EXAMEN DES ARTICLES

CHAPITRE IER - Dispositions relatives à l'aviation civile

Article 1er Contrôles d'alcoolémie et de substances psychoactives pour les personnels navigants

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à prendre, dans un délai de huit mois, une ordonnance pour mettre en oeuvre les obligations de conduire des tests d'alcoolémie sur les équipages, et la possibilité d'effectuer des tests pour d'autres substances psychoactives, introduites par le règlement (UE) 2018/1042.

La commission a adopté un amendement afin de garantir le respect du secret médical dans le cadre de la mise en oeuvre du règlement (UE) n° 2018/1042 ainsi qu'un amendement rédactionnel.

I. LES ÉQUIPAGES DU SECTEUR AÉRIEN SOUMIS À MOINS D'EXIGENCES QUE D'AUTRES MODES DE TRANSPORTS EN CE QUI CONCERNE LE DÉPISTAGE D'ALCOOLÉMIE

Le 24 mars 2015, un copilote suicidaire a précipité l'A 320 de Germanwings qu'il conduisait contre une montagne dans les Alpes du Sud françaises. À la suite de cet accident, le règlement (UE) 2018/1042 a prévu des mesures destinées à mieux garantir l'aptitude médicale des membres de l'équipage de conduite ou de cabine et l'installation d'un système d'alarme d'impact sur les avions à turbine neufs autorisés à transporter entre six et neuf passagers.

Le règlement [UE] 2018/1042 du 23 juillet 2018 6 ( * ) prévoit ainsi :

- de conduire des tests d'alcoolémie sur les équipages ;

- et la possibilité d'effectuer des tests pour d'autres substances psychoactives.

Ce règlement prévoit que les tests d'alcoolémie peuvent être effectués par les inspecteurs au sol de l'aviation civile ou par d'autres autorités officielles des États membres dans le cadre de leurs réglementations nationales, sous réserve de leur conformité aux principes et objectifs du règlement européen.

Le droit français prévoit un dispositif de contrôle des équipages dans le secteur aérien peu coercitif

- l'arrêté du 12 mai 1997 relatif aux conditions techniques d'exploitation d'avions par une entreprise de transport aérien public prévoit qu'un membre de l'équipage ne doit pas exercer de fonctions sur un avion lorsqu'il est sous l'effet de médicaments / drogues / alcool risquant d'affecter ses facultés au point de nuire à la sécurité ;

- l'arrêté du 23 avril 2004 portant diverses dispositions en matière de transport aérien public au moyen d' hélicoptères prévoit que le commandant de bord doit veiller à ce qu'un vol ne soit pas entrepris s'il a connaissance que l'un des membres de l'équipage n'est pas en mesure d'exercer ses fonctions en raison des effets de l'alcool ou d'agents pharmacodynamiques ;

- l'arrêté du 24 juillet 1991 relatif aux conditions d'utilisation des aéronefs civils en aviation générale prévoit que tout membre d'équipage doit s'abstenir d'exercer ses fonctions dès qu'il se trouve sous l'influence de boissons alcoolisées, de narcotiques ou de stupéfiants .

Cependant, dans le domaine aérien, en dehors des cas de crime ou de délit, pour lesquels le code de la santé publique prévoit à l'article L. 3354-1 que soient conduits des tests d'alcoolémie, de tels tests ne sont pas prévus par la réglementation nationale sur les pilotes ou autres personnels de l'aviation civile.

Le secteur aérien se distingue donc, en matière de tests d'alcool ou de psychotropes, d'autres modes de transport comme :

- les transports routiers (articles L. 234-1 et suivants et R. 234-1 et suivants du code de la route pour l'alcool ; L. 235-1 et suivants et R. 235-1 et suivants pour les stupéfiants) ; par exemple, les officiers ou agents de police judiciaire soumettent à des épreuves de dépistage d'alcoolémie l'auteur présumé d'une infraction ;

- ou les transports maritimes qui soumettent les gens de mer, auteurs présumés d'une infraction dans un événement de mer ayant occasionné un dommage corporel, à des épreuves de dépistage d'alcoolémie (articles L. 5531-21 et suivants et R. 5531-20 et suivants du code des transports).

II. DES EXIGENCES EUROPÉENNES QUI IMPOSENT UN RÉGIME PLUS SÉVÈRE

La réalisation de tests prévus par le droit européen nécessite de définir les sanctions pénales associées à un dépassement des taux d'alcoolémie.

Conformément à l'article 34 de la Constitution, la détermination de tels délits ainsi que les peines qui leur sont applicables doivent être prévues par la loi. Ces vérifications, par éthylomètre ou par prise de sang, sont également de nature législative, car elles ont un lien avec les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques.

L'article 1 er vise à habiliter le Gouvernement à prendre, dans un délai de huit mois, une ordonnance afin de mettre en oeuvre :

- les obligations de conduire des tests d'alcoolémie sur les équipages ;

- et la possibilité d'effectuer des tests pour d'autres substances psychoactives, introduites par le règlement (UE) 2018/1042 ; il s'agit là d'un choix proposé au Parlement puisque le droit européen n'impose pas le dépistage de substances psychoactives autres que l'alcool.

Le périmètre du dépistage défini par le règlement européen exclut les aéronefs historiques, les ULM, les ballons, les planeurs très légers, les parachutes ainsi que les télépilotes de drone. Cependant, le Gouvernement craint une disparité de traitement entre les personnels de conduite des différents types d'aéronefs qui serait préjudiciable à la crédibilité du dispositif global.

La mesure proposée au Sénat élargit donc le champ matériel du règlement à d'autres membres d'équipage ou personnes concourant à la conduite des aéronefs : les élèves pilotes, les membres d'équipage technique pour les opérations de SAMU héliporté, les télépilotes de drones pour les opérations les plus risquées ou encore les parachutistes professionnels.

C'est la gendarmerie et la police qui seront chargées de réaliser les contrôles d'alcoolémie et de substances psychoactives dans le domaine aérien. Les tests obligatoires prescrits par le règlement 2018/1042 seront réalisés par la gendarmerie des transports aériens, déjà présente sur de nombreux aéroports.

L'ordonnance prévue a vocation à être codifiée à la sixième partie « aviation civile » de la partie législative du code des transports. Elle appellera des décrets en Conseil d'État qui seront codifiés dans la partie réglementaire du code de l'aviation civile et des arrêtés d'application.

Le Gouvernement précise que les mesures à prendre sont volumineuses puisqu'il s'agit d'ajouter plus de vingt articles dans la partie aviation civile du code des transports, en s'inspirant d'un dispositif équivalent à celui du code de la route ainsi que dans le code des transports pour les gens de mer.

Il convient cependant de prévoir les adaptations requises au domaine aérien avec de multiples acteurs susceptibles de faire l'objet de tests : pilotes professionnels, pilotes de loisirs, personnels de cabine, télépilotes de drones.

De plus, il convient également de prévoir les dispositions relatives aux substances psychoactives et d'en adapter également les procédures. De telles dispositions existent dans le code de la route (mais pas dans la partie du code des transports pour les gens de mer) même si elles ont été ajoutées longtemps après celles relatives à l'alcoolémie.

Enfin, le projet d'ordonnance contient des dispositions devant être mises en oeuvre par la police et la gendarmerie, et doit donc faire l'objet d'une coordination avec le ministère de l'Intérieur et plus spécifiquement avec la direction générale de la gendarmerie nationale et la direction générale de la police nationale. Sont également envisagées des dispositions pénales nécessitant une concertation avec le ministère de la justice. Enfin, des discussions doivent également être menées avec le ministère de la santé afin d'évaluer si certaines dispositions sont susceptibles d'impacter le code de la santé.

III. TESTER LES PERSONNELS AVEC TACT ET EFFICACITÉ, EN RESPECTANT LA FRONTIÈRE ENTRE VIE PRIVÉE ET PROFESSIONNELLE AINSI QU'EN TENANT COMPTE DE LA POSSIBILITÉ DE « FAUX POSITIFS ».

On peut noter que l'avis du Conseil d'État classe cet article 1 er dans la catégorie des demandes d'habilitations à légiférer par ordonnance motivées par le nombre, la complexité et la spécificité des mesures à prendre lorsque le législateur européen a renvoyé aux États membres le soin d'en définir certaines modalités.

Sur le principe , un tel dispositif se fonde sur un principe de précaution bien légitime .

Malgré la situation extrêmement tendue dans laquelle se trouve le secteur aérien qui doit faire face au pire effondrement de trafic de son histoire -- ce qui accapare les personnels engagés dans des négociations sociales -- et le temps très court imparti à l'examen de ce texte, le rapporteur a entendu plusieurs acteurs du terrain qui ont approuvé la démarche du Gouvernement.

Les tests porteraient non seulement sur l'alcool, mais aussi sur certaines substances médicamenteuses qui peuvent faire l'objet d'une prescription médicale avec le risque d'une atteinte à leur vie privée et au secret médical, tel que mis en avant parmi les acteurs entendus . Effectivement, de tels contrôles peuvent soulever de délicates questions de frontière entre la vie privée et professionnelle . La commission a donc adopté un amendement COM-21 afin que la mise en oeuvre du règlement (UE) n° 2018/1042 se fasse dans le respect du secret médical. Elle a également adopté un amendement COM-22 rédactionnel.

Les pilotes et les personnels concernés peuvent également redouter les cas de « faux positifs » qui les empêcheraient d'accomplir leurs missions ; or la période de pandémie a démontré, s'il le fallait, que les tests ne sont pas infaillibles.

En pratique, ce sont bien les modalités de mise en oeuvre du dispositif qui peuvent apporter une réponse satisfaisante à ces inquiétudes. Le Sénat sera donc extrêmement attentif aux conditions d'élaboration du texte et à sa rédaction définitive.

La commission a adopté l'article premier ainsi modifié.

Article 2 Actualisation des limites d'âge des pilotes dans le transport aérien commercial

Cet article vise à mettre en adéquation avec les règlements européens les dispositions législatives relatives aux limites d'âge des pilotes dans le transport aérien commercial.

Pour les avions et les hélicoptères, l'âge maximal est fixé, au niveau européen, à 60 ans dans le transport aérien commercial monopilote et à 65 ans en cas de multipilotage. Pour les dirigeables, l'âge maximal est fixé à 65 ans. Pour les titulaires d'une licence de pilote de ballon, la limite d'âge est fixée à 70 ans pour le transport commercial de passagers en ballon, de même que pour les dirigeables à air chaud et les planeurs.

La commission a adopté trois amendements rédactionnels du rapporteur, sans modifier le fond du dispositif.

I. DES LIMITES D'ÂGE NATIONALES PLUS RESTRICTIVES QUE CELLES FIXÉES PAR LE DROIT EUROPÉEN

La convention relative à l'aviation civile internationale, signée à Chicago le 7 décembre 1944, a été ratifiée par tous les États membres de l'Union européenne. Cette convention a institué l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) dont l'objet est de développer les principes et les techniques de la navigation aérienne internationale ainsi que de promouvoir la planification et le développement du transport aérien international.

Sous l'intitulé « Licences du personnel », l'annexe 1 de la convention de Chicago regroupe les normes et les pratiques recommandées pour la délivrance des licences aux membres d'équipage de conduite -- pilotes, mécaniciens navigants et navigateurs -- aux contrôleurs de la circulation aérienne, aux opérateurs radio de station aéronautique, aux techniciens de maintenance et aux agents techniques d'exploitation. En particulier, cette annexe précise qu'« un État contractant qui a délivré une licence de pilote ne permettra pas au titulaire de cette licence de remplir les fonctions de pilote d'un aéronef qui effectue des vols de transport commercial international s'il a atteint l'âge de 60 ans, ou de 65 ans dans le cas de vols avec plus d'un pilote ». Dans le transport commercial international, ces dispositions concernent quasi exclusivement les avions et les hélicoptères.

Les normes et pratiques recommandées adoptées par le Conseil de l'OACI ne sont pas d'application directe et doivent être transposées dans la réglementation nationale de chaque État contractant. Lorsqu'un État ne peut se conformer à l'une de ces normes, une notification de différence au Conseil est obligatoire en vertu de l'article 38 de la Convention de Chicago.

Prenant pour logique de base un plafond compris entre 65 et 70 ans , les trois règlements (UE) n° 1178/ 2011 sur l' aviation civile 7 ( * ) , (UE) 2018/395 8 ( * ) sur l'exploitation de ballons et le règlement d'exécution (UE) 2018/1976 sur les planeurs, déterminent, pour le transport aérien commercial par avion, hélicoptère, dirigeable, ballon et planeur , les limites d'âge suivantes :

- pour les avions et hélicoptères : le titulaire d'une licence de pilote de plus de 60 ans ne peut conduire un aéronef du transport aérien commercial que dans un équipage multipilote ;

- cette possibilité cesse à 65 ans pour les avions, hélicoptères et dirigeables dans le transport aérien commercial ;

- les titulaires d'une licence de pilote de ballon (BPL) de plus de 70 ans ne peuvent plus piloter un ballon utilisé pour le transport commercial de passagers ;

- les titulaires d'une licence de pilote de planeur (SPL) de plus de 70 ans ne peuvent plus piloter de planeurs utilisés dans le transport commercial de passagers.

Ces limites d'âge constituent des règles de sécurité aérienne qui ont pour but de réduire le risque :

- d'une incapacité soudaine due à un risque cardio et cérébro-vasculaire plus élevé ;

- et des effets généraux du vieillissement.

En France, ces limites d'âge sont impératives du fait de l'application directe des règlements européens .

Précisons que dans le domaine du travail aérien , c'est-à-dire les activités aériennes commerciales autres que le transport de passagers , de courrier et de fret, il n'y a pas de limite d'âge , ce qui peut permettre aux pilotes ayant atteint la limite d'âge en transport aérien commercial de poursuivre une carrière dans le travail aérien.

Le droit national, figurant dans la partie législative du code des transports , relatif à ces limites d'âge n'a pas été actualisé avec ces dispositions. Ainsi, l'article L. 6521-4 prévoit que l'activité de pilote de ligne ne peut être exercée dans le transport aérien public au-delà de l'âge de 60 ans, sauf à en faire la demande annuellement pour poursuivre cette activité en équipage multipilote jusqu'à 65 ans, sous réserve d'aptitude médicale, et qu'un seul des deux pilotes soit âgé de plus de 60 ans.

II. UNE MISE EN CONFORMITÉ AVEC LES LIMITES D'ÂGE FIXÉES PAR LE DROIT EUROPÉEN

L'article 2 vise à mettre en conformité le code des transports avec les évolutions récentes du droit européen relatives aux limites d'âge des pilotes agissant dans le transport aérien commercial. Il retranscrit ainsi les limites d'âge fixées par les trois règlements européens déjà mentionnés, avec en conséquence un assouplissement de la condition d'âge applicable à la composition d'un équipage multipilote, qui pourrait, en pratique, être composé de deux pilotes de ligne âgés de plus de 60 ans. À noter que la limite d'âge pour les dirigeables à air chaud est fixée à 70 ans, ces dirigeables étant assimilables, dans la réglementation européenne, à des ballons. Les dirigeables à air chaud sont, dans la réglementation européenne de sécurité aérienne, assimilés à des ballons.

Comme l'indique l'étude d'impact, l'option consistant à ne pas mettre en cohérence les dispositions de l'article L. 6521-4 du code des transports avec les limites d'âge imposées par les règlements européens n'est pas satisfaisante, car elle maintiendrait dans notre droit la mention de limites d'âge plus restrictives que les limites d'âge applicables dans le droit européen, nuisant ainsi à la lisibilité de la norme applicable. Le Gouvernement propose donc un alignement des normes européennes et françaises.

Par ailleurs, même si les avions, les hélicoptères, les ballons, les planeurs et les dirigeables représentent une grande partie des aéronefs, d'autres, comme les ULM et les parachutes , ne sont pas régis par des dispositions européennes. Or l'évolution des technologies permet à ces derniers d'effectuer du transport commercial, ce qui n'était pas possible auparavant. Il n'est cependant pas possible de fixer une limite d'âge a priori dans la loi de façon proportionnée, compte tenu de l'hétérogénéité des aéronefs concernés et des évolutions technologiques. Afin de répondre à cette problématique, le projet de loi donne également au ministre chargé de l'aviation civile la possibilité de fixer par voie réglementaire un âge limite entre 60 et 70 ans pour ces aéronefs non visés par les règlements européens.

III. UNE TRANSPOSITION FORMELLE, N'AYANT AUCUNE CONSÉQUENCE SUR LE DROIT APPLICABLE

Le présent article concerne, en France, nos 8 500 pilotes d'avion titulaires d'une licence permettant de faire du transport aérien commercial, 300 pilotes d'hélicoptères, 2 000 titulaires d'une licence de planeur et environ 300 titulaires d'une licence de ballon. Ces pilotes ont les titres qui leur permettent de réaliser des activités de transport aérien, sans qu'on sache combien utilisent cette faculté.

Du point de vue juridique, les exigences de limite d'âge prévues par les règlements européens de sécurité aérienne n° 1178/2011, n° 2018/395 et n° 2018/1976 sont directement applicables . Par conséquent, la transposition prévue par le présent article, formelle, ne vise qu'à modifier le contenu du code des transports, sans réellement affecter un droit déjà applicable.

Cet alignement juridique n'aurait donc pas d'impacts économiques, financiers ou sociaux. En particulier, les pilotes d'avions et d'hélicoptères continueraient à être soumis à l'article L. 6521-4 relatives à l'âge limite de 60 ans au-delà duquel le personnel navigant doit présenter une demande pour poursuivre son activité, ne sont pas modifiées. S'agissant de la réglementation sur la retraite applicable aux personnels navigants, on peut rappeler que les dispositions de l'article R. 426-11 du code de l'aviation civile permettent à tout navigant de bénéficier :

- d'une retraite s'il a atteint l'âge de 50 ans et s'il justifie de vingt annuités acquises au titre de services éligibles ;

- d'une retraite à taux plein, s'il a atteint l'âge de 55 ans ou s'il justifie de trente annuités acquises et seulement si la somme de l'âge et du nombre d'annuités acquises est supérieure ou égale à 80.

Au cours des auditions la DGAC a indiqué que le droit européen pourrait prochainement évoluer, mais qu'il était tout de même souhaitable d'harmoniser notre droit sans plus attendre.

La commission a adopté trois amendements rédactionnels ( COM-32 , COM-23 et COM-24 ) du rapporteur, sans modifier le fond du dispositif.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article 3 Introduction, par voie d'ordonnance, de la possibilité de recours à un régime de déclaration au titre des exigences de sécurité pour le transport aérien public

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à mettre en adéquation, par voie d'ordonnance, le code des transports avec plusieurs règlements européens portant sur la délivrance des licences d'exploitation et sur le type d'obligation requise au titre des exigences de sécurité pour le transport aérien public. Il s'agit de tirer les conséquences de l'introduction en droit européen de la notion de déclaration en matière de sécurité.

La commission a adopté un amendement rédactionnel, sans modifier le dispositif sur le fond.

I. UNE DISSOCIATION EUROPÉENNE ENTRE LES OBLIGATIONS LIÉES À L'OBTENTION D'UNE LICENCE D'EXPLOITATION ET CELLES LIÉES À LA SÉCURITÉ

L'article L. 6412-2 du code des transports subordonne l'activité de transporteur aérien public à la détention :

- d'une licence d'exploitation , accordée selon des critères économiques ;

- et d'un certificat de transporteur aérien qui requiert des garanties de sécurité .

Le droit français prévoit à ce jour, en matière d'exigences de sécurité pour les exploitations d'aéronefs civils, un régime d'autorisation conditionnant la délivrance du certificat de transporteur aérien . Les règles nationales imposent par ailleurs que l'obtention d'une licence d'exploitation pour réaliser du transport public soit délivrée sur la base de ce certificat de transporteur aérien (articles R. 330-1-1 et, par son renvoi au règlement européen, R. 330-19 du code de l'aviation civile).

La réglementation européenne dissocie, en revanche, les obligations liées à l'obtention d'une licence d'exploitation (règlement (CE) n° 1008/2008) et celles liées à la sécurité (règlement (UE) n° 2018/1139).

Le règlement (UE) n° 2018/1139 a introduit, en matière de sécurité, un régime de déclaration comme alternative à un régime d'autorisation pour certaines activités aériennes, de transport public ou autres. Son article 30 prévoit qu'il peut être demandé aux exploitants européens d'aéronefs de déclarer avoir la capacité et les moyens d'assumer les responsabilités liées à l'exploitation d'aéronefs en conformité avec ces actes d'exécution, ou d'être titulaires d'un certificat.

La dissociation des obligations liées à l'obtention d'une licence d'exploitation et celles liées à la sécurité impose donc de dissocier, dans le droit national, l'obligation de détenir une licence d'exploitation de celle de détenir un certificat de transporteur aérien .

Cette dissociation est d'autant plus nécessaire que les règles nationales imposent que la licence d'exploitation pour le transport public soit délivrée sur la base d'un certificat de transporteur aérien. Or, pour certaines catégories d'aéronefs comme les ballons et les planeurs, les règles européennes, qui prévoient désormais non plus une autorisation, mais une déclaration, rendent de fait impossible, dans ces cas, la délivrance au niveau national d'une licence d'exploitation.

II. UNE HABILITATION À LÉGIFÉRER PAR ORDONNANCE AFIN D'INTRODUIRE LE CONCEPT DE DÉCLARATION AUX CÔTÉS DE LA CERTIFICATION POUR CERTAINES ACTIVITÉS AÉRIENNES

Cet article prévoit d'habiliter le Gouvernement à mettre en adéquation, par ordonnance, le code des transports avec les dispositions relevant de ces règlements européens.

La transposition ainsi permise doit permettre d'introduire le concept de déclaration aux côtés de la certification pour certaines activités aériennes, notamment le transport aérien public, en ce qui concerne les exigences de sécurité , et de dissocier le régime de délivrance d'une licence d'exploitation du type d'obligation requise en matière de sécurité .

III. UNE MISE EN CONFORMITÉ AVEC LE DROIT EUROPÉEN ESSENTIELLEMENT TECHNIQUE

Cet article 3 propose une habilitation à mettre en place, par ordonnance, un régime de déclaration -- introduit par le règlement (UE) n° 2018/1139 au titre des exigences de sécurité -- comme alternative au régime d'autorisation pour le certificat de transporteur aérien.

L'article se classe également, comme le signale l'avis du Conseil d'État, dans la catégorie des demandes d'habilitations motivées par le nombre, la complexité et la spécificité des mesures à prendre pour appliquer le droit européen.

Sur le fond, cet article n'appelle pas d'observation puisque les finalités et les domaines d'intervention des mesures envisagées sont définis avec suffisamment de précision au regard des exigences de l'article 38 de la Constitution.

La commission a cependant adopté un amendement COM-25 rédactionnel .

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

Article 4 Actualisation des références à des textes européens abrogés et prise en compte de l'entrée en vigueur du règlement (UE) 2018/1139

Cet article vise à actualiser, par voie d'ordonnance, les références de notre droit devenues obsolètes à la suite de l'entrée en vigueur du règlement (UE) 2018/1139 dans le domaine de l'aviation civile. Il prévoit également d'adapter notre législation relative aux drones puisque cette matière qui relevait du droit interne est entrée dans le périmètre de la réglementation européenne.

La commission a adopté l'article sans modification.

I. DE NOMBREUSES RÉFÉRENCES À DES TEXTES EUROPÉENS DEVENUES OBSOLÈTES EN MATIÈRE D'AVIATION CIVILE ET UN CHAMP D'APPLICATION MATÉRIEL DU RÈGLEMENT (UE) 2018/1139 ÉLARGI AUX DRONES

De nombreuses références à des textes européens sont devenues obsolètes dans la sixième partie « aviation civile » du code des transports. En particulier, le règlement (UE) 2018/1139 du 4 juillet 2018 a eu pour effet d'abroger et de remplacer le règlement (CE) n° 216/2008, celui-ci ayant déjà abrogé la directive 2004/36/CE à laquelle il est fait encore référence dans la sixième partie « aviation civile » du code des transports.

Par ailleurs, le champ d'application matériel du règlement (UE) 2018/1139 est aujourd'hui plus large que celui du règlement (CE) n° 216/2008. Le règlement (UE) 2018/1139 a par exemple conféré à l'Agence de l'Union européenne pour la sécurité aérienne la compétence concernant les aéronefs sans équipage à bord (drones) . Cette compétence s'est ainsi traduite par la publication en juin 2019 de deux règlements
- règlement délégué (UE) n° 2019/945 et règlement d'exécution (UE) n° 2019/947 - de mise en oeuvre de cette compétence.

II. UNE DEMANDE D'HABILITATION À LÉGIFÉRER PAR ORDONNANCE AFIN DE METTRE À JOUR LES RÉFÉRENCES AUX TEXTES EUROPÉENS ABROGÉS ET DE PRENDRE EN COMPTE L'ENTRÉE EN VIGUEUR DU RÈGLEMENT (UE) 2018/1139

Le présent article prévoit une demande d'habilitation à légiférer par ordonnance afin de mettre à jour les références aux textes européens abrogés et de prendre en compte l'entrée en vigueur du règlement (UE) 2018/1139.

Les évolutions du droit européen dans le secteur aérien imposent la mise à jour non seulement du code des transports, mais aussi, pour les drones civils, du code de la consommation et du code des postes et des communications électroniques. S'agissant de ces drones civils, les modifications proposées portent sur l'abrogation des dispositions de la loi n° 016-1428 du 24 octobre 2016 relative au renforcement de la sécurité de l'usage des drones civils concernant la sécurité aérienne, remplacées par les dispositions des règlements délégué et d'exécution (UE) 2019/945 et 2019/947, ainsi que sur l'alignement des terminologies avec celles de ces règlements européens. Il s'agit également de mettre en oeuvre les obligations de surveillance du marché et de contrôle des produits entrant sur le marché de l'Union prévues par le règlement délégué (UE) 2019/945.

De plus, les violations des règles de sécurité définies par le règlement (UE) 2018/1139 ou les règlements pris pour son application dans des domaines autres que les drones appellent la création d'un dispositif de sanctions pénales. Celles-ci seraient de nature délictuelle et nécessitent donc une disposition législative aux termes de l'article 34 de la Constitution.

III. UNE DEMANDE D'HABILITATION JUSTIFIÉE COMPTE TENU DU NOMBRE, DE LA COMPLEXITÉ ET DE LA SPÉCIFICITÉ DES MESURES ATTENDUES

La demande d'habilitation formulée par cet article est l'une des trois qui se justifie par le nombre, la complexité et la spécificité des mesures à intervenir pour mettre en oeuvre les obligations fixées par le législateur européen.

Il s'agit ici de tirer les conséquences de l'entrée en vigueur du règlement (UE) 2018/1139 et d'actualiser les références qui, dans notre droit, renvoient à des règlements européens plus anciens. Ce règlement (UE) 2018/1139 nécessite également de modifier notre législation nationale dans le domaine des drones , qui n'était jusque-là pas couverte par les règles européennes.

Le Gouvernement motive les délais proposés - de six mois pour prendre une ordonnance et trois mois pour déposer un projet de loi d'habilitation - par le volume et la technicité des mesures à prendre. Dans de nombreux cas, il s'agirait d'un simple changement de référence, le renvoi au règlement européen n° 216/2008 devant être remplacé par le renvoi au règlement n° 2018/1139 dans les sept livres de la sixième partie « aviation civile » du code des transports.

La commission a adopté l'article 4 sans modification.

Article 5 - Sécurisation du transport aérien de marchandises dangereuses

Conformément au règlement (UE) n° 965/2012, cet article vise à étendre l'application des règles de la convention de Chicago, qui traitent de la sécurité du transport aérien de matières dangereuses, en prenant en compte les opérations effectuées avant l'intervention des exploitants aériens.

La commission a adopté l'article sans modification.

I. DES RÈGLES INTERNATIONALES APPLICABLES, MAIS NON TRANSPOSÉES EN DROIT FRANÇAIS

Le transport de marchandises dangereuses [TMD] s'effectue par différentes voies : routière, ferroviaire, fluviale, maritime et aérienne. Afin de permettre la circulation des marchandises dangereuses entre pays, des normes internationales, européennes et nationales visent à prévenir les risques pour les personnes, les biens et l'environnement.

Dans le domaine aérien, la définition d'une marchandise dangereuse figure au chapitre 1 er de l'annexe 18 de la convention relative à l'aviation civile internationale dite convention de Chicago . Il s'agit de « matières ou objets de nature à présenter un risque pour la santé, la sécurité, les biens ou l'environnement qui sont énumérés dans la liste des marchandises dangereuses des Instructions Techniques ou qui sont classées conformément à ces Instructions ».

Les classes de marchandises dangereuses sont les suivantes :

Classe 1 : Matières et objets explosibles ;

Classe 2 : Gaz ;

Classe 3 : Liquides inflammables ;

Classe 4 : Matières solides inflammables, matières sujettes à l'inflammation spontanée et matières qui, au contact de l'eau, dégagent des gaz inflammables ;

Classe 5 : Matières comburantes et peroxydes organiques ;

Classe 6 : Matières toxiques et matières infectieuses ;

Classe 7 : Matières radioactives ;

Classe 8 : Matières corrosives ;

Classe 9 : Matières et objets dangereux divers.

L'annexe 18 de la Convention de Chicago relative à l'aviation civile internationale, complétée par les instructions techniques de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI), définit les modalités de transport des marchandises dangereuses en matière de sécurité.

Ces dispositions, qui constituent la référence au niveau mondial, ne sont pas d'application directe. Le règlement [UE] 965/2012 relatif aux opérations aériennes en a rendu l'application obligatoire pour les exploitants aériens, mais ceci ne concerne pas les autres acteurs du transport des marchandises dangereuses par voie aérienne que sont, par exemple, les expéditeurs, les emballeurs.

