N° 194

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026

Enregistré à la Présidence du Sénat le 10 décembre 2025

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à simplifier la sortie de l'indivision successorale,

Par M. Jean-Baptiste BLANC,

Sénateur








(1) Cette commission est composée de : Mme Muriel Jourda, présidente ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, M. Marc-Philippe Daubresse, Mmes Laurence Harribey, Isabelle Florennes, Patricia Schillinger, Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Michel Masset, vice-présidents ; Mmes Marie Mercier, Jacqueline Eustache-Brinio, Lauriane Josende, M. Olivier Bitz, secrétaires ; M. Jean-Michel Arnaud, Mme Nadine Bellurot, MM. Jean-Baptiste Blanc, François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Sophie Briante Guillemont, M. Ian Brossat, Mme Agnès Canayer, MM. Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, David Margueritte, Hervé Marseille, Thani Mohamed Soilihi, Mme Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mme Anne-Sophie Patru, M. Hervé Reynaud, Mme Olivia Richard, MM. Teva Rohfritsch, Pierre-Alain Roiron, Mme Elsa Schalck, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) :

823, 1004 et T.A. 63

Sénat :

415 (2024-2025) et 195 (2025-2026)

L'ESSENTIEL

La proposition de loi n° 415 (2025 - 2026) visant à simplifier la sortie de l'indivision successorale, adoptée le 6 mars 2025 par l'Assemblée nationale et inscrite au Sénat dans l'espace réservé du groupe Union centriste, porte des mesures affectant principalement le droit des indivisions successorales mais aussi des successions vacantes. L'objectif affiché par les auteurs du texte est de « simplifier » les sorties de ces indivisions et le règlement des successions vacantes, notamment pour répondre aux situations de blocage qui peuvent être constatées sur le terrain. Celles-ci peuvent entraîner une dégradation des biens, autant dommageable aux indivisaires qu'à la collectivité.

Tout en souscrivant à ces objectifs, la commission a, sur proposition de son rapporteur, Jean-Baptiste Blanc, adopté 9 amendements afin de tenir compte des difficultés juridiques identifiées lors de ses travaux, et de proposer des solutions y répondant de façon plus adéquate.

I. LE DROIT DE L'INDIVISION ET DES SUCCESSIONS VACANTES OPÈRE UNE CONCILIATION EXIGEANTE ENTRE LE RESPECT DE LA PROPRIÉTÉ ET LE RÈGLEMENT DES SITUATIONS DE BLOCAGE

A. LE PRINCIPE DE L'UNANIMITÉ A ÉTÉ PROGRESSIVEMENT ASSOUPLI MAIS DEMEURE LA RÈGLE POUR LES PARTAGES AMIABLES

L'indivision est un régime juridique qui s'applique à un bien ou à un ensemble de biens partagé entre plusieurs propriétaires, dits indivisaires, qui disposent ensemble de pouvoirs concurrents sur celui-ci. Comme son nom l'indique, l'indivision successorale rassemble les héritiers et les légataires d'un même actif successoral avant qu'il ne soit partagé entre eux.

Le législateur est intervenu pour faciliter la gestion de ces indivisions qui sont, par nature, sujettes à des conflits puisqu'elles résultent fréquemment d'un divorce ou d'un désaccord lors d'une succession. La loi distingue désormais à cet égard trois catégories d'actes :

Ø les actes conservatoires, qui recouvrent les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis, peuvent être pris sans habilitation par un seul indivisaire, dans la mesure où ils préservent lesdits biens d'un péril ;

Ø les actes d'administration, qui découlent de l'exploitation normale des biens indivis, peuvent être pris à la majorité des deux tiers des droits indivis, à condition d'en informer les autres indivisaires ;

Ø les actes de disposition, donc de vente, des biens indivis demeurent quant à eux régis par le principe d'unanimité.

L'indivision doit en toute hypothèse aboutir au partage des biens indivis, soit en nature, en procédant à la répartition par lots, soit en valeur, en ventilant le montant obtenu lors de leur aliénation. Chaque copartageant reçoit alors des biens pour une valeur égale à celle de ses droits dans l'indivision.

Lorsque les indivisaires échouent à s'entendre à l'amiable, le code civil prévoit l'éventualité d'un partage judiciaire, que n'importe quel indivisaire peut provoquer, conformément au principe, énoncé à l'article 815 du même code, selon lequel « nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision ». Il existe deux procédures de partage judiciaire :

Ø le partage judiciaire « simple », dans le cadre duquel le tribunal ordonne le partage, s'il peut avoir lieu, ou la vente par licitation si les indivisaires sont capables et présents ou représentés, ce sans qu'un notaire ne soit nécessairement désigné ;

Ø le partage judiciaire « complexe », lors duquel le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour surveiller ces opérations, compte tenu de leur complexité.

 

Nombre annuel de demandes de partages judiciaires, toutes catégories1(*)

L'objectif du législateur demeure toutefois de faciliter le partage amiable pour réserver le partage judiciaire aux cas les plus sensibles, et d'inciter à la sortie de l'indivision, pour éviter les situations de blocage. Parallèlement aux grands principes décrits supra, plusieurs procédures ont donc été adoptées pour atteindre ces objectifs, notamment en permettant à un copartageant de mettre en demeure un indivisaire défaillant de se faire représenter sous trois mois au partage amiable, en permettant aux titulaires de deux tiers des droits indivis de saisir la justice en vue d'une autorisation de vente d'un bien ou encore, en outre-mer et en Corse, où s'observe une situation de désordre foncier sévère, en abaissant les seuils nécessaires pour vendre,
par procédure notariale et sans intervention judiciaire, des biens indivis.

Ces règles dérogatoires doivent toutefois être conciliées avec le respect du droit de propriété, protégé par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Le respect du droit de propriété encadre également la gestion des successions vacantes. Une succession est déclarée vacante lorsqu'il ne se présente personne pour la réclamer et qu'il n'y a pas d'héritier connu, lorsque tous les héritiers y ont renoncé ou lorsqu'ils n'ont pas opté, de manière tacite ou expresse, après un délai de six mois. Le juge désigne alors la direction nationale d'interventions domaniales, la Dnid, curatrice de la succession au nom de l'État. La Dnid est chargée de la gestion de l'actif successoral du défunt et du règlement de ses dettes en procédant, le cas échéant, à la vente des biens.

B. MALGRÉ LES OUTILS PRÉVUS PAR LE LÉGISLATEUR, LE RÈGLEMENT DES INDIVISIONS SUCCESSORALES ET DES SUCCESSIONS VACANTES EST SOUVENT « UN NID » À DIFFICULTÉS

Les travaux conduits par le rapporteur ont mis en exergue la persistance de difficultés rencontrées par les praticiens, et les indivisaires eux-mêmes, pour clore une indivision successorale ou une succession vacante. Malgré le peu de statistiques disponibles, le rapporteur relève que la dénonciation de ces « obstacles » fut unanime.

Sans prétendre à l'exhaustivité, plusieurs difficultés peuvent être mentionnées.

En premier lieu, elles peuvent résulter de la composition de l'indivision, lorsque les héritiers sont nombreux, parfois de générations différentes et ont des intérêts divergents. Dans ce contexte, la prise de décision, en particulier à l'unanimité, est évidemment complexe.

Cette complexité peut être exacerbée lorsque certains indivisaires sont introuvables ou éloignés, ou que certains indivisaires adoptent une stratégie d'inertie ou d'opposition de principe, à la suite de conflits familiaux. Cette stratégie d'inertie peut également résulter de la faiblesse des enjeux, lorsque les biens indivis ont une valeur peu élevée et que le fruit de la vente est à partager entre de nombreux indivisaires.

Pour résoudre les situations de conflit, les procédures judiciaires sont longues, puisqu'elles exigent le respect du contradictoire et onéreuses, car elles supposent le paiement des émoluments des notaires, du droit de partage prélevé par l'administration fiscale et des honoraires des avocats. Une procédure de partage judiciaire complexe peut ainsi durer entre 18 et 24 mois.

En parallèle, s'observe une hausse tendancielle des successions vacantes, liée, d'une part, à la structure démographique du pays, et, d'autre part, aux évolutions sociétales telles qu'une plus grande mobilité géographique et l'affaiblissement des liens familiaux. La Dnid est en outre confrontée aux mêmes difficultés d'identification et d'accord des indivisaires lorsqu'une succession vacante s'inscrit au sein d'une indivision.

Source : commission des lois, d'après les données transmises par la Dnid

II. UN TEXTE AUX OBJECTIFS AMBITIEUX PARTAGÉS PAR LA COMMISSION, SOUS RÉSERVE D'ÉVOLUTIONS SIGNIFICATIVES

Le texte transmis au Sénat comporte 7 articles, dont 2 demandes de rapport. Dans un esprit constructif mais vigilant quant à leur solidité juridique et à la proportionnalité des atteintes au droit de propriété, la commission a adopté 9 amendements, présentés par le rapporteur, qui procèdent à des aménagements significatifs du texte.

A. LA CRÉATION D'UNE BASE DE DONNÉES DE RECENSEMENT DES « BIENS ABANDONNÉS »

L'article 1er visait à créer une base de données pour informer les collectivités territoriales quant aux biens abandonnés situés sur leur territoire. Le dispositif prévoyait que les biens concernés par quatre procédures spécifiques seraient intégrés à cette base. Or, ces procédures sont soit connues de la personne publique, soit engagées dans l'attente de la manifestation d'un propriétaire. La commission a supprimé cette mesure, qui ne permet pas de satisfaire l'objectif qu'elle poursuit.

B. LA FACILITATION DE LA GESTION DES SUCCESSIONS VACANTES POUR L'ADMINISTRATION DU DOMAINE

La proposition de loi comporte deux articles, les articles 1er bis et 2, ayant pour objet principal de répondre aux difficultés que peut rencontrer la Dnid dans l'exercice de ses fonctions de curatrice des successions vacantes.

L'article 1er bis lui permet d'assurer par voie numérique la publicité de l'ordonnance judiciaire la désignant curatrice. La commission a approuvé cette mesure qui correspond aux changements des pratiques, tout en prévoyant explicitement que cette publicité numérique doit se cumuler avec le maintien de la publicité par voie de presse.

La commission a en outre adopté un article additionnel, 1er ter, qui supprime la règle selon laquelle la Dnid doit obligatoirement vendre les biens meubles avant de pouvoir aliéner les biens immeubles. Il s'agit ainsi d'octroyer davantage de souplesse de gestion au curateur, en lui permettant de déterminer au cas par cas quels sont les biens à vendre prioritairement afin d'apurer les dettes du défunt, bien évidemment sous le contrôle du juge.

L'article 2 introduisait une procédure judiciaire dérogatoire pour permettre à la Dnid de vendre un bien indivis inscrit à l'actif d'une succession vacante qu'elle administre. Il apparaît que cette procédure porterait une atteinte disproportionnée au droit de propriété, en dépit des critères cumulatifs qui conditionnent l'engagement de cette procédure. Une telle procédure introduirait par ailleurs une inégalité de traitement injustifiée entre les coïndivisaires, dans la mesure où tout indivisaire peut connaître les difficultés que rencontre la Dnid. La commission a donc jugé plus opportun de consacrer à l'article 815-6 du code civil la possibilité dont dispose le président du tribunal judiciaire de vendre un bien indivis pourvu qu'une telle mesure soit justifiée par l'urgence et l'intérêt commun des indivisaires.

C. LA SIMPLIFICATION DE LA VENTE DES BIENS INDIVIS ET L'ACCÉLÉRATION DES PARTAGES

Enfin, les articles 3 et 4 visaient respectivement à assouplir les conditions de vente d'un bien indivis - sans passer par un partage en bonne et due forme - et à accélérer les partages judiciaires.

L'article 3, qui abaissait de deux tiers à plus de la moitié des droits indivis le seuil de majorité pour demander au juge l'autorisation de vendre un bien indivis, a été recentré par la commission sur une actualisation de la procédure dérogatoire applicable en Corse, dont la faible application démontrait des lacunes. En effet, pour ce qui concerne le droit commun, l'abaissement du seuil des deux tiers à la majorité simple aurait créé une incohérence majeure des seuils qui régissent le droit de l'indivision, et dont l'architecture actuelle est fondée sur une juste proportion des atteintes au droit de propriété. Cette modification risquait en outre d'avoir des effets économiques imprévisibles sur le droit des sociétés et des affaires, puisque le droit des indivisions ne s'applique pas qu'aux indivisions successorales.

L'article 4 introduisait l'expérimentation d'une procédure d'accélération du partage judiciaire. Si la commission souscrit à l'objectif poursuivi par les auteurs du texte, elle a toutefois considéré qu'il serait plus utilement satisfait par l'adoption d'une véritable réforme du partage judiciaire à laquelle a oeuvré un groupe de travail présidé par la direction des affaires civiles et du sceau. La commission a donc rejeté cet article dans l'attente de la présentation éventuelle par le Gouvernement du volet législatif de cette réforme en séance publique.

*

* *

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXAMEN DES ARTICLES

Propos liminaire
Présentation générale du droit de l'indivision successorale

Le régime juridique de l'indivision successorale présente des garanties significatives, qui peuvent s'apparenter à des pesanteurs auxquelles remédient dans certaines hypothèses des règles dérogatoires.

1. L'indivision successorale se caractérise par sa nature transitoire, car elle aboutit en principe à un partage amiable

Avant d'aborder l'indivision successorale en elle-même, il convient de rappeler brièvement en quoi consiste une indivision. Il s'agit du régime juridique qui s'applique à un bien ou à un ensemble de biens partagé entre plusieurs propriétaires, dits indivisaires, qui disposent ensemble de pouvoirs concurrents sur celui-ci.

Définition du régime général de l'indivision2(*)

« Il y a indivision lorsque plusieurs droits de nature identique s'exercent sur un même objet sans division matérielle des parts. La situation peut avoir les origines les plus diverses : succession dévolue par la loi ou le testament à plusieurs, mais aussi dissolution d'une communauté conjugale ou d'une société, acquisition conjointe d'un bien, à titre onéreux ou à titre gratuit. Quelle qu'en soit la source, quel qu'en soit l'objet - universalité ou bien unique -, l'indivision obéit aux mêmes principes directeurs. »

L'indivision successorale est, comme son nom l'indique, celle qui rassemble les héritiers et les légataires d'un même actif successoral avant qu'il ne soit partagé entre eux.

Il importe ainsi de souligner que « l'indivision obéit aux mêmes principes directeurs », indépendamment de sa source ou de son objet, parce que sa nature est plastique. Aussi un volet successoral peut-il être ajouté à une indivision issue de la dissolution d'une communauté conjugale suite au décès de l'un des indivisaires.

Le droit français était traditionnellement « hostile à l'indivision », selon les termes des professeurs Terré, Lequette et Gaudemet, dans la mesure où elle porte par nature atteinte à l'exercice plein et entier du droit de propriété. L'indivision avait donc classiquement vocation à aboutir rapidement à un partage, ce qui expliquait la précarité de son régime juridique.

Or, comme le remarquent les mêmes professeurs, « les prévisions du législateur furent infirmées par la pratique ». Les indivisions sont ainsi souvent devenues pérennes pour des raisons diverses, qui tiennent principalement aux rapports entre les indivisaires ou à la nature du bien indivis.

Le législateur a donc progressivement étayé le régime de l'indivision3(*), pour faciliter la gestion des biens soumis à ce dernier. Cette démarche a exigé de relativiser le principe de l'unanimité des indivisaires qui prévalait classiquement pour l'ensemble des décisions relatives à l'indivision. La loi distingue désormais trois catégories d'actes :

· les actes conservatoires : une faculté laissée à tout indivisaire

Ces actes recouvrent selon l'article 815-2 du code civil « les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis ». Ils peuvent être pris sans habilitation par un seul indivisaire, indépendamment de sa quote-part au sein de l'indivision, dès lors qu'ils préservent lesdits biens d'un péril et ce même s'ils « ne présentent pas un caractère d'urgence ».

· les actes d'administration : l'exigence d'une majorité des deux tiers

La loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités4(*) a rompu avec la logique de l'unanimité pour les actes d'administration. L'article 815-3 du code civil prévoit désormais qu'il est loisible aux coïndivisaires, à la majorité des deux tiers et à condition d'en informer les autres :

- d'effectuer les actes d'administration ;

- de donner un mandat général d'administration à l'un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers ;

- de vendre les meubles indivis pour honorer les dettes et charges de l'indivision ;

- de conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Les actes d'administration sont ceux qui découlent de « l'exploitation normale des biens indivis ». Les professeurs Terré, Lequette et Gaudemet observent du reste que les trois catégories d'actes qui suivent les actes d'administration sont eux-mêmes des « actes d'administration que le législateur a pris le soin de mentionner afin de dissiper toute ambiguïté ».

· les actes de disposition : la permanence de l'unanimité

Les actes de disposition, donc de vente, des biens indivis demeurent quant à eux régis par le principe d'unanimité en vertu de l'article 815-3 du code civil, qui dispose que « le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l'exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition » autre que ceux adoptés pour payer les dettes et charges de l'indivision. Ces derniers constituent, comme ce fut évoqué ci-dessus, des actes d'administration, dans la mesure où ils maintiennent l'actif de l'indivision plutôt qu'ils n'en altèrent la structure.

En dehors de ces trois grandes catégories d'actes, le législateur a prévu plusieurs seuils de majorité applicables à certains actes de gestion d'une indivision, dont certains sont spécifiques à des territoires marqués par une situation cadastrale exceptionnelle et feront l'objet de développements propres ci-dessous. Le tableau ci-dessous les récapitule.

Tableau récapitulatif des seuils de majorité applicables
aux divers actes sur les biens indivis

Seuil de majorité

Acte

Référence

Tout indivisaire

Acte conservatoire

Article 815-2 du code civil

Usage et jouissance des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires

Article 815-9 du code civil

Sur autorisation judiciaire, acte pour lequel le consentement d'un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l'intérêt commun.

