Rapport n° 96 (2019-2020) de Mme Marie MERCIER , fait au nom de la commission des lois, déposé le 30 octobre 2019

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SOMMAIRE

Pages

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS 5

EXPOSÉ GÉNÉRAL 9

I. LE VOLET PÉNAL : MIEUX PROTÉGER LES FEMMES VICTIMES DE VIOLENCES CONJUGALES 10

A. UNE MESURE PHARE : LE BRACELET ANTI-RAPPROCHEMENT 10

1. Un dispositif technique novateur 11

2. Un champ d'application étendu 12

3. Un dispositif qui a fait ses preuves en Espagne 12

B. ENCOURAGER LE RECOURS AU TÉLÉPHONE GRAVE DANGER 13

II. L'ORDONNANCE DE PROTECTION, UN OUTIL DE LUTTE CONTRE LES VIOLENCES CONJUGALES QUI DOIT ÊTRE RENDU PLUS ACCESSIBLE ET PLUS PROTECTEUR POUR LES VICTIMES 14

1. Un dispositif d'urgence à mi-chemin entre le droit civil et le droit pénal 14

2. Des difficultés de mise en oeuvre qui perdurent 17

3. Donner toute sa mesure à l'ordonnance de protection en accélérant les délais de délivrance et en renforçant son contenu 19

III. FACILITER LE RELOGEMENT DES FEMMES VICTIMES DE VIOLENCE 20

A. UN ENJEU IMPORTANT POUR LES FEMMES VICTIMES 20

1. L'éviction du conjoint violent est la règle de principe 21

2. Le relogement de la victime est pourtant parfois nécessaire 21

B. LE LANCEMENT DE DEUX EXPÉRIMENTATIONS 22

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION 23

A. SUR LES MESURES PÉNALES 23

B. SUR LES MESURES CIVILES 25

C. SUR LE VOLET LOGEMENT 26

EXAMEN DES ARTICLES 29

CHAPITRE I ER DE L'ORDONNANCE DE PROTECTION ET DE LA MÉDIATION FAMILIALE 29

• Article 1 er (art. 515-10 du code civil) Conditions préalables requises pour la sollicitation d'une ordonnance de protection et modalités de déroulement de l'audience devant le juge 29

• Article 1 er bis (art. 515-9 du code civil) Critères de conjugalité applicables à la délivrance d'une ordonnance de protection 35

• Article 2 (art. 515-11 du code civil) Délai de délivrance et contenu de l'ordonnance de protection 39

• Article 2 bis (art. 373-2-10 du code civil) Interdiction pour le juge de proposer une médiation familiale en cas de violences intrafamiliales 50

• Article 2 ter (supprimé) (art. L. 312-3-2 nouveau du code de la sécurité intérieure) Interdiction d'acquérir et de détenir une arme pour les personnes visées par une ordonnance de protection 52

• Article 2 quater (nouveau) Caractère temporaire du bracelet anti-rapprochement en matière civile 54

CHAPITRE II DE L'ÉLARGISSEMENT DU PORT DU BRACELET ANTI-RAPPROCHEMENT 54

• Article 3 (art. 131-4-1, 131-22, 132-45, 132-45-1 [nouveau] et 222-18-3 du code pénal, art. 471 et 712-19 du code de procédure pénale) Port du bracelet anti-rapprochement en cas de condamnation pénale 54

• Article 4 (art. 138 et 138-3 nouveau du code de procédure pénale) Port du bracelet anti-rapprochement pendant la phase pré-sentencielle 61

• Article 4 bis (nouveau) (art. 230-19 du code de procédure pénale) Inscription dans le fichier des personne recherchées 63

• Article 5 (art. 15-3-1 du code de procédure pénale) Information de la victime au moment du dépôt de plainte 64

• Article 6 (art. 721 du code de procédure pénale) Conditionnement des réductions de peine automatiques dont peuvent bénéficier les auteurs de violences intrafamiliales au respect de leur obligation de soins 66

CHAPITRE III DE L'ACCÈS AU LOGEMENT 67

• Article 7 (art. L. 442-8-1 du code de la construction et de l'habitation) Expérimentation de deux dispositifs pour faciliter l'accès au logement des victimes de violences intrafamiliales 68

• Article 7 bis (art. L. 441-2-2 du code de la construction et de l'habitation) Impossibilité de motiver le refus d'attribution d'un logement social par la qualité de propriétaire lorsque le candidat a bénéficié d'une ordonnance de protection 74

• Article 7 ter (art. L. 441-2-2 du code de la construction et de l'habitation) Attribution en urgence par le préfet d'un logement de droit commun pris sur le contingent de logements réservés de l'État aux femmes victimes de violences 74

• Article 8 (article 41-3-1 du code de procédure pénale) Attribution du téléphone grave danger 76

• Article 9 (supprimé) Rapport sur la conception d'une application destinée aux personnes victimes de violences intrafamiliales 78

• Article 10 A (supprimé) Rapport sur la conception d'une application destinée aux personnes victimes de violences intrafamiliales 79

• Article 10 B (supprimé) Rapport sur la prise en charge par les juridictions et les forces de l'ordre des violences faites aux femmes 80

• Article 10 (suppression maintenue) Coordination et entrée en vigueur 81

• Article 11 (suppression maintenue) Gage financier 81

• Article 12 (nouveau) (art. 804 du code de procédure pénale et 711-1 du code pénal) Application outre-mer 82

EXAMEN EN COMMISSION 85

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES ET CONTRIBUTION ÉCRITE 107

TABLEAU COMPARATIF 111

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 30 octobre 2019 , sous la présidence de Philippe Bas, président , la commission des lois a examiné le rapport de Marie Mercier et établi son texte sur la proposition de loi n° 57 (2019-2020) vis ant à agir contre les violences au sein de la famille.

Alors qu'une femme meurt sous les coups de son conjoint 1 ( * ) ou ex-conjoint tous les deux ou trois jours et que l'on estime à plus de 200 000 le nombre de femmes victimes chaque année de violences conjugales, la proposition de loi vise à apporter des réponses concrètes à ces situations de violences inacceptables, qui ont souvent des répercussions très préjudiciables à l'épanouissement des enfants présents dans le foyer.

La proposition de loi, que l'Assemblée nationale a adoptée à l'unanimité le 15 octobre dernier, se compose d'un volet pénal, dont la mesure-phare est la création du bracelet anti-rapprochement, d'un volet civil, visant à renforcer le dispositif de l'ordonnance de protection, et d'un volet relatif au relogement des victimes de violences conjugales.

• Concernant les mesures pénales , la proposition de loi tend à autoriser le juge à ordonner, dans un cadre présentenciel, sentenciel ou post-sentenciel, la pose d'un bracelet anti-rapprochement destiné à prévenir la répétition des violences commises par le conjoint ou l'ancien conjoint. Ce dispositif électronique permet de géolocaliser en temps réel l'auteur des violences et la victime et de déclencher une alerte si l'auteur se rapproche de la victime en-deçà d'une certaine distance fixée par le juge. Au moment où elle dépose plainte, la victime serait informée de la possibilité de bénéficier de ce dispositif.

La proposition de loi procède aussi à des ajustements, dans le code de procédure pénale, destinés à encourager le recours au téléphone grave danger (TGD), qui permet à une victime de violences conjugales de contacter une plateforme d'assistance en cas de danger.

La commission a approuvé ces mesures sous réserve d'améliorations rédactionnelles et de mesures de coordination.

• En ce qui concerne les mesures civiles , le texte vise surtout à accélérer la délivrance de l'ordonnance de protection et à enrichir son contenu. Il contient également une mesure relative à la médiation familiale.

Créée en 2010, l'ordonnance de protection permet à un juge aux affaires familiales d'ordonner, dans un bref délai, des mesures destinées à protéger une personne pour laquelle il existe des raisons sérieuses de penser qu'elle est la victime de violences conjugales et qu'elle court un danger. Ces mesures peuvent, par exemple, consister à évincer le conjoint violent du domicile conjugal ou à lui interdire d'entrer en contact avec la victime.

Pour accélérer la procédure, la proposition de loi prévoit que le juge aux affaires familiales devra délivrer l'ordonnance dans un délai maximal de six jours à compter du moment où il a fixé la date de l'audience. Le texte vise également à lever les obstacles à la délivrance d'une ordonnance de protection en précisant qu'un dépôt de plainte n'est pas nécessaire et que l'ordonnance peut concerner un couple qui n'a jamais cohabité.

Le texte donne également de nouveaux pouvoirs au juge aux affaires familiales : il pourrait interdire au conjoint violent de paraître en certains lieux que fréquente la victime ; l'interdiction de détenir ou de porter une arme serait systématique, sauf décision spécialement motivée ; et il pourrait recourir, avec le consentement des deux parties, au bracelet anti-rapprochement afin de prévenir la répétition des violences.

La commission a jugé ces dispositions innovantes et créatives. Elles renforcent le côté hybride, à mi-chemin entre le droit civil et le droit pénal, de l'ordonnance de protection. La commission n'est pas certaine que les juges aux affaires familiales se saisiront aisément des nouvelles prérogatives qui leur sont confiées, ni que le délai indicatif fixé par l'Assemblée nationale conduise à réduire la durée des procédures. Elle a cependant accepté la mise en oeuvre de cette ordonnance de protection rénovée, qui peut apporter une réponse à certaines situations. Elle a toutefois conféré un caractère temporaire à la possibilité donnée au juge aux affaires familiales de proposer le recours au bracelet anti-rapprochement : au terme d'un délai de trois ans, le législateur pourra ainsi décider, sur la base d'une évaluation, de reconduire le dispositif ou de le faire évoluer. Elle a également supprimé un article qui posait une interdiction générale de détenir ou de porter une arme pour les personnes à l'encontre desquelles une ordonnance de protection a été prononcée, considérant que cette interdiction n'était pas cohérente avec les pouvoirs par ailleurs reconnus au juge aux affaires familiales.

• Si la loi fait de l'éviction du conjoint violent du domicile conjugal la règle de principe, certaines victimes ne souhaitent pas regagner leur domicile, soit parce que ce dernier est associé à des souvenirs traumatiques, soit parce qu'elles préfèrent déménager pour se sentir plus en sécurité.

Pour faciliter leur relogement, le texte prévoit de mettre en oeuvre deux expérimentations :

- la première consiste à mettre en place un mécanisme de sous-location temporaire de logements relevant du parc locatif social : des associations d'aide aux victimes pourraient louer des logements sociaux dans le but de les sous-louer, sous condition de ressources, aux femmes qui s'adressent à elles ;

- la deuxième vise à créer un dispositif d'accompagnement adapté en s'appuyant sur des dispositifs déjà existants, qui permettent à la personne en difficulté de bénéficier d'une garantie locative ou d'une aide pour financer le dépôt de garantie.

Ces expérimentations ont été complétées par une mesure pérenne consistant à prévoir que la victime de violences conjugales bénéficiant d'une ordonnance de protection puisse se voir attribuer un logement social sans que la propriété d'un logement répondant à ses besoins puisse lui être opposée.

La commission s'est prononcée en faveur de ces dispositions auxquelles elle a seulement apporté des améliorations techniques.

La commission des lois a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Les violences commises par le conjoint ou par l'ex-conjoint demeurent une réalité insupportable dans notre pays. Dans neuf cas sur dix, c'est une femme qui est victime de ces violences. Depuis le début de l'année, 121 femmes sont tombées sous les coups de leur conjoint, selon le décompte effectué par le collectif « féminicides par compagnon ou ex », soit autant que sur l'ensemble de l'année 2018.

Le plus souvent, l'homicide, ou la tentative, fait suite à une longue série de comportements violents. Chaque année, environ 220 000 femmes sont victimes de violences physiques ou sexuelles commises par leur conjoint ou ex-conjoint, selon l'observatoire national des violences faites aux femmes 2 ( * ) . De nombreux drames pourraient donc être évités si une action efficace était conduite par les pouvoirs publics dès le déclenchement des premiers faits de violence.

Nos concitoyens sont aujourd'hui en attente de mesures concrètes, et non de déclarations d'intention ou d'un empilement de textes dépourvus de retombées sur le terrain. De plus en plus mobilisée et sensible à ces sujets, la société nous pousse à agir de manière déterminée.

Pour faire émerger de nouvelles solutions, le Gouvernement a ouvert le 3 septembre dernier un « Grenelle des violences conjugales », qui va se prolonger jusqu'au 25 novembre prochain. Il réunit l'ensemble des parties prenantes : ministères, parlementaires, élus locaux, associations, familles et proches de victimes, avocats, médias, professionnels de la santé, du logement, forces de l'ordre, etc .

Sans attendre les conclusions du Grenelle, le Gouvernement a rendu publiques, dès le 3 septembre, dix mesures d'urgence. Certaines peuvent être mises en oeuvre sans intervention du législateur : ouverture de nouvelles places d'hébergement, audit des commissariats et gendarmeries pour évaluer les conditions d'accueil des femmes victimes, possibilité de déposer plainte dans les hôpitaux, retour d'expérience pour analyser les failles en cas de féminicide... D'autres nécessitent des mesures législatives.

La proposition de loi visant à agir contre les violences au sein de la famille, déposée par le député Aurélien Pradié (Les Républicains - Lot) et adoptée par l'Assemblée nationale le mardi 15 octobre, tend précisément à mettre en oeuvre certaines de ces mesures.

En approuvant le texte par 553 voix sur 553 suffrages exprimés, l'Assemblée nationale a montré que la représentation nationale pouvait se rassembler autour de cette cause, par-delà les clivages partisans. En choisissant de soutenir un texte déposé par un membre de l'opposition, le Gouvernement a fait preuve d'ouverture et de pragmatisme, en retenant la procédure qui permettra l'entrée en vigueur la plus rapide de ces mesures.