La convention de Chicago relative à l'aviation civile internationale exclut de son champ d'application les aéronefs d'État utilisés dans des services militaires, de douane ou de police. Ces aéronefs ne sont pas non plus soumis aux règles portant sur le transport des marchandises dangereuses fixées par le règlement (UE) n° 965/2012. Les aéronefs militaires et étatiques n'entrent donc ni dans le champ d'application des règles de l'OACI, ni dans le champ des règlements européens relatifs à l'aviation civile.

Dans le droit français en vigueur, la section relative au transport des marchandises dangereuses de la partie législative du code des transports (section 1, chapitre II, titre V, livre II, première partie) ne contient aucune disposition relative au transport de marchandises dangereuses par voie aérienne .

Le transport de marchandises dangereuses effectué par les aéronefs militaires et les aéronefs appartenant à l'État et exclusivement affectés à un service public, mentionnés à l'article L. 6100-1 du code des transports, est, pour sa part, réalisé selon des règles particulières aux autorités employant ces aéronefs.

II. INTÉGRER LE TRANSPORT AÉRIEN DE MARCHANDISES DANGEREUSES DANS LE DISPOSITIF DU CODE DES TRANSPORTS DÉJÀ EXISTANT POUR LES MODES TERRESTRES ET MARITIMES

L'article 5 du projet de loi prévoit d'intégrer le transport des marchandises par voie aérienne dans le dispositif législatif en vigueur pour les transports par voie routière, ferroviaire et fluviale . La mesure envisagée prévoit la création de nouvelles dispositions qui seront codifiées dans la première partie « dispositions communes » de la partie législative du code des transports.

Ceci permettrait d'étendre, par arrêté, aux marchandises dangereuses transportées par voie aérienne la nomenclature des marchandises dangereuses fixant les conditions de préparation des expéditions, d'emballage, de marquage et d'étiquetage, ainsi que les exigences de visites et d'épreuves des emballages et la liste des matières exclues du transport ( article L. 1252-1 du code des transports).

L'article 5 modifie par ailleurs l'article L. 1252-2 du code des transports afin de permettre aux agents de l'État, aux organismes ou aux personnes que le ministre chargé de l'aviation civile a habilités à l'effet d'exercer les missions de contrôle au sol et à bord des aéronefs de constater les infractions afférentes au transport de marchandises dangereuses par voie aérienne.

La modification de l'article L. 1252-5 du code des transports permet également d'étendre au secteur aérien le dispositif de sanctions pénales en vigueur au niveau national pour les infractions aux règles relatives au transport de marchandises dangereuses, et ainsi rendre pleinement effectif le dispositif de sanctions que les États membres doivent mettre en place aux termes des dispositions de l'article 131 du règlement (UE) n° 2018/1139.

Comme le précise l'article L. 1252-1 A nouveau introduit par l'article 5, ces dispositions sont sans conséquence sur le transport de marchandises dangereuses effectué par les aéronefs militaires et les aéronefs appartenant à l'État et exclusivement affectés à un service public, qui est effectué selon des règles spécifiques, fixées par les autorités employant ces aéronefs, répondant à leurs besoins et nécessités opérationnels.

III. UNE SOLUTION LÉGISLATIVE CONCISE QUI ÉTEND LES RÈGLES DE SÉCURITÉ EN AMONT OU EN AVAL DU TRANSPORT DES MARCHANDISES DANGEREUSES PAR VOIE AÉRIENNE

La solution législative proposée par le Gouvernement permet d'éviter de dupliquer le dispositif existant pour les autres modes de transports terrestres et maritimes : cet article prévoit simplement d'étendre le dispositif législatif existant de la section 1 du chapitre II du titre V du livre II de la première partie du code des transports au transport des marchandises dangereuses par voie aérienne.

Ce renvoi permet, en outre, d'étendre en amont ou en aval du transport des marchandises dangereuses par voie aérienne l'application des règles détaillées relatives aux conditions dans lesquelles le transport de marchandises dangereuses par aéronefs est autorisé ou limité par souci de sécurité, règles qui ne sont, pour l'heure, applicables qu'aux exploitants aériens en vertu du règlement (UE) n° 965/2012.

En pratique, cet article n'ajouterait aucune nouvelle obligation pour les exploitants aériens pour lesquels, au travers du règlement européen (UE) n° 965/2012, les normes définies par l'OACI sont déjà pleinement applicables . Elle concernerait en revanche les acteurs en amont du transport aérien (expéditeurs, emballeurs, etc.). Pour ces derniers, l'article 5 vise en fait à donner une assise légale à des pratiques de fait déjà généralisées par le biais de processus contractualisés entre les différentes parties. L'absence de transposition de ces exigences dans le droit national se limite aujourd'hui à une fragilité d'ordre juridique en cas de procédures liées à des contestations, des incidents ou des accidents .

La commission a adopté l'article 5 sans modification.

Article 6 - Achèvement de la transposition de la directive 2009/12/CE sur les redevances aéroportuaires et maintien de la compétence de l'Autorité de régulation des transports (ART) sur les aéroports malgré la baisse de leur trafic en 2020

Cet article vise à achever la transposition de la directive 2009/12/CE sur les redevances aéroportuaires, en ratifiant, avec une modification, l'ordonnance du 24 juillet 2019 relative au régulateur des redevances aéroportuaires, c'est-à-dire l'Autorité de régulation des transports (ART). Il prévoit également la ratification, sans modification, de l'ordonnance du 16 décembre 2020 destinée à maintenir la compétence de l'Autorité de régulation des transports (ART) sur les aéroports dont le trafic a baissé en raison de la pandémie.

La commission considère que les pouvoirs du régulateur doivent être consolidés et a donc adopté ces dispositions sans les modifier.

Dans le même état d'esprit, elle a également adopté un amendement visant à permettre à l'ART de collecter régulièrement des données économiques et financières auprès des aéroports relevant de son champ de compétence, afin d'exercer efficacement sa mission d'homologation des tarifs des redevances aéroportuaires.

I. DES POUVOIRS DE L'AUTORITÉ DE RÉGULATION DES TRANSPORTS EN MATIÈRE DE REDEVANCES AÉROPORTUAIRES FAISANT L'OBJET DE DEUX ORDONNANCES ET D'UNE DÉCISION DU CONSEIL D'ÉTAT

Deux ordonnances n° 2019-761 du 24 juillet 2019 et n° 2020-1602 du 16 décembre 2020 relatives au régulateur des redevances aéroportuaires, sont visées par l'article 6 du projet de loi qui propose au Sénat de les ratifier tout en tirant les conséquences logiques d'une toute récente décision du Conseil d'État.

La première a pour objet de confier les missions de régulateur des redevances aéroportuaires à l'Autorité de régulation des transports (ART) .

Rappelons que l'article 134 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte) a habilité le Gouvernement à intégrer par ordonnance la régulation des redevances aéroportuaires à une autorité indépendante .

Sur cette base, le Gouvernement a pris l'ordonnance n° 2019-761 du 24 juillet 2019 relative au régulateur des redevances aéroportuaires qui transfère les pouvoirs :

- de l'Autorité de supervision indépendante (ASI), placée auprès du vice-président du Conseil général de l'environnement et du développement durable ;

- à l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), renommée « Autorité de régulation des transports (ART) ».

L'ART dispose donc désormais de deux principaux pouvoirs :

- l'homologation des tarifs des redevances aéroportuaires mentionnées à l'article L. 6325-1 du code des transports pour les aérodromes de plus de 5 millions de passagers annuels et les aérodromes secondaires qui leur sont rattachés ;

- et l' avis conforme rendu au ministre sur les projets de contrats de régulation économique mentionnés à l'article L. 6325-2 du code des transports, entre l'État et ces mêmes aérodromes.

L'article L. 6327-3 du code des transports, relatif à l'avis conforme sur les contrats de régulation économique , prévoit que l'ART vérifie « la juste rémunération des capitaux investis au regard du programme d'investissements, des objectifs de qualité de service, des objectifs d'évolution des charges et des règles comptables d'allocation des actifs, des produits et des charges au périmètre d'activités mentionné à l'article L. 6325-1, tels qu'ils ont été retenus par les parties au contrat ». L'Autorité ne se prononce donc pas sur les règles d'allocation des actifs, des produits et des charges du « périmètre non régulé » retenues dans le contrat de régulation économique.

Ce sujet amène à évoquer la jurisprudence récente du Conseil d'État qui, le 28 janvier 2021, a annulé la dernière phrase du dernier alinéa de l'article R. 224-3-1 du code de l'aviation civile relatif aux redevances aéroportuaires qui confiait au ministre chargé de l'aviation civile un pouvoir d'approbation des règles d'allocation des actifs , des produits et des charges au « périmètre régulé ». Le Conseil d'État a estimé qu'elles restreignaient la capacité de l'autorité de régulation à apprécier, de manière indépendante, la pertinence du niveau des redevances de façon non conforme aux objectifs de la directive 2009/12/CE.

Cette décision ne porte pas directement sur l'application de l'article L. 6327-3 du code des transports, mais elle invite à modifier le socle législatif de la disposition réglementaire contestée afin d'assurer sa compatibilité avec le droit de l'Union européenne.

La seconde ordonnance visée par l'article 6 du présent projet de loi prévoit de tenir compte de l'impact de la Covid-19 sur le transport aérien , a et de modifier le critère d'appréciation du seuil de trafic des aéroports définissant le champ de compétence de l'ART.

II. UNE RATIFICATION DE DEUX ORDONNANCES ET UN ÉLARGISSEMENT DES POUVOIRS DE L'ART

L'article 6 vise à ratifier les deux ordonnances décrites ci-dessus tout en élargissant les pouvoirs de l'Autorité de régulation des transports .

Cet article prévoit d'abord la ratification , sans modification , de l'ordonnance n° 2020-1602 du 16 décembre 2020 relative au régulateur des redevances aéroportuaires prise en application du III de l'article 10 de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire. Cette ordonnance a pour objet de maintenir la compétence de l'Autorité de régulation des transports (ART) sur les aéroports malgré la baisse de leur trafic en 2020. En raison de la crise sanitaire de la Covid-19, le trafic des aéroports français pourrait être en 2020 inférieur de plus de 65 % à son niveau de 2019. La reprise du trafic aérien devrait être progressive et il n'est pas attendu que ces aéroports retrouvent leur niveau d'activité antérieur à la crise avant 2023.

Or en application de l'article L. 6327-1 du code des transports, l'ART est compétente pour la régulation des redevances des aéroports dont le trafic annuel a dépassé 5 millions de passagers au cours de l'année civile précédente. Afin d'assurer la stabilité de la régulation des principaux aéroports français , l'ordonnance a modifié l'article L. 6327-1 du code des transports en étendant la compétence de l'ART aux aéroports dont le trafic annuel a dépassé cinq millions de passagers au cours de l'une des cinq années précédentes et à leurs aéroports satellites.

On peut se féliciter que la rédaction retenue corresponde à celle adoptée par le Sénat à l'article 3 quaterdecies du projet de loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire . Cet article n'avait cependant pas été maintenu par l'Assemblée nationale dans le texte final 9 ( * ) .

L'article 6 propose ensuite de ratifier l'ordonnance n° 2019-761 du 24 juillet 2019 relative au régulateur des redevances aéroportuaires, tout en modifiant l'article L. 6327-3 du code des transports créé par cette ordonnance et qui concerne l'avis conforme que doit émettre l'ART sur les contrats de régulation économique. L'ART vérifierait ainsi la juste rémunération des capitaux investis au regard du programme d'investissements, des objectifs de qualité de service, et de l'évolution des charges . Le Conseil d'État a approuvé la suppression, proposée par cet article 6, de dispositions qui restreignent, dans une mesure contraire aux objectifs de la directive 2009/12/CE, la capacité de l'Autorité de régulation des transports à apprécier, de manière indépendante, la pertinence du niveau des redevances en cause.

Enfin, pour tirer toutes les conséquences, au niveau législatif, de la décision du Conseil d'État du 28 janvier 2021, le Gouvernement propose d'insérer un nouvel article L. 6327-3-1 dans le code des transports pour doter l'ART d'un pouvoir réglementaire de détermination des principes auxquels doivent obéir les règles d'allocation des actifs, des produits et des charges au périmètre d'activités régulées . Ce pouvoir se matérialiserait par une décision publiée au Journal officiel et doit permettre de garantir la cohérence et l'homogénéité entre les aéroports pour l'édiction des règles comptables par les exploitants.

III. DES POUVOIRS DU RÉGULATEUR DEVANT ÊTRE CONSOLIDÉS

Au cours des auditions, il est apparu que cet article porte sur un sujet qui, malgré la décision du Conseil d'État et le point d'équilibre qu'elle définit, continue de soulever des divergences de vues entre le Gouvernement, le régulateur et les opérateurs . L'affectation de certaines charges ou recettes au « secteur régulé » ou au « secteur non régulé » peut par exemple donner lieu à des appréciations ou arbitrages différents : il en va ainsi d'un couloir emprunté par les passagers pour se rendre en salle d'embarquement, mais qui permet également l'accès à des commerces « duty free ».

L'article 6 du projet de loi vise à tirer les conséquences de la décision du Conseil d'État du 28 janvier 2021 qui reconnait que la détermination des principes de l'allocation des actifs, des produits et des charges au périmètre « régulé » des aéroports revient à l'Autorité de régulation des transports.

Certains aéroports craignent que cette évolution de la norme génère de l'incertitude dans la régulation économique et souhaitent se prémunir contre d'éventuelles évolutions et contracycliques . Le Gouvernement répond à cette objection en estimant que l'introduction par le présent projet de loi de l'article L. 6327-3-1 permettrait de clarifier la répartition des compétences entre le ministre chargé de l'aviation civile et le régulateur des redevances aéroportuaires, dans le strict respect de la décision du Conseil d'État.

Certains aéroports souhaiteraient également que la définition du périmètre régulé soit fixée au niveau législatif, en imposant de manière expresse le respect par l'ART du système de « double caisse » en redoutant que la compétence nouvelle attribuée à l'ART fragilise celle du ministre chargé de l'aviation civile pour déterminer le périmètre « régulé » des aéroports. Le Gouvernement, qui ne partage pas cette analyse, rappelle que selon l'article L. 6325-1 du code des transports le périmètre « régulé » est « précisé par voie réglementaire pour chaque aérodrome » attribuant sans ambiguïté la compétence de sa détermination au Gouvernement . Les profits du périmètre non régulé ne pourront donc pas être pris en compte dans la détermination des redevances aéroportuaires . Une telle contribution est précisément exclue par l'arrêté du 16 septembre 2005 relatif aux redevances pour services rendus sur les aérodromes. L'application des principes d'allocation définis par l'ART pourra certes conduire à des évolutions du calcul de la rentabilité du périmètre « régulé ». Celles-ci sont inhérentes à l'exercice de la compétence que le Conseil d'État a reconnue à l'ART en application du droit européen, mais elles resteront de second ordre par rapport à la définition de ce périmètre.

Pour leur part, les compagnies aériennes rappellent l'importance du contrôle des règles d'allocation d'actifs , sans lequel on ne peut pas écarter le risque qu'un aéroport disposant d'un important pouvoir de marché utilise une méthodologie qui conduirait à allouer le maximum de coûts aux activités aéronautiques et, par suite, à imposer aux compagnies aériennes des montants de redevances trop élevés. Elles estiment que l'article 6 du présent projet de loi est de nature à limiter les oppositions récurrentes entre aéroports et compagnies aériennes sur ce point .

La commission considère que les pouvoirs du régulateur doivent être consolidés et a donc adopté ces dispositions sans les modifier. Dans le même état d'esprit, elle a également adopté un amendement COM-31 visant à permettre à l'ART de collecter régulièrement des données économiques et financières auprès des aéroports relevant de son champ de compétence, afin d'exercer efficacement sa mission d'homologation des tarifs des redevances aéroportuaires.

La commission a adopté l'article 6 ainsi modifié.

Article 7 - Organisation des services aériens sur les liaisons soumises à obligations de service public

Cet article vise à élargir aux liaisons européennes -- et non plus aux seules liaisons intérieures -- la possibilité offerte aux collectivités de se voir déléguer l'organisation de services de transport aérien soumis à des obligations de service public (OSP), conformément à l'article 16 du règlement (CE) n° 1008/2008.

La commission a adopté cet article qui retranscrit fidèlement la proposition formulée en 2019 par la mission d'information consacrée aux lignes sous OSP .

I. LA POSSIBILITÉ OFFERTE AUX COLLECTIVITÉS DE SE VOIR DÉLÉGUER L'ORGANISATION DE SERVICES DE TRANSPORT AÉRIEN SOUMIS À OSP, LIMITÉE AUX SEULES LIAISONS INTÉRIEURES

Le règlement n° 1008/2008 10 ( * ) permet à la France d'imposer des obligations de service public (OSP) :

- sur une liaison entre un aéroport européen et un aéroport desservant une zone périphérique ou de développement située sur notre territoire ;

- ou sur une liaison à faible trafic à destination d'un aéroport situé sur son territoire.

Ces obligations de service public peuvent se traduire par l'octroi à un transporteur, sélectionné après appel d'offres, de l'exclusivité de l'exploitation de la ligne et d'une compensation financière du déficit encouru dans le cadre de cette exploitation.

Dans ce cadre, l'article L. 6412-4 du code des transports permet à l'État de déléguer à une collectivité territoriale ou à une autre personne publique intéressée l'ayant demandé, tout ou partie de l'organisation des services de transport aérien sur une liaison soumise à OSP. Il limite toutefois sa portée aux seules liaisons nationales , faisant par là même obstacle à la mise en oeuvre par les collectivités de l'ensemble des dispositions rendues possibles par la réglementation européenne.

En pratique, les OSP sur des services aériens réguliers au départ, à destination ou à l'intérieur du territoire français, sont imposées par le ministre chargé de l'aviation civile, sur proposition des collectivités territoriales ou d'autres personnes publiques intéressées, conformément à l'article R. 330-7 du Code de l'aviation civile.

À l'exception de la desserte européenne de Strasbourg, prise en charge conjointement par l'État et les collectivités locales dans le cadre d'un contrat triennal « Strasbourg, capitale européenne », il revient aux collectivités d'organiser les services aériens et de mener l'appel d'offres visant, le cas échéant, à attribuer à un transporteur l'exclusivité sur la ligne, avec une éventuelle compensation financière.

Comme le rappelle le rapport d'information fait au nom de la mission d'information du Sénat sur les transports aériens et l'aménagement des territoires 11 ( * ) , « cette répartition des rôles entre l'État et les collectivités territoriales s'explique puisque les contraintes imposées par les OSP nécessitent d'être proportionnées et adaptées aux besoins locaux . Or, les collectivités territoriales à l'origine de la demande sont bien plus à même de connaître les besoins de leur territoire. La mise en place d'une ligne d'aménagement du territoire répond en effet souvent à une demande du monde économique. La nature du tissu économique et les entreprises présentes sur place conditionnent toutefois le succès de la ligne : seule une connaissance fine du terrain permet de déterminer ces facteurs . »

L'État étant compétent sur l'ensemble des liaisons aériennes, sauf compétences spécifiques attribuées par la loi à certaines collectivités
-- continuité territoriale pour la Corse, liaisons intrarégionales pour les régions depuis la loi NOTRe -- l'organisation et la gestion des lignes sous OSP par les collectivités territoriales reposent sur une délégation prévue à l'article L. 6412-4 du code des transports.

Cette délégation est accordée par décision publiée au Bulletin officiel du ministère en charge de l'aviation civile.

Elle est toutefois restreinte aux seuls services aériens intérieurs au territoire français, et l'État reste compétent pour toute liaison touchant un autre territoire européen.

II. UN ÉLARGISSEMENT DE LA POSSIBILITÉ DE DÉLÉGATION AUX LIAISONS EUROPÉENNES

L'article 7 vise à supprimer la restriction géographique imposée par la loi française par rapport aux dispositions européennes sur les obligations de service public en matière de services aériens.

Il est ainsi proposé de modifier l'article L. 6412-4 du code des transports, afin d'offrir aux collectivités la possibilité de se voir déléguer l'organisation de toute liaison aérienne soumise à obligations de service public.

La référence faite par le droit en vigueur aux services aériens « intérieurs au territoire français » (deuxième alinéa de l'article L.6412-4 du code des transports) serait ainsi remplacée par celle des services « au départ, à destination ou à l'intérieur du territoire français ». Pour garantir la limitation d'une telle mesure aux seules liaisons intraeuropéennes, une référence au règlement (CE) 1008/2008 serait également ajoutée.

III. LA RETRANSCRIPTION D'UNE PROPOSITION DE LA MISSION D'INFORMATION SÉNATORIALE DE 2019 CONSACRÉE AUX LIGNES SOUS OSP

La mission d'information sénatoriale de 2019 avait préconisé l'ouverture du droit aux collectivités territoriales d'obtenir une délégation de l'État pour l'organisation de liaisons d'aménagement du territoire vers les États membres de l'Union européenne (proposition n° 19). Cette disposition peut permettre l'émergence de nouvelles liaisons européennes au départ de territoires enclavés et, partant, une amélioration de l'offre de transport pour les particuliers.

La commission accueille donc favorablement cet article qui retranscrit fidèlement la proposition formulée en 2019 par la mission d'information consacrée aux lignes sous OSP .

La commission a adopté l'article 7 sans modification.

Article 8 - Harmonisation du régime de responsabilité des transporteurs aériens

Cet article vise à parachever l'harmonisation du régime de responsabilité civile des transporteurs aériens en droit interne. Il propose d'étendre le régime de responsabilité civile issu de la convention internationale de Montréal du 28 mai 1999 aux transporteurs aériens qui ne sont pas titulaires d'une licence d'exploitation dite « communautaire » délivrée conformément à la réglementation de l'Union européenne.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels, sans modifier le fond du dispositif proposé.

I. UNE CONVENTION DE MONTRÉAL AMÉLIORANT SUBSTANTIELLEMENT L'INDEMNISATION DES VICTIMES D'ACCIDENTS D'AVION, MAIS NE S'APPLIQUANT PAS À CERTAINS VOLS

La convention de Varsovie du 12 octobre 1929 réglemente les rapports entre les transporteurs aériens et leurs passagers en cas d'accident survenant dans le cadre du trafic aérien international. Sa transposition en droit interne a été assurée par une loi du 2 mars 1957, codifiée aux articles L. 421-4 (transports de personnes) et L. 6422-2 à L. 6422-5 (transports de marchandises) du code des transports.

Au fil du temps, la convention de Varsovie est apparue comme mal adaptée au développement de l'industrie du transport aérien et plusieurs de ses dispositions ont été jugées inéquitables à l'égard des passagers ou de leurs ayants droit. En particulier, la convention prévoyait un plafonnement de l'indemnisation des victimes en cas d'accident 12 ( * ) , sauf preuve d'une faute inexcusable du transporteur souvent difficile à démontrer. C'est la raison pour laquelle les États parties à la Convention de Varsovie ont souhaité réformer cet accord et ont abouti à la signature de la convention de Montréal le 28 mai 1999 se substituant à la précédente.

La France a ratifié la convention de Montréal qui est entrée en vigueur le 28 juin 2004. Celle-ci a amélioré très sensiblement l'indemnisation des victimes d'accidents aériens. La convention de Montréal a posé un niveau de responsabilité objective, dite de plein droit, seuil en dessous duquel il n'est pas nécessaire de prouver une faute du transporteur aérien. Ce seuil se chiffre aujourd'hui à 128 821 DTS (droits de tirage spéciaux définis par le Fonds Monétaire International), soit environ 155 000 euros par passager. Sous ce seuil, la responsabilité du transporteur est donc automatiquement engagée pour un dommage, sauf si une faute de la victime est rapportée. Au-delà de ce seuil, le transport aérien peut se défendre en rapportant la preuve qu'il n'a pas commis de faute ou de négligence. Entrée en vigueur au plan international le 3 novembre 2003, et comptant à ce jour 136 États parties, la convention de Montréal a été ratifiée par l'Union européenne en qualité d'organisation régionale d'intégration économique et par ses États membres.

Le règlement européen 889/2002 a incorporé en droit de l'UE les dispositions de cette nouvelle convention internationale de Montréal et en a étendu le champ d'application aux transports aériens intérieurs assurés sur le territoire d'un État membre par un transporteur titulaire d'une licence d'exploitation communautaire. Son considérant 18 invite les États membres à adopter les mesures supplémentaires pour mettre en oeuvre la convention de Montréal dans les domaines non couverts par la réglementation européenne .

En France, certains transports aériens intérieurs ne relèvent pas du droit européen : vols locaux rémunérés au moyen de petits aéronefs en métropole ou outre-mer, transport interne de marchandises et liaisons domestiques dans certaines collectivités territoriales d'outre-mer. Ces derniers restent soumis au droit interne en matière de responsabilité civile, lequel renvoie aujourd'hui à la convention de Varsovie (articles L. 6421-4 et L. 6422-2 du code des transports).

À la différence des vols payants, le transport aérien de personnes à titre gratuit est soumis à un régime propre de responsabilité pour faute, conforté au regard du principe d'égalité, par la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. Civ. 1 ère arrêt n° 974 du 5 juillet 2012).

II. UNE EXTENSION À L'ENSEMBLE DES VOLS COMMERCIAUX DU RÉGIME DE RESPONSABILITÉ CIVILE ISSU DE LA CONVENTION INTERNATIONALE DE MONTRÉAL

L'article 8 opère une uniformisation du régime de responsabilité du transport aérien de passagers à titre onéreux, conformément à la recommandation énoncée au considérant 18 du règlement (CE) n° 889/2002 du Parlement européen et du Conseil du 13 mai 2002, afin de mettre en oeuvre la convention de Montréal pour les transports effectués par les transporteurs dont la licence d'exploitation n'est pas régie par ce règlement.

L'article procède donc à une reformulation de l'article L. 6421-4 (transports de personnes) et à une substitution de la référence à la convention de Varsovie par celle de la convention de Montréal aux articles L. 6422-2 à L. 6422-5 (transports de marchandises) du code des transports.

L'extension projetée, qui répond aux voeux du législateur européen, permettra de mettre fin, dans un souci d'équité, à une situation préjudiciable aux victimes d'accidents aériens survenant à bord de petits aéronefs dès lors qu'ils sont exploités contre rémunération.

Le Gouvernement fait observer que cette harmonisation permettra de réduire la complexité du cadre juridique applicable en matière de responsabilité civile dans le domaine du transport aérien commercial.

En revanche le régime propre de la responsabilité du transport aérien de passagers opéré à titre gratuit est maintenu par l'article 8. Dans ces cas, la preuve d'une faute inexcusable serait, par conséquent, toujours nécessaire pour engager la responsabilité du transporteur aérien. L'article 8 propose toutefois de remanier la rédaction du second alinéa de l'article L. 6421-4 en faisant référence au montant d'indemnisation fixé par la Convention de Montréal. En effet, le premier alinéa de l'article L. 6421-4 fixe aujourd'hui la limite de responsabilité à 114 336 euros sans prévoir de dispositif de révision. Avec la nouvelle rédaction, la limite se trouvera portée à 128 821 DTS, soit environ 150 000 euros. Cette rédaction permettra ainsi d'éviter la cristallisation du montant de l'indemnisation qui résultait de la mention d'une somme exprimée en euros et non soumise à révision périodique par l'actuel article L. 6421-4 du code des transports.

III. UNE AVANCÉE NOTABLE POUR LE DROIT DES PASSAGERS AÉRIENS

Il s'agit d'une avancée notable pour le droit des passagers aériens .

L'étude d'impact du projet de loi signale opportunément que cette avancée pourrait :

- faciliter le droit à réparation pour les victimes d'accidents aériens dans le cadre d'une exploitation commerciale ;

- et alléger le fonctionnement de la justice grâce au nouveau système d'indemnisation institué au plan international basé pour les dommages corporels sur un principe de responsabilité de plein droit jusqu'à hauteur d'un certain niveau et sur la recherche de solutions transactionnelles.

En revanche, les conséquences assurantielles de ce dispositif ne font pas l'objet de développements particuliers et il conviendra de rester attentif à l'évolution des primes d'assurances à la charge de certains opérateurs qui organisent des activités de loisirs payantes comme les baptêmes d'aéroclubs, les vols payants en ULM, montgolfières et parapente.

La commission a adopté deux amendements COM-26 et COM-27 rédactionnels , sans modifier le fond du dispositif proposé.

La commission a adopté l'article 8 ainsi modifié.

Article 9 - Vérification des antécédents et habilitation de personnels intervenant dans le domaine de la sûreté de l'aviation civile

Cet article prévoit, conformément à deux règlements européens récents -- (UE) n° 2019/103 et (UE) n° 2019/1583 -- d'étendre à de nouvelles catégories de personnels intervenant dans le domaine de la sûreté de l'aviation civile les obligations d'effectuer une vérification de leurs antécédents.

La commission a adopté cet article, saluant notamment le choix opportun de soumettre à cette obligation certaines catégories de personnels afin de renforcer la prévention des cyberattaques dans le domaine aérien.

I. Une liste des personnes devant faire l'objet d'une vérification de leurs antécédents complétée au niveau européen.

• Dans le prolongement des attentats du 11 septembre 2001, l'Union européenne [UE] a instauré des règles et des normes en matière de sûreté de l'aviation s'appliquant à tous les États membres de l'UE.

En la matière, le règlement [CE] n° 300/2008 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2008 qui a abrogé et remplacé le règlement initial du 16 décembre 2002 constitue le socle normatif européen. Le règlement n° 300/2008 est complété au niveau européen par des textes d'exécution avec, en particulier, le règlement d'exécution [UE] n° 2015/1998 fixant des mesures détaillées pour la mise en oeuvre des normes dans le domaine de la sûreté de l'aviation civile.