Article 815-5 du code civil

Droit de préemption en cas de vente, par un indivisaire, de tout ou partie de ses droits indivis.

Article 815-14 du code civil

Sur autorisation judiciaire, et uniquement en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion et à Saint-Martin, exécution des travaux d'amélioration, de réhabilitation et de restauration d'un immeuble indivis à usage d'habitation ou à usage mixte d'habitation et professionnel est vacant ou n'a pas fait l'objet d'une occupation effective depuis plus de deux années civiles ainsi que l'accomplissement des actes d'administration et formalités de publicité, ayant pour seul objet de le donner à bail à titre d'habitation principale.

Article 815-7-1 du code civil

Demande d'un partage judiciaire

Articles 815 et 840 du code civil

Plus de la moitié des droits indivis

En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, vente par procédure extrajudiciaire du bien indivis si la succession est ouverte depuis plus de dix ans, sauf opposition d'un ou de plusieurs indivisaires.

Article 1er de la loi n° 2018-1244 du 27 décembre 2018, dite Letchimy

Actes d'administration des biens indivis situés en Corse et ayant fait l'objet d'un acte notarié de notoriété acquisitive

Article 2 de la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017

Deux tiers des droits indivis

Acte d'administration

Article 815-3 du code civil

Saisine de la justice en vue d'une autorisation de vente du bien indivis

Article 815-5-1 du code civil

Acte de disposition et acte d'administration « qui ne ressortit pas à l'exploitation normale des biens indivis » lorsque ces biens sont situés en Corse et ont fait l'objet d'un acte notarié de notoriété acquisitive

Article 2 de la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017

Unanimité

Acte de disposition

Avant-dernier alinéa de l'article 815-3 du code civil

Source : commission des lois

En dépit de ces évolutions législatives qui manifestent l'installation dans le temps de certaines indivisions et favorisent donc leur gestion,
il demeure que l'indivision successorale doit en principe aboutir au partage des biens indivis
, soit en nature, en procédant à la répartition par lots, soit en valeur, en ventilant le montant obtenu lors de l'aliénation des biens indivis.

Le partage consiste donc à substituer, pour chaque indivisaire, des droits privatifs à des droits indivis.

Les articles 816 à 842 du code civil établissent les modalités de cette opération, lors de laquelle, comme le précise l'article 826 du code civil, « chaque copartageant reçoit des biens pour une valeur égale à celle de ses droits dans l'indivision ».

L'opération de partage d'une indivision est en principe amiable. Il peut être réalisé « dans la forme et selon les modalités choisies par les parties » dès lors que tous les coïndivisaires sont présents et capables. L'article 835 du code civil, qui établit ce principe, prévoit toutefois une exception lorsque l'indivision porte sur des biens soumis à la publicité foncière. Un acte notarié est alors nécessaire pour adopter l'acte de partage.

Le code civil définit par ailleurs les modalités du partage amiable lorsqu'un indivisaire est présumé absent ou se trouve hors d'état de manifester sa volonté du fait de son éloignement (article 836 du code civil) et lorsqu'un indivisaire est défaillant (article 837 du même code).

Le partage amiable peut en outre, en vertu de l'article 838 du code civil, « être total ou partiel », c'est-à-dire qu'il ne peut concerner que certains biens indivis ou certains coïndivisaires.

Lorsque les indivisaires échouent à procéder au partage à l'amiable, le code civil prévoit l'éventualité d'un partage judiciaire régi par ses articles 840 à 842. L'article 840 du code civil dispose ainsi que « le partage est fait en justice lorsque l'un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ou s'il s'élève des contestations sur la manière d'y procéder ou de le terminer ou lorsque le partage amiable n'a pas été autorisé ou approuvé » dans les cas de l'absence ou de la défaillance d'un coïndivisaire. Le partage amiable constitue donc bien le principe et le partage judiciaire, l'exception. En conséquence, l'article 1360 du code de procédure civile dispose que l'assignation en partage doit contenir, à peine d'irrecevabilité, « les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable ».

Il existe deux procédures de partage judiciaire.

· le partage judiciaire « simple »

Cette procédure est régie par les articles 1359 à 1363 du code de procédure civile. Tout indivisaire peut faire enrôler au greffe du tribunal du lieu d'ouverture de la succession une assignation en partage qui doit, à peine d'irrecevabilité, contenir « un descriptif sommaire du patrimoine à partager et [préciser] [s]es intentions [...] quant à la répartition des biens ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable ».

Il incombe ensuite au tribunal d'« [ordonner] le partage, s'il peut avoir lieu, ou la vente par licitation » si les indivisaires sont capables et présents ou représentés, ce sans qu'un notaire ne soit nécessairement désigné. Dans l'hypothèse d'une licitation, les coïndivisaires peuvent décider à l'unanimité et en vertu de l'article 1378 du code de procédure civile que l'adjudication se déroulera entre eux. Les tiers à l'indivision y sont autrement admis.

· le partage judiciaire « complexe »

Lorsque la complexité des opérations le justifie, « le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour surveiller ces opérations ». L'article 1364 du code de procédure civile précise en outre qu'à défaut d'accord entre les copartageants, le tribunal désigne le notaire.

Il revient ensuite au notaire, en vertu de l'article 1365 du même code, de convoquer les coïndivisaires pour qu'ils produisent « tout document utile à l'accomplissement de sa mission », laquelle tient à l'élaboration, dans le délai d'un an après sa désignation, d'un « état liquidatif qui établit les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir » (article 1368 du code de procédure civile).

Cet état liquidatif peut soit conduire à l'établissement d'un acte de partage amiable, qui entraîne la clôture de la procédure judiciaire de partage en vertu de l'article 1372 du code de procédure civile, soit, en cas de désaccord entre les copartageants, à la saisine du juge commis dans les conditions établies aux articles 1373 à 1376 du code de procédure civile.

Or, il s'agit là d'une procédure longue, car elle est complexe, et onéreuse, car elle suppose le paiement des émoluments des notaires, du droit de partage prélevé par l'administration fiscale et des honoraires des avocats.

Le rapport adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale cite par ailleurs le conseil supérieur du notariat, qui observe que « ces procédures sont trop lourdes, trop longues et complexes, onéreuses et peu efficaces, car les acteurs les évitent », spécialement lorsque l'actif successoral représente une faible valeur5(*).

Le législateur a donc entendu faciliter le partage amiable pour réserver le partage judiciaire aux cas les plus sensibles, notamment en permettant à un copartageant de mettre en demeure un indivisaire défaillant de se faire représenter sous trois mois au partage amiable6(*).

Les personnes entendues par le rapporteur conviennent toutes que les difficultés que soulève actuellement la procédure de partage judiciaire expliquent largement la cristallisation de nombreuses indivisions. Aussi la Chancellerie a-t-elle constitué en 2025 un groupe de travail consacré au partage judiciaire, dont les conclusions seront évoquées lors de l'analyse de l'article 4 du présent texte.

Les pesanteurs qu'engendre l'exigence du partage amiable de l'indivision successorale expliquent la pérennité problématique de certaines indivisions et, partant, l'adoption de certains régimes dérogatoires pour y mettre un terme.

2. Des règles dérogatoires ont été introduites pour la Corse, certains territoires d'outre-mer et l'Alsace-Moselle

En raison du statut spécifique de l'Alsace-Moselle, d'une part, et de la situation foncière particulière qui caractérise depuis plusieurs siècles la Corse et les territoires d'outre-mer, d'autre part, des dérogations territorialisées au droit commun de l'indivision successorale ont été introduites et étendues par le législateur.

a) Des seuils abaissés pour les biens indivis situés en Corse

Caractérisée par une situation de « désordre foncier » résultant, notamment, d'un défaut ancien de titrisation des biens immobiliers7(*), la Corse a fait l'objet de plusieurs adaptations au droit des successions. Parmi ces adaptations législatives figure la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 relative à l'assainissement cadastral et à la résorption du désordre de la propriété, dont le régime dérogatoire a été prorogé de dix ans en 2025, et s'applique désormais jusqu'en 20378(*).

Outre des exonérations fiscales9(*) et une procédure spécifique de recours aux actes notariés de notoriété acquisitive permettant de faire foi de la possession d'un immeuble situé en Corse10(*), cette loi a instauré une dérogation à l'article 815-3 du code civil, en prévoyant des règles de majorité distinctes pour la gestion et le partage d'une indivision, dès lors que cette dernière aura été constatée par l'acte notarié précité. En effet, la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 abaisse à la majorité simple, contre une majorité des deux tiers dans le droit commun, le seuil requis pour accomplir les actes d'administration indispensables à la bonne gestion du bien. De même, elle abaisse à une majorité des deux tiers, contre une règle d'unanimité dans le droit commun, le seuil requis pour accomplir à l'amiable des actes de disposition, tels que les ventes ou les cessions. Ces mesures sont soumises à l'information des autres indivisaires. La loi du 6 mars 2017 ne précise cependant pas les conséquences d'une opposition formelle d'un indivisaire à cette vente.

Bien qu'il demeure, d'après les chiffres transmis au rapporteur par le groupement d'intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété en Corse (Girtec), encore 303 369 parcelles concernées par une succession non réglée au 31 décembre 2024, soit 29,2 % des parcelles de l'île, l'important travail de reconstitution des titres de propriété effectué par les notaires de l'île avec le soutien du Girtec a permis de réduire de 24,6 % le nombre de ces parcelles en quinze ans.

Le groupement d'intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété en Corse (Girtec)

L'article 42 de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 modifiant le code général des collectivités territoriales et la loi n° 2002-6 du 4 janvier 2002 relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle a créé, pour une durée initiale de dix ans, le groupement d'intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété en Corse, chargé de rassembler tous les éléments propres à reconstituer les titres de propriété pour les biens fonciers et immobiliers qui en sont dépourvus.

L'État, la collectivité territoriale de Corse, l'association des maires de la Corse-du-Sud, l'association des maires de Haute Corse ainsi que le conseil régional des notaires de Corse, membres de droit, administrent le groupement. Il jouit en outre de la mise à disposition par ses membres de personnels, de locaux et d'équipements, lui permettant de s'appuyer sur une équipe de dix agents pour répondre aux saisines et conduire les recherches qui en découlent.

Aux termes des conventions constitutives de 2007 et 2017, deux missions incombent au Girtec :

- le groupement d'intérêt public est chargé de rassembler tous les éléments propres à reconstituer les titres de propriété en Corse pour les biens fonciers et immobiliers qui en sont dépourvus et peut à cet égard « prendre toute mesure permettant de définir ces biens et d'en identifier les propriétaires et créer ou gérer l'ensemble des équipements ou services d'intérêt commun rendus nécessaire pour la réalisation de son objet ». Il dispose ainsi d'un droit de communication à l'égard de toute personne, physique ou morale, de droit privé ou public, lui permettant d'obtenir tous documents et informations nécessaires à la réalisation de cette mission, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel. Sans se substituer aux notaires dans l'établissement d'un titre de propriété, le Girtec est ainsi saisi par ces derniers afin de procéder aux recherches et leur permettre de créer un titre (acte de notoriété acquisitive) ou de le faire entrer légalement dans le patrimoine communal ;

- la convention constitutive du Girtec, telle que modifiée en 2017, faisant suite à la pérennisation du groupement, lui a en outre confié,
en complément des demandes formulées par les personnes directement intéressées par la reconstitution des titres de propriété, la possibilité, au service exclusif des personnes et établissements publics, de rassembler les éléments nécessaires à l'identification des propriétaires des biens fonciers et immobiliers en vue d'apporter des informations nécessaires à l'exercice de leurs missions d'intérêt général.

Après deux années de définition des méthodes de travail et de recueil de données, le Girtec a initié véritablement ses travaux en 2011. Il traite en moyenne 500 dossiers chaque année.

Après s'être concentré sur le titrement des biens appartenant aux particuliers, le groupement développe depuis 2022 l'aide au titrement des biens des collectivités. Une convention a été signée en novembre 2023 avec les deux associations de maires et le conseil régional des notaires pour aider au titrement des parcelles communales dépourvues de titre.

Source : commission des lois

Si des progrès manifestes ont été réalisés en matière de titrisation, la loi précitée du 6 mars 2017 n'a en revanche pas eu le succès escompté en matière de gestion et de sortie d'indivision successorale. En effet, son article 2 est « inutilisé par les notaires de Corse », comme l'a indiqué au rapporteur la chambre régionale des notaires de Corse. D'après le Girtec, cette inutilisation serait liée au « manque de formalisme » de la procédure prévue par le législateur, qui serait ainsi insuffisamment protectrice pour les indivisaires souhaitant initier un acte d'administration ou, surtout, un acte de disposition. En conséquence, c'est bien le droit commun qui est appliqué par les notaires de Corse pour la gestion et la sortie des indivisions successorales, malgré la volonté de prise en compte, par le législateur, des spécificités de la situation foncière de l'île.

b) La loi Letchimy du 27 décembre 2018 permet d'aliéner un bien indivis à la majorité simple et sans intervention judiciaire

La loi n° 2018-1244 du 27 décembre 2018 visant à faciliter la sortie de l'indivision successorale et à relancer la politique du logement en outre-mer, dite « loi Letchimy », a été adoptée puis réformée en 202411(*), à chaque fois avec le soutien du Sénat, dans l'objectif de « résoudre les difficultés foncières ultramarines »12(*). D'après le Conseil supérieur du notariat, les territoires ultramarins sont en effet structurellement confrontés à « une problématique de successions non réglées depuis parfois trois ou quatre générations, générant des indivisions successorales composées souvent de plus de cinquante héritiers, parfois de plus de cent, sclérosées depuis plusieurs dizaines d'années, totalement enkystées »13(*).

Pour répondre à ces difficultés, la loi Letchimy permet de déroger à certaines règles du droit commun de l'indivision successorale dans les départements et les régions d'outre-mer, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon. En particulier, elle permet d'écarter la règle de l'unanimité pour les ventes des biens indivis par procédure amiable, au profit d'une règle de majorité simple, dès lors - notamment - que la succession est ouverte depuis plus de dix ans et que le bien n'est pas un local d'habitation dans lequel réside le conjoint survivant. Sur le modèle de la procédure de droit commun de vente d'un bien indivis par autorisation judiciaire14(*), ce n'est qu'en cas d'opposition formelle d'un ou de plusieurs indivisaires formulée dans un délai de trois mois que la vente ou le partage est soumis au juge judiciaire. Contrairement à la loi du 6 mars 2017 sur la Corse, la loi Letchimy ne se contente donc pas d'abaisser les seuils, mais instaure en sus une procédure amiable renforcée, afin de limiter le recours à la justice aux seules oppositions explicites d'indivisaires connus. En revanche, contrairement à la procédure de droit commun, l'absence de manifestation d'un indivisaire vaut accord tacite à la vente.

En outre, la loi Letchimy institue une dérogation à l'article 887-1 du code civil, qui autorise l'annulation du partage successoral si un des cohéritiers en a été omis. Elle n'offre à ceux omis « par la simple ignorance ou l'erreur », si le partage amiable ou judiciaire a déjà été soumis à la formalité de la publicité foncière ou exécuté par l'entrée en possession des lots, que la possibilité de recevoir leur part en valeur, sans annulation du partage.

Ces deux mesures instituent donc des dérogations fortes à l'article 815-3 du code civil qui dispose que « le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l'exploitation normale des biens indivis ».

Ayant vocation à n'être que temporaire en raison de l'atteinte au droit de propriété qu'il peut représenter, ce dispositif ne s'applique que jusqu'au 31 décembre 2038.

Dans deux rapports publiés récemment, la délégation sénatoriale aux outre-mer a fait état d'un bilan partiel - en l'absence de chiffres consolidés - mais modeste de l'application de cette loi, qui ne serait que « faiblement utilisée »15(*).

c) Le droit alsacien-mosellan prévoit un partage judiciaire dans lequel l'intervention du juge est réduite

Pour mémoire, l'Alsace-Moselle est partiellement régie par un droit local, résultant de son rattachement successif à l'empire allemand puis à la République française. Ce droit local, que le Conseil constitutionnel a érigé en principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR)16(*), s'applique à certains pans du droit civil, et notamment au partage judiciaire, régi par les articles 220 à 242 de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

Cette procédure est qualifiée de « gracieuse »17(*), selon une acception distincte du droit commun. En effet, la procédure de partage judiciaire alsacienne-mosellane « gracieuse » suppose l'existence d'un contentieux. Toutefois, la preuve de l'échec d'un partage amiable n'est pas nécessaire pour l'engager.

Outre la différence d'appellation, la procédure de droit local se distingue du droit commun en ce qu'elle est confiée principalement au notaire, le juge se contentant de vérifier son bon déroulement et « [d']homologuer »18(*) l'acte de partage. Ce n'est qu'en cas de « difficultés pendant les opérations devant le notaire et si elles n'ont pas reçu de solution » que le juge intervient sur le fond, par voie d'assignation19(*).

Ainsi, c'est le notaire et non le juge qui convoque les parties intéressées, qui réunit leurs « justifications »20(*), qui anime les débats et qui en dresse le procès-verbal. L'objectif de ces échanges extrajudiciaires est « d'établir les masses, de fixer les droits de chaque intéressé, de former les lots et de procéder ensuite au tirage au sort de ces lots », sauf si un partage en nature n'est pas faisable sans une dépréciation des biens à partager, auquel cas les biens sont vendus par voie d'adjudication aux enchères publiques.

Dans une logique similaire à la procédure dérogatoire prévue par la loi Letchimy pour les territoires ultramarins, en cas de non-comparution à une réunion organisée par le notaire, les absents sont présumés consentir au partage, qui s'impose à eux21(*), sauf à justifier devant le juge que « c'est sans [leur] faute [qu'ils ont] été empêché[s] de comparaître »22(*).

Une fois que le juge a homologué l'acte de partage, celui-ci a force exécutoire. Une exécution forcée peut avoir lieu.

