allez-vous aider les communes à faire face et à surmonter ce mur administratif ? Impossible n'est pas français - ni ardennais ! Il faut trouver des solutions ; il y a urgence, pour les Ardennes et pour le pays ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP ; M. Jean-Michel Arnaud applaudit également.)

Mme Monique Barbut, ministre de la transition écologique, de la biodiversité et des négociations internationales sur le climat et la nature .  - Cette situation suscite des craintes légitimes. Un plan interministériel a été lancé en mars dernier avec trois objectifs : la transparence, la réduction de notre exposition et le traitement de la contamination.

L'Anses a publié un premier état des lieux de la contamination par les PFAS dans tous les milieux : nous saurons où agir, et vite.

La proposition de loi de Nicolas Thierry a restreint certains usages - d'ici à 2028, les rejets industriels devraient avoir diminué de 70 % - et créé une redevance spécifique sur le principe pollueur-payeur. Les industriels contribueront au coût de la dépollution, au bénéfice des collectivités.

Dans les Ardennes, un comité de suivi et de gestion a été mis en place. Les communes concernées présenteront un plan d'action.

M. le président.  - Il faut conclure.

Mme Monique Barbut, ministre.  - Nous avons enfin diligenté une mission d'inspection sur le financement de la dépollution des eaux, dont les propositions sont attendues dans les trois mois. Nous sommes pleinement mobilisés.

M. Sébastien Lecornu, Premier ministre.  - Très bien !

Collecte de la taxe d'aménagement (II)

M. Daniel Fargeot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Il est des fractures silencieuses, invisibles, qui ne se mesurent pas en euros mais en perte de confiance entre l'État et les territoires. Depuis deux ans, la réforme de la taxe d'aménagement tourne au fiasco : 1,5 milliard d'euros, au bas mot, non collectés en 2024-2025. Résultat : des communes fragilisées, des départements qui compensent comme ils peuvent, des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) asphyxiés.

Cette taxe, qui finance l'aménagement local, les équipements publics et la préservation des espaces naturels sensibles, est la juste contrepartie due aux collectivités - ces moines-soldats de la République - qui construisent.

Bercy exige de nouveaux efforts des collectivités, mais laisse filer des milliards ! La rigueur commence pourtant par l'exemple. L'érosion budgétaire devient une érosion républicaine, le lien de confiance se distend. La République ne s'administre pas depuis une tour de contrôle, elle se construit avec les élus. Mais là, l'État regarde ailleurs.

Dans quels délais la DGFiP compte-t-elle résorber le retard ? Comment éviter aux collectivités la double peine : panne et pénalité ?

Épargnez-nous les principes, éclairez-nous sur les solutions. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ainsi que sur plusieurs travées du groupe Les Républicains et du RDSE)

Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Première solution, que les travaux terminés dans chaque commune soient déclarés.

Deuxième solution, traiter le stock de dossiers qui sont encore dans les DDT, dont certains datent de 2018, 2019 ou 2020.

Troisième solution, accompagner la reprise de la construction - qui ne se décrète pas. Elle est favorisée par la baisse des taux d'intérêt, mais cela prend du temps. Le produit de la taxe d'aménagement a été divisé par deux entre 2023 et 2024, du seul fait de la hausse des taux qui a ralenti la dynamique de construction.

Quatrième solution, simplifier le système. Entre la mairie, le service en charge de l'urbanisme, le citoyen et la DGFiP, le circuit est tout sauf compréhensible.

Je suis une femme pragmatique ; vous êtes des sénateurs engagés ; les maires veulent que cela fonctionne. Nous allons y arriver, mais nous devons travailler ensemble. Il n'y a pas d'un côté l'État central qui ralentit, et de l'autre les maires qui avancent. C'est ensemble que nous avancerons. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

La séance est suspendue quelques instants.

Présidence de M. Xavier Iacovelli, vice-président

Avis sur des nominations

M. le président.  - En application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique et de la loi du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable (26 voix pour, 2 voix contre) à la nomination de M. Jean Castex aux fonctions de président-directeur général de la SNCF, et un avis favorable (18 voix pour, 12 voix contre) à la nomination de M. Henri Prévost au poste de directeur général de l'Agence nationale pour la cohésion des territoires.

Rappel au règlement

M. Guy Benarroche.  - Ce rappel a trait à la séance des questions d'actualité au Gouvernement.

M. le président.  - Sur quel article vous fondez-vous ? (M. Guy Benarroche ne peut le dire.) Monsieur Benarroche, je vous propose de faire votre rappel au règlement ultérieurement.

Mandat d'élu local (Deuxième lecture - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi visant à encourager, à faciliter et à sécuriser l'exercice du mandat d'élu local, à la demande du Président du Sénat.

Discussion des articles (Suite)

Article 17

M. le président.  - Amendement n°89 rectifié de M. Masset et alii.

M. Michel Masset.  - La proposition de loi supprime l'accord formel du médecin pour poursuivre son mandat en cas de maladie. Mais nous devons protéger la santé de nos élus locaux ! Nous proposons donc que le médecin se prononce sur la possibilité pour l'élu d'exercer son mandat pendant son arrêt de travail.

Nous proposons également l'extension des dispositions sur les congés de paternité, maternité et d'adoption aux travailleurs indépendants et aux non-salariés agricoles.

M. le président.  - Amendement identique n°174 rectifié de Mme Doineau et alii.

M. Olivier Henno.  - La proposition de loi permet à un élu local en arrêt maladie de poursuivre son mandat, même sans avis explicite de son médecin. Pourtant, cet avis est essentiel à la protection de la santé de l'élu. Conservons une cohérence avec le droit applicable aux autres assurés sociaux. Le médecin peut autoriser, au cas par cas, certaines activités compatibles avec la guérison. C'est l'objet de cet amendement, qui étend par ailleurs les dispositions relatives aux congés de paternité, de maternité et d'adoption aux non-salariés agricoles et aux travailleurs indépendants -  c'est une question d'égalité de traitement.

M. le président.  - Amendement identique n°248 du Gouvernement.

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.  - Défendu.

M. le président.  - Sous-amendement n°264 rectifié de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure de la commission des lois.  - Rédactionnel.

Le texte permet aux élus salariés en arrêt maladie de poursuivre leur mandat, sans risque de devoir reverser leurs indemnités journalières à la sécurité sociale. Avis favorable à ces trois amendements qui étendent son bénéfice aux non-salariés agricoles et aux travailleurs indépendants. L'élu en congé maladie pourra continuer à exercer son mandat tant que le médecin ne s'y oppose pas.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Je salue la pertinence de ces amendements et du sous-amendement : avis favorable.

Le sous-amendement n°264 rectifié est adopté.

Les amendements identiques nos89 rectifié, 174 rectifié et 248, ainsi sous-amendés, sont adoptés.

L'article 17, modifié, est adopté.

Rappel au règlement

M. Guy Benarroche.  - L'article 33 de notre règlement interdit toute attaque personnelle et toute interruption lors de nos débats. Mais lors des questions d'actualité au Gouvernement, les interventions intempestives des uns et des autres m'ont empêché d'aller au bout de mon intervention. Le temps de parole de mon groupe en a été réduit.

