Mardi 26 juin 2018

- Présidence de M. Philippe Bas, président -

La réunion est ouverte à 9 h 05.

Projet de loi relatif à la lutte contre la fraude - Examen du rapport pour avis

M. Philippe Bas, président. - Nous sommes saisis pour avis du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude, pour lequel nous avons une délégation au fond sur les articles 1er, 8 et 9.

Mme Nathalie Delattre, rapporteur pour avis. - Ce projet de loi relatif à la lutte contre la fraude a été présenté en Conseil des ministres le 28 mars dernier puis déposé sur le bureau du Sénat. Ce texte, dont la commission des finances est saisie au fond, entend doter l'administration et l'autorité judiciaire de nouveaux instruments pour lutter plus efficacement contre les infractions fiscales et douanières.

Il est présenté comme le pendant répressif du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance (Essoc) qui a pour objet de permettre à l'administration d'accompagner de façon bienveillante un contribuable ayant commis une erreur ou un oubli de bonne foi. Le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude prévoit, quant à lui, le renforcement de la sanction du contribuable qui se soustrait sciemment à ses obligations contributives.

Chaque année, la fraude fiscale prive l'État de ressources d'un montant estimé entre 60 et 80 milliards d'euros. L'administration fiscale procède à environ un million de contrôles par an sur des entreprises et des personnes physiques, contrôles sur pièces et parfois sur place qui permettent de repérer environ 15 000 dossiers de fraude fiscale présentant un caractère dit « répressif », c'est-à-dire des dossiers qui révèlent une intentionnalité d'éluder l'impôt, exclusive de la bonne foi, ce qui est la condition nécessaire pour pouvoir engager des poursuites pénales.

Un millier de dossiers sont transmis annuellement au parquet, qui peut décider d'engager ou non des poursuites. Le nombre de décisions finalement rendues par le juge pénal est de l'ordre de quelques centaines chaque année. Les dossiers transmis à la justice sont ceux que l'administration a sélectionnés et qui ont reçu un avis favorable de la commission des infractions fiscales (CIF). Créée en 1977, la CIF est une commission indépendante composée de 29 membres dont le président est un conseiller d'État.

Pour procéder à la sélection de ce millier de dossiers, l'administration applique les critères définis dans une circulaire commune du garde des sceaux et du ministre du budget de 2014 : on y retrouve des critères comme le seuil financier de plus de 100 000 euros d'impôts éludés, l'organisation de l'insolvabilité, l'omission ou la minoration de déclaration de plus-value, de successions, de donations, etc.

Tous les interlocuteurs auditionnés ont confirmé que les parquets et les tribunaux correctionnels n'auraient pas les moyens de traiter, dans un délai raisonnable, les milliers de dossiers qui présentent un caractère répressif. L'application de sanctions administratives permet donc de réprimer beaucoup plus vite les manquements constatés et surtout de percevoir plus rapidement les recettes fiscales que la fraude avait permis de soustraire au fisc.

Il est admis par le plus grand nombre qu'il est nécessaire de ne porter devant la justice que les affaires les plus emblématiques et pour lesquelles l'exemplarité de la sanction pénale, avec la publicité qui s'y attache, présente un intérêt majeur. Il n'en reste pas moins que le système actuel mérite à la fois d'évoluer et de se renforcer.

Le texte qui nous est soumis comporte onze articles, dont certains concernent le fonctionnement de la justice ou modifient des règles de droit pénal, ce qui a conduit la commission des finances à nous déléguer au fond les articles 1er, 8 et 9, étant précisé que le champ de notre saisine pour avis s'étend à l'article 5.

D'une manière générale, les dispositions du texte concourent à trois objectifs : mieux détecter, mieux appréhender, et mieux sanctionner la fraude.

En matière de détection, le projet de loi facilite l'échange de données entre administrations et la transmission d'informations par les plateformes collaboratives. En matière d'appréhension de la fraude, il renforce les moyens d'investigation. En matière de sanction, des dispositions complètent et alourdissent l'arsenal existant, notamment dans une logique plus large de publicité.

L'article 1er autorise la création, au sein du ministère du budget, d'un nouveau service à compétence nationale chargé de mener des enquêtes judiciaires en matière de fraude fiscale : il s'agirait d'une « police de Bercy ». Pourtant, depuis 2010, procureurs et juges d'instruction peuvent s'appuyer sur une brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF). Dépendant du ministère de l'intérieur, et co-administrée par Bercy, cette brigade associe des officiers de police judiciaire (OPJ) et des officiers fiscaux judiciaires (OFJ). Elle peut ainsi mettre en oeuvre les techniques d'investigation de la police judiciaire - écoutes, filatures, balises par exemple - et bénéficier d'une expertise pointue en matière fiscale. Cette brigade, originale par sa mixité de fonctions, comprend environ 40 agents qui peuvent s'appuyer sur l'ensemble du maillage territorial de la police judiciaire, soit environ 5 700 personnes.

Le Conseil d'État précise dans son avis qu'un second service d'enquête judiciaire fiscale créé hors du ministère de l'intérieur serait concurrent du premier. Il dit ne pas comprendre pourquoi, dans un souci de bonne administration, n'est pas retenue l'option consistant à renforcer le service existant.

Je suis également peu convaincue du bien-fondé de la création d'une nouvelle police, celle de Bercy, alors que la BNRDF a déjà pour mission de mener des enquêtes fiscales. Il me semble plus simple, plus sain et plus efficace de doter la BNRDF de moyens supplémentaires que de créer un nouveau service, qui risque d'alimenter une guerre des polices, préjudiciable à l'efficacité de l'action publique, et qui risque de faire fi de la nécessaire coordination que nécessite ce type de dossiers complexes. Je vous proposerai donc la suppression de cet article.

L'article 5 traite de la publicité des condamnations pour fraude fiscale, suivant le principe du name and shame. Dans sa rédaction actuelle, l'article 1741 du code général des impôts prévoit que les tribunaux peuvent décider l'affichage ou la diffusion des condamnations qu'ils prononcent pour fraude fiscale. Jusqu'en 2010, cette peine complémentaire d'affichage ou de publication était obligatoire. Mais le Conseil constitutionnel a estimé que cette règle, par son caractère automatique, contrevenait au principe constitutionnel d'individualisation des peines. Depuis qu'elles sont facultatives, les peines de diffusion ou d'affichage ne sont prononcées, en moyenne, que dans 5 % des affaires.

Considérant que la publicité des condamnations peut avoir une vertu dissuasive, le Gouvernement propose de la rendre de nouveau obligatoire en précisant que cette peine complémentaire pourrait être écartée, par une décision spécialement motivée du juge, si elle n'apparaissait pas justifiée au regard des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. J'estime le dispositif proposé satisfaisant, en ce qu'il permet de rétablir la règle qui était en vigueur jusqu'en 2010, tout en la conciliant avec le principe d'individualisation des peines.

L'article 8 traite de l'alourdissement des amendes prévues en cas de fraude fiscale. L'article 1741 du code général des impôts prévoit que les personnes physiques condamnées pour fraude fiscale encourent une peine de 5 ans d'emprisonnement et de 500 000 euros d'amende. En cas de fraude fiscale aggravée, les peines sont portées à 7 ans d'emprisonnement et à 3 millions d'amende. Pour les personnes morales, le montant de l'amende est cinq fois plus élevé, soit 2,5 millions d'euros ou 15 millions en cas de fraude aggravée. Quoique d'un niveau élevé, ces peines d'amende se révèlent insuffisamment dissuasives face à certaines fraudes. C'est pourquoi cet article prévoit que le montant de l'amende pourra être porté au double du produit tiré de l'infraction. Ainsi, en cas de fraude ayant permis à un particulier d'éluder 5 millions d'impôts, l'amende pourrait atteindre, au maximum, 10 millions. Pour les personnes morales, compte tenu du principe figurant à l'article 131-38 du code pénal, le montant de l'amende pourrait atteindre le décuple du produit de l'infraction. Je ne peux qu'encourager la commission à approuver cette disposition.

Enfin, l'article 9 étend la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) à la fraude fiscale. Cette procédure, souvent appelée le plaider-coupable, a été introduite dans notre code de procédure pénale en 2004. Elle permet d'apporter une réponse pénale plus rapide pour certaines infractions reconnues par leur auteur.

La procédure se déroule en deux temps : d'abord, une phase de proposition par le procureur puis, lorsque la personne poursuivie accepte la ou les peines proposées, une phase d'homologation auprès du président du tribunal de grande instance. La CRPC permet d'éviter un procès long et de régler le dossier en quelques mois sans effacer pour autant la culpabilité de l'auteur. Je vous propose d'accepter cette mesure.

Dans le même esprit, et en lien avec une proposition pertinente formulée par nos collègues députés Emilie Cariou et Éric Diard dans un récent rapport d'information, je vous propose d'étendre à la fraude fiscale la possibilité de conclure une convention judiciaire d'intérêt public (CJIP). La conclusion d'une telle convention par une personne morale est possible sur la seule proposition du procureur. Elle implique de verser au Trésor public une amende d'intérêt public et de mettre en oeuvre un programme de mise en conformité. La convention doit être obligatoirement homologuée par un juge qui doit également en faire publicité via un communiqué de presse et une diffusion en ligne.

Déjà autorisée pour le blanchiment de fraude fiscale, la CJIP a été utilisée avec succès par le parquet national financier (PNF) pour traiter certains dossiers et il est donc cohérent de l'autoriser aussi pour la fraude fiscale. Je vous proposerai un amendement en ce sens.

Le rapporteur général de la commission des finances est favorable aux amendements que je vais vous présenter. À cette heure, en revanche, je ne peux vous présenter les amendements qui seront proposés par la commission des finances, notre collègue Alberic de Montgolfier y travaillant jusqu'au dernier moment ; la commission des finances se réunira demain matin. Je sais son souhait d'inscrire des critères objectifs dans la loi qui permettraient de déterminer les dossiers issus d'un contrôle fiscal qui mériteraient d'être transmis directement au parquet, sans passer par la CIF, critères que la jurisprudence du Conseil constitutionnel, les circulaires ministérielles et les pratiques de la CIF, utilisent déjà, à savoir le seuil financier de 100 000 euros, l'opacité du montage, la récidive...

M. Philippe Bas, président. - Merci pour ce rapport d'une grande clarté.

M. François Pillet. - Ce sujet technique déchaîne souvent les passions. Je rejoins notre rapporteur sur l'article 1er, mais était-il nécessaire d'avoir recours à la loi pour organiser des services d'enquête ?

Ce texte fait ressurgir le verrou de Bercy, véritable serpent de mer. Comme je me suis maintes fois exprimé sur cette institution que j'ai critiquée depuis sa naissance, je n'y reviendrai pas, mais je préfère me répéter plutôt que de me contredire. Et puis, à quoi bon s'agacer de ce verrou alors qu'avec l'arrêt Talmon, la Cour de cassation a offert une voie de contournement. C'est pourquoi je soutiens l'amendement créant un article additionnel après l'article 9, afin d'inscrire dans la loi cette jurisprudence qui permet aux parquets de poursuivre directement le délit de blanchiment de fraude fiscale.

Pour le reste, j'approuve les autres amendements de notre rapporteur.

M. Pierre-Yves Collombat. - Certaines dispositions de ce projet de loi nous satisfont, comme le durcissement des peines ou le renforcement des moyens dédiés à la lutte contre les fraudes, mais d'autres sont critiquables car la fraude fiscale n'est toujours pas considérée comme un délit à part entière. En tant que grand défenseur des libertés - surtout des libertés de certains- le Conseil constitutionnel nous invite à traiter ces questions avec beaucoup de doigté.