Le rapporteur n'a pas eu connaissance d'éventuelles difficultés particulières d'application de cette procédure spécifique à l'Alsace-Moselle, qui est connue et maîtrisée par les professionnels du droit dans ces territoires.

Article 1er (supprimé)
Création d'une base de données relative au recensement
des biens abandonnés

L'article 1er de la proposition de loi vise à créer une base de données de recensement des biens dits abandonnés. Si l'expression « biens abandonnés » ne renvoie à aucune catégorie juridique existante, la commission des lois de l'Assemblée nationale l'a rattachée, en adoptant un amendement proposé par sa rapporteure, Louise Morel, à plusieurs procédures juridiques spécifiques.

La base de données recenserait donc les biens concernés par certaines procédures limitativement énumérées. Il s'agit de la déclaration de parcelle en état d'abandon manifeste, de l'attribution à une personne publique de la propriété des biens sans maître, de la gestion de biens de l'État dans le cadre d'une succession vacante et de l'envoi de biens en possession par l'État dans le cadre d'une succession en déshérence.

Le rapporteur a toutefois constaté durant ses travaux que ces procédures sont par définition soit connues de la personne publique, soit engagées dans l'attente de la manifestation d'un propriétaire ou lorsqu'une personne publique revendique la propriété d'un bien. La base de données ne permettrait donc pas de satisfaire l'objectif qui lui est assigné. La commission a en conséquence, sur proposition de son rapporteur, Jean-Baptiste Blanc, adopté un amendement de suppression de l'article 1er.

1. L'article 1er créerait une base de données, qui recenserait les biens immobiliers dits abandonnés, parce que concernés par des procédures spécifiques

La version initiale de l'article 1er sollicitait du Gouvernement « un rapport sur la création d'une base de données relative au recensement des biens abandonnés ».

La rapporteure de la commission des lois de l'Assemblée nationale, Louise Morel, a présenté un amendement de réécriture globale de cet article, pour instaurer immédiatement cette base de données par la voie législative.

Cette base permettrait d'après la rapporteure d'informer les collectivités territoriales quant au régime juridique auquel sont soumis les biens abandonnés sis sur leur territoire et, partant, de remédier aux effets néfastes qui en découlent (absence de recouvrement de l'impôt foncier, opérations d'aménagement entravées, etc.).

Si la notion de « biens abandonnés » ne renvoie à aucune catégorie juridique autonome, plusieurs régimes juridiques spécifiques s'y rattacheraient selon la rapporteure de l'Assemblée nationale. La base recenserait ainsi les biens concernés par l'une des procédures suivantes :

· la déclaration de parcelle en état d'abandon manifeste

Cette procédure est régie par les articles L. 2243-1 à L. 2243-4 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Le maire peut l'engager, lorsque, dans sa commune, « des immeubles, parties d'immeubles, voies privées assorties d'une servitude de passage public, installations et terrains sans occupant à titre habituel ne sont manifestement plus entretenus » (article L. 2243-1 du CGCT).

· l'attribution à une personne publique de la propriété de biens sans maître

Cette procédure, prévue par les articles L. 1123-1 à L. 1123-3 du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP), concerne deux catégories de biens.

Il s'agit en premier lieu des biens inscrits à l'actif des successions ouvertes depuis plus de trente ans et pour lesquelles aucun successible ne s'est présenté.

L'article 713 du code civil détermine les règles relatives à l'acquisition de la propriété de ces biens. En dehors du cas spécifique des parcelles situées sur certains littoraux, leur propriété revient de plein droit à la commune ou à l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, et s'ils y renoncent, à l'État23(*).

La procédure s'applique en second lieu aux immeubles sans propriétaire connu pour lesquels, depuis plus de trois ans, les taxes foncières n'ont pas été acquittées ou l'ont été par un tiers.

· la gestion de biens par l'État dans le cadre d'une succession vacante

Les successions vacantes sont régies par les articles 809 à 810-12 du code civil. Une succession devient vacante dans trois hypothèses, qu'énumère l'article 809 du code civil :

- l'absence d'option successorale et d'hériter connu ;

- le renoncement de l'ensemble des héritiers connus à la succession ;

- l'indécision de l'option successorale des héritiers connus à l'expiration d'un délai de six mois après l'ouverture de la succession.

Tout créancier, toute personne qui assurait l'administration de tout ou partie du patrimoine de la personne décédée, toute autre personne intéressée, un notaire et le ministère public peuvent alors saisir le juge sur requête pour qu'il confie la curatelle de la succession vacante à l'autorité chargée du domaine, c'est-à-dire à la direction nationale d'interventions domaniales (Dnid).

Il revient ensuite à la Dnid de gérer la succession vacante et spécialement d'apurer le passif de cette dernière, en vertu de l'article 810-2 du code civil. Elle accomplit à cette fin l'ensemble des actes conservatoires et d'administration une fois achevé un délai de six mois qui court à compter de l'ouverture de la succession.

· l'envoi de biens en possession de l'État dans le cadre d'une succession en déshérence

Cette procédure vise à faire reconnaître par le tribunal, en vertu de l'article 811 du code civil, que, faute d'héritier, les biens d'une succession en déshérence doivent revenir à l'État. Elle est engagée à l'initiative de ce dernier.

L'article 1er de la proposition de loi précise en son dernier alinéa que la base de données recenserait « l'ouverture de ces procédures », qu'elle serait « alimentée par les administrations et par certaines professions réglementées » et « accessible aux collectivités territoriales ».

2. La création de cette base de données présente des difficultés juridiques et pratiques, qui ont convaincu la commission de rejeter cet article

Le rapporteur a constaté au long de ses travaux que la base de données définie par l'article 1er de la proposition de loi présente des défauts de conception majeurs, qui compromettent son utilité et par là même son opportunité.

La plupart des personnes entendues par le rapporteur, qu'il s'agisse du professeur Brenner, des représentants de la Dnid ou de ceux de la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) ont en effet souligné que les procédures ciblées par le dispositif apparaissent parfois incohérentes avec l'objectif qu'il poursuit.

Les deux premières procédures que vise le dispositif sont engagées par des personnes publiques et donc nécessairement connues de ces dernières :

- la déclaration de parcelle en état d'abandon manifeste est ainsi engagée par le maire de la commune sur le territoire de laquelle est sis le bien concerné. Au surplus, cette procédure ne concerne pas nécessairement un bien dont le propriétaire serait inconnu. La seule dégradation matérielle de l'immeuble suffit à justifier son engagement ;

- l'attribution de la propriété d'un bien sans maître à une personne publique résulte, elle aussi, d'un mouvement engagé par cette dernière.

Les deux autres procédures mentionnées par l'article 1er ne renvoient quant à elles pas précisément à des biens abandonnés :

- la gestion par la Dnid d'une succession vacante n'empêche en rien un héritier de se manifester et de faire valoir ses droits, comme le prévoit explicitement l'article 810-12 du code civil ;

- l'envoi en possession de l'État dans le cadre d'une succession en déshérence consiste précisément en la désignation de l'État comme propriétaire.

Le rapporteur considère donc que cette base de données ne permettrait pas d'améliorer l'information des collectivités territoriales quant à l'abandon des biens situés sur leur territoire.

Les représentants de la DACS et de la Dnid entendus par le rapporteur ont par ailleurs souligné que les modalités pratiques d'alimentation de la base de données n'apparaissent pas fonctionnelles. La DACS a insisté sur le fait que « cette base inclurait des données dont la gestion relève de différentes administrations » et de plusieurs professions réglementées.

Enfin, la création de cette base représenterait une dépense significative, dont l'opportunité n'apparaît pas fondée au regard des éléments qui précèdent.

Les défauts de conception de cette base de données ont convaincu la commission d'adopter l'amendement COM-4 de suppression de l'article 1er, présenté par son rapporteur.

La commission a supprimé l'article 1er.

Article 1er bis
Publicité numérique de l'ordonnance judiciaire de désignation de l'État comme curateur dans une succession vacante

L'article 1er bis autorise l'administration chargée du domaine, c'est-à-dire la direction nationale d'interventions domaniales, à publier par voie numérique, sur son site internet, l'ordonnance judiciaire la désignant curatrice au nom de l'État dans une succession vacante. En l'état du droit, cette publication n'a lieu que par voie de presse.

La commission a adopté cet article, entièrement réécrit par un amendement présenté par son rapporteur, afin d'étendre la publicité numérique à tous les documents liés à la curatelle successorale dont le code civil impose la publication.

1. Les ordonnances de curatelle sont publiées par voie de presse

Une succession est déclarée vacante lorsque l'une de ces trois conditions, fixées à l'article 809 du code civil, est remplie24(*) :

- lorsqu'il ne se présente personne pour réclamer la succession et qu'il n'y a pas d'héritier connu ;

- lorsque tous les héritiers connus ont renoncé à la succession ;

- lorsque, après l'expiration d'un délai de six mois depuis l'ouverture de la succession, les héritiers connus n'ont pas opté, de manière tacite ou expresse.

Il revient alors au juge judiciaire, saisi sur requête par tout créancier, toute personne qui assurait, pour le compte de la personne décédée, l'administration de tout ou partie de son patrimoine, un notaire, toute autre personne intéressée ou le ministère public, de déclarer la vacance de la succession. Le juge confie alors la curatelle « à l'autorité administrative chargée du domaine »25(*), c'est-à-dire la direction nationale d'interventions domaniales (Dnid). En 2024, celle-ci a assuré la gestion de 7 784 biens immobiliers dans le cadre de 5 933 successions vacantes.

La direction nationale des interventions domaniales

La Dnid est un service à compétence nationale rattaché au directeur de l'immobilier de l'État au sein de la direction générale des finances publiques (Dgfip). Créée en 1969, elle est dirigée par un comptable public principal.

La Dnid réalise quatre grandes missions relatives à la gestion du patrimoine public et privé.

Premièrement, elle pilote la valorisation du patrimoine mobilier de l'État par la vente et les dons de biens mobiliers publics (biens réformés des organismes publics, véhicules de fourrière, d'objets issus de saisies judiciaires, douanières et fiscales). Les ventes de biens mobiliers publics ont atteint 108 millions d'euros en 2024. Cette mission est assurée par un réseau de 14 commissariats aux ventes répartis sur le territoire national.

Deuxièmement, la Dnid réalise des évaluations immobilières destinées à contrôler la valeur des acquisitions ou baux contractés par des organismes publics ex ante. En 2024, 80 000 évaluations domaniales ont été réalisées, représentant 49,2 milliards d'euros d'actifs évalués.

Troisièmement elle prend en charge la gestion des successions vacantes, agissant comme curateur lorsqu'aucun héritier n'est identifié (voir infra).
Elle s'appuie pour l'exercice de cette mission sur 22 « pôles de gestion des patrimoines privés » (17 dans l'Hexagone et 5 en outre-mer).

Les 22 pôles de gestion des patrimoines privés

Source : direction générale des finances publiques

Enfin, elle exerce des missions de comptable spécialisé du domaine pour la tenue des comptes spéciaux du Trésor liés au domaine public et les opérations de recettes et de dépenses domaniales.

Source : commission des lois

Conformément à l'article 1379 du code de procédure civile, l'ordonnance de curatelle est rendue par le président du tribunal judiciaire,
qui statue selon les modalités fixées aux articles 493 à 498 du même code, qui régissent le prononcé des ordonnances sur requête.

Comme toutes les ordonnances sur requête, l'ordonnance de curatelle est une décision provisoire, dans l'attente de la clôture de la succession, et donc de la fin de la curatelle, après que le curateur a « rend[u] compte au juge des opérations effectuées par lui »26(*). Ces opérations doivent être menées dans le double objectif de gestion de l'actif successoral du défunt27(*), après établissement d'un inventaire dressant l'actif et le passif de la succession28(*), et de règlement des dettes du défunt envers ses créanciers en procédant, le cas échéant, à la vente des biens29(*).

Ainsi, l'ordonnance de curatelle n'a pas pour objet ni pour effet de transférer à l'État la propriété des biens constituant la succession. Ce n'est qu'à la clôture de la curatelle que le juge peut ordonner « l'envoi en possession de l'État »30(*) lorsqu'un actif demeure après l'apurement des dettes et qu'il n'y a pas d'héritier dont les droits sont reconnus.

En l'état du droit, l'article 809-1 du code civil prévoit que l'ordonnance de curatelle « fait l'objet d'une publicité ». Conformément à l'article 1er de la loi n° 55-4 du 4 janvier 1955 concernant les annonces judiciaires et légales, cette publicité se matérialise par « une publication de presse ou un service de presse en ligne ». En pratique, cette publication « donne lieu à l'insertion d'un avis dans un journal d'annonces légales diffusé dans le ressort du tribunal judiciaire compétent »31(*). À titre d'exemple, les 54 ordonnances de curatelle prononcées dans le ressort des tribunaux judiciaires de Bastia et d'Ajaccio en 2024 ont toutes été publiées dans le quotidien Corse Matin32(*).

D'après les chiffres transmis au rapporteur par la Dnid, les annonces légales qu'elle publie dans le cadre des successions vacantes - ce qui représente toutefois un périmètre plus large que les seules ordonnances de curatelle, puisque cela inclut la publicité de l'établissement de l'inventaire, du projet de règlement du passif et du compte de clôture - atteignent le nombre de 30 000 par an. La Dnid fait état de « contraintes de gestion fortes, avec des délais d'intervention du prestataire qui restent élevés (publication dans un délai de 7 à 11 jours) ». Le coût, pour la Dnid, de ces publications par voie de presse s'est élevé à 1,675 million d'euros en 2024.

2. L'article 1er bis autoriserait la publication numérique des ordonnances de curatelle

L'article 1er bis a été introduit en commission des lois de l'Assemblée nationale à l'initiative de la rapporteure, Louise Morel33(*), sur une suggestion de la Dnid.

Il prévoit une dérogation à la procédure de publicité par voie de presse en autorisant la publication de l'ordonnance judiciaire « par voie numérique sur le site internet de l'administration chargée des domaines ». Si cet article était adopté, il nécessiterait en conséquence une actualisation de l'article 1342 du code de procédure civile, qui appartient au domaine règlementaire, et qui prévoit l'insertion d'un avis dans un journal d'annonces légales.

Ce site internet pourrait être le portail des successions vacantes tenu par la Dnid et hébergé sur le site internet de la direction générale des finances publiques (Dgfip). En l'état, ce portail numérique permet aux héritiers ou légataires de revendiquer les successions et aux créanciers de réclamer leurs créances. Pour avoir accès aux informations qu'il contient, il faut toutefois disposer de la date du décès, qui peut se trouver en consultant le fichier des personnes décédées mis en ligne sur le site data.gouv.fr.

D'après la Dnid, ce portail « en accès grand public sur le site internet impots.gouv.fr, réunit en effet les conditions d'accès libre et gratuit pour offrir les conditions d'une large information des personnes intéressées ».

Si le texte transmis au Sénat ouvre la faculté, pour la Dnid, de publier par voie numérique l'ordonnance de curatelle, il ne précise cependant pas si cette publication numérique est exclusive d'une publication par voie de presse. Dans son rapport sur la présente proposition de loi, la rapporteure de la commission des lois de l'Assemblée nationale, Louise Morel, interprète ainsi le texte : « cette modalité de publicité doit être entendue comme ayant vocation à s'ajouter à celle déjà prévue par le droit existant dans un journal d'annonces légales, non à s'y substituer nécessairement. Les deux modalités de publicité seront alternatives et auront la même portée légale »34(*). Cette interprétation ne semble toutefois pas garantie. En effet, interrogée par le rapporteur, la Dnid a indiqué qu'elle « cumulera, dans un premier temps, les deux modes de publicité », mais que « ce cumul de publicité pourra être réévalué en fonction de l'évolution des comportements des usagers ».

En tout état de cause, la mise en oeuvre du présent article nécessitera des développements informatiques importants pour la Dnid, qui devra faire évoluer le portail de successions vacantes. Bien que la publication numérique ne puisse pas être réalisée immédiatement, les développements qu'elle nécessite ne devraient pas avoir d'effets sur le délai de publication actuellement mis en oeuvre pour publier les annonces en matière de successions vacantes, puisque, dans l'attente, la publication via les journaux d'annonces légales sera maintenue.

Par comparaison, et bien qu'il ne s'agisse pas d'une ordonnance de curatelle, la publicité par voie numérique est déjà autorisée pour la publication de l'acte notarié de notoriété acquisitive régi par l'article 1er de la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 visant à favoriser l'assainissement cadastral et la résorption du désordre de propriété et pour la procédure extrajudiciaire de vente d'un bien indivis instaurée par la loi dite Letchimy du 27 décembre 201835(*). Cette publication numérique se cumule cependant avec une publication par voie de presse et par voie d'affichage36(*).

3. Une mesure opportune mais qui ne doit pas se substituer à la publication par voie de presse

Le rapporteur a jugé pertinente cette évolution qui devrait permettre d'offrir une plus large information des héritiers et des créanciers potentiels et, partant, d'améliorer la gestion des successions vacantes.

Tout en la soutenant, il a présenté un amendement COM-5, adopté par la commission, qui réécrit l'article 1er bis, afin, d'une part, de le compléter et, d'autre part, de corriger un effet de bord indésirable.

Ainsi, l'amendement COM-5 porte trois modifications.

En premier lieu, il étend la possibilité de publicité numérique à tous les documents liés à la curatelle successorale dont le code civil impose la publication, c'est-à-dire l'établissement de l'inventaire des biens constituant la succession (article 809-2 du code civil), le projet de règlement du passif (article 810-5 du même code) et le compte de clôture (article 810-7 dudit code). Tel que transmis au Sénat, l'article 1er bis n'autorise en effet pas la publication numérique de ces éléments. En revanche, l'amendement COM-5 ne prévoit pas la publication sur le site internet de la Dnid des informations relatives à la vente des biens de la succession, régie par l'article 810-3 du code civil, parce qu'il ne s'agit pas d'une publicité légale au sens de la loi précitée du 4 janvier 1955 mais d'une obligation d'assurer une mise en concurrence des acheteurs potentiels d'un bien.