Des mesures plus strictes que les normes européennes peuvent être mises en oeuvre au niveau national, mais ne peuvent en aucun cas être moins strictes.

• Pour vérifier les antécédents des personnels du secteur aérien , l'annexe au règlement d'exécution n° 2015/1998 prévoit actuellement que :

- doivent avoir passé avec succès la vérification de leurs antécédents , certaines catégories de personnels du secteur aérien, en particulier les membres d'équipage, les titulaires d'une carte d'identification aéroportuaire, les personnes recrutées pour l'inspection/filtrage ou d'autres contrôles de sûreté, les instructeurs dispensant des formations en matière de sûreté de l'aviation civile et les validateurs de sûreté aérienne de l'Union européenne ;

- et doivent répondre à la même exigence ou avoir fait l'objet d'un contrôle préalable à l'embauche , d'autres catégories de personnels. C'est le cas, par exemple, des personnes disposant d'un accès non accompagné au fret ou au courrier aérien ayant fait l'objet des contrôles de sûreté requis.

L'annexe précitée du texte européen précise que, concrètement, la vérification des antécédents doit au moins établir l'identité de la personne, prendre en considération le casier judiciaire, les emplois, les études et les interruptions d'activité au cours des cinq dernières années.

• En droit français, ces normes sont principalement intégrées à l'article R. 213-4-5 du code de l'aviation civile , qui prévoit que cette vérification est effectuée par l'employeur de la personne ou l'organisme de formation.

La réglementation de l'Union européenne n'impose actuellement pas que les personnels concernés fassent l'objet d' enquêtes administratives. Cependant, la France a fait le choix, il y a plusieurs années, de soumettre certaines catégories de personnels du secteur aérien à de telles enquêtes. Celles-ci sont réalisées dans le cadre d'une procédure d'habilitation , définie par l'article L. 6342-3 du code des transports : certains personnels travaillant en lien avec l'aérien doivent être habilités par l'autorité administrative, c'est-à-dire le préfet exerçant les pouvoirs de police sur l'aérodrome concerné ou le préfet territorialement compétent. L' enquête administrative peut nécessiter de consulter le bulletin n° 2 du casier judiciaire ainsi que les bases de données à caractère personnel gérées par la police ou la gendarmerie nationales.

Sont ainsi actuellement soumises à l'obligation de détenir cette habilitation les personnes ayant accès aux zones de sûreté à accès réglementé des aérodromes ou aux approvisionnements de bord sécurisés, ainsi que celles ayant accès au fret, aux colis postaux ou au courrier postal .

• Une évolution récente de la réglementation européenne a modifié les obligations en matière de vérification des antécédents, en créant de nouvelles dispositions qui entreront en vigueur le 31 décembre 2021.

Le règlement d'exécution n° 2019/103 a introduit une distinction entre deux types de vérification des antécédents :

- une vérification ordinaire qui reprend les exigences existantes (identité de la personne, casier judiciaire, emplois, études et interruptions au cours des cinq dernières années) ;

- et une vérification renforcée des antécédents qui ajoute la prise en considération des informations des services de renseignement et de toute autre information pertinente dont les autorités nationales disposent, ce qui correspond à la procédure d'habilitation prévue par l'article L. 6342-3 du code des transports dans sa rédaction actuelle.

Conformément à cette modification de la réglementation européenne, devront être soumises à une vérification renforcée de leurs antécédents, à compter du 31 décembre 2021 :

- les personnes titulaires d'une carte d'identification de membre d'équipage, employées comme membres d'équipage par un transporteur aérien, permettant l'accès de ces personnes en zone de sûreté à accès réglementé ;

- les personnes titulaires d'une carte d'identification aéroportuaire, permettant l'accès de ces personnes en zone de sûreté à accès réglementé ;

- les personnes recrutées pour mettre en oeuvre ou être responsables de la mise en oeuvre de l' inspection/filtrage , du contrôle d'accès ou d'autres contrôles de sûreté dans une zone de sûreté à accès réglementé ;

- les instructeurs dispensant des formations en matière de sûreté de l'aviation civile ;

- et les validateurs de sûreté aérienne de l'Union européenne.

En revanche, cette modification opérée par le règlement d'exécution n° 2019/103 laisse le choix d'opter pour une vérification ordinaire ou une vérification renforcée des antécédents pour les personnes suivantes :

- celles qui sont recrutées pour mettre en oeuvre ou conduire les dispositifs de l'inspection/filtrage, du contrôle d'accès ou d'autres contrôles de sûreté ailleurs que dans une zone de sûreté à accès réglementé ;

- les personnes disposant d'un accès non accompagné au fret aérien et au courrier aérien, au courrier des transporteurs aériens et au matériel des transporteurs aériens, aux approvisionnements de bord et aux fournitures destinées aux aéroports qui ont fait l'objet des contrôles de sûreté requis .

La liste de catégories de personnels pour lesquelles le choix est donné d'opter pour une vérification ordinaire ou une vérification renforcée des antécédents a été complétée par le règlement d'exécution n° 2019/1583 qui a introduit une nouvelle catégorie qui ne faisait jusqu'alors l'objet d'aucune obligation de vérification des antécédents ou de contrôle préalable à l'embauche dans le règlement d'exécution n° 2015/1998 : les personnes ayant des droits d'administrateur ou un accès non surveillé et illimité aux données et systèmes de technologies de l'information et de la communication critiques utilisés aux fins de la sûreté de l'aviation civile.

En outre, le règlement d'exécution n° 2019/1583 prévoit que les vérifications des antécédents devront faire l'objet d'un renouvellement à intervalles réguliers ne dépassant pas douze mois pour les vérifications renforcées des antécédents, ou trois ans pour les vérifications ordinaires des antécédents.

II. SOUMETTRE À VÉRIFICATION RENFORCÉE LES INSTRUCTEURS DE SÉCURITÉ DE L'AVIATION CIVILE AINSI QUE LES PERSONNES AYANT ACCÈS NON SURVEILLÉ AUX DONNÉES NUMÉRIQUES.

Cet article vise à modifier le code des transports pour soumettre au principe d'une vérification renforcée de leurs antécédents, en particulier par la réalisation d'enquêtes administratives, deux nouvelles catégories de personnes :

- les instructeurs dispensant des formations en matière de sûreté de l'aviation civile. Si certains instructeurs font déjà l'objet d'enquêtes administratives réalisées dans le cadre de la procédure d'habilitation, définie à l'article L. 6342-3 du code des transports s'agissant de ceux « ayant accès aux zones de sûreté à accès réglementé des aérodromes », ce n'est pas le cas de ceux qui n'ont pas besoin d'avoir accès à ces zones ;

- et les personnes ayant des droits d'administrateur ou un accès non surveillé et illimité aux données et systèmes de technologies de l'information et de la communication critiques utilisés aux fins de la sûreté de l'aviation civile. Au vu du risque que représentent la menace interne et les cybermenaces pour la sûreté de l'aviation civile, il a été décidé de soumettre ces personnes à une vérification renforcée de leurs antécédents.

Pour ce faire, l'article 9 opère un réaménagement de l'article L. 6342-3 existant du code des transports , relatif à la délivrance d'habilitations préfectorales. Les personnes actuellement mentionnées à cet article sont les personnes accédant aux zones de sûreté à accès réglementé des aérodromes et les personnes qui accèdent à des éléments ayant vocation à être transportés par voie aérienne. Il est donc nécessaire de modifier l'article L. 6342-3 du code des transports pour élargir cette obligation d'habilitation aux instructeurs et aux personnes ayant des droits d'administrateur ou un accès non surveillé et illimité aux données et systèmes de technologies de l'information et de la communication critiques utilisés aux fins de la sûreté de l'aviation civile.

Par ailleurs, dans la mesure où ces dispositions seront applicables sur l'ensemble du territoire national, y compris en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna, à Saint-Barthélemy et à Saint-Pierre-et-Miquelon, l'article 9 modifie en conséquence des articles L. 6733-3, L. 6753-2, L. 6763-6, L. 6773-7 et L. 6783-7 du code des transports relatifs à ces collectivités. L'article 9 prévoit enfin que ces dispositions s'appliqueront à compter du 31 décembre 2021 , date à laquelle les nouvelles obligations précitées du règlement d'exécution n° 2015/1998 du 5 novembre 2015 entreront en vigueur.

L'étude d'impact précise enfin qu'il n'apparaît pas nécessaire de modifier l'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure relatif aux enquêtes administratives. En effet, cet article qui mentionne « les décisions administratives de recrutement, d'affectation, de titularisation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation, prévues par des dispositions législatives ou réglementaires, concernant (...) les emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense » couvre d'ores et déjà les nouvelles catégories de personnes concernées par la mesure envisagée.

III. LE SOUCI DE PRÉVENTION DES CYBERATTAQUES DANS LE DOMAINE AÉRIEN JUSTIFIANT LA TRANSPOSITION DE NOUVELLES OBLIGATIONS DE VÉRIFICATION DES ANTÉCÉDENTS DE CERTAINS PERSONNELS

Au vu du risque que représentent la menace interne et les cybermenaces pour la sûreté de l'aviation civile, il a été décidé de soumettre les personnes ayant des droits d'administrateur ou un accès non surveillé et illimité aux données et systèmes de technologies de l'information et de la communication critiques utilisés aux fins de la sûreté de l'aviation civile à une vérification renforcée de leurs antécédents.

La commission salue ce choix opportun, guidé par un souci de prévention des cyberattaques dans le domaine aérien.

La commission a adopté l'article 9 sans modification.

Article 10 - Sanctions pénales de l'intrusion en zone « côté piste » d'un aéroport

Cet article vise à renforcer les sanctions applicables aux intrusions illégales en zone sensible aéroportuaire.

La commission a adopté cet article, assorti de corrections rédactionnelles, considérant que le droit national actuel est aujourd'hui insuffisamment dissuasif à l'égard des intrusions dans la zone la plus sensible des aéroports et que la modification proposée rapproche, en la matière, la France de la moyenne européenne.

I. UN DROIT NATIONAL INSUFFISAMMENT DISSUASIF À L'ÉGARD DES INTRUSIONS DANS LA ZONE LA PLUS SENSIBLE DES AÉROPORTS

• À la suite des attentats du 11 septembre 2001, l'Union européenne (UE) a mis en place des règles communes en matière de sûreté de l'aviation qui s'appliquent à tous les États membres de l'UE. Il s'agit essentiellement du règlement (CE) n° 300/2008 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2008, toujours en vigueur et de ses textes d'exécution 13 ( * ) .

Chaque État membre décline ensuite ces normes dans son dispositif normatif national, avec la possibilité d'instaurer des mesures plus strictes, mais en aucun cas plus indulgentes.

S'agissant du contrôle d'accès aéroportuaire, on distingue deux zones :

-- le « côté ville », librement accessible (parcs de stationnement, voiries extérieures, espaces à caractère commercial, zones d'accueil, banques d'enregistrement et salles de livraison bagages le cas échéant) ;

-- le « côté piste » dont l'accès est réglementé. On y retrouve des espaces tels que les salles d'embarquement, les passerelles, les pistes et zones de circulation de l'aéroport, les zones de tri des bagages au départ, les salles de livraison bagages le cas échéant, ainsi que des espaces dits de sûreté.

Le règlement n° 300/2008 prévoit que l'accès au côté piste est réglementé de manière à empêcher l'accès de personnes et de véhicules non autorisés à ces zones. Le règlement d'exécution n° 2015/1998 précise que « l'accès au côté piste n'est autorisé qu'aux personnes et aux véhicules qui ont une raison légitime de s'y trouver (...) . Toute personne doit être munie d'une autorisation pour se voir autoriser l'accès au côté piste ».

• En droit national, ces normes sont intégrées à l'article L. 6342-2 du code des transports, qui prévoit que l'accès au « côté piste » de l'aérodrome et la circulation dans cette zone sont soumis à autorisation . Celle-ci est délivrée par le préfet exerçant les pouvoirs de police sur l'aérodrome, conformément à l'article R. 213-3-2 du code de l'aviation civile.

En matière de sanctions , conformément à l'article 21 du règlement n° 300/2008 du 11 mars 2008, il appartient à chaque État membre de l'Union européenne de déterminer le régime applicable aux violations des dispositions de ce règlement et d'assurer l'application des sanctions. Ces sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives .

En droit français, les mesures de sûreté de l'aviation civile figurent dans le code des transports (articles L. 6341-1 et suivants) et, au niveau réglementaire, dans le code de l'aviation civile (articles R. 213-1-1 et suivants).

Les sanctions pénales sont définies par l'article R. 282-3 (1°) du code de l'aviation civile qui prévoit une amende pour les contraventions de la quatrième classe (135 euros) pour toute personne pénétrant à l'intérieur de la zone « côté piste » sans raison légitime de s'y trouver.

L'article R. 217-3 (I-d) du même code prévoit également des sanctions administratives , avec une amende d'un montant maximal de 750 euros. L'autorisation d'accès peut également être suspendue. Enfin, le fait d'accéder à la zone « côté piste » avec l'autorisation d'accès, mais sans que celle-ci soit portée de façon apparente, est passible d'une amende administrative d'un montant de 150 euros.

• Dans les faits, depuis 2015, au moins 91 intrusions ont été relevées sur 39 aéroports différents, dont les deux principales plateformes françaises, Paris-Charles-de-Gaulle et Paris-Orly. Au-delà d'intrusions opérées par des individus isolés, des intrusions collectives en zone côté piste pour des motifs revendicatifs se multiplient depuis plusieurs années. Ainsi, récemment, des intrusions en zone « côté piste » pour de tels motifs ont eu lieu le 26 juin 2020 sur l'aéroport de Paris-Orly, le 3 octobre 2020 sur les aéroports de Paris-Roissy et de Bordeaux, et encore le 5 mars 2021 de nouveau sur l'aéroport de Paris-Roissy avec une action qui a conduit à la dégradation d'un avion de la compagnie Air France .

Ce phénomène récent tient à l'impact de telles actions, qui permettent aux auteurs de telles intrusions d'obtenir un large relais médiatique. Il tient aussi au fait que certains mouvements visent spécialement les aéroports dans le cadre de leurs revendications, comme l'illustre le mouvement « marchons sur les aéroports le 3 octobre 2020 » lancé par des associations appelant à la diminution drastique du trafic aérien et à une reconversion du secteur aéronautique, et qui s'est traduit le 3 octobre 2020 par des intrusions en zone « côté piste » sur les aéroports de Paris-Roissy et de Bordeaux.

Ce type d'événements semble facilité par le fait que les sanctions actuellement pratiquées pour une telle intrusion en zone « côté piste » ne sont pas véritablement dissuasives.

Par ailleurs, outre les considérations de sûreté, ces intrusions sont susceptibles de causer des accidents graves de personnes entraînant la mise en danger des auteurs eux-mêmes, des personnels de piste, ainsi que des passagers et personnels navigants présents dans les aéronefs circulant sur les pistes et les taxiways.

II. LA CRÉATION D'UN DÉLIT D'INTRUSION CÔTÉ PISTE D'UN AÉROPORT QUI SUCCÉDERAIT À UNE SIMPLE INFRACTION CONTRAVENTIONNELLE

• L'article 10 a pour objectif de satisfaire l'article 21 du règlement n° 300/2008 du 11 mars 2008, qui exige, en matière de sécurité aéroportuaire, des sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives ».

Le Gouvernement propose ainsi de renforcer le régime de sanctions existant en faisant observer que le dispositif national de sûreté fait l'objet d'inspections de la Commission européenne qui pourrait relever une déficience française dans ce domaine.

Par analogie avec le régime applicable aux intrusions en zone d'accès restreint d'un port 14 ( * ) , le Gouvernement propose donc de punir l'intrusion délibérément non autorisée en zone « côté piste » d'un aéroport, en élevant cette infraction au niveau du délit .

• Cet article 10 vise ainsi à créer, dans la partie législative du code des transports, une nouvelle sous-section consacrée à la sûreté aéroportuaire et composée de trois articles nouveaux qui prévoient de :

- punir de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende le fait de s'introduire sans autorisation en zone « côté piste » d'un aéroport (article L. 6372-11) ;

- punir d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende cette infraction lorsqu'elle est commise en réunion et/ou lorsqu'elle est précédée, accompagnée ou suivie d'un acte de destruction, de dégradation ou de détérioration (article L. 6372-12) ;

- et de punir des mêmes peines la tentative des délits prévus aux deux alinéas précédents (article L. 6372-13).

En pratique, conformément aux articles R. 213-3-1 et R. 282-1 du code de l'aviation civile, relatifs au régime actuel de sanctions en cas d'intrusion en zone « côté piste », les infractions et manquements font l'objet de constats écrits dressés par les militaires de la gendarmerie, les fonctionnaires de la police nationale, les agents des douanes ainsi que par les fonctionnaires et agents spécialement habilités et assermentés en application de l'article L. 6372-1 du code des transports.

Les nouvelles sanctions pénales prévues par l'article 10 du projet de loi relèveraient également de l'article L. 6372-1 qui prévoit que : « Sans préjudice de la compétence reconnue à d'autres fonctionnaires et aux militaires de la gendarmerie par les lois et règlements en vigueur, les infractions aux dispositions du chapitre I er et du chapitre II du présent titre peuvent être constatées par des procès-verbaux dressés par tous agents civils et militaires habilités à cet effet et assermentés » .

Enfin, dans la mesure où ces dispositions seront applicables sur l'ensemble du territoire national, y compris en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et -- Futuna, à Saint-Barthélemy et à Saint-Pierre-et-Miquelon, l'article 10 prévoit en conséquence, dans le code des transports, la création de cinq nouveaux articles (L 6733-6, L. 6753-4, L. 6763-10, L. 6773-11 et L. 6783-14) et la modification des articles L. 6763-1 et L. 6773-1 et L. 6783-1 relatifs à ces collectivités.

III. UN RENFORCEMENT QUI RAPPROCHE LA FRANCE DE LA MOYENNE EUROPÉENNE

Cet article, qui prévoit le renforcement des sanctions pénales punissant l'intrusion en zone « côté piste » d'un aéroport serait bien entendu applicable à toute personne non autorisée et a pour but de protéger les passagers ainsi que la communauté aérienne .

Il fait cependant l'objet de prises de position hostiles de la part d'organisations de défense de l'environnement. Rappelons que le renforcement de telles sanctions a fait l'objet d'une démarche similaire à l'automne 2020, puisque le Gouvernement a déposé un amendement lors du débat en commission à l'Assemblée nationale de la proposition de loi « pour une sécurité globale préservant les libertés ». Cet amendement, qui a finalement été déclaré irrecevable car considéré comme un « cavalier législatif », avait toutefois été identifié par des organisations de défense de l'environnement. Des militants ont fait part de leur mécontentement sur les réseaux sociaux à l'égard de cette initiative qu'ils jugent punitive à leur encontre en faisant référence à leurs actions médiatiques.

On constate cependant que les sanctions envisagées à cet article pour l'aéroportuaire correspondent à celles qui sont prévues pour les intrusions sans autorisation dans une zone d'accès restreint d'un port .

On peut également signaler que les six mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende prévus pour protéger les zones sensibles portuaires et aéroportuaires représentent la moitié du niveau de sanction atteint en cas d'intrusion non autorisée dans l'emprise d'installations nucléaires (article L. 1333-13-12 du code de la défense). La peine doublerait si le délit est commis en réunion dans un port ou un aéroport tandis qu'elle triple si l'intrusion concerne une installation nucléaire.

S'agissant des comparaisons européennes, l'intrusion non autorisée dans une zone aéroportuaire sensible peut faire l'objet en Espagne de 4 500 000 euros d'amende pour une personne morale, 10 ans de prison en Allemagne, et 6 mois de prison aux Pays-Bas ainsi qu'en Italie.

Considérant que le droit national actuel est aujourd'hui insuffisamment dissuasif à l'égard des intrusions dans la zone la plus sensible des aéroports et que la modification proposée rapproche, en la matière, la France de la moyenne européenne, la commission a ainsi adopté trois amendements rédactionnels sans modifier le fond du dispositif proposé.

Comparaisons européennes sur le délit d'intrusion
en zone d'accès restreint d'un aérodrome

Pays

Régime de sanctions

Espagne

Sanction administrative

L'article 48.3 de la loi n° 21/2003 sur la sécurité et la sûreté aérienne classifie l'accès non autorisé en zone d'accès restreint ou en zone d'opération d'un aéroport comme une infraction punie de 90 001 à 225 000 € d'amende pour une personne physique et de 250 001 à 4 500 000 € d'amende pour une personne morale.

Sanction pénale

Dans le cas où l'intrusion empêche le bon fonctionnement du trafic aérien, une peine de prison peut être prononcée sur la base des articles 20 et 21 de la loi pénale 209/1964 de la navigation aérienne.

Suisse

L'article 91 de la loi fédérale sur l'aviation prévoit qu'est puni de 20 000 CHF (soit environ 18 000 €) quiconque, intentionnellement, « pénètre dans la zone de sûreté à accès réglementé d'un aérodrome sans y être autorisé ou en contournant ou en déjouant les contrôles de sûreté ».

En cas d'infraction grave, l'amende peut être portée à 40 000 CHF (soit environ 36 000 €).

Allemagne

Le paragraphe 315 du code pénal allemand punit tout acte d'intervention pouvant mettre en danger le trafic aérien de 6 mois à 10 ans de prison.

Par ailleurs, un acte d'intervention visant spécifiquement le trafic aérien est puni d'une peine de prison allant de 5 ans à la perpétuité.

Les délits contre l'aviation civile sont sanctionnés par une peine d'amende pouvant aller jusqu'à 30 000 €.

Pays-Bas

L'article 62a de la loi sur l'aviation néerlandaise prévoit une peine de 3 mois maximum de prison ou une amende de 4 350 € pour les personnes qui entrent ou se maintiennent illégalement sur un aérodrome.

Une personne qui accède à un aérodrome par des moyens illégaux (dégradation des clôtures, escalade, fausse clef...) est punie de 6 mois d'emprisonnement maximum ou d'une amende de 8 700 €.

La peine de prison pour chacune de ces infractions peut être augmentée d'un tiers si elle est commise en réunion.

Pays

Régime de sanctions

Pologne

L'article 210 des dispositions pénales de la loi sur l'aviation civile prévoit que la violation des règles de sécurité et de sûreté des vols ou la violation des mesures de contrôle d'accès et l'accès par des moyens illégaux à des zones protégées sont punis d'une amende.

Conformément au code pénal, cette amende peut aller jusqu'à 250 000 € en fonction de la gravité de l'infraction.

Dans le cas où l'intrusion fait courir un risque pour la sécurité de l'aviation, la partie XXI du code pénal prévoit que « créer un danger immédiat de catastrophe aérienne est puni de 6 mois à 8 ans de prison. En l'absence d'intention malveillante, l'infraction est punie au maximum de 3 ans de prison ».

Italie

L'article 1161 du code de la navigation prévoit que l'occupation illégale d'un espace dédié à l'aviation est passible de 6 mois d'emprisonnement ou 516 € d'amende. Cette amende peut être portée à 6 197 € si la personne a contrevenu aux règles de police pour s'introduire sur la zone.

Royaume--Uni

La section 39 de la loi sur l'aviation civile de 1982 prévoit une amende maximale de 1 000 GBP (soit environ 1 150 €) pour toute personne s'introduisant illégalement sur un aérodrome.

La section 21C de la loi précitée prévoit, en outre, une amende maximale de 5 000 GBP (soit environ 5 750 €) pour toute personne présente, sans autorisation, dans une zone d'accès restreint.

La section 68 de la loi sur la justice criminelle et l'ordre public prévoit que l'intrusion aggravée est caractérisée si la personne a pour intention d'empêcher l'activité normale, en l'occurrence ici celle du transport aérien, se déroulant sur la zone concernée. Cette infraction est punie de 3 mois de prison et/ou d'une amende de 2 500 GBP (environ 2 870 €).

Source : DGAC

La commission a adopté des amendements COM-29 et COM-30 afin d'opérer des corrections rédactionnelles ainsi qu'un amendement COM-28 de précision, rappelant la possibilité, pour le juge, de moduler la sanction applicable aux intrusions dans le domaine aéroportuaire sensible, dit « côté piste ».

Elle a adopté l'article 10 ainsi modifié .

Article 11 - Constatation d'infractions par les agents des organismes habilités ou les personnes habilitées à exercer des missions de contrôle au sol et à bord des aéronefs

Cet article vise à compléter la liste des personnes chargées de constater les infractions aux dispositions du volet « aviation civile » du code des transports, pour y ajouter les agents des organismes habilités ou les personnes habilitées à exercer des missions de contrôle au sol et à bord des aéronefs.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. UN TRÈS PETIT NOMBRE D'AGENTS HABILITÉS À CONSTATER LES INFRACTIONS

Conformément aux articles L. 6221-4 du code des transports et R. 133-5 du code de l'aviation civile, le ministre chargé de l'aviation civile définit par arrêtés les missions de contrôles au sol et à bord des aéronefs effectuées par des personnes extérieures à l'administration ou des agents d'un organisme habilité . Ces personnes et ces organismes surveillent l' application des exigences techniques applicables en application du règlement (UE) 2018/1139 15 ( * ) .

Outre les officiers de police judiciaire , qui sont habilités à constater les infractions, l'article L. 6142-1 du code des transports désigne d' autres personnes pouvant exercer cette même tâche, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. Parmi ces personnes figurent notamment les personnels navigants effectuant des contrôles en vol pour le compte de l'administration .

En revanche, ces dispositions ne concernent pas les agents des organismes habilités ni l'ensemble des personnes habilitées à exercer des missions de contrôle au sol et à bord des aéronefs en application de l'article L. 6221-4 du code des transports .

Par conséquent, dans le droit en vigueur, plusieurs centaines de personnes investies de fonctions de contrôle au sol et à bord des aéronefs ne peuvent pas constater d'infractions car elles ne peuvent être ni assermentées ni commissionnées à cette fin.

Aujourd'hui, les personnes chargées des contrôles au sol ou à bord des aéronefs peuvent relever des manquements aux règles de sécurité aérienne applicables, et dans certains cas, suspendre la validité de certains documents, ayant pour effet d'interdire de vol un aéronef ou de suspendre l'activité d'un organisme de maintenance des aéronefs. Elles ne peuvent cependant pas établir de procès-verbal d'infraction permettant de déclencher, lorsque c'est justifié, un processus de sanction administrative.

Sur la base des constats qu'ils communiquent aux agents de l'État commissionnés et assermentés , ces derniers peuvent relever des infractions à des fins de sanctions. Un tel processus est générateur de délais et de lourdeur administrative liée à la transmission des dossiers. Par ailleurs, les agents de l'État commissionnés et assermentés n'étant pas eux-mêmes sur le terrain pour faire les constats, un certain nombre de dossiers ne peuvent en définitive pas être traités en tant qu'infractions. Seuls les cas où les infractions se matérialisent par des preuves écrites dans des documents requis réglementairement peuvent actuellement être transmis aux agents assermentés de l'État pour relever des infractions.

Selon l'étude d'impact, les manquements dont la constatation est impossible en dehors d'une présence physique sur site échappent donc aujourd'hui à ce processus. Plus de 80 % des manquements sont de ce fait aujourd'hui impossibles à constater.

II. ÉLARGIR LA CONSTATATION DES INFRACTIONS À DES AGENTS QUI EN FONT AUJOURD'HUI UN SIMPLE « RELEVÉ ».

Le Gouvernement propose de compléter l'article L. 6142-1 du code des transports pour élargir la liste des personnes pouvant être commissionnées et assermentées pour constater les infractions prévues au livre II de la sixième partie « aviation civile » du code des transports. Seraient ainsi intégrés les agents des organismes habilités ou les personnes habilitées par le ministre chargé de l'aviation civile en vertu de l'article L. 6221-4 du code des transports.

La mesure envisagée permettrait aux personnes qui sont au plus proche du terrain d'être assermentées et commissionnées en vue de relever des infractions. Il ne sera ainsi plus nécessaire que les dossiers d'infraction potentielle soient transmis à d'autres agents pour établir les procès-verbaux .

Par ailleurs, dans la mesure où ces dispositions seront applicables sur l'ensemble du territoire national, y compris en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, l'article 11 modifie en conséquence les articles L. 6761-1, L. 6771-1, L. 6781-1 et L. 6791-1 du code des transports relatifs à ces collectivités.

III. LEVER UN VERROU JURIDIQUE AU CONSTAT EFFICACE DES INFRACTIONS PORTANT SUR LES RÈGLES TECHNIQUES DE SÉCURITÉ AÉRIENNE

Le droit en vigueur ne permet pas de relever et de sanctionner efficacement un certain nombre d'infractions techniques aux règles permettant d'assurer la sécurité aérienne. En pratique, plus de 80 % des manquements seraient aujourd'hui impossibles à constater par les trois agents assermentés.

En effet, un certain nombre d'agents en charge du contrôle ne peuvent pas, en raison des limitations imposées par le droit en vigueur « constater les infractions », c'est-à-dire dresser procès-verbal.

Cela concerne en particulier les 150 inspecteurs de surveillance de la société OSAC (organisme pour la sécurité de l'aviation civile), habilitée par le ministre chargé de l'aviation civile. Ces agents surveillent les 9 900 aéronefs français en état de vol, les 390 ateliers de maintenance, 200 organismes de production d'aéronefs ou de pièces d'aéronefs, 35 organismes de formations des mécaniciens aéronautiques, 220 organismes de maintien de navigabilité des aéronefs, tous basés sur le territoire français, et 8 500 mécaniciens.