Sous le terme générique de fraude fiscale, on parle des petits manquements mais aussi de la fraude organisée, qui coûte 50 à 60 milliards d'euros par an à notre pays. Ce n'est pas rien ! L'État pourrait peut-être faire des efforts pour récupérer ce manque à gagner. Nous devons renforcer les moyens d'investigation et permettre au ministère de la justice, par le biais du parquet financier, de lutter contre la fraude. Je ne comprends donc pas que d'autres ministères soient chargés de cette lutte. En revanche, je rejoins mon collègue Pillet sur le verrou de Bercy.

Non, les petits arrangements avec les fraudeurs ne sont pas acceptables.

M. Jérôme Durain. - Notre position sur ce texte s'inscrit dans la continuité de celle que nous avons prise lors de l'examen de la proposition de loi de Mme de la Gontrie sur le verrou de Bercy. Je regrette des textes qui arrivent par bribes, avec beaucoup d'amendements annoncés mais pas encore connus. Je souhaite bon courage à notre rapporteur qui est au milieu du gué.

Sur le reste, ce projet de loi est le bâton, après la carotte du texte « Société de confiance ». Comme notre rapporteur, je suis dubitatif sur l'article 1er. Nous sommes favorables à l'article 8 qui durcit les sanctions, même si les peines effectivement prononcées par les juges en relativiseront certainement l'impact. Enfin, la réforme de la justice annoncée par la garde des sceaux reviendra certainement sur l'article 9 que nous nous apprêtons à adopter.

Mme Agnès Canayer. - Dans la mesure où je suis élue d'un territoire qui compte le premier port à conteneurs de France, je vois le travail des douanes pour lutter contre les fraudes. En outre, j'ai rendu un rapport il y a un an sur la lutte contre la fraude sociale dans le cadre de la mission d'évaluation des comptes de la sécurité sociale.

Les montages complexes prennent de court nos services qui ne sont pas assez coordonnés entre eux. Comme notre rapporteur, je suis donc opposée à la création d'une police spéciale au sein du ministère des finances. Nous devons doter nos services des moyens matériels les plus performants pour qu'ils puissent appréhender le plus en amont possible les fraudeurs.

Les sanctions pénales sont insuffisamment efficaces pour lutter contre la fraude : le temps d'instruction permet aux fraudeurs d'organiser leur insolvabilité. Pour lutter contre les fraudes sociales et douanières, il faut privilégier les sanctions administratives.

M. François Bonhomme. - Comment évaluer précisément le montant de la fraude ? Bercy l'estime à 25 milliards tandis que certaines ONG évoquent jusqu'à 100 milliards.

Ce texte concerne-t-il aussi les fraudes aux cotisations sociales et à la TVA ?

Ce rapport confirme que la justice n'a pas les moyens de poursuivre toutes les affaires, puisqu'elle ne se préoccupe que de celles qualifiées d'emblématiques. Qu'est-ce à dire ? Que fait-on du principe d'égalité ?

Comment va se traduire cette chasse à la grande fraude ? L'inventivité dans ce domaine est sans limite et les services de l'État se retrouvent souvent dépassés par la technicité des montages et par leur manque d'effectifs.

Mme Muriel Jourda. - Je voudrais réagir aux propos de M. Collombat : nous sommes tous d'accord pour lutter contre la fraude, mais cela ne doit pas nous faire oublier qu'il faut poursuivre les efforts d'économie. Peut-être faut-il nous interroger sur la cause de la fraude : n'est-elle pas le symptôme d'une maladie bien plus grave, l'excès d'impôt ?

M. Pierre-Yves Collombat. - Pauvres riches !

Mme Muriel Jourda. - Le consentement à l'impôt est un principe en perdition : le taux, l'assiette et l'utilisation de l'impôt sont décriés, ce qui explique en partie la fraude.

M. Philippe Bas, président. - Cette question est essentielle, mais même si le taux de l'impôt est trop élevé, cela n'excuse pas la fraude.

Mme Brigitte Lherbier. - J'ai rencontré vendredi le président de la chambre des métiers de Lille qui estime que les PME ont plus besoin d'aide que de subir le harcèlement des services fiscaux. Non, les artisans ne sont pas de grands fraudeurs.

M. Éric Kerrouche. - Le niveau de prélèvements publics baisse de façon régulière en France depuis les années 2000 au profit des catégories les plus aisées de la population ; les déficits publics auraient pu être évités si l'on avait maintenu le niveau des prélèvements.

La remise en question des impôts est difficilement entendable, sauf à considérer que l'impôt est illégitime pour les plus riches.

M. Yves Détraigne. - Notre système fiscal est extrêmement complexe et il faut être un spécialiste pour s'y retrouver. Une législation claire et durable serait indispensable. Nous réformons beaucoup trop souvent la règlementation, ce qui permet de trouver des failles pour échapper à l'impôt.

Mme Josiane Costes. - Je m'inquiète de la subjectivité de certains termes : « les affaires les plus emblématiques », « les cas les plus graves »... Ne risque-t-on pas certaines dérives ?

M. Pierre-Yves Collombat. - Nous voudrions tous un système clair qui permette de savoir qui paye et qui ne paye pas. Mais la complexité actuelle n'est pas le fruit du hasard : l'obscurité favorise des accommodements avec le ciel...

M. Philippe Bas, président. - À l'attention de M. Kerrouche, je voudrais rappeler que les prélèvements obligatoires en France représentaient en 1995, 33,6 % du PIB, en 2000, 43,1 % et en 2015, 45,5 %.

M. Éric Kerrouche. - Je faisais référence à l'impôt sur le revenu. À considérer qu'il faut baisser l'impôt pour être plus compétitif, nous nivelons par le bas. Les décisions prises aux États-Unis vont avoir des conséquences négatives pour tous, sauf pour le petit nombre de contribuables fortunés qui captent la plus grande des richesses produites dans le monde.

Mme Nathalie Delattre, rapporteur pour avis. - Effectivement, monsieur Durain, les conditions ne sont pas les meilleures pour rapporter ce texte d'autant que la commission des finances souhaite encore l'améliorer.

Je ne me prononcerai pas sur la justesse et le montant de l'impôt : ce vaste débat pourra avoir lieu lors de la prochaine loi de finances.

Le montant de la fraude fiscale est difficile à évaluer : la fourchette entre 60 et 80 milliards est la plus communément admise, mais comme il d'agit d'impôts éludés, impossible d'être plus précis.

J'en viens à l'article 1er et à la création d'une police de Bercy. J'ai auditionné la BNRDF : des discussions approfondies ont eu lieu entre le ministère du budget et celui de l'intérieur. Bercy veut absolument cette police. Aujourd'hui, le code de procédure pénale prévoit que les officiers fiscaux judiciaires doivent être rattachés au ministère de l'intérieur, d'où la nécessité de passer par la loi pour créer un nouveau service d'enquête au sein du ministère du budget. Dans l'étude d'impact, il est dit que 260 affaires sont en attente à la BNRDF alors que seulement 205 affaires sont en cours d'instruction. La BNRDF instruit ces dossiers complexes et rend ses conclusions en 24 mois en moyenne. Ce délai semble tout à fait satisfaisant au regard du temps nécessaire pour mener l'instruction. Les bons taux d'élucidation sont dus aux OPJ formés à la contrainte : ils savent mener des perquisitions, auditionner, investiguer, alors que les OFJ sont formés au contrôle fiscal. Leurs formations sont tout à fait complémentaires. La mixité des profils au sein de la BNRDF explique les succès enregistrés. En outre, la brigade nationale est rattachée au ministère de l'intérieur mais codirigée par des fonctionnaires des finances publiques.

Aucun office central de police judiciaire n'est rattaché au ministère de la justice, monsieur Collombat. Il est préférable que le ministère de l'intérieur soit compétent, afin que cette police bénéficie de son maillage territorial.

Je ne pense pas que l'on reviendra sur le plaider coupable à l'occasion de l'examen des prochains textes sur la justice.

Les affaires dites « emblématiques » sont celles qui remplissent les critères définis par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, précisée par les circulaires ministérielles et l'usage de la CIF. Aujourd'hui, la justice serait incapable de traiter 15 000 dossiers répressifs. Sur cette masse de dossiers, seuls un millier remplissent l'ensemble des critères. Ces dossiers sont présentés par la CIF aux parquets territoriaux ou au parquet national financier qui en retiennent en général 95 %. Les critères de complexité, d'opacité et de récidive sont examinés avec attention, de même que le montant d'impôt éludé. M. de Montgolfier souhaiterait inscrire ces critères dans la loi. Merci à M. Pillet d'avoir rappelé que le parquet est saisi par la CIF mais qu'il a aussi la capacité de s'autosaisir en cas de blanchiment de fraude fiscale, depuis l'arrêt Talmon de 2008. Je propose d'inscrire cet arrêt dans la loi.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er (délégué)

Mme Nathalie Delattre, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-56 tend à supprimer l'article 1er, tout comme l'amendement identique COM-13, et je suis défavorable à l'amendement COM-12. Je m'en suis longuement expliquée.

M. Pierre-Yves Collombat. - Alors que les problèmes que nous évoquons ce matin sont toujours plus interministériels, ils sont ici traités en silo, d'où des questions de répartition de compétences et de moyens. Si la lutte contre l'évasion fiscale était une priorité, tous les services avanceraient dans la même direction. Lorsque fut créée l'Agence française anticorruption (AFA), j'avais proposé que cette instance fût à la disposition du parquet financier. Bien sûr, cela a été refusé. J'ai le sentiment que l'on continue à bricoler, sans grande cohérence d'ensemble.

Mme Nathalie Delattre, rapporteur pour avis. - À mon avis, l'organisation actuelle, avec la BNRDF, est optimisée et répond à la nécessaire transparence et transversalité que nous appelons tous de nos voeux. Si un trafic de drogue est découvert à l'occasion d'un contrôle pour fraude fiscale, la police locale se saisira du dossier. Ministères de l'intérieur et du budget travaillent de conserve.

L'amendement de suppression COM-56 est adopté. En conséquence, la commission proposera à la commission des finances d'adopter l'amendement identique COM-13 et de ne pas adopter l'amendement COM-12.

La commission proposera à la commission des finances de supprimer l'article 1er.

Article 9 (délégué)

M. Pierre-Yves Collombat. - Mon amendement COM-11 supprime l'article. La CRPC, procédure rapide et particulière, doit être réservée à certains délits bien délimités et qui ne posent pas de problèmes. Le fait de l'étendre à la fraude fiscale, sans instaurer de plafond, me parait excessif. La CRPC, qui a eu du mal à s'imposer, est aujourd'hui bien acceptée. Ne bouleversons pas l'équilibre auquel nous sommes parvenus.

Mme Nathalie Delattre, rapporteur pour avis. - La CRPC n'est pas un régime de faveur. Le procureur n'est pas obligé d'utiliser cet outil. Le prononcé de la peine est homologué par le juge.

M. Philippe Bas, président. - Il s'agit effectivement de prononcer une peine.

M. François Pillet. - Lorsque le juge n'admet pas l'accord qui est intervenu entre le procureur et le prévenu, il peut le refuser. La CRPC est un mode de jugement ; en aucun cas, il ne s'agit d'un jugement allégé.

L'amendement rédactionnel COM-59 est adopté.

La commission proposera à la commission des finances de ne pas adopter l'amendement COM-11.

La commission proposera à la commission des finances d'adopter l'article 9 ainsi modifié.

Articles additionnels après l'article 9

Mme Nathalie Delattre, rapporteur pour avis. - Autorisé pour le blanchiment de fraude fiscale, le recours à la procédure de CJIP gagnerait à être étendu à la fraude fiscale elle-même afin de permettre aux procureurs de traiter plus rapidement certains dossiers, d'où cet amendement COM-57.

L'amendement COM-57 est adopté.