Acte en est donné.

Discussion des articles (Suite)

Article 17 bis (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°205 de M. Benarroche et alii.

M. Guy Benarroche.  - Cet amendement rétablit l'article 17 bis afin qu'en cas de congé de maternité ou d'adoption, une élue municipale puisse recourir à un pouvoir de vote. Mon amendement n°212 a le même objet, restreint au seul congé de maternité.

Le pouvoir de vote est autorisé en cas de maladie, mais la formulation générale du code général des collectivités territoriales (CGCT) ne mentionne ni la maternité ni l'adoption. Levons toute ambiguïté !

M. le président.  - Amendement n°88 rectifié de M. Masset et alii.

M. Ahmed Laouedj.  - Un conseiller municipal ne peut donner pouvoir à un collègue pour plus de trois conseils consécutifs qu'en cas de maladie. Nous proposons de lever toute ambiguïté s'agissant des élues enceintes ou jeunes mères. Levons les freins à la participation des femmes à la vie publique !

M. le président.  - Amendement identique n°212 de M. Benarroche et alii.

M. Guy Benarroche.  - Défendu.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure.  - Le CGCT permet aux élus en congé maladie de donner pouvoir pour plus de trois séances consécutives.

L'Assemblée nationale a introduit cet article 17 bis pour viser explicitement les élues en congé maternité. Pour la commission, cela est satisfait par le droit en vigueur et nous n'avons pas connaissance de difficultés d'application.

Toutefois, dans un esprit de compromis avec l'Assemblée nationale, nous émettons un avis de sagesse sur les amendements identiques nos88 rectifié et 212. Avis défavorable à l'amendement n°205, qui étend la mesure au congé d'adoption.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - La grossesse n'est pas une maladie, au contraire.

Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois.  - C'est une belle chose de la vie !

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Certes, nous n'avons pas connaissance de difficultés - mais c'est une clarification, et cela favorise une forme d'entente cordiale avec l'Assemblée nationale. Avis favorable.

M. Guy Benarroche.  - Je remercie Mme la ministre de son avis favorable et la rapporteure de son avis de sagesse. Mais pourquoi la commission refuse-t-elle d'étendre la disposition à l'adoption ?

Mme Lana Tetuanui.  - En Nouvelle-Calédonie, comme en Polynésie française, les élus ne disposent d'aucune couverture sociale. Or ce sont des agents de l'État et leurs indemnités sont alignées sur le droit commun. Il est grand temps de lever cette ambiguïté et que nos élus communaux bénéficient, eux aussi, d'une couverture sociale.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - La Polynésie française est régie par l'article 74 de la Constitution. À chaque fois que nous adoptons des dispositions générales, nous prévoyons leur adaptation aux collectivités d'outre-mer. Nous étudierons avec attention le point que vous évoquez.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure.  - Je tiens à vous rassurer : nous avons pris soin d'étendre toutes les dispositions envisagées par cette proposition de loi à la Polynésie française.

Mme Patricia Schillinger.  - Je ne comprends pas, madame la rapporteure, vos réticences sur l'adoption.

L'amendement n°205 n'est pas adopté.

Les amendements identiques nos88 rectifié et 212 sont adoptés et l'article 17 bis est rétabli.

Article 18

Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois .  - La question de la prise illégale d'intérêts soucie les élus, qui ne doivent pas être poursuivis lorsqu'ils agissent pour l'intérêt public.

Permettez-moi de vous éclairer sur les effets réels des deux amendements de la commission. Le dispositif qui résulterait des articles 18 et 18 bis A tels qu'amendés par les rapporteurs traiterait trois situations d'élus.

La première situation concerne les élus membres de deux collectivités territoriales -  ou d'une collectivité et d'un groupement de collectivités. Quand la première collectivité se prononcera sur une affaire intéressant la seconde, le seul fait que l'élu siège aux deux n'entachera pas -  en soi  - d'illégalité la délibération. Il n'y aura donc ni conflit d'intérêts ni prise illégale d'intérêts.

Deuxième situation : l'élu est membre d'une collectivité territoriale et d'un organisme public ou privé, mais il ne touche ni rémunération ni avantage particulier. Sa participation à une délibération de la première collectivité concernant la seconde structure ne sera pas considérée comme illégale de ce seul fait. Il n'y aura donc pas d'obligation de déport ni de risque de prise illégale d'intérêts.

La loi prévoira toutefois un cas précis de déport obligatoire, quand une des structures est candidate à un marché public de l'autre : l'élu ne pourra alors participer ni à la commission d'appel d'offres, ni à la commission d'examen des candidatures, ni à la décision d'attribution du marché.

Troisième cas : l'élu siège dans une collectivité et dans un organisme de droit public ou privé, mais touche une rémunération -  une indemnité de fonction, par exemple  - ou un avantage particulier. Dans ce cas, le droit commun ou des dispositions spécifiques s'appliqueront.

Nous avons aussi souhaité améliorer le droit commun. Si l'intérêt poursuivi dans les deux structures est public, il n'y aura pas de prise illégale ou de conflit d'intérêts. Et si l'élu ne peut faire autrement pour répondre à un motif impérieux d'intérêt général, il sera exonéré de responsabilité pénale. Exemple : en cas de tornade, si le seul charpentier disponible pour étanchéifier le toit de l'école est un autre élu, le maire ne sera pas poursuivi.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure de la commission des lois .  - Le délit de prise illégale d'intérêts doit être mieux défini, afin de réprimer les cas avérés d'atteinte à la probité, sans mettre en cause les élus de bonne foi.

Notre amendement propose trois modifications. D'abord, il exclut les intérêts publics du périmètre de la répression pénale, ce qui mettra fin à presque toutes les poursuites litigieuses. Ensuite, il prévoit que l'intérêt en cause doit « altérer » et non plus « compromettre » l'impartialité, l'objectivité ou l'indépendance du décideur public : nous passons ainsi d'une notion potentielle à une notion effective. Enfin, nous affirmons le caractère intentionnel de l'infraction : la prise illégale d'intérêts doit avoir été commise « en connaissance de cause ».

Afin que la rédaction retenue soit inattaquable en droit, nous rappelons un certain nombre d'exemptions, qui doivent être prises en compte par les juridictions pénales ; afin d'éviter tout risque d'insécurité juridique, nous avons supprimé la rédaction adoptée en commission sur les liens affectifs susceptibles de constituer un intérêt au sens pénal.

Enfin, s'agissant de l'urgence, la notion de « motif impérieux d'intérêt général », proposée par l'Assemblée nationale, est intéressant mais son périmètre est trop large. Nous proposons que ce motif ne soit retenu que si le décideur public concerné est contraint par les circonstances, c'est-à-dire s'il n'y a pas d'autre solution que celle qui a été prise.

M. Cédric Vial .  - Merci à la commission des lois pour sa rédaction qui règle un grand nombre de problèmes.

Les élus souhaitent éviter qu'une interprétation malheureuse ne les conduise devant les tribunaux. En vertu du principe de précaution, de nombreuses collectivités demandent à leurs élus, suivant l'avis de leur déontologue, de se déporter, ce qui complique la tenue de nos assemblées.