En deuxième lieu, à l'instar de la procédure dérogatoire régie par la loi Letchimy du 27 décembre 2018, il précise que la publication par voie numérique - sur le site internet de l'administration chargée du domaine - n'est pas exclusive d'une publication par voie de presse. En effet, si le rapporteur souscrit à l'objectif de faciliter d'accès aux informations liées aux vacances successorales, il estime qu'il ne pourra qu'être mieux atteint en maintenant la publication par voie de presse.

Enfin, en reprenant les termes de l'article 2 de la loi précitée du 27 décembre 2018, il accorde une base légale à la pratique, systématique en Corse, consistant à publier les actes notariés de notoriété acquisitive dans un journal d'annonces légales, en sus de la publication de cet acte « par voie d'affichage, sur un site internet et au service de la publicité foncière ».

La commission a adopté l'article 1er bis ainsi modifié.

Article 1er ter (nouveau)
Assouplissement des règles encadrant la vente des biens d'une succession vacante par l'administration chargée du domaine

Issu de l'adoption par la commission d'un amendement du rapporteur, l'article 1er ter supprime la règle selon laquelle l'administration chargée du domaine doit obligatoirement vendre les biens meubles avant de pouvoir aliéner les biens immeubles. Par cette modification, il s'agit d'octroyer davantage de souplesse de gestion au curateur d'une succession vacante, en lui permettant de déterminer au cas par cas quels sont les biens à vendre prioritairement afin d'apurer les dettes du défunt.

1. Le curateur d'une succession vacante ne peut vendre les biens immeubles que si la vente des biens meubles ne suffit pas à apurer les dettes ou si leur conservation est difficile ou onéreuse

La curatelle exercée par la direction nationale d'interventions domaniales (Dnid)37(*) a pour objets principaux de veiller aux intérêts de la succession, notamment dans l'hypothèse où des héritiers n'ayant pas refusé la succession se manifesteraient ou seraient tardivement identifiés, et de répondre aux droits des créanciers sur celle-ci.

Une fois la Dnid désignée curatrice, celle-ci prend possession des biens de la succession, aux fins de poursuivre « le recouvrement des sommes dues »38(*). Elle peut également assurer, le cas échéant, l'exploitation de l'entreprise individuelle dépendant de la succession, qu'elle soit commerciale, industrielle, agricole ou artisanale.

Après prélèvement des frais d'administration, de gestion et de vente, la Dnid consigne les sommes composant l'actif de la succession ainsi que les revenus des biens et les produits de leur réalisation.

Pour apurer les dettes et, plus généralement, gérer l'actif successoral du défunt, le curateur est naturellement conduit à vendre tout ou partie des biens meubles et immeubles qui constituent cet actif. Le code civil, tel que profondément modifié par la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités, régit toutefois précisément la temporalité et les modalités des ventes auxquelles peut procéder le curateur.

Au cours d'une première période de six mois suivant l'ouverture de la succession, le curateur ne peut procéder qu'aux actes purement conservatoires ou de surveillance, aux actes d'administration provisoire et à la vente des biens périssables39(*). Comme l'a relevé à l'époque le rapporteur de la commission sur la loi précitée du 23 juin 2006, Henri de Richemont, le curateur ne peut donc pas vendre des biens meubles ou immeubles « même pour régler les dettes urgentes »40(*). Cette règle est censée éviter l'alinéation irréversible des biens dans un délai proche du décès du défunt, c'est-à-dire un délai au cours duquel il est encore probable que des héritiers jusqu'alors inconnus se manifestent ou soient identifiés. Dans les faits, cette règle, bien qu'utile sur le principe, ne trouve pas à s'appliquer, puisqu'en moyenne la Dnid est désignée curatrice d'une succession vacante 3 ans et 8 mois après le décès.

Passé ce délai de six mois, le curateur peut exercer l'ensemble des actes conservatoires et d'administration. Il peut aussi effectuer des actes de disposition, c'est-à-dire procéder à la vente des biens. Cependant, conformément à l'article 810-2 du code civil, le curateur dispose pour ces actes de disposition d'un périmètre d'action limitée.

En premier lieu, le législateur soumet la vente de ces biens à des motifs précis : le curateur ne peut vendre les biens de la succession que pour permettre l'apurement du passif ou lorsque leur conservation est difficile ou onéreuse. Ce second motif permet d'éviter que la conservation des biens n'induise des frais inutiles, réduisant d'autant l'actif pour les éventuels héritiers comme pour les créanciers et, le cas échéant, in fine, l'État. Le curateur ne peut donc pas vendre les biens en dehors de ces deux motifs, par exemple s'il souhaite, pour des raisons de simple facilité d'administration, avoir à gérer une succession ne comportant que des liquidités.

En second lieu, l'article 810-2 précité fixe un ordre pour la réalisation des actifs puisque le curateur « ne peut céder les immeubles que si le produit prévisible de la vente des meubles apparaît insuffisant ». Autrement dit, le curateur ne peut vendre des biens immeubles qu'après avoir vendu les biens meubles.

Cet ordre de vente, qui a été inséré dans le code civil lors de la réforme des successions et des libéralités de 2006, reprend la règle ancienne qui était instaurée par l'article 1001 du code de procédure civile de 1807.

Tout en l'acceptant, le législateur s'est toutefois interrogé, en 2006, sur la pertinence du maintien de cette règle deux fois centenaire. Le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, Sébastien Huygue, faisait en effet observer que « cette chronologie classique maintient un postulat toujours admis dans le code civil, mais abandonné dans la liquidation de la succession acceptée à concurrence de l'actif, dans la mesure où l'héritier a la faculté de déclarer conserver certains biens, leur nature important peu. L'héritier est en effet parfaitement en droit de souhaiter conserver un bijou historique, et de vendre sans état d'âme la maison familiale, ou a fortiori un simple immeuble de rapport »41(*). Cette liberté de choix des biens à vendre pour apurer une dette, qui est reconnue à tous les héritiers, conformément au droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, n'a en revanche pas été reconnue au curateur parce que, « faute de connaître les héritiers, il apparaît plus irréversible de céder les immeubles que les meubles »42(*).

2. L'article 1er ter permet d'adapter la stratégie de vente du curateur

L'article 1er ter, issu de l'amendement COM-6 présenté par le rapporteur, revient sur cette règle qui institue pour l'administration du domaine des contraintes de gestion parfois disproportionnées, d'une part, et qui n'est pas toujours adaptée à la composition de certaines successions, d'autre part.

En effet, si les conditions fixées à l'article 810-2 du code civil se comprennent aisément, d'un point de vue théorique, pour ce qui concerne les biens meubles « meublant » - il paraît pour le moins illogique que la Dnid vende un bien immobilier tout en conservant les meubles qu'il contenait -, elle n'est pas toujours pertinente en pratique. D'une part, lorsque les biens meubles relèvent d'autres catégories, telles que des oeuvres d'art ou des véhicules, qui se dégradent moins rapidement et qui peuvent être couplés à l'existence de biens immeubles de faible valeur au sein de la succession,
tels qu'un terrain inexploité ou un bâtiment dégradé, il peut être financièrement plus opportun de vendre le bien immobilier d'abord. D'autre part, la réalisation en priorité des biens immeubles, notamment détenus en indivision, s'impose parfois compte tenu notamment des risques d'occupation irrégulière du bien ou de dépréciation des actifs.

Par ailleurs, dans le cas d'une succession vacante composée de plusieurs biens immobiliers « meublés », la règle actuelle impose à l'administration chargée du domaine de vendre en premier lieu tous les meubles présents dans ces immeubles, donc de les vider, avant, dans un second temps, de n'avoir à vendre qu'un seul de ces immeubles dans le cas où les dettes seraient inférieures à l'actif. La Dnid peut donc se voir contrainte de vider une maison de famille à forte valeur sentimentale, avant de vendre, par exemple, un simple champ en jachère.

Enfin, l'argument de l'irréversibilité n'apparaît pas entièrement fondé au rapporteur, au regard des exemples qui ont été donnés en 2006 pour justifier le maintien de la règle datant de 1807 : n'est-ce pas, justement, plus attentatoire aux intérêts des héritiers de vendre d'abord des « bijoux historiques » plutôt qu'un « simple immeuble de rapport » ? Dans les deux cas, si les héritiers se manifestent après la vente, ils ne pourront récupérer ces biens légalement acquis par leur nouveau propriétaire.

Compte tenu de ces considérations, l'article 1er ter vise à octroyer davantage de souplesse de gestion au curateur d'une succession vacante, en lui permettant de déterminer au cas par cas quels sont les biens à vendre prioritairement afin d'apurer les dettes du défunt. Conformément à l'article 810-7 du code civil, ces opérations demeureront soumises au contrôle du juge, auquel le curateur doit « rendre compte ». Ce faisant, l'assouplissement de cette règle fixant un ordre de vente devrait permettre de minimiser les risques de perte en valeur, au bénéfice des héritiers ou, en l'absence d'héritiers à l'issue de la procédure de curatelle, de l'État.

Naturellement, dans l'esprit du rapporteur, la pratique par défaut doit demeurer la vente des biens meubles en premier, la vente des biens immobiliers ne devant être envisagée qu'avec vigilance - notamment grâce au contrôle final du juge - et sous réserve de la présence de biens meubles particuliers qu'il conviendrait de maintenir dans la succession. En tout état de cause, la pratique actuelle consistant à vendre d'abord les biens meubles devrait rester la plus courante, puisqu'elle correspond aux successions « classiques » composée d'un seul bien immobilier qui constituait le logement du défunt et, éventuellement, d'un véhicule peu récent.

Parallèlement, le 2° de l'article 1er ter procède à la correction d'une erreur matérielle à l'article 810-3 du code civil, qui mentionne encore les commissaires-priseurs judiciaires et les huissiers de justice alors que l'article 61 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a créé la profession de « commissaire de justice » qui regroupe désormais les professions d'huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire.

Par l'adoption de l'amendement COM-6 du rapporteur, la commission a approuvé ces mesures, considérant qu'elles concourront à faciliter la gestion des successions vacantes.

La commission a adopté l'article 1er ter ainsi rédigé.

Article 2
Procédure judiciaire dérogatoire d'aliénation d'un bien indivis appartenant à une succession vacante administrée
par l'administration du domaine

L'article 2, dans sa version transmise par l'Assemblée nationale, instaurait une procédure judiciaire dérogatoire d'aliénation d'un bien indivis qui figure à l'actif d'une succession vacante. Ce dispositif permettait ainsi au juge d'autoriser la vente d'un bien indivis à la demande de l'administration du domaine curatrice d'une succession vacante.

Cette procédure reposait sur plusieurs critères cumulatifs : l'indivision devait être constituée depuis au moins dix ans et comprendre un indivisaire décédé depuis plus de deux ans dont la succession a été déclarée vacante ; l'identité ou l'adresse d'un ou de plusieurs indivisaires ne devait pas être connue ; l'administration du domaine devait justifier des diligences entreprises pour identifier et localiser les indivisaires en question ; l'aliénation du bien indivis ne devait pas porter une atteinte excessive aux intérêts des autres indivisaires.

Le rapporteur a toutefois constaté au cours de ses travaux que cette procédure portait une atteinte disproportionnée au droit de propriété. Il a considéré au surplus qu'elle introduisait une inégalité de traitement injustifiée entre les coïndivisaires. Aussi a-t-il proposé à la commission de consacrer une jurisprudence, qui permet déjà d'obtenir la vente d'un bien indivis requise par l'intérêt commun de l'indivision. La commission a, sur proposition de son rapporteur, Jean-Baptiste Blanc, adopté l'article 2 ainsi modifié.

1. Le code civil prévoit plusieurs procédures de partage ou de vente d'un bien indivis en l'absence d'une unanimité entre les coïndivisaires

Si le principe de l'unanimité prévaut pour les actes de disposition, conformément à l'article 815-3 du code civil et comme ce fut évoqué dans le propos liminaire de ce rapport, le code civil prévoit toutefois certaines procédures qui permettent de procéder au partage ou de vendre un bien indivis sans qu'une véritable unanimité des coïndivisaires ne soit constatée.

· Dans le cadre du partage amiable

L'absence présumée d'un indivisaire ou son éloignement, qui le met hors d'état de manifester sa volonté, n'empêche pas les autres coïndivisaires d'aboutir à un partage amiable. L'article 836 du code civil précise que ce partage peut intervenir dans le cadre des dispositions du même code relatives à la présomption d'absence. L'article 116 du code civil dispose ainsi qu'« en cas d'opposition d'intérêts entre le représentant [de l'indivisaire absent] et le présumé absent, le juge des tutelles autorise le partage » et prévoit qu'en toute hypothèse « l'état liquidatif est soumis à l'approbation du juge des tutelles ».

En vertu de l'article 837 du code civil, un copartageant peut mettre en demeure un indivisaire défaillant de se faire représenter au partage amiable. Si ce dernier ne constitue pas mandataire dans les trois mois qui suivent cette mise en demeure, un copartageant « peut demander au juge de désigner toute personne qualifiée qui représentera le défaillant jusqu'à la réalisation complète du partage ». Il revient ensuite au juge de donner l'autorisation à la personne qualifiée de consentir au partage.

· Dans le cadre d'une procédure judiciaire

L'article 815-5 du code civil permet ainsi à un indivisaire de saisir le juge pour qu'il l'autorise « à passer seul un acte pour lequel le consentement d'un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l'intérêt commun ». Cette disposition peut notamment permettre l'aliénation d'un bien nécessaire au paiement d'une dette qui n'était pas directement liée à l'indivision. La Cour de cassation a ainsi estimé que le refus de l'un des indivisaires de consentir à l'aliénation des biens indivis pour assurer le paiement des droits de succession met en péril l'intérêt commun des indivisaires, dans la mesure où les droits de succession peuvent être poursuivis solidairement contre les héritiers et sur les biens de l'indivision43(*).

Le président du tribunal judiciaire peut en outre, en vertu de l'article 815-6 du code civil, « prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun ». Parmi les mesures urgentes susceptibles d'être ordonnées par le juge figure la vente d'un bien indivis. La Cour de cassation a en effet considéré dans un arrêt du 4 décembre 2013 que « le président du tribunal judiciaire peut autoriser un indivisaire à conclure seul un acte de vente d'un bien indivis pourvu qu'une telle mesure soit justifiée par l'urgence et l'intérêt commun »44(*).

Enfin, la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification du droit a introduit l'article 815-5-1 du code civil, qui permet au tribunal judiciaire d'autoriser l'aliénation d'un bien indivis « à la demande de l'un ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis » dans certaines conditions prévues au même article. Cette procédure ne peut toutefois pas être engagée lorsqu'un indivisaire est présumé absent ou qu'il se trouve hors d'état de manifester sa volonté par suite d'éloignement. En outre, les biens indivis qui font l'objet d'un démembrement de propriété sont exclus du champ d'application de cet article. Or, et comme cela est développé dans le commentaire d'article relatif à l'article 3 de la présente proposition de loi, l'article 815-5-1 du code civil établit des conditions restrictives qui expliquent le faible recours à cette procédure en pratique.

Enfin et par définition, la procédure de partage judiciaire régie par les articles 840 à 842 du code civil ne repose pas sur le consentement des coïndivisaires.

2. L'article 2 vise à faciliter l'aliénation d'un bien indivis inscrit à l'actif d'une succession vacante qu'il incombe à la direction nationale d'interventions domaniales d'administrer

Les auteurs du texte entendent remédier à la difficulté que rencontre l'administration du domaine à aliéner des biens indivis inscrits à l'actif des successions vacantes. La vente de ces biens est en effet est compromise pour des raisons pratiques, lorsque :

- les autres indivisaires sont taisants, défaillants, introuvables ou non identifiés ;

- la valeur du bien indivis est trop faible pour que les démarches nécessaires au partage de l'indivision puissent être engagées.

Il est du reste de nombreux cas où ces deux raisons s'entremêlent, dans la mesure où le caractère impécunieux de la succession vacante empêche la direction nationale d'interventions domaniales (Dnid) de réaliser les diligences nécessaires à l'identification des autres indivisaires, qu'il s'agisse du recours à un généalogiste ou à un huissier de justice.

L'article 2 vise ainsi à faciliter l'aliénation d'un bien indivis inscrit à l'actif d'une succession vacante qu'il incombe à la Dnid d'administrer, lorsqu'elle ne parvient pas à identifier ou à localiser un ou plusieurs autres indivisaires.

Dans sa version initiale, il insérait deux nouveaux articles au sein du code civil, les articles 815-5-2 et 815-5-3, qui facilitaient l'aliénation du bien indivis dans le cas, respectivement, d'une difficulté à identifier les autres indivisaires et lorsque la valeur du bien indivis n'excédait pas une valeur déterminée par décret.

Il fit l'objet en commission d'un amendement de réécriture globale proposé par la rapporteure, Louise Morel, pour améliorer la rédaction d'un dispositif désormais recentré sur un seul article 815-5-2 nouveau du code civil.

Ainsi rédigé, l'article 2 permet au tribunal judiciaire d'autoriser la Dnid à aliéner un bien indivis lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies :

- l'indivisaire pour la succession vacante duquel elle fut désignée curateur est décédé depuis au moins deux ans ;

- l'identité ou l'adresse d'au moins un autre indivisaire est inconnue ;

- la Dnid « justifie de diligences entreprises en vue d'identifier et de localiser les indivisaires dont l'identité ou l'adresse n'est pas connue » ;

- l'indivision concernée est ouverte depuis au moins dix ans ;

- l'aliénation du bien indivis ne porte pas « une atteinte excessive aux intérêts des indivisaires ».

L'article 2 précise que cette aliénation, qui serait opposable aux indivisaires, s'effectuerait par licitation, c'est-à-dire par une vente publique.