Certains États ont précédé la France dans la nécessaire mobilisation contre les violences au sein du couple, notamment l'Espagne qui s'est dotée depuis une dizaine d'années de juridictions spécialisées et qui met en oeuvre un dispositif anti-rapprochement qui a fait ses preuves.

Le recours à un bracelet anti-rapprochement constitue la mesure-phare de cette proposition de loi. Ce dispositif peut contribuer à prévenir la répétition des violences en géolocalisant la victime et son potentiel agresseur pour empêcher qu'ils se retrouvent en contact. Le texte vise également à améliorer l'ordonnance de protection , outil juridique dont dispose le juge aux affaires familiales depuis 2010 pour protéger une victime de violences conjugales avant tout dépôt de plainte. Le texte comporte enfin un volet logement afin d'aider les femmes qui choisissent de quitter le domicile conjugal à se reloger plus facilement.

Votre commission soutient ces mesures qui devront cependant s'inscrire dans une stratégie globale, avec des moyens budgétaires adaptés , pour porter pleinement leurs fruits. Une volonté politique sera nécessaire dans la durée pour rendre ces dispositions pleinement opérationnelles. Dans ce domaine, alors que la sécurité des femmes et de leurs enfants est en jeu, il ne nous est plus permis de décevoir.

I. LE VOLET PÉNAL : MIEUX PROTÉGER LES FEMMES VICTIMES DE VIOLENCES CONJUGALES

A. UNE MESURE PHARE : LE BRACELET ANTI-RAPPROCHEMENT

La proposition de loi tend à autoriser l'utilisation d'un nouveau dispositif technique, le bracelet anti-rapprochement, à tous les stades de la procédure pénale.

1. Un dispositif technique novateur

L'administration pénitentiaire utilise depuis longtemps des dispositifs de bracelets électroniques pour mettre en oeuvre les mesures de placement sous surveillance électronique (PSE) ou de placement sous surveillance électronique mobile (PSEM), que ce soit dans un cadre présentenciel, comme une alternative à la détention provisoire, dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire ou encore dans le cadre d'un aménagement de peine. La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a prévu la création d'une peine de détention à domicile qui repose également sur l'utilisation de ce dispositif.

Généralement portés à la cheville, ces bracelets sont munis d'un GPS qui permet de localiser en permanence et à distance la personne qui le porte et de contrôler si elle respecte les obligations de présence à son domicile qui ont été fixées par le juge. Si elle quitte son domicile en-dehors des heures autorisées, un surveillant pénitentiaire est aussitôt averti par une alarme. Dans le cadre d'un PSEM, le dispositif permet également de contrôler si la personne ne se rend pas dans des lieux qui lui sont interdits.

Le bracelet anti-rapprochement se distingue de ces dispositifs en ce qu'il permet de localiser à la fois l'auteur des violences et la personne que l'on souhaite protéger.

L'auteur porte le bracelet à sa cheville, posé par un membre du personnel de l'administration pénitentiaire, tandis que la personne protégée se voit confier un boîtier, de petite dimension, qu'elle peut glisser dans un sac à main ou dans une poche.

Le juge fixe la distance à laquelle il est fait interdiction à l'auteur des violences de s'approcher de la personne protégée ; il définit également le périmètre d'une « zone tampon », plus étendue, autour de la victime. Si l'auteur pénètre dans la « zone tampon », une première alerte est déclenchée. Si l'auteur ne s'éloigne pas, une deuxième alerte est déclenchée, ce qui peut entraîner son placement en détention.

À la première alerte, l'auteur des violences serait contacté par téléphone et invité à s'éloigner de la personne protégée. S'il n'obtempère pas et qu'une deuxième alerte est déclenchée, le centre de surveillance contacterait la police nationale ou la gendarmerie et préviendrait la personne protégée pour qu'elle puisse se réfugier en lieu sûr.

Le bracelet anti-rapprochement constitue donc un outil de prévention reposant sur l'apport des techniques de géolocalisation . L'objectif est d' empêcher l'auteur des violences de récidiver en s'assurant à tout moment qu'il n'entre pas en contact avec la victime. Il exerce un effet dissuasif sur le potentiel agresseur et permet d'intervenir rapidement si le conjoint violent tente, malgré tout, de passer à l'acte.

Le Gouvernement a indiqué qu'une enveloppe de 5,6 millions d'euros serait consacrée au déploiement d'un millier de bracelets anti-rapprochement, puis que le coût de fonctionnement du dispositif en régime de croisière serait de l'ordre de 1,8 million d'euros par an. Le contrôle du dispositif serait assuré par un centre de surveillance, fonctionnant 24 heures sur 24, employant 45 personnes en équivalent temps plein (ETP).

2. Un champ d'application étendu

Le bracelet anti-rapprochement pourrait être utilisé dans un cadre présentenciel (article 4 de la proposition de loi) ou sentenciel et postsentenciel (article 3), de manière à couvrir l'ensemble des situations où une victime pourrait avoir besoin d'être protégée.

À titre présentenciel , c'est-à-dire dans l'attente du jugement, le port du bracelet pourrait être décidé dans le cadre d'un placement sous contrôle judiciaire, mais aussi à l'occasion d'une assignation à résidence sous surveillance électronique ou d'une assignation à résidence sous surveillance électronique mobile (ARSEM). La décision serait prise par un juge d'instruction ou par un juge des libertés et de la détention (JLD).

À titre sentenciel , au moment d'une condamnation, le bracelet pourrait être prescrit par la juridiction de jugement dans le cadre d'une peine de sursis probatoire ou d'une peine de détention à domicile sous surveillance électronique, ou dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire.

À titre post-sentenciel , enfin, le port du bracelet pourrait être ordonné dans le cadre d'une mesure d'aménagement de peine (détention à domicile sous surveillance électronique, semi-liberté, placement extérieur), dans le cadre d'une libération conditionnelle ou d'une libération sous contrainte ou dans le cadre de mesures de surveillance judiciaire ou de surveillance de sûreté. La décision relèverait cette fois de la compétence du juge de l'application des peines (JAP).

À chaque fois, le texte prévoit que le consentement de la personne mise en cause ou condamnée est requis, ce qui est légitime s'agissant d'un dispositif placé physiquement sur un individu. Un refus pourrait toutefois entraîner son incarcération, sur décision du juge, ce qui devrait l'inciter fortement à l'accepter.

3. Un dispositif qui a fait ses preuves en Espagne

Les promoteurs du bracelet électronique anti-rapprochement soulignent que ce dispositif a fait la preuve de son efficacité en Espagne où il est utilisé depuis déjà dix ans.

Même s'il s'inscrit dans une politique plus large, le bracelet anti-rapprochement est souvent crédité d'avoir fait baisser de manière importante le nombre de féminicides : alors que l'on dénombrait, en 2003, 71 femmes décédées sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint, ce chiffre n'était plus que de 47 en 2018 (soit une baisse d'environ un tiers). Si la France avait le même nombre de victimes rapporté à sa population, c'est une cinquantaine de vies qui seraient sauvées chaque année.

La mise en oeuvre du dispositif est assurée par un centre de contrôle situé en banlieue de Madrid et géré par deux entreprises privées (Telefonica pour le réseau téléphonique et Securitas pour la centrale d'alarme et de sécurité). Le bracelet est aujourd'hui porté par près de 1 100 femmes.

Lorsqu'un juge impose une mesure d'éloignement avec pose du bracelet, il précise les zones dans lesquelles ce dernier ne peut se rendre (domicile de la victime, école des enfants...) et il transmet ces informations au centre de contrôle. Le récepteur est remis à la victime au tribunal et des opérateurs de Securitas sont chargés de remettre l'équipement à l'auteur des violences, généralement dans un délai bref de moins de vingt-quatre heures.

Depuis que le dispositif a été mis en place, une seule femme bénéficiant de cette protection est décédée sous les coups de son ex-conjoint. Elle n'avait pas le récepteur avec elle au moment où elle a été agressée.

B. ENCOURAGER LE RECOURS AU TÉLÉPHONE GRAVE DANGER

D'abord expérimenté en Seine-Saint-Denis, le téléphone grave danger (TGD) a été généralisé à l'ensemble du territoire par la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Le lancement du bracelet anti-rapprochement ne doit pas conduire à négliger l'apport de ce dispositif, jugé utile par les femmes à qui il a été confié.

Le TGD est un appareil portable qui permet de joindre, en cas de danger, une plateforme d'assistance. Le dispositif fonctionne en partenariat avec Orange pour la fourniture des appareils et la société Allianz-Mondial Assistance pour la plateforme d'appels, qui doit fonctionner en continu.

Chaque année, le TGD permet à des centaines de personnes en situation de danger de bénéficier d'une assistance : en 2016, la société Mondial Assistance a sollicité à 222 reprises les forces de l'ordre à la suite des alertes déclenchées par les bénéficiaires du dispositif. Cela a permis de les mettre en sécurité et d'interpeller à 36 reprises les auteurs des violences sur les lieux.

En complément du TGD, la proposition de loi suggère de mettre à l'étude (article 10A) le développement d'une application téléchargeable sur smartphone qui permettrait à une victime de violences de trouver aisément toutes les informations utiles (démarches à accomplir, adresses des professionnels, contacts des associations susceptibles de l'aider, etc. ).

II. L'ORDONNANCE DE PROTECTION, UN OUTIL DE LUTTE CONTRE LES VIOLENCES CONJUGALES QUI DOIT ÊTRE RENDU PLUS ACCESSIBLE ET PLUS PROTECTEUR POUR LES VICTIMES

Depuis une dizaine d'années, les juges aux affaires familiales peuvent délivrer, dans de brefs délais, une ordonnance de protection destinée à protéger la victime de violences au sein du couple.

Dans son volet civil, la proposition de loi comporte des dispositions qui visent à réduire le délai dans lequel sont rendues les ordonnances de protection et à renforcer les prérogatives reconnues au juge.

1. Un dispositif d'urgence à mi-chemin entre le droit civil et le droit pénal

Instituée par la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, l'ordonnance de protection est un dispositif à mi-chemin entre le droit civil et le droit pénal dont le régime est codifié aux articles 515-9 et suivants du code civil 3 ( * ) .

Elle s'inscrit dans le cadre plus général du droit européen et notamment de la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, dite « Convention d'Istanbul », que la France a ratifiée en 2014 4 ( * ) et qui impose aux États parties de légiférer afin que « des ordonnances d'injonction ou de protection appropriées soient disponibles pour les victimes de toutes les formes de violence (...) » 5 ( * ) . La Cour européenne des droits de l'homme rappelle d'ailleurs régulièrement que les autorités de l'État ont l'obligation positive de protéger les femmes victimes de violences domestiques. Elle a récemment jugé que ces victimes ont droit à la protection de l'État sous la forme d'une prévention efficace qui les mette à l'abri de formes graves d'atteintes à l'intégrité de la personne 6 ( * ) . Les ordonnances de protection prises en matière civile dans un autre État membre de l'Union européenne bénéficient en outre d'une reconnaissance mutuelle 7 ( * ) .

L'ordonnance de protection est délivrée en urgence - « dans les meilleurs délais » 8 ( * ) - par le juge aux affaires familiales , à la demande de la personne victime 9 ( * ) de violences exercées au sein du couple ou par un ancien conjoint, partenaire de pacte civil de solidarité (PACS) ou concubin, la mettant en danger ou mettant en danger ses enfants 10 ( * ) . Elle peut aussi être délivrée à la demande du ministère public , avec l'accord de la victime.

Le procureur de la République est associé à tous les stades de la procédure et peut poursuivre par la voie pénale les faits en parallèle de la procédure civile.

Deux conditions cumulatives sont nécessaires à la délivrance de l'ordonnance : il doit exister des raisons sérieuses de considérer comme « vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés » 11 ( * ) .

Dans le cadre de ce dispositif, le juge dispose de larges prérogatives. Il peut tout d'abord ordonner des mesures relevant traditionnellement du droit pénal qui s'adressent à la partie défenderesse : l'interdiction d'entrer en relation, de recevoir ou de rencontrer certaines personnes désignées par le juge et l'interdiction de détenir ou de porter une arme, qui s'accompagne de l'obligation de remettre au greffe du tribunal de grande instance les armes possédées.

Le juge aux affaires familiales peut ensuite prononcer des mesures civiles . Il statue sur la résidence séparée des membres du couple, et sur l'attribution du logement à la victime des violences , en précisant les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement. Il peut également régler les relations financières entre les partenaires ainsi que les modalités d'exercice de l'autorité parentale .

Enfin le juge peut prononcer des mesures d'aide ou de protection de la personne victime de violences : autorisation de dissimulation de son domicile, admission provisoire à l'aide juridictionnelle et présentation de personnes morales qualifiées susceptibles de l'accompagner pendant toute la durée de l'ordonnance de protection. À sa demande, le juge aux affaires familiales pourra en outre interdire à la personne menacée de mariage forcé de sortir du territoire français.

Une ordonnance de protection peut également être délivrée à la personne majeure menacée de mariage forcée et, dans ce cadre, le juge peut ordonner, à sa demande, son interdiction temporaire de sortie du territoire 12 ( * ) .

L'ordonnance est exécutoire à titre provisoire , sauf décision contraire du juge. Elle est susceptible d'appel dans un délai de quinze jours suivant sa notification 13 ( * ) .

Ces mesures sont prises pour une durée maximale de six mois , mais peuvent être prolongées si une demande en divorce ou en séparation de corps est introduite avant leur expiration, ou si le juge aux affaires familiales a été saisi d'une requête relative à l'exercice de l'autorité parentale. Elles peuvent à tout moment être modifiées, complétées, supprimées ou suspendues. Leur non-respect constitue un délit réprimé par les articles 227-4-2 14 ( * ) et 227-4-3 15 ( * ) du code pénal.