Demeure un irritant : les notions de rémunération et d'avantage. Qu'est-ce qu'un avantage ? Être remboursé d'un frais, par exemple ? Y a-t-il une différence entre rémunération et indemnité ? Le flou perdure...

M. Pierre-Alain Roiron .  - Bien sûr, ceux qui fautent doivent être condamnés. Mais nous avons trouvé un chemin. Je me réjouis de cette avancée, tardive mais bienvenue. Les élus locaux servent leur territoire. Il ne s'agit pas de se servir de son territoire pour faire avancer ses propres intérêts !

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation .  - Cet article est essentiel pour permettre aux élus de remplir la mission pour laquelle ils ont été élus. Nous savions qu'il faudrait un texte spécial pour traiter le problème. Le Sénat a beaucoup travaillé et le rapport Vigouroux a permis d'avancer.

Je remercie la présidente Jourda et Mme Eustache-Brinio pour la clarté de leurs propos, auxquels je souscris pleinement. Il s'agit de sécuriser l'élu dans l'exercice de son mandat, mais sans le soustraire à la loi. Je remercie aussi tous les présidents de groupe pour le travail considérable et exigeant que nous avons fait ensemble. Je remercie également le Premier ministre et le garde des sceaux pour leur contribution.

Hier matin, nous n'avions toujours pas d'accord. Aujourd'hui, nous avons trouvé non pas un compromis, mais un accord exigeant, avec lequel les associations d'élus sont en phase. Merci à tous pour votre bonne volonté, sans complaisance.

M. le président.  - Amendement n°68 rectifié ter de Mme Havet et alii.

Mme Nadège Havet.  - Les exécutifs de nos collectivités territoriales doivent être sécurisés.

M. le président.  - Amendement identique n°178 rectifié bis de M. Roiron et du groupe SER.

M. Pierre-Alain Roiron.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°265 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Avis favorable à ces amendements. Merci pour ce travail collectif, notamment à ceux qui ont retiré ou rectifié leurs amendements.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Avis favorable. Je vous adresse ma gratitude républicaine pour ce travail collectif.

Les amendements identiques nos68 rectifié ter, 178 rectifié bis et 265 sont adoptés et l'article 18 est ainsi rédigé.

Les amendements nos66, 70 rectifié,81 rectifié ter, 136 rectifié ter, 209, 220 rectifié sexies,224 rectifié ter et 108 rectifié quinquies n'ont plus d'objet.

Article 18 bis A

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure de la commission des lois .  - En commission, nous sommes revenus sur certains dispositifs, en raison de leur rédaction insuffisamment aboutie. Adopter un amendement de rétablissement dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale fermerait l'article, et ces insuffisances rédactionnelles risqueraient de se retourner contre les élus. Nous avons donc sécurisé la rédaction.

Je remercie les groupes qui ont retiré leur amendement ou l'ont rectifié pour le rendre identique à celui de la commission.

L'exemption de la prise illégale et du conflit d'intérêts pour les élus qui représentent leur collectivité au sein d'un organisme extérieur repose sur un critère : cette désignation doit intervenir en application de la loi. Mais cette formulation floue pose de nombreuses difficultés.

Certains collègues ont proposé de substituer à ce critère celui de la perception d'une indemnité de fonction : c'est une idée bienvenue, mais peu sécurisante, la notion d'indemnité de fonction n'étant pas légalement définie.

Nous proposons plutôt la notion de « rémunération ou d'avantages particuliers », dont la portée est bien connue. Il n'y aura donc plus d'exigence de déport pour les délibérations relatives à l'octroi d'une aide ou d'une garantie financière. Seuls seraient maintenus, comme dans le texte de l'Assemblée nationale, les déports pour les délibérations liées à la commande publique.

Nous conservons enfin la disposition qui prévoit que le seul fait pour un élu de détenir deux mandats locaux lorsqu'une collectivité prend une délibération qui concerne l'autre ne pose pas de difficulté. Nous sécurisons la rédaction et l'étendons à toutes les strates de collectivités.

Ces évolutions sont attendues par les élus.

M. Cédric Vial .  - Nous ne pouvons pas voter sans éclaircissement. Madame la rapporteure, vous remplacez la notion d'indemnité par celle de rémunération. Mais une indemnité de fonction est-elle une rémunération, comme l'a dit Muriel Jourda ? Si oui, l'élu devra se déporter. Vous avez aussi introduit la notion « d'avantages particuliers », mais comment la définir ?

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Les élus locaux, très inquiets, attendent ce texte. Nous devons éviter toute suspicion généralisée à leur égard. Nos assemblées locales ne doivent pas se transformer en théâtres, avec des élus qui sortent un par un, de peur d'être suspectés d'un conflit d'intérêts imaginaire.

Oui, il faut éviter les conflits d'intérêts, mais aussi faciliter l'exercice des mandats. L'interdépendance des mandats est une réalité : les élus de toutes les collectivités travaillent ensemble, au service de l'intérêt général.

La probité, ce n'est pas la méfiance systématique, mais la responsabilité assumée. Nous avons besoin d'un droit clair et cohérent, qui sécurise les élus et n'en fait pas l'objet de soupçons. Prévenons les dérives, mais avec discernement.

M. le président.  - Amendement n°65 de M. Buis et du RDPI.

M. Bernard Buis.  - Je rends mon amendement identique à celui, oecuménique, de la commission.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°65 rectifié.

M. le président.  - Amendement identique n° 67 rectifié bis de Mme Havet et alii.

Mme Nadège Havet.  - Je rectifie également mon amendement pour le rendre identique à celui de la commission.

M. le président.  - Il devient l'amendement n°67 rectifié ter.

M. le président.  - Amendement identique n°82 rectifié bis de Mme Micouleau et alii.

Mme Nadine Bellurot.  - Je salue le travail réalisé et retire mon amendement.

L'amendement n°82 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°195 rectifié de M. Sautarel et alii.

Mme Nadine Bellurot.  - Je retire également celui-ci.

L'amendement n°195 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°210 de M. Benarroche et alii.

M. Guy Benarroche.  - Retiré !

L'amendement n°210 est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°222 rectifié de M. Delcros et alii.

M. Bernard Delcros.  - Je rectifie mon amendement pour le rendre conforme à celui de la commission.

M. le président.  - Il s'agit donc de l'amendement n°222 rectifié bis.

M. le président.  - Sous-amendement n°239 rectifié bis de M. Michallet et alii.

M. Cédric Vial.  - Il me semble que le dérouleur n'est pas à jour, car je ne vois plus mon sous-amendement...

Quant à ce sous-amendement n°239 rectifié bis, que j'ai cosigné, n'aurait-il pas dû tomber, l'amendement n°195 rectifié, qu'il visait à modifier, ayant été retiré ?

Le sous-amendement n°239 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°179 rectifié bis de M. Roiron et du groupe SER.

M. Pierre-Alain Roiron.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°266 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Défendu.

Avis favorable à tous les amendements rendus identiques à celui de la commission ; je remercie leurs auteurs de les avoir rectifiés.