Mme Nathalie Delattre, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-58 inscrit l'arrêt Talmon dans la loi.

L'amendement COM-58 est adopté.

M. Philippe Bas, président. - Nous en avons terminé. Notre rapporteur présentera demain ces amendements à la commission des finances.

La réunion est close à 10 heures.

Mercredi 27 juin 2018

- Présidence de M. François Pillet, vice-président -

La réunion est ouverte à 9 h 35.

Projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-157 du 9 février 2017 étendant et adaptant à la Polynésie française certaines dispositions du livre IV du code de commerce relatives aux contrôles et aux sanctions en matière de concurrence - Désignation des candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire

La commission soumet au Sénat la nomination de MM. Philippe Bas, Mmes Catherine Troendlé, Muriel Jourda, MM. Philippe Bonnecarrère, Jacques Bigot, Jean-Yves Leconte et Mme Nathalie Delattre comme membres titulaires et de Mme Agnès Canayer, M. Pierre-Yves Collombat, Mmes Catherine Di Folco, Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Loïc Hervé, Éric Kerrouche et Thani Mohamed Soilihi comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire.

Projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie - Désignation des candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire

La commission soumet au Sénat la nomination de MM. Philippe Bas, François-Noël Buffet, Jacques Grosperrin, Philippe Bonnecarrère, Jean-Yves Leconte, Mmes Marie-Pierre de la Gontrie et Josiane Costes comme membres titulaires et de Mme Éliane Assassi, M. Jacques Bigot, Mmes Catherine Di Folco, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Loïc Hervé, Mme Muriel Jourda et M. Alain Richard comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire.

Projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes - Désignation des candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire

La commission soumet au Sénat la nomination de M. Philippe Bas, Mmes Marie Mercier, Jacky Deromedi, M. Hervé Marseille, Mmes Marie-Pierre de la Gontrie, Laurence Rossignol et Maryse Carrère comme membres titulaires et de M. Arnaud de Belenet, Mme Esther Benbassa, M. François Bonhomme, Mme Catherine Di Folco, MM. Loïc Hervé, Jean-Yves Leconte et Mme Brigitte Lherbier comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire.

Proposition de loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination - Désignation des candidats pour faire partie de la commission mixte paritaire

La commission soumet au Sénat la nomination de M. Jacques Bigot comme membre titulaire, en remplacement de M. Jean-Pierre Sueur, et de M. Éric Kerrouche comme membre suppléant, en remplacement de M. Jean-Luc Fichet de la commission mixte paritaire.

Examen de pétitions adressées au Président du Sénat

M. François Pillet, président. - Nous examinons ce jour deux pétitions inscrites au rôle général des pétitions. La première émane de M. Louis Ripault qui sollicite une loi interprétative de la loi organique n° 79-43 du 18 janvier 1979 modifiant le statut de la magistrature. Il estime qu'il est fait une lecture extensive de ce texte, ce qui confèrerait aux magistrats de l'ordre judiciaire, en cas de déni de justice, une immunité contraire à la Constitution. Le déni de justice, tout comme la faute lourde, engagent la responsabilité de l'État pour fonctionnement défectueux du service public de la justice. Toutes les décisions de condamnation de l'État sont transmises par le garde des sceaux aux chefs de cour d'appel intéressés, ce qui permet, le cas échéant, d'engager des poursuites disciplinaires à l'encontre des magistrats fautifs. De plus, une action récursoire de l'État contre l'intéressé est possible sur le fondement de l'article 11-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Le déni de justice constitue également un délit défini par l'article 434-7-1 du code pénal en ces termes : « Le fait, pour un magistrat, toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle ou toute autorité administrative, de dénier de rendre la justice après en avoir été requis et persévérer dans son déni après avertissement ou injonction de ses supérieurs est puni de 7 500 € d'amende et de l'interdiction de l'exercice des fonctions publiques pour une durée de cinq à vingt ans ». Les textes en vigueur prévoient donc un régime de responsabilité des magistrats, y compris dans l'hypothèse d'un déni de justice, de sorte que les intéressés ne peuvent être considérés comme bénéficiant d'une immunité.

M. Alain Richard. - L'article 434-7-1 du code pénal prévoit donc qu'un juge a des supérieurs qui lui donnent des injonctions...

M. François Pillet, président. - Il n'est donc pas nécessaire de prévoir de disposition interprétative. Je vous propose de répondre en ce sens au pétitionnaire et de classer la pétition.

Il en est ainsi décidé.

M. François Pillet, président. - La seconde pétition émane des époux Gorce qui ont constitué une association « loi 1901 » à but non lucratif pour construire des logements pour séniors à laquelle ils souhaitent faire don de leurs biens. Ils déplorent que les donations et legs faits aux associations qui ne bénéficient pas d'exonérations soient taxés à hauteur de 60 %. Conformément à l'article 88 du Règlement du Sénat, je vous propose de renvoyer cette pétition à la commission des finances, compétente en la matière.

Il en est ainsi décidé.

Projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique - Examen du rapport pour avis

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Notre commission est saisie pour avis du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN), déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 4 avril et transmis au Sénat le 13 juin 2018.

« Construire plus, plus vite et moins cher » : personne ne peut être en désaccord avec ces objectifs qui visent à combattre la crise du logement dans laquelle nous nous trouvons. Les derniers chiffres connus montrent une baisse significative au premier trimestre des permis de construire et des constructions neuves, baisse qui se poursuit au second trimestre de cette année. Plusieurs gouvernements ont tenté de combattre cette crise à l'aide de lois-cadres ou de programmation, avec plus ou moins de succès. Ceux qui ont réussi partiellement le doivent souvent à la gouvernance et aux méthodes utilisées. Ce fut le cas - et je prendrai deux exemples pour ne vexer personne - de la loi de cohésion sociale de 2005, qui utilisa simultanément plusieurs leviers : les politiques de l'emploi, de l'égalité des chances et du logement pour restaurer la cohésion nationale, dans un contexte de chômage identique à celui d'aujourd'hui. Elle a eu des résultats significatifs : la construction a augmenté de 50 % dans le pays. Ce fut également le cas des mesures pragmatiques de relance du logement prises par Mme Sylvia Pinel en 2014, à l'issue d'une importante concertation avec les professionnels et les élus. Il n'y a donc pas de fatalité, comme on l'entend trop souvent, face à la crise du logement. Elle peut se résorber, au moins partiellement, par la création de dynamiques vertueuses et l'utilisation d'un certain nombre de leviers liés au foncier, au financement et à la fiscalité.

Les deux crises mondiales que nous avons traversées nous ont ramené à des étiages qui nécessitent des mesures fortes. Nous sommes repassés en dessous des 400 000 constructions par an. Je rappelle que lorsque M. Jean-Louis Borloo avait lancé son plan, on avait atteint un niveau de 480 000 logements par an, contre 330 000 les années précédentes.

Le président Larcher a proposé d'organiser, en prélude à ce projet de loi, une conférence de consensus sur le logement, en association avec le ministre de la cohésion des territoires, M. Jacques Mézard, afin de préparer l'examen de ce texte. Cette démarche originale a été un succès. Elle a permis de recenser, sous la coprésidence de parlementaires du Sénat et de l'Assemblée nationale, de toutes les sensibilités politiques, de très nombreuses propositions.

À l'issue de ce cycle de concertation, le président du Sénat a mis en exergue deux axes forts devant guider les travaux du Parlement : d'abord, la nécessité d'adopter une approche pragmatique, qui prenne mieux en compte les besoins, les spécificités et les contraintes des territoires, ainsi que les expériences des acteurs de terrain, et en particulier des maires ; ensuite, l'urgence de simplifier notre droit, y compris s'agissant des nouveaux dispositifs proposés par le Gouvernement comme les grandes opérations d'urbanisme ou les projets partenariaux d'aménagement.

Je me suis donc attaché à vérifier que les attentes exprimées dans cette conférence de consensus étaient satisfaites totalement, ou partiellement, par ce projet de loi ELAN.

Or, force est de constater que ce texte n'est pas une loi de décentralisation : dès ses premiers articles il propose de créer de nouveaux outils permettant de dessaisir le maire de ses prérogatives, notamment en matière de permis de construire, dans le cadre de grandes opérations d'urbanisme (GOU), dont l'utilité reste d'ailleurs à démontrer après l'échec retentissant du précédent outil créé par un autre gouvernement : les opérations d'intérêt national (OIN).

Plusieurs autres articles dénotent une méfiance certaine du Gouvernement vis-à-vis des élus locaux, en particulier des maires. Il y a donc une volonté claire de recentralisation en prévoyant l'intervention du préfet à tous les niveaux et en minorant rôle du maire. Certains des amendements que je vous proposerai s'attacheront donc à rétablir le rôle essentiel du maire dans l'utilisation et la régulation du droit du sol et des autorisations d'urbanisme.

Ce texte est-il une loi de simplification ? Alors qu'il était initialement composé de 65 articles, le projet de loi transmis au Sénat en compte désormais 179. Je doute que nous puissions l'examiner en une semaine au cours du mois de juillet.

Si on examine ces articles dans le détail, on s'aperçoit qu'on crée de nouveaux outils toujours plus complexes alors même que nous n'utilisons pas toutes les potentialités de ceux qui existent déjà. Ce texte met également en place une mécanique autoritaire de regroupement et de financement des bailleurs sociaux, centralisée autour de deux grands acteurs : Action logement et la Caisse des dépôts et consignations. Cela ne va pas dans le sens de la proximité et des territoires. Nous ne sommes pas saisis de ces questions, la commission des affaires économiques donnera son point de vue.

Enfin, ce texte va-t-il être efficace et s'attaque-t-il aux vraies contraintes que rencontrent les maires, tous les jours sur le terrain, à savoir la contrainte financière - sur laquelle nous ne sommes pas saisis, puisque toutes les mesures fiscales et financières, notamment de regroupement des bailleurs sociaux, ont été prises dans la loi de finances, alors même qu'elles privilégient les zones tendues au détriment des autres territoires -, et la contrainte urbanistique, toujours plus lourde en raison des prescriptions environnementales qui raréfient considérablement le faisceau des possibles pour l'avenir ? Au final, on constate moins d'argent pour les bailleurs sociaux pour construire plus, et moins de terrains pour construire et développer les logements de toute nature : cela ne peut pas aller dans le sens de l'efficacité...

Ce projet de loi  comporte plusieurs grands axes : construire plus, mieux et moins cher, faire évoluer le secteur du logement social, répondre aux besoins de chacun tout en favorisant la mixité sociale et améliorer le cadre de vie.

Malgré une saisine au périmètre très large, tenant au grand nombre de dispositions entrant dans le champ de compétence de notre commission, je vous propose de nous concentrer sur les mesures nécessitant une intervention de notre part, sans nous attarder sur les dispositions n'appelant aucun commentaire particulier.

Mes propositions se veulent complémentaires des travaux réalisés par la commission des affaires économiques, saisie au fond du projet de loi, sous l'égide de sa rapporteure, notre collègue Dominique Estrosi-Sassone, ainsi que des travaux réalisés par nos collègues Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, et Jean-Pierre Leleux, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, ainsi que du groupe d'études « Mer et Littoral », présidé par Michel Vaspart dont nous avons repris les deux principaux amendements dans la continuité des précédents travaux de la commission, sous l'autorité du Président Philippe Bas.

Ainsi, alors même que la saisine de votre commission concerne 71 articles, je vous propose d'adopter seulement 34 amendements. Concernant la question particulière des ordonnances, que le Gouvernement a choisi d'utiliser tout azimut, les statistiques déjà présentées ici, montrent bien que cette méthode n'est pas forcément plus rapide qu'un véritable examen par le Parlement. En outre, il me semble que lorsque l'on touche au droit de la copropriété, par exemple, priver le Parlement de son pouvoir de législateur, alors même qu'il importe de garantir le bon équilibre dans les relations entre propriétaires et locataires, n'est pas pertinent.