3. La commission considère que l'adaptation d'un dispositif existant permet de remédier plus utilement à la difficulté identifiée par les auteurs du texte

Si le rapporteur partage l'objectif poursuivi par les auteurs du texte, il considère toutefois que le dispositif actuellement prévu à l'article 2 de la proposition de loi présente des limites juridiques significatives. Au surplus, le droit actuel permet déjà de remédier aux difficultés que rencontre la Dnid sans qu'il soit nécessaire d'introduire un dispositif dérogatoire à son seul profit.

En dépit des garanties que présente le caractère cumulatif des critères nécessaires à l'engagement de la procédure, cette dernière pourrait, selon les représentants de la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) entendus par le rapporteur, « porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété des indivisaires non identifiés ou non localisés ».

En premier lieu, ce dispositif n'apparaît pas conforme au droit de propriété, dans la mesure où il ne présente pas de garantie suffisante pour les autres indivisaires, qu'ils soient favorables ou opposés à la vente. La Dnid pourrait ainsi vendre un bien par licitation, c'est-à-dire au moyen d'une vente aux enchères, au détriment de ses coïndivisaires, qui pourraient par exemple préférer la conclusion d'une vente amiable du bien.

Le critère de l'« atteinte excessive aux intérêts des autres indivisaires » ne suffit pas à remédier à cette difficulté juridique, puisque le dispositif ne prévoit aucun seuil relatif aux droits dont dispose la Dnid au sein de l'indivision. Le dispositif de l'article 815-5-1 du code civil, qui mentionne également ce critère, prévoit quant à lui une majorité des deux tiers des droits indivis. Or, comme l'a remarqué le professeur Brenner, le législateur porterait une atteinte disproportionnée au droit de propriété en permettant au curateur d'une succession de vendre un bien indivis tandis que « la succession vacante ne comporte peut-être que des droits infimes dans l'indivision » et méconnaîtrait par là même le principe de l'égalité de traitement qui s'applique aux indivisaires.

En second lieu, l'article 2 ne prévoit pas la nécessité de prendre des mesures de publicité pour signifier aux coïndivisaires la demande d'autorisation de vendre.

Le rapporteur constate par ailleurs que le droit en vigueur permet déjà de remédier aux situations dans lesquelles un ou plusieurs indivisaires seraient défaillants, présumés absents ou récalcitrants et plus particulièrement de :

- procéder à un partage amiable en dépit de l'absence présumée ou de la défaillance d'un indivisaire, en vertu des articles 836 et 837 du code civil ;

- surmonter devant le juge le refus d'un coïndivisaire qui « met en péril l'intérêt commun » de l'indivision, conformément à l'article 815-5 du code civil ;

- saisir le président du tribunal judiciaire sur le fondement de l'article 815-6 du code civil pour qu'il « [autorise] toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun ».

Cette dernière disposition permet ainsi de vendre un bien indivis « pourvu qu'une telle mesure soit justifiée par l'urgence et l'intérêt commun »45(*). Son champ d'application est donc plus large que celui de l'article 815-5 du code civil, qui suppose qu'un coïndivisaire exprime un refus. Aussi le professeur Brenner a-t-il souligné que l'article 815-6 du code civil « est aujourd'hui régulièrement utilisé pour permettre des aliénations qui apparaissent souhaitables ».

Le rapporteur remarque en outre que ces diverses dispositions bénéficient à l'ensemble des indivisaires. Il considère que les difficultés que rencontre la Dnid à aliéner des biens indivis peuvent être connues par tout indivisaire et qu'il n'y a donc pas lieu d'instaurer une procédure dérogatoire qui ne bénéficierait qu'à elle seule.

Le rapporteur a donc proposé à la commission d'adopter un amendement COM-7, qui consacre à l'article 815-6 du code civil la jurisprudence de la Cour de cassation sur la possibilité d'aliéner un bien indivis en cas d'urgence si cela est conforme à l'intérêt commun des indivisaires. Cette solution permet de favoriser le recours à cette procédure tout en préservant une égalité de traitement entre les indivisaires.

La commission a adopté l'amendement COM-7 et l'article 2 ainsi modifié.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article 3
Abaissement, de deux tiers à plus de la moitié des droits indivis, du seuil de majorité nécessaire pour aliéner un bien indivis après autorisation judiciaire

L'article 3 de la proposition de loi, entièrement réécrit lors de son examen à l'Assemblée nationale, abaisse le seuil de majorité nécessaire afin de saisir la justice pour être autorisé à aliéner un bien indivis, éventuellement après autorisation judiciaire en cas d'opposition d'un ou de plusieurs indivisaires. Il est ainsi proposé d'abaisser de deux tiers à la majorité simple des droits le seuil des droits indivis fixé à l'article 815-5-1 du code civil. Cette modification rapprocherait le droit commun de la procédure dérogatoire prévue par la loi dite « Letchimy » de 2018 qui a instauré, dans certaines conditions, une règle de majorité absolue pour les actes de disposition.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a supprimé l'abaissement proposé du seuil de majorité, tout en précisant la procédure dérogatoire applicable en Corse.

1. Une procédure d'autorisation judiciaire de vente d'un bien indivis dérogatoire de la règle d'unanimité mais qui s'avère peu usitée

Constatant que certaines indivisions faisaient face à « des conflits qui se cristallisent sur quelques biens »46(*), le législateur a, en 200947(*), instauré une nouvelle procédure, distincte du partage judiciaire, pour autoriser, par la voie judiciaire, la vente d'un bien indivis en dépit de l'opposition ou de l'inertie d'un ou de plusieurs indivisaires. Il s'agissait ainsi, dans l'esprit du législateur de 2009, de permettre de contourner la règle de l'unanimité, non pas forcément pour clore la totalité d'une indivision successorale - c'est l'objet de la procédure de partage judiciaire, qui a été décrite dans l'introduction - mais pour, a minima, vendre une partie des biens indivis, par exemple ceux qui demandent beaucoup d'entretien ou pour lesquels l'attachement émotionnel est moins fort.

Bien que cette procédure, dans sa conception, cible les indivisions successorales, elle s'applique à toutes les indivisions, par exemple l'indivision post-conjugale. Elle ne concerne par ailleurs pas que les biens immobiliers « classiques », mais peut, par exemple, régir un fonds de commerce.

Cette procédure, dont le Sénat avait soutenu l'adoption, est régie par l'article 815-5-1 du code civil.

L'initiative de la vente appartient à un ou plusieurs indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis. Pour mémoire, la répartition des droits indivis ne correspond pas nécessairement au nombre d'indivisaires, ainsi la majorité des droits indivis peut être distincte de la majorité des indivisaires, par exemple si un indivisaire a cédé une partie de ses droits, conformément à l'article 815-14 du code civil. Cette majorité des deux tiers des droits indivis a été fixée par le législateur de 2009 « dans un souci de cohérence avec la majorité nécessaire pour accomplir les actes de gestion courante des biens indivis »48(*). Le choix de fixer un seuil de majorité simple a en revanche été écarté afin d'offrir « une garantie supplémentaire des droits des indivisaires minoritaires »49(*).

En sus du seuil, considéré comme élevé, des deux tiers des droits indivis, l'article 815-5-1 précité prévoit deux cas d'exclusion de la mise en oeuvre de la procédure de vente par autorisation judiciaire.

En premier lieu, la vente ne peut pas être demandée en cas de démembrement de la propriété du bien. La vente d'un tel bien demeure réalisable, mais dans le cadre d'un partage, selon les règles définies aux articles 816 à 842 du code civil.

En second lieu, la vente ne peut également être demandée qu'à la double condition que tous les indivisaires soient connus et localisés - puisque les troisième et dernier alinéas de l'article 815-5-1 précité prévoient que le notaire notifie aux autres indivisaires l'intention de vente du bien, faute de quoi l'aliénation du bien n'est pas opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut - et qu'aucun ne soit présumé absent, hors d'état de manifester sa volonté par suite d'éloignement, ou placé sous un régime de protection juridique. Si tel était le cas, un partage amiable ou judiciaire de l'indivision devrait être réalisé en application de l'article 836 du code civil auquel il est fait référence.

Il revient au notaire, qui joue un rôle central dans cette procédure, d'apprécier la réunion de ces conditions. Il dispose d'un délai d'un mois pour informer les autres indivisaires du projet de vente du bien.

En cas de refus ou en l'absence de réponse des indivisaires dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire dresse un procès-verbal, qui ouvre à l'indivisaire ou aux indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis la possibilité de saisir le tribunal judiciaire aux fins d'autorisation de la vente. Dans l'esprit du législateur de 2009, ce délai était destiné à permettre aux « indivisaires tentés de s'opposer aux décisions des autres indivisaires sans raison valable » de réaliser « qu'il est de leur intérêt désormais d'être plus conciliants. Ceux-ci observeront alors que la vente amiable du bien s'effectuera sans doute plus rapidement et dans de meilleures conditions que dans le cadre d'une vente aux enchères. »50(*).

Naturellement, si tous les indivisaires se manifestent et donnent leur accord à la vente, celle-ci peut avoir lieu à l'amiable, sans saisine du juge.

Si ce n'est pas le cas, le juge judiciaire apprécie alors si l'aliénation du bien « ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires ». À titre d'exemple, il peut être imaginé que le juge refuse d'autoriser la vente d'une maison de famille, si le préjudice moral causé aux indivisaires qui s'y opposent, alors qu'ils contribuent régulièrement à son entretien, est trop important.

Si le juge autorise la vente, l'aliénation est réalisée par voie de licitation, c'est-à-dire par voie d'enchères à la barre du tribunal judiciaire ou en l'étude du notaire, selon les modalités prévues aux articles 1377 et 1378 du code de procédure civile. Les indivisaires peuvent, s'ils le souhaitent, participer à cette vente aux enchères, voire en exclure les tiers.

Afin d'inciter à la sortie de l'indivision, l'article 815-5-1 du code civil interdit le remploi des sommes retirées de la vente, c'est-à-dire l'utilisation de ces sommes pour racheter un bien en indivision. Cette restriction est toutefois atténuée afin de payer les dettes et charges de l'indivision, sur le modèle de l'article 815-3 du code civil, qui permet la vente de meubles indivis pour payer les dettes et charges de l'indivision.

Le rapporteur a toutefois constaté que, pour utile qu'elle soit en théorie, cette procédure peine à trouver son public et qu'elle est unanimement considérée par les praticiens du droit de l'indivision comme difficilement mobilisable. Outre que le ministère de la justice n'a pas été en mesure de communiquer des chiffres précis sur le recours à l'article 815-5-1 précité, autant les notaires que les avocats et les magistrats interrogés par le rapporteur ont affirmé que le recours à cette procédure était « rare en pratique », certains d'entre eux ne connaissant même pas son existence.

2. L'article 3 tend à ouvrir la possibilité aux titulaires de plus de la moitié des droits indivis d'engager une procédure d'autorisation judiciaire de vente du bien

L'article 3 a fait l'objet d'une réécriture complète au cours de son examen par l'Assemblée nationale51(*). Initialement, il prévoyait une extension à l'ensemble du territoire national du régime dérogatoire institué par la loi Letchimy pour les territoires d'outre-mer régis par le principe d'identité législative52(*). Ainsi, dans sa version première, l'article 3 avait notamment pour effet de supprimer dans le droit commun le principe de l'unanimité pour les actes de disposition d'un bien indivis issu d'une succession ouverte depuis plus de dix ans. En conséquence, l'article 3 prévoyait parallèlement l'abrogation du régime dérogatoire applicable en outre-mer.

Néanmoins, la rapporteure, Louise Morel, a estimé que « l'extension directe de la loi Letchimy entraînerait des effets de bords et emporterait des risques juridiques importants »53(*). C'est pourquoi le dispositif de l'article 3, tel que transmis au Sénat, est désormais moins ambitieux, puisqu'il ne modifie plus le droit dérogatoire applicable dans les outre-mer et se contente d'abaisser les seuils prévus par la procédure de droit commun pour aliéner un bien indivis après autorisation judiciaire. Il ne revient donc plus sur la règle d'unanimité qui régit toutes les procédures amiables d'actes de disposition.

Alors qu'en l'état du droit l'article 815-5-1 du code civil impose une majorité des deux tiers des droits indivis pour se tourner vers le tribunal judiciaire afin que ce dernier autorise une aliénation du bien, comme décrit supra, le présent article 3 procède à trois modifications de l'article 815-5-1 afin d'abaisser ce seuil à « plus de la moitié » des droits indivis.

Cette modification est directement inspirée des dérogations prévues par le législateur dans les territoires d'outre-mer, puisqu'il s'agirait du même seuil de majorité absolue des droits indivis. La seule différence significative entre les deux dispositifs est le cas dans lequel un indivisaire ne se manifesterait pas pendant le délai de trois mois suivant la signification de l'intention de vente par le notaire. Dans le droit commun, cette absence de manifestation rend nécessaire la saisine du juge judiciaire pour autoriser la vente. Dans le droit dérogatoire applicable en outre-mer, l'absence de manifestation est considérée de facto comme un accord à la vente, qui peut donc avoir lieu sans autorisation du juge. Cette procédure dérogatoire comporte toutefois des garanties supplémentaires, telles qu'un délai de dix ans après l'ouverture de la succession et l'impossibilité de vendre un local d'habitation dans lequel réside le conjoint survivant.

3. Une mesure jugée inopportune par la commission

À travers cet article 3, l'objectif affiché par les députés est de « contribuer à rendre plus attractif ce dispositif [régi par l'article 815-5-1 du code civil] destiné à favoriser la sortie des indivisions gelées par des indivisaires "inertes" »54(*).

S'il comprend cet objectif, le rapporteur estime toutefois qu'il ne doit pas être atteint par n'importe quels moyens. Ainsi, outre que la modification proposée ne lui est pas apparue opportune, elle ne serait pas dénuée d'effets de bord dommageables. Les travaux du rapporteur ont en effet mis en exergue cinq considérations.

Premièrement, le rapporteur a constaté que les modifications portées par le présent article 3 étaient loin de provoquer une adhésion unanime des professionnels interrogés. Ceux-ci ont manifesté au mieux un désintérêt pour la mesure, au pire une vive opposition.

Deuxièmement, il est indéniable que la procédure régie par l'article 815-5-1 du code civil peut constituer, dans certains cas, une atteinte au droit de propriété puisqu'un indivisaire minoritaire peut être forcé à la vente d'un bien. Si le législateur fait oeuvre utile lorsqu'il agit pour « faciliter la conclusion d'accords familiaux permettant la sortie d'indivisions successorales », comme l'a reconnu le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2018-719 QPC du 13 juillet 201855(*), et qu'un indivisaire minoritaire n'a pas, par principe, de droit au blocage, il convient de rappeler que l'article 815-5-1 du code civil constitue une procédure dérogatoire, puisque le mode normal de sortie d'une indivision en cas de désaccord entre les indivisaires est la procédure de partage judiciaire, que n'importe quel indivisaire, même minoritaire, peut provoquer. L'abaissement des seuils de majorité applicables pour vendre un bien indivis après autorisation judiciaire risque donc fortement de désinciter le recours au partage judiciaire. C'est là un effet de bord important que le rapporteur souhaite éviter.

Troisièmement, comme mentionné supra, l'article 815-5-1 du code civil n'est pas applicable aux seules indivisions successorales sur des biens immobiliers classiques tels qu'un logement. Il concerne tous types d'indivisions, y compris les indivisions post-conjugales, ou, par exemple, les indivisions sur des fonds de commerce. Abaisser le seuil pour forcer la vente sur les indivisions non-successorales sans réforme d'ampleur de l'ensemble du droit de l'indivision aurait ainsi des conséquences qui dépassent les objectifs que se fixe le présent texte et qui n'ont fait l'objet d'aucune évaluation.

Quatrièmement, l'abaissement du seuil prévu à l'article 815-5-1 pour demander une autorisation judiciaire de vente d'un bien indivis affecterait la cohérence d'ensemble des seuils applicables en matière d'indivision. En effet, si l'article 3 était adopté dans sa rédaction transmise par l'Assemblée nationale, le seuil pour demander une vente du bien - plus de la moitié des droits indivis - serait ainsi inférieur au seuil nécessaire pour effectuer de simples actes d'administration dudit bien indivis, qui est fixé aux deux tiers, conformément à l'article 815-3 du code civil. À ce titre, il convient de rappeler qu'en 2009, lors de la création de l'article 815-5-1 du même code, la commission des lois avait accepté cette mesure en tenant compte d'un « souci de cohérence avec la majorité nécessaire pour accomplir les actes de gestion courante des biens indivis »56(*).

Enfin, contrairement aux dispositifs dérogatoires de la loi dite « Letchimy » du 17 décembre 2018, applicable en outre-mer, et de la loi du 6 mars 2017, applicable en Corse, qui prévoient des seuils abaissés pour la vente d'un bien indivis, l'article 815-5-1 est un dispositif pérenne, dont la modification doit donc être pensée avec davantage de précautions. Par ailleurs, la situation foncière dans les territoires d'outre-mer et en Corse, dont la résorption des difficultés qu'elle présente justifie des mesures fortes pour favoriser sa résorption, est sans commune mesure avec la situation hexagonale. Dans un souci de proportionnalité au regard de la situation hexagonale, le droit commun doit donc limiter les atteintes au droit de propriété, et prévoir davantage de garanties pour les indivisaires.

Pour toutes ces raisons, la commission a adopté l'amendement COM-8, présenté par son rapporteur, qui supprime cet abaissement de seuil, et maintient donc la rédaction actuelle de l'article 815-5-1 du code civil.

Le même amendement COM-8 complète l'article 3 pour actualiser l'article 2 de la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 précitée, qui permet, dans une logique proche de celle de l'article 815-5-1 du code civil, la vente d'un bien indivis en Corse à une majorité des deux tiers, sans intervention judiciaire.

Or, comme mentionné supra, cet article 2 est totalement inutilisé en pratique, en raison d'un « manque de formalisme » qui freine son utilisation par les notaires de l'île, et donc les sorties des indivisions.