M. le président.  - Sous-amendement n°267 de M. Vial.

M. Cédric Vial.  - Il s'agit de supprimer l'alinéa mentionnant la rémunération et les avantages particuliers. Je pense par exemple à un conseiller régional désigné pour siéger au sein d'un parc naturel régional.

Mme Cécile Cukierman.  - Par exemple...

M. Cédric Vial.  - Avec notre nouvelle règle, plus besoin de se déporter. Au sein des parcs naturels régionaux, des postes de vice-présidents sont réservés à des représentants du département ou de la région, qui toucheront une indemnité. Ainsi, ils ne pourront pas participer aux délibérations relatives audit parc : c'est idiot !

Et dès qu'un élu se fera rembourser ses frais de déplacement -  une avancée que nous avons votée hier  - , il sera considéré comme ayant reçu un « avantage particulier »...

Je n'ai pas eu de réponse, en dépit de mes trois interpellations.

M. le président.  - Votre sous-amendement devient un sous-amendement des cinq amendements identiques.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - M. Vial propose de revenir sur le critère de rémunération proposé par la commission.

Il s'agit donc de circonscrire l'exclusion du conflit d'intérêts, soit les situations dans lesquelles les élus désignés pour représenter leur collectivité dans un organisme extérieur sont exemptés de prise illégale et conflit d'intérêts du fait de leur désignation en vertu de la loi. Un consensus existe pour reconnaître que le droit actuel est insécurisant. C'est pourquoi nous proposons, à l'instar des députés, de fixer un critère lié à la rémunération, déjà prévu dans le CGCT.

La plus grande précision s'impose ici. Aujourd'hui, l'élu ne sera exempté de prise illégale d'intérêts que du fait de sa désignation. Une fois désigné, le fait de percevoir une rémunération risquerait de le placer en situation de conflit d'intérêts, et certains actes qu'il pourrait accomplir pourraient être fragilisés.

Gardons-nous d'adopter des dispositions qui donneraient aux élus un sentiment de fausse sécurité, mais en définitive se retourneraient contre eux.

Par ailleurs, s'agissant des élus qui représentent leur collectivité au sein d'une société d'économie mixte, le cadre applicable est inchangé : ils sont exemptés de prise illégale et conflit d'intérêts du fait de leur désignation au sein de ces sociétés en tant que membres ou présidents de conseil d'administration ou de surveillance.

Nous sommes donc très défavorables à votre sous-amendement.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Le Gouvernement est favorable à l'amendement de la commission et aux amendements identiques.

La complexité juridique de ces questions requiert une expertise très fine. Je salue la grande pédagogie de Mme la rapporteure.

Notre objectif est de donner aux élus locaux la possibilité d'accomplir la mission pour laquelle ils ont été désignés par leur collectivité sans se retrouver en difficulté. La convergence des analyses des uns et des autres prouve que nous l'avons atteint.

Monsieur Vial, je vous remercie pour votre vigilance, mais votre proposition aurait pour effet de réduire la protection des élus. J'y suis donc défavorable.

M. Cédric Vial.  - Madame la ministre, ce n'est pas notre premier désaccord.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Cela ne me gêne pas.

M. Cédric Vial.  - Je maintiens ma position, quitte à être battu. Je n'ai pas été convaincu, faute de clarifications sur la notion d'avantage particulier et la différence entre rémunération et indemnité. Par ailleurs, je ne vois pas dans quel cas un conseil municipal pourrait désigner un élu dans une instance en dehors de tout cadre législatif ou réglementaire.

Dans mon exemple du parc naturel régional, je maintiens que le représentant désigné par la région n'aura pas le droit de participer aux décisions autour de l'attribution de la subvention, à peine de conflit d'intérêts.

Vous dites qu'on protège les élus ; je pense, moi, le contraire. Avec mon sous-amendement, j'écarte le risque lié à la notion d'avantage particulier, qui me paraît impossible à cerner : il ne pourra y avoir conflit d'intérêts par le seul fait de la désignation.

Le sous-amendement n°267 n'est pas adopté.

Mme Cécile Cukierman.  - On en apprend tous les jours... J'ai fait preuve d'un grand calme ces derniers jours, parfois contre mon naturel, alors que nous assistions à une crispation autour de la réécriture des articles 18 et 18 bis A. Les élus nous attendent sur une forme de consensus : pas un consensus mou, mais la capacité à travailler ensemble.

La commission des lois propose des mesures qui semblent convenir à tout le monde, puisque certains se sont crus obligés de conformer leur amendement au sien plutôt que de simplement le retirer. Nous actons ainsi de nouvelles manières de travailler. Ce n'est pas grave, mais nous en tirerons les conséquences.

Chacun s'est ému de l'évolution de ce texte, adopté dans le consensus l'année dernière. Veillons à ne pas trop en faire, au risque de dégoûter celles et ceux que nous entendons servir. Nous voterons les amendements identiques. (M. Pierre Jean Rochette renchérit.)

M. Simon Uzenat.  - Sylvie Robert et moi souhaitons une précision à propos des élus siégeant au sein de sociétés d'économie mixte (SEM), de sociétés d'économie mixte à opération unique (Sémop) et de sociétés publiques locales (SPL) et qui ne sont pas rémunérés : bénéficieront-ils de la réduction de la liste des déports dans la rédaction proposée par la commission ?

M. Jean-Michel Arnaud.  - Ce débat a suscité beaucoup de tensions dans l'hémicycle, beaucoup d'interrogations aussi sur la fluidité des relations avec certaines associations représentatives d'élus, mais aussi avec le Gouvernement.

Nous avons dépassé ces difficultés en praticiens et avec le souci de protéger les élus contre un certain nombre de procédures et de risques. Notre capacité à trouver ces voies de passage fait honneur à la Haute Assemblée et à la responsabilité de chacun d'entre nous, sur quelque travée qu'il siège.

J'ajoute que la clarification demandée par M. Uzenat est nécessaire ; nous souhaitons que la ministre dissipe toute ambiguïté.

Mme Marie-Do Aeschlimann.  - Je salue le travail de clarification des rapporteurs. Au-delà de la légalité des délibérations des collectivités, c'est la sécurité pénale des élus qui est en jeu. Les questions de M. Vial ne sont pas purement rhétoriques : la notion d'avantage particulier n'est pas assez précise. Je ne voudrais pas que les élus soient tributaires d'une casuistique jurisprudentielle. Pourquoi ne définissons-nous pas nous-mêmes cette notion pour éclairer les juges ? Les remboursements de frais de déplacement, par exemple, sont-ils concernés ?

M. Marc Laménie.  - Je n'avais pas prévu d'intervenir, mais je rebondis sur les propos de Mme Cukierman, sans toutefois reprendre le terme « dégoûter » : veillons à ne pas casser les bonnes volontés.

Je suis élu dans un village de 170 habitants - à mon élection, j'ai été frappé par le fait que j'avais le même temps de parole que le maire de Marseille ou de Lyon ! Élus de proximité, nous sommes en première ligne. Pour voter une subvention de 50 euros à une association, si on est membre du bureau de celle-ci, il faut sortir de la salle... Mais, en pratique, les mêmes personnes sont souvent actives dans plusieurs associations. Il faut vraiment simplifier. Quant aux frais de déplacement, combien de maires prennent leur voiture et ne demandent rien ?