En conclusion, ce texte comprend plusieurs points positifs pour accélérer la construction, notamment le renforcement de la lutte contre les recours abusifs. Toutefois, il manque d'un ingrédient essentiel : la confiance dans les territoires et dans les élus locaux, alors que plusieurs gouvernements précédents s'étaient appuyés sur cette confiance, pour résoudre la crise du logement.

M. François Pillet, président. - Il a été remis à chacun d'entre vous un tableau récapitulant les articles dont la commission est saisie pour avis et les propositions de notre rapporteur correspondantes. Cela doit nous permettre d'identifier rapidement ce qui doit être débattu.

M. Jean-Pierre Sueur. - Je voulais dire à notre rapporteur tout l'intérêt du propos qu'il vient de tenir. Je partage beaucoup de points, en particulier sur le caractère discutable en l'espèce des ordonnances.

Il y a un présupposé dans ce texte, concernant les logements sociaux, en vertu duquel une sorte de grande dérégulation serait bénéfique pour construire davantage dans ce pays. Je comprends que l'on cherche à soutenir des initiatives et à construire le plus de logements sociaux possibles. En revanche, il y a une manière de s'abstraire, et même de récuser et de supprimer des règles relatives à l'architecture, à l'urbanisme et au patrimoine qui pose problème. Les logements sociaux que nous devons construire doivent être de qualité ; On sait ce que coûte de réhabiliter des logements construits à la hâte. Je ne cherche pas à jeter la pierre sur qui que ce soit - si nous avions été élus dans les années 1950 ou1960, on aurait été très fiers d'inaugurer les logements sociaux construits à cette époque, pourtant critiqués ensuite. Un logement, donnant lieu à une première réhabilitation, une deuxième restauration, un troisième contrat, et une quatrième procédure avant qu'on décide de le démolir, coûte cher. Si l'on fait le calcul économique sur trente ans, on se rend compte qu'il vaut mieux faire des logements de qualité. Cela suppose de ne pas mépriser les règles relatives à l'architecture, à l'urbanisme et au patrimoine.

M. François Pillet, président. - Il faut donner acte à notre collègue Jean-Pierre Sueur de la fidélité de son attachement à cette question. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'il attire notre attention sur un sujet, sur lequel il ne serait pas très difficile d'avoir un accord global.

M. Pierre-Yves Collombat. - Merci de cet exposé parfaitement clair qui présente le problème. Je suis sûr que, vu la longueur du texte, cela devient plus compliqué dans les détails. Vous excuserez le caractère sommaire de mon intervention. Ces textes sont une vieille rengaine. Cela fait quelques années que je suis sénateur. À chaque changement de président, une nouvelle loi est proposée. Il est vrai qu'il s'agit d'un problème fondamental. En outre, la cherté des logements et des loyers a un impact sur les salaires. Du point de vue économique, agir pour faciliter le logement à des prix raisonnables est une façon de dynamiser et de permettre à notre pays d'être plus compétitif. Mais le diagnostic est suivi d'un ensemble de mesures en trompe l'oeil. L'une des plus classiques est la torture du code de l'urbanisme. Celui-ci sera bientôt aussi épais que le code des impôts. On supprime les mécanismes protecteurs pour laisser la place à la dynamique du marché, sans se rendre compte que cette dynamique va nous conduire à construire là où cela rapporte le plus : dans les centres-villes déjà embouteillés, ou à des conditions ne permettant pas aux gens présents sur le territoire d'y accéder. Une autre mesure classique consiste à retirer le pouvoir d'aménager aux communes et aux maires pour le confier à des gens qui seraient plus perspicaces, visionnaires, et dont on peut apprécier les grandes qualités à leurs résultats.

En revanche rien n'est dit sur la manière de solvabiliser la demande, il en est de même sur les modalités à suivre pour construire là où on en a besoin. Rien n'est dit non plus sur la manière dont l'État doit agir. Or, je ne vois pas comment faire autrement, pour financer et réaliser de grandes opérations d'aménagement dans certaines zones du pays. On ne peut se contenter de laisser pousser les maisons. Comme tout le monde, on fera face à ce nouveau texte, mais pour moi cela sera le onzième. Je vous avoue que je commence à me lasser.

M. François Pillet, président. - À l'image des propos de M. Sueur, je peux aussi souligner la constance de notre collègue Pierre-Yves Collombat, à la fois sur la forme et sur le fond.

M. Éric Kerrouche. - Sur la partie numérique du texte, plusieurs éléments doivent être soulignés à la fois dans ceux déjà disponibles et dans ceux qui manquent. D'autres commissions vont discuter de ce point. Seuls 11 millions de foyers sont éligibles à la fibre en France, auxquels s'ajoutent les 9 millions de clients du réseau SFR, et les 1,5 million qui sont raccordés par des réseaux d'initiative publique. Il est évident qu'il faut faire mieux pour le déploiement du très haut débit. Néanmoins, dans les propositions faites, certaines interrogations demeurent, notamment en ce qui concerne l'assouplissement de la loi « Abeille », sur le développement des réseaux hertziens. Au-delà de cela, bien que la proposition de notre collègue Patrick Chaize ait été reprise en partie, notamment la mise en place de sanctions des opérateurs et le renforcement des pouvoirs de l'autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), il manque un élément important : la capacité à sanctionner les opérateurs qui viendraient profiter des réseaux d'initiative publique, en développant un réseau parallèle, à côté d'un réseau public existant. J'espère que ce dernier sera repris dans la discussion au Sénat. Il y a donc des manques qu'il conviendra de combler lors du débat.

M. François Pillet, président. - Ce sont des débats très intéressants. Je vous remercie de les avoir inclus dans les débats de ce matin. Toutefois, la commission des lois ne s'est pas saisie des articles concernant ces questions.

Mme Brigitte Lherbier. - Je suis particulièrement intéressée par les questions relatives au permis de construire. Vous avez dit que l'on ôterait de plus en plus au maire la compétence de les délivrer ou non, en renforçant le rôle du préfet en la matière. Ce sont des points qui me semblent difficile à accepter. Est-ce que les associations des maires de France ont réagi ? Qu'est-il encore possible de faire, le cas échéant ?

M. Alain Marc. - Il s'agit plutôt d'une impression car nous ne sommes pas saisis pour avis de ce sujet. Nos gouvernants ont souvent la volonté d'uniformiser et cela me gêne beaucoup. On uniformise en exigeant qu'il y ait par opérateur 15 000 appartements minimum, et un opérateur par département. Or, il y a des zones qui sont très tendues, et d'autres qui ne le sont pas, notamment en milieu rural. Pour avoir été président bénévole d'une entreprise sociale pour l'habitat, fonction que la loi sur les cumuls de mandats m'a obligé d'abandonner, je préfère le « cousu main ». On travaille mieux. La proximité est gage d'efficacité. Je regrette qu'une fois de plus nous soyons obligés d'en passer par l'uniformisation des procédures. Cela me semble dommageable pour tous les territoires.

M. François Pillet, président. - Je vous remercie d'avoir formulé cette réflexion que nous sommes nombreux à nous être faite.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - J'ai discuté à plusieurs reprises avec Jean-Pierre Sueur, et nous avons un large accord sur ce qu'il a dit. Il a été maire, moi aussi, comme beaucoup d'entre vous. Choisir de légiférer par ordonnances ne me semble pas opportun pour un certain nombre de sujets fondamentaux qui ont font l'objet de nombreux débats et ont donné lieu à de nombreuses auditions dans le cadre de travaux sur des projets ou propositions de loi. C'est notamment le cas pour les pouvoirs de police administrative du maire dont je vais vous parler. Telle est également la position des élus locaux. Cela n'est pas heureux d'écarter le Parlement de ces débats, au moment où on parle des compétences du maire, premier acteur de proximité, et le mieux à même d'apprécier beaucoup de choses en particulier dans le monde de l'emploi et du logement.

Je partage également ses propos sur la qualité architecturale. Je vous proposerai un amendement à l'article 1er bis, qui préserve le rôle des architectes. Sur les autres points, c'est notre collègue Jean-Pierre Leleux, de la commission de la culture, également saisie pour avis, qui interviendra, et notamment sur la question du rôle et du moment où doivent intervenir les architectes des bâtiments de France, pour garantir une qualité architecturale.

J'ai préparé deux lois sur le logement. Je partage l'opinion de M. Collombat. Quels que soient les gouvernements, on parvient à un résultat satisfaisant lorsqu'on arrive à dégager un consensus, un accord entre les acteurs de terrain, toujours les maires, souvent les intercommunalités et les départements, les bailleurs sociaux et l'État. Si on ne les met pas autour de la table dans des contrats de partenariat territorialisés, on fait fausse route. Je suis également d'accord concernant vos propos sur la solvabilisation de la demande. C'est un sujet majeur. Malheureusement, un certain nombre de mesures ont été prises dans la loi de finances qui ne vont pas dans ce sens.

Notre collègue Jean-Pierre Chaize est saisi pour avis sur la partie numérique. Le sujet que notre collègue Kerrouche a abordé, sera repris par un amendement.

Nous avons auditionné beaucoup de monde : les acteurs du logement, mais également les représentants de tous les élus locaux. L'association des maires de France a une position claire et nette. Elle refuse le dessaisissement des maires, y compris pour les grandes opérations d'urbanisme. Cela m'amènera à vous présenter des amendements en ce sens.

Sur la restructuration du monde du logement social - question sur laquelle nous ne sommes pas saisis, mais que Mme Estrosi-Sassone traitera -, ce qui m'inquiète c'est que la restructuration projetée est guidée par un souci de recentralisation capitalistique. Il faut faire très attention à ne pas concentrer en une seule ou en quelques mains toute la puissance capitalistique du monde du logement social, asphyxié par ailleurs, au risque d'en perdre la vision territoriale. La plupart des organismes est dirigée par des élus locaux. Il en ressort des contrats territoriaux. Si c'est la logique capitalistique qui prédomine et que l'on va à Paris chercher des décisions, je ne suis pas sûr que l'on aille dans la bonne direction. Nous aurons ce débat en séance.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Je vous propose de supprimer l'arbitrage du préfet dans la qualification et la mise en oeuvre des GOU créées à la suite de projets partenariaux d'aménagement (PPA). Pour rappel, l'État avait lancé les OIN qui prennent place à une échelle décentralisée. L'article instituant les PPA et les GOU prévoit que l'on puisse mener des opérations revêtant un véritable intérêt communautaire, dans les grandes métropoles et intercommunalités et pour lesquelles l'avis du préfet pourrait transcender l'avis des communes. Or, je ne vois pas pourquoi ce dernier devrait intervenir dans la relation entre la commune et l'intercommunalité. Il y a déjà des OIN qui donnent la possibilité à l'État intervenir, s'il le souhaite. L'amendement COM-212 retire donc ce rôle au préfet lorsqu'une commune ne veut pas d'une grande opération d'urbanisme sur son territoire. Il y substitue une décision prise à la majorité qualifiée des communes concernées afin de dégager un consensus, au nom de l'intérêt communautaire.

M. François Pillet, président. - Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrick Kanner. - Sur ce question visant à redonner du pouvoir à l'État et donc à recentraliser de fait, nous sommes tout à fait favorable à la suppression de cet article.