C'est pourquoi, l'amendement COM-8 s'inspire à la fois de la procédure prévue par la loi Letchimy et de l'article 815-5-1, pour préciser les modalités selon lesquelles cette vente extrajudiciaire pourra s'effectuer, c'est-à-dire en l'absence d'opposition formelle d'un indivisaire. Si des oppositions sont formulées, ce qui permet de protéger les indivisaires minoritaires, la vente devra être autorisée par le juge judiciaire, comme c'est le cas en droit commun. En revanche, comme pour les territoires ultramarins, les indivisaires qui ne se manifesteront pas seront réputés donner leur accord à la vente. Cela est justifié par les situations d'indivisions non réglées parfois depuis le XIXe siècle, dans lesquelles les indivisaires se comptent en dizaines, voire centaines de personnes, pour des biens d'une faible valeur.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

Article 4 (supprimé)
Expérimentation d'une procédure d'accélération du partage judiciaire

L'article 4 instaurait une expérimentation relative à l'application d'une procédure d'accélération du partage judiciaire. Cet article visait initialement à étendre le droit alsacien-mosellan du partage judiciaire à la « vieille France ». Les réécritures dont il a fait l'objet en commission et en séance à l'Assemblée nationale traduisent les difficultés juridiques qu'un tel dispositif soulèverait.

On doit saluer la volonté d'améliorer le partage judiciaire. Ses modalités actuelles constituent autant de pesanteurs qui allongent les contentieux et dissuadent les indivisaires d'y recourir. Aussi le rapporteur juge-t-il plus opportun d'engager une réforme de la procédure de partage judiciaire, plutôt que de conduire une expérimentation.

Les représentants de la direction des affaires civiles et du sceau (DACS), du conseil supérieur du notariat (CSN), du conseil national des barreaux (CNB) ont indiqué au rapporteur durant leur audition qu'un groupe de travail consacré au partage judiciaire oeuvre actuellement à la réforme de cette procédure.

Compte tenu de l'avancée de ces travaux, la commission a, sur la proposition de son rapporteur, Jean-Baptiste Blanc, rejeté l'article 4 dans l'attente de la présentation éventuelle par le gouvernement, en séance publique, du volet législatif de cette réforme.

1. Le consensus relatif aux difficultés qui caractérisent aujourd'hui le partage judiciaire a convaincu la Chancellerie d'en engager la réforme

Les modalités actuelles du partage judiciaire suscitent une insatisfaction partagée par l'ensemble des personnes entendues par le rapporteur. Comme ce fut évoqué dans le propos liminaire du présent rapport, le partage judiciaire constitue une procédure longue et complexe, que les indivisaires renoncent souvent à engager en dépit de leur volonté d'aboutir à un partage.

Un rapport de l'inspection générale de la justice relatif au traitement des dossiers civils longs et complexes avait en 2021 consacré des développements spécifiques au partage judiciaire. Il préconisait ainsi à la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) d'« engager une réflexion sur la procédure de partage et sur l'accroissement du rôle du notaire » 57(*).

La DACS a conduit les travaux d'un groupe de travail sur la réforme de la procédure de partage judiciaire entre janvier et juillet 2025, pour identifier les évolutions législatives et réglementaires susceptibles de simplifier et d'accélérer cette procédure.

Ce groupe a réuni autour de la DACS des représentants de la magistrature, du notariat et des avocats et a procédé à un cycle d'auditions durant lequel des universitaires et des praticiens ont été entendus.

Les objectifs principaux que poursuit la DACS dans ce cadre sont donc de :

- réduire les délais procéduraux ;

- clarifier la procédure ;

- faciliter le partage en cas d'inertie ou d'obstruction d'un coïndivisaire.

La DACS a indiqué au rapporteur qu'en l'état de ses travaux, la réforme devrait porter « une procédure modernisée, centrée sur un binôme juge commis-notaire efficace et responsabilisé, avec une présence de l'avocat à tous les stades de la procédure, capable de conduire à un partage dans des délais réduits et avec moins de contentieux accessoires ».

Cette réforme, qui devrait essentiellement reposer sur des adaptations du code de procédure civile, donc sur des dispositions réglementaires, procéderait à :

- la suppression de l'obligation établie à l'article 1360 du code de procédure civile de préciser, à peine d'irrecevabilité, « les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable » au sein de l'assignation en partage. Si la Chancellerie demeure attachée à ce que le partage amiable constitue le principe et le partage judiciaire, l'exception, elle juge préférable d'évacuer cette condition de recevabilité. La DACS remarque que « cette tentative préalable obligatoire [...] est en effet considérée par les membres du groupe de travail, les contributeurs et les personnes auditionnées, comme une source importante de contentieux et de lenteur de la procédure » ;

- la désignation conjointe et rapide, dès l'engagement de la procédure, d'un notaire et d'un juge commis, pour accélérer les opérations de liquidation et de partage. Pour rappel, en l'état du droit, seule la procédure de partage judiciaire « complexe » repose sur la désignation d'un notaire et d'un juge commis, « si la complexité des opérations le justifie » (article 1364 du code de procédure civile) ;

- la clarification de l'office du notaire, qui conduirait les opérations de partage, organiserait les réunions, tenterait de concilier les parties, instruirait les demandes des coïndivisaires et élaborerait un projet complet de partage ;

- l'élargissement des attributions du juge commis, qui suivrait la procédure, viderait les différends, adopterait les actes de gestion des biens indivis ;

- l'amélioration du traitement de l'inertie d'un indivisaire, suivant des modalités qui n'ont pas encore été déterminées par la DACS ;

- la clarification de la fin de la procédure de partage, pour prévenir les conséquences procédurales actuellement induites par les désaccords qui s'élèvent entre les indivisaires.

La DACS a précisé que le projet de réforme devrait être soumis aux membres du groupe de travail avant la fin de l'année 2025. Elle conduira ensuite une plus ample consultation, pour en éprouver les dispositions avant que le texte ne soit soumis au Conseil d'État en mars 2026.

Si l'essentiel des dispositions de cette réforme appartient au domaine réglementaire, certaines adaptations législatives seraient nécessaires pour qu'elle puisse être conduite.

Les différentes personnes entendues par le rapporteur, qui pour l'essentiel appartiennent au groupe de travail en cause, considèrent donc que la présente proposition de loi constituerait un véhicule législatif approprié pour accompagner cette refonte du partage judiciaire.

2. L'article 4, qui étendait initialement le droit alsacien-mosellan sur le partage judiciaire à l'ensemble du territoire, propose désormais l'expérimentation d'une procédure d'accélération du partage judiciaire

Les auteurs de la proposition de loi poursuivent également l'objectif d'une accélération de la procédure de partage judiciaire. Ils entendaient toutefois initialement aboutir à ce résultat en étendant le droit alsacien-mosellan relatif au partage judiciaire à l'ensemble du territoire national.

La proposition de loi procédait en sa version initiale à la réécriture de l'article 840 du code civil, qui traite en l'état du droit du partage judiciaire, pour qu'il disposât : « Le partage judiciaire a lieu par voie de juridiction gracieuse, dans les conditions prévues par le code de procédure civile. Est réservé aux parties intéressées le droit de provoquer par voie d'assignation une décision sur le fond et la recevabilité du partage ».

Il s'agissait là d'une reformulation de l'article 220 de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, qui a été présentée dans le propos liminaire.

L'article 4 a été significativement modifié en commission et en séance publique à l'Assemblée nationale, compte tenu des difficultés juridiques que soulèverait l'application du partage judiciaire alsacien-mosellan en « vieille France ».

Les travaux conduits par la rapporteure de la commission des lois de l'Assemblée nationale, Louise Morel, « ont fait état de préventions sur une généralisation pure et simple de ce régime de la part de certains praticiens ». La DACS a ainsi souligné que « la procédure applicable en Alsace-Moselle [...] est très différente de la procédure de droit commun et constitue un tout cohérent, qu'il n'est pas possible d'intégrer partiellement en droit commun sans entraîner des effets de bord significatifs ».

La rapporteure a donc obtenu l'adoption d'un amendement de réécriture globale de cet article, pour substituer une simple expérimentation à cette généralisation du régime de partage judiciaire alsacien-mosellan.

Toutefois, une telle expérimentation soulevait les mêmes difficultés juridiques manifestes compte tenu des différences entre le droit alsacien-mosellan et le droit commun. Elle aurait par exemple impliqué une refonte expérimentale du statut des notaires, dont le professeur Brenner souligne qu'ils exercent en Alsace-Moselle « des fonctions quasi-judiciaires qui n'ont pas d'équivalent » en droit commun.

En séance, l'Assemblée a en donc adopté un amendement qui écarte la référence au régime de partage judiciaire alsacien-mosellan, au bénéfice d'une procédure d'accélération du partage judiciaire. Cette dernière reposerait notamment sur le renforcement des pouvoirs du notaire en cas d'inertie d'un indivisaire.

3. La commission partage l'objectif poursuivi par l'article 4, mais considère qu'il serait plus utilement atteint à la faveur d'une véritable réforme du partage judiciaire

Si le rapporteur partage l'objectif que poursuivent les auteurs du texte, il considère toutefois que cette expérimentation, largement indéfinie, générerait davantage de difficultés juridiques qu'elle ne résoudrait de pesanteurs procédurales.

L'expérimentation apparaît en premier lieu largement indéterminée. En dehors de l'objectif d'accélérer le partage judiciaire, l'article 4 précise tout au plus que, « par dérogation au second alinéa de l'article 841-1 du code civil, si l'indivisaire inerte n'a pas constitué un mandataire dans le mois suivant la mise en demeure, il est présumé consentir à ce que l'on procède au partage et que le partage sera obligatoire pour lui ».

L'article 841-1 du code civil dispose en l'état du droit que, « faute pour l'indivisaire d'avoir constitué mandataire dans les trois mois de la mise en demeure, le notaire peut demander au juge de désigner toute personne qualifiée qui représentera le défaillant jusqu'à la réalisation complète des opérations ».

Le dispositif raccourcirait donc de deux mois le délai de la mise en demeure et évacuerait a priori la représentation du défaillant par une personne qualifiée. Au-delà du fait que la précision relative au consentement de l'indivisaire défaillant est superfétatoire dans le cadre d'un partage judiciaire, ce dispositif présente donc un caractère indéterminé, car l'essentiel des modalités de l'expérimentation resterait à définir.

Au surplus, la mise en oeuvre d'une telle expérimentation soulèverait des difficultés juridiques et pratiques considérables, car elle nécessiterait l'adaptation à des dispositifs expérimentaux d'un grand nombre de professionnels du droit dans plusieurs ressorts juridictionnels.

Une telle expérimentation entraînerait en outre des effets de bord sur le territoire national, car si l'article 841 du code civil dispose que « le tribunal du lieu d'ouverture de la succession est exclusivement compétent pour connaître de l'action en partage et des contestations qui s'élèvent soit à l'occasion du maintien de l'indivision soit au cours des opérations de partage », les notaires et les éventuels avocats impliqués dans la procédure n'appartiendraient pas nécessairement au ressort en question.

Compte tenu de ces difficultés et de l'état d'avancée des travaux du groupe de travail consacré au partage judiciaire, le rapporteur juge donc préférable d'engager une véritable réforme du partage judiciaire, qui serait immédiatement applicable dans l'ensemble des ressorts. Une telle réforme permettrait en effet d'atteindre plus efficacement l'objectif poursuivi par les auteurs du texte.

Aussi la commission a-t-elle adopté un amendement COM-9 de suppression de l'article 4, présenté par son rapporteur, dans l'attente de la présentation éventuelle en séance publique, par le Gouvernement, du volet législatif de la réforme du partage judiciaire qu'il entend conduire.

La commission a supprimé l'article 4.

Articles 5 et 6 (supprimés)
Demandes de rapport au Gouvernement dressant le bilan de la loi dite Letchimy et sur la procédure de partage judiciaire applicable en Alsace-Moselle

Les articles 5 et 6, introduits tous deux lors de l'examen de la proposition de loi en commission des lois de l'Assemblée nationale, requièrent du Gouvernement la remise, pour l'article 5, d'un rapport dressant le bilan de la loi dite Letchimy du 27 décembre 2018 et, pour l'article 6, d'un rapport sur la procédure de partage judiciaire applicable en Alsace-Moselle.

Conformément à sa position constante en matière de demande de rapports au Gouvernement, la commission a, suivant l'avis du rapporteur, supprimé ces articles.

Introduits par la commission des lois de l'Assemblée nationale, les articles 5 et 6 prévoient tous deux la remise de rapports du Gouvernement au Parlement.

L'article 5 a été adopté à l'initiative du député Frédéric Maillot58(*), malgré un avis défavorable de la rapporteure, Louise Morel, et n'a fait l'objet d'aucune modification en séance publique. Il prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport établissant un bilan de la loi Letchimy du 27 décembre 2018, présentée supra59(*), dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente proposition de loi.

À titre d'information, la loi Letchimy a déjà fait l'objet d'évaluations parlementaires, au moins partielles :

- par la délégation sénatoriale aux outre-mer, dans deux rapports consacrés au foncier dans les territoires d'outre-mer60(*) ;

- par la commission des lois61(*) et la commission des affaires économiques62(*) du Sénat comme de l'Assemblée nationale, lors de l'examen de la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 visant à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement, dont l'article 51 a modifié substantiellement plusieurs articles de la loi Letchimy.

L'article 6 a été ajouté par la commission des lois de l'Assemblée nationale à l'initiative de la députée Céline Thiébault-Martinez63(*) avec un avis favorable de la rapporteure. Il requiert du Gouvernement la remise au Parlement, dans un délai d'un an, d'un rapport consacré à la procédure de partage judiciaire applicable spécifiquement en Alsace-Moselle64(*) et régie par les articles 220 à 242 de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. À la suite de l'adoption d'un amendement présenté en séance publique par le député Charles Sitzenstuhl65(*), sous-amendé par la rapporteure66(*), l'article 6 prévoit parallèlement à la rédaction de ce rapport une consultation « des représentants des professions intéressées par le droit local d'Alsace-Moselle ».

La commission a supprimé ces deux articles par l'adoption des amendements COM-10 et COM-11, présentés par son rapporteur. La commission a ainsi réaffirmé sa position constante en matière de demande de rapport, d'autant plus que leur taux de remise est en forte diminution et s'est établi à 13 % lors de la session 2023 - 2024, d'après le rapport annuel d'application des lois présenté par Sylvie Vermeillet67(*).

La commission a supprimé les articles 5 et 6.

Intitulé de la proposition de loi

La commission a adopté un amendement de son rapporteur visant à rendre plus conforme l'intitulé du présent texte à son dispositif.

Tel que transmis au Sénat, l'intitulé du texte ne cible que les indivisions « successorales ». Cela correspond au souhait de son autrice, Louise Morel, de répondre à des situations de blocage des successions, qui dure parfois plusieurs décennies.

Sans remettre en cause cet objectif, le rapporteur constate toutefois que, dès son dépôt, le texte avait un périmètre plus large que les seules indivisions successorales.

D'une part, certains articles, à l'instar des articles 3 et 4, concernent tous les types d'indivision, sans distinction. D'autre part, l'article 1er bis concerne les successions vacantes, qui n'ont pas pour nécessaire corollaire une indivision.

C'est pourquoi la commission a adopté l'amendement COM-12 présenté par son rapporteur, afin de mettre en cohérence l'intitulé du texte avec son périmètre initial réel.

La commission a adopté l'intitulé ainsi modifié.

EXAMEN EN COMMISSION

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous passons à l'examen du rapport de M. Jean-Baptiste Blanc sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à simplifier la sortie de l'indivision successorale.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - Contrairement à ce que son nom indique, cette proposition de loi ne se limite pas à la sortie de l'indivision successorale. Je tiens à insister sur ce point pour favoriser le bon examen de ses différents articles, car il s'agit d'une matière d'une particulière technicité.

Les articles de ce texte peuvent être regroupés en trois grands thèmes.

Le premier concerne l'information des collectivités territoriales quant aux biens abandonnés qui se situeraient sur leur territoire. Il fait l'objet de l'article 1er.

Le deuxième traite des successions vacantes - et plus particulièrement de leur gestion par la direction nationale d'interventions domaniales (Dnid), qui est l'administration du domaine. Les articles 1er bis et 2 s'y rattachent.

Le troisième thème, qui recouvre quant à lui les articles 3 et 4, tient à la simplification de la vente des biens indivis et à l'accélération des partages judiciaires. Il ne porte donc pas seulement sur les indivisions successorales, mais aussi sur les indivisions au sens large.

L'analyse de ce texte, thème par thème, permettra de clarifier la position que je vous propose d'adopter. Je précise que je me suis appuyé sur de nombreuses auditions et tables rondes qui m'ont conduit à confronter les points de vue des praticiens - avocats, notaires, magistrats -, des théoriciens - professeurs de droit - et du ministère de la justice. Je regrette toutefois l'incomplétude des statistiques dont nous disposons : si nous ne légiférons pas à l'aveugle grâce aux précieux retours des acteurs de terrain, il est anormal que le ministère de la justice ne soit pas en mesure de déterminer, par exemple, le nombre d'indivisions successorales qui sont réglées par la voie d'un partage judiciaire. Tout au plus puis-je vous informer que l'administration du domaine a été saisie de 6 718 successions vacantes en 2024 et que le nombre moyen de partages judiciaires demandés entre 2018 et 2024, toutes catégories d'indivisions confondues, atteint en moyenne 9 635.

L'article 1er a pour objet de créer une base de données qui aurait pour vocation d'informer les collectivités territoriales sur la présence de biens abandonnés sur leur territoire. Cependant, la notion de « biens abandonnés » ne renvoie à rien en droit. Le dispositif prévoit donc que lorsqu'une des quatre procédures qu'il cible expressément est engagée à l'égard d'un bien, ce dernier sera inscrit dans la base. Or, aucune de ces procédures ne permet d'atteindre l'objectif poursuivi. Les deux premières sont par définition connues de la personne publique, car c'est elle qui les engage. Il s'agit de la déclaration de parcelle en état d'abandon manifeste et de l'attribution à une personne publique de la propriété d'un bien sans maître. Les deux suivantes, quant à elles, ne concernent pas à proprement parler des biens abandonnés. Il s'agit de la gestion des successions vacantes et de l'envoi en possession de l'État. Je vous proposerai donc de supprimer cet article.