J'appuie la position de la commission des lois, dont je salue le travail. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe CRCE-K)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Dans les sociétés d'économie mixte, monsieur Uzenat, notre dispositif ne change rien aux règles de déport en matière de rémunérations. S'agissant des élus qui président une telle structure, nous ne remettons pas non plus en cause leur place.

Les amendements identiques nos65 rectifié, 67 rectifié ter, 222 rectifié bis, 179 rectifié bis, 266 sont adoptés et l'article est ainsi rédigé.

Les amendements nos216 rectifié bis, 217 rectifié bis et 223 rectifié n'ont plus d'objet.

Article 18 bis

M. le président.  - Amendement n°221 de Mme Florennes.

Mme Isabelle Florennes.  - Je propose de préciser qu'un élu contraint de se déporter ne doit pas être considéré comme membre en exercice pour le calcul du quorum. Restreindre la non-prise en compte pour le quorum au seul cas prévu à l'article L. 1111-16 du CGCT serait source de difficultés.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Nous demandons l'avis du Gouvernement sur cet amendement, de même que sur les deux suivants.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Retrait de l'amendement n°221 : il est satisfait par les modifications apportées à l'article 18, qui s'appliquent aux règlements intérieurs.

L'amendement n°221 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°219 de Mme Florennes.

Mme Isabelle Florennes.  - Les règles de prévention des conflits d'intérêts doivent s'appliquer aux commissions permanentes des conseils départementaux et régionaux.

M. le président.  - Amendement n°218 de Mme Florennes.

Mme Isabelle Florennes.  - Même objet que le précédent.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Si le Sénat adopte la proposition de loi, vous serez satisfaite. Retrait des amendements nos219 et 218 ?

Les amendements nos219 et 218 sont retirés.

M. Simon Uzenat.  - Il y a quelques instants, Mme la rapporteure n'a pas répondu à ma question. En ce qui concerne les SEM, Sémop et SPL, leurs modalités de contrôle sont visées par l'article 1524-5 du CGCT. Ma question portait précisément sur les élus siégeant au sein de ces structures et qui ne sont pas rémunérés. Il serait bon de clarifier leur situation assez rapidement, car de nombreux élus sont inquiets.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Les dispositions particulières aux SEM et SPL ne changent pas. Il reste une règle de déport en cas d'octroi d'aides à ces sociétés. Je vous suggère, si vous continuez d'avoir un doute, de poser au Gouvernement une question écrite.

L'article 18 bis est adopté.

Article 19

M. Simon Uzenat .  - La loi du 21 mars 2024 a conduit à un certain nombre d'avancées, mais le Sénat n'a pas obtenu gain de cause sur l'allongement des délais de prescription. Nous n'avons pas pu déposer d'amendements sur ce sujet, du fait de l'article 45 de la Constitution. Je tiens à souligner que c'est une demande récurrente des élus face au sentiment d'impunité, notamment en cas d'injure ou de menace les visant. Il est urgent d'y revenir, car c'est l'un des fléaux qui conduisent de nombreux élus à ne pas se représenter, quand ce n'est pas à démissionner.

M. le président.  - Amendement n°110 de Mme Florennes.

Mme Isabelle Florennes.  - Cet article étend à tous les élus l'octroi automatique de la protection fonctionnelle, créée par la loi du 21 mars 2024. Depuis son entrée en vigueur, de nombreuses difficultés ont été remontées : il faut donc mieux sécuriser ce mécanisme. Plusieurs corrections y ont été apportées par nos collègues députés. La rédaction de la commission des lois de l'Assemblée nationale opère ainsi certaines corrections pour les élus régionaux et départementaux, mais pas municipaux. Je propose de réparer cet oubli.

M. le président.  - Amendement identique n°258 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Amendement de coordination.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Précision pertinente : avis favorable.

Les amendements identiques nos110 et 258 sont adoptés.

M. le président.  - Amendement n°56 de Mme Senée et alii.

Mme Ghislaine Senée.  - Le GEST se félicite de l'octroi automatique de la protection fonctionnelle à tous les élus. Toutefois, un garde-fou paraît opportun, car il n'y a pas de limite à la prise en charge des frais de justice par la collectivité. Nous craignons une multiplication des procédures bâillons. Prévoyons le remboursement des frais lorsqu'un élu est définitivement condamné ou débouté dans le cadre d'une procédure l'opposant à un autre élu de la même collectivité.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Nous comprenons l'intention d'assurer le bon emploi des deniers publics, mais l'amendement semble inutile. L'élu doit déjà rembourser ces frais au titre des règles liées au retrait d'une décision créatrice de droits. Au surplus, il s'agit ici de la protection demandée par un élu victime de violences ou de menaces du fait de ses fonctions : je vois mal comment cet élu serait condamné dans une procédure l'opposant à un collègue. Avis défavorable, comme en première lecture.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Le Sénat a souhaité que tous les élus bénéficient de la protection fonctionnelle. Imaginez : vous êtes conseiller municipal et votre voisin, mécontent à la suite du changement d'horaire de la collecte des déchets, vous agresse verbalement, voire physiquement. Cet exemple illustre la pertinence d'élargir la protection fonctionnelle aux conseillers municipaux.

Vous pointez un risque d'abus. La protection fonctionnelle peut être retirée à tout moment si le maire considère que l'affaire n'a rien à voir avec le mandat. Je préfère considérer que tout élu doit être protégé par principe. Faisons confiance aux élus. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Ghislaine Senée.  - Je pense à une commune qui a engagé vingt et une procédures en diffamation... Parfois on peut faire confiance, parfois non. Reste que je retire l'amendement.

L'amendement n°56 est retiré.

L'article 19, modifié, est adopté.

Article 20

M. le président.  - Amendement n°259 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

L'amendement de coordination n°259, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 20, modifié, est adopté.

Les articles 21 et 22 sont successivement adoptés.

Après l'article 22

M. le président.  - Amendement n°188 rectifié ter de M. Rochette et alii.

M. Pierre Jean Rochette.  - En érigeant la transparence en absolu, nous avons glissé vers une société du soupçon. Publier des informations personnelles relatives à nos familles, ce n'est pas de la transparence : c'est du voyeurisme. Je suis favorable au contrôle des élus, mais ne veux pas que mes enfants soient exposés ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Les règles relatives aux personnes politiquement exposées résultent du droit européen : nous ne pouvons les modifier d'un coup de baguette magique. Retrait, sinon avis défavorable

Mme Françoise Gatel, ministre.  - « Je voudrais bien, mais je peux point », selon la formule célèbre de la bonne du curé... Ces dispositions relèvent en effet de directives européennes.

M. Pierre Jean Rochette.  - C'est nul !

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Avis défavorable.

M. Dany Wattebled.  - Quand on veut, on peut ! (M. Éric Kerrouche proteste.) J'aime bien le droit européen, mais nous sommes encore en France ! Votons cette excellente proposition.

L'amendement n°188 rectifié ter n'est pas adopté.