L'ajout des agents des organismes et des personnes que le ministre habilite au dispositif de commissionnement et d'assermentation permettrait à ces personnes, lorsqu'elles relèvent une non-conformité de sécurité aux règlements européens sur la navigabilité des aéronefs, de constater, le cas échéant, les infractions correspondantes, et d'enclencher un processus de sanction administrative.

La commission a adopté l'article 11 sans modification.

Article 12 - Renforcement du dispositif de sanction des passagers indisciplinés (PAXI)

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à prendre, dans un délai de huit mois, une ordonnance destinée à lutter plus efficacement contre les faits commis par les passagers indisciplinés à l'intérieur d'un aéronef en renforçant les sanctions pénales et en instituant des sanctions administratives.

La commission a adopté l'article sans modification.

I. UN DISPOSITIF DE LUTTE CONTRE LES PASSAGERS PERTURBATEURS D'UNE PORTÉE LIMITÉE

• L'annexe 17 de la convention relative à l'aviation civile internationale 16 ( * ) définit le passager perturbateur - ou « indiscipliné » ou « PAXI » - comme : « passager qui ne respecte pas les règles de conduite dans un aéroport ou à bord d'un aéronef ou qui ne suit pas les instructions du personnel de l'aéroport ou des membres de l'équipage et perturbe de ce fait le bon ordre et la discipline à l'aéroport ou à bord de l'aéronef ».

• L'article L. 6522-3 du code des transports donne au commandant de bord le pouvoir de débarquer toute personne « qui peut présenter un danger pour la sécurité, la santé, la salubrité ou le bon ordre de l'aéronef ».

Cependant, notre droit ne permet pas d'aborder de manière globale des comportements indisciplinés des passagers aériens susceptibles de compromettre le bon déroulement des vols . Dans ce domaine, la réponse pénale sanctionnant les faits les plus graves peut donc sembler lacunaire.

II. UN RENFORCEMENT DU DROIT EN VIGUEUR

• L'article 34 de la Constitution impose de recourir à la loi pour créer :

- un régime pénal spécial, en définissant avec précision les délits et les peines ;

- ainsi qu'un régime de sanction administrative qui peut avoir des incidences sur la liberté d'aller et de venir des individus et sur la liberté contractuelle, en particulier si la concertation prévue débouche sur des interdictions de vol.

• Dans ce cadre, l'article 12 vise à habiliter le Gouvernement à prendre, dans un délai de huit mois, une ordonnance destinée à renforcer les sanctions pénales et à instituer des sanctions administratives à l'égard des passagers indisciplinés.

Cette initiative vise à remédier à la lenteur et au caractère faiblement dissuasif de la réponse pénale aux infractions de gravité moyenne, mais qui induisent des retards et des coûts parfois importants pour les transporteurs et les passagers ; de plus, une infraction mineure peut, par ricochet, avoir des conséquences plus graves en détournant l'attention des équipages.

L'article 12 prévoit d'appliquer des sanctions administratives et pénales aux quatre types de manquements susceptibles de porter atteinte au bon déroulement d'un vol qui ont été identifiés par les opérateurs :

- l'utilisation d'un appareil électronique ou électrique interdite pendant une phase ou la totalité du vol ;

- la méconnaissance de l'interdiction de fumer à bord ;

- l'entrave à l'exercice des missions de sécurité des personnels navigants ;

- le refus d'un passager de se conformer à une instruction de sécurité.

Le Gouvernement fait valoir que ces manquements pour lesquels la réponse pénale est soit absente, soit inopérante, pourraient être plus efficacement réprimés par la mise en place d'un régime de sanctions plus souple, rapide et efficace. Il précise que des mesures permettant d'exclure du transport aérien les personnes commettant certaines infractions ont un effet dissuasif supérieur , ce que confirme l'expérience de certaines compagnies qui appliquent des mécanismes de « liste noire » de passagers, mais qui se limitent nécessairement à la possibilité de faire appel à ces seules compagnies.

Un régime proche de celui instauré par la loi n° 93-1282 du 6 décembre 1993 relative à la sécurité des manifestations sportives qui a mis en place une sanction « d'interdiction de stade » pourrait être institué , d'après les informations communiquées par le Gouvernement.

Ainsi, un régime mixte serait défini avec :

- des sanctions pénales pour les infractions les plus graves ou une aggravation des sanctions pénales existantes ;

- et des sanctions administratives pour les autres.

L'articulation de ces deux régimes devrait faire l'objet de consultations interministérielles. Pour justifier sa demande d'habilitation ainsi que le délai de huit mois, le Gouvernement invoque la nécessité de conduire un travail interministériel approfondi impliquant de nombreux acteurs de la sécurité du transport aérien, de la police, de la gendarmerie, de la justice.

De son côté, le Sénat, qui souhaite être associé à ce processus, ne manquera pas de vérifier que les sanctions administratives proposées répondent aux garanties légales ou jurisprudentielles avec, en particulier, une procédure respectueuse du principe du contradictoire.

III. DISSUADER ET SANCTIONNER LES INCIVILITÉS AÉRIENNES QUI ONT CONNU UNE COURBE ASCENSIONNELLE ET PROTÉGER LES PERSONNELS NAVIGANTS DES AGRESSIONS.

Deux principaux constats résultent des travaux et auditions effectués par le rapporteur.

- D'une part, statistiquement on constate un très fort accroissement des incidents à bord des aéronefs. De 2000 à 2006 une centaine d'incidents par an ont été notifiés ; puis cette moyenne a quintuplé entre 2007 et 2015 ; un nouveau palier a été franchi avec environ 1500 incidents par an de 2016 à 2018 . L'usage de la cigarette a représenté la moitié des événements recensés, l'agressivité liée ou non à l'alcool 25 %, et le refus de se conformer à des consignes de sécurité 14 % ;

- d'autre part, les auditions et les remontées de terrain ont permis de témoigner de la réalité humaine et de la sociologie de ce phénomène d'incivilité aérienne qui a accompagné la montée en puissance du trafic aérien, celui-ci ayant atteint 4,5 milliards de passagers en 2019. Comme l'ont indiqué les organisations syndicales entendues par le rapporteur, il est inadmissible qu'un membre du personnel navigant qui subit une agression violente d'un passager puisse quelques semaines plus tard, voir réapparaître son agresseur sur un vol similaire.

Cet article s'inscrit dans une tendance générale à l'échelle européenne. Ainsi, l'Agence européenne de la sécurité aérienne s'est récemment engagée, avec les États membres de l'Union européenne, à traiter la problématique des passagers indisciplinés à laquelle l'Europe est confrontée.

La commission a adopté l'article 12 sans modification.

CHAPITRE II - Dispositions relatives aux transports terrestres et maritimes
Article 13 - Transposition de la directive 2019/520 du 19 mars 2020 sur les systèmes de télépéage routier

Cet article vise à transposer la directive 2019/520 du 19 mars 2020 concernant l'interopérabilité des systèmes de télépéage routier et facilitant l'échange d'informations relatives au défaut de paiement des redevances routières dans l'Union européenne.

La commission a adopté un amendement visant à corriger une erreur de numérotation.

I. L'ADOPTION D'UN NOUVEAU CADRE EUROPÉEN RELATIF AU TÉLÉPÉAGE

Comme le rappelle l'étude d'impact, le télépéage fait intervenir trois types d'acteurs :

- l'usager de la route ;

- l'exploitant de la route, désigné dans la terminologie communautaire et dans le projet de loi comme le « percepteur de péage » ;

- le prestataire de service de télépéage qui assure l'interface entre l'usager et l'exploitant par la mise à disposition de l'équipement électronique embarqué ainsi que la facturation et la collecte du péage, ensuite reversé à l'exploitant.

Au niveau communautaire , le télépéage a d'abord été régi par la directive 2004/52/CE 17 ( * ) dont l'objet était d'assurer l'interopérabilité des systèmes en précisant les solutions technologiques à utiliser. Ce texte prévoyait également la mise en place d'un service européen de télépéage (SET), complémentaire aux services nationaux. La décision de la Commission 2009/750 relative à la définition du service européen de télépéage et à ses aspects techniques a précisé les droits et obligations des acteurs du SET.

Après une dizaine d'années d'application de la première directive télépéage, la Commission européenne a estimé que, « même si un certain degré d'interopérabilité avait été atteint, il était souhaitable de renforcer l'interopérabilité des systèmes » 18 ( * ) . C'est l'objet de la directive 2019/520 du 19 mars 2019 19 ( * ) qui porte sur :

- l'interopérabilité des systèmes de télépéage et la définition du service européen de télépéage d'une part. Comme l'indique l'étude d'impact, si l'économie du dispositif n'est pas bouleversée, le volume des dispositions contenues dans la directive 2019/520 s'est considérablement accru en comparaison de la directive de 2004 puisqu'elle intègre des dispositions de la décision 2009/750 ;

- le renforcement de la lutte contre la fraude en facilitant l'échange transfrontalier d'informations sur les véhicules et propriétaires fraudeurs d'autre part.

Dans le droit français en vigueur, l'article L. 119-2 du code de la voirie routière dispose que le service européen de télépéage (SET) « concerne » les paiements effectués par les usagers du réseau routier au moyen d'un équipement électronique embarqué. Or, cette définition conduit à réduire le SET au moyen de paiement que serait l'équipement électronique embarqué, ce que l'étude d'impact estime réducteur et en partie inexact. En effet, l'équipement embarqué permet la détection d'un véhicule et le calcul du péage dû mais ne constitue pas un moyen de paiement. Cette définition semble également incomplète puisque la détection du véhicule peut être effectuée par la reconnaissance automatique de la plaque d'immatriculation, ce que consacre la directive 2019/520.

De plus, en l'état actuel du droit, les percepteurs de péage qui constatent un défaut de paiement peuvent interroger le système d'immatriculation des véhicules (SIV) sur le fondement de l'article L. 330-2 du code de la route, afin d'identifier le propriétaire du véhicule. Les percepteurs de péage peuvent ensuite déclencher la procédure transactionnelle définie à l'article 529-6 du code de procédure pénale afin de recouvrer le montant du péage.

II. RÉAMÉNAGER DES DISPOSITIONS DU CODE DE LA VOIRIE ROUTIÈRE ET ÉLARGIR LE CHAMP DE LA RÉGULATION CONFORMÉMENT AU DROIT EUROPÉEN

L'article 13 du projet de loi vise à actualiser les dispositions de la section 1 du chapitre X du titre premier du code de la voirie routière, qui avaient transposé, il y a quinze ans, la directive 2004/52.

Il prévoit quatre nouveaux réaménagements législatifs :

• Il clarifie l'article L. 119-2 pour définir le service européen de télépéage de façon plus précise , comme « le service de péage proposé aux usagers du domaine public routier ou de transbordeurs 20 ( * ) par des prestataires enregistrés dans un État membre de l'Union européenne en qualité de prestataire sur tout ou partie de ce domaine en vertu d'un contrat unique passé avec un prestataire » et renvoie à un décret d'application l'ensemble des prestations qui le composent ;

• L'article L . 119-3 modifié reprendrait l'essentiel du L. 119-2 en vigueur, sa principale innovation étant de conférer aux percepteurs de péage le droit d'obtenir des prestataires les données nécessaires à l'identification des fraudeurs, sans avoir à interroger systématiquement les services de police ou de gendarmerie en application des articles L. 330-2 et R. 330 3 du code de la route. La mise en oeuvre de ce dispositif, qui serait précisée par décret devra respecter les dispositions issues du règlement européen sur la protection des données et de la directive 2016/680, dite « Police-Justice » ;

• L'article L. 119-4 modifié viserait à confier à l'Autorité de régulation des transports un triple rôle dans le fonctionnement du service européen de télépéage : l'exercice d'une mission de conciliation entre les percepteurs de péage et les prestataires du service européen de télépéage (articles 11 et 12 de la directive 2019/520), l'enregistrement des prestataires du service européen de télépéage (article 4 de la même directive), et la tenue du registre électronique du service européen de télépéage (article 21 de la directive).

Le Gouvernement précise que ces trois missions existaient déjà dans le dispositif issu de la directive 2004/52/CE : la mission de conciliation a été exercée par la commission de conciliation du télépéage, instituée par le décret 2012-645 21 ( * ) du 3 mai 2012, jusqu'à sa suppression par le décret n° 2019-1362 22 ( * ) du 16 décembre 2019 tandis que l'enregistrement des prestataires du service européen et la tenue du registre électronique du service européen de télépéage sont actuellement assurés par les services du ministère des transports .

• Enfin, l'article L. 119-5, dans la nouvelle rédaction proposée par l'article 13 du projet de loi, vise à permettre à l'État, aux collectivités territoriales et à leurs groupements d'obtenir des données de trafic de la part des prestataires de service de péage pour les besoins des politiques publiques en matière de mobilité et de transports publics en donnant un caractère anonyme à ces données.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

Le présent article retranscrit les dispositions de la directive 2019/520 du 19 mars 2019 visant d'une part à préciser les droits et obligations des différents acteurs du système européen de télépéage, et d'autre part comportant un volet destiné à faciliter l'échange transfrontalier d'informations en cas de non-paiement d'une redevance par un usager.

Sur ce dernier point, le Conseil d'État a relevé une « sur-transposition » de la directive par le Gouvernement, qui élargit à tous les prestataires de service de péage l'obligation de transmettre aux percepteurs de péage les données nécessaires à l'identification des auteurs des infractions pour défaut de paiement du péage que leurs agents sont habilités à constater. En effet, la directive prévoyait originellement d'étendre cette obligation aux seuls prestataires du service européen de télépéage. Cependant, les auditions menées par le rapporteur ont permis d'établir que ce choix était motivé par une logique d'applicabilité et d'effectivité de la mesure, afin de répondre aux objectifs de lutte contre la fraude de la directive. Cette ouverture à tous les prestataires de péages semble donc cohérente.

L'attribution à l'Autorité de régulation des transports des missions de conciliation, d'enregistrement des prestataires du service européen de télépéage et de tenue du registre électronique du service européen de télépéage semble pertinente au regard de ses prérogatives existantes et de son statut d'organe indépendant. En effet, selon le Gouvernement, ces trois missions se rattachent à la régulation du marché du télépéage, ce qui justifierait de les confier à l'ART, en complément de sa compétence sur le secteur autoroutier. La mission de conciliation en particulier, qui vise notamment à s'assurer que les prestataires ne subissent pas de discrimination par les percepteurs de péage, est particulièrement adaptée aux prérogatives de l'ART . Concernant l'enregistrement des prestataires de télépéage, si le choix de l'ART peut être justifié comme indirectement lié à la régulation du secteur, la commission s'interroge néanmoins sur l'opportunité du transfert de ces compétences, alors que le ministre chargé des transports exerce déjà correctement cette mission.

En complément de ces observations, la commission a également adopté un amendement COM-34 rédactionnel.

La commission a adopté l'article 13 ainsi modifié.

Article 14 - Transposition de la directive 2019/520 du 19 mars 2020 sur les systèmes de télépéage routier

Cet article vise à transposer la directive 2019/520 permettant la transmission aux points de contacts nationaux d'autres États membres que la France des informations permettant d'identifier les résidents français qui n'auraient pas acquitté des péages dus dans ces États membres.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. L'ENCADREMENT DE L'UTILISATION DES INFORMATIONS RELATIVES À LA CIRCULATION DES VÉHICULES

Le droit français prévoit un encadrement de l'enregistrement et de la communication des informations relatives à la circulation des véhicules qui figure au titre III du livre III du code de la route.

L'article L. 330-2 précise l'utilisation qui peut être faite de ces informations. Celles-ci peuvent être transmises « aux services compétents des États membres, pour l'application des instruments de l'Union européenne destinés à faciliter l'échange transfrontalier d'informations concernant les infractions en matière de sécurité routière » .

Ces « services compétents » font référence aux « points de contact nationaux » que doivent créer les États membres, en application de la directive 2015/413 23 ( * ) .

II. LA MISE À DISPOSITION DES POINTS DE CONTACT NATIONAUX DES INFORMATIONS SUR LE DÉFAUT DE PAIEMENT DE REDEVANCES ROUTIÈRES

Cet article vise à modifier l'article L. 330-2 du code de la route, afin de permettre aux autorités publiques françaises de transmettre aux « points de contacts nationaux » d'autres États membres de l'Union européenne les données permettant d'identifier les auteurs français de fraude au péage, conformément à l'article 23 de la directive 2019/520.

Il s'agit de la base législative permettant de transposer le chapitre VIII de la directive 2019/520 du 19 mars 2020 concernant l'interopérabilité des systèmes de télépéage routier et facilitant l'échange d'informations relatives au défaut de paiement des redevances routières dans l'Union. Ce chapitre VIII prévoit que chaque État membre désigne un point de contact national et donne accès aux points de contact nationaux des autres États membres aux données nationales relatives à l'immatriculation des véhicules, afin de permettre l'identification d'un véhicule pour lequel un défaut de paiement d'une redevance routière a été établi, ainsi que de son détenteur ou propriétaire.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

Le présent article transpose, par coordination avec l'article 13, l'obligation mise en place par la directive de partage d'informations entre les États membres via les points de contact nationaux, le Gouvernement ayant indiqué que les dispositions du chapitre VIII restantes seraient transposées par voie règlementaire.

Cet article n'appelle pas de commentaire, car il résulte d'une simple transposition des obligations des États membres en application des nouvelles mesures mises en place par la directive 2019/520.

La commission a adopté l'article 14 sans modification.

Article 15 - Transposition de la directive 2019/520 - nécessité d'un renvoi du code des transports vers le code de la voirie routière, lequel détaille les missions de l'Autorité de régulation des transports en matière de télépéage

Cet article vise à transposer la directive 2019/520 en assurant l'articulation entre le code des transports et le code de la voirie routière sur les missions de l'Autorité de régulation des transports en matière de télépéage.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LES MISSIONS DE L'ART SONT CONCENTRÉES SUR LA RÉGULATION DU SECTEUR AUTOROUTIER

L'article L. 1262-3 du code des transports définit les missions de l'Autorité de régulation des transports, en renvoyant à leur définition dans les codes pertinents. Il renvoie au code de la voirie routière pour les missions de l'ART concernant le secteur des autoroutes.

II. UN RENVOI AUX NOUVELLES COMPÉTENCES DE L'ART RELATIVES AU SERVICE DE TÉLÉPÉAGE EUROPÉEN

Le présent article formalise, par coordination, l'ajout aux missions de l'Autorité de régulation des transports d'un nouveau volet relatif à la régulation du service européen du télépéage, introduit par l'article 13 du présent projet de loi. Cet article renvoie au code de la voirie routière. Il vise à modifier le code des transports, en introduisant un renvoi au code de la voirie routière.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

Cet article de renvoi actualise dans le code des transports la référence aux missions de l'Autorité de régulation de transports. Il n'appelle pas de commentaire de la part de la commission.

La commission a adopté l'article 15 sans modification.

Article 16 - Contrôle des émissions de soufre

Le présent article a pour objet de mettre en conformité le droit français avec la directive (UE) 2016/802 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 qui vise à réduire la teneur en soufre des combustibles marins.

Il modifie le code de l'environnement afin d'introduire un plafond de teneur en soufre de 3,50 % en masse, assorti d'une dérogation prévue pour les navires mettant en oeuvre des méthodes de réduction des émissions et qui fonctionnent en « système fermé ». Il précise le régime de sanctions pénales y afférent.

Par ailleurs, il vise à étendre cette modification en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

La commission a adopté un amendement clarifiant les plafonds de teneur en soufre applicables aux navires mettant en oeuvre des méthodes de réduction des émissions, selon qu'ils fonctionnent en « système ouvert » ou en « système fermé ». Par ailleurs, afin de mieux lutter contre les « scrubbers », elle a souhaité préciser que les méthodes de réduction des émissions de soufre mises en oeuvre par les navires ne peuvent avoir une incidence négative notable sur l'environnement.

I. LE DROIT FRANÇAIS N'EST PAS CONFORME AUX EXIGENCES COMMUNAUTAIRES EN MATIÈRE DE CONTRÔLE DE LA TENEUR EN SOUFRE DES COMBUSTIBLES MARINS

A. L'obligation d'utiliser des combustibles marins dont la teneur en soufre est conforme à la directive 2016/802 s'accompagne d'une dérogation pour les navires fonctionnant en « système fermé »

La pollution générée par les navires est devenue une préoccupation environnementale majeure, en particulier pour les villes portuaires .

À bord des navires, le combustible le plus utilisé est un fuel-oil lourd obtenu à partir de résidus provenant de la distillation du pétrole brut qui contient du soufre . Après combustion dans le moteur, ce pétrole lourd se retrouve dans les émissions des navires sous la forme d' oxydes de soufre et de particules, accroissant la pollution atmosphérique . Ces émissions nuisent à la santé humaine - en causant des affections respiratoires - et à l'environnement. Elles contribuent par ailleurs à la création de dépôts acides qui constituent une menace pour la biodiversité, les écosystèmes fragiles et la croissance des forêts , mais également pour les milieux urbains, les pluies acides pouvant induire une dégradation du bâti et du patrimoine architectural.

Afin de lutter contre ces effets néfastes, plusieurs instances internationales ont instauré des mesures destinées à limiter les émissions de soufre générées par les navires.

Au niveau international, la teneur en soufre des combustibles marins est encadrée par l'annexe VI à la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (dite « Convention MARPOL »), adoptée en 1973 à l'Organisation maritime internationale (OMI) et entrée en vigueur en 2005.

Au niveau européen, elle est régie par la directive 2012/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 modifiant la directive 1999/32/CE concernant la teneur en soufre des combustibles marins, consolidée dans la directive 2016/802 (UE) du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 concernant une réduction de la teneur en soufre de certains combustibles liquides . Cette directive reprend les dispositions de la Convention MARPOL.

Ces textes ont pour objet de limiter et réduire progressivement la teneur en soufre des combustibles marins . Pour ce faire, ils fixent une « teneur limite » en soufre du fuel-oil utilisé à bord des navires.

L'article 6 de la directive 2016/802 et la Convention MARPOL définissent deux régimes distincts en fonction des zones concernées :

- dans les eaux territoriales, les zones économiques exclusives et les zones de prévention de la pollution des États membres, la teneur en soufre maximale autorisée pour les combustibles marins est de 0,5 % en masse depuis le 1 er janvier 2020 24 ( * ) ;

- dans les zones de contrôle des émissions de soufre délimitées par l'OMI , les navires sont soumis à une réglementation et des contrôles plus stricts, la teneur en soufre maximale étant abaissée à 0,10 % ( depuis le 1 er janvier 2015). La localisation géographique de ces zones est annexée à la convention MARPOL.

Comme l'indique la directive 2016/802, en l'absence de telles mesures, « les émissions dégagées par le transport maritime auraient bientôt dépassé les émissions générées par l'ensemble des sources terrestres » .

Toutefois, cette réglementation tend à soutenir à la hausse le prix des combustibles marins faiblement « soufrés », ce qui risque d'influer défavorablement sur la compétitivité du transport maritime. Pour pallier ces difficultés, la directive prévoit notamment que les États membres facilitent le recours à des « méthodes de réduction des émissions » de soufre.

Les méthodes de réduction des émissions de soufre sur les navires

La directive 2016/802 prévoit que les navires peuvent déroger aux teneurs en soufre maximales fixées à son article 6, lorsqu'ils ont recours à des méthodes de réduction des émissions de soufre. Ces méthodes sont définies à l'article 2 de la directive comme « toute installation ou tout matériel, dispositif ou appareil destinés à équiper un navire, ou toute autre procédure, tout combustible de substitution ou toute méthode de mise en conformité utilisés en remplacement de combustibles marins à faible teneur en soufre répondant aux exigences de la présente directive, qui sont vérifiables, quantifiables et applicables » .

Ces méthodes doivent permettre d'obtenir des réductions des émissions au moins équivalentes à celles pouvant être obtenues par l'utilisation de combustibles à faible teneur en soufre et ne peuvent avoir une incidence négative notable sur l'environnement. Elles sont en principe soumises à des « mécanismes appropriés d'approbation et de contrôle » de la part des États du pavillon.

En pratique, pour les capitaines de navire, deux procédés sont envisageables :

- limiter la teneur en soufre du combustible utilisé , par exemple en employant un fuel-oil à haute teneur en soufre, mélangé à un autre fuel-oil dont la teneur en soufre est nettement inférieure, afin d'obtenir un combustible conforme à la réglementation internationale. Il est également possible d'équiper les navires de moteurs qui utilisent des combustibles ayant une teneur en soufre très faible, comme le gaz naturel ou les biocarburants ;

- se doter de dispositifs d'épuration des gaz d'échappement , également appelés « épurateurs » (ou « scrubbers »), qui éliminent les oxydes de soufre des gaz d'échappement émis par les moteurs des navires. Un navire équipé d'un épurateur peut continuer à utiliser du fuel-oil lourd, puisque les émissions de soufre seront réduites à un niveau équivalent à la teneur plafonnée.

Aux termes de l'article 8 de la directive 2016/802, les navires peuvent utiliser des méthodes de réduction des émissions de soufre au lieu d'utiliser des combustibles marins conformes aux seuils fixés à l'article 6 de la même directive, à la condition qu'ils réalisent « de manière permanente des réductions des émissions de dioxyde de soufre au moins équivalentes à celles qu'il aurait obtenues en utilisant un combustible marin conforme aux exigences » .

Toutefois, c ette dérogation est strictement encadrée : sont seuls autorisés à dépasser la teneur maximale en soufre imposée aux États membres (qui est de 3,5 % en masse) les navires, mettant en oeuvre des méthodes de réduction des émissions, qui fonctionnent « en système fermé » (article 5).

B. Une dérogation mal transposée en droit français

L'ordonnance n° 2015-1736 du 24 décembre 2015 qui a transcrit la directive 2016/802 n'a pas pleinement répondu aux exigences communautaires.

Les règles en matière de pollution par les rejets des navires sont fixées par la section 1 du chapitre VIII du titre I er du livre II du code de l'environnement et ses articles L. 218-2 et L. 218-15.

À l'article L. 218-2, les I et II transcrivent les seuils de teneur en soufre des combustibles que peuvent utiliser les navires, conformément au droit de l'Union européenne. Le IV prévoit que les navires équipés en méthodes de réduction de soufre peuvent ne pas utiliser de combustibles marins dont la teneur en soufre est inférieure ou égale aux valeurs obligatoires, à la condition qu'ils « réalisent en permanence des réductions des émissions de dioxyde de soufre au moins équivalentes à celles qu'ils auraient obtenues en utilisant des combustibles marins répondant à ces exigences », conformément à la réglementation européenne (article 8 de la directive 2016/802).

Enfin, l'article L. 218-15 fixe les peines en cas d'infractions au régime prévu à l'article L. 218-2 en prévoyant, au II, la possibilité de prononcer des sanctions pénales à travers une peine d'un an d'emprisonnement et 200 000 € d'amende.

La dérogation prévue au IV de l'article L. 218-2 s'écarte des exigences fixées à l'article 5 de la directive 2016/802. Ainsi que le relève l'avis du Conseil d'État, joint au projet de loi, ne sont en effet mentionnés ni le plafond de teneur en soufre de 3,5 % que les navires ne doivent en principe pas dépasser lorsqu'ils ont recours à des méthodes de réduction des émissions ni la possibilité pour les seuls navires qui disposent d'un circuit fermé de dépasser ce seuil. L'exposé des motifs du projet de loi évoque d'ailleurs « une omission ».

Pour remédier à cette situation, l'arrêté du 14 février 2020 portant modification de l'arrêté du 23 novembre 1987 relatif à la sécurité des navires 25 ( * ) a expressément mentionné cette dérogation en permettant d'utiliser un combustible dont la teneur en soufre est supérieure à 3,5 % aux seuls navires mettant en oeuvre des méthodes de réduction des émissions de soufre en « système fermé », excluant les systèmes ouverts tels que les « scrubbers ».

Toutefois, la sanction du dépassement du seuil de 3,5 % par les navires qui ne disposent pas d'un système fermé est impossible puisque le régime prévu à l'article L. 218-15 est défini par référence aux règles prévues à l'article L. 218-2 qui ne mentionne pas cette interdiction. En pratique, l'infraction au dispositif prévu par l'arrêté précité ne peut donc donner lieu à aucune sanction , ce qui place la France en situation de non-conformité avec le droit de l'Union européenne. En effet, l'article 18 de la directive 2016/302 précise que « Les États membres déterminent les sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées en application de la présente directive. Les sanctions déterminées doivent être efficaces, proportionnées et dissuasives et elles peuvent comprendre des amendes calculées de manière à, au minimum, priver les responsables des avantages économiques tirés de la violation des dispositions nationales visées au premier alinéa, tout en augmentant progressivement ces amendes pour les infractions répétées . »

II. LA NÉCESSITÉ DE TRANSCRIRE FIDÈLEMENT LA DÉROGATION À LA TENEUR MAXIMALE EN SOUFRE : LIMITER LE CHAMP ET SÉCURISER SON APPLICATION

Le dispositif proposé consiste à compléter le IV de l'article L. 218-2 du code de l'environnement de manière à préciser que seuls les navires qui mettent en oeuvre des méthodes de réduction des émissions et qui fonctionnent en système fermé peuvent utiliser un combustible dont la teneur en soufre est supérieure à 3,5 % en masse.

Cette rédaction a pour conséquence d'introduire un plafond de teneur en soufre de 3,5 %, conformément à la réglementation européenne, qui s'applique aux combustibles marins utilisés par des navires qui mettent en oeuvre des méthodes de réduction des émissions en circuit ouvert.