Pour les personnes étrangères en situation régulière ou en situation irrégulière, la délivrance d'une ordonnance de protection entraîne, de plein droit, la délivrance d'un titre de séjour d'un an 16 ( * ) .

Le Conseil constitutionnel ne s'est jamais prononcé sur l'ordonnance de protection .

En effet, la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants n'avait pas été déférée au Conseil constitutionnel . En outre, la saisine des sénateurs sur la loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes ne concernait pas l'ordonnance de protection 17 ( * ) .

Un plaideur a depuis tenté de soulever l'inconstitutionnalité de l'article 515-11 du Code civil par la voie de la question prioritaire de constitutionnalité suivante : « L'article 515-11 du code civil est-il conforme aux droits et libertés garantis par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et à la Constitution du 4 octobre 1958, en particulier au principe de présomption d'innocence, en ce qu'il conditionne la délivrance d'une ordonnance de protection par le juge aux affaires familiales à des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime ou plusieurs enfants sont exposés ? » 18 ( * ) . La Cour de cassation n'a pas pu y donner suite pour des raisons de procédure 19 ( * ) .

2. Des difficultés de mise en oeuvre qui perdurent

Entre 2010 et 2018, près de 21 000 demandes d'ordonnances de protection ont été formées devant les juges aux affaires familiales 20 ( * ) .

Toutefois, le nombre de demandes d'ordonnance de protection reste très en-deçà du nombre de signalements de faits de violences conjugales aux services enquêteurs . En 2017, environ 70 000 affaires de cette nature ont été transmises aux parquets, alors que seulement 3 102 demandes d'ordonnance de protection ont été formées devant les juges aux affaires familiales 21 ( * ) . Près de 20 % des défendeurs ont, en outre, déjà été poursuivis pénalement pour des faits de violences conjugales et 13 % des défendeurs font également l'objet d'une procédure pénale concomitante à la procédure civile.

Compte tenu du volume moyen des affaires nouvelles soumises chaque année aux juges aux affaires familiales 22 ( * ) , les ordonnances de protection représentent moins de 1 % de leur activité .

Trois ans après l'entrée en vigueur de la loi, un premier bilan de son application avait été dressé par la commission des lois de l'Assemblée nationale dans un rapport d'information du 17 janvier 2012 23 ( * ) .

Ce rapport faisait état d'une montée en puissance progressive mais inégale du dispositif sur le territoire et pointait, déjà, plusieurs difficultés de mise en oeuvre auxquelles la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes a tenté d'apporter des réponses.

Ainsi, alors qu'en 2012 le délai moyen de délivrance entre la saisine du juge et la décision était de vingt-six jours , ce délai est désormais, d'après les dernières données connues en 2016 24 ( * ) de 42,4 jours en moyenne. La précision selon laquelle le juge statue « dans les meilleurs délais » ajoutée dans la loi en 2014 , n'a donc rien changé. Pire, la situation s'est aggravée.

Autre élément qui interroge, les demandes , presque exclusivement présentées par des femmes, se concentrent sur un nombre restreint de tribunaux de grande instance : près de la moitié des demandes sont formées devant les juges aux affaires familiales de seize juridictions - sur les 164 tribunaux de grande instance que compte le territoire - tandis que 10 % des juridictions n'ont jamais prononcé aucune décision en la matière 25 ( * ) .

En outre, le juge n'accueille favorablement la demande de protection que dans 60 % des cas 26 ( * ) faute, le plus souvent, de pouvoir évaluer la vraisemblance des faits de violence et du danger encouru.

D'après les derniers chiffres communiqués par Nicole Belloubet, garde des Sceaux, lors d'une audition à l'Assemblée nationale 27 ( * ) , sur les 3 332 demandes de protection dont ont été saisis les juges aux affaires familiales en 2018, 2 703 décisions ont été rendues au fond, dont 1 672 acceptations totale ou partielle ; soit un taux de succès global qui stagne à 62 % . Il convient d'ailleurs de noter que le nombre de cas dans lesquels le juge n'a pas pu statuer (désistement, radiation pour défaut de diligence, caducité ou irrecevabilité) représente une proportion importante des demandes : elle s'établissait à plus de 22 % en 2016 et à presque 19 % en 2018. Par comparaison, cette même année, près de 39 000 ordonnances de protection ont été prononcées en Espagne .

Deux autres freins à la pleine efficacité de l'ordonnance de protection sont également à déplorer .

En premier lieu, une plainte préalable est exigée dans la plupart des juridictions , alors qu'elle n'est nullement requise par la loi, justement pour favoriser la révélation des faits.

En second lieu, le panel des mesures que le juge peut ordonner n'est pas utilisé à sa pleine mesure . Ainsi, alors que l'interdiction de contact avec le défendeur est presque toujours sollicitée (83 % des demandes) et accordée (99 % des cas), l'interdiction de détention et de port d'armes n'est sollicitée que dans 15 % des cas et accordée dans 77 % des cas, alors qu'elle pourrait protéger utilement la victime 28 ( * ) . Les demandes restreignant les relations entre les enfants et le défendeur sont également un peu moins souvent acceptées par le juge : l'interdiction d'entrer en contact avec l'enfant ou d'entrer en contact en dehors des lieux médiatisés n'est acceptée qu'à hauteur de 80 %. De même, les demandes de suspension du droit de visite ou d'attribution de l'exercice exclusif de l'autorité parentale (demandée dans 35 % des cas) sont acceptées dans moins de 70 % des cas.

3. Donner toute sa mesure à l'ordonnance de protection en accélérant les délais de délivrance et en renforçant son contenu

Dans sa rédaction telle qu'adoptée par l'Assemblée nationale, la proposition de loi tend à remédier à ces difficultés, pour renforcer le volet civil de lutte contre les violences conjugales (articles 1 er , 1 er bis et 2).

Les articles 1 er et 1 er bis proposent des ajustements aux conditions et à la procédure de délivrance de l'ordonnance de protection.

L' article 1 er tend à exclure formellement le dépôt de plainte comme condition préalable à la demande d'une ordonnance de protection. Il précise également que le ministère public est convoqué par le juge aux affaires familiales à fin d'avis . Il revoit, enfin, les modalités des auditions : elles se tiendraient obligatoirement en chambre du conseil et de manière séparée , si la partie demanderesse le souhaite. L' article 1 er bis tend à inclure parmi les destinataires de l'ordonnance de protection toutes les formes de couples ou d'anciens couples, y compris ceux qui ne cohabiteraient pas.

L' article 2 propose de revoir substantiellement le délai de délivrance et le contenu de l'ordonnance de protection.

Il prévoit, en premier lieu, un délai fixe de délivrance de l'ordonnance par le juge, de six jours à compter de la fixation de la date de l'audience. Il tend, en second lieu, à renforcer le rôle du juge , enserré dans les demandes des parties en matière civile, en lui intimant de solliciter leurs observations sur l'ensemble des mesures que la loi lui permet d'ordonner.

Il modifie , en troisième lieu, le contenu de l'ordonnance de protection. Tout d'abord, en renforçant la portée de mesures préexistantes. Le juge devrait ainsi spécialement motiver sa décision lorsqu'il ne prononce pas certaines mesures. Tout d'abord, celle d'interdire de détention ou de port d'armes le défendeur, lorsqu'il a prononcé une interdiction d'entrer en contact.

L' article 2 ter fixerait d'ailleurs, à cet égard, un régime général d'interdiction d'acquisition et de détention d'arme applicable à tout défendeur visé par une ordonnance de protection.

La motivation spéciale du juge devrait également intervenir dans deux autres hypothèses :

- lorsqu'il n'attribue pas la jouissance du logement à la victime de violences ;

- et lorsqu'il n'ordonne pas l'exercice du droit de visite dans un espace de rencontre désigné ou en présence d'un tiers de confiance.

Surtout, l' article 2 complèterait le contenu de l'ordonnance de protection par trois mesures nouvelles , relevant plus traditionnellement du droit pénal , que le juge pourrait prononcer à l'encontre de la partie défenderesse.

Le juge pourrait ainsi interdire à la partie défenderesse de se rendre dans certains lieux spécialement désignés dans laquelle se trouve habituellement la partie demanderesse.

Il pourrait aussi proposer à la partie défenderesse une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ou un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes.

Il pourrait également, lorsqu'il a prononcé la mesure d'entrer en contact, ordonner le port d'un bracelet anti-rapprochement avec le consentement des deux parties . À défaut d'accord du défendeur, le dossier serait transféré au procureur de la République, qui pourrait mettre en oeuvre, le cas échéant, des poursuites pénales.

Enfin, l' article 2 bis tend à interdire au juge aux affaires familiales de proposer une mesure de médiation en vue d'un exercice consensuel de l'autorité parentale, lorsque des violences intra-familiales sont alléguées .

III. FACILITER LE RELOGEMENT DES FEMMES VICTIMES DE VIOLENCE

La proposition de loi comporte un chapitre III relatif à « l'hébergement d'urgence », qui a en réalité pour objet principal de favoriser l'accès des femmes victimes de violences à un logement social.

A. UN ENJEU IMPORTANT POUR LES FEMMES VICTIMES

Il convient de rappeler, en préambule, que les femmes victimes de violences au sein du couple ont vocation à demeurer au sein du domicile conjugal ou commun.

1. L'éviction du conjoint violent est la règle de principe

Dans le cadre d'une procédure pénale, l'éviction du conjoint violent peut être ordonnée par le procureur de la République, par le juge d'instruction ou le JLD ou par la juridiction de jugement ; elle peut également être ordonnée par le JAF dans le cadre d'une ordonnance de protection. Sauf circonstances particulières, la victime a le droit de rester dans son logement si elle le sollicite. Sans être automatique, l'éviction du conjoint violent est donc bien la règle de principe .

Les personnes entendues par votre rapporteur ont souligné que ce principe est maintenant bien intégré par les acteurs du monde judiciaire et que l'éviction du conjoint violent est fréquemment décidée par les juridictions.

Dans l'attente d'une décision judiciaire, il faut cependant gérer l'urgence, lorsqu'une femme fuit le domicile conjugal, parfois accompagnée de ses enfants, pour échapper aux coups de son conjoint.

La victime peut être accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence, par exemple un centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), un foyer de jeunes travailleurs (FJT) ou une chambre d'hôtel. Pour augmenter l'offre d'hébergement, le Gouvernement a annoncé, à l'occasion du Grenelle des violences conjugales, son intention d'ouvrir 1 000 places supplémentaires d'hébergement d'urgence ou de logement temporaire.

Votre rapporteur a entendu des représentantes de l'association Halte aide aux femmes battues, créée à Paris en 1983, qui gère un CHRS. Elles ont insisté sur l'importance des besoins d'hébergement et de logement ainsi que d'un accompagnement social pour aider les femmes en situation de détresse et les soutenir dans leurs démarches.

2. Le relogement de la victime est pourtant parfois nécessaire

Passée l'urgence, il est parfois nécessaire d'envisager un relogement plus durable, notamment lorsque la victime ne veut pas regagner le domicile conjugal parce qu'il est associé à des souvenirs traumatiques ou lorsqu'elle juge plus prudent de déménager, afin de ne pas pouvoir être retrouvée par le conjoint violent et de se sentir ainsi plus en sécurité.

Le relogement est plus difficile, surtout dans les grandes villes, pour les femmes qui ne disposent que de peu de ressources, ce qui justifie de prendre des mesures pour faciliter leur accès au parc social. Les auditions auxquelles a procédé votre rapporteur ont montré que les acteurs du logement social sont sensibilisés depuis longtemps aux difficultés particulières de ce public vulnérable.

L'Union sociale de l'habitat (USH) a par exemple noué un partenariat avec la Fédération nationale Solidarité Femmes (FNSF) et a engagé un programme de formation de ses salariés de proximité pour leur apprendre à repérer et gérer les situations de violence au sein du couple. Le Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL), qui verse des aides aux personnes qui rencontrent des difficultés d'accès au logement en raison de difficultés financières ou d'insertion sociale, prévoit de consacrer 15 millions d'euros au financement de logements accompagnés pour les femmes victimes et pour les jeunes sortant de l'aide sociale à l'enfance (ASE).

Action Logement, l'organisme qui gère les ressources issues de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), est également impliqué : il a lui aussi passé une convention avec la FNSF et a pris l'engagement, en 2018, de mettre à la disposition du conseil régional d'Ile-de-France 500 logements destinés aux femmes victimes de violences quotidiennes.

La loi fait déjà des femmes victimes de violences au sein du couple un public prioritaire pour l'accès au logement social. Récemment, la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi ELAN, a apporté une protection supplémentaire aux femmes victimes en introduisant une exception au principe de solidarité qui régit habituellement le paiement du loyer entre personnes mariées ou partenaires de PACS : si la victime informe le bailleur, par lettre recommandée avec avis de réception, qu'elle bénéficie d'une ordonnance de protection ou que son conjoint ou partenaire a fait l'objet d'une condamnation pénale pour des faits de violences conjugales, elle n'est alors plus tenue de continuer à payer le loyer.

B. LE LANCEMENT DE DEUX EXPÉRIMENTATIONS

Pour faciliter encore le relogement des victimes, l' article 7 de la proposition de loi tend à autoriser deux expérimentations pour une durée de trois ans.

La première vise à mettre en place un mécanisme de sous-location temporaire de logements relevant du parc locatif social : des associations d'aide aux victimes de violences conjugales se verraient confier la gestion d'un certain nombre de logements sociaux qu'elles pourraient sous-louer, sous condition de ressources, aux victimes qui s'adressent à elles. Ces logements pourraient ainsi être accordés selon une procédure souple et rapide, en-dehors de la procédure d'attribution classique, étant précisé que ce logement n'aurait pas vocation à être pérenne. Il s'agirait d'aménager une solution de transition entre l'hébergement d'urgence et un logement définitif.