Article 23 (Suppression maintenue)

Article 24 bis

M. Pierre Jean Rochette .  - Mon amendement relatif aux fichés S a été déclaré irrecevable. Donc, on peut mettre en prison un ancien Président de la République alors que bon nombre de Français considèrent, à tort ou à raison, que le dossier est fragile, mais on peut être fiché S et élu ! Où est la cohérence républicaine ? (M. Thomas Dossus s'exclame.) Tous les fichés S doivent être inéligibles. Le rejet de mon amendement ne sert pas la cause des élus.

M. Thomas Dossus .  - La différence entre les situations dont vous parlez, c'est qu'un juge a pris une décision. Une décision de l'administration prise de façon discrétionnaire n'est pas comparable. Vous proposez ni plus ni moins que le retour des lettres de cachet ! (Applaudissements sur les travées du GEST et sur certaines travées du groupe SER)

M. le président.  - Amendement n°247 du Gouvernement.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Nous abordons la HATVP - je sens votre intérêt grandir... (Sourires)

Il arrive qu'à l'occasion d'une déclaration de patrimoine, les élus découvrent qu'ils sont propriétaires, qui d'un compte postal ouvert par sa grand-mère sur lequel il y a 30 euros, qui d'un terrain en indivision dans une forêt de l'Allier. « Pourquoi n'en ai-je pas été informé avant ? », se demandent-ils.

C'est pourquoi je reste favorable au pré-remplissage de la déclaration d'intérêts. Toutefois, je ne suis pas sûre que le pré-remplissage puisse être effectif d'ici aux élections de mars prochain.

N'oublions pas que les candidats ne sont remboursés de leurs frais de campagne qu'une fois la déclaration d'intérêts remplie. J'imagine au printemps prochain une question d'actualité passablement énervée : « on l'a dit, pourquoi ne l'a-t-on pas fait ? »

Je ne renonce pas à l'objectif, mais ce sera au Parlement de continuer à travailler sur le sujet en bonne intelligence avec la HATVP.

Pour l'heure, cet amendement s'inspire du principe « dites-le-nous une fois ». Pour les élus qui ont déjà rempli une déclaration d'intérêts, il n'y aura qu'un ajustement à faire, pas une nouvelle déclaration. Cela vous paraîtra sans doute insuffisant, mais ne promettons que ce que nous sommes en mesure de réaliser. Il s'agit d'un premier progrès, et la HATVP fera de son mieux pour que ce dispositif soit opérationnel dès les prochaines élections municipales.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Avis défavorable, malgré la prestation de la ministre... Cet amendement porte uniquement sur les anciens élus ; les nouveaux auront tout à faire. L'attitude de la HATVP nous agace quelque peu. Nous avons entendu ses questions, notre amendement y répond.

Mme Cécile Cukierman.  - Nous voterons les deux amendements. Dix ans après, nous aurions intérêt à nous pencher sur la révision de la loi Transparence - lorsque le temps politique sera plus calme, s'il l'est un jour. Sinon, nous continuerons de nourrir la suspicion à l'encontre des élus.

J'ai rencontré le président de la HATVP : lui aussi voudrait bien, mais peut point... (Sourires) Or toute personne déclarant du patrimoine est assujettie à la taxe foncière - même s'il s'agit d'un bien hérité d'une vieille tante. Il s'agit de savoir si nos administrations sont en mesure de compiler ces informations. (M. Pierre Jean Rochette renchérit.)

Si c'est un problème législatif, légiférons. Si c'est un problème réglementaire, que le Gouvernement fasse le nécessaire. Si c'est un problème de personnes, nous en tirerons les enseignements.

L'argument de la HATVP selon lequel le remboursement des comptes de campagne serait fragilisé est inacceptable. Je rappelle à cet égard que le remboursement est dû dès lors que le candidat fournit un récépissé de dépôt de sa déclaration - dépôt, pas validation.

M. Pierre Jean Rochette.  - Je me félicite de ce débat. En première lecture, j'avais déposé un amendement, adopté à l'unanimité malgré deux avis défavorables. Mme Cukierman a raison : l'administration française est capable de fournir les informations sur les intérêts et le patrimoine. Nous remettons en cause non pas la HATVP, mais le système de saisie. Dès qu'on oublie un centime, on nous rappelle. Il faut mettre en oeuvre enfin le pré-remplissage !

M. Pierre-Alain Roiron.  - Le pré-remplissage serait en effet un progrès. À l'époque, madame la ministre, si ma mémoire est bonne, vous n'y étiez pas défavorable.

M. Pierre Jean Rochette.  - En effet !

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Je n'ai pas changé d'avis.

M. Vincent Louault.  - Madame la ministre, vous avez fait un pas vers nous : merci. L'administration, elle, fait des petits pas quand elle le souhaite. Pour elle, le législateur va toujours trop loin, trop vite, trop fort.

J'ai fait l'expérience : en un clic, le directeur départemental des finances publiques de mon département a accès à tout mon patrimoine. Pour ma part, j'ai mis cinq mois à m'en sortir dans ma déclaration. Et le seul moyen de connaître la valeur d'une entreprise, c'est de la vendre ! Il faudrait un expert comme mon collègue Vogel pour réaliser une expertise qui me coûterait 20 000 euros... (Sourires) On marche sur la tête.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Notre amendement est plus large que celui du Gouvernement : il concerne tous les élus. Si l'amendement n°247 est adopté, celui de la commission devient sans objet. Avis défavorable à l'amendement n°247.

L'amendement n°247 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°260 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Il s'agit de décaler la mesure à 2027.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Sagesse. (« Ah » ! sur plusieurs travées ; M. Michaël Weber applaudit.)

L'amendement n°260 est adopté.

L'article 24 bis, modifié, est adopté.

Article 25

M. le président.  - Amendement n°172 rectifié de M. Bilhac et alii.

Mme Maryse Carrère.  - Être maire, c'est gérer des finances et du personnel. Nous proposons que les élus ayant accompli un mandat complet bénéficient des acquis de la VAE sans devoir produire une multitude de justificatifs ni passer devant un jury.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure.  - La VAE se fait en plusieurs étapes : dépôt du dossier, identification des compétences et certifications, examen du dossier. Votre amendement ne serait pas applicable. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Même avis.

Mme Maryse Carrère.  - Soit. Mais il faudra simplifier les procédures de VAE, longues et complexes.

L'amendement n°172 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°245 du Gouvernement.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Mon ministère est chargé d'établir la liste des compétences correspondant à l'exercice d'un mandat électif. Cela nécessite un travail interministériel avec les ministres chargés de la formation professionnelle et de l'enseignement supérieur. S'il doit y avoir équivalence de dipôle, le processus doit être sécurisé.

Cet amendement permet d'associer l'ensemble des administrations compétentes ; un travail devra être réalisé en amont avec les associations d'élus.

Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure.  - Avis favorable.

L'amendement n°245 est adopté.

L'article 25, modifié, est adopté.

M. le président.  - Les articles 26 et 27 ont été précédemment examinés.

Article 31

Mme Lana Tetuanui.  - L'article 38 de la Constitution donne au Gouvernement un délai pour légiférer par ordonnances.

La loi du 21 mai sur les élections municipales prévoit un nouveau mode de scrutin pour les communes de moins de 1 000 habitants. Une ordonnance est prévue pour les dispositions relatives à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française. Madame la ministre, aurez-vous le temps de la prendre ?