Par ailleurs, le présent article étend en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises les modifications ainsi proposées.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission approuve cet article visant à transcrire les exigences de l'article 5 de la directive (UE) 2016/802 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 concernant une réduction de la teneur en soufre de certains combustibles liquides .

La prise en compte de ces exigences répond à une attente forte de la part de nombreux acteurs du secteur maritime et de l'environnement. En outre, la transposition incomplète de la directive a pu générer certains effets pervers : certains navires ont été équipés de systèmes d'épuration des gaz d'échappement en boucle ouverte, qui utilisent de l'eau de mer afin de filtrer les gaz d'échappement pour ensuite rejeter l'eau polluée en soufre dans la mer. Cette pratique, qui ne peut être que néfaste pour les milieux marins, semble encore largement répandue dans le monde. Rappelons que selon la dernière étude de l'Agence européenne de sécurité maritime (EMSA), 78 % des eaux de navires rejetées en mer proviendraient de ces systèmes à boucle ouverte. Il était urgent de lutter plus efficacement contre ces systèmes d'épuration à boucle ouverte, en permettant que soient prononcées des sanctions pénales en cas d'infraction aux règles fixées par la directive de 2016.

La commission se félicite donc de la transposition de ces obligations dans la loi et ce, d'autant plus qu'en application de l'article L. 218-2 du code de l'environnement, elles s'appliquent à l'ensemble des navires « naviguant dans les eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction française » , et pas uniquement à ceux du pavillon français.

De plus, elle note que l'impact de cette mesure sur les navires battant pavillon français devrait être limité : l'étude d'impact du projet de loi précise qu'actuellement, seuls six navires battant pavillon français sont équipés d'épurateurs de fumée en système ouvert. Cette interdiction ne constitue pas véritablement une contrainte nouvelle pour ces navires dans la mesure où ils effectuent des navigations internationales, ce qui a pour effet de les soumettre à cette réglementation dans les autres ports de l'Union européenne dans lesquels cette directive est transposée et appliquée. Par ailleurs, d'après les données de l'Organisation maritime internationale, il est très rare de trouver dans le monde du fuel dont la teneur en soufre dépasse les 2,5 % en masse, donnée confirmée en France et dans les lieux d'approvisionnement voisins fréquentés par ces navires.

La commission a souhaité apporter des clarifications rédactionnelles au dispositif proposé par le Gouvernement, dans un souci de garantir une transposition rigoureuse de la directive . Elle a donc adopté un amendement COM-13 effectuant plusieurs modifications.

D'une part, il propose, dans un souci de clarification du droit, de supprimer, à l'article L. 218-2 du code de l'environnement, les références obsolètes aux plafonds de teneur en soufre qui ne sont plus applicables, parfois depuis plusieurs années.

D'autre part, il clarifie la rédaction proposée par le Gouvernement afin de préciser, conformément à la directive, le régime applicable aux navires qui mettent en oeuvre des méthodes de réduction des émissions de soufre (comme le recours à des épurateurs de fumée), selon qu'ils fonctionnent en système ouvert ou en système fermé. Il s'agit de spécifier que seuls les navires fonctionnant en système fermé et ne rejetant pas de soufre à la mer peuvent déroger à la teneur maximale en soufre de 3,50 %. En revanche, les navires rejetant du soufre à la mer, même lorsqu'ils mettent en oeuvre des méthodes de réduction des émissions, sont soumis au respect de ce plafond.

Par ailleurs, cet amendement transpose dans le droit français la précision selon laquelle les méthodes de réduction des émissions de soufre mises en oeuvre par les navires ne peuvent avoir une incidence négative notable sur l'environnement , notamment les écosystèmes marins, et que leur mise au point est soumise à des mécanismes appropriés d'approbation et de contrôle par les autorités publiques.

Enfin, il complète l'article L. 218-1 du code de l'environnement afin d'y mentionner la définition des « méthodes de réduction des émissions de soufre », dans le souci de renforcer la lisibilité des articles suivants au sein de la division du code.

La commission a adopté l'article 16 ainsi modifié.

Article 17 - Obligations des organismes de formation professionnelle maritime

Le présent article vise à renforcer l'encadrement dont font l'objet certains organismes dispensant des formations professionnelles maritimes afin de le mettre en conformité avec deux conventions internationales 26 ( * ) , reprises par la directive 2008/106 du 19 novembre 2008 concernant le niveau minimal de formation des gens de mer.

Le dispositif permet d'étendre aux « superviseurs » exerçant dans ces organismes les exigences de qualification et d'expérience requises pour la délivrance d'agréments, qui étaient jusqu'ici limitées aux formateurs et dirigeants. Il prévoit la définition d'un niveau de qualification et d'expérience requis pour les formateurs et évaluateurs dispensant des formations initiales par voie réglementaire.

Par ailleurs, il rend applicables ces modifications en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna. Enfin, il procède à la correction d'une erreur matérielle concernant l'application en Polynésie française de dispositions relatives aux organismes de formation des gens de mer plus anciennes.

La commission a adopté un amendement visant à corriger une erreur de numérotation.

I. L'INSUFFISANTE PRISE EN COMPTE EN DROIT FRANÇAIS DES EXIGENCES INTERNATIONALES DE QUALIFICATION POUR LA FORMATION DES GENS DE MER

La formation professionnelle des gens de mer est encadrée par deux conventions internationales de l'Organisation maritime internationale (OMI) :

- la convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille de 1978 (convention STCW) ;

- la convention internationale sur les normes de formation du personnel des navigants de pêche, de délivrance des brevets et de veille de 1995 (convention STCW-F).

Les dispositions de ces deux conventions sont reprises par la directive 2008/106/CE du 19 novembre 2008 concernant le niveau minimal de formation des gens de mer, qui invite les États membres à fixer des normes de qualité concernant non seulement l'administration du système de délivrance des titres et les programmes de formation ainsi que les examens, mais aussi les qualifications et l'expérience des instructeurs (c'est-à-dire les formateurs), des évaluateurs (c'est-à-dire les personnels chargés d'évaluer les stagiaires de la formation professionnelle ou les élèves en formation) et des superviseurs, qui sont chargés de la coordination des formations.

Ces exigences ont été transposées par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, qui prévoit que la formation professionnelle 27 ( * ) conduisant à l'obtention ou au renouvellement des titres de la formation professionnelle maritime est soumise à un agrément (articles L. 5547-3 à L. 5547-9 du code des transports). Toutefois, cette transposition est incomplète à deux titres.

D'une part, les « superviseurs » ne sont pas inclus dans la liste des personnels dont le niveau de qualification et d'expérience constitue une condition de délivrance de l'agrément prévu à l'article L. 5547-3 du code des transports. Sont seuls mentionnés les dirigeants, les formateurs et les évaluateurs.

D'autre part, le code des transports ne comporte pas de dispositions concernant les qualifications attendues des personnels qui dispensent des formations conduisant à la délivrance de titres de formation professionnelle maritime dans les établissements soumis à la tutelle du ministre chargé de la mer, à savoir les 12 lycées professionnels maritimes et l'École nationale supérieure de la marine (ENSM).

II. POUR ASSURER LA CONFORMITÉ AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE, RENFORCER LES EXIGENCES DE QUALIFICATION POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES GENS DE MER

Le dispositif proposé consiste :

- à ajouter les « superviseurs » à la liste des personnels des organismes de formation professionnelle maritime dont le niveau de qualification et d'expérience est pris en compte pour la délivrance d'un agrément (cela concerne, d'après l'étude d'impact jointe au projet de loi, une centaine d'organismes de formation professionnelle maritime) ;

- à renvoyer au pouvoir réglementaire la définition du niveau de qualification des formateurs et évaluateurs dispensant les formations conduisant à la délivrance de titres de formation professionnelle maritime dans les lycées professionnels maritimes et à l'École nationale supérieure de la marine.

Par ailleurs, cet article étend ces modifications en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.

Enfin, il procède à la correction d'une erreur matérielle introduite en 2019 par une ordonnance 28 ( * ) , dans un article portant sur l'application en Polynésie française de dispositions relatives aux organismes de formation des gens de mer.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission se félicite que cet article permette de mettre notre droit en conformité avec les exigences de la réglementation européenne et des conventions internationales.

Elle souligne l'importance de cet enjeu pour la formation maritime : les gens de mer étant amenés à travailler sur des navires étrangers, il est indispensable que la France leur délivre des titres de formation en parfaite conformité avec les conventions internationales. Il en va de la reconnaissance de leur niveau de formation et de leurs conditions d'accès à l'emploi. De même, ces normes internationales permettent aux armateurs français, lorsqu'ils engagent un marin étranger, de pouvoir s'assurer de son niveau de qualification.

Le dispositif proposé permettra donc de garantir la reconnaissance à l'étranger des titres de formation délivrés aux marins français. De plus, comme l'ont confirmé des acteurs consultés par le rapporteur, il a un impact faible pour les établissements concernés :

- s'agissant de l'élargissement des critères pris en compte pour la délivrance d'un agrément : il ne s'agit pas de créer de nouvelles exigences de formation au niveau législatif, mais de prévoir que celles-ci sont prises en compte pour la délivrance des agréments. L'étude d'impact mentionne qu'en pratique, l'ensemble des organismes agréés remplissent déjà les exigences de formation et de qualification requises ;

- s'agissant des personnels de formation exerçant dans les établissements soumis à la tutelle du ministre chargé de la mer (les 12 lycées professionnels maritimes et l'ENSM), la commission sera attentive aux mesures d'application qui seront prises pour définir le niveau de qualification requis.

Au total, la commission estime que ce dispositif va dans le bon sens, en tant qu'il permettra de sécuriser à l'international les titres professionnels délivrés aux marins .

Elle a adopté un amendement COM-14 visant à remplacer la numérotation erronée de l'article L. 5447-10 introduit au chapitre VII du titre IV du livre V de la cinquième partie du code des transports, par la numérotation adéquate.

La commission a adopté l'article 17 ainsi modifié.

Article 18 - Modification des dispositions relatives à l'autorité de surveillance des équipements marins

Cet article vise à rendre les dispositions relatives à la surveillance des équipements marins strictement conformes aux exigences européennes, en tirant les conséquences de l'entrée en vigueur d'une partie du règlement (UE) 2019/1020 sur la surveillance du marché et la conformité des produits prévue en juillet 2021.

En particulier, il aligne le droit national sur le règlement européen s'agissant du champ des opérateurs économiques soumis à la surveillance des équipements marins et de la liste des mesures que l'autorité administrative est susceptible de prendre à l'encontre d'un opérateur qui a mis sur le marché un équipement non conforme à la réglementation, présentant un risque pour le consommateur.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LA SURVEILLANCE DES ÉQUIPEMENTS MARINS PRÉVUE EN DROIT FRANÇAIS N'EST PAS PARFAITEMENT CONFORME À LA NOUVELLE RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE

Au sein de l'Union européenne, certains produits sont soumis à une surveillance particulière et à une législation harmonisée encadrée par le règlement (CE) n° 765/2008 relatif à l'accréditation et à la surveillance du marché, qui a été modifié en 2020 par le règlement (UE) 2019/1020 sur la surveillance et la conformité des produits.

Cette surveillance vise à assurer que les produits mis sur le marché de l'Union respectent les dispositions européennes en matière de santé et de sécurité des consommateurs.

Les équipements marins sont soumis à cette surveillance , en application de la directive 2014/90/UE relative aux équipements marins et du règlement (CE) n° 765/2008 relatif à l'accréditation et à la surveillance du marché.

Les dispositions de ce règlement ont été reprises en droit interne, notamment à la section 2 bis du chapitre I er du titre IV du livre II de la cinquième partie du code des transports.

Toutefois, un nouveau règlement (règlement (UE) 2019/1020 sur la surveillance du marché et la conformité des produits) modifiant le règlement de 2008 a été publié en 2019. Il s'applique à compter de l'année 2021, une partie des dispositions entrant en vigueur au 1 er janvier et l'autre au 16 juillet.

Le règlement 2019/1020 complète, en son article 2, la définition de la notion « d'opérateur économique » qui était donnée par le règlement de 2008. Il y ajoute, outre le fabricant, le mandataire, l'importateur et le distributeur, « le prestataire d'exécution de commandes » . En pratique, cet ajout a pour effet d'intégrer ce nouvel acteur dans le champ de la surveillance du marché des équipements marins prévue par la législation européenne.

Par ailleurs, ce règlement élargit l'éventail des mesures que sont susceptibles de prendre les autorités administratives afin de tirer les conséquences d'un constat de non-conformité concernant un équipement marin : il prévoit que, dans les cas où il n'existe pas d'autre moyen d'éviter un risque de préjudice grave pour l'utilisateur final, les autorités de surveillance de marché adoptent des mesures permettant d'ordonner l' affichage d'une mise en garde explicite le concernant 29 ( * ) .

Ces évolutions du règlement de 2019 n'ont encore pas été introduites en droit national.

- D'une part, l'article L. 5241-2-2 du code des transports qui comporte la définition des termes employés (en cohérence avec les définitions données par la réglementation européenne) dans les articles suivants consacrés à la surveillance des équipements marins ne mentionne pas les « prestataires d'exécution de commande » ;

- d'autre part, la liste des mesures que peut prendre l'autorité administrative apparaît restrictive au regard de la réglementation européenne.

En France, le code de la consommation permet à l'autorité administrative, lorsque des produits « ne sont pas conformes à la réglementation en vigueur ou présentent ou sont susceptibles de présenter un danger pour la santé publique ou la sécurité des consommateurs » d'ordonner par arrêté la suspension de la mise sur le marché, le retrait, le rappel ou la destruction, mais également d'ordonner la diffusion d'une mise en garde (article L. 521-7 du code de la consommation).

En revanche, l'article L. 5241-2-10 du code des transports qui concerne les équipements marins mentionne une liste plus restrictive de mesures parmi lesquelles :

- l'interdiction ou la restriction de la mise à disposition des équipements marins non conformes sur le marché ;

- le rappel ou le retrait de tous les équipements marins présentant une ou plusieurs non-conformités ;

- la destruction des équipements marins non conformes.

La possibilité de diffuser une mise en garde concernant des équipements marins non conformes ne figure donc pas à l'heure actuelle dans le droit national.

Ainsi, le système de surveillance des équipements marins n'est pas parfaitement conforme aux exigences européennes.

II. DES MODIFICATIONS PONCTUELLES SONT NÉCESSAIRES POUR PERMETTRE UNE STRICTE CONFORMITÉ AU RÈGLEMENT 2019/1020

En France, c'est la direction des affaires maritimes (DAM) , rattachée au ministère de la Mer, qui est chargée d'assurer la surveillance du marché des équipements marins.

Les mesures que peut prendre la DAM sont mentionnées à l'article L. 5241-2-10 du code des transports, qui prévoit notamment l'interdiction ou la restriction de la mise à disposition d'un équipement ou la possibilité de procéder à son retrait du marché. Toutefois, il est précisé que l'opérateur doit d'abord être invité à se mettre en conformité. Ainsi que le dispose le II de l'article L. 5241-2-10 : l'autorité compétence peut prononcer des sanctions « lorsque l'opérateur économique concerné ne prend pas les mesures correctives appropriées dans le délai prescrit ». En pratique, la DAM est donc rarement amenée à prononcer des sanctions : en moyenne, cela ne se produit que trois à cinq fois par an selon l'étude d'impact.

Pour se mettre strictement en conformité avec la réglementation européenne, le dispositif proposé vise à :

- modifier l'article L. 5241-2-2 du code des transports de manière à y ajouter la définition du « prestataire de service d'exécution des commandes » , qui comprend toute personne physique ou morale qui propose dans le cadre d'une activité commerciale, au moins deux des services suivants : entreposage, conditionnement, étiquetage et expédition des équipements marins sans en être propriétaire, à l'exclusion des services postaux ;

- compléter la définition de l'opérateur économique qui figure au même article L. 5241-2-2 pour y ajouter les prestataires de service d'exécution des commandes, ainsi que « toute personne physique ou morale soumise à des obligations liées à la fabrication d'équipements marins, à leur mise à disposition sur le marché ou à leur mise en service », conformément au règlement ;

- modifier l'article L. 5241-2-10 pour permettre à la direction des affaires maritimes d'ordonner la diffusion ou l'affichage d'une mise en garde sur les équipements marins mis sur le marché qui présentent des non-conformités.

Cet article prévoit également l'application de ces dispositions en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Lorsque tel est le cas, les mesures peuvent toutefois avoir pour effet de retirer du marché plusieurs centaines d'équipements non conformes.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

L'encadrement du marché des équipements marins présente un enjeu majeur pour la sécurité des marins, qu'ils soient professionnels ou amateurs, dans notre pays. En 2020, la direction des affaires maritimes a dû retirer du marché français des gilets de sauvetage à déclenchement automatique produits par un fabricant britannique, au motif qu'étaient constatés des déclenchements intempestifs présentant un réel danger pour les utilisateurs.

Au vu des conséquences des mesures pouvant être prononcées - en particulier les décisions de retrait qui peuvent porter sur des centaines d'équipements - ce sujet revêt un lourd enjeu pour les fabricants. Le rapporteur s'est interrogé sur l'impact du dispositif sur les entreprises productrices d'équipements marins, en particulier sur le nombre d'entreprises qui vont se trouver nouvellement soumis à la surveillance exercée par la DAM. Cependant, il n'a pu obtenir de chiffre précis sur ce point de la part du Gouvernement.

Toutefois, la commission estime que les répercussions seront limitées, dans la mesure où la possibilité de prononcer une mise en garde lorsqu'un équipement marin non conforme à la réglementation est mis sur le marché ne constitue pas un alourdissement des sanctions à l'encontre des opérateurs. Il s'agit plutôt de permettre à la DAM de moduler davantage les sanctions prononcées à l'encontre des opérateurs.

D'autre part, en pratique, l'élargissement de la définition des opérateurs économiques permettra de mieux cibler l'opérateur responsable du manquement , là où, auparavant, elle ne pouvait prendre de mesure qu'à l'encontre d'acteurs situés en amont ou en aval du prestataire d'exécution de commande.

Le dispositif proposé permettra d'assurer la conformité du système de notre surveillance des équipements marins avec le règlement européen 2019/1020 et, ainsi, d'éviter tout rappel à l'ordre de la part de la Commission européenne.

La commission a adopté l'article 18 sans modification.

Article 19 - Casinos en mer

Cet article vise à conserver la possibilité pour les ferries naviguant entre la France et le Royaume-Uni, compte tenu de l'entrée en vigueur Brexit , d'exploiter exclusivement des appareils de jeu de type « machine à sous ».

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LE BREXIT PRIVE D'EFFECTIVITÉ LA POSSIBILITÉ OFFERTE PAR LE CODE DE LA SÉCURITÉ INTÉRIEURE D'EXPLOITER DES CASINOS À BORD DES FERRIES TRANSMANCHE

En principe, la loi française n'autorise l'exploitation d'appareils de jeux (c'est-à-dire de « machines à sous ») dans les casinos terrestres qu'en association avec des jeux dits de table.

Toutefois, cette disposition fait l'objet d'aménagements s'agissant des casinos « flottants » , installés à bord de navires.

Depuis la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l'économie bleue, le II de l'article L. 321-3 du code de la sécurité intérieure permet à certains navires de commerce transporteurs de passagers battant pavillon français, sous réserve d'être titulaires d'une autorisation, d'exploiter à leur bord des casinos qui ne comprennent que des appareils de jeux. La dérogation ne s'applique toutefois qu'aux lignes « intracommunautaires ». Il s'agissait de garantir l'attractivité des compagnies françaises exploitant des ferries à destination ou en provenance d'autres États membres de l'Union européenne.

Si elle s'appliquait à l'ensemble des lignes internes à l'Union européenne, cette dérogation revêt une importance particulièrement sensible sur les lignes transmanche. En effet, la réglementation en vigueur au Royaume-Uni autorise les navires sous pavillon britannique à exploiter des appareils de jeux seuls. Par ailleurs, le Gambling Commission permet aux navires sous pavillon étranger naviguant dans les eaux britanniques d'exploiter des casinos à titre exclusif. L'objectif de la dérogation introduire en 2016 était donc de placer les ferries sous pavillon français dans des conditions de concurrence équitables avec leurs homologues naviguant sous pavillon britannique et, ainsi, de renforcer la compétitivité de la flotte française

Or, la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne prive d'effectivité l'article L. 321-3 du code de la sécurité intérieure qui fait uniquement référence aux lignes « intracommunautaires ».

II. ADAPTER LE DROIT INTERNE POUR CONSERVER LA POSSIBILITÉ EXISTANTE D'EXPLOITER DES CASINOS FLOTTANTS ENTRE LA FRANCE ET LE ROYAUME-UNI

Le dispositif proposé modifie le II de l'article L. 321-3 du code de la sécurité intérieure afin d'étendre la possibilité de n'exploiter que des appareils de jeux aux trajets effectués sur des lignes ne touchant qu'un port de l'Union européenne, au lieu de se limiter aux seules lignes intracommunautaires.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission est favorable à cette mesure qui se borne à maintenir une possibilité existante pour les ferries qui exploitent des casinos entre la France et le Royaume-Uni.

En outre, elle rappelle que cette possibilité résultait d'un amendement introduit au Sénat à la loi sur l'économie bleue en 2016 : déposé par le Gouvernement, cet amendement avait reçu un avis favorable de la part de la commission saisie au fond, la commission des affaires économiques, et de son rapporteur, M. Didier Mandelli.

Cette mesure fait l'objet d'un large consensus parmi les professionnels du secteur et correspond à un souhait de leur part de pouvoir continuer à installer uniquement des jeux mécanisés à leur bord, comme le pratique la concurrence étrangère, en particulier britannique. Ces équipements sont essentiels pour l' équilibre financier des compagnies exploitant des ferries , aujourd'hui particulièrement affectées par le double effet de la crise sanitaire et du Brexit .

La commission souligne que la rédaction retenue aura pour effet d'étendre la possibilité d'exploiter des casinos aux lignes de ferries naviguant entre la France et les pays du Maghreb, une évolution qu'elle juge d'autant plus positive qu'elle s'inscrit ainsi dans la philosophie qui était celle du législateur lorsqu'il a examiné la loi relative à l'économie bleue en 2016. De la même manière que pour les lignes transmanches, cette mesure permettra de renforcer la compétitivité de la flotte française face à certaines compagnies concurrentes, espagnoles et italiennes, qui opèrent vers le Maghreb et exploitent des casinos seuls.

La commission a adopté l'article 19 sans modification.

Article 20 - Travail de nuit des jeunes travailleurs de moins de 18 ans à bord des navires

Cet article vise à vise à mettre en conformité des dispositions du code des transports relatives au travail de nuit de jeunes de moins de 18 ans à bord des navires avec la directive 94/33/CE relative à la protection des jeunes au travail et la directive 2017/159 relative à la mise en oeuvre de la convention C188 de l'Organisation internationale du travail sur le travail dans la pêche.

Plus précisément, il prévoit :

- d'avancer l'heure à laquelle débute le travail dit de nuit, en principe interdit, à 21 heures (au lieu de 22 heurs actuellement) afin de couvrir une période de 9 heures consécutives conformément au droit européen ;

- d'étendre la période de repos obligatoire dont bénéficient ces jeunes travailleurs de minuit à 4 heures du matin plutôt que 5 heures.

Par ailleurs est prévue l'application de cette disposition à Wallis-et-Futuna.

La commission a adopté un amendement visant à introduire un temps de pause pour les jeunes travailleurs à bord des navires, conformément aux exigences de la directive 94/33/CE.

I. LE DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE CONCERNANT LE TRAVAIL DE NUIT DE CERTAINS JEUNES TRAVAILLEURS À BORD DE NAVIRES A ÉTÉ IMPARFAITEMENT TRANSPOSÉ

Les jeunes âgés de moins de 18 ans ont la possibilité de réaliser un stage à bord d'un navire dans le cadre d'une période de formation en milieu professionnel. En 2019, 1 750 jeunes travailleurs ont bénéficié de ce dispositif en France.

Ces jeunes travailleurs constituant un public « fragile », ils font l'objet d'un cadre juridique spécifique au niveau international, européen ainsi qu'en droit interne.

Deux conventions internationales encadrent le travail des jeunes de moins de 18 ans à bord de navires :

- la convention du travail maritime de l'OIT, adoptée en 2006 ;

- la convention n° 188 de l'OIT relative au travail dans la pêche, adoptée en 2007.

Le contenu de ces textes a été repris au niveau européen dans trois directives :

- la directive 2009/13/CE du Conseil du 16 février 2009 portant mise en oeuvre de l'accord conclu par les Associations des armateurs de la Communauté européenne (ECSA) et la Fédération européenne des travailleurs des transports (ETF) concernant la convention du travail maritime de 2006, et modifiant la directive 1999/63/CE ;

- la directive (UE) 2017/159 du Conseil du 19 décembre 2016 portant mise en oeuvre de l'accord relatif à la mise en oeuvre de la convention sur le travail dans la pêche de 2007, de l'Organisation internationale du travail ;

- la directive 94/33/CE relative à la protection des jeunes au travail détermine, enfin, des prescriptions minimales en vue de garantir un meilleur niveau de protection de la sécurité et de la santé des jeunes travailleurs.

Par ailleurs, l'article 6 de l'annexe à la directive 2017/159 précise que le travail de nuit doit couvrir une période d'au moins « 9 heures consécutives » .

Dans le secteur de la pêche, la directive 94/33/CE interdit le travail de nuit des jeunes travailleurs âgés de moins de 18 ans en prévoyant la possibilité d'une dérogation. Toutefois, même dans ce cas de figure, elle impose une interdiction de travail entre minuit et 4 heures du matin.

Ces dispositions ont été transposées en droit interne.

Le travail de nuit à bord des navires est en principe interdit aux jeunes âgés de moins de 18 ans entre 22 heures et 6 heures à l'article L. 5544-27 du code des transports. Toutefois, à titre dérogatoire, il peut être autorisé par l'inspection du travail dans le secteur de la pêche , lorsque des impératifs liés à la formation le justifient. Dans ce cas de figure, est malgré tout prévue une période de repos obligatoire comprise entre minuit et 5 heures du matin en application de l'article L. 5544-29 du code des transports.

Ces dispositions ne sont que partiellement conformes aux exigences européennes. En effet, la période du travail de nuit définie à l'article L. 5544-27, allant de 22 heures à 6 heures du matin, ne permet pas de couvrir une période de « neuf heures consécutives » conformément à la directive 2017/159.

Par ailleurs, la France se trouve en situation de sur-transposition s'agissant de la définition de la période de repos obligatoire : en effet, celle-ci est actuellement comprise entre minuit et 5 heures du matin selon le code des transports, soit un intervalle plus large que celui prévu par la directive 94/33/CE . De plus, cette définition semble inadaptée aux contraintes des métiers maritimes, dès lors que les embarquements ont généralement lieu avant 5 heures du matin. En pratique, selon des organisations professionnelles des gens de mer entendues par le rapporteur, cette rédaction a actuellement pour effet d'empêcher certains jeunes effectuant des stages d'embarquer à bord des navires.

II. UNE NÉCESSAIRE MISE EN COHÉRENCE AVEC LES GARANTIES FIXÉES DANS LES DIRECTIVES

Afin d'assurer une transposition stricte du droit de l'Union européenne, le dispositif envisagé propose de :

- modifier l'étendue horaire du travail de nuit afin qu'elle couvre une période de neuf heures consécutives, en la ramenant à la période 21 heures-6 heures contre 22 heures-6 heures actuellement ;

- raccourcir d'une heure la période de repos obligatoire pour s'aligner sur la directive 94/33/CE, qui sera donc comprise entre minuit et 4 heures du matin.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission approuve cet article qui permet une transposition correcte de la directive 2017/159 sur le travail dans la pêche.

Toutefois, elle souligne deux points :

• D'une part, le présent article a notamment pour objet de revenir sur une disposition introduite par ordonnance au mois de septembre 2020, qui n'était pas conforme à la réglementation européenne.

Jusqu'au mois de septembre dernier, le code des transports prévoyait que la période de travail de nuit des jeunes âgés de 16 à 18 ans, effectuant un stage à bord d'un navire, s'étendait de 20 heures à 6 heures du matin. Cette mesure était conforme à la réglementation européenne, elle était même plus favorable puisque la période de travail de nuit couvrait alors une période de 10 heures consécutives, là où la directive prévoit « au moins 9 heures consécutives ».

L'ordonnance n° 2020-1162 du 23 septembre 2020 relative aux conditions de travail des jeunes travailleurs de moins de dix-huit ans à bord des navires et à l'embarquement de personnes autres que gens de mer à des fins d'observation ou de mise en situation en milieu professionnel a modifié l'article L. 5544-27 du code des transports, de manière à décaler le début de la période de travail de nuit de 2 heures. Le travail de nuit commençait donc à 22 heures pour s'achever à 6 heures, et couvrait une période de seulement 8 heures consécutives. Cette modification a placé le droit national en contradiction avec la directive européenne.

La commission déplore ces modifications successives qui sont source d'instabilité législative et de confusion pour les acteurs du secteur maritime . Par ailleurs, elle constate que le fait de légiférer par ordonnances s'accompagne souvent d'une moindre qualité normative. Le législateur ne peut que regretter ce type d'incertitude juridique en matière de réglementation du travail des jeunes dans le secteur maritime, un domaine très sensible à la fois pour les armateurs, qui ont besoin d'un cadre juridique stable pour employer des jeunes en formation sur leur navire, que pour les stagiaires qui doivent faire l'objet d'un encadrement adapté en tant qu'ils constituent un public fragile.

• D'autre part, la commission constate qu'une garantie fixée par la réglementation européenne pour les jeunes effectuant des stages à bord de navires de pêche ne figure plus dans notre droit national. Il s'agit du temps de pause des jeunes travailleurs.