La deuxième vise à créer un dispositif d'accompagnement adapté en s'appuyant sur des dispositifs existants, comme par exemple, s'agissant d'Action Logement, la garantie locative Visale, qui permet de couvrir des impayés de loyers, ou le Loca-Pass, qui permet de financer le dépôt de garantie.

Le pilotage de l'expérimentation serait confié à un comité réunissant des représentants de l'État et des parlementaires (deux députés et deux sénateurs), sous la présidence d'un parlementaire.

L'Assemblée nationale a complété le volet logement du texte en y ajoutant une mesure ( article 7 bis ), qui ne présente pas un caractère expérimental, tendant à rendre impossible qu'une attribution de logement social puisse être refusée aux victimes de violences au motif qu'elles sont déjà propriétaires d'un logement adapté à leurs besoins.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission porte, dans l'ensemble, une appréciation positive sur les mesures contenues dans la proposition de loi, qui lui paraissent de nature à renforcer la protection des victimes .

Elle s'interroge cependant sur le calendrier et la méthode proposés : le Parlement est saisi d'un texte, examiné en procédure accélérée, alors que se déroule, en parallèle, une grande concertation dans le cadre du Grenelle des violences conjugales. Certains sujets, en matière d'autorité parentale par exemple, sont débattus dans le cadre de groupes de travail, ce qui est légitime compte tenu de la sensibilité du sujet. Mais ils ne sont pas abordés dans la proposition de loi, de sorte qu'un nouveau texte devra être soumis au Parlement s'il apparaît à l'issue du Grenelle que des évolutions sont souhaitables sur ces sujets. Il aurait peut-être été plus logique d'attendre la fin du Grenelle pour légiférer, de manière globale, sur la lutte contre les violences conjugales.

A. SUR LES MESURES PÉNALES

La commission est favorable au déploiement du bracelet anti-rapprochement : il pourrait apporter une solution à la situation d'insécurité et d'anxiété dans laquelle vivent de nombreuses femmes victimes de violences. Il s'agit d'un dispositif technique qui s'insère aisément dans la gamme des outils à la disposition du juge pénal. La commission n'a ainsi adopté que des amendements de précision rédactionnelle aux articles 3 et 4 du texte.

L'enjeu essentiel sera de s'assurer que les conditions nécessaires au bon fonctionnement du bracelet anti-rapprochement seront réunies. L'État devra mobiliser des moyens techniques et humains adaptés pour s'assurer du succès du dispositif.

À cet égard, la commission ne peut que déplorer que les deux expérimentations votées par le législateur n'aient jamais été mises en oeuvre . Elles auraient pourtant permis de tester, à une échelle réduite, le fonctionnement du dispositif et de régler les problèmes pratiques qui ne manqueront pas de se poser dans les premiers temps de son déploiement.

Le principe d'une expérimentation avait été acté une première fois par l'article 6 de la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants. Prévue pour une durée de trois ans, l'expérimentation aurait dû se dérouler dans les ressorts des tribunaux de Strasbourg, d'Aix-en-Provence et d'Amiens et aurait concerné des personnes condamnées à au moins cinq ans d'emprisonnement.

Le décret d'application n'a cependant été publié que le 24 février 2012, soit dix-huit mois seulement avant le terme prévu de l'expérimentation. Surtout, il est apparu que les critères retenus étaient trop restrictifs en pratique, personne n'ayant été condamné, dans le ressort de ces tribunaux, à une peine correspondant au seuil à partir duquel le dispositif aurait pu être expérimenté.

Ensuite, une seconde expérimentation a été votée en 2017, à l'article 39 de la loi n° 2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique. Cet article reprenait à l'identique le texte adopté sept ans plus tôt. À nouveau, l'expérimentation ne put avoir lieu en raison du niveau trop élevé du seuil de cinq années d'emprisonnement 29 ( * ) .

Certaines juridictions étaient pourtant volontaires pour participer à l'expérimentation. Entendue par votre rapporteur, Mme Gwenola Joly-Coz, présidente du tribunal de grande instance de Pontoise, a indiqué que sa juridiction était prête à s'investir dans ce projet.

Il est donc extrêmement regrettable que les gouvernements qui se sont succédé depuis 2010 n'aient pas fait preuve de davantage de volontarisme dans ce domaine, quitte à corriger par la loi les critères qui se seraient révélés inadaptés. Votre rapporteur ne peut s'empêcher de penser que de nombreuses vies auraient été sauvées si tant de temps n'avait pas été perdu. Et le ministère de la justice va devoir maintenant déployer sur l'ensemble du territoire le dispositif du bracelet anti-rapprochement sans bénéficier du précieux retour d'expérience qu'une expérimentation aurait rendu possible.

La commission est favorable aux ajustements proposés par le texte concernant le téléphone grand danger . Elle n'a en revanche pas été convaincue de l'utilité de demander un rapport sur l'élaboration d'une application téléchargeable, constatant qu'une telle application avait déjà été développée.

Votre rapporteur souhaite également insister sur l'importance de la formation et de la sensibilisation des forces de police et de gendarmerie à l'accueil des femmes victimes de violences conjugales . Trop de femmes, pas assez prises au sérieux, sont incitées à déposer une main courante au lieu de déposer plainte. Et trop de plaintes, classées sans suite, n'ont aucune suite judiciaire.

L'annonce, dans le cadre du Grenelle, que les commissariats et postes de gendarmerie seront évalués, en ce qui concerne l'accueil réservé aux femmes victimes de violences, et que les dossiers de féminicides donneront lieu à une analyse détaillée afin de comprendre à quel moment la chaîne pénale a échoué à prévenir le crime, apparaît de ce point de vue prometteuse. Sans attendre les annonces du Grenelle, le procureur de Pontoise, M. Eric Corbaux, entendu par votre rapporteur, a fait réaliser des monographies sur les quatre derniers féminicides intervenus dans sa juridiction : il ressort de cette analyse que trois victimes sur quatre n'avaient jamais engagé de démarches auprès des services de police ou de gendarmerie. Cet exemple souligne la nécessité d'identifier et de lever les freins à la libération de la parole , tant pour les femmes victimes que pour les mineurs victimes.

La spécialisation, dans les grandes juridictions, de magistrats formés à la problématique des violences faites aux femmes constitue également une piste intéressante, déjà suivie d'effets dans certains tribunaux. La création de tribunaux ou de chambres spécialisés, sur le modèle espagnol, mérite également d'être expertisée, même si elle impliquerait des changements de plus grand ampleur dans l'organisation judiciaire.

B. SUR LES MESURES CIVILES

Votre commission a approuvé l'économie générale des mesures proposées en matière civile et, en particulier, accepté la mise en oeuvre d'une ordonnance de protection rénovée .

Elle a, en premier lieu, estimé légitime de fixer au juge aux affaires familiales un bref délai pour délivrer cette ordonnance , afin que celle-ci puisse véritablement devenir un instrument efficace de protection des victimes.

Le délai de six jours à compter de la saisine , initialement prévu par la proposition de loi, semblait objectivement peu réaliste , eu égard à la pratique judiciaire. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale a fait évoluer le texte en prévoyant la computation du délai de six jours à compter de la fixation de la date de l'audience . Votre commission a choisi d' accepter ce dispositif , même si elle n'est pas certaine que ce délai indicatif conduise à réduire, en pratique, la durée des procédures.

Votre commission a, en second lieu, choisi de donner sa chance au bracelet anti-rapprochement, très innovant en droit civil, malgré les interrogations légitimes qu'il peut soulever .

Elle a estimé que les bénéfices de ce nouvel outil , dont l'objectif est d'assurer une protection accrue des victimes de violences conjugales , ainsi que les conditions de son prononcé par le juge aux affaires familiales, qui ne peut se passer du consentement du défendeur , permettaient de surmonter des obstacles juridiques de principe. Il appartiendra ensuite aux juridictions de se saisir de ce nouvel outil pour lui donner toute sa portée.

Elle a toutefois conféré un caractère temporaire à la possibilité donnée au juge aux affaires familiales de proposer le recours au bracelet anti-rapprochement : au terme d'un délai de trois ans , le législateur pourra ainsi décider, sur la base d'une évaluation , de reconduire le dispositif ou de le faire évoluer .

Elle a également adopté des modifications mineures à l'ordonnance de protection , poursuivant l'objectif des députés de s'assurer que l'absence de plainte pénale préalable ou, s'agissant des critères de définition du couple, l'absence de cohabitation, ne pourraient constituer, à eux seuls, des critères de refus de la délivrance d'une ordonnance de protection, voire de la recevabilité de la demande dans la première hypothèse.

Enfin, votre commission a également supprimé un article qui posait une interdiction générale de détenir ou de porter une arme pour les personnes à l'encontre desquelles une ordonnance de protection a été prononcée , considérant que cette interdiction n'était pas cohérente avec les pouvoirs par ailleurs reconnus au juge aux affaires familiales.

C. SUR LE VOLET LOGEMENT

Concernant le chapitre consacré au logement, la commission soutient les mesures prévues par le texte, sous réserve d'améliorations techniques, car elles conforteraient les dispositifs existants et donneraient aux acteurs des outils supplémentaires pour aider les femmes à se reloger.

Le Sénat est traditionnellement peu favorable à la création d'organismes extra-parlementaires dans lesquels députés et sénateurs sont invités à siéger au détriment de leur participation aux travaux de leurs assemblées respectives. C'est pour cette raison que la commission n'a pas souhaité retenir la proposition de l'Assemblée nationale de créer un comité de pilotage , qui compterait quatre parlementaires en son sein, pour superviser le déroulement des deux expérimentations envisagées par le texte.

La commission insiste sur l'importance de compléter les efforts en vue de l'accès au logement par un accompagnement social adapté , assuré par des travailleurs sociaux ou par des associations. Il ne suffit pas de fournir un logement à une femme isolée et traumatisée par la violence qu'elle a subie pour qu'elle surmonte aisément les difficultés qui se présentent à elle. Les associations, qui effectuent un travail remarquable, ont besoin du soutien financier des pouvoirs publics pour continuer à exercer la mission essentielle qu'elles assument auprès des victimes.

*

* *

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée .

EXAMEN DES ARTICLES

CHAPITRE IER
DE L'ORDONNANCE DE PROTECTION
ET DE LA MÉDIATION FAMILIALE

L'intitulé de ce chapitre a été modifié, à l'initiative de votre rapporteur, par l'adoption d'un amendement COM-34 , dans la mesure où ce chapitre contient non seulement des mesures relatives à l'ordonnance de protection mais aussi un article qui concerne la médiation familiale.

Article 1er
(art. 515-10 du code civil)
Conditions préalables requises pour la sollicitation d'une ordonnance
de protection et modalités de déroulement de l'audience devant le juge

L'article 1 er de la proposition de loi tend à exclure expressément l'exigence d'une plainte préalable pour la délivrance d'une ordonnance de protection et à revoir les modalités de l'audience devant le juge.

1. Faire obstacle à l'exigence d'une plainte pénale préalable comme condition de délivrance d'une ordonnance de protection

Le juge aux affaires familiales peut délivrer une ordonnance de protection compte tenu de la vraisemblance 30 ( * ) des faits de violence allégués et du danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés 31 ( * ) .

L'ordonnance de protection est donc une possibilité offerte à la personne qui se déclare victime de violences conjugales, indépendamment de la plainte pénale, qui n'est nullement exigée par la loi 32 ( * ) , comme le rappellent la circulaire de la garde des Sceaux du 9 mai 2019 33 ( * ) ainsi que le guide de la Chancellerie publié en juillet 2019 sur l'ordonnance de protection 34 ( * ) .

Les statistiques du ministère de la justice 35 ( * ) font pourtant état d'une plainte pénale accompagnant la demande d'ordonnance de protection dans 74 % des cas.

Or, si la plainte peut venir à l'appui de la demande d'ordonnance de protection, il ne s'agit en aucun cas d'une condition nécessaire à la recevabilité ou au bien-fondé de la demande . Il semble pourtant, d'après les représentants des avocats et des associations de victimes entendus par votre rapporteur, tout comme d'après la doctrine autorisée, que certaines juridictions font, en pratique, du dépôt de plainte une condition de recevabilité de la demande d'ordonnance de protection .

D'après les informations portées à la connaissance de votre rapporteur par les services de la Chancellerie, seules 15 % des demandes acceptées l'ont été en l'absence d'une plainte ou d'une main courante.

Ces pratiques reflètent sans doute les difficultés d'administration de la preuve en matière d'ordonnance de protection , la victime devant apporter un faisceau d'indices établissant de manière sérieuse le caractère vraisemblable des violences et du danger, le défendeur devant quant à lui prouver la réalité des faits s'il la conteste. Le juge recherche donc des éléments matériels susceptibles d'étayer son jugement . Il peut s'agir d'un dépôt de plainte, d'une main courante, mais aussi d'un certificat médical du médecin généraliste ou d'une unité médico-judiciaire, d'attestations ou encore de témoignages. L'insuffisance des éléments de preuve versés au dossier constitue en effet un motif récurrent de refus de la demande d'ordonnance de protection.

Toutefois, si le juge est libre d'apprécier le bien-fondé de la demande , il n'est pas acceptable que des conditions supra legem soient imposées, qui méconnaissent l'esprit de la loi et portent ainsi atteinte au principe d'égalité entre les victimes.