M. Georges Naturel.  - Il y a effectivement urgence pour les communes de Polynésie française ou de Nouvelle-Calédonie, qui sont encore des collectivités de l'État.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Le ministre des outre-mer y travaille. J'entends votre alerte et la lui transmettrai.

L'article 31 est adopté.

Article 39

M. le président.  - Amendement n°263 de Mmes Eustache-Brinio et Patru et M. Kerrouche, au nom de la commission des lois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Il s'agit de supprimer l'article 39, une demande de rapport sur l'Ircantec.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°263 est adopté et l'article 39 est supprimé.

Article 40 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°204 de M. Benarroche et alii.

M. Guy Benarroche.  - Rien n'est prévu pour les artisans, les commerçants, les paysans, les médecins - bref, ceux qui ne sont ni salariés, ni fonctionnaires, ni retraités. « C'est compliqué », nous dit-on, en repoussant nos amendements. Soit.

Ici, je demande un rapport sur les travailleurs indépendants. J'ai vu certaines demandes de rapport « contre-nature » aboutir, notamment quand elles sont portées par le rapporteur... L'Assemblée nationale ne s'en prive pas, d'ailleurs. Adopter ce rapport nous aidera à trouver un compromis en CMP.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Vous connaissez l'avis de la commission sur les demandes de rapport : défavorable.

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Je félicite le sénateur Benarroche pour son art oratoire. Le législateur a le droit d'investiguer et de contrôler. Le Parlement peut se saisir de ce sujet : vous avez toute liberté pour obtenir des informations. Avis défavorable.

L'amendement n°204 n'est pas adopté.

L'article 40 demeure supprimé.

Intitulé de la proposition de loi

M. le président.  - Amendement n°61 de M. Roiron et du groupe SER.

M. Pierre-Alain Roiron.  - Modifions l'intitulé de cette proposition de loi. Dans sa version initiale, nous souhaitions un statut de l'élu local. Cette version ne crée pas véritablement un statut, mais encourage, facilite et sécurise l'exercice d'un mandat local. Je vous renvoie à la proposition de loi de M. Kerrouche qui visait à créer un statut d'agent civique territorial.

Rien ne serait pire que de laisser croire aux élus locaux que nous créons un statut d'élu local. Revenons à l'intitulé adopté par l'Assemblée nationale.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure.  - Avis défavorable. Les termes de « statut de l'élu local » sont une demande forte des élus locaux. Il reflète nos travaux. Je souhaite remercier les services de la commission des lois. (Applaudissements)

Mme Françoise Gatel, ministre.  - Nous allons, par le biais de l'article 5, écrire dans le CGCT le terme « statut ». C'est donc que nous l'avons créé.

Éric Kerrouche avait proposé, à l'instar d'autres pays, que le maire soit un fonctionnaire d'État avec un statut particulier ; nous n'avons pas retenu cette solution. Nous pensons qu'un citoyen peut s'engager librement sans dépendre d'un parti politique. « Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément. » Les élus désignent déjà ce texte avec cette expression.

Monsieur Roiron, vous avez sans doute raison, c'est un premier pas important qui valorise l'engagement des élus. Mais il y a le sens des mots, le pouvoir des mots et le travail que vous avez accompli.

M. Vincent Louault.  - Nous ne voterons pas cet amendement, car nous tenons à cet intitulé.

Mme Cécile Cukierman.  - J'entends l'argument de nos collègues socialistes. Ne laissons pas croire que nous mettons en oeuvre un véritable statut de l'élu. De nombreux champs sont encore à investiguer.

En février 2019, lors de l'examen de la proposition de loi de Pierre-Yves Collombat, la majorité sénatoriale expliquait qu'il ne fallait pas de statut de l'élu. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, mais attention aux girouettes !

La ministre à raison : quel que soit l'intitulé de ce texte, les élus le considèrent comme une véritable avancée ; là est l'essentiel.

L'amendement n°61 n'est pas adopté.

Vote sur l'ensemble

Mme Maryse Carrère .  - Nous arrivons à la fin de l'examen de ce texte essentiel. Je remercie Mme la ministre pour le travail réalisé, vous y teniez particulièrement. Je salue également le travail des rapporteurs.

C'est un premier pas important dans la valorisation du travail des élus, mais il reste beaucoup à faire. Les normes, les tracasseries quotidiennes seront difficiles à atténuer. Les maires reçoivent désormais des circulaires de plus de soixante pages ! Avec M. Darnaud, nous avons commis un rapport au sujet du mal des maires.

M. Bernard Buis .  - Depuis hier, nous avons fait oeuvre utile pour faciliter l'exercice du mandat local. Je salue le travail de la ministre. Le RDPI salue cette étape majeure. Nous espérons que la CMP sera conclusive. Bien reconnaître les élus locaux et leur statut, c'est renforcer la République.

M. Vincent Louault.  - Bravo !

M. Pierre-Alain Roiron .  - Je félicite les rapporteurs et les administrateurs pour le travail réalisé, un travail exigeant, dans un contexte politique instable. Nombre d'élus locaux ont renoncé entre-temps.

Après un an et demi de débat, c'est un pas important, mais mesuré. Il valorise l'engagement et sécurise l'action des élus, sans les placer au-dessus de la règle commune.

Sans créer un véritable statut de l'élu local, cette proposition de loi en pose les jalons.

Le Sénat a renoncé heureusement au serment républicain des élus, qui aurait été assez mal vécu. La loyauté à la République se prouve dans l'action, pas par un rituel.

Aux articles 18 et 18 bis A, un équilibre permet de sécuriser sans déresponsabiliser, en clarifiant le champ de la prise illégale d'intérêts. La réponse est concrète, fiable et politiquement utile.

À moins de six mois des municipales, nous adressons un signal de confiance aux élus.

M. Louis Vogel .  - Quand nous avons commencé nos travaux, j'avais cité le nombre important de démissions des maires, véritable appel à l'aide de leur part. Nous avons commencé à répondre à cette interpellation. Sur le terrain, on nous demande de faire ce statut de l'élu.

Madame la ministre, je vous remercie, ainsi que les rapporteurs qui ont trouvé un chemin parmi des demandes contradictoires. C'est possible au Sénat. Au nom de mon groupe, je vous en remercie. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; Mme Marie-Do Aeschlimann applaudit également.)

Mme Cécile Cukierman .  - Je me félicite de l'aboutissement de ce texte.

Nous pouvons voir les choses de plusieurs manières. Nous pourrions dire « que de temps perdu », ou « que de soubresauts en une semaine ».

On peut aussi se dire que, pour aboutir, il faut prendre du temps, exprimer parfois des désaccords. Les choses n'avancent pas forcément au travers d'un consensus béni-oui-oui, si je puis dire.

Ce n'est pas un véritable statut, mais la maison est hors d'eau, nous pouvons commencer le travail. Madame la ministre, nous avons encore beaucoup à faire. Il y va de la protection de la démocratie locale que de permettre à chacun d'être élu et de ne plus être un élu ensuite. Sécurisons l'accès à ce très beau mandat !