L'article 12 de la directive 94/33/CE dispose pourtant : « Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les jeunes bénéficient, au cas où le temps de travail journalier est supérieur à quatre heures et demie, d'un temps de pause d'au moins trente minutes, si possible consécutives. »

Cette disposition avait été transposée en droit national. Toutefois, elle a été abrogée par erreur en 2010 , là encore une ordonnance était en cause (l'ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 relative à la partie législative du code des transports).

La commission juge l'intervention du législateur nécessaire pour réintroduire cette garantie dans le code des transports. C'est pourquoi, sur la proposition du rapporteur, elle a adopté un amendement COM-15 pour remédier à cette situation.

La commission a adopté l'article 20 ainsi modifié.

Article 21 - Prise en compte des périodes d'activité partielle pour la validation des droits à pension des marins

Depuis l'entrée en vigueur du Brexit et compte tenu du contexte économique lié à l'épidémie de covid-19 qui a engendré un recours massif à l'activité partielle de longue durée dans le secteur maritime, cet article vise à soumettre au versement de cotisations vieillesse les périodes d'activité partielle des marins. Cette mesure vise à permettre de prendre en compte ces périodes dans le montant de leur pension future.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LES DIFFICULTÉS DU SECTEUR MARITIME DEPUIS 2020 PÉNALISENT LES MARINS PROCHES DE LA RETRAITE, DU FAIT D'UNE MAUVAISE PRISE EN COMPTE DES PÉRIODES D'ACTIVITÉ PARTIELLE DANS LE CALCUL DE LEUR PENSION

Les marins sont affiliés à un régime spécial de sécurité sociale , qui fut historiquement le premier régime de retraite créé en France, par Colbert, en 1673 (Fonds des invalides de la marine). Actuellement, ce régime est géré par l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM) et ses règles sont fixées par le code des transports ainsi que par le code des pensions de retraite des marins français du commerce, de pêche ou de plaisance, de nature réglementaire.

En 2017, la France comptait près de 40 000 marins actifs 30 ( * ) affiliés à ce régime, répartis entre l'hexagone et les outre-mer. Ces marins se partagent entre les secteurs de la pêche (44,3 %), du commerce (41 %), des cultures marines (12 %) et de la plaisance professionnelle (5,3 %).

Le calcul des cotisations et contributions acquittées par les marins actifs répond à un système spécifique. Les marins actifs sont classés en 20 catégories, selon les caractéristiques du navire sur lequel ils exercent, leur fonction, et les titres professionnels qu'ils détiennent. Cette catégorie d'appartenance permet la détermination d'un salaire forfaitaire 31 ( * ) , qui sert de base au calcul des cotisations salariales, patronales, et des contributions. Lorsqu'il a cotisé dix ans au sein d'une catégorie, un marin peut bénéficier d'un « surclassement », lui permettant d'accéder à la catégorie supérieure et ce faisant, à un salaire forfaitaire plus élevé. Le calcul de la pension de retraite des marins repose sur ce système.

Le calcul de la pension de retraite des marins

Les pensions des marins, versées par l'ENIM 32 ( * ) , sont calculées à partir du salaire forfaitaire, d'un taux et du nombre d'annuités qu'ils comptabilisent.

Le salaire forfaitaire retenu pour le calcul de la pension est celui correspondant à la catégorie dans laquelle le marin était classé lors des 36 derniers mois précédant la liquidation de la pension. Lorsqu'un marin a cotisé dans des catégories différentes lors de ces 36 mois, le salaire forfaitaire est une moyenne calculée en fonction de la durée passée dans chaque catégorie.

Le taux applicable est fixé à 2 % et le nombre d'annuités correspond à la durée des services validés, c'est-à-dire ayant donné lieu à versement de cotisations. Cela inclut les périodes de congé, de repos, d'accident ou de maladie 33 ( * ) . En revanche, jusqu'en 2020, les indemnités d'activité partielle n'étaient pas prises en compte.

À ces trois éléments peut s'ajouter une bonification pour les marins ayant deux enfants ou plus.

Source : ENIM

Depuis 2020, la crise sanitaire a fortement accentué le recours à l'activité partielle de longue durée dans le secteur maritime : parmi les 30 000 marins relevant du régime de protection sociale des marins, environ 8 000 marins ont bénéficié du dispositif d'activité partielle, dont 3 000 dans le secteur de la pêche et 5 000 dans celui du commerce. La sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne au 1 er janvier 2021, du fait de ses conséquences défavorables sur l'activité maritime française, va sans doute accentuer le recours à ce dispositif.

Les indemnités versées dans le cadre de l'activité partielle constituent un revenu de remplacement, prévu au II de l'article L. 5122-1 du code du travail, non soumis aux cotisations de sécurité sociale en vertu de l'article L. 5428-1 du code du travail. En principe, la période d'activité partielle ne permet donc pas aux bénéficiaires de cotiser au titre du risque vieillesse .

Depuis 2020, les périodes d'activité partielle permettent d'ouvrir des droits à retraite , c'est-à-dire qu'elles sont prises en compte pour le calcul des annuités effectuées. L'article 11 de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne a prévu la prise en compte de l'activité partielle pour l'ouverture des droits à pension, sur une période toutefois limitée (du 1 er mars au 31 décembre 2020). Cette mesure devait permettre aux salariés placés en activité partielle de longue durée de continuer à valider des trimestres. L'article 8 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 a pérennisé ce système, y compris pour les gens de mer : l'article L. 5552-16 du code des transports, qui concerne les services pris en compte pour les pensions de retraite des marins, prévoit désormais la prise en compte de la période d'activité partielle.

Toutefois, les périodes d'activité partielle ne donnent toujours pas lieu au versement de cotisations. Or, dans le contexte actuel de crise sanitaire, cette lacune s'avère particulièrement défavorable aux marins en fin de carrière du fait des modalités de calcul de leurs pensions qui reposent sur la catégorie d'appartenance des 36 derniers mois.

II. DANS LE CONTEXTE DE CRISE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE, SOUMETTRE LES PÉRIODES D'ACTIVITÉ PARTIELLE DES MARINS À COTISATION VIEILLESSE AFIN DE VALORISER LEURS PENSIONS DE RETRAITE

Le dispositif proposé vise à modifier le titre du code des transports consacré à la protection sociale des gens de mer, afin de prévoir que les périodes de perception de l'indemnité d'activité partielle donnent lieu au versement de cotisations vieillesse.

Ce système s'inspire de celui qui prévaut déjà, dans le régime de sécurité sociale des marins, pour d'autres revenus de remplacement. Lorsqu'un marin est arrêté à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle par exemple, l'indemnité journalière qu'il perçoit donne lieu au versement de la cotisation personnelle au titre du risque vieillesse s'agissant de la part du bénéficiaire (la part de l'employeur, en revanche, n'est pas due). Il s'agit de transposer ce principe à l'activité partielle, en tenant compte des spécificités du régime des marins dans lequel les cotisations sont assises non pas sur un revenu réel, mais sur le salaire forfaitaire correspondant à la catégorie d'appartenance.

En pratique, ce dispositif aura pour effet de permettre aux marins, placés en activité partielle et proches de l'obtention d'un « surclassement décennal », de continuer à cotiser pour obtenir ce surclassement. Il s'agit donc d' éviter des interruptions dans l'avancement des gens de mer . Indirectement, cette mesure aura un impact positif sur le calcul des pensions de retraite dès lors que celui-ci dépend de la catégorie à laquelle le marin appartient au moment de liquider sa pension. Cette évolution est favorable à la fois aux marins en fin de carrière qui sont proches de l'obtention d'un surclassement et aux marins plus éloignés de la retraite qui ne seront pas pénalisés dans leur déroulement de carrière.

Le dispositif prévu doit s'appliquer aux périodes d'activité partielle « courant à compter du 1 er mai 2021 » . En d'autres termes, cet article s'appliquera de manière rétroactive aux périodes d'activité partielle comprises entre le 1 er mai et l'entrée en vigueur du projet de loi . En pratique, cela aura pour effet la réclamation, par l'ENIM de rappels de cotisations vieillesse sur la période comprise entre ces deux dates.

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a admis qu'il soit dérogé au principe de non-rétroactivité de la loi, en considérant qu'en l'espèce, l'atteinte à ce principe était justifiée par un motif d'intérêt général suffisant, comme le permet sa jurisprudence 34 ( * ) .

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission salue cette mesure favorable à l'ensemble des marins placés en activité partielle de longue durée. Elle vise à garantir un continuum dans leur carrière, de manière à ne pas retarder l'obtention d'un surclassement. En outre, cette mesure permettra de favoriser le recours à l'activité partielle de longue durée si la crise est appelée à durer. Ainsi que le mentionne l'étude d'impact, des accords collectifs en lien avec l'activité partielle sont d'ailleurs en cours de négociation dans certaines compagnies maritimes.

Toutefois, la commission regrette que le Gouvernement ne soit pas allé plus loin dans sa volonté de sécuriser les droits sociaux des marins , actuellement durement affectés par la crise économique.

Parmi les 30 000 marins relevant du régime de protection sociale des marins, 8 000 ont été placés en situation d'activité partielle au cours de l'année 2020, soit presque le tiers.

La mesure proposée par le Gouvernement, puisqu'elle ne prévoit la soumission de la période d'activité partielle au versement de cotisations « vieillesse » qu'à compter du mois de mai 2021, ne permettra pas de compenser les « pertes » de cotisations enregistrées depuis l'éclatement de l'épidémie de covid-19 au mois de mars 2020. Or, les gens de mer entendus par le rapporteur soulignent unanimement l'impact de cette crise sur les droits sociaux des marins en fin de carrière, qui sont proches de la liquidation de leur pension .

Pour rappel, dans le cadre du régime spécial des marins, le calcul de la pension de retraite est basé sur le salaire forfaitaire, lui-même déterminé en fonction de la catégorie d'appartenance du marin. Un marin peut accéder à la catégorie immédiatement supérieure lorsqu'il a cotisé dix ans au sein d'une catégorie donnée. Or, l'obtention d'un surclassement permet aux marins d'accéder à un salaire forfaitaire plus élevé et donc, de bonifier leur pension future. En d'autres termes, des marins qui étaient proches de la liquidation de leur pension et de l'obtention d'un surclassement au moment de l'éclatement de la crise sanitaire pourraient devoir retarder leur départ en retraite de quelques mois afin de bénéficier d'un montant de pension plus élevé ou, plutôt, du montant de pension auquel ils auraient eu droit s'ils n'avaient pas été placés en situation d'activité partielle. Les gens de mer entendus par le rapporteur ont souligné ce point en faisant part de leurs inquiétudes. Le rapporteur n'a pu obtenir de chiffres précis sur le nombre de marins qui pourraient être dans cette situation à ce stade de ses travaux. Toutefois, d'après les personnes entendues, cela pourrait concerner un nombre limité de personnes, quelques dizaines de marins au plus.

Interrogé sur ce sujet, le Gouvernement a indiqué qu'une rétroactivité plus importante de la mesure, en remontant par exemple au mois de janvier 2021 ou au mois de mars 2020, aurait pour effet un rappel de cotisations trop important pour l'ENIM, qui d'une part induirait des difficultés de mise en oeuvre et, d'autre part, porterait trop fortement atteinte au principe de sécurité juridique.

La commission estime toutefois qu'un meilleur compromis aurait pu être trouvé à travers l'élargissement de la rétroactivité du dispositif aux seuls marins se trouvant à moins de trois ans de la liquidation de leur pension et proches d'un surclassement , qui risquent de devoir travailler plus longtemps afin de ne pas être pénalisés.

La commission regrette de ne pouvoir déposer un amendement en ce sens, en raison de l'article 40 de la Constitution selon lequel les amendements induisant une aggravation de charges publiques ne sont pas recevables. En effet, soumettre rétroactivement à cotisation les périodes d'activité partielle sur une période plus longue aurait pour conséquence de permettre des surclassements supplémentaires, ce qui induirait indirectement des droits à pension plus élevés dans le futur.

Toutefois, elle tient à appeler l'attention du Gouvernement sur cette question, en l'invitant à étendre le champ de l'application rétroactive de cet article de manière à neutraliser davantage les effets de la crise sanitaire sur les marins qui sont à moins de trois ans de leur retraite.

La commission a adopté l'article 21 sans modification.

Article 22 - Application du Paquet mobilité I

Cet article permet d'adapter le droit français aux règles issues du du Paquet mobilité I, adopté par les instances européennes en juillet 2020, qui renforce l'encadrement des conditions de travail des conducteurs routiers ainsi que les conditions d'accès au marché du transport routier.

Ces mesures vont dans le sens de la réduction de la concurrence déloyale dans le secteur du transport routier, de voyageurs et de marchandises.

La commission a adopté un amendement visant à opérer des clarifications rédactionnelles et à mieux encadrer l'obligation pour les entreprises de transport de conserver les documents attestant du respect du droit au retour des conducteurs étrangers dans leur État d'établissement.

I. LA NOUVELLE RÉGLEMENTATION RENFORCE LE CADRE JURIDIQUE DU TRANSPORT ROUTIER AU SEIN DE L'UNION EUROPÉENNE

A. Le paquet mobilité I : des mesures pour encadrer l'accès au marché du transport routier et y réduire la concurrence déloyale

Le « Paquet mobilité » est né d'un ensemble de propositions formulées par la Commission européenne en 2017, visant à moderniser le système de transports en Europe. Il comprend trois volets :

- le premier volet (ou « Paquet mobilité I ») concerne l'amélioration des conditions de travail des chauffeurs routiers et la régulation des règles de cabotage et de détachement les concernant ;

- le deuxième volet concernera la réduction des émissions de CO 2 dans le secteur des transports ;

- un troisième volet sera consacré à la connectivité et à la sécurité du transport routier.

Adopté le 15 juillet 2020, le Paquet mobilité I concerne le transport de marchandises et comprend trois textes (deux règlements et une directive) :

- le règlement (UE) 2020/1054 qui concerne les durées de conduite, de pause et de repos des conducteurs routiers ;

- le règlement (UE) 2020/1055 qui concerne les règles d'accès à la profession de conducteur routier ;

- la directive (UE) 2020/1057 qui concerne le détachement de conducteurs dans le secteur du transport routier.

Ces trois textes visent en réalité à modifier plusieurs règlements européens encadrant depuis plus de dix ans le transport routier au sein de l'Union européenne :

- le règlement (CE) n° 561/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 relatif à l'harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, modifiant les règlements (CEE) n° 3821/85 et (CE) n° 2135/98 du Conseil et abrogeant le règlement (CEE) n° 3820/85 du Conseil ;

- le règlement (CE) n° 1071/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes sur les conditions à respecter pour exercer la profession de transporteur par route, et abrogeant la directive 96/26/CE du Conseil ;

- le règlement (CE) n° 1072/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l'accès au marché du transport international de marchandises par route ;

- le règlement (UE) n° 165/2014 du Parlement européen et du Conseil du 4 février 2014 relatif aux tachygraphes dans les transports routiers, abrogeant le règlement (CEE) n° 3821/85 du Conseil concernant l'appareil de contrôle dans le domaine des transports par route et modifiant le règlement (CE) n° 561/2006 du Parlement européen et du Conseil relatif à l'harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route.

Cette réglementation répond à une nécessité : mieux encadrer le marché du transport routier au niveau européen. Le transport routier de marchandises est soumis à une concurrence intense au niveau intra-européen, notamment en provenance des pays d'Europe de l'Est. En effet, il n'est pas rare que des transporteurs saisissent l'opportunité du marché unique pour effectuer des opérations de transport dans d'autres pays, en profitant de la législation plus souple de leur pays d'implantation.

L'un des objectifs du Paquet mobilité est de parvenir, grâce à une législation européenne harmonisée, à limiter le dumping social et la fragmentation du marché liée aux mesures unilatérales prises par les États membres.

B. Un encadrement renforcé des temps de conduite et de repos des conducteurs routiers et des opérations de cabotage

Les temps de conduite et de repos des conducteurs routiers (règlement (CE) n° 561/2006)

Le règlement 561/2006 encadre depuis 2006 les temps de conduite et de repos des conducteurs routiers.

Il s'applique uniquement aux poids lourds (véhicules de plus de 3,5 tonnes) pour le transport de marchandises et de plus de neuf places pour le transport de voyageurs.

Le règlement fixe pour les conducteurs des plafonds de temps de conduite quotidiens (9 heures ou 10 heures) et hebdomadaires (56 heures sur une semaine ou 90 heures sur deux semaines). Il introduit également l'obligation de prendre des repos quotidiens normaux (11 heures) ou réduits (9 heures au minimum), ainsi que des repos hebdomadaires normaux dits « RHN » (45 heures toutes les deux semaines au minimum) ou réduits dits « RHR » (24 heures au minimum).

Sont également prévus des temps de pause (45 minutes après 4 heures 30 de conduite).

Les conducteurs doivent enregistrer ces temps de conduite et de repos au moyen d'un chronotachygraphe, installé à bord du véhicule.

Le règlement (UE) 2020/1054 a renforcé l'harmonisation des conditions de travail des conducteurs routiers. Pour cela, il a modifié le règlement (CE) n° 561/2006 qui concerne les temps de conduite et de repos des conducteurs et le règlement (UE) n° 165/2014 concernant le tachygraphe 35 ( * ) de la manière suivante :

- il crée un « droit au retour » à leur domicile ou au centre opérationnel de l'État membre d'établissement pour les conducteurs étrangers, toutes les trois ou quatre semaines selon les cas ;

- il autorise la prise de deux RHR successifs pour certaines opérations de transport international ;

- il interdit la prise de RHN dans le véhicule de manière explicite ;

- il prévoit l'application du règlement 561/2006 aux véhicules utilitaires légers à compter de 2026 ;

- il sanctionne le fait de rémunérer un conducteur au titre de la vitesse de livraison.

Par ailleurs, le règlement (UE) 2020/1055 renforce l'encadrement dont fait l'objet l'activité de cabotage au niveau européen, en modifiant le règlement 1072/2009.

Le cabotage désigne le fait, pour un transporteur appartenant à un État membre de l'Union européenne, d'opérer un transport « domestique » dans un autre État membre de l'Union européenne. Cette possibilité est autorisée, mais encadrée par le droit de l'Union européenne.

Le règlement 1072/2009 prévoit qu'une opération de cabotage ne peut être effectuée qu'après la dernière opération de déchargement de la marchandise qui fait l'objet d'un transport international. Le nombre d'opérations sur le territoire d'un même État est limité à trois dans un délai maximal de 7 jours à compter de la fin de l'opération de transport routier international.

La pratique du cabotage dans le transport routier de marchandises

Source : Ministère de la transition écologique

Le règlement (UE) 2020/1055 renforce ces règles en imposant aux transporteurs qui réalisent des opérations de cabotage le respect d'un délai minimal de quatre jours, dit « de carence », entre deux périodes de cabotage sur le territoire d'un même État membre pour un même véhicule.

II. LA NÉCESSITÉ DE TIRER LES CONSÉQUENCES DE LA NOUVELLE RÉGLEMENTATION DANS LE DROIT NATIONAL

Le dispositif proposé vise à introduire dans le code des transports les mesures résultant des règlements (UE) 2020/1054 et 2020/1055 concernant les conditions de travail des conducteurs routiers et l'encadrement des opérations de cabotage effectuées sur le territoire national.

• Concernant les conditions de travail des conducteurs routiers

Il modifie le titre unique du livre III de la troisième partie du code des transports :

- en introduisant dans le chapitre III consacré au temps de conduite et de repos des conducteurs routiers un nouvel article L. 3313-5 qui impose à l'entreprise de transport de fournir la preuve du respect du droit de retour des conducteurs étrangers. Par ailleurs, il est prévu que l'entreprise documente la manière dont elle s'acquitte de son obligation d'organiser le travail du conducteur de manière à ce qu'il soit en mesure de retourner au centre opérationnel de l'État membre d'établissement ou à son domicile, pour y prendre un temps de repos hebdomadaire. Cet article prévoit également que l'entreprise de transport doit permettre au conducteur d'apporter la preuve qu'elle s'acquitte de ses obligations à son égard, en cas de contrôle en bord de route ;

- en modifiant l'article L. 3315-4-1 qui concerne les sanctions pénales applicables aux entreprises de transport, de manière à sanctionner le fait d'organiser le travail d'un conducteur sans veiller à ce que celui-ci puisse retourner au centre opérationnel ou à son domicile au cours de chaque période de quatre semaines consécutives pour y prendre un repos hebdomadaire (45 heures). Ces deux infractions sont punies d'un an d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. Il est précisé que la sanction s'applique également lorsque l'entreprise ne permet pas au conducteur de rejoindre l'État membre d'établissement de son employeur avant le début de son temps de repos hebdomadaire, lorsqu'il a pris deux temps de repos hebdomadaires réduits consécutifs.

Ces dispositions visent à permettre la mise en oeuvre du droit de retour .

Il est également proposé de modifier le même article L. 3315-4-1 pour soumettre au même régime de sanction le fait, pour l'entreprise de transport, de rémunérer un conducteur routier en fonction de la rapidité de la livraison.

• Concernant l'encadrement du cabotage

Cet article modifie par ailleurs la section 2 du chapitre unique du titre II du livre IV de la troisième partie du code des transports, consacré au cabotage dans le transport de marchandises, afin de traduire les nouvelles dispositions encadrant ces opérations.

Il réécrit l'article L. 3421-3 de manière à prévoir la possibilité pour les entreprises de transport routier non établies en France d'effectuer des opérations de cabotage sur le territoire, dans le respect du règlement 1072/2009. Il réécrit par ailleurs l'article L. 3421-4 en prévoyant l'obligation pour les entreprises françaises faisant réaliser une opération de cabotage de veiller à ce que les services de transports commandés soient conformes à la réglementation européenne.

Il abroge les articles L. 3421-5 à L. 3421-7, par coordination avec l'introduction d'un nouvel article L. 3452-7-1 qui prévoit une sanction pénale (15 000 euros d'amende) pour les entreprises qui ne respectent pas les règles qui régissent les opérations de cabotage, notamment :

- lorsque le transport routier international a pour destination le territoire français, le fait de ne pas respecter l'obligation de n'effectuer qu'une opération de cabotage sur le territoire français et d'achever ce transport de cabotage dans un délai maximal de 3 jours suivant l'entrée à vide du véhicule sur le territoire ;

- le fait de ne pas respecter le délai maximal de 7 jours à compter du déchargement des marchandises ayant fait l'objet d'un transport routier international ;

- le fait de ne pas respecter le délai de carence de 4 jours entre deux opérations de cabotage sur le territoire français.

Par ailleurs, il effectue des coordinations aux articles L. 3452-8 et L. 3521-5 pour tirer les conséquences de l'abrogation des articles L. 3421-5 à L. 3421-7.

Enfin, il met à jour l'article L. 3421-9 qui concerne le contrôle de l'activité de cabotage routier pour tenir compte du règlement UE n° 165/2014 relatif au tachygraphe, qui a abrogé le règlement 3821/85 auquel cet article faisait toujours référence.

La majeure partie de ces mesures entrera en vigueur le 21 février 2022.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission approuve cet article qui permet d'introduire dans le droit national des mesures qui étaient très attendues, tant par la France que par nombre de ses voisins européens.

Le Paquet mobilité est une avancée très positive , qui va permettre de mieux encadrer les pratiques et de réduire certaines dérives , notamment les durées parfois abusives durant lesquelles certains conducteurs étrangers effectuant des opérations de transport international se retrouvent éloignés de chez eux. Il permet d'aller vers davantage d'harmonisation des conditions de travail des routiers et vers un encadrement désormais plus ferme du cabotage (3 opérations sur le territoire national sur 7 jours, suivies par 4 jours de carence pour le véhicule).

L'intégration de ces mesures en droit national permettra de prendre le chemin d'une concurrence plus saine et équitable sur le marché du transport routier . Toutefois, il convient d'être lucide sur le fait que ces mesures ne suffiront pas à lutter efficacement contre le dumping social. En l'absence d'harmonisation sociale et fiscale au niveau de l'Union européenne, les différentiels en termes d'impôt sur les sociétés et de charges sociales entre la France et certains pays d'Europe de l'Est qui réalisent des opérations de transport sur le territoire national demeurent une source de concurrence déloyale , qui pèse sur la compétitivité de nos entreprises de transport.

Cet article n'appelle pas d'observations particulières. La commission a toutefois adopté un amendement COM-16 visant à effectuer des clarifications rédactionnelles et à préciser que l'obligation pour les entreprises de transport de conserver les documents attestant du respect du droit au retour des conducteurs étrangers dans leur États d'établissement s'applique durant une durée limitée, fixée par voie réglementaire .

La commission a adopté l'article 22 ainsi modifié.

Article 23 - Transposition de l'article 1er de la directive 2020/1057 « lex specialis » détachement des conducteurs routiers

Cet article vise à transposer la directive 2020/1057 qui comporte des mesures spécifiques au détachement des conducteurs routiers.

La commission a adopté un amendement visant à corriger une erreur de référence.

I. LA DIRECTIVE 2020/1057 PRÉCISE LE CADRE SPÉCIFIQUE DU DROIT AU DÉTACHEMENT POUR LES CONDUCTEURS ROUTIERS

La législation européenne dispose depuis 1996 d'un cadre juridique applicable au détachement des travailleurs (directives 96/71/CE et 2014/67/UE). En juin 2018, cette directive a été révisée (directive 2018/957/UE modifiant la directive 96/71).

Toutefois, compte tenu des spécificités du secteur routier et du caractère particulièrement mobile de ses travailleurs, il a été décidé de prévoir un cadre juridique spécifique et adapté pour les conducteurs routiers au niveau européen .

La directive 2020/1057 ou « lex specialis » est l'une des composantes du Paquet mobilité I adopté en juillet 2020. Elle vise à appliquer des règles spécifiques aux conducteurs routiers faisant exception au cadre général posé par la directive 96/71. L'application de ces règles doit permettre de réduire la concurrence déloyale en garantissant aux conducteurs routiers une rémunération plus juste, reposant sur les règles définies dans l'État membre d'accueil.

Le cadre général du détachement fixé par le droit de l'Union européenne a été transposé en droit national dans le code du travail. Par ailleurs, des dispositions spécifiques existent déjà pour le détachement des travailleurs « roulants ou navigants » des transports terrestres, au niveau législatif (articles L. 1331-1 à L. 1331-3) et réglementaire (articles R. 1331-1 et R. 1331-7). Ces dispositions sont applicables aux activités relevant des articles L. 1262-1 et L. 1662-2 du code du travail, c'est-à-dire aux cas de détachement pour opérations de prestations de services internationales (« PSI »), au détachement interne à un groupe ainsi qu'au détachement temporaire.

L'article 1 er de la directive 2020/1057 prévoit de nouvelles dispositions spécifiques pour l'application du droit du détachement aux conducteurs employés par des entreprises de transport routier qui effectuent des opérations de transport de marchandises constituant une prestation de service transnationale .

Il précise le champ d'application de ces nouvelles règles dans le transport routier, en prévoyant qu'elles concernent les opérations de cabotage. En revanche, ne sont pas concernées les opérations de transit (c'est-à-dire la simple traversée d'un État sans déchargement de la marchandise). Il précise aussi que les conducteurs assurant des opérations bilatérales de transport (c'est-à-dire en provenance ou à destination de l'État membre d'établissement de l'entreprise) qui peuvent comporter des opérations intermédiaires, ne sont pas des travailleurs détachés, y compris lorsque l'opération comprend deux chargements et déchargements supplémentaires.

Enfin, il prévoit les obligations qui s'imposent aux entreprises de transport routier qui détachent des conducteurs routiers en prestations de services internationales (PSI), notamment celle de transmettre aux autorités nationales une déclaration de détachement au moyen du système d'information du marché intérieur (« IMI »).

L'article 9 de la directive 2020/1057 dispose que les États membres doivent transposer ces dispositions au plus tard le 2 février 2022, date à laquelle elles s'appliqueront au secteur routier.

II. LA NÉCESSITÉ DE TIRER LES CONSÉQUENCES DE CETTE NOUVELLE DIRECTIVE DANS LE DROIT NATIONAL RELATIF AU DÉTACHEMENT DES SALARIÉS ROULANTS

Le dispositif proposé insère un nouveau chapitre au sein du code des transports, après le chapitre unique, qui deviendra chapitre I er , du titre III du livre III de la première partie, consacré à la lutte contre la concurrence déloyale dans le transport.

Le chapitre I er est modifié de manière à restreindre le cadre général actuellement applicable au détachement dans le transport routier, aux cas de détachements qui ne relèvent pas de la directive 2020/1057. Est inséré un nouveau chapitre II, consacré au détachement de conducteurs en PSI, afin d'y introduire les dispositions portant transposition de la même directive.

Il est prévu, conformément à la directive, que ces règles spécifiques de détachement peuvent s'appliquer aux opérations de cabotage (nouvel article L. 1332-1), mais pas aux simples opérations de transit (article L. 1332-2) ni aux opérations de transport bilatérales de marchandises ou de voyageurs.

L'article prévoit également que les entreprises de transport établies en France qui détachent un salarié conducteur routier établissent une déclaration de détachement par voie dématérialisée et précise les modalités de décompte du délai de douze mois prévu à l'article L. 1262-4 du code du travail (délai au-delà duquel un employeur détachant un salarié devient soumis aux dispositions du code du travail applicables aux entreprises établies en France).

Il comprend aussi des dispositions concernant les obligations qui incombent aux entreprises qui détachent des conducteurs routiers soumis au régime spécifique de la directive n° 2020/1057, en prévoyant qu'elles transmettent aux autorités nationales une déclaration de détachement au moyen du système d'information du marché intérieur (IMI).