M. François Pillet, président. - L'amendement ne supprime pas totalement l'article, mais le modifie.

M. Alain Richard. - J'ai une appréciation un peu différente des difficultés qui peuvent s'élever entre communes et intercommunalités. Il y a des situations de confrontations, d'objectifs ou d'intérêts à l'intérieur des intercommunalités, qui sont très fortes. La plupart du temps elles n'entrent pas dans le débat public. Il me semble qu'il y a une lacune dans notre droit territorial, qui devrait prévoir la possibilité d'une forme d'arbitrage dans ces conflits internes à l'intercommunalité. Quand il s'agit d'une grande opération, il y a des situations de communes mises à l'écart par une majorité de fait à l'intérieur d'une intercommunalité, alors même que les décisions concernent leur propre territoire. Nous connaissons tous de tels cas, qui ne sont d'ailleurs pas toujours la conséquence d'une alliance politique. Je pense que le rôle d'arbitrage du préfet est préférable à celui d'une majorité éventuellement composite de l'intercommunalité. Je sais que ce n'est pas à la mode. Mais le fait de croire qu'à l'intérieur d'une intercommunalité, tout se passe toujours de manière équitable et transparente est un survol de la réalité.

M. Didier Marie. - Suite à l'intervention de notre collègue Alain Richard, je souhaite indiquer que l'on voit depuis quelques temps, dans de nombreux domaines, une volonté de recentralisation et de renforcement du pouvoir du préfet. S'il est un point sur lequel cela ne se justifie pas, c'est bien celui-ci. La relation entre la commune et l'intercommunalité doit relever de la collégialité entre l'ensemble des communes membres. On sait pertinemment que, de temps à autre, le préfet peut de façon informelle jouer le médiateur entre les élus. La décision finale doit relever de l'intercommunalité. Le choix de la majorité qualifiée ou de la majorité simple est un autre débat. Le rapporteur propose de recourir à la majorité qualifiée : Pourquoi pas ? Mais, en tout état de cause, les difficultés inhérentes au fonctionnement des intercommunalités doivent se gérer en leur sein.

M. Patrick Kanner. - Aucun système n'est parfait dans ce genre de conflit. Mais, très honnêtement, je préfère espérer des intercommunalités et des communes qui en sont membres, que d'une consigne du ministre de l'intérieur par l'intermédiaire du préfet.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - On a fait les lois de décentralisation. J'ai, comme beaucoup d'entre vous, une longue pratique de l'intercommunalité. J'ai ainsi été pendant dix ans le vice-président de Pierre Mauroy, dans le cadre d'un gouvernement consensuel de l'intercommunalité de la métropole de Lille où nous avons toujours résolu les problèmes entre communes du territoire. On a toujours trouvé la voie d'un intérêt communautaire ensemble. Je propose la majorité qualifiée pour encourager l'esprit de consensus et non pas pour qu'une part de l'assemblée force la main de l'autre. De la pratique que j'ai, cela s'est toujours très bien passé, dans l'esprit des lois de décentralisation de 1982-1983.

L'amendement COM-212 est adopté.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-213 rétablit le maire dans son pouvoir de délivrer les permis de construire dans le périmètre d'une GOU et revient sur le fait de confier le pouvoir de délivrance au président de l'EPCI.

L'amendement COM-213 est adopté.

Article 1er bis

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-214 répond à une préoccupation de notre collègue Jean-Pierre Sueur. Je réintroduis le rôle de l'architecte afin qu'il ne soit pas court-circuité dans l'élaboration d'un projet d'aménagement de lotissement.

M. François Pillet. - Je suis convaincu que cet amendement fait consensus au sein de la commission.

L'amendement COM-214 est adopté.

Article 3

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-215 a le même objet que l'amendement COM-213. Il vise à rétablir la compétence de droit commun du maire en matière de délivrance de permis de construire dans la périmètre d'une GOU.

L'amendement COM-215 est adopté.

Article 5 quater

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-216 vise à coordonner la rédaction de l'article 5 quater avec les dispositions de la proposition de loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination, en cours d'examen.

L'amendement COM-216 est adopté.

Article 12

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-217 répond à une demande des associations d'élus locaux, et en particulier de l'association des maires de France. Il vise à allonger le délai pendant lequel un plan d'occupation des sols (POS) redevient applicable en cas d'illégalité du plan local d'urbanisme (PLU). Cet amendement propose ainsi de faire passer le délai de validité de l'ancien POS de 18 mois à 24 mois afin de donner le temps nécessaire à l'élaboration d'un nouveau document d'urbanisme.

L'amendement COM-217 est adopté.

Article 12 bis

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-218 supprime un article créant un nouvel objectif du développement durable en matière d'urbanisme et une nouvelle orientation d'aménagement et de programmation pour les plans locaux d'urbanisme.

Nous estimons qu'il appartient aux élus de déterminer dans les documents d'orientation et d'objectif (DOO) des schémas de cohérence territoriaux (SCoT) les grandes orientations nécessaires à l'ensemble du territoire du SCOT ou à une partie de celui-ci. On ne doit pas imposer indistinctement telle ou telle contrainte. C'est aux élus d'apprécier.

L'amendement COM-218 est adopté.

Article 12 quinquies

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-219 est l'un des deux amendements que nous avons travaillé avec notre collègue Michel Vaspart président du groupe d'études « Mer et littoral » et le Président Philippe Bas. Il facilite les modifications de PLU et de SCOT qui seront rendues nécessaires par le nouveau statut que le projet de loi ELAN donne à ces documents au regard de la loi « Littoral ». Cet amendement vise également à allonger la période couverte par le droit transitoire prévu par l'article 12 quinquies du projet de loi. À partir du moment où le SCOT et le PLU deviennent des instruments d'application de la loi « Littoral », il est normal de laisser aux collectivités le temps nécessaire pour d'adapter leurs outils.

M. Didier Marie. - J'alerte sur le détricotage éventuel de la loi « Littoral ». On sait qu'une proposition de loi portant sur le trait de côte a suscité beaucoup de débats dans notre assemblée. Je suis de ceux qui pensent qu'il faut faire très attention aux modifications portées à la loi « Littoral » et suis réservé sur cet amendement.

M. Éric Kerrouche. - Je partage la position de notre collègue Didier Marie.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Un travail de fond a été mené au sein du groupe d'études par nos collègues de tous bords et Philippe Bas qui s'est beaucoup investi sur ce dossier. Je ne pense pas non plus qu'il faille détricoter la loi « Littoral ». C'est la raison pour laquelle je n'ai retenu que deux amendements qui font suite à ces travaux alors que d'autres propositions vont plus loin. Ces deux amendements me semblent raisonnables.

L'amendement COM-219 est adopté.

Article 12 sexies

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-220 procède du même raisonnement que pour l'amendement précédent.

L'amendement COM-220 est adopté.

Article 13

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-221 peut sembler technique car il vise la question de la compatibilité des PLU avec les SCOT et l'empilement de documents d'urbanisme. Dans mon rôle de vice-président à l'aménagement d'une grande métropole, j'ai déjà élaboré des documents de ce type : un schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme (SDAU) et un PLU, puis un SCOT et à nouveau un PLU. Dans une collectivité qui compte 1,2 million d'habitants, ce n'est pas quelque chose de facile. Ayant pratiqué tout cela, j'essaye de rendre les choses plus simples, plus faciles, et surtout moins longues. Il est, en effet, nécessaire de respecter les procédures de concertation, faisant appel à la participation citoyenne dans les enquêtes publiques. Mais lorsque des sous-articles imposent des choses à d'autres sous-articles - je viens d'en avoir l'expérience dans un avis des services de l'État - je pense que l'on va trop loin.

L'idée est ici de dire que le lien de compatibilité du PLU avec le SCoT doit s'apprécier, d'une part, au regard du document d'orientation et d'objectifs (DOO) du SCoT et, d'autre part, le projet d'aménagement et de développement durable (PADD) du PLU et les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) du PLU qui concernent l'ensemble du territoire couvert par ce PLU. Je propose donc qu'on limite les compatibilités à l'aspect stratégique des choses, entre les documents stratégiques du SCOT et du PLU. Pour le reste, on laisse plus de marge de manoeuvre aux élus locaux.

M. François Pillet, président. - Nous vous remercions pour vos explications très claires. Dans cette jungle d'acronymes, il est très difficile de s'y retrouver.

Mme Françoise Gatel. - A-t-on bien une cohérence avec le souci de simplification en matière urbanisme qu'il y a avait au centre de la proposition de loi portant accélération des procédures et stabilisation du droit de l'urbanisme, de la construction et de l'aménagement ? Elle portait notamment sur la hiérarchisation des documents d'urbanisme et les délais pour les remettre en cohérence en cas de révision d'un document, pour sécuriser les maires et éviter le chamboule-tout permanent. Il s'agissait également de rassurer les maires face à la multiplication de procédures menées par des individus qui porteraient, selon eux, l'intérêt général au plus haut.

M. Alain Richard. - J'approuve cet amendement, et je suis la position du rapporteur.

M. André Reichardt. - Dans cette jungle d'acronymes, il est appréciable d'avoir un rapporteur qui sait de quoi il parle. Je voudrais, une fois de plus, souhaiter beaucoup de plaisir à ceux qui vont nous succéder sans avoir de compétence locale. Seule mon expérience de maire, et le fait d'avoir été confronté à ces questions en tant que vice-président d'une agglomération, me permettent de comprendre ce dont on parle.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'article 13 a pour objet d'habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances. Cet amendement répond à une préoccupation de simplification. Pour avoir eu recours à deux cabinets d'avocats, ainsi qu'aux services juridiques de mon agglomération qui ont travaillé sur tous les risques de contentieux, ce que je propose est juridiquement possible et vise à simplifier la vie des maires.

L'amendement COM-221 est adopté.

Article 16

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-222 supprime, au sein de l'article 16, une mention faite au droit de l'Union européenne qui se révèle inutile et trop floue.

M. Pierre-Yves Collombat. - Que vient faire l'Union européenne dans ce dispositif ?

M. Alain Richard. - Les mécanismes de simplification permettent de déroger au droit interne, mais pas à celui de l'Union européenne.

M. Pierre-Yves Collombat. - Cet article vise donc à réaffirmer la prévalence du droit de l'Union européenne sur notre droit.

M. Alain Richard. - C'est l'application des traités que nous avons signés depuis 60 ans.

M. Pierre-Yves Collombat. - Nous sommes les vassaux du droit européen.

M. Jean Louis Masson. - Ayant une sympathie très limitée pour l'Union européenne, je suis favorable à cet amendement. Toutefois, ce n'est pas parce que l'on supprime l'article, que l'on va échapper à l'application du droit européen. De toute manière, nous sommes « obligés » - tant que l'on se laissera faire - d'appliquer le droit européen. Je ne vois pas pourquoi on reparle de l'Union européenne.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - S'il n'est pas d'application directe, le droit européen doit être transposé en droit français. Et lorsqu'il l'est - avec des aspects plus ou moins normatifs d'ailleurs -, les normes nationales de transposition s'appliquent au même titre que les autres normes nationales. Pourquoi donc demander des pièces supplémentaires afin de vérifier le respect du droit de l'Union européenne ? C'est superfétatoire.

L'amendement COM-222 est adopté.

Article 16 bis

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-223 est un amendement rédactionnel.

L'amendement COM-223 est adopté.

Article 17

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-224 permet que l'outil de téléprocédure, qui vise à dématérialiser le traitement des demandes d'urbanisme, soit développé au niveau de l'intercommunalité. Toutes les communes ne sont pas en capacité de le faire toutes seules.

L'amendement COM-224 est adopté.

Article 17 bis

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-225 vise à supprimer l'article 17 bis, car la diffusion d'informations cadastrales n'est pas opportune au regard des exigences de protection des données personnelles et du secret fiscal.

L'amendement COM-225 est adopté.

Article 17 ter

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-226 vise à supprimer l'article 17 ter, qui prévoit de créer un guichet unique de la publicité foncière, car cette mesure relève de la compétence du pouvoir réglementaire. Un projet en ce sens est d'ailleurs en cours à la Chancellerie.