M. Jean-Marie Mizzon .  - Je remercie également la ministre, mes collègues et les rapporteurs. Ce travail va apporter à beaucoup, même s'il n'apportera pas à tous.

Hier soir, je vous ai interrogée sur les élus travailleurs frontaliers, madame la ministre. Votre réponse n'était pas suffisante - et l'Europe n'est pas en cause. Il faut engager des discussions bilatérales avec nos voisins pour que les élus français qui travaillent de l'autre côté de la frontière aient le même statut que les autres élus. Sinon, plus personne ne se présentera aux élections dans ces communes remplies de frontaliers ! Le travail n'est pas fini.

M. Guy Benarroche .  - Ce texte nous permet d'obtenir des avancées considérables, malgré certains manques. La crise démocratique que nous vivons n'est pas liée au seul statut de l'élu. Elle s'explique surtout par le manque de dynamisme de l'engagement citoyen, comme le rappelait une mission d'information du Sénat. C'est aussi lié au fait que certaines procédures n'ont pas encore été développées. Je l'ai montré dans le rapport que vous m'aviez confié au titre de la délégation aux collectivités territoriales : des communes ont développé, pour leur transition environnementale, des éléments de participation citoyenne, suscitant l'engagement des habitants. Il faut réussir à raconter un récit. C'est sur cette voie qu'il faut concentrer nos efforts.

Mme Marie Mercier .  - Le Sénat avait la volonté de défendre nos élus. Personne n'a oublié le hashtag #BalanceTonMaire. Nos communes sont de petites républiques qui font tenir la grande dans la proximité ! Continuons à les défendre et à défendre la proximité qui fait vivre la démocratie.

M. Laurent Somon .  - Ce texte est une forme de reconnaissance du travail des élus locaux. Il reconnaît la protection fonctionnelle. Le travail de la commission a été ardu.

Je remercie la commission des lois pour le travail réalisé, et la ministre qui a tenu ce projet à bout de bras depuis plusieurs années. Cela montre la qualité du travail sénatorial.

Ce texte ne règlera pas tout, car une loi n'est jamais parfaite. Mais elle ne désespérera pas ceux qui veulent s'engager.

À l'heure du Congrès des maires et des prochaines échéances électorales, elle effectue un pas important. Je me réjouis de cette volonté commune : nous avons abouti à un texte qui va dans le bon sens.

M. Jean-Michel Arnaud .  - Ce texte n'est pas une révolution. Mais les petits pas permettent de cheminer, d'atteindre des cols et de fixer de nouveaux horizons - je pense aux élections municipales à venir. Beaucoup de maires cherchent de nouveaux visages. Oui, nous avons veillé à attirer des jeunes, des femmes, des étudiants : de nouveaux visages. Les plus petites communes ont besoin d'indemnités à la hauteur. Nous avons aussi renforcé l'accompagnement et limité les risques de prises illégales d'intérêts.

De nombreux rapports sénatoriaux ont alimenté le travail, mené en profondeur. J'espère que le texte sera adopté définitivement avant les prochaines élections et donnera une bonne image du Parlement.

Je nous donne collectivement rendez-vous aux prochaines élections pour défendre une démocratie locale vivante. (Mme Annick Billon applaudit.)

Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois .  - Je me réjouis de la manière dont la démocratie fonctionne. Nos débats, malgré les oppositions, sont apaisés. Ce sont la discussion et le vote qui en constituent la règle. Nous avons respecté, aussi, le bicamérisme : le travail de l'Assemblée nationale n'a pas été défait par principe par le Sénat ; nous avons écouté des positions qui n'étaient pas les nôtres. En ces temps troublés, dans une France fracturée, je me réjouis de porter attention aux maires et aux élus ; le maillage territorial, voilà ce qui tient le pays !

Nous avons fait oeuvre d'intérêt public avec ce débat apaisé. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP ; Mme Cécile Cukierman applaudit également.)

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation .  - Dans nos vies d'élus, nous vivons des moments d'exception, des moments où l'on a fait progresser les choses. Cette proposition de loi transpartisane, ce travail issu de la délégation aux collectivités territoriales et de nombreuses commissions, malgré les turbulences, n'est ni plus ni moins que la capacité à mettre en oeuvre une promesse républicaine : chaque citoyen qui veut s'engager doit pouvoir le faire.

Sécuriser, conforter, nous l'avons fait, et ce n'est pas rien. Lors de la crise du covid, les crèches, les écoles, la voirie, l'éclairage public, tout cela a tenu grâce à l'engagement des élus locaux, tout comme lors des grands événements climatiques.

La République reconnaît l'engagement de ceux qui la servent. Nous leur exprimons notre gratitude et affirmons le rôle essentiel des élus municipaux dans la République. C'est pourquoi je tiens au mot de « statut » - ce même statut qu'ont les sapeurs-pompiers volontaires. Rappelons à chacun ce que nous devons aux maires.

Je suis assez émue. Que, dans ce moment tourbillonnaire de la vie politique et sociale, nous ayons su, dans cette chambre des territoires, débattre de la sorte, c'est l'honneur de la politique. Vous avez montré à nos concitoyens, qui parfois doutent de nous, que nous étions capables de dépasser les clivages. Nous construisons ensemble un chemin, celui de la démocratie.

Tout n'est pas fini, ce texte est une étape -  il nous faudra parler simplification, notamment.

Merci à la commission des lois et aux rapporteurs, à l'ensemble des groupes politiques, aux administrateurs du Sénat et aux collaborateurs du ministère, que je félicite. Merci au président du Sénat et à la présidente de l'Assemblée nationale, qui nous ont aidés. Merci au Premier ministre, (on ironise à droite ; M. Jean-Raymond Hugonet se montre dubitatif) : c'est lui qui a voulu que ce texte soit débattu au Sénat. Je salue enfin le travail de la Chancellerie -  et j'attends vos votes ! (Sourires et applaudissements)

À la demande de la commission des lois, la proposition de loi, modifiée, est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°368 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption 344
Contre     0

La proposition de loi est adoptée.

(Mme Françoise Gatel applaudit.)

Conférence des présidents

M. le président.  - Les conclusions adoptées par la Conférence des Présidents réunie ce jour sont consultables sur le site du Sénat. En l'absence d'observations, je les considère comme adoptées.

Les conclusions de la Conférence des présidents sont adoptées.

En application de l'article 17 du règlement, nous pourrions renvoyer le projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales à la commission des affaires sociales, avec une saisine pour avis de la commission des finances et de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

Il en est ainsi décidé.

Prochaine séance demain, jeudi 23 octobre à 10 h 30.

La séance est levée à 19 h 20.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du jeudi 23 octobre 2025

Séance publique

Présidence : M. Alain Marc, vice-président, M. Pierre Ouzoulias, vice-président

De 10 h 30 à 13 heures et de 14 h 30 à 16 heures

1Proposition de loi visant à se libérer de l'obligation alimentaire à l'égard d'un parent défaillant, présentée par M. Xavier Iacovelli (n°349, 2024-2025)

2Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à garantir un cadre fiscal stable, juste et lisible pour nos micro-entrepreneurs et nos petites entreprises (texte de la commission, n°26, 2025-2026)