Enfin, il habilite le Gouvernement à prendre par ordonnances, dans un délai de douze mois, des mesures relevant du domaine de la loi afin d'assurer la cohérence des textes et d'opérer des coordinations dans les dispositions du code du transport et du code du travail portant sur le détachement, actualiser des références, corriger des erreurs matérielles faisant suite à l'entrée en vigueur du présent article.

La majeure partie de ces mesures entrera en vigueur le 2 février 2022.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La France oeuvre depuis plusieurs années au niveau européen pour un renforcement du cadre du détachement des travailleurs, il en va de la garantie d'une concurrence équitable entre les entreprises européennes et de conditions de travail plus protectrices pour les salariés.

La commission est donc très favorable à cet article qui transcrit de manière fidèle les dispositions de la directive (UE) n° 2020/1057, qui doit être transposée avant le 2 février 2022. Comme pour l'article 22 du présent projet de loi, ces mesures vont dans le sens d'une meilleure sécurisation juridique et d'une limitation des distorsions de concurrence. Elles permettront de réduire les divergences entre les pays de l'Union européenne dans la mise en oeuvre du droit au détachement dans le secteur routier.

De plus, les nouvelles règles faciliteront les contrôles pour les autorités nationales, grâce :

- au système d'information du marché intérieur (IMI) prévu par la directive : en pratique, l'instauration de ce système implique que les services du ministère du travail n'auront plus à traiter les attestations de détachement transmises qui concernent des prestations de service international, puisque les entreprises de transport les saisiront directement dans le système d'information. Cela constitue un gain de temps important pour l'administration qui devait traiter jusqu'à 45 000 attestations par an ;

- au tachygraphe intelligent , qui permettra notamment d'enregistrer le passage des frontières et les activités de chargement et déchargement. Ces données seront accessibles, à distance, aux autorités de contrôle.

La commission a adopté un amendement COM-17 afin de corriger une erreur de référence.

La commission a adopté l'article 23 ainsi modifié.

Article 24 - Pérennisation des aménagements réalisés par Eurotunnel en vue du rétablissement des contrôles douaniers et sanitaires dans le cadre de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne

Cet article vise à permettre l'autorisation des installations douanières et sanitaires mises en place en urgence dans la perspective du Brexit et du rétablissement des contrôles aux frontières entre la France et le Royaume-Uni.

Ces installations, situées sur la commune de Calais, ont été construites en 2019 et 2020 de manière dérogatoire à la loi dite « littoral ». Autorisée sur la base d'une habilitation législative à légiférer par ordonnance, leur implantation ne vaut que pour une durée de deux ans, qui devrait expirer en 2022.

L'intervention du législateur est donc nécessaire pour pérenniser ces installations et permettre qu'elles fassent l'objet d'un permis de construire.

La commission a adopté un amendement visant à effectuer une clarification juridique.

I. LA PERSPECTIVE DU BREXIT A CONDUIT À DES AMÉNAGEMENTS D'URGENCE DU TUNNEL SOUS LA MANCHE DÉROGATOIRES AU DROIT DE L'URBANISME

À la suite du référendum du 23 juin 2016 sur l'appartenance du Royaume-Uni à l'Union européenne , des années de négociation sur les conditions de retrait ont été nécessaires entre Londres et Bruxelles, qui ont permis d'aboutir à un accord en début d'année 2020. Le Royaume-Uni a donc officiellement quitté l'Union européenne le 31 janvier 2020. Depuis le 31 décembre 2020, fin de la période transitoire, le Royaume-Uni n'appartient plus au territoire douanier de l'Union .

Pour la France, cela implique un rétablissement des contrôles sanitaires et douaniers aux frontières entre les deux pays, en particulier au niveau du tunnel transmanche.

Le tunnel sous la Manche est une infrastructure ferroviaire reliant Calais à Folkestone depuis 1994. Il constitue une frontière sous-terraine entre les deux pays, et un enjeu économique et commercial majeur pour la France et pour l'Union européenne : au total, 26 % des échanges entre l'UE et le Royaume-Uni transitent par cette voie, pour un montant de 140 milliards d'euros par an. En 2019, plus de 2 millions de voitures, 50 000 autocars et 1,5 million de poids lourds ont transité par le tunnel.

En 2019, l'enlisement des négociations et les rejets successifs par le Parlement britannique de l'accord négocié avec l'Union européenne ont fait craindre un « Brexit sans accord » et un rétablissement brutal des contrôles aux frontières. Cela a conduit les autorités françaises à construire des infrastructures en urgence, qui ont été remises officiellement en avril 2020. Le centre de contrôle ainsi mis en place, appelé « SIVEP-Douanes », comporte notamment neuf quais de déchargement, une zone de consigne frigorifique et un parking de 100 places destiné à accueillir les poids lourds en attente de contrôle, mais aussi 1 000 m 2 de bureaux. Depuis le 1 er janvier 2021, il permet d'effectuer les contrôles douaniers et sanitaires sur les marchandises et animaux qui franchissent la frontière.

Or, pour être situées au plus près des flux de sortie du tunnel, ces installations ont été construites dans une zone soumise à la loi dite « littoral » , en méconnaissance du principe d' urbanisation en continuité des constructions existantes qui y est applicable. La loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral encadre strictement l'urbanisation des zones littorales. Ces règles sont désormais fixées dans le code de l'urbanisme, au chapitre I er du titre II du livre I er comprenant les articles L. 121-1 et suivants.

Pour permettre la réalisation de ces travaux, le Gouvernement a été habilité par le Parlement à prendre par voie d'ordonnances les mesures nécessaires pour tirer les conséquences du Brexit en matière de « de contrôle sur les marchandises et passagers à destination et en provenance du Royaume-Uni et de contrôle vétérinaire et phytosanitaire à l'importation en provenance du Royaume-Uni » (6° du I de l'article 1 er de la loi n° 2019-30 du 19 janvier 2019 habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne). L'ordonnance n° 2019-36 du 23 janvier 2019 portant diverses adaptations et dérogations temporaires nécessaires à la réalisation en urgence des travaux requis par le rétablissement des contrôles à la frontière avec le Royaume-Uni en raison du retrait de cet État de l'Union européenne a été publiée en application de cette loi. Elle prévoit :

- la limitation de la durée d'implantation de ces infrastructures à deux ans ;

- la possibilité d'autoriser leur implantation pérenne avant l'expiration de ce délai, « dans les conditions de droit commun prévues par le code de l'urbanisme » .

Or, le code de l'urbanisme ne permet pas, dans le droit actuel, l'autorisation de telles installations. En effet, l'article L. 121-4 prévoit la possibilité de construire certaines installations en zone soumise à des restrictions au titre de la loi littoral, lorsque leur localisation répond à une « nécessité technique impérative » . Toutefois, ces installations sont énumérées de façon limitative, il s'agit des « installations, constructions, aménagements de nouvelles routes et ouvrages nécessaires à la sécurité maritime et aérienne, à la défense nationale, à la sécurité civile et ceux nécessaires au fonctionnement des aérodromes et des services publics portuaires autres que les ports de plaisance ».

Or, en l'espèce, si la localisation des constructions concernées répond bien à un impératif technique du fait de la nécessité d'un accès direct au flux de sortie du tunnel, celles-ci n'entrent pas dans le champ prévu de l'article L. 121-4 du code de l'urbanisme qui ne mentionne pas les installations de type ferroviaire .

L'intervention du législateur est donc nécessaire pour permettre l'autorisation de ces infrastructures avant l'expiration du délai de deux ans, fixée à 2022 .

II. LA NÉCESSAIRE INSCRIPTION DE LA PÉRENNISATION DE CES INSTALLATIONS DANS LA LOI

Le dispositif proposé a pour objet de permettre l'autorisation des infrastructures construites dans la zone « SVIPEP-Douanes », en prévoyant une dérogation aux dispositions du chapitre I er du titre II du livre Ier du code de l'urbanisme . En pratique, cette dérogation permettra la délivrance d'un permis de construire au centre SIVEP-Douanes .

Compte tenu de son caractère exceptionnel et dérogatoire au regard de la loi littoral, le dispositif fait référence aux installations, constructions et aménagements liés au lien transmanche dans le cadre du rétablissement des contrôles des marchandises et des passagers à destination ou en provenance du Royaume-Uni . Pour le même motif, a été fait le choix de ne pas inscrire ces dispositions dans le code de l'urbanisme mais de les rédiger en clair dans le projet de loi. En effet, cet article vise à régulariser des constructions déjà effectuées mais n'a pas pour objet de permettre des aménagements futurs.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission est favorable à cet article qui vise à régulariser des équipements coûteux et existants qui, de surcroît, ont été rendus indispensables par le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne le 1 er janvier 2021 .

En outre, le Gouvernement a indiqué qu'une compensation de l'impact environnemental de l'aménagement était prévue : un site d'environ 30 hectares devra faire l'objet d'un arrêté de protection de biotope. De plus, pour compenser l'impact des aménagements sur une zone humide, « une dizaine d'autres hectares » sont identifiés sur le territoire de la commune de Calais pour des mesures de compensation. Il indique que la garantie sera couverte par une ORE. Compte tenu de la localisation des installations du site « SIVEP-Douanes » dans une zone sensible soumise à la loi « littoral », la commission sera attentive à la mise en oeuvre de ces compensations.

Toutefois, le rapporteur s'interroge sur la possibilité, pour l'Eurotunnel, d'opérer des aménagements futurs en matière de sécurité et de sûreté notamment (la réglementation « Entry-Exit system » prévoyant de nouvelles obligations à compter de 2022), compte tenu de l'application stricte de la loi littoral dont il fait l'objet. Il souhaite interroger le Gouvernement sur la manière dont il entend prendre en compte les contraintes et besoins auxquels l'Eurotunnel pourrait faire face dans les prochaines années. Toutefois, il souligne le site de l'Eurotunnel est en partie situé sur le territoire de deux communes, Coquelles et Fréthun, qui ne sont pas soumises à la loi littoral. En tout état de cause, des aménagements sont donc possibles dans cette zone dans les conditions de droit commun.

La commission a adopté un amendement COM-20 afin d'apporter une clarification juridique pour rendre le dispositif pleinement opérationnel.

La commission a adopté l'article 24 ainsi modifié.

Article 24 bis (nouveau) - Ratification de diverses ordonnances relatives aux transports

Le présent article, introduit par l'amendement COM-18 , prévoit la ratification de 6 ordonnances relatives aux transports, qui ont été publiées en 2020 et 2021. Ces ordonnances ont été prises par le Gouvernement sur le fondement de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM).

I. LE DROIT EXISTANT : DES NOMBREUSES ORDONNANCES RELATIVES AUX TRANSPORTS PUBLIÉES PAR LE GOUVERNEMENT EN APPLICATION DE LA LOM, SANS QUE CELLES-CI AIENT ÉTÉ RATIFIÉES

Le Parlement a octroyé au Gouvernement 31 habilitations à légiférer par ordonnances dans le cadre de la LOM.

22 ordonnances ont été publiées. Toutefois, à la date du 12 mai 2021, si un projet de loi de ratification a parfois été déposé par le Gouvernement, aucune de ces ordonnances n'a été ratifiée.

II. LE DROIT PROPOSÉ : RATIFIER CERTAINES ORDONNANCES AFIN DE CONSOLIDER LEUR PLACE DANS L'ORDONNANCEMENT JURIDIQUE ET LEUR CONFÉRER PLEINEMENT VALEUR LÉGISLATIVE

Du point de vue de la hiérarchie des normes, la ratification a pour effet de consolider l'ordonnancement juridique. Elle évite que des normes intervenues dans le domaine législatif puissent être remises en cause à tout moment devant le juge administratif, au détriment de la sécurité juridique.

La décision n° 2020-843 QPC du 28 mai 2020, dite « Force 5 » n'a pas remis en cause ce principe.

Dans cette décision, le Conseil constitutionnel s'est reconnu compétent pour examiner des dispositions issues d'une ordonnance non ratifiée, reconnaissant par là que celles-ci pouvaient « être regardées comme des dispositions législatives » . Deux questions pouvaient alors se poser : d'une part, sur le régime contentieux des ordonnances non ratifiées et, d'autre part, sur la place du Parlement et la portée de la ratification expresse.

Toutefois, dans le commentaire de la décision, le conseil a limité la portée de cette jurisprudence au seul contentieux lié à une QPC : il est précisé que le juge constitutionnel ne peut connaître, dans le cadre du contentieux lié à une QPC, de dispositions issues d'une ordonnance non ratifiée qu'à la condition :

- que celles-ci interviennent dans le domaine législatif ;

- que le délai d'habilitation fixé par le Parlement ait expiré .

Le Conseil constitutionnel précise en revanche que « cette évolution ne remet naturellement pas en cause les autres voies de recours permettant de contester ces dispositions, au regard d'autres motifs que leur conformité aux droits et libertés constitutionnellement garantis » . En d'autres termes, le juge administratif demeure compétent pour connaître du contentieux des ordonnances non ratifiées, lorsque celui-ci ne porte pas sur la conformité de leurs dispositions aux droits et libertés garantis par la Constitution.

On peut supposer que le Conseil constitutionnel a été amené à ce revirement de jurisprudence dans un souci de garantir la protection des droits et libertés garantis par la Constitution, dans un contexte où le recours aux ordonnances par le Gouvernement est désormais massif , tandis que la pratique de la ratification des ordonnances, quant à elle, se raréfie.

En tout état de cause, la commission estime que cette jurisprudence plaide pour une appropriation par le Parlement de sa compétence en matière de ratification des ordonnances . Une pratique plus systématique de la ratification ne peut que conforter les prérogatives du Parlement et clarifier le régime contentieux des ordonnances.

La commission propose donc de ratifier les ordonnances suivantes relatives au transport maritime :

1° L'ordonnance n° 2020-234 du 11 mars 2020 modifiant le champ d'application du permis d'armement et du régime des fouilles de sûreté des navires ;

2° L'ordonnance n° 2020-1162 du 23 septembre 2020 relative aux conditions de travail des jeunes travailleurs de moins de dix-huit ans à bord des navires et à l'embarquement de personnes autres que gens de mer à des fins d'observation ou de mise en situation en milieu professionnel ;

3° L'ordonnance n° 2020-933 du 29 juillet 2020 relative aux conditions d'exercice d'activités maritimes accessoires et à l'adaptation des conditions d'exercice de certaines activités maritimes aux voyages à proximité du littoral ;

4° L'ordonnance n° 2020-599 du 20 mai 2020 portant mise en oeuvre de la convention sur le travail dans la pêche et d'amendements à la convention du travail maritime ;

5° L'ordonnance n° 2021-77 du 27 janvier 2021 modifiant les dispositions du code des transports relatives aux services privés de recrutement et de placement des gens de mer ;

6° Ordonnance n° 2021-266 du 10 mars 2021 portant application de la convention conclue à Nairobi sur l'enlèvement des épaves.

CHAPITRE II BIS (nouveau) - Dispositions relatives à la prévention des risques
Article 25 - Régime de sanctions applicables aux violations du règlement européen relatif au mercure

Cet article vise à tirer les conséquences de l'entrée en vigueur en 2018 du règlement (CE) n° 852/2017 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 relatif au mercure qui abroge le règlement (CE) n° 1102/2008, visant à réduire les rejets de mercure liés aux activités humaines.

La commission a adopté un amendement visant à insérer un chapitre spécifique pour les articles concernant la prévention des risques et à effectuer des corrections rédactionnelles.

I. UN ENCADREMENT PLUS STRICT DE L'UTILISATION DU MERCURE AU SEIN DE L'UNION EUROPÉENNE DEPUIS 2017

Le mercure est une substance particulièrement toxique, qui constitue un danger pour la santé humaine ainsi que pour la faune et la flore sauvage.

Le règlement n° 852/2017 du 17 mai 2017 relatif au mercure et abrogeant le règlement (CE) n° 1102/2008 indique que la pollution au mercure est de nature transfrontalière, et que « 40 % à 80 % des dépôts totaux de mercure dans l'Union proviennent de l'extérieur de ses frontières » , un élément qui s'explique par la présence de cette substance dans l'air. La principale source de la pollution au mercure réside dans les activités anthropiques telles que l'extraction minière, l'utilisation du mercure dans certains produits ou procédés industriels ou encore la combustion du charbon et la gestion des déchets comportant du mercure.

L'Europe a adopté dès 2005 une stratégie de lutte contre la pollution liée au mercure. Elle dispose aujourd'hui d'un dispositif réglementaire parmi les plus complets au monde pour encadrer et réduire l'utilisation de cette substance.

Le règlement n° 1102/208 du 22 octobre 2008 relatif à l'interdiction des exportations de mercure et au stockage de cette substance prévoyait l'interdiction de l'exportation de substances (mercure métallique, minerai de cinabre, chlorure de mercure...) dont la teneur en mercure était supérieure à 95 % masse/masse, en provenance de la Communauté européenne à compter de 2011. L'article 7 de ce règlement prévoyait la détermination d'un régime de sanction des infractions à ces obligations par les États membres. En France, cela s'est traduit par un régime de sanctions pénales prévu à l'article L. 541-46 du code de l'environnement 36 ( * ) .

En 2017 , l'Union européenne a renforcé ce dispositif en adoptant le règlement (CE) n° 852/2017 . Ce texte avait notamment pour objet de transposer au sein de la législation de l'Union européenne la convention internationale de Minamata, adoptée en 2013 sous l'égide des Nations unies, qui vise à protéger la santé humaine et l'environnement des effets néfastes du mercure. Le règlement 852/2017 soumet l'utilisation du mercure à un encadrement plus strict qu'auparavant . Plus précisément, il interdit l'importation, l'exportation et la production de mercure à partir d'un calendrier (fixé en annexe II du règlement) échelonné de décembre 2018 à 2020, selon les produits considérés (lampes d'éclairages, pesticides, piles ou accumulateurs...). Il prévoit également, en son article 16, que les États membres déterminent un régime de sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives » à l'encontre des violations de ces dispositions.

Plus de trois ans après son entrée en vigueur, le droit français n'a pas encore tiré les conséquences du nouveau règlement en 2017 , l'article L. 541-46 du code de l'environnement faisant toujours référence au règlement de 2008. En pratique, cette lacune ne semble pas avoir posé de difficulté majeure puisque, d'une part, le règlement est d'application directe et, d'autre part, aucun procès-verbal pour infraction au règlement de 2017 n'a dû être dressé depuis son entrée en vigueur.

Toutefois, il importe de mettre le régime de sanction français en cohérence avec la nouvelle réglementation, en faisant référence au règlement de 2017 afin d'éviter toute incertitude juridique.

Récemment, la Commission européenne a fait savoir qu'elle comptait réviser le règlement de 2017 dans les prochaines années afin de réduire de manière encore plus drastique l'utilisation du mercure dans certains produits, notamment les amalgames dentaires. Il est donc possible que la France doive à nouveau ajuster son droit national à cette nouvelle réglementation.

II. AVEC RETARD, LA FRANCE DOIT TIRER LES CONSÉQUENCES DE LA NOUVELLE RÉGLEMENTATION SUR LE MERCURE AFIN DE RENDRE PLEINEMENT EFFECTIF SON RÉGIME DE SANCTIONS

Le chapitre I er du titre II du livre V du code de l'environnement, consacré au contrôle des produits chimiques qui présentent un risque pour la santé humaine, ne fait pas encore référence au règlement de 2017 relatif au mercure.

Le dispositif proposé vise donc à rendre pleinement opérant le système de sanctions prévu en cas d'infraction au règlement n° 852/2017, en mettant à jour les références à l'ancienne réglementation dans le code de l'environnement. Cette mise à jour concerne deux régimes de sanctions , s'agissant du contrôle des produits chimiques, mais aussi de la gestion des déchets. Il permet notamment :

- de prévoir, à l'article L. 521-21 du code de l'environnement relatif aux sanctions pénales qui peuvent être prononcées par l'autorité administrative dans le cadre du contrôle des produits chimiques, une peine de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende pour le non-respect des mesures d'interdiction ou de prescription édictées en application du règlement de 2017 relatif au mercure ;

- de prévoir que les agents habilités à procéder à des contrôles en matière de produits chimiques sont également habilités à rechercher et constater les infractions au règlement de 2017 relatif au mercure ;

- d' actualiser une référence au règlement 852/2017 , obsolète depuis plus de trois ans, à l'article L. 541-46 du code de l'environnement qui concerne les sanctions pénales applicables dans le cadre de la gestion des déchets.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission est favorable à cet article qui permet de mettre le droit national en conformité avec la nouvelle réglementation européenne, même si c'est avec retard et, de sécuriser juridiquement les sanctions prises en cas d'infraction au règlement sur le mercure.

Cet article se borne à consolider le régime de sanctions déjà prévu en droit français . Il n'a pas d'impact particulier sur les entreprises puisque celles-ci étaient déjà soumises aux dispositions du règlement qui est d'application directe. Il n'appelle donc pas d'observation particulière.

La commission a adopté un amendement COM-19 afin d'opérer des corrections d'ordre rédactionnel et d'assurer l'application effective de cet article. Par ailleurs, cet amendement permet de rassembler les articles 25 à 27, qui portent sur la prévention des risques liés à la pollution, dans un chapitre spécifique, et ce, dans un souci d'améliorer la lisibilité du projet de loi.

La commission a adopté l'article 25 ainsi modifié.

Article 26 - Régime de sanctions applicables aux violations du règlement européen relatif aux fluides frigorigènes

Cet article vise à introduire en droit national un régime de sanction effectif pour assurer le respect par les producteurs et importateurs des quotas concernant la mise sur le marché de certains fluides frigorigènes, particulièrement nocifs pour l'environnement.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LE DROIT INTERNE NE PERMET PAS DE SANCTIONNER LE NON-RESPECT DES QUOTAS DE FLUIDES FRIGORIGÈNES DE MANIÈRE OPÉRANTE

Les fluides frigorigènes sont des substances chimiques qui, grâce à leur capacité réfrigérante, sont souvent utilisées pour des applications industrielles telles que la réfrigération, la climatisation, le conditionnement d'air, ou encore le refroidissement de liquides. Ils se répartissent en plusieurs familles, notamment :

- les fluides naturels (eau, dioxyde de carbone...) ;

- les hydrocarbures comme le propane ;

- les hydrocarbures halogénés .

À l'heure actuelle, les hydrocarbures halogénés font partie des fluides frigorigènes les plus utilisés, au premier rang desquels les hydrofluorocarbures (ou HFC). Or, les HFC représentent une forte menace pour l'environnement : avec un pouvoir de réchauffement entre 1 000 et 15 000 fois supérieur à celui du CO 2 , ils constituent un gaz à effet de serre très puissant.

De ce fait, les HFC font l'objet d'un encadrement strict au niveau européen visant à en réduire l'utilisation. Le règlement (UE) n° 517/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif au gaz à effet de serre fluorés et abrogeant le règlement (CE) n° 842/2006 a instauré un mécanisme de réduction progressive des quantités de HFC mises sur le marché de l'Union européenne, de 100 % en 2015 jusqu'à 21 % en 2030 des quantités en tonnes équivalent CO 2 mises en moyenne sur le marché au cours des années 2009 à 2012.

Diminution des HFC mis sur le marché prévue par le règlement (UE) n° 517/2014

Source : DGPR

Pour mettre en oeuvre ces diminutions de quantités de HFC mises sur le marché, le règlement s'appuie sur un système de quotas prévu en son article 15 : la Commission européenne alloue des quotas aux producteurs et importateurs de HFC sur la base des déclarations de mises sur le marché réalisées par ces acteurs chaque année. Les nouveaux entrants sur le marché peuvent demander des quotas en complétant une déclaration à la Commission européenne.

Les quotas alloués sont réévalués tous les trois ans. Ils dépendent d'une valeur de référence, qui est attribuée à chaque acteur sur la base des mises sur le marché moyennes effectuées entre 2009 et 2012, et diminuée par la suite selon un rythme défini par le règlement ( cf. graphique ci-dessus). Pour les nouveaux entrants, la valeur de référence est attribuée sur la base des besoins déclarés à la Commission.

Les équipements préchargés (par exemple, les climatiseurs) ne peuvent par ailleurs être mis sur le marché qu'à la condition que les HFC qu'ils contiennent ont été comptabilisés dans le système de quotas. En pratique, aucun quota ne peut être délivré aux metteurs sur le marché d'équipements préchargés en fluides frigorigènes : les importateurs d'équipements préchargés doivent obtenir l'autorisation, de la part d'une entreprise détentrice de quotas de HFC, d'utiliser une partie de ses quotas (article 18 du règlement).

Le règlement prévoit en son article 25 que les États membres mettent en oeuvre des sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives » pour assurer le respect de ces obligations. Il s'agit donc d'en tirer les conséquences dans le régime national de sanction.

II. L'INTRODUCTION D'UN RÉGIME DE SANCTION DU DÉPASSEMENT DES QUOTAS DE HFC CONFORME AU RÈGLEMENT DE 2014

Le dispositif proposé modifie le code de l'environnement pour prévoir un système de sanction pleinement opérant en cas de dépassement des quotas fixés par l'Union européenne.

L'article L. 521-17 du code de l'environnement définit les sanctions administratives qui peuvent être prononcées en matière de contrôle des produits chimiques mentionne le règlement 517/2014 depuis 2015, référence introduite par la loi n° 2015-1567 du 2 décembre 2015 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la prévention des risques. Toutefois, cet article prévoit, dans les six mois suivant le constat d'un manquement, que l'autorité administrative « peut mettre en demeure » le fabricant ou l'importateur en infraction de satisfaire aux obligations qui s'imposent à lui. Or, un tel cas de figure est exclu par le règlement (UE) 2017/2014 qui ne prévoit pas la possibilité pour un fabricant ou un importateur de se voir attribuer a posteriori un quota ou une autorisation de quota correspondant à la quantité de HFC qu'il a mise sur le marché. Il est donc proposé d'exclure cette possibilité de mise en demeure en cas d'infractions aux quotas alloués, en application de l'article 15 du règlement 2017/2014.

En conséquence, la mention du règlement 2017/2014 à l'article L. 521-18 du code de l'environnement qui prévoit la procédure de sanction administrative faisant suite à la mise en demeure, inopérante, est supprimée du dispositif.

Un nouvel article L. 521-18-1 dans le code de l'environnement dédié à la procédure de sanction administrative en cas de dépassement des quotas prévus par le règlement 2017/2014 reprend le régime de sanction actuellement applicable : l'autorité administrative peut ordonner au fabricant ou à l'importateur le paiement d'une amende , « au plus égale au produit de la quantité équivalente en tonne équivalent dioxyde de carbone du dépassement de quota par un montant de 75 euros » . Pour respecter le principe du contradictoire , il est permis à la personne ayant dépassé le quota de prendre connaissance du dossier et de présenter ses observations avant qu'une amende ne soit prononcée.

Conformément au règlement 2017/2014, une sanction équivalente est prévue pour les fabricants ou importateurs mettant sur le marché des équipements importés et préchargés en hydrofluorocarbures, en dépassant l'autorisation de quota allouée en application de l'article 18 du règlement 2017/2014.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

Cet article permet d'assurer un respect strict par la France des obligations qui résultent de la réglementation européenne. Il mérite d'être approuvé.

Rappelons que la France s'est engagée dans la lutte contre le réchauffement climatique , à travers l'accord de Paris de 2015 et la stratégie nationale bas carbone. Dans ce cadre, elle a également pris des mesures destinées à réduire l'utilisation de HFC : à titre d'illustration, l'article 197 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a instauré une taxe sur les HFC qui est entrée en vigueur le 1 er janvier 2021.

La commission a adopté l'article 26 sans modification.

Article 27 - Mise à jour avec le droit européen des règles applicables aux polluants organiques persistants

Cet article vise à consolider le droit national afin de rendre pleinement opérantes les procédures de sanction des infractions au règlement 2019/1021 sur les polluants organiques persistants.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LE DROIT INTERNE N'A PAS PRIS EN COMPTE L'ENTRÉE EN VIGUEUR EN 2019 D'UN RÈGLEMENT SUR LES POLLUANTS ORGANIQUES PERSISTANTS

Les polluants organiques persistants (POP) recouvrent un ensemble de substances chimiques qui possèdent quatre particularités, explicitées par la convention de Stockholm en 2001 : elles sont persistantes, bioaccumulables, toxiques et mobiles. Les POP se dégradent lentement et tendent à s'accumuler dans les organismes vivants. À ce titre, ils constituent un risque pour la santé humaine et pour l'environnement. On compte notamment parmi eux des pesticides et certains hydrocarbures et dioxines.

Le règlement (UE) 2019/1021 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les polluants organiques persistants (POP) vise à diminuer la production et l'utilisation des POP afin de réduire les rejets liés à ces substances. En pratique, il interdit ou limite la fabrication, la mise sur le marché et l'utilisation de POP dont la liste est renvoyée dans une annexe. Ce texte réglemente également la gestion les déchets contenant des POP .

Le règlement de 2019 remplace le règlement (CE) n° 850/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 concernant les polluants organiques persistants et modifiant la directive 79/117/CEE.

II. L'ACTUALISATION TARDIVE DE LA RÉFÉRENCE AU RÈGLEMENT UE 2019/1021 EN DROIT INTERNE POUR CONSOLIDER LES PROCÉDURES DE SANCTION

Le dispositif proposé vise à remplacer la référence, obsolète, au règlement de 2004 par la référence au règlement (UE) 2019/1021 dans divers articles du code de l'environnement, notamment aux articles L. 521-12 concernant le contrôle du respect des dispositions du règlement, et L. 541-46 concernant la procédure de sanction en cas de non-respect de l'article 7 du règlement sur la gestion des déchets (deux ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende).