En toute rigueur, votre rapporteur pourrait être réservée sur l'exclusion formelle de la plainte pénale comme condition de délivrance d'une ordonnance de protection, puisqu'il s'agit du droit positif. Toutefois, compte tenu des pratiques hétérogènes des juridictions et de l'obstacle que cela constitue pour les victimes, elle a choisi d'approuver cette précision.

Elle propose toutefois d' exclure toute plainte pénale préalable et non pas seulement le dépôt de plainte simple visé à l'article 15-3 du code de procédure pénale. Le code de procédure pénale comprend en effet trois types de plaintes : la plainte mentionnée à l'article 15-3 déposée auprès d'un officier ou d'un agent de police judiciaire, la plainte prévue à l'article 40 auprès du procureur de la République ; et la plainte avec constitution de partie civile auprès du juge d'instruction mentionnée à l'article 85.

Or, en précisant que la délivrance d'une ordonnance de protection n'est pas conditionnée au dépôt d'une plainte prévue par l'article 15-3 du code de procédure pénale, il pourrait être sous-entendu qu' a contrario une plainte auprès du procureur de la République ou une plainte avec constitution de partie civile sont nécessaires pour obtenir une ordonnance de protection.

Il importe donc de ne pas risquer d'interprétation a contrario qui viendrait restreindre le champ d'application de l'ordonnance de protection .

Sur proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement COM-35 en ce sens.

2. Renforcer le rôle du ministère public comme partie à la procédure

L'article 1 er tend, en deuxième lieu, à préciser que le ministère public intervient « à fin d'avis » et non plus à fin de réquisition, comme le prévoyait le texte initial de la proposition de loi. Cette précision résulte d'un amendement de notre collègue député Aurélien Pradié, rapporteur, adopté en commission.

Les textes en vigueur confient en effet un rôle particulier au parquet en matière d'ordonnance de protection , puisqu'il est présent à tous les stades de l'instance civile .

L'article 515-10 du code civil dispose en effet que le juge aux affaires familiales « convoque », outre les parties demanderesse et défenderesse, le ministère public, qui n'est toutefois présent que dans 10 % des cas 36 ( * ) . S'il n'est pas à l'initiative de la procédure 37 ( * ) , le procureur de la République reçoit donc notification de la demande d'ordonnance de protection et est convoqué à l'audience. Partie jointe à la procédure, il peut émettre un avis écrit 38 ( * ) .

Il est alors essentiel qu'il transmette au juge aux affaires familiales tout élément pertinent dont il dispose afin d'éclairer le juge sur les antécédents pénaux du défendeur. Il peut ainsi mentionner les éventuelles condamnations, mesures alternatives ou poursuites en cours pour des faits similaires, ou si le défendeur fait l'objet d'un contrôle ou d'un suivi judiciaire. Le parquet peut également développer son avis à l'audience.

D'après la doctrine autorisée et certaines personnes entendues par votre rapporteur, le parquet se contente parfois de donner un avis qui n'est pas toujours étayé ou qui indique seulement que la procédure pénale est en cours. Il ne rend d'ailleurs de conclusions que dans 57 % des cas 39 ( * ) , sans nul doute faute de temps et en raison d'une charge de travail toujours plus grande.

Enfin, le parquet est informé des suites données à toutes les demandes d'ordonnance de protection puisque :

- la décision prise par le juge aux affaires familiales lui est notifiée pour information par remise avec émargement ou envoi contre récépissé (article 1136-9 du code de procédure civile) ;

- il doit procéder à l'inscription au fichier des personnes recherchées des personnes faisant l'objet d'une interdiction de contact ou de détention et de port d'armes (article 230-19 du code de procédure pénale) ;

- le juge aux affaires familiales effectue auprès de lui un signalement sans délai de toute ordonnance de protection délivrée en raison de violences susceptibles de mettre en danger un ou plusieurs enfants, afin de permettre, le cas échéant, la saisine du juge des enfants (article 515-11 du code civil).

Ainsi, en l'état actuel des textes, le procureur de la République a déjà communication de toutes les demandes et décisions d'ordonnance de protection et peut délivrer un avis .

Préciser que le ministère public est convoqué « à fin d'avis » n'emporte en réalité pas de conséquence sur l'état du droit positif mais pourrait permettre de clarifier le rôle du parquet . Son implication peut en effet lui permettre d'engager des poursuites contre l'auteur des faits de violence allégués et d'assurer ainsi la coordination, par une information réciproque, entre la chaîne pénale et la chaîne civile .

3. Revoir les modalités de l'audience du juge aux affaires familiales

À l'initiative de notre collègue député Stéphane Peu, l'Assemblée nationale a décidé que les auditions devant le juge aux affaires familiales auraient lieu séparément, à la demande de la partie demanderesse , et qu'elles se tiendraient en chambre du conseil, transformant de ce fait en obligations ce qui ne sont aujourd'hui que des facultés offertes au juge. Le premier ajout a été adopté contre l'avis du Gouvernement et avec l'avis de sagesse du rapporteur en séance publique. Le second, adopté en commission avec l'avis favorable du rapporteur, n'a pas suscité de difficulté en séance publique.

S'agissant de la tenue séparée des auditions de chacune des parties, dans sa rédaction en vigueur, l'article 515-10 du code civil donne déjà au juge la faculté de convoquer les parties à des auditions séparées.

Cela répond au souci de protéger la victime en évitant qu'elle soit confrontée directement à l'auteur des violences.

La question de systématiser cette comparution séparée s'était déjà posée lors de l'examen de la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, et de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Le Sénat avait alors écarté une telle solution estimant qu'elle n'était pas conforme au principe du contradictoire , corollaire du principe constitutionnel des droits de la défense 40 ( * ) résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et consacré par l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Il craignait qu'en pratique, elle prive le juge d'un moyen d' écarter les demandes abusives , ainsi que de l'un des moyens les plus adaptés et les plus efficaces qu'il possède pour forger son opinion , en confrontant dans la même pièce chacun aux déclarations et aux preuves avancées par l'autre, alors qu' aucune mesure d'instruction spécifique autre que l'audition n'est prévue . L'article 515-11 du code civil dispose d'ailleurs que le juge se prononce « au vu d'éléments probants produits devant lui et contradictoirement débattus ».

En tout état de cause, notre ancien collègue François Pillet, rapporteur de la loi du 9 juillet de 2010 précitée, précisait que, lorsque le juge décidait de tenir des auditions séparées, pour que soit respectée l'exigence du contradictoire, il convient que la partie absente au moment de l'audition puisse avoir connaissance des déclarations de la partie entendue et qu'elle puisse y répondre 41 ( * ) .

Votre commission a donc estimé que la tenue d'auditions séparées n'était pas, en soi, contraire au principe du contradictoire, si le juge aux affaires familiales interroge l'autre partie sur les éléments qui lui ont été communiqués et s'il existe une forme de restitution au défendeur lui permettant d'y répondre.

Ce faisant, la transmission du procès-verbal de l'audition à la partie adverse et sa réponse risquent toutefois d'allonger les délais de la procédure, ce qui explique sans doute pourquoi les juges y ont actuellement peu recours : les parties sont en effet entendues ensemble dans 97 % des affaires 42 ( * ) . Il est toutefois possible d'imaginer que ces auditions se tiennent dans un délai court l'une après l'autre, le temps pour le greffe d'éditer le procès-verbal et pour la partie absente d'en prendre connaissance.

Tenant compte de la sensibilité du contexte pour la victime et de la possibilité pour le juge d'organiser le contradictoire, votre commission a approuvé le principe de la tenue d'auditions séparées dès lors que la partie demanderesse le souhaiterait . Le juge garderait, en outre, la faculté de procéder ainsi s'il l'estime nécessaire.

Quant à la publicité des auditions , à l'heure actuelle, l'article 515-10 du code civil prévoit qu'elles peuvent se tenir en chambre du conseil , c'est-à-dire à huis clos. Il s'agit, de nouveau, d'une simple possibilité. L'article 1 er de la proposition de loi tend à rendre ce format systématique, ce qui correspond à la règle fixée par l'article 1074 du code de procédure civile pour les contentieux familiaux.

Cette question s'était déjà posée lors de l'examen de la loi du 4 août 2014 précitée. Le Sénat avait approuvé la tenue systématique des auditions en chambre du conseil compte tenu du caractère délicat des affaires de violences exercées au sein des couples , qui touchent à l'intimité et à la vie privée des personnes et de la pratique qui est déjà largement celle des auditions en chambre du conseil.

Dans une décision récente par laquelle il a, pour la première fois, déduit des articles 6 et 16 de la Déclaration de 1789 un principe de publicité des audiences devant les juridictions civiles et administratives , le Conseil constitutionnel a jugé qu'il était « loisible au législateur d'apporter à ce principe des limitations liées à des exigences constitutionnelles, justifiées par l'intérêt général ou tenant à la nature de l'instance ou aux spécificités de la procédure, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi » 43 ( * ) .

À cet égard, il a jugé que « si le législateur a prévu, en matière gracieuse et dans les matières relatives à l'état et à la capacité des personnes ou intéressant la vie privée déterminées par décret, que les débats ont lieu en chambre du conseil et que les jugements ne sont pas prononcés publiquement, sans que le juge ne dispose d'un pouvoir d'appréciation sur l'un ou l'autre de ces points, il n'en résulte, compte tenu de la nature des matières en cause ou des enjeux particuliers qu'elles présentent au regard de l'intimité et de la vie privée des personnes, aucune méconnaissance du principe de publicité des audiences ni d'aucune autre exigence constitutionnelle » 44 ( * ) .

Compte tenu de ces éléments, votre commission a approuvé le principe de la systématisation des auditions en chambre du conseil s'agissant de la délivrance d'une ordonnance de protection.

Enfin, par l'adoption d'un amendement COM-39 de son rapporteur , votre commission a distingué les notions d'audience et d'auditions , pour permettre une meilleure compréhension de l'article 515-10 du code civil . Le juge convoquerait ainsi les parties à une audience de jugement, laquelle se tiendrait en chambre du conseil. Les auditions ont lieu lors de cette audience et, si nécessaire, de manière séparée.

Votre commission a adopté l'article 1 er ainsi modifié .

Article 1er bis
(art. 515-9 du code civil)
Critères de conjugalité applicables
à la délivrance d'une ordonnance de protection

Adoptée à l'initiative de notre collègue député Stéphane Peu en séance publique avec l'avis favorable du rapporteur et du Gouvernement, l'article 1 er bis de la proposition de loi tend à préciser que l' ordonnance de protection peut être délivrée en l'absence de cohabitation , en cas de violences exercées au sein du couple ou d'un ancien couple.

Dans sa rédaction en vigueur depuis 2010, l'article 515-9 du code civil dispose qu'une ordonnance de protection peut être délivrée en urgence par le juge aux affaires familiales lorsque des violences sont exercées « au sein du couple ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin » et mettent en danger la personne qui en est victime ou un ou plusieurs enfants.

Les députés à l'initiative de l'amendement, soutenu par le rapporteur, craignent que l'absence de cohabitation, présente ou passée, puisse constituer un critère de refus de l'ordonnance de protection .

D'après les travaux parlementaires de 2010, l'intention du législateur était bien de prendre en compte toutes les formes de conjugalité reconnues par le code civil. Ainsi notre ancien collègue François Pillet, rapporteur, précise que la notion de couple doit être entendue au sens large « marié, partenaire de pacte civil de solidarité ou vivant en union libre » 45 ( * ) .

Aux violences exercées au sein du couple s'ajoutent donc les violences du fait d'un ancien conjoint, d'un ancien partenaire de pacte civil de solidarité ou d'un ancien concubin.

La qualité de conjoint - qui définit la personne unie à une autre par le mariage - ne soulève pas de difficulté. Aux termes de l'article 215 du code civil, « les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie ». Elle implique, traditionnellement, la cohabitation et les relations charnelles entre époux. Les époux peuvent toutefois avoir un domicile distinct, par exemple, pour des raisons professionnelles 46 ( * ) , sans qu'il soit pour autant porté atteinte à la communauté de vie. De même, la séparation de corps met fin au devoir de cohabitation entre époux (article 299 du code civil).

La qualité de partenaire lié par un pacte civil de solidarité ne pose pas, non plus, de grande difficulté . Aux termes de l'article 515-1 du code civil, un « pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune ». S'il est donc dit que les partenaires s'engagent à une « vie commune » (article 515-4 du même code), par écho à la « communauté de vie », à laquelle s'obligent les époux, il n'y a aucun moyen d'en exiger l'exécution. Les partenaires doivent toutefois, aux termes de l'article 515-3 du code civil, faire la déclaration conjointe devant l'officier de l'état civil « de la commune dans laquelle elles fixent leur résidence commune », sauf en cas d'empêchement grave à la fixation de celle-ci.

Dans sa décision sur la loi du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité, le Conseil constitutionnel a jugé « que la notion de vie commune ne couvre pas seulement une communauté d'intérêts et ne se limite pas à l'exigence d'une simple cohabitation entre deux personnes ; que la vie commune mentionnée par la loi déférée suppose, outre une résidence commune, une vie de couple, (...) » et que ces dispositions revêtant un caractère obligatoire, les parties ne peuvent y déroger 47 ( * ) .

Le concubinage est défini par l'article 515-8 du code civil comme une « union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple ». La vie de couple se déduit naturellement de l'existence de relations charnelles qui constituent l'élément fondateur du concubinage. L'exigence de cohabitation pour attester d'une situation de concubinage est appréciée par la jurisprudence au cas par cas, en prenant en compte l'ensemble des éléments qui permettent de caractériser une vie commune et une vie de couple. Ainsi, la Cour de cassation a pu juger, en matière criminelle, que le concubinage supposait une cohabitation entre concubins 48 ( * ) . Toutefois, la cohabitation ne suffit pas forcément à constituer un concubinage 49 ( * ) . En sens inverse, il peut y avoir concubinage même en l'absence de cohabitation, s'il existe des relations stables et durables entre deux personnes 50 ( * ) .