L'article 1er bis tend à faciliter la tâche de la Dnid en matière de successions vacantes. C'est en effet elle qui exerce la curatelle d'une succession lorsqu'elle est déclarée vacante par le juge. La Dnid est alors chargée de la gestion de l'actif successoral du défunt et du règlement de ses dettes en procédant, le cas échéant, à la vente des biens. En l'état du droit, l'ordonnance judiciaire la désignant curatrice doit être publiée par voie de presse. L'article 1er bis l'autoriserait à effectuer cette publicité par voie numérique,
sur son site internet. Je ne suis pas opposé à cette évolution, qui correspond aux changements des pratiques et devrait permettre d'accroître la visibilité des mesures de publicité qu'impose à la Dnid le code civil. Je vous proposerai donc d'étendre le périmètre de l'article, en y incluant des mesures de publicité que l'Assemblée nationale avait omises. En revanche, il me semble que l'objectif de facilitation de l'accès aux informations liées aux successions vacantes serait mieux atteint en maintenant, parallèlement à la publication par voie de numérique, la publication par voie de presse. Tel sera également le sens de l'amendement que je vous soumettrai sur cet article.

Toujours dans l'objectif de simplifier la gestion des successions vacantes par l'administration du domaine, je vous proposerai l'adoption d'un article additionnel revenant sur la règle qui lui impose actuellement de vendre les biens meubles avant les biens immeubles. Si cette règle est, dans l'immense majorité des cas, fondée, elle peut parfois entraîner des situations absurdes, par exemple si la succession comporte d'une part des oeuvres d'art ou des bijoux de valeur et d'autre part des biens immobiliers dégradés ou inexploités : il me semble donc opportun d'apporter de la souplesse de gestion au curateur, qui pourra décider au cas par cas de l'ordre de vente, sous le contrôle du juge bien évidemment.

L'article 2 introduit une procédure dérogatoire pour permettre à la Dnid de vendre un bien indivis qui figure à l'actif d'une succession vacante. Cette disposition soulève deux difficultés principales. D'une part, elle porte une atteinte disproportionnée au droit de propriété, car elle ne présente pas de garanties suffisantes pour les autres indivisaires, qu'ils soient favorables ou opposés à cette vente. D'autre part, elle méconnaît le principe d'égalité de traitement des indivisaires, car elle ne bénéficie qu'à la Dnid, indépendamment, d'ailleurs, de sa quote-part au sein de l'indivision.

Je vous proposerai donc d'apporter une modification au droit existant, qui permet déjà de surmonter l'inertie, l'absence ou le refus d'un indivisaire. Cette solution présente l'avantage de bénéficier à l'ensemble des indivisaires. Au-delà du respect de l'égalité de traitement, cela nous semble préférable, car la Dnid n'est pas le seul indivisaire à connaître des situations de blocage.

J'en viens à l'article 3, qui est l'une des évolutions principales que propose le texte. Il vise à abaisser de deux tiers à plus de la moitié des droits indivis la majorité nécessaire pour vendre un bien indivis après autorisation judiciaire. Il s'agit donc d'un fort assouplissement d'une dérogation, datant de 2009, au principe d'unanimité qui régit les actes de disposition. J'ai constaté que cet abaissement des seuils était loin de susciter l'unanimité des professionnels interrogés, bien au contraire ! Je vous proposerai donc de maintenir le seuil actuel de deux tiers, qui est plus protecteur du droit de propriété, plus cohérent avec le reste des seuils que prévoit le droit de l'indivision et qui désincite moins à recourir au mode normal de sortie d'une indivision en cas de désaccord, le partage judiciaire, que peut demander à tout moment n'importe quel indivisaire.

En outre, je signale que le dispositif que cible l'article 3 concerne toutes les indivisions et non pas les seules indivisions successorales : je vous laisse imaginer les importantes conséquences, non évaluées par les auteurs du texte, que cela aurait pour les personnes ayant conclu un pacte civil de solidarité (Pacs) ou un divorce, ou en matière de droit des affaires. À la place, je vous proposerai une évolution de la procédure dérogatoire de vente des biens indivis applicable en Corse, qui souffre d'un manque de formalisme freinant son application.

L'article 4, enfin, visait initialement à étendre le droit alsacien-mosellan du partage judiciaire à l'ensemble de la « vieille France ». Il a été grandement remodelé à l'Assemblée nationale, car cette solution n'est pas envisageable au regard des différences qui existent entre le droit commun et ce droit local. Cet article introduit désormais une expérimentation relative à une procédure d'accélération du partage judiciaire. Dans sa version initiale comme dans sa version actuelle, il poursuit donc l'objectif d'améliorer la procédure du partage judiciaire.

Cette procédure se distingue en effet aujourd'hui par des pesanteurs que tous les professionnels du droit critiquent. Bon nombre d'indivisaires renoncent à l'engager compte tenu de sa complexité et de sa longueur. Partant, des indivisions s'installent dans le temps et des biens se dégradent.

C'est la raison pour laquelle la Chancellerie a institué sous la houlette de la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) un groupe de travail consacré à cette question. Ce groupe a travaillé durant plusieurs mois avec les représentants des notaires comme des avocats. La plupart des personnes que j'ai entendues y ont participé et se disent enthousiastes quant au résultat de ses travaux.

Le ministère de la justice envisage de conduire cette réforme, qui sera essentiellement réglementaire, dans le courant de l'année 2026. Seulement,
il a besoin d'un véhicule législatif pour apporter certaines modifications au code civil.

Je vous proposerai donc de supprimer l'article 4, et d'attendre que le Gouvernement présente, en séance, ces dispositions. Cette solution m'apparaît préférable, car une modification du droit commun bénéficiera à tous, tandis qu'une expérimentation se réduirait à quelques ressorts, au-delà des difficultés juridiques et pratiques qu'elle ne manquerait pas de soulever.

C'est donc une évolution très significative du texte que je vous propose. J'insiste toutefois sur le caractère constructif de ma démarche : je partage entièrement les objectifs poursuivis par les auteurs du texte, en particulier la députée Louise Morel. Le droit de l'indivision successorale et des successions vacantes n'a pas connu de réforme d'ampleur depuis la loi du 23 juin 2006, une actualisation est sans conteste souhaitable pour limiter les situations de blocage. J'espère, par les propositions que j'ai formulées après de nombreuses auditions et en lien avec le ministère de la justice, faire oeuvre utile pour permettre au texte d'atteindre plus adéquatement ses objectifs.

Mme Dominique Vérien. - Je salue un texte utile, que le travail de notre rapporteur, réalisé en lien avec le ministère de la justice, ainsi que la navette parlementaire vont grandement améliorer. Pour une fois, nous ne pouvons que nous féliciter du temps pris pour l'aboutissement d'une proposition de loi, car nous obtiendrons en définitive une version qui facilitera véritablement la résolution des indivisions, tout en s'intégrant de manière plus stable dans le droit commun en dépassant le seul cadre expérimental.

Le groupe Union Centriste suivra le rapporteur.

M. Pierre-Alain Roiron. - Nous sommes, pour notre part, globalement favorables à cette proposition de loi qui s'attaque au problème prégnant des logements vacants, dont une partie significative est bloquée par des indivisions successorales. C'est particulièrement le cas en outre-mer où, semble-t-il, 40 % du foncier privé serait concerné. Pragmatique, ce texte entend doter les collectivités territoriales d'outils concrets.

Cependant, vous proposez de supprimer la base de données nationale prévue à l'article 1er. Nous comprenons les difficultés techniques que vous soulevez, mais ce serait perdre un outil potentiellement utile à la planification foncière. Plutôt que de le supprimer, ne pourrait-on pas l'améliorer ? Évidemment, la question des moyens budgétaires et humains est, ici, certainement centrale.

À l'article 3 - et c'est le point le plus sensible -, vous refusez l'abaissement de deux tiers à plus de 50 % du seuil de la majorité nécessaire pour vendre un bien indivis après autorisation judiciaire. Maintenir ce seuil à deux tiers risque de perpétuer les blocages que nous cherchons précisément à lever.

À l'article 4, vous proposez de supprimer l'expérimentation d'une procédure d'accélération du partage judiciaire. Il serait intéressant que le Gouvernement s'engage clairement sur une réforme du droit commun de cette procédure.

Nous travaillerons de manière constructive sur ce texte en veillant à l'équilibre entre déblocage effectif des indivisions et protection des droits patrimoniaux des héritiers, notamment les plus fragiles. S'il va dans le bon sens, il ne règle du reste pas la crise du logement, laquelle nécessite une politique plus volontariste.

M. Teva Rohfritsch. - J'accueille à mon tour de manière globalement favorable les propositions qui nous sont présentées. Néanmoins, il me semble que l'abaissement du seuil de décision lors de la vente de biens indivis s'inscrit dans le sens de la simplification.

Je signale l'importance que revêt cette question outre-mer, et spécialement dans le Pacifique. En Polynésie française, où la proportion des terres en indivision excède 40 %, une forte demande émane de l'ensemble des acteurs, notamment du corps notarial, en vue de l'obtention de cet abaissement. Le seuil actuel y constitue un blocage aux projets de développement économique. Si le droit commun n'évolue pas sur ce point, je solliciterai une disposition dérogatoire pour l'outre-mer, peut-être par voie d'ordonnance compte tenu du statut particulier de nos territoires. À défaut de l'obtenir, je serai enclin à soutenir l'amendement présenté par M. Sautarel à l'article 3 de la proposition de loi.

M. Thani Mohamed Soilihi. - La législation a déjà prévu en 2018 une exception pour l'outre-mer. Un amendement sera toutefois utile pour la proroger dans le temps, car, en pratique, nous avons pris, dans ces territoires, du retard dans la résolution des indivisions. Une dizaine d'années supplémentaires serait nécessaire.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Merci de cette précision.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - Le rapport que je vous ai présenté ne revient pas sur l'exception qui prévaut dans les territoires d'outre-mer. Nous pouvons bien entendu travailler sur la situation spécifique qui les concerne.

Une base de données nationale peut, de prime abord, sembler intéressante pour les élus. Il est cependant apparu qu'elle serait, telle qu'elle est conçue dans la proposition de loi, inefficace. Le problème de son coût, que la Dnid a elle-même mis en exergue, se pose également. Il est estimé par cette même administration - cela reste encore à affiner - à 1 million d'euros par semestre de développement.

Le passage des deux tiers à plus de la moitié de la majorité nécessaire à la vente d'un bien indivis soulève, lui, de nombreuses difficultés que les universitaires ont longuement évoquées. Ils craignent des effets de bord pour les personnes en concubinage et les personnes pacsées, qui seraient également concernées par ce dispositif. La possession de droits indivis majoritaires permettrait en effet à un indivisaire de compromettre les conditions de vie de l'autre, en sollicitant par exemple le juge pour vendre un logement occupé par l'autre.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Concernant le périmètre du texte, en application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer qu'il inclut les dispositions relatives au recensement des biens en état d'abandon et sans maître, la gestion d'une succession vacante ou en déshérence, le partage amiable ou judiciaire d'une indivision et les règles civiles applicables à la vente d'un bien indivis.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - L'article 1er a pour objet la création d'une base qui compile les données relatives aux biens concernés par quatre procédures existantes. Dans la mesure où ces procédures sont soit engagées par la puissance publique, soit sans lien direct avec les biens abandonnés, elle ne me paraît pas en l'état à même d'atteindre l'objectif poursuivi par la proposition de loi et c'est pourquoi je vous propose de supprimer cet article, qui entraînerait une dépense injustifiée. La navette parlementaire nous permettra néanmoins de poursuivre la discussion.

L'amendement COM-4 est adopté.

L'article 1er est supprimé.

Article 1er bis (nouveau)

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - L'amendement COM-5 vise, d'une part, à étendre la possibilité de publication numérique à tous les documents liés à la curatelle successorale pour lesquels le code civil impose la publicité et, d'autre part, à rendre cumulatives la publication par voie numérique et la publication par voie de presse.

L'amendement COM-5 est adopté.

L'article 1er bis est ainsi rédigé.

Après l'article 1er bis (nouveau)

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - Suivant une logique similaire à celle de l'article 1er bis, l'amendement COM-6 tend à assouplir les règles encadrant la vente des biens d'une succession vacante par l'administration chargée du domaine, en lui permettant de vendre les biens immeubles avant les biens meubles et ainsi de déterminer, au cas par cas, sa stratégie de vente. Celle-ci demeurera soumise au contrôle du juge.

L'amendement COM-6 est adopté et devient article additionnel.

Article 2

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - À l'article 2, qui, dans sa rédaction initiale, prévoit d'introduire une procédure judiciaire dérogatoire permettant à la DNID de vendre, indépendamment de l'appréciation de ses coïndivisaires, un bien indivis qui figure à l'actif d'une succession vacante, il me semble plus judicieux de consacrer une solution jurisprudentielle qui bénéficie à tous les coïndivisaires, dont la DNID. Il s'agit de la possibilité d'obtenir du juge, lorsque l'urgence et l'intérêt commun le justifient, de vendre un bien indivis en vertu de l'article 815-6 du code civil.

L'amendement COM-7 est adopté.

L'article 2 est ainsi rédigé.

Article 3

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - J'émets un avis défavorable à l'adoption de l'amendement COM-1, présenté par M. Sautarel, qui a pour objet d'assouplir les règles encadrant l'administration et la vente des biens indivis. Touchant au coeur du droit de l'indivision, il me paraît se heurter aux limites que j'ai identifiées, au cours de mes travaux, à l'abaissement du seuil de majorité nécessaire à la vente d'un bien indivis.

Premièrement, cette mesure ne fait pas l'objet d'un consensus parmi les professionnels, tant s'en faut.

Deuxièmement, il s'agit d'une atteinte au droit de propriété qui me semble d'autant plus préjudiciable qu'elle désinciterait les indivisaires à se tourner vers la procédure de partage judiciaire, qui constitue le mode normal de sortie d'une indivision en cas de désaccord. Si cette procédure de partage judiciaire s'avère complexe, longue et onéreuse, il convient de la simplifier. Cette simplification interviendra dans quelques semaines à l'initiative de la Chancellerie.

Troisièmement, l'article 3 s'appliquerait à toutes les indivisions, et non aux seules indivisions successorales. L'abaissement des seuils déstabiliserait profondément le droit des affaires ou les relations post-conjugales, sans que cela n'ait fait l'objet d'aucune évaluation.

Quatrièmement, cet abaissement des seuils rendrait totalement incohérente l'architecture du droit de l'indivision, puisqu'il serait exigé un seuil plus bas pour vendre un bien que pour l'administrer.

Enfin, l'article 3 vise une disposition pérenne du code civil, contrairement aux dérogations temporaires prévues pour la Corse et les territoires d'outre-mer. Nous devons être encore plus attentifs aux atteintes au droit de propriété lorsque leurs conséquences portent sur le long terme.

Par conséquent, je vous propose, avec l'amendement COM-8, de maintenir le seuil actuel des deux tiers des droits indivis pour demander l'autorisation judiciaire de vendre d'un bien indivis. Je vous suggère en parallèle de répondre aux lacunes de la procédure dérogatoire applicable en Corse.

L'amendement COM-1 n'est pas adopté. L'amendement COM-8 est adopté.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 3

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - Mon avis est également défavorable sur l'amendement COM-2 de M. Sautarel qui vise à imposer un partage judiciaire lorsqu'une succession est ouverte, sur saisine d'un notaire, depuis plus de cinq ans. La proposition de notre collègue consiste à éviter qu'une succession ne s'enlise, mais elle se heurte à plusieurs difficultés.

Tout d'abord, toutes les indivisions ne sont pas subies, elles résultent parfois d'un choix délibéré.

De même, toutes les indivisions ne sont pas d'origine successorale. Or, cet amendement concernerait l'ensemble des indivisions : cela signifierait donc que toutes les indivisions non successorales portant sur des fonds de commerce ou des exploitations agricoles, par exemple, devraient être partagées au bout de cinq ans... Ce serait un chamboulement du droit des affaires !

L'ensemble des indivisions successorales n'est pas non plus soumis à un notaire. En effet, une partie des partages amiables sont réalisés sans l'intervention de ce professionnel, notamment lorsque la succession ne comprend pas de biens immobiliers.

Ensuite, cette disposition revient à instaurer un partage obligatoire au bout de cinq années, alors même que les héritiers disposent d'un délai de dix ans pour opter. Cela me semble pour le moins incohérent. Il n'apparaît en effet pas possible de contraindre des héritiers à partager l'indivision successorale alors même que leur droit d'opter n'est pas expiré.

Par ailleurs, cette proposition placerait le notaire dans une situation extrêmement délicate au regard du nécessaire respect de ses obligations déontologiques. Il est le conseil des personnes physiques ou morales de droit privé et de droit public et le rédacteur impartial de leurs volontés. Il ne peut, en toute circonstance, renoncer à sa neutralité et veille à éviter tout conflit d'intérêts. Le contraindre à porter le dossier de ses clients en justice, contre leur avis, serait contraire à la déontologie qui l'anime dans ses relations avec sa clientèle.

Enfin, cet amendement aurait une conséquence qui va à l'encontre des objectifs poursuivis par les auteurs de la proposition de loi puisqu'il supprime la précision, actuellement prévue à l'article 815 du code civil, selon laquelle le « partage peut être toujours provoqué », c'est-à-dire même avant le délai de cinq ans.