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

Cette mise à jour rédactionnelle était indispensable pour sécuriser le droit national et rendre pleinement effectives les procédures de sanctions en cas d'infractions aux règles concernant la fabrication, la mise sur le marché ou l'utilisation des polluants organiques persistants, qui constituent une menace grave pour les écosystèmes et la santé humaine.

La commission a adopté l'article 27 sans modification.

CHAPITRE III - Dispositions relatives aux minerais de conflit
Article 28 - Contrôle du devoir de diligence sur l'importation des minerais de conflit

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Lors de sa réunion, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté les amendements COM-6 , COM-7 , COM-8 et COM-9 de son rapporteur, M. François Bonneau.

La commission a adopté l'article 28 ainsi modifié.

CHAPITRE IV - Dispositions relatives à la protection et à l'information environnementales
Article 29 - Clarification du calendrier des mesures destinées à garantir le bon état des eaux par cohérence avec le droit européen

Cet article vise à clarifier les règles relatives au calendrier des mesures destinées à garantir le bon état des eaux en application de la directive 2013/39/UE du Parlement européen et du Conseil du 12 août 2013 modifiant les directives 2000/60/CE et 2008/105/CE en ce qui concerne les substances prioritaires pour la politique dans le domaine de l'eau.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LA DIRECTIVE 2013/39/UE A FAIT L'OBJET D'UNE DOUBLE TRANSPOSITION EN FRANCE, SOURCE DE CONFUSION QUANT AU DROIT APPLICABLE

La politique de l'Union européenne dans le domaine de l'eau est régie par la directive-cadre 2000/60/CE, adoptée le 23 octobre 2000 . Cette directive vise à prévenir et réduire la pollution de l'eau, promouvoir son utilisation durable, protéger l'environnement, améliorer l'état des écosystèmes aquatiques et atténuer les effets des inondations et des sécheresses.

Au fil des années, elle a été complétée par d'autres directives, parmi lesquelles la directive 2013/39/UE du Parlement européen et du Conseil du 12 août 2013, dont l'annexe I établit une liste des substances chimiques, présentant un danger avéré, qui doivent faire l'objet d'une surveillance spécifique dans l'ensemble des États membres.

Elle prévoit que les États membres peuvent adopter des dispositions pour réduire la présence dans les milieux aquatiques de ces substances dangereuses, dans le but de respecter les objectifs de qualité des eaux imposés par la directive-cadre de 2000.

Ainsi que le relève le Conseil d'État, cette directive 2013/39/UE du 12 août 2013 « a fixé un calendrier échelonné pour la prise en compte d'un certain nombre de substances (ou groupes de substances) et de normes de qualité environnementale entrant dans l'appréciation des états écologiques et chimiques et du potentiel écologique des eaux de surface » .

Cette directive a été transposée de manière quasi concomitante à deux niveaux de notre hiérarchie des normes :

- un arrêté du 28 juin 2016 a modifié l'annexe 8 de l'arrêté du 25 juin 2010 relatif aux méthodes et critères d'évaluation de l'état écologique, de l'état chimique et du potentiel écologique des eaux de surface ; cet arrêté a été pris en application de l'article R. 212-18 du code de l'environnement qui habilite le ministre chargé de l'environnement à définir les méthodes et critères servant à caractériser les différents états écologiques et chimiques ou les potentiels écologiques des masses d'eau et à fixer la liste des polluants à prendre en compte et les normes de qualité environnementale correspondantes ;

- la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a modifié l'article L. 212-1 du code de l'environnement, de manière à prévoir que « les échéances d'atteinte du bon état chimique [pour certaines eaux de surface], prescrites par les directives européennes, sont fixées par voie réglementaire. »

Cet ajout résultant de la loi pour la reconquête de la biodiversité, redondant avec les dispositions introduites dans l'arrêté du 25 juin 2010 en juin 2016, induit une ambiguïté sur les échéances à prendre en compte. L'exposé des motifs évoque d'ailleurs une « erreur de transposition » . En outre, l'avis du Conseil d'État précise que l'article 34 de la Constitution ne s'oppose pas à la suppression de cette précision, de nature réglementaire, dans la loi.

II. UNE CLARIFICATION DES ÉCHÉANCES D'ATTEINTE DU BON ÉTAT DES EAUX, LA SUPPRESSION D'UNE DISPOSITION INUTILE DANS LA LOI DE 2016 SUR LA BIODIVERSITÉ

Le dispositif proposé modifie l'article L. 212-1 du code de l'environnement de manière à supprimer la phrase, introduite en 2016 par la loi pour la reconquête de la biodiversité, qui renvoie la fixation d'échéances d'atteinte du bon état chimique des eaux au pouvoir réglementaire. En conséquence, il est proposé de supprimer une référence ambiguë relative à des « délais », pour ne renvoyer qu'au délai mentionné à la première phrase de l'article L. 212-1, concernant une échéance antérieure datant de 2015.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

Cet article vise à lever une ambiguïté induite par des dispositions redondantes prises pour transposer la directive de 2013 sur le bon état des eaux, en supprimant des dispositions de la loi de 2016 relative à la reconquête de la biodiversité qui étaient redondantes avec d'autres mesures prises par voie réglementaire.

Il permet une clarification juridique utile et n'appelle pas d'autres observations de la part de la commission.

La commission a adopté l'article 29 sans modification.

Article 30 - Clarification du contrôle exercé sur les installations d'assainissement non collectif par cohérence avec le droit européen

Cet article vise à clarifier le champ d'application de l'agrément auquel sont soumises certaines installations d'assainissement non collectif. Il s'agit de lever une ambiguïté de procédure afin d'assurer la conformité du droit national au règlement sur les produits de construction de 2011 (dit « RPC »), qui proscrit de soumettre des produits portant un marquage « CE » à des contrôles supplémentaires.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LE DISPOSITIF DE CONTRÔLE DES INSTALLATIONS D'ASSAINISSEMENT NON COLLECTIF PRÉSENTE UN RISQUE DE NON-CONFORMITÉ AU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE

En France, 20 % de la population réside dans un immeuble non raccordé à un réseau public d'assainissement des eaux usées, mais doté d'une installation d'assainissement non collectif.

Depuis la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales prévoit une procédure d'agrément national pour les installations d'assainissement non collectif (ANC) recevant des eaux usées domestiques ou assimilées ne disposant pas d'un système de traitement par le sol. Les modalités de délivrance de cet agrément sont fixées par l'arrêté du 7 septembre 2009 fixant les prescriptions techniques applicables aux installations d'assainissement non collectif recevant une charge brute de pollution organique inférieure ou égale à 1,2 kg/j de DBO5.

Cet agrément vise à s'assurer que les installations d'ANC dans lesquelles sont intégrées des dispositifs d'ANC ne présentent aucun risque pour la santé ou l'environnement. Or, certains dispositifs d'ANC font déjà l'objet d'un marquage CE en application du règlement relatif aux produits de construction (règlement (UE) n° 305/2011 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2011 établissant des conditions harmonisées de commercialisation pour les produits de construction et abrogeant la directive 89/106/CEE du Conseil). Ainsi que le souligne le Conseil d'État dans son avis, les dispositifs d'assainissement non collectif sont considérés au niveau européen comme des produits de construction. Le marquage CE (CE pour « conformité européenne ») a été introduit dans le cadre de la législation européenne d'harmonisation technique. Il figure sur la plupart des produits non alimentaires, et indique que le produit répond aux exigences des directives qui lui sont applicables, ce qui permet de faciliter sa libre circulation sur le marché européen.

Le règlement européen prévoit que les États membres doivent s'abstenir d'entraver la mise à disposition sur le marché ou l'utilisation de produits de construction portant le marquage CE , lorsque les performances déclarées de ces produits sont conformes aux exigences régissant leur utilisation (article 7). En conséquence, l'application d'une procédure nouvelle de contrôle à un produit faisant déjà l'objet d'un marquage CE n'est pas permis par ce règlement.

Or, la rédaction actuelle du dernier alinéa de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales peut laisser penser que les installations d'ANC portant le marquage CE peuvent être soumises à des contrôles supplémentaires. Une clarification rédactionnelle s'impose donc afin de lever cette ambiguïté.

II. CLARIFIER LE DROIT DE MANIÈRE À PRÉCISER, QUE LES INSTALLATIONS SOUMISES AU « MARQUAGE CE » NE FONT PAS L'OBJET DE CONTRÔLES SUPPLÉMENTAIRES

Le dispositif envisagé propose d'utiliser une terminologie plus conforme aux exigences du droit européen, en supprimant la référence ambiguë au « dispositif » d'assainissement non collectif, pour y substituer le terme plus global « d'installation » :

- au septième alinéa du III de l'article L. 2224-8 concernant la mission de contrôle des installations d'ANC des communes ;

- à l'avant-dernier alinéa du même III. Il s'agit ainsi de clarifier la rédaction en précisant que ce sont les installations d'ANC dans leur totalité qui font l'objet d'un agrément et non les « dispositifs de traitement » destinés à y être intégrés, rédaction qui pouvait sembler inclure les dispositifs portant le marquage CE.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

Cet article constitue une simple clarification rédactionnelle de la procédure déjà applicable. Il devrait permettre d'éviter un éventuel risque contentieux avec la Commission européenne.

La commission a adopté l'article 30 sans modification.

Article 31 - Mise en place d'un système de contrôle des captures et mises à mort accidentelles des espèces animales

Cet article vise à assurer la stricte transposition en droit national de la directive 92/43/CE dite « directive habitats », en ce qui concerne le suivi des captures et mises à mort accidentelles de certaines espèces protégées.

La France a fait l'objet d'une mise en demeure à ce sujet en 2020 du fait d'une transposition insuffisante au regard des exigences de la directive.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LA FRANCE A FAIT L'OBJET D'UNE MISE EN DEMEURE POUR MAUVAISE TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE « HABITATS » CONCERNANT LE SUIVI DES CAPTURES ET MISES À MORT ACCIDENTELLES DE CERTAINES ESPÈCES PROTÉGÉES

Depuis plusieurs décennies, l'Union européenne met en oeuvre une politique de protection de l'environnement, qui s'appuie sur la lutte contre la pollution de l'air (notamment à travers le protocole de Kyoto dès les années 1990), la pollution de l'eau (directive n° 91/271 du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux urbaines résiduaires) et sur la protection de la nature et de la biodiversité, à travers plusieurs directives.

La directive 92/43/CE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages dite « directive habitats », modifiée par la directive 97/62/CEE concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, constitue l'axe structurant de la politique de l'Union européenne en matière de protection de la biodiversité. Elle a pour objectif de maintenir ou rétablir la biodiversité au sein de l'Union européenne, notamment à travers le déploiement du réseau Natura 2000 dans des zones jugées « d'intérêt communautaire » en tant qu'elles participent à la préservation d'un ou plusieurs habitats ou d'une ou plusieurs espèces d'intérêt communautaire.

Le 1 de l'article 12 de la « directive habitats » impose aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte de certaines espèces animales protégées listées en annexe IV de la directive, en interdisant leur capture ou mise à mort intentionnelle, leur perturbation (notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d'hibernation ou de migration), ou encore le ramassage intentionnel de leurs oeufs.

Par ailleurs, le 4 du même article 12 instaure un s ystème de contrôle de la mise à mort accidentelle des mêmes espèces . En effet, il arrive que des espèces protégées soient mises à mort de manière non-intentionnelle, du fait d'activités humaines comme la pêche ou le BTP.

Depuis plusieurs années déjà, la France a mis en place des actions afin d'évaluer les impacts de certaines activités sur l'état de conservation des espèces :

- l'article L. 411-3 du code de l'environnement impose d'effectuer de manière systématique une analyse des facteurs de menace pesant sur les espèces lors de l'élaboration des plans nationaux d'action (PNA) en faveur des espèces protégées menacées. Plus de 60 PNA sont actuellement mis en oeuvre pour diverses espèces terrestres (mammifères, insectes, amphibiens...) ;

- les espèces marines font également l'objet de mesures de surveillance et de conservation, en particulier s'agissant des mammifères marins (à travers le programme « Mammifères marins et tortues marines » adopté en 2015, qui repose notamment sur un suivi des populations et des données d'échouage) et des oiseaux marins (à travers le programme « Oiseaux marins » qui permet d'évaluer l'état des populations d'oiseaux marins).

En pratique, la France met donc déjà en oeuvre un contrôle des morts accidentelles , dans le cadre de réglementations propres à certaines espèces ou à des activités sectorielles. Par exemple, l'arrêté du 1 er juillet 2011, depuis sa modification en 2018, prévoit une obligation de déclaration des captures accidentelles de mammifères marins par les professionnels de la pêche.

Toutefois, la France n'a pas formellement transposé en droit interne le principe d'un contrôle généralisé conformément au 4 de l'article 12 de la « directive habitat ». De plus, les données démontrent que les cas de mort accidentelle d'espèces protégées demeurent nombreux en France, en particulier s'agissant de petits cétacés victimes d'engins de pêche. Malgré les mesures mises en place, 1 100 cétacés s'échouent encore chaque hiver sur les côtes françaises, des chiffres qui ne semblent pas diminuer.

En conséquence, la Commission européenne a mis en demeure la France en juillet 2020 d'agir pour protéger avec plus d'efficacité l'ensemble des espèces visées par la « directive habitats », en particulier les cétacés.

Pour se conformer à la directive habitats, il s'agit donc de traduire le principe d'un contrôle transversal des captures et mises à mort accidentelles , permettant le suivi de l'ensemble des espèces animales protégées énumérées en annexe IV de la directive. Cet outil de surveillance doit permettre de prendre les mesures de prévention nécessaires en cas « d'incidence négative importante » (article 12 de la directive) sur ces espèces.

II. POUR ASSURER UNE TRANSPOSITION STRICTE, INSTAURER UN SUIVI TRANSVERSAL DES CAPTURES ET MORTS ACCIDENTELLES DES ESPÈCES PROTÉGÉES VISÉES PAR LA « DIRECTIVE HABITATS »

La transposition du 4 de l'article 12 de la directive habitat ne requiert l'intervention du législateur que pour inscrire le principe de ce nouveau système de contrôle prévu par la directive . En revanche, conformément à l'article 34 de la Constitution qui réserve à la loi la détermination des seuls principes fondamentaux relatifs à la préservation de l'environnement, il est renvoyé pour la définition des modalités de mise en oeuvre du contrôle à un texte réglementaire.

Le dispositif prévu se contente donc de modifier l'article L. 411-2 du code de l'environnement qui concerne la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels ou d'espèces animales ou végétales, de manière à ajouter un paragraphe prévoyant la publication d'un décret en Conseil d'État pour déterminer les conditions et modalités dans lesquelles est instauré un « système de contrôle des captures et mises à mort accidentelles des espèces animales énumérées à l'annexe IV point a de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ».

Sur la base de ce suivi, l'État devra prendre les mesures d'évitement ou de réduction des captures ou destructions accidentelles nécessaires , ou ajuster les mesures existantes au regard des objectifs de la directive.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission est favorable à cet article qui est au coeur de ses préoccupations en matière de préservation de la biodiversité en tant qu'il permet une rigoureuse transposition de la directive dite « habitats ».

Elle suivra avec attention les modalités de mise en oeuvre du système de surveillance ainsi prévu, qui seront précisées par voie réglementaire, ainsi que la mise en place de mesures destinées à prévenir ces destructions accidentelles d'espèces pourtant protégées.

Le Gouvernement mentionne que cet article devrait avoir un impact modéré sur les entreprises, l'essentiel des situations justifiant un contrôle faisant déjà l'objet d'une surveillance adaptée (dans la pêche, mais également d'autres secteurs tels que l'aménagement ou l'agriculture). Toutefois, l'élargissement du contrôle à l'ensemble des espèces mentionnées au a de l'annexe IV de la directive habitat pourrait avoir un impact supplémentaire sur certains secteurs tels que celui de la pêche marine ou en eau douce.

Ainsi que l'indique l'étude d'impact soumise par le Gouvernement, il importera de s'assurer que les modalités de ce système de surveillance sont adaptées et proportionnées, et qu'elles permettent de concilier les objectifs de conservation de la biodiversité et de protection des secteurs économiques concernés. Le contexte actuel de crise renforce cet impératif, en particulier s'agissant du secteur de la pêche très durement affecté (selon les estimations, les pêcheurs français pourraient enregistrer une baisse de chiffre d'affaires de 30 % à 40 % au cours de l'année 2020).

La commission a adopté l'article 31 sans modification.

Article 32 - Information environnementale

Cet article vise aligner la définition de la notion d'« information environnementale » en droit français sur celle imposée par la directive 2003/4/CE.

Cela fait suite à l'engagement par la Commission européenne d'une procédure d'infraction à l'encontre de la France du fait d'une définition trop restrictive, ayant pour effet de limiter l'accès du public aux informations environnementales.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LA DÉFINITION TROP RESTRICTIVE DE L'INFORMATION ENVIRONNEMENTALE A CONDUIT À L'ENGAGEMENT D'UNE PROCÉDURE D'INFRACTION CONTRE LA FRANCE

La directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement a pour objectif de garantir le droit d'accès aux informations environnementales et de fixer les conditions d'exercice de ce droit.

Elle définit la notion d'« information environnementale » de manière large. Selon son article 2, il s'agit de « toute information disponible sous forme écrite, visuelle, sonore, électronique ou toute autre forme matérielle » concernant une liste d'items ayant trait à :

- l'état de l'environnement (air, atmosphère, terres, paysages, biotopes...) ;

- des facteurs tels que les substances, l'énergie, le bruit ou encore les déchets ;

- les mesures prises telles que les politiques publiques , les dispositions législatives, les plans et programmes, les accords environnementaux et les activités ayant des incidences sur les éléments mentionnés plus haut, y compris les mesures destinées à protéger ces mêmes éléments ;

- les rapports sur l'application de la législation environnementale ;

- les analyses des coûts et avantages ainsi que les hypothèses économiques utilisées dans le cadre des décisions et activités ;

- l'état de la santé humaine, ou encore la sécurité ou les conditions de vie des personnes, pour autant qu'ils puissent être altérés par l'état des éléments mentionnés plus haut.

Cette directive a fait l'objet d'une transposition en droit interne, y compris la définition de l'information environnementale qui figure à l'article L. 124-2 du code de l'environnement.

Pourtant, la Commission européenne a ouvert une procédure d'infraction pour non-conformité des mesures de transposition de la directive 2003/4/CE, ce qui a donné lieu à une mise en demeure de la France le 24 janvier 2019.

La Commission européenne évoque deux griefs :

- aux termes de l'article L. 124-2 du code de l'environnement, une information, pour être qualifiée d'environnementale, doit avoir « pour objet » les éléments mentionnés aux 1° à 5° du même article qui reprennent en substance la liste fixée par la directive, alors que la directive définit l'information environnementale comme « toute information disponible [...] concernant » ces éléments ;

- la directive prévoit que les mesures susceptibles d'avoir des incidences sur les éléments de l'environnement comprennent également « celles destinées à protéger ces éléments » . Cette précision ne figure pas à l'article L. 124-2 du code de l'environnement, qui se contente d'un renvoi aux mesures « susceptibles d'avoir une incidence » sur les éléments de l'environnement.

En réponse, la France a indiqué à la Commission européenne que :

- d'une part, la formulation selon laquelle l'information doit avoir « pour objet » les éléments ensuite énumérés devait être lue comme imposant la communication de toute information relative à ces éléments ;

- d'autre part, que la notion d'activités « susceptibles d'avoir une incidence » sur les éléments de l'environnement était indifférente à la nature, positive ou négative de ces incidences sur ces éléments.

Toutefois, afin de lever toute ambiguïté et d'éviter une procédure contentieuse, les autorités françaises se sont malgré tout engagées à modifier l'article L. 124-2 du code de l'environnement dans le sens indiqué par la mise en demeure formulée par la Commission européenne.

II. AFIN D'ÉVITER TOUT RISQUE CONTENTIEUX, UN ALIGNEMENT STRICT DE LA DÉFINITION DE L'INFORMATION ENVIRONNEMENTALE SUR LA DIRECTIVE EUROPÉENNE S'IMPOSE

Le dispositif envisagé modifie l'article L. 124-2 du code de l'environnement afin d'assurer une transposition littérale de la directive 2003/4/CE. Ainsi, il est proposé :

- de supprimer les mots « qui a pour objet » ayant donné lieu à un litige avec la Commission européenne, pour indiquer que l'information environnementale « concerne » les éléments ensuite listés ;

- de préciser, au 2° de l'article L. 124-2 qui a trait aux mesures susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement, que ces mesures incluent celles destinées à protéger les éléments environnementaux mentionnés au même article.

Cette nouvelle rédaction devrait permettre de lever les ambiguïtés existantes concernant la transposition de la directive 2003/4/CE en droit français.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

La commission juge indispensable l'alignement de la définition de la notion d' « information environnementale » qui figure en droit français sur celle prévue par la directive 2003/4/CE, et ce d'autant plus que cette mesure permettra d'éviter l'engagement d'une procédure contentieuse à l'encontre de la France pour non-conformité à la directive.

La commission tient à souligner que le droit d'accès à l'information environnementale est une dimension essentielle de la démocratie environnementale : il est d'ailleurs consacré depuis 2005 à l'article 7 de la Charte de l'environnement selon lequel « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques » . Il est regrettable que la France se soit trouvée en situation de non-conformité au regard de la législation européenne sur un sujet pourtant inscrit au plus haut niveau de sa hiérarchie des normes.

La commission a adopté l'article 32 sans modification.

CHAPITRE V - Dispositions en matière économique et financière
Article 33 - Adaptations du droit relatif à l'identification des actionnaires

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a adopté l'amendement COM-35 de son rapporteur, M. Hervé MAUREY.

La commission a adopté l'article 33 ainsi modifié.

Article 34 - Transposition de l'article 1er de la directive (UE) 2019/2177 du 18 décembre 2019 modifiant la directive 2009/138/CE dite « Solvabilité II », la directive 2014/65/UE dite « MiFID II », et la directive (UE) 2015/849 dite « quatrième directive anti-blanchiment »

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a adopté l'amendement COM-36 de son rapporteur, M. Hervé MAUREY.

La commission a adopté l'article 34 ainsi modifié.

Article 35 - Transposition de l'article 2 de la directive (UE) 2019/2177 du 18 décembre 2019 modifiant la directive 2009/138/CE dite « Solvabilité II », la directive 2014/65/UE dite « MiFID II », et la directive (UE) 2015/849 dite « quatrième directive anti-blanchiment »

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a adopté l'amendement COM-37 de son rapporteur, M. Hervé MAUREY.

La commission a adopté l'article 35 ainsi modifié.

Article 36 - Habilitation à transposer la directive (UE) 2021/338 du 16 février 2021, dite « CMRP Mifid »

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a proposé l'adoption de cet article.

La commission a adopté l'article 36 sans modification.

Article 37 - Mise en conformité du code monétaire et financier avec la directive 98/26/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a proposé l'adoption de cet article.

La commission a adopté l'article 37 sans modification.

Article 38 - Mise en conformité du code monétaire et financier avec le règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a adopté l'amendement COM-38 de son rapporteur, M. Hervé MAUREY.

La commission a adopté l'article 38 ainsi modifié.

Article 39 - Régime de sanctions administratives applicables en cas d'infraction à certaines dispositions du règlement n° 260/2012 relatif aux virements et prélèvements transfrontaliers

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a proposé l'adoption de cet article.

La commission a adopté l'article 39 sans modification.

Article 40 - Adaptation des sanctions en matière de prestations de services des courriers recommandés électroniques par des prestataires non agréés

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a proposé l'adoption de cet article.

La commission a adopté l'article 40 sans modification.

Article 41 - Habilitation à prendre par ordonnance les mesures législatives de mise en conformité au règlement (UE) 2020/1503 du Parlement européen et du Conseil du 7 octobre 2020 relatif aux prestataires européens de services de financement participatif pour les entrepreneurs, et modifiant le règlement (UE) 2017/1129 et la directive (UE) 2019/1937

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a adopté les amendements COM-39 et COM-40 de son rapporteur, M. Hervé MAUREY.

La commission a adopté l'article 41 ainsi modifié.

Article 42 - Application des dispositions du deuxième alinéa du paragraphe 6 de l'article 18 du règlement (UE) 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux abus de marché modifié par le règlement (UE) 2019/2115 du Parlement européen du 27 novembre 2019

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a adopté l'amendement COM-41 de son rapporteur, M. Hervé MAUREY.

La commission a adopté l'article 42 ainsi modifié.


* 6 Règlement (UE) 2018/1042 de la Commission du 23 juillet 2018 modifiant le règlement (UE) n° 965/2012 en ce qui concerne les exigences techniques et les procédures administratives applicables à l'introduction de programmes de soutien, l'évaluation psychologique des membres de l'équipage de conduite, ainsi que le dépistage systématique et aléatoire de substances psychotropes en vue de garantir l'aptitude médicale des membres de l'équipage de conduite et de l'équipage de cabine, et en ce qui concerne l'installation d'un système d'avertissement et d'alarme d'impact sur les avions à turbine neufs dont la masse maximale certifiée au décollage est inférieure ou égale à 5 700 kg et qui sont autorisés à transporter entre six et neuf passagers.

* 7 Règlement (UE) n° 1178/2011 de la Commission du 3 novembre 2011 déterminant les exigences et les procédures administratives applicables au personnel navigant de l'aviation civile.

* 8 Règlement (UE) 2018/395 de la Commission du 13 mars 2018 établissant des règles détaillées concernant l'exploitation de ballons ainsi que l'octroi de licences pour les membres d'équipage de conduite de ballons.

* 9 Loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire.

* 10 Règlement (CE) n° 1008/2008 du 24 septembre 2008 établissant des règles communes pour l'exploitation de services aériens dans la Communauté.

* 11 Rapport d'information n° 734 (2018-2019) de Mme Josiane Costes, fait au nom de la mission d'information Transports aériens, « Contribution du transport aérien au désenclavement et à la cohésion des territoires », 24 septembre 2019.

* 12 Les limites de responsabilité du transporteur fixées par la convention de Varsovie s'établissaient à environ 8 000 dollars pour les dommages corporels.

* 13 Le règlement n° 300/2008 est complété au niveau européen par des textes d'exécution avec, en particulier, le règlement d'exécution (UE) n° 2015/1998 du 5 novembre 2015 fixant des mesures détaillées pour la mise en oeuvre des normes de base communes dans le domaine de la sûreté de l'aviation civile.

* 14 L'article L. 5336-10 du code des transports, dans sa rédaction issue de l'article 71 de la loi du 20 juin 2016 pour l'économie bleue, prévoit que le fait de s'introduire ou tenter de s'introduire sans autorisation dans une zone d'accès restreint d'un port est puni de six mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende -- bientôt portée à 7 500 euros par le 4° de l'article 2 de l'ordonnance n° 2021-373 du 31 mars 2021 relative à la sûreté portuaire qui entrera en vigueur au plus tard le 1 er janvier 2022.

* 15 Règlement (UE) 2018/1139 du Parlement et du Conseil du 4 juillet 2018 concernant des règles communes dans le domaine de l'aviation civile et instituant une Agence de l'Union européenne pour la sécurité aérienne.

* 16 Dite « Convention de Chicago » et publiée sous l'égide de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).

* 17 Directive 2004/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 concernant l'interopérabilité des systèmes de télépéage routier dans la Communauté.

* 18 Étude d'impact.

* 19 Directive 2019/520 concernant l'interopérabilité des systèmes de télépéage routier et facilitant l'échange transfrontière d'informations relatives au défaut de paiement des redevances routières dans l'Union.

* 20 Dans le langage courant, un transbordeur désigne un ouvrage, une installation ou un véhicule permettant de transporter des biens ou des personnes d'un point à un autre (pont, bac, ferry...).

* 21 Décret n° 2012-645 du 3 mai 2012 organisant une commission de conciliation du télépéage.

* 22 Décret n° 2019-1362 du 16 décembre 2019 portant suppression de commissions administratives relevant du ministère de la transition écologique et solidaire et du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

* 23 Directive (UE) 2015/413 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2015 facilitant l'échange transfrontalier d'informations concernant les infractions en matière de sécurité routière.

* 24 Jusqu'au 31 décembre 2019, ce seuil était fixé à 3,50 %.

* 25 Article 213-6.04.

* 26 Conventions STCW et STCW-F de l'Organisation maritime internationale.

* 27 En revanche, la formation initiale dispensée par les lycées professionnels maritimes (baccalauréat professionnel) n'est pas soumise à cet agrément.

* 28 Ordonnance n° 2019-861 du 21 août 2019 visant à assurer la cohérence de diverses dispositions législatives avec la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

* 29 Il renvoie également à la directive 2001/95/CE qui permet à ces mêmes autorités de diffuser des mises en garde sur les produits mis sur le marché et présentant des risques pour les consommateurs.

* 30 Source : ENIM, 2017.

* 31 Arrêté du 24 mars 2020 portant majoration des salaires forfaitaires servant de base de calcul des contributions des armateurs, des cotisations et de certaines prestations des marins du commerce, de la plaisance, de la pêche et des cultures marines.

* 32 En 2017, 67 960 pensions ont été liquidées par l'ENIM.

* 33 Depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, les périodes d'activité partielle sont également prises en compte.

* 34 Décision n° 2012-661 DC, 29 décembre 2012, Loi de finances rectificative pour 2012.

* 35 Le chronotachygraphe (anciennement « tachygraphe ») est un instrument, installé à bord d'un véhicule routier, permettant de mesurer la vitesse et le temps de conduite et de repos.

* 36 En application du 14° du I de cet article, le non-respect des interdictions édictées par le règlement (CE) n° 1102/2008 est puni de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

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