Les membres d'un couple ne sont donc pas toujours tenus de cohabiter mais cela demeure l'un des critères importants d'appréciation de la conjugalité .

Il n'y a, a fortiori , plus de cohabitation chez les anciens conjoints, partenaires de PACS ou concubins . Cette situation n'est toutefois pas totalement à exclure. Il n'est désormais plus rare de voir d'anciens époux continuer de cohabiter, par exemple pour des raisons matérielles.

En l' état du droit positif, les juges aux affaires familiales apprécient très largement la notion de « couple » afin de pouvoir l'appliquer à tout type de relation sentimentale . Ainsi, 13 % des décisions d'ordonnance de protection font état d'une séparation au sens large (et non d'un divorce, d'une dissolution de PACS ou d'une décohabitation) 51 ( * ) .

Les juges aux affaires familiales délivrent ainsi des ordonnances de protection aux couples qui ne cohabitent pas et aucune ordonnance de protection n'a été refusée , d'après les informations portées à la connaissance de votre rapporteur par les services de la Chancellerie, car les parties n'avaient jamais cohabité . Cette solution a toutefois pu être contestée en doctrine, certains auteurs estimant que l'article 515-8 du code civil impose de rapporter la preuve d'une cohabitation. De ce fait, ces auteurs estiment que la jurisprudence 52 ( * ) qui reconnaît une situation de concubinage sans preuve d'une quelconque cohabitation est contestable.

En outre, plusieurs juges du fond ont pu considérer que le danger avait cessé depuis la fin de la cohabitation. Il s'agit d'une appréciation au cas par cas, au regard de la situation particulière des parties.

Votre commission estime légitime de protéger tous les types de couples : ceux qui vivent ensemble, ceux qui viennent de se séparer, ceux qui sont séparés depuis longtemps, ceux qui n'ont pas vécu ensemble.

La référence à l'absence de cohabitation peut être une précision utile afin d'éviter toute incertitude , c'est le choix qui a été fait en matière pénale depuis longtemps . L'article 132-80 du code pénal prévoit ainsi une circonstance aggravante générale en cas d'infraction commise par « le conjoint, le concubin ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, y compris lorsqu'ils ne cohabitent pas ».

La rédaction de l'article 1 er bis de la proposition de loi tel qu'adopté par l'Assemblée nationale répond au même objectif. Pour autant, sa rédaction est perfectible. En effet, préciser que d'anciens concubins ne sont pas tenus de cohabiter semble, à première vue, tautologique. Votre rapporteur estime que c'est la cohabitation passée, lorsqu'ils étaient en couple, qu'il y avait lieu de viser. En outre, cette condition ne concerne pas que les concubins mais peut aussi concerner les époux voire les partenaires de PACS sous certaines réserves.

Favorable à l'objectif poursuivi par l'article 1 er bis , votre commission a adopté, sur la proposition de son rapporteur, un amendement COM-36 visant à préciser à l'article 515-9 du code civil que l'ordonnance de protection peut être délivrée lorsque des violences sont exercées au sein du couple « y compris lorsqu'il n'y a pas de cohabitation » . Cette rédaction consacre ainsi dans la loi le sens majoritaire de la jurisprudence et harmonise les dispositions du code civil avec celles du droit pénal.

Afin de répondre aux craintes des députés, votre rapporteur a également précisé que l'ordonnance pouvait aussi être délivrée s'agissant des anciens couples, « y compris lorsqu'ils n'ont jamais cohabité » .

Dès lors, une ordonnance de protection ne pourra pas, du fait de la loi, être refusée sur le seul fondement de l'absence passée ou présente de cohabitation.

Par ailleurs, lors des débats à l'Assemblée nationale, nos collègues députés se sont inquiétés d'un risque d'exclusion du champ de l'ordonnance de protection des relations sentimentales brèves qui ne relèveraient d'aucune des formes de conjugalité prévues par le code civil.

D'après les éléments indiqués en séance publique par la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, l' ordonnance de protection est déjà applicable à tout type de relation sentimentale, quelle que soit sa nature . Cette situation résulte d'une appréciation souple par les juges de la notion de concubinage , qu'ils appliquent à des réalités très diverses. Le guide de la Chancellerie précité sur l'ordonnance de protection indique d'ailleurs explicitement que celle-ci concerne tous les couples, « peu importe que la relation ait été épisodique ou de longue durée » 53 ( * ) , et mentionne les différentes catégories d'auteurs des faits concernés. Ceux-ci sont les actuels ou anciens conjoints, partenaires de PACS, concubins, compagnons et petits-amis.

Dès lors, il n'a pas semblé opportun à votre commission de créer une quatrième forme juridique de conjugalité, qui serait une source de difficultés et d'insécurité juridiques.

Votre commission a adopté l'article 1 er bis ainsi modifié .

Article 2
(art. 515-11 du code civil)
Délai de délivrance et contenu de l'ordonnance de protection

L'article 2 de la proposition de loi poursuit deux objectifs : accélérer le délai de délivrance de l'ordonnance de protection et renforcer la portée et le contenu des mesures que peut prononcer le juge aux affaires familiales.

1. Accélérer le délai de délivrance de l'ordonnance de protection

Dans sa rédaction initiale , l'article 2 de la proposition de loi prévoyait la délivrance de l'ordonnance de protection par le juge aux affaires familiales dans un délai de six jours maximal à compter de sa saisine . Le texte transmis au Sénat prévoit un délai de six jours à compter de la fixation de la date de l'audience . Il résulte d'un amendement de notre collègue Aurélien Pradié, rapporteur, adopté en commission.

L'article 515-11 du code civil ne prévoit à l'heure actuelle qu'une délivrance « dans les meilleurs délais » . Par cette précision apportée dans la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, le législateur n'entendait pas, à l'évidence, que le délai qu'il jugeait déjà trop long à l'époque - 26 jours en moyenne - s'aggrave encore. D'après le rapport de notre collègue Virginie Klès sur ce projet loi, 46,4 % des ordonnances étaient à l'époque prononcées dans un délai inférieur à 20 jours 54 ( * ) .

Or, le délai moyen de délivrance s'est établi, en 2016, à 42,4 jours en moyenne 55 ( * ) dont dix jours pour le délibéré , ce qui est très long pour une procédure d'urgence dont l'objet est de protéger une victime de violences d'un danger, tel que le vise expressément l'article 515-9 du code civil.

Ce délai s'explique en partie par le choix des modalités de convocation de la partie défenderesse , « par tous moyens adaptés », selon l'article 515-10 du code civil, déclinés dans le code de procédure civile.

Les modalités de convocation des parties

L'article 1136-3 du code de procédure civile dispose que « chaque partie est convoquée par le greffier à l'audience ». Trois procédures différentes sont prévues.

Lorsqu'il est saisi par requête , le greffe convoque les parties par lettre recommandée avec accusé de réception dont le délai de retrait est de quinze jours. C'est alors le greffe qui fixe la date d'audience, en concertation avec le juge, au moment même de sa saisine. 62 % des demandes ont été introduites selon cette voie.

En cas de saisine par assignation en la forme des référés , la date est donnée au demandeur par le greffe. Le demandeur l'insère dans son assignation et l'huissier de justice remet l'assignation au défendeur. Cette procédure est en principe plus rapide mais nécessite de recourir à un huissier de justice. Cette procédure représente 38 % des cas.

Enfin, la convocation par la voie administrative peut être pratiquée en cas de danger grave et imminent pour la sécurité d'une personne concernée par une ordonnance de protection ou lorsqu'il n'existe pas d'autre moyen de notification. Elle peut alors être délivrée dans la journée par officier de police judiciaire, le greffe communiquant la date d'audience fixée en concertation avec le juge aux services de police ou de gendarmerie -parfois par l'intermédiaire du parquet. Très peu de convocations sont délivrées par cette voie.

Un délai de délivrance trop long ne permet pas d'assurer la protection dans l'urgence des femmes qui en auraient besoin . De plus, il peut faire échouer la procédure car la condition de danger peut ne plus être caractérisée au moment où le juge statue . Certains auteurs en doctrine estiment ce risque très important dès lors que la convocation à l'audience dépasse huit jours après la saisine.

Pour pallier ces difficultés, certains tribunaux de grande instance (TGI) ont mis en place des partenariats avec les huissiers de leur ressort. C'est le cas à Bobigny, par exemple, où les huissiers acceptent de délivrer les assignations dans la journée, alors même que la décision d'accorder l'aide juridictionnelle au demandeur n'a pas encore été tranchée, et qu'ils ne sont donc pas payés. Cette procédure permet au TGI d'avoir un délai de délivrance des ordonnances relativement bref. Le rapport de notre ancienne collègue Virginie Klès évoquait un délai de douze jours en moyenne, à compter de la demande 56 ( * ) . Ces exemples ont été suivis par d'autres juridictions, comme le TGI de Pontoise, dont votre rapporteur a entendu la Présidente. Dans cette juridiction, le délai de délivrance d'une ordonnance de protection était, dans le meilleur des cas, de dix jours .

D'après les éléments portés à la connaissance de votre rapporteur par la Chancellerie, les statistiques sur l'ordonnance de protection ont révélé que dans 12,5 % des cas les décisions étaient rendues dans un délai inférieur à quinze jours à compter de la saisine , ce qui démontre que le juge aux affaires familiales est matériellement en mesure de rendre une décision rapide.

Votre rapporteur estime donc légitime de fixer dans la loi un bref délai pour rendre l'ordonnance afin que celle-ci puisse véritablement devenir un instrument efficace. S'agissant d'un délai qui est imposé au juge et non aux parties, aucune nullité de la procédure ne pourrait être envisagée. La seule sanction serait donc un engagement de la responsabilité de l'État .

Au terme des auditions, votre rapporteur a donc examiné les différentes solutions possibles au prisme de deux exigences à concilier : l'urgence de la situation et l'exercice du contradictoire .

Le délai de six jours à compter de la saisine, initialement prévu par la proposition de loi, semblait objectivement peu réaliste, eu égard à la pratique judiciaire telle qu'elle a été présentée à votre rapporteur par les personnes qu'elle a entendues, qu'il s'agisse de magistrats ou de représentants d'associations de victimes.

La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale a fait évoluer le texte en prévoyant la computation du délai de six jours à compter de la fixation de la date de l'audience . Le dispositif suscite encore néanmoins quelques interrogations .

Sans autre précision, le juge n'aurait pas de délai butoir pour fixer l'audience : il pourrait donc fixer l'audience au bout de plusieurs dizaines de jours, d'autant plus que l'obligation de statuer « dans les meilleurs délais » serait supprimée. De plus, ce délai diffèrerait selon le mode de saisine choisi par le demandeur : requête auprès du juge aux affaires familiales, assignation ou convocation par voie administrative. Le juge aurait seulement l'obligation, à compter du moment où il fixerait l'audience, de délivrer l'ordonnance dans les six jours.

En outre, retenir la notion de « fixation de la date de l'audience » comme moment du point de départ d'un délai fixé pour que le juge statue constitue une rédaction inédite. En effet, ce moment n'est pas formalisé, il ne correspond pas à un acte procédural, il s'agit d'un événement informel dont la date est difficile à déterminer et dans la majorité des cas impossible à prouver. Seuls sont formalisés les moments de l'assignation, de la remise de l'assignation, de la saisine par requête ou de l'audience, qui ont une date certaine et identifiable.

Votre commission est consciente des changements qu'impliquerait la computation de ce nouveau délai. Les conséquences devront assurément en être tirées dans la procédure civile relative à l'ordonnance de protection. Elle a choisi d' accepter ce dispositif en raison de son caractère indicatif, parce qu'il laisse au magistrat la maîtrise du point de départ du délai , tout en lui imposant de statuer dans les six jours ensuite.

Votre commission estime que, dans ces conditions, il serait souhaitable de privilégier la voie administrative ou l'assignation . Cette seconde solution impliquerait toutefois de faire évoluer les conditions d'accès à l'aide juridictionnelle dans la mesure où l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle n'est possible actuellement qu'à la condition d'obtenir la délivrance de l'ordonnance de protection.

L'octroi systématique de l'aide juridictionnelle au demandeur d'une ordonnance de protection pourrait certainement résoudre un certain nombre des difficultés actuelles, sous réserve du contrôle du juge ou du bureau d'aide juridictionnelle, même si les risques de demandes abusives semblent faibles dans cette hypothèse. Cette mesure se heurte à l'irrecevabilité posée par l'article 40 de la Constitution, qui prohibe les dispositions créant une charge publique.

En outre, votre commission rappelle qu'en cas d'urgence vitale, le dispositif de l'ordonnance de protection n'est pas adapté à court terme car six jours constituent une durée encore trop longue lorsqu'il y a une menace grave. La voie pénale doit dans cette hypothèse être privilégiée pour traiter la situation.

En tout état de cause, votre rapporteur estime qu'un délai raisonnable pour la délivrance d'une ordonnance de protection devrait se situer à une quinzaine de jours maximum à compter de la saisine du juge aux affaires familiales, ce délai permettant de répondre à l'urgence tout en respectant le principe du contradictoire , comme l'indique du reste le guide de la Chancellerie 57 ( * ) .

2. Renforcer la portée des mesures de l'ordonnance de protection et compléter son contenu

a) Inciter les parties à solliciter toutes les mesures adéquates

À la suite d'un amendement de notre collègue député Aurélien Pradié, rapporteur, adopté en séance publique avec l'avis favorable du Gouvernement, l'article 515-11 du code civil préciserait que le juge aux affaires familiales se prononce sur le contenu de l'ordonnance de protection « après avoir recueilli les observations des parties » sur chacune des mesures qu'il est susceptible de prononcer.