M. Pierre-Alain Roiron. - Pour notre part, nous pensons que le délai de cinq ans correspond au moment propice pour imposer un partage judiciaire, car nous constatons que les successions ouvertes se prolongent trop longtemps, et nous sommes par conséquent favorables à l'amendement de M. Sautarel.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Cet amendement se caractérise par l'automaticité de la solution qu'il prévoit. Certes, il arrive que l'on reste longtemps dans l'indivision, mais celle-ci peut être choisie ou correspondre à des difficultés inhérentes à la vie de famille.

À l'occasion de la réforme qu'elle entend entreprendre, la Chancellerie nous a remis un document de présentation émanant du travail mené avec des notaires et des avocats, les premiers des professionnels à être sollicités quand il s'agit de sortir d'une indivision. Il en ressort que les indivisions, en particulier les indivisions successorales, ne tiennent le plus souvent pas tant à des questions d'argent qu'à des questions de famille, à des histoires de vie, qui ne peuvent se résoudre aisément par le seul fait de déterminer un délai. Assez peu de partages s'effectuent du reste de façon judiciaire, le mode amiable l'emportant. Et lorsqu'ils passent par une procédure judiciaire, c'est parce qu'une difficulté l'exige.

La Chancellerie envisage d'intervenir sur cette procédure elle-même et sa durée.

Mme Patricia Schillinger. - Les indivisions s'avèrent d'autant plus complexes en Alsace, surtout lorsqu'elles concernent des terrains, qu'elles y mêlent souvent le droit local au cadre juridique transfrontalier. Les communes comme les familles sont souvent empêchées de progresser dans leurs projets, les premières en particulier lorsqu'elles élaborent un plan local d'urbanisme (PLU). Laisser perdurer l'indivision n'est pas non plus une solution. Il nous faudra y réfléchir de manière approfondie.

M. Pierre-Alain Roiron. - La problématique de successions qui durent depuis trop longtemps existe en effet. Cela contraint les municipalités à agir, y compris pour des lieux qui ne sont plus du tout habités.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Presque tous ici connaissons l'exercice du mandat d'élu local et il est exact que nos projets se heurtent parfois à une succession vacante.

Les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen nous rappellent cependant que le droit de propriété est un droit naturel et imprescriptible. Ce droit est constitutionnellement protégé, ce qui n'est pas le cas de nos PLU.

Par ailleurs, les procédures d'expropriation, de déclaration d'abandon manifeste ou de biens sans maître permettent de débloquer des situations. Elles sont empreintes d'un certain formalisme et caractérisées par leur longueur, mais c'est la conséquence directe et inévitable de la mise en cause d'un droit constitutionnel. L'équilibre existant ne me paraît en définitive pas mauvais.

Mme Cécile Cukierman. - L'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen est souvent cité pour nous rappeler que le droit de propriété est constitutionnellement garanti ; mais complétons-en la lecture, puisque, s'il dispose que nul ne peut en être privé, il ajoute aussitôt : « si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité. »

L'idée d'un droit de propriété absolument immuable qui empêcherait toute action sur les terrains ou d'autres biens privés n'est donc pas incontestable. Depuis de nombreuses années, dans nos débats au Sénat, on oublie régulièrement cette seconde partie de la rédaction de l'article 17, qui pourtant lui confère tout son sens. Relativiser le droit de propriété est indispensable si l'on veut trouver de bons compromis.

Mme Muriel Jourda, présidente. - C'est pour cela que j'ai précisé la nature des trois procédures à la disposition de la puissance publique et lui permettant de faire prévaloir l'intérêt général. Ajoutons-leur encore le droit de préemption.

M. Marc-Philippe Daubresse. - J'invite notre collègue Cécile Cukierman à se reporter à la jurisprudence tout à fait éclairante du Conseil constitutionnel sur le droit de propriété. Ce que vous avez dit, madame la présidente, est tout à fait exact : le droit de propriété est un droit fondamental, auquel l'on ne peut aisément déroger, spécialement avec un PLU, qui n'est, en comparaison, qu'un simple outil juridique.

Mme Cécile Cukierman. - Des droits existent, spécialement le droit d'expropriation, qui limitent aujourd'hui la portée du droit de propriété et en relativisent la primauté en toutes circonstances.

L'amendement COM-2 n'est pas adopté.

L'amendement COM-3 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

Article 4

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - L'amendement de suppression COM-9 concerne l'expérimentation relative à l'accélération du partage judiciaire. Nous restons dans l'attente de la réforme à venir de la Chancellerie.

L'amendement COM-9 est adopté.

L'article 4 est supprimé.

Article 5 (nouveau)

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - L'amendement COM-10 vise à supprimer cet article, qui concerne une demande de rapport.

L'amendement COM-10 est adopté.

L'article 5 est supprimé.

Article 6 (nouveau)

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - Il en est de même pour l'amendement COM-11 à l'article 6.

L'amendement COM-11 est adopté.

L'article 6 est supprimé.

Intitulé de la proposition de loi

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. - L'amendement COM-12 vise à mettre en cohérence l'intitulé du texte avec son périmètre, plus large que les seules indivisions successorales.

Mme Muriel Jourda, présidente. - À cette fin, il s'agit de remplacer le mot « successorale » par les mots « et la gestion des successions vacantes ».

L'amendement COM-12 est adopté.

L'intitulé de la proposition de loi est ainsi modifié.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1er

M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur

4

Suppression de la base de données dont les modalités de fonctionnement sont incohérentes avec l'objectif qui lui est assigné

Adopté

Article 1er bis (nouveau)

M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur

5

Caractère cumulatif de la publication par voie de presse et par voie numérique et extension du périmètre de l'article

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 1er bis (nouveau)

M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur

6

Assouplissement des règles encadrant la vente des biens d'une succession vacante par l'administration chargée du domaine

Adopté

Article 2

M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur

7

Réécriture du dispositif pour consacrer un recours valable pour l'ensemble des coïndivisaires

Adopté

Article 3

M. SAUTAREL

1

Abaissement des seuils de majorité nécessaires pour effectuer un acte d'administration et pour aliéner un bien indivis après autorisation judiciaire

Rejeté

M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur

8

Suppression de l'abaissement de majorité nécessaire pour aliéner un bien indivis après autorisation judiciaire et actualisation de la procédure dérogatoire applicable en Corse

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 3

M. SAUTAREL

2

Obligation de procéder à un partage judiciaire lorsqu'une succession est ouverte depuis plus de cinq ans

Rejeté

M. SAUTAREL

3

Report du paiement des droits de succession lorsque la succession comporte un bien immobilier

Irrecevable art. 45, al. 1 C (cavalier)

Article 4

M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur

9

Suppression de l'expérimentation dans l'attente de la présentation d'une réforme législative du partage judiciaire par le Gouvernement en séance

Adopté

Article 5 (nouveau)

M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur

10

Suppression de la demande de rapport établissant un bilan de la loi dite Letchimy du 27 décembre 2018

Adopté

Article 6 (nouveau)

M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur

11

Suppression de la demande de rapport sur la procédure de partage judiciaire applicable en Alsace-Moselle

Adopté

Intitulé de la proposition de loi

M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur

12

Mise en cohérence de l'intitulé du texte avec son périmètre

Adopté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU SÉNAT

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis »,
le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 68(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie69(*). Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte70(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial71(*).

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des lois a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 10 décembre 2025, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 415 (2024-2025) visant à simplifier la sortie de l'indivision successorale.

Elle a considéré que ce périmètre incluait les dispositions relatives :

au recensement des biens en état d'abandon manifeste et sans maître ;

à la gestion d'une succession vacante ou en déshérence ;

au partage amiable ou judiciaire d'une indivision ;

aux règles civiles applicables à la vente d'un bien indivis.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mme Louise Morel, députée de la 6? circonscription du Bas-Rhin et autrice de la proposition de loi

M. Nicolas Turquois, député de la 4? circonscription de la Vienne et co-auteur de la proposition de loi

Direction nationale d'interventions domaniales (Dnid)

Mme Isabelle Rouberol, directrice adjointe

M. Barthélémy Bégué, responsable du pôle de gestion des patrimoines privés

M. Joël Roch, juriste du pôle des successions vacantes

Mme Aurélie Le Toux, inspectrice principale des finances publiques

Direction des affaires civiles et du sceau (DACS)

Mme Raphaëlle Wach, cheffe du bureau du droit des personnes et de la famille

Mme Manon Fauvernier, adjointe à la cheffe du bureau du droit des personnes et de la famille

Mme Douce Honorez, rédactrice au bureau du droit des personnes et de la famille

Mme Laetitia Dutour, cheffe du bureau du droit de l'immobilier et du droit de l'environnement

Mme Eleonora Ongaro, rédactrice du bureau du droit de l'immobilier et du droit de l'environnement

Conseil supérieur du notariat (CSN)

Me Olivier Vix, docteur en droit, notaire, membre de l'institut d'études juridiques du CSN

Mme Camille Stoclin-Mille, directrice de cabinet, responsable des relations institutionnelles

Conseil national des barreaux (CNB)

Mme Élodie Mulon, membre du groupe Famille de la commission Textes

Mme Nancy Ranarivelo, chargée de mission affaires publiques

Union syndicale des magistrats (USM)

Mme Fabienne Averty, secrétaire nationale

M. Cyril Jeanningros, chargé de mission

Institut du droit local alsacien-mosellan

M. Éric Sander, secrétaire général

Table ronde sur le régime de l'indivision en Corse

Mme Marie-Anne Pieri, notaire et élue à l'Assemblée de Corse

Conseil régional des notaires de Corse

Me Paul Cuttoli, président

Groupement d'intérêt public pour la reconstitution des titres de propriétés en Corse (Girtec)

Mme Claire Chavignier, présidente

Mme Raphaëlle Medori, secrétaire générale

Personnalités qualifiées

Mme Nathalie Baillon-Wirtz, professeur de droit privé à l'Université de Reims Champagne Ardenne

M. Claude Brenner, professeur de droit privé à l'Université Panthéon-Assas/Paris II

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

Me Didier Guérin, président honoraire à la chambre criminelle de la Cour de cassation

Mes Émilie Finot et Murielle Gamet, notaires associés au sein du Cabinet Cheuvreux, et Me Julie Boireau, juriste au Lab Cheuvreux

Chambre des Notaires du Vaucluse

Me Julie Pfeiffer-Pradelle, notaire

Syndicat Unité magistrats SNM FO

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl24-415.html


* 1 Source : ministère la justice (DACS). Il s'agit de la moyenne sur la période 2018-2024.

* 2 François Terré, Yves Lequette, Sophie Gaudemet, Les successions. Les libéralités, Lefebvre Dalloz, 5e édition, p. 816.

* 3 Loi n° 76-1286 du 31 décembre 1976 relative à l'organisation de l'indivision ; loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités ; loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allégement des procédures.

* 4 Loi n° 2006-728 précitée.

* 5  Rapport n° 1004 (2025 - 2026) sur la proposition de loi visant à simplifier la sortie de l'indivision successorale, fait par Mme Louise Morel, députée, au nom de la commission des lois, p. 11.

* 6 Article 837 du code civil.

* 7  Rapport n° 494 (2023- 2024) d'André Reichardt fait au nom de la commission des lois, sur la proposition de loi visant à proroger la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 relative à l'assainissement cadastral et à la résorption du désordre de la propriété, déposé au Sénat le 3 avril 2024.

* 8 Par la loi n° 2025-115 du 7 février 2025 visant à proroger la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 relative à l'assainissement cadastral et à la résorption du désordre de la propriété.

* 9 Voir les articles 3 à 5 de la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 précitée.

* 10 Voir l'article 1er de la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 précitée.

* 11 Par la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 visant à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement.

* 12  Rapport n° 379 (2017 - 2018) de Thani Mohamed Soilihi, fait au nom de la commission des lois, sur la proposition de loi visant à faciliter la sortie de l'indivision successorale et à relancer la politique du logement en outre-mer, déposé au Sénat le 28 mars 2018.

* 13  Avis n° 333(2023 - 2024) de Françoise Dumont, fait au nom de la commission des lois, sur le projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement, déposé le 14 février 2024.

* 14 Cette procédure, décrite en commentaire de l'article 3 de la présente proposition de loi, est régie par l'article 815-5-1 du code civil.

* 15  Rapport d'information n° 799 (2022 - 2023) fait par Vivette Lopez et Thani Mohamed Soilihi au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer, intitulé « Le foncier agricole en outre-mer : une reconquête nécessaire pour la souveraineté alimentaire », déposé le 28 juin 2023 ; rapport d'information n° 206 (2024 - 2025) fait par Micheline Jacques au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer, intitulé « Foncier outre-mer : relever ensemble les défis », déposé le 16 décembre 2024.

* 16 Conseil constitutionnel, décision n° 2011-157 QPC du 5 août 2011, Société SOMODIA.

* 17 Article 220 de la loi précitée du 1er juin 1924.

* 18 Ibid, article 235.

* 19 Ibid, article 232.

* 20 Ibid article 224.

* 21 Ibid, article 225.

* 22 Ibid, article 234.

* 23 Sauf si le conservatoire régional d'espaces naturels formule une demande pour se porter acquéreur de cette propriété, mais cette hypothèse apparaît marginale en ce qui concerne les biens immeubles dont traite la présente proposition de loi.

* 24 Voir le commentaire de l'article 1er pour une présentation plus détaillée des biens considérés comme abandonnés.

* 25 Article 809-1 du code civil.

* 26 Article 810-7 du même code.

* 27 Article 810 dudit code.

* 28 Article 809-2 du même code.

* 29 Article 810-2 du même code.

* 30 Article 810-12 du même code.

* 31 Article 1342 du code de procédure civile.

* 32 Source : éléments transmis au rapporteur par le groupement d'intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété en Corse (Girtec).

* 33 Amendement n° CL29 présenté par Louise Morel.

* 34 Rapport n° 823 (Assemblée nationale - XVIIe législature) fait par Louise Morel au nom de la commission des lois, sur la proposition de loi visant à simplifier l'indivision successorale, déposé le 20 février 2025, page 23.

* 35 Ces deux lois sont présentées plus en détail dans le propos liminaire.

* 36 L'article 1er de la loi du 6 mars 2017 ne mentionne pas de publication dans un journal d'annonces légales. En pratique, les actes notariés de notoriété acquisitive sont toutefois tous publiés dans la presse locale, d'après les informations transmises par le Girtec et par la chambre régionale des notaires de Corse.

* 37 Voir le commentaire de l'article 1er bis pour une présentation du régime juridique général de la curatelle des successions vacantes.

* 38 Article 810 du code civil.

* 39 Article 810-1 du code civil.

* 40  Rapport n° 343 (2005 - 2006) fait par Henri de Richemont au nom de la commission des lois, sur la loi portant réforme des successions et des libéralités, déposé au Sénat le 10 mai 2006.

* 41 Rapport n° 2850 (Assemblée nationale - XIIe législature), fait par Sébastien Huyghe au nom de la commission des lois, sur la loi portant réforme des successions et des libéralités, déposé le 8 février 2006.

* 42 Ibid.

* 43 Cour de cassation, première chambre civile, 14 février 1984, n° 82-16.526.

* 44 Cour de cassation, première chambre civile, 4 décembre 2013, n° 12-20.158.

* 45 Cour de cassation, première chambre civile, 4 décembre 2013, n° 12-20.158.

* 46  Rapport n° 209 (2008 - 2009) fait par Bernard Saugey au nom de la commission des lois du Sénat, sur la proposition de loi de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures, déposé le 11 février 2009.

* 47 Loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures.

* 48 Rapport n° 209 (2008 - 2009) précité.

* 49 Ibid.

* 50 Ibid.

* 51 Amendement n° CL31 présenté par Louise Morel et sous-amendement n° CL33 présenté par Sébastien Huyghe.

* 52 Voir le propos liminaire pour une description de la loi Letchimy.

* 53 Rapport n° 823 (Assemblée nationale - XVIIe législature) fait par Louise Morel au nom de la commission des lois, sur la proposition de loi visant à simplifier l'indivision successorale, déposé le 20 février 2025, page 29.

* 54 Ibid, page 30.

* 55 Décision n° 2018-719 QPC du 13 juillet 2018, Mme Estelle M. (Imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières issues d'un partage successoral), paragr. 10.

* 56  Rapport n° 209 (2008 - 2009) fait par Bernard Saugey au nom de la commission des lois du Sénat, sur la proposition de loi de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures, déposé le 11 février 2009.

* 57 Inspection générale de la justice, Le traitement des dossiers civils longs et complexes, n° 127-21, décembre 2021, p. 93.

* 58 Amendement n° CL1 présenté par Frédéric Maillot.

* 59 Voir le propos liminaire pour une description de la loi Letchimy.

* 60  Rapport d'information n° 799 (2022 - 2023) fait par Vivette Lopez et Thani Mohamed Soilihi au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer, intitulé « Le foncier agricole en outre-mer : une reconquête nécessaire pour la souveraineté alimentaire », déposé le 28 juin 2023 ; rapport d'information n° 206 (2024 - 2025) fait par Micheline Jacques au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer, intitulé « Foncier outre-mer : relever ensemble les défis », déposé le 16 décembre 2024.

* 61  Avis n° 333 (2023 - 2024) fait par Françoise Dumont au nom de la commission des lois du Sénat sur le projet de loi visant à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement, déposé le 13 février 2024.

* 62  Rapport n° 342 (2023 - 2024) fait par Amel Gacquerre au nom de la commission des affaires économiques du Sénat sur le projet de loi visant à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement, déposé le 14 février 2024.

* 63 Amendement n° CL16 présenté par Céline Thiébault-Martinez.

* 64 Voir le propos liminaire pour une description du régime spécifique de sortie d'indivision applicable en Alsace-Moselle.

* 65 Amendement n° 6 présenté par Charles Sitzensthul.

* 66 Sous-amendement n° 23 présenté par Louise Morel.

* 67  Rapport d'information n° 710 (2024-2025) fait par Sylvie Vermeillet au nom du Bureau du Sénat, sur le bilan annuel de l'application des lois au 31 mars 2025, déposé le 6 juin 2025

* 68 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 69 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 70 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 71 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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