L'amendement COM-226 est adopté.

Article 23

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-227 harmonise les horaires des contrôles administratifs de la conformité de travaux aux règles d'urbanisme avec les horaires applicables notamment en matière de perquisition et de visites domiciliaires.

M. François Pillet, président. - C'est une excellente initiative légistique.

L'amendement COM-227 est adopté.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-228 supprime deux alinéas inutiles.

L'amendement COM-228 est adopté.

Article 24

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'article 24 est un article important pour la lutte contre les recours abusifs. Nous avons auditionné longuement Mme Maugüé, conseillère d'État, qui a présidé récemment un groupe de travail chargé de réfléchir sur cette question. Elle a fait un travail très important. Ce qui figure dans le projet de loi va dans le bon sens. L'amendement COM-229 renforce encore le dispositif. C'est l'expérience de maire qui parle. Bien évidemment, les riverains concernés par un projet ont un droit au recours. Il en est de même pour les associations de défense de l'environnement. Toutefois, nous connaissons trop d'associations spontanées qui se créent subitement, lorsque le projet arrive. Quand une association se crée, nous exigeons souvent un an d'existence, pour vérifier son travail, avant de lui accorder des subventions ou de lui prêter des locaux. Je propose qu'une association puisse agir en justice à partir du moment où on a pu vérifier qu'elle agissait réellement sur le terrain, et n'était pas seulement créée pour s'opposer à la construction d'un bâtiment.

M. Jean Louis Masson. - Je pense que les moyens mis en oeuvre sont très déséquilibrés. Les promoteurs immobiliers brassent des sommes colossales. Le petit citoyen se retrouvant en face est écrasé. En outre, l'immobilier est une source de trafics financiers, de collusion entre certains élus locaux et les promoteurs.

M. François Pillet, président. - Ne généralisons pas.

M. Jean Louis Masson. - Il faut dire la vérité, et je la dis.

M. François Pillet, président. - C'est apparemment une vérité que vous seul constatez.

M. Jean Louis Masson. - Cela se retrouve en particulier dans le département de la Moselle. Je crois que vouloir empêcher des citoyens en leur faisant prendre des risques financiers excessifs n'est pas bon. La démocratie, c'est aussi que le petit puisse se défendre contre le gros, au niveau financier, et contre tous les trafics qu'il peut y avoir. Je suis contre cet article et cet amendement.

Mme Catherine Di Folco. - N'avons-nous pas déjà examiné cette question à l'occasion de nos travaux sur un projet ou proposition de loi ?

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Oui mais le texte que nous avons adopté n'est pas encore entré en vigueur.

Mme Catherine Di Folco. - J'apprécie que nous ayons de la constance sur ce sujet-là, car il est majeur.

Mme Françoise Gatel. - Notre collègue Catherine Di Folco a raison. Ce sujet a été évoqué très sérieusement et avec beaucoup d'affirmation dans le cadre de la proposition de loi « simplification des procédures d'urbanisme », mais elle n'a pas franchi les portes de l'Assemblée nationale. Je souligne avec intérêt et grande satisfaction la proposition de notre rapporteur.

Sur les communes littorales en Bretagne, il existe un sport de la part d'individus qui se regroupent en pseudo-associations de protection du patrimoine et qui systématiquement, lorsqu'il y a des opérations de rénovation urbaine, font des recours. Leur but est que les promoteurs soient amenés à faire un don à cette association, pour un prétexte confus et éviter des recours abusifs. Ces associations sont occultes, elles ne rendent compte de rien. Si tout individu a le droit de faire un recours, il faut limiter les recours abusifs.

J'ai dans ma commune un particulier qui, depuis neuf ans, ne cesse de faire recours sur recours contre la commune dans le cadre d'un projet de démolition-reconstruction de logements sociaux, au seul prétexte que cela le dérange.

Je ne suis pas du tout d'accord avec ce que M. Jean Louis Masson a dit. On ne peut pas laisser quelqu'un tenir des propos aussi généraux. Il y a sans doute des abus. Mais il faut être affirmatif sur la vertu de la grande majorité des élus.

M. Alain Marc. - Je ne peux que réagir, cher collègue, après vous avoir entendu parler de collusion entre les élus locaux et les promoteurs. Il y en a peut-être, mais franchement, cela fait 24 ans que je suis conseiller départemental, je n'ai jamais assisté à cela. Aujourd'hui, on vérifie le patrimoine des élus. On ne pas peut pas laisser dire cela, d'autant plus que nous sommes les représentants des collectivités locales. Personnellement, je ne serais pas le représentant des élus locaux, s'ils avaient tous le défaut d'être corrompus. Pour moi, ce sont des propos assez insupportables.

Pour ce qui est de cet amendement, je trouve qu'il est de très bon aloi. Il y a trop d'associations qui se créent de manière opportuniste, certaines peut-être pour obtenir des compensations financières du promoteur immobilier, mais d'autres servent les intérêts des promoteurs immobiliers concurrents qui, sous le couvert de ces associations, essayent d'entrer dans le jeu.

M. Henri Leroy. - Je m'associe à Mme Gatel et M. Marc. Il n'y a pas que le littoral breton qui est concerné. Sur le littoral des Alpes-Maritimes, nous constatons la même pratique. Ces associations cherchent à obtenir des compensations financières contre le retrait de leurs recours. C'est très fréquent. Enfin, les rares élus qui ont manqué à leurs missions ont tous été quelque part écartés.

M. Éric Kerrouche. - Je souhaite dire à M. Masson que faire des généralités en partant éventuellement de cas particuliers est contre-intuitif et contre scientifique.

L'espèce présentée par Mme Gatel a essaimé en Nouvelle-Aquitaine où nous connaissons aussi ce genre d'associations. C'est un très bon amendement.

M. François Bonhomme. - Je vais dans le même sens que les propos précédents. Même s'il y a des zones plus soumises à ce genre de phénomène, je constate une monétisation des recours. Je pense que cet amendement va vers un rééquilibrage. Je ne suis même pas sûr que le délai d'un an soit suffisant pour rééquilibrer véritablement cette situation.

Mme Maryse Carrère. - Le département des Hautes-Pyrénées n'échappe pas à ce que vous avez décrit. Dans les départements à enjeux environnementaux forts, nous sommes soumis à ces pressions des associations. Je suis favorable à cet amendement, mais ne suis pas sûre que cela suffira. En effet, si on limite le recours aux associations créées depuis plus d'un an, les personnes concernées feront porter leur recours par des associations plus importantes au niveau national. C'est ce qui se passe dans les Hautes-Pyrénées. Ce ne sont jamais les petites associations locales qui portent les recours, mais une association nationale qui a plus de surface financière.

Je serais également favorable à une limitation des délais de recours, de leur nombre dans le temps ainsi qu'au renforcement de la pénalisation financière des associations qui s'en sortent souvent bien, lorsqu'elles se livrent à des recours abusifs.

M. Alain Richard. - L'amendement que propose le rapporteur règle un problème : celui des associations créées à l'occasion d'un projet de travaux. Le délai préalable d'un an, qui se calcule, je suppose, par rapport à la date d'adoption ou de publication du permis, me paraît raisonnable. Il est clair que lorsqu'un permis est publié, l'opération est déjà perceptible dans l'environnement. Il y a forcément des personnes qui laissent filtrer des informations. L'association est créée plusieurs mois avant la délivrance du permis.

En revanche, à mon avis, on ne pourrait pas introduire un délai beaucoup plus long. On s'opposerait alors au droit au recours, en l'occurrence celui d'une personne morale. Le délai préliminaire est bien calculé. En revanche, par rapport aux associations déjà constituées et « tirant sur tout ce qui bouge » dans une localité, je ne vois pas d'autres outils que ceux existant déjà dans le code de justice administrative. Je pense notamment au pouvoir qu'a le président du tribunal administratif de clore l'instruction et donc de statuer assez vite sur le recours. L'association qui perd doit supporter les frais de procédure de la collectivité. En outre, le tribunal a la possibilité de prononcer une amende pour recours abusif. Il est vrai que les tribunaux administratifs le font avec prudence, mais ils en ont le droit.

Quant aux transactions financières réalisées entre les promoteurs et les associations, on a adopté, sur la base d'une précédente enquête du Conseil d'État réalisée par M. Labetoulle, un système de contrôle des donations faites à la suite d'un procès ou d'un désistement. Il serait utile de demander au Gouvernement quelle évaluation on peut faire de ces expériences. Y a-t-il eu des cas où des donations pour désistement de l'association ont pu être détectées et ont donné lieu à des sanctions ?

M. François Pillet, président. - Notre collègue Alain Richard a eu raison de préciser l'incidence de la procédure administrative. Les parties ont la possibilité d'inviter le juge à exercer tous ces pouvoirs : donner des délais limites pour le dépôt des mémoires et pour statuer dans un délai très court. Les parties ont un rôle à jouer.

M. Jean Louis Masson. - Je souhaite faire une mise au point. Je n'ai pas pour habitude d'accepter que l'on me fasse dire ce que je n'ai pas dit. Contrairement à ce que certains collègues ont prétendu, je n'ai jamais dit que tous les élus locaux étaient corrompus. Ce que j'ai dit, et je le maintiens, c'est qu'il y a des élus locaux qui sont corrompus, notamment là où il y a de la pression immobilière, dans les grandes villes et agglomérations, ou en bordure de zones touristiques. Peut-être que vous ne voyez pas les mêmes gens que moi, mais ce qu'il y a de sûr, c'est qu'il y en a. Je maintiens ce que j'ai dit et je regrette que certains aient déformé mes propos.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Je souhaite dire mon accord avec ce que vient de dire Alain Richard. L'article 24 est un article important. Le Gouvernement a d'ailleurs repris une large partie des propositions formulées par le groupe de travail présidé par Mme Christine Maugüé. Il prévoit ainsi d'imposer des délais plus courts, de pouvoir qualifier plus facilement le recours d'abusif, de cristalliser les moyens pour éviter qu'une association ajoute un moyen à un autre moyen faisant durer la procédure pendant des années. Cet article va dans le bon sens.

On a regardé ensemble comment aller plus loin. Un décret est en cours de préparation, dont nous avons discuté avec elle et avec la Chancellerie. En tant que rapporteur, j'ai la certitude que de nombreux problèmes que vous avez soulevés vont être réglés par ce biais, comme par exemple le renforcement des sanctions financières. J'ai essayé de rajouter un ou deux points. Mais, on ne peut pas aller plus loin que le délai d'un an d'existence pour les associations qui souhaitent engager une action. On doit être raisonnable et préserver le droit au recours face à des opérations de ce type.

L'amendement COM-229 est adopté.

M. Alain Richard. - Il y a des associations nationales qui n'existent qu'en tant qu'agence de contentieux de toutes les associations locales de France et de Navarre.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - M. Richard me permet de faire la transition vers l'amendement COM-230. Aujourd'hui, dans la loi, il est écrit que les associations de protection de l'environnement agréées sont présumées agir dans la limite de la défense de leurs intérêts légitimes. L'article propose de remplacer cette notion en prévoyant qu'elles sont présumées ne pas adoptées de comportement abusif. Pourquoi seraient-elles présumées ne pas adopter de comportement abusif ? Une telle préemption n'est pas justifiée, et elle n'est pas irréfragable. Donc elle aurait peu d'effet. Je propose de supprimer cette présomption.