En pratique, lors de l'audience, le juge, qui dirige les débats, demanderait aux parties si elles ont des observations sur tel ou tel point afin de pouvoir en être saisi, et le cas échéant ordonner une des mesures si elle est utile. Le juge ne peut en effet aujourd'hui se prononcer que sur la requête initiale. Cette modification permettrait aux parties de pouvoir, éventuellement, faire de nouvelles demandes lors de l'audience.

Cette précision paraît utile à votre rapporteur puisque le juge civil ne peut statuer que sur des demandes qui ont été formulées (principe de l'« omnia petita » et interdiction de l'« ultra petita ») et ayant fait l'objet d'un débat contradictoire. Elle est en outre davantage conforme aux exigences du procès civil que le texte qui résultait des travaux de la commission, par lequel le juge aurait été tenu de statuer sur chacune des mesures prévues aux 1° à 7° de l'article 515-11 du code civil et ce même en l'absence de demande des parties.

b) Renforcer la portée des mesures existantes

Le juge aux affaires familiales ne peut délivrer une ordonnance de protection que « s'il estime, au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus, qu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés ».

Dans ce cadre, l'article 515-11 du code civil donne compétence au juge pour imposer des interdictions ou des obligations à la partie défenderesse 58 ( * ) , parmi lesquelles les trois mesures dont l'article 2 de la proposition de loi renforcerait la portée.

• L'interdiction de la détention ou du port d'armes comme principe, sauf décision spécialement motivée du juge

Le juge aux affaires familiales qui délivre une ordonnance de protection peut d'ores et déjà « interdire à la partie défenderesse de détenir ou de porter une arme et, le cas échéant, lui ordonner de remettre au service de police ou de gendarmerie qu'il désigne les armes dont elle est détentrice en vue de leur dépôt au greffe » (2° de l'article 515-11 du code civil). Cette mesure est inspirée de la compétence confiée au juge d'instruction ou au juge des libertés et de la détention dans le cadre d'un contrôle judiciaire lorsqu'une personne encourt une peine d'emprisonnement correctionnel ou une peine plus grave. Dans cette hypothèse, le juge pénal peut lui interdire de « détenir ou porter une arme et, le cas échéant, remettre au greffe contre récépissé les armes dont elle est détentrice » (17° de l'article 138 du code de procédure pénale).

Mais cette mesure est seulement sollicitée par 15 % des demandeurs d'une ordonnance de protection .

C'est pourquoi le texte transmis par l'Assemblée nationale prévoit, à la suite d'un amendement du rapporteur adopté en commission, que la décision de ne pas interdire la détention ou le port d'arme soit désormais spécialement motivée par le juge aux affaires familiales , dès lors que le juge aurait par ailleurs prononcé une mesure d'interdiction d'entrer en contact avec la victime . Le principe serait donc celui de l'interdiction, sauf motivation spéciale.

Le code de procédure civile précise à son article 455 que le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens et doit être motivé. Le principe de la motivation spéciale, fréquente en droit pénal, existe aussi en droit civil 59 ( * ) .

La loi imposerait ici au juge de motiver spécialement sa décision de ne pas interdire la détention ou le port d'armes. La loi n'imposerait nullement au juge de prononcer cette mesure et ne méconnaitrait donc pas le principe constitutionnel de l'indépendance de la justice.

• L'éviction du conjoint violent

Le juge a également compétence pour statuer sur la jouissance du logement partagé par le couple. Les 3° et 4° de l'article 515-11 du code civil visent à ce que le logement du couple soit attribué, sauf circonstances particulières, à la partie qui n'est pas l'auteur des violences vraisemblables. Toutes les formes de conjugalité sont concernées.

Le principe est donc déjà l'attribution du logement à la victime, dès lors qu'elle le demande , même si elle a bénéficié d'un logement d'urgence, sauf « circonstances particulières ». Le juge qui attribue le logement au défendeur a déjà l'obligation de motiver dans sa décision ces circonstances particulières. Dès lors, la précision adoptée en séance publique à l'initiative de notre collègue députée Alexandra Louis, selon laquelle il doit motiver spécialement sa décision n'apporte rien au droit en vigueur, mais ne crée pas de difficulté particulière.

• Les modalités d'exercice de l'autorité parentale

L'ordonnance de protection permet au juge aux affaires familiales de se prononcer sur « les modalités d'exercice de l'autorité parentale » et sur les relations financières entre les époux ou les partenaires de PACS (5° de l'article 515-11 du code civil).

L'article 2 tend à préciser que le juge se prononcerait au sens de l'article 373-2-9 du code civil, sur les modalités du droit de visite et d'hébergement. Or, les droits de visite et d'hébergement sont effectivement des modalités de l'exercice de l'autorité parentale. Il s'agit d'une mention qui ne modifie rien au droit positif. Le juge se prononce toujours sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale conformément aux dispositions en vigueur prévues au titre IX du code civil, qui comprend l'article 373-2-9.

Une autre disposition apportée en commission à l'initiative du rapporteur de l'Assemblée nationale tend à faire du droit de visite dans un espace de rencontre ou en présence d'un tiers le principe, sauf décision spécialement motivée, lorsque le juge ordonne l'interdiction de contact prévue au 1° du même article. Si l'interdiction de contact peut être prononcée avec la victime et pas forcément avec l'enfant, il est évident que les conditions de visite et d'hébergement doivent faire l'objet de la plus grande attention du juge, ce que permettrait cette mention.

D'ailleurs, l'article 373-2-11 du code civil dispose que lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, le juge prend notamment en compte « les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre », ce qui paraît évident lorsqu'il statue dans le cadre d'une ordonnance de protection.

À cet égard, certains représentants des avocats entendus lors des auditions ont relaté que cet article était très peu visé par les juges, dans les procédures classiques de fixation des modalités d'exercice de l'autorité parentale, ce que regrette votre rapporteur.

c) Compléter l'ordonnance de protection avec trois nouvelles mesures à l'égard de l'auteur des faits de violence

• L'interdiction de paraître en certains lieux désignés par le juge

À la suite de trois amendements identiques du Gouvernement, du rapporteur et de notre collègue député Guillaume Vuilletet adoptés en commission, le juge aux affaires familiales pourrait « interdire à la partie défenderesse de se rendre dans certains lieux spécialement désignés par le juge aux affaires familiales dans lesquels se trouve de façon habituelle la partie demanderesse ». Cette mesure est destinée à assurer le respect pratique de l'interdiction d'entrer en contact.

Elle est, là encore, inspirée du droit pénal.

Les obligations que peut imposer la juridiction de condamnation ou le juge de l'application des peines dans le cadre du sursis avec mise à l'épreuve, ainsi que celles que peuvent ordonner le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention 60 ( * ) dans le cadre du contrôle judiciaire, présentent en effet de grandes similitudes avec certaines mesures de l'ordonnance de protection. En l'espèce, il s'agit en particulier :

- de l'obligation de s'abstenir de paraître en tout lieu spécialement désigné (article 132-45, 9° du code pénal), ou de ne pas se rendre en certains lieux ou de ne se rendre que dans les lieux déterminés par le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention (article 138, 3° du code de procédure pénale) ;

- de l'obligation de s'abstenir d'entrer en relation avec certaines personnes et en particulier la victime de l'infraction (article 132-45, 13° du code de procédure pénale), ou de s'abstenir de rencontrer certaines personnes spécialement désignées par le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention, ainsi que d'entrer en relation avec elles, de quelque façon que ce soit (article 138, 9° du code de procédure pénale).

L'article 41-1 du code de procédure pénale permet aussi au procureur de la République, dans le cadre des mesures alternatives aux poursuites qu'il peut édicter pour assurer la réparation du dommage causé à la victime, mettre fin au trouble résultant de l'infraction, ou contribuer au reclassement de l'auteur, « de demander à l'auteur des faits de ne pas paraître, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, dans un ou plusieurs lieux déterminés dans lesquels l'infraction a été commise ou dans lesquels réside la victime » (7° de l'article).

En l'état du droit positif, rien n'empêche une personne à l'encontre de laquelle une ordonnance de protection a été prononcée de surveiller son ancienne compagne en se plaçant face à son domicile, près de son lieu de travail ou de l'école des enfants. En effet, un tel comportement ne rentre pas nécessairement dans l'interdiction d'entrer en contact.

Cette mesure nouvelle d'interdiction de paraître constitue, à l'évidence, une restriction de la liberté d'aller et venir, résultant des articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789 61 ( * ) , qui est une composante de la liberté personnelle reconnue par le Conseil constitutionnel. Elle est inédite en matière civile, puisqu'elle n'existe à ce jour qu'en matière pénale ou administrative.

Le prononcé de la mesure, valable six mois maximum sauf exceptions, pourrait être contesté, comme toute ordonnance de protection, dans un délai de quinze jours. Le juge pourrait également, en application de l'article 515-12 du code civil, la modifier ou la supprimer à tout moment à la demande de l'une ou l'autre des parties et s'il l'estime nécessaire.

Le non-respect de cette mesure serait puni de deux ans d'emprisonnement et d'une amende, comme toutes les obligations ou interdictions visées dans une ordonnance de protection (articles 227-4-2 et 227-4-3 du code pénal).

Le texte tel qu'il a été voté par l'Assemblée nationale dispose que les lieux où la personne aurait interdiction de paraître seraient « spécialement désignés par le juge » mais correspondraient à des lieux « dans lesquels se trouve de façon habituelle la partie demanderesse ».

Il reviendrait donc au juge de proportionner l'interdiction de paraître au danger encouru par la victime et, en particulier, de déterminer les lieux concernés par une telle interdiction, sans soumettre les intéressés à une rigueur qui ne serait pas nécessaire, dans un cadre civil où ils ne sont ni condamnés ni même poursuivis.

• La proposition au défendeur d'un accompagnement social, sanitaire, psychologique ou d'un stage de responsabilisation

En séance publique, à l'initiative, de notre collègue député rapporteur, le juge aux affaires familiales pourrait proposer à la partie défenderesse :

- une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ;

- ou un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes.

En cas de refus, le procureur de la République serait immédiatement avisé.

Ces dispositions, de nouveau inspirées de dispositifs existant en matière pénale, ont été adoptées avec l'avis favorable du Gouvernement.

Dans le cadre du régime de la mise à l'épreuve, la juridiction de condamnation ou le juge de l'application des peines peuvent imposer au condamné de se soumettre à des mesures d'examen médical, de traitement ou de soins même sous le régime de l'hospitalisation (article 132-45, 3° du code pénal). Le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention peuvent également ordonner une mesure similaire dans le cadre du contrôle judiciaire (article 138, 10° du code de procédure pénale).

En revanche, l'article 41-1 du code de procédure pénale permet au procureur de la République de « demander » à l'auteur des violences de faire l'objet d'une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique, dans le cadre d'une mesure alternative aux poursuites. Si l'auteur des violences ne le fait pas, le procureur met en oeuvre une composition pénale ou engage des poursuites.

Les dispositions insérées à l'article 515-11 du code civil par l'article 2 de la proposition de loi diffèrent toutefois du droit pénal s'agissant du niveau de contrainte. Au civil il s'agit d'une proposition, au pénal d'une injonction. Il n'appartient pas au juge civil de soumettre une personne à une injonction, même thérapeutique. Comme l'a relevé la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, lors des débats, toute injonction touchant à la liberté de disposer de son corps sans le consentement de la personne doit relever d'un juge pénal.

• Le bracelet anti-rapprochement : donner sa chance à une mesure innovante en droit civil

L'article 2 de la proposition de loi tend également à créer un nouvel article 515-11-1 du code civil, qui permettrait au juge aux affaires familiales , lorsqu'il prononce la mesure d'interdiction d'entrer en contact , d'ordonner le port par les deux parties et avec leur consentement , d'un « dispositif électronique mobile anti-rapprochement ». Celui-ci aurait pour objet de signaler à tout moment à la victime que l'auteur des violences se rapprocherait d'une certaine distance qui serait fixée par le juge dans l'ordonnance de protection . Le juge aux affaires familiales aviserait immédiatement le procureur de la République en cas de refus du défendeur de porter le bracelet anti-rapprochement.

Le consentement du défendeur , qui n'était pas prévu dans la proposition de loi initiale, a été ajouté à l'initiative du Gouvernement et du rapporteur en commission, afin d' assurer la constitutionalité du dispositif, compte tenu du niveau de contrainte d'un tel dispositif sur une personne qui ne fait pas l'objet de poursuites pénales et qui n'est, a fortiori , pas condamnée .

Le port d'un bracelet électronique hors de toute procédure pénale est inédit . Le dispositif diffère toutefois de celui qui est proposé en matière pénale .

D'une part, alors qu'au plan pénal, deux interdictions de rapprochement seraient créés aux articles 138-3 du code de procédure pénale et 132-45-1 du code pénal, en matière civile, le dispositif « permet de signaler que la partie défenderesse se trouve à moins d'une certaine distance de la partie demanderesse », sans pour autant interdire à la seconde de s'approcher de la première.

Il s'agirait donc, en matière civile, d'un dispositif technique permettant de s'assurer que l'interdiction de contact prévue par le 1° de l'article 515-11 est respectée et non pas d'une interdiction de rapprochement, pénalement sanctionnée (leur violation peut entraîner une incarcération). Ce ne serait alors qu'en cas de contact avec la victime que le délit de non-respect de l'ordonnance de protection serait constitué.

Le bracelet serait donc, en matière civile, un outil de prévention de la commission d'éventuelles infractions qui ne pourrait pas être interprété comme une peine ou une sanction.