L'amendement COM-230 est adopté.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Lorsque vous avez à appliquer un permis de construire accordé en application d'un document d'urbanisme - le plus souvent un POS ou un PLU - et qu'ultérieurement le POS ou PLU est annulé, c'est un problème de sanctionner quelqu'un qui a respecté ce document d'urbanisme - et s'est soumis à de nombreuses restrictions -, parce que celui-ci est annulé. L'amendement COM-231 traduit cette problématique. Pour autant, par rapport à la proposition du groupe de travail présidé par Mme Christine Maugüé, j'ai ajouté la notion de bonne foi. Il ne faut pas que tel ou tel promoteur ou bailleur se dise que le PLU va être annulé et qu'il en profite pour agir avant.

L'amendement COM-231 est adopté.

Article 40 bis

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-232 est rédactionnel.

L'amendement COM-232 est adopté.

Article 41 bis

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Les huissiers de justice se sont manifestés pour avoir accès aux boites aux lettres. La loi prévoit actuellement qu'ils ont accès à l'ensemble des parties communes, mais le décret qui devait préciser cette disposition n'a jamais été pris, la privant ainsi de tout effet. Avec l'amendement COM-233, on leur donne accès aux boites aux lettres, afin qu'ils puissent faire leur métier, mais on leur laisse aussi l'accès aux parties communes car la Chancellerie serait désormais en mesure de prendre le décret manquant du fait de la création par la loi « ALUR » d'un registre des copropriétés, permettant aux huissiers d'identifier les syndics compétents pour leur autoriser l'accès aux parties communes.

L'amendement COM-233 est adopté.

Article 46

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Je touche à la loi « SRU » avec une main tremblante, comme dirait le Président Gérard Larcher. L'amendement COM-234 concerne l'hébergement d'urgence. Nous venons de voter le projet de loi « asile et immigration ». Lorsqu'une commune a le courage d'accueillir sur son sol des populations en situation de précarité, cela ne compte pas dans le quota de la loi « SRU ». Je trouve cela regrettable. Certes, ce n'est pas du logement social proprement dit, mais c'est de l'hébergement et cela nécessite que le maire fasse un certain nombre d'efforts. J'aurai une autre proposition concernant la loi « SRU » tout à l'heure. Mon souci a été de ne pas la détricoter, d'autres le proposeront. Le projet de loi « asile et immigration » a été voté hier. Je ne fais que reprendre ce que nous avons approuvé.

M. Didier Marie. - En cohérence avec le vote de notre groupe sur cette disposition du texte précité, nous ne soutiendrons pas cet amendement. D'autre part, s'il est utile de souligner l'effort des communes et de leurs maires, qui acceptent d'accueillir sur leur sol des réfugiés, il n'en reste pas moins que, par définition, ces présences sont inscrites dans une durée donnée et ne sont pas permanentes. Cela ne correspond pas à du logement social. On considère que cela n'a pas à être comptabilisé à ce titre.

M. Patrick Kanner. - Sans vouloir être facétieux, je ne suis pas certain que les communes qui déjà n'acceptent pas des logements sociaux en nombre suffisant sur leur territoire, accepteraient des réfugiés.

Si vous ouvrez la boite de Pandore, en intégrant ces structures dans les quotas, vous aurez d'autres demandes du même type : pourquoi un centre social ne serait-il pas considéré comme un élément concourant à l'application de la loi « SRU » ?

La loi SRU est volontairement rigide, même si nous l'avons assouplie avec la loi « égalité et citoyenneté », pour permettre du logement permanent. Un centre d'hébergement d'urgence, nous l'espérons, n'est pas permanent. Il y a 220 communes en France qui sont aujourd'hui carencées par rapport aux textes. Je regrette que le Gouvernement ait décidé, il y a deux mois, de supprimer le délégué interministériel à la mixité sociale dans l'habitat, fonction occupée par notre ami Thierry Repentin. Sans aller jusqu'à parler de totem de la République, la loi « SRU » est un engagement fort, qui n'a jamais été remis en cause depuis son adoption. Même des gouvernements qui auraient pu être tentés de le faire ne l'ont pas fait en raison des réserves du monde associatif. Je m'associe donc pleinement aux propos de notre collègue Didier Marie.

M. Pierre-Yves Collombat. - Je soutiens l'amendement du rapporteur. Si les communes carencées ne créent pas de centres d'accueil, où est le problème ? Il s'agit d'accueillir des populations qu'en général tout le monde refuse. J'ai du mal à comprendre.

Quant à la rigidité de la loi « SRU », elle impose de construire des logements sociaux, même s'il n'y a pas de demandes. J'ai des exemples à foison de logements sociaux vides.

Mme Brigitte Lherbier. - Pour répondre à M. Kanner, redéfinir le logement social va être nécessaire. Les centres éducatifs renforcés pour les mineurs délinquants, les centres d'hébergement pour les sortants de prison sont autant de contraintes sociales et d'organisation pour une ville. C'est bien dommage qu'ils ne soient pas pris en compte.

M. Alain Richard. - Je faisais partie du Gouvernement qui a fait voter la loi « SRU ». Cela ne m'empêche pas d'en voir certaines imperfections qui me font penser aux mécanismes de planification d'une autre puissance planétaire, à une autre époque.

Pour autant, je ne pense pas qu'il faille la démanteler ou la fragiliser. Lorsqu'un établissement préexistant est transformé en centre d'hébergement et de réinsertion sociale, les équivalents logements sont comptés au titre des quotas imposés par la loi « SRU ». Des communes sont en train de se mettre en conformité avec la loi, et rencontrent de grosses difficultés, que les services du ministère du logement refusent de prendre en compte. Il existe des dérogations et des atténuations aux objectifs fixés dans la loi « SRU » depuis 2000, que le ministère du logement s'ingénie à neutraliser avec beaucoup d'énergie et d'efficacité. Par exemple, même si la charge administrative et financière de présence d'un centre d'hébergement d'urgence (CHU) ou d'un centre d'accueil et d'orientation n'est pas tout à fait la même que celle de logements sociaux, donner une petite prime aux communes, qui facilitent la tâche de l'État, en leur donnant ce soulagement temporaire par rapport aux contributions qu'elles sont amenées à payer, est dans l'esprit de la loi SRU.

L'amendement COM-234 est adopté.

Article additionnel après l'article 46

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Après discussion avec nos autres collègues, nous n'avons pas voulu ouvrir la boite de Pandore. Je comprends le raisonnement de M. Kanner. Lorsque j'ai été ministre en charge du logement, j'ai fait respecter la loi « SRU ». Mais nous essayons de voir la réalité du terrain. Il ne faut pas avoir de procès d'intention. Nous pensons que beaucoup de problèmes de la loi SRU se gèreront au niveau des flux de création de nouveaux logements. Or, aujourd'hui, les sanctions sont fonction du niveau des « stocks » de logements. On carence des communes qui, bien souvent, n'ont pas toujours la possibilité d'accueillir de nouveaux logements sociaux. Elles sont de bonne foi, mais on leur impose des contraintes environnementales ou urbanistiques qui les empêchent de procéder à des constructions. C'est au niveau de l'intercommunalité que cela doit se gérer. Il y a une question de territoire pertinent.

J'en ai discuté avec M. Mézard. Pour pouvoir avancer à ce sujet, nous proposons de ne pas toucher au totem du stock, ni à l'objectif de 25 % de logements sociaux à atteindre, qui est pourtant un objectif très difficile. Mme Estrosi-Sassone va d'ailleurs proposer d'allonger le délai pour des cas spécifiques. Nous ne touchons pas non plus au dispositif de « carençage ».

L'amendement COM-235 tend à permettre aux communes de mutualiser leurs obligations de quotas « SRU » à l'échelle de l'intercommunalité. L'idée est donc que, au sein d'un territoire donné, il soit possible de faire la somme des quotas de logements que chaque commune aurait dû atteindre individuellement, dans des conditions précises, et sans pouvoir imposer de construire de nouveaux logements sociaux à certaines communes remplissant déjà leurs objectifs. S'il le souhaite, l'EPCI, qui est souvent le prolongement des communes, pourra alors mutualiser ces objectifs par l'intermédiaire d'un contrat intercommunal de mixité sociale.

Notre collègue Dominique Estrosi-Sassone, rapporteure de la commission des affaires économiques qui est saisie au fond, va faire une proposition voisine, sur la base d'un contrat liant directement les communes et l'État. Nos collègues de l'Union centriste vont, en outre, porter une autre proposition sur les intercommunalités atteignant l'objectif de 25 % de logements sociaux.

Le dispositif que je propose de mon côté prévoit que le contrat intercommunal de mixité sociale reçoive l'agrément du représentant de l'État. Là encore, on ne peut pas proposer une mutualisation à l'échelle intercommunale sans qu'il y ait, d'une part, l'accord de l'intercommunalité, d'autre part, un consensus politique et, enfin, un droit de regard du préfet sur le dispositif.

Par ce dispositif, nous ne contournons pas la loi « SRU » car nous ne proposons pas de considérer le taux de logements sociaux à l'échelle de l'EPCI mais bien la somme des objectifs auxquels aurait dû se soumettre chaque commune membre.

Mme Catherine Di Folco. - Cet amendement est très intéressant mais pourquoi limitez-vous cette disposition aux EPCI de plus de 50 000 habitants, qui comportent une commune de plus de 1 500 habitants ?

M. Patrick Kanner. - C'est l'article 55 de la loi SRU qui le prévoit. Ce sont les seules communes concernées par la loi « SRU ».

Mme Catherine Di Folco. - Pas seulement.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Notre collègue Catherine Di Folco n'a pas tort. On a deux cas de figures. Il y a tout d'abord les communes prévues par l'article 55 de la loi « SRU ». C'est le seuil que j'indique. Il s'agit souvent des communautés urbaines ou d'agglomération. Mais il y a aussi des communes nouvelles qui vont entrer dans le champ de la loi pour des questions de seuil de population. Elles ne sont effectivement pas couvertes par mon amendement. Je rectifie donc mon amendement pour tenir compte de son observation.

M. Patrick Kanner. - Nous avons déjà assoupli la loi « SRU » par la loi « égalité et citoyenneté », avec la création des contrats de mixité sociale, qui tiennent compte de la pression en termes de logements. Cela répond aux phénomènes de logements sociaux qui seraient vides. Nous n'imposons plus, et c'est le préfet qui en est garant, des mesures qui ne seraient pas utiles pour la demande de logements sociaux insatisfaite.

Avec cet amendement, la « main tremblante » que vous évoquiez a chuté. On exonère de fait des communes au travers de l'intercommunalité.

L'intercommunalité de la métropole lilloise prise globalement répond aux objectifs de la loi « SRU ». Il y a des villes comme Lille qui ont 35 ou 40 % de logements sociaux sur leur territoire. Votre amendement constitue une remise en cause des principes de la loi « SRU ». Nous voterons contre cet amendement qui crée la plus grande remise en cause des principes mêmes de la loi de 2000. C'est votre choix. Ce ne sera pas le nôtre.

M. Didier Marie. - On peut très bien se trouver face à des intercommunalités qui ont déjà les 25 % voire plus de logements sociaux sur leur territoire. J'entends le raisonnement du rapporteur. Mais, le principe de mutualisation pourrait conduire à geler les situations existantes sur le territoire de l'intercommunalité. Un des principes recherchés par bon nombre d'entre elles est de rééquilibrer entre les communes membres la répartition des logements sociaux. Je suis dans une commune où il y a plus de 60 % de logements sociaux. Notre plan local de l'habitat nous interdit d'en construire de nouveaux et nous soumet à des obligations de diversification. Mais si, à terme, nous diminuons le nombre de logements sociaux, il faudra bien que ceux-ci, à l'échelle intercommunale, arrivent ailleurs. Il y a donc une nécessité que les communes qui n'ont pas atteint le seuil des 25 % tendent vers celui-ci. Si on considère que l'intercommunalité a atteint ce seuil, on gèle toute nouvelle répartition. Je pense que cela est dangereux et contraire à l'esprit de la loi « SRU ». 

M. Éric Kerrouche. - Je crains que, malgré les bonnes intentions affichées, on arrive à des gels de ségrégation spatiale sur certains territoires et certaines parties d'intercommunalité. Cela risque de pérenniser des déséquilibres entre communes.

M. Pierre-Yves Collombat. - Je considère qu'à partir du moment où l'intercommunalité est compétente en matière de PLU - condition posée par l'amendement, elle doit être compétente en matière de répartition des logements. Dans le cas contraire, cela n'a pas de sens.

Quand je vois le forcing qu'ont fait les derniers gouvernements pour rendre obligatoire le transfert de la compétence PLU à l'intercommunalité...

M. Éric Kerrouche. - Cela n'a rien à voir.

M. Pierre-Yves Collombat. - Si, cela est lié. Si la compétence en matière d'urbanisme est une compétence de l'intercommunalité, la répartition de ce que l'on construit en fonction du plan local d'urbanisme doit également l'être, surtout lorsqu'il y a un consensus comme cela est prévu par l'amendement.

M. François-Noël Buffet. - Je souhaite apporter un soutien au rapporteur, lié à l'expérience que j'ai de la métropole de Lyon. Beaucoup critiquent parfois ce qui s'y passe. Mais, il y a de très bonnes choses, notamment en matière de logement. Nous avons, depuis plusieurs années, mutualisé la gestion des logements sociaux à l'échelle métropolitaine, avec un certain nombre de secteurs permettant à chacun de remplir ses responsabilités en matière de logement social. Cela a très bien fonctionné, jusqu'à ce que le système soit mis à mal par la carence de certaines communes. Elles n'avaient pas pu construire suffisamment de logements, pour des raisons liées à l'urbanisme même ou au fait que leurs territoires étaient composés de terrains non constructibles. L'augmentation du nombre de logements sociaux sur la métropole a été constante sur plusieurs années. Cette mutualisation n'est donc pas une opposition à la loi « SRU », mais une adaptation, en fonction des réalités territoriales, dans le respect de son esprit. L'ensemble des élus, sur tous les bancs du conseil de métropole, partageait cette idée. C'est pourquoi je soutiens le rapporteur.

M. Alain Richard. - Des dispositions proches existent déjà au deuxième alinéa de l'article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation. Il est défectueux pour trois raisons. La première est que les préfets, sur instruction du ministère du logement, font tout pour ne pas encourager les collectivités à l'utiliser. La deuxième est qu'il ne permet la mutualisation que sur une période triennale. Enfin, même si toutes les communes concernées se sont entendues pour faire cette mutualisation - j'ai une commune dont le territoire est saturée et située entre une zone inondable et une colline connaissant des zones d'effondrement - et que l'on réalise les constructions, la commune reste soumise à la contribution.

On pourrait améliorer la loi de 2000, sans refaire l'ensemble du système.

M. André Reichardt. - Cet amendement va dans le bon sens. Je ne vois pas la difficulté et rejoins l'explication de Pierre-Yves Collombat. Dans la mesure où l'EPCI a la compétence en matière d'urbanisme, il est logique qu'il ait cette possibilité, d'autant plus qu'il s'agit d'une faculté et non d'une obligation. En outre, cet amendement prévoit que le dispositif est expérimental, pour une durée de six ans.

Des contraintes liées à leur foncier font que certaines communes n'y arriveront jamais, sauf à créer de très nombreuses zones à urbaniser en priorité. J'ai créé deux lotissements avec 35 % de logements locatifs sociaux qui ne sont malgré tout pas suffisants au regard des objectifs fixés par la loi SRU. Il me parait manquer une vraie réponse à la question de la sanction a priori des communes concernées. Je me suis battu pour faire du logement social, et pourtant, dès la première année, ma commune a été carencée et sévèrement sanctionnée. Certes les communes qui ne contribuent pas doivent être sanctionnées, mais qu'une commune le soit dès le départ, alors qu'elle fait tous les efforts possibles pour atteindre les objectifs fixés me parait inacceptable.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Je reprécise les choses, par un exemple concret. Je ne propose pas qu'on passe d'une sanction sur les stocks, à l'échelle de la commune, à une mutualisation des flux. Dans la métropole de Lille, la loi « SRU » nécessite de réaliser 9 000 logements. Le dispositif proposé ne prévoit pas de remettre en cause la construction de ces 9 000 logements du fait que la métropole a globalement atteint l'objectif de 25% de logement sociaux. Il prévoit simplement que ces 9 000 logements pourront être réalisés sur l'ensemble du territoire de la métropole selon des modalités prévues par le contrat intercommunal de mixité sociale.

Certaines communes ne peuvent pas atteindre leurs objectifs. Le PLU intercommunal que je viens d'achever impose, par exemple, à une commune de prévoir un réservoir de biodiversité ou des zones tampons. Elle est donc dans l'impossibilité de construire autant de logements sociaux qu'elle le devrait. À l'échelle de l'intercommunalité, nous travaillons ensemble depuis longtemps. Nous avons un accord entre nous pour mutualiser. Pourquoi va-t-on nous empêcher de le faire, alors que nous réalisons l'objectif des 25 % sur le stock ? Ou bien cette loi a une visée idéologique pour montrer du doigt certains acteurs, ou bien elle vise à faire avancer le logement social.

Lorsque j'étais ministre, nous avons triplé les montants destinés au financement du logement social. Depuis nous ne sommes jamais remontés au niveau où nous étions en 2006. Or, je viens d'avoir les chiffres relatifs à l'agrément des nouveaux logements sociaux et ils indiquent que le trimestre dernier a connu une baisse de 6 %. Ils ne remonteront pas car ne sont pas le fruit de mauvaises volontés. Ce n'est pas une question de vouloir ou de ne pas vouloir. Il s'agit de donner un coup de main aux collègues qui sont dans l'impossibilité de faire, mais sont de bonne foi.

Notre collègue Valérie Létard va déposer un autre amendement, allant également dans le même sens d'une mutualisation, pour les intercommunalités qui ont déjà atteint 25 % de logement sociaux.

Alain Richard a raison. Un dispositif existe déjà dans la loi, mais ne s'applique pas. J'en propose un nouveau que je souhaite expérimental. Laissez-nous expérimenter et, à l'issue de l'expérimentation, nous verrons bien si cela a fonctionné ou non. Jusqu'ici, le système coercitif et dirigiste n'a pas produit les effets escomptés, malgré la bonne volonté des maires.

Les propos tenus par François-Noël Buffet me font penser que la métropole de Lyon n'est pas un EPCI mais une collectivité de plein exercice. Je vous propose donc de la faire entrer dans le dispositif.

Mme Brigitte Lherbier. - Les 9 000 logements dont vous parlez monsieur le rapporteur peuvent être modifiés. Avec les zones à urbaniser en priorité (ZUP) que l'on essaye d'aérer, il y aura moins de logements dans certaines contrées.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement comprend une clause très claire qui permet à une commune de refuser qu'on lui impose des logements supplémentaires si elle compte déjà un taux important de logements sociaux.

L'amendement COM-235 ainsi modifié est adopté.

Article 47 bis A

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-236 vise à préciser que les nom, prénom, coordonnées, téléphone et adresse électronique du locataire ne pourront être transmis par son bailleur au syndic qu'avec son accord.

L'amendement COM-236 est adopté.

Article 47 bis B

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-237 précise et rééquilibre le dispositif permettant au locataire victime de violences conjugales ou domestiques, qui a quitté son logement, de ne plus être tenu solidairement des dettes locatives afférentes à ce logement.

L'amendement COM-237 est adopté.

Article 47 bis C

L'amendement de clarification COM-238 est adopté

Article 47 bis

L'amendement COM-239, tendant à supprimer une précision inutile, est adopté.

Article 56 bis

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-240 tend à supprimer l'article 56 bis qui fait référence au statut d'habitat collectif, notion qui n'est utilisée dans aucun texte de portée législative et dont on ignore donc la portée juridique.

L'amendement COM-240 est adopté.

Article 56 quater

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Cet amendement concerne les dispositifs de déclaration ou d'autorisation de mise en location, créés par la loi « ALUR » et qui sont de plus en plus utilisés dans les grandes agglomérations. Il s'agit ici de lutter contre les marchands de sommeil. Le maire, dans un périmètre donné, peut soumettre les locations à une autorisation préalable. Les intercommunalités ont aussi cette possibilité, mais elles ne sont pas demandeuses : ce sont des questions de proximité, le maire est mieux à même de les traiter, avec sa connaissance des quartiers difficiles. Je propose de clarifier ce dispositif, d'en exclure les intercommunalités, et de préciser son champ d'application, en permettant son déploiement en cas de menace à la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques.

L'amendement COM-241 est adopté.

Article 58

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Je ne suis pas d'accord pour que l'on touche aux pouvoir de police administrative du maire ou que l'on prévoit son transfert à une intercommunalité sans débat au Parlement.

L'amendement COM-242 est adopté.

Article additionnel après l'article 58 bis

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-243 porte sur la question des squats. Notre ancienne collègue, Natacha Bouchart, avait été à l'initiative d'une proposition de loi visant à lutter contre les squatteurs. Cette proposition a été adoptée par le Sénat, puis par l'Assemblée nationale, à l'unanimité. J'avais alors été rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur ce texte. Malheureusement, il n'est pas, ou très peu appliqué. Cet amendement étend le champ d'application du dispositif aux « locaux à usage d'habitation », notion plus large que celle de « domicile ». Il précise également qu'en cas de mise en demeure des squatteurs de quitter les lieux, demeurée infructueuse, le préfet devra intervenir sans délai pour évacuer le local.

M. Didier Marie- Cet élargissement permet-il d'inclure dans le champ d'application un EHPAD fermé, et aujourd'hui squatté ? J'ai ce cas dans mon département.

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Je pense que oui, cela entrerait dans le champ d'application du dispositif.

L'amendement COM-243 est adopté.

Article 60

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - L'amendement COM-244 concerne l'habilitation donnée au Gouvernement pour codifier et réformer le droit de la copropriété par ordonnance. Il vise à permettre un véritable examen par le Parlement de cette ordonnance qui modifierait sur le fond le droit de la copropriété, en prévoyant que sa ratification passerait par l'examen du projet de loi déposé à cet effet et ne pourrait avoir lieu au détour de l'examen d'un autre texte par l'adoption d'un article, voire même d'un simple amendement.

Par ailleurs, pour éviter la coexistence de trois droits différents : le droit de la copropriété antérieur à l'ordonnance, le droit de la copropriété en vigueur à compter de la publication de l'ordonnance et le droit de la copropriété faisant suite aux modifications des dispositions issues de l'ordonnance au moment de la ratification, cet amendement propose de différer l'entrée en vigueur des dispositions de fond modifiées par l'ordonnance au jour de leur ratification par le Parlement.

C'est ici un peu délicat, car l'article 38 de la Constitution précise que les ordonnances entrent en vigueur au jour de leur publication. Pour autant, il est fréquent que le Gouvernement prévoit, dans l'ordonnance elle-même, que les nouvelles dispositions n'entreront en vigueur qu'à une date ultérieure.

M. François Pillet, président. - C'est un débat que nous aurons lors de l'examen de la révision constitutionnelle.

M. Alain Richard. - Vous anticipez même cette révision ! En l'état actuel de la Constitution, je pense que ce dispositif n'y est pas conforme...

M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis. - Je souhaite lancer le débat. Si le Gouvernement nous demandait de renoncer à cette disposition en prenant un engagement en séance de s'y tenir, nous pourrions le faire.

L'amendement COM-244 est adopté.

Article 63 quater

L'amendement de suppression COM-245 est adopté.

La commission émet un avis favorable à l'adoption du projet de loi, sous réserve de l'adoption de ses amendements.

La réunion est close à 11 h 30.