Dans cette hypothèse, s'appliquerait tout de même le principe qui, en matière de restrictions apportées à la liberté individuelle, à la liberté personnelle ou au respect de la vie privée, prohibe la rigueur non nécessaire qui trouve sa source dans les articles 4 et 9 de la Déclaration de 1789 62 ( * ) . Le port d'un bracelet anti-rapprochement constituerait, à l'évidence, un niveau de contrainte supplémentaire par rapport aux mesures que peut aujourd'hui prononcer le juge aux affaires familiales , juge civil qui ne dispose pas des pouvoirs d'enquête dévolus au juge pénal et se prononce sur des faits « vraisemblables » .

Matériellement, il s'agirait en effet pour le défendeur du même dispositif que l'actuel bracelet qui permet le placement sous surveillance électronique . La géolocalisation permanente et les conséquences du bracelet pourraient constituer une restriction à sa liberté personnelle (liberté d'aller et venir, droit à la vie privée). En effet, dès lors qu'il se rapprocherait à une certaine distance de la victime, il serait contacté pour changer d'itinéraire.

D'ailleurs, le cadre choisi en matière pénale montre que le port de ce bracelet ne peut, dans l'échelle des peines, correspondre qu'à des infractions d'une certaine gravité, puisque seules les infractions punies d'au moins trois ans d'emprisonnement pourraient donner lieu au prononcé dudit bracelet. Le droit en vigueur place d'ailleurs, dans l'échelle des peines, le bracelet électronique en deuxième position après la détention.

Il est vrai, néanmoins, qu' à la différence du dispositif pénal, l'exigence de consentement préalable vient tempérer l'atteinte à la liberté d'aller et venir, tandis que les objectifs que cette mesure poursuit, à savoir la prévention des atteintes à l'ordre public et à la sécurité des personnes 63 ( * ) , pourrait la faire regarder comme proportionnée .

Aucune garantie existant en matière pénale 64 ( * ) n'est toutefois prévue en matière civile. Le dispositif électronique doit ainsi, en matière pénale, « garantir le respect de la dignité, de l'intégrité et de la vie privée de la personne et ne pas entraver son insertion sociale », alors que rien n'est précisé en matière civile. S'agissant du même matériel, il est évident que, par capillarité, les bracelets utilisés en matière civile devront aussi être conformes à ces principes. De même, l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) n'est pas prévu s'agissant du fichier qui régirait le bracelet, mais cette précision relève de la procédure civile, matière relevant du règlement.

D'autre part, alors qu'en matière pénale, l'alternative à la pose du bracelet anti-rapprochement est l'incarcération, en matière civile, en cas de refus du défendeur, le juge aux affaires familiales ne pourrait qu'aviser immédiatement le procureur de la République, qui seul décide ensuite de l'opportunité des poursuites, ce qui semble moins dissuasif mais mieux correspondre à un cadre civil.

L'intérêt pratique d'une telle mesure n'est donc pas assuré .

Certaines personnes entendues par votre rapporteur doutent d'ailleurs que les juges aux affaires familiales se saisissent d'une telle mesure qui n'est pas dans leur office traditionnel. Ces juges rencontreront, de plus, des difficultés de suivi de l'exécution de la mesure. Quels agents en seront chargés ? Probablement des agents de l'administration pénitentiaire, ce qui montre bien, une fois de plus, les difficultés à insérer des mesures d'origine pénale dans un cadre civil.

À cet égard, la comparaison avec le modèle espagnol n'est pas complètement pertinente puisque l'Espagne a créé des juridictions spécialisées en matière de violences conjugales , composées de juges disposant de prérogatives en matière pénale et civile. Toute tentative de transposition se heurte donc à des difficultés un peu lourdes auxquelles la proposition de loi a tenté de remédier , en imposant notamment le consentement du défendeur.

Votre commission a choisi de donner sa chance au bracelet anti-rapprochement, très innovant en droit civil, malgré les interrogations légitimes qu'il peut soulever .

Elle a estimé que les bénéfices de ce nouvel outil, dont l'objectif est d'assurer une protection accrue des victimes de violences conjugales, ainsi que les conditions de son prononcé par le juge aux affaires familiales, qui ne peut se passer du consentement du défendeur, permettaient de surmonter les obstacles juridiques de principe. Il appartiendra ensuite aux juridictions de se saisir de ce nouvel outil pour lui donner toute sa portée. Votre commission rappelle toutefois que la délivrance d'une ordonnance de protection ne peut in fine se substituer à la voie pénale, seule voie efficace pour assurer la répression des infractions.

Votre commission a adopté l'article 2 sans modification.

Article 2 bis
(art. 373-2-10 du code civil)
Interdiction pour le juge de proposer une médiation familiale
en cas de violences intrafamiliales

Introduit en séance publique à l'initiative de notre collègue député Stéphane Peu avec un avis de sagesse du Gouvernement et l'avis favorable du rapporteur à titre personnel, l'article 2 de la proposition de loi a pour objet d' écarter la possibilité pour le juge aux affaires familiales de proposer aux parents en désaccord, s'agissant des modalités de l'exercice de l'autorité parentale, une mesure de médiation lorsque des violences sont alléguées par l'un des parents sur l'autre parent ou sur l'enfant .

Le droit en vigueur exclut déjà , au dernier alinéa de l'article 373-2-10 du code civil, la possibilité pour le juge d'enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur familial pour recevoir une simple information sur l'objet et le déroulement d'une médiation, lorsque des violences intrafamiliales du même ordre ont été commises.

Le Sénat, à l'occasion de l'examen de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, s'était opposé à cette disposition, considérant qu'elle marquait une certaine défiance à l'égard du juge et que celui-ci n'userait pas de cette faculté si elle allait à l'encontre des intérêts de l'une des parties ou de l'enfant du couple 65 ( * ) .

Il semble effectivement que le juge est le mieux placé pour apprécier la situation et, le cas échéant, l'asymétrie de la relation conjugale et mener les débats en conséquence. Les juges savent qu'imposer une médiation dans une situation de violences est impossible et même plus largement dans les situations dysfonctionnelles ou d'emprise - même sans violences - car il n'est pas possible de placer les deux parties dans une relation d'égalité.

Votre rapporteur a toutefois constaté que la prohibition de la médiation familiale en cas de violences conjugales était une demande forte des associations qu'elle a pu entendre et dont elle a pu consulter les contributions.

Ces associations mettent en évidence que les situations de violences au sein du couple ou intrafamiliales impliquent un rapport d'emprise incompatible avec le dialogue équilibré et respectueux qu'exige une médiation . De plus, du fait de l'emprise exercée par leur agresseur, les victimes peuvent se sentir forcées de consentir à la médiation . En effet, face à un juge, certaines victimes de violences n'osent pas refuser de participer à une médiation familiale par peur d'être sanctionnées dans la suite de la procédure judiciaire, par manque d'information sur le déroulement de cette procédure ou en raison de l'emprise exercée par leur agresseur.

Compte tenu du droit en vigueur qui impose déjà au juge de ne pas enjoindre de rencontrer un médiateur à titre d'information et d'une attente forte qui lui a semblé légitime en la matière, il est apparu cohérent à votre rapporteur d'étendre cette précaution à la proposition que peut faire le juge de recourir à une médiation .

Outre une extension du principe d'interdiction de la médiation en cas de violences aux deux hypothèses de l'article 373-2-10 du code civil, l'article 2 substitue aux termes de « violences commises » celui de « violences alléguées ».

Suffirait-il d'alléguer de violences, possiblement de manière dilatoire, pour que cela interdise toute tentative de médiation ? En réalité, il ne semble pas que cette modification rédactionnelle emporte de lourdes conséquences.

Dans sa décision sur la loi du 18 novembre 2016 précitée, le Conseil constitutionnel a jugé que « le législateur n'avait pas entendu subordonner l'interdiction faite au juge aux affaires familiales d'enjoindre aux parties de recevoir une information sur l'objet et le déroulement d'une médiation familiale en cas de violences intrafamiliales à la condition que ces violences aient donné lieu à condamnation pénale ou au dépôt d'une plainte » 66 ( * ) . Le Conseil ajoute d'ailleurs que le législateur n'a pas davantage entendu dispenser les parents séparés de faire une tentative de médiation dans ces seules hypothèses et qu' « il appartiendra donc au juge d'apprécier la réalité des violences pour l'application du troisième alinéa de l'article 373-2-10 du code civil ».

En conséquence, une circulaire de la Chancellerie du 26 juillet 2017 67 ( * ) indique que le « juge devra apprécier s'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblable la commission des faits de violences allégués au vu des éléments produits devant lui conformément aux règles applicables au procès civil et contradictoirement débattus ». Les termes de « violences alléguées » qu'introduit l'article 2 bis sont donc déjà employés par la Chancellerie elle-même, reprenant les conditions de l'ordonnance de protection - sans l'exigence du danger - délivrée sur la base de la « vraisemblance de faits de violences allégués ».

Votre commission a adopté l'article 2 bis sans modification .

Article 2 ter (supprimé)
(art. L. 312-3-2 nouveau du code de la sécurité intérieure)
Interdiction d'acquérir et de détenir une arme pour les personnes visées par une ordonnance de protection

1. Le dispositif proposé : une interdiction automatique et sans limitation de durée

Cet article additionnel est issu de l'adoption d'un amendement du député Guillaume Vuilletet et des membres du groupe La République en Marche (LaREM), adopté avec un avis favorable du rapporteur et du Gouvernement.

Il tend à créer dans le chapitre du code de la sécurité intérieure relatif à l'acquisition et à la détention d'armes et de munitions un nouvel article L. 312-3-2.

Ce nouvel article interdit aux personnes « à l'encontre desquelles a été rendue une ordonnance de protection en application de l'article 515-11 du code civil » d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie. Si l'ordonnance de protection, prise dans le cadre civil, n'est pas prononcée à l'encontre d'une partie, il s'agit par cette formulation de désigner, comme l'a indiqué lors des débats la garde des Sceaux, les « défendeurs visés par une ordonnance de protection ».

L'article pose une interdiction automatique d'acquisition et de détention d'arme, quelle qu'en soit la catégorie. Cette interdiction s'appliquerait, en l'état de sa rédaction, sans limitation de durée puisqu'aucun terme n'est prévu à l'interdiction une fois que l'ordonnance a été rendue.

L'article L. 312-3-1 du code de la sécurité intérieure permet déjà à l'autorité administrative d'interdire l'acquisition et la détention des armes de catégories A, B et C aux personnes dont le comportement laisse craindre une utilisation de ces armes dangereuse pour elle-même ou pour autrui.

2. La position de votre commission

Destiné à envoyer un « signal clair » sur l'importance de la nécessité d'interdire aux auteurs de violences de détenir ou d'acquérir des armes, cet article souffre de nombreuses malfaçons dans sa rédaction et son articulation avec les dispositifs existants ou prévus par la proposition de loi.

Cette interdiction générale paraît difficile à concilier avec l'article 2 de la proposition de loi qui donne la possibilité au juge aux affaires familiales (JAF) de ne pas interdire la détention ou le port d'arme par une décision spécialement motivée.

Lors de la discussion de l'amendement à l'Assemblée nationale, le rapporteur a en outre émis des interrogations sur la constitutionnalité du dispositif, arguments auxquels la garde des Sceaux a répondu dans les termes suivants : « J'entends les interrogations, que vous avez vous-même soulevées et que M. le rapporteur s'est également appropriées, quant à une interdiction de détention d'armes qui reposerait non sur une condamnation pénale, mais sur un jugement civil. Sans doute y a-t-il ici matière à réflexion : on pourrait préciser et améliorer le dispositif pour le borner dans le temps, ou mieux définir les catégories d'armes visées. Nous pouvons mener ce travail lors de la navette, en lien étroit avec le ministère de l'intérieur, compétent sur ces questions. Il faudrait également travailler sur le caractère opérationnel de la mesure en prévoyant d'informer l'autorité administrative des ordonnances de protection qui auront été prononcées, car elle ne les connaît pas de manière automatique. En tout cas, cet amendement représente un très bon point de départ et j'y suis favorable . »

Lors de ses auditions, votre rapporteur n'a pu que constater l'inachèvement de la réflexion du Gouvernement sur ce point. En tout état de cause, il n'est pas certain qu'il soit utile de prévoir une interdiction générale dans le code de la sécurité intérieure au regard des possibilités offertes au JAF ou à l'autorité administrative d'interdire la détention d'arme.

Pour ces raisons, votre commission a adopté l' amendement COM-27 de suppression de l'article, présenté par le rapporteur.

Votre commission a supprimé l'article 2 ter .

Article 2 quater (nouveau)
Caractère temporaire
du bracelet anti-rapprochement en matière civile

Issu de l'adoption d'un amendement COM-40 de votre rapporteur, l'article 2 quater de la proposition de loi tend à conférer un caractère temporaire au bracelet anti-rapprochement en matière civile qui s'appliquerait seulement jusqu'au 31 décembre 2022 .

Ce dispositif qui serait créé à l'article 515-11-1 du code civil par l'article 2 de la proposition de loi, constituerait un nouvel outil d'urgence auquel pourrait recourir le juge aux affaires familiales dans le cadre de l'ordonnance de protection.

Il est particulièrement innovant en matière civile et soulève des interrogations légitimes 68 ( * ) .

Dès lors, votre commission souhaite, avant de le pérenniser à compter du 31 décembre 2022, en évaluer la mise en oeuvre par les juridictions et en ajuster, si nécessaire, le dispositif.

Votre commission a adopté l'article 2 quater ainsi rédigé .

CHAPITRE II
DE L'ÉLARGISSEMENT DU PORT
DU BRACELET ANTI-RAPPROCHEMENT

Article 3
(art. 131-4-1, 131-22, 132-45, 132-45-1 [nouveau] et 222-18-3 du code pénal, art. 471 et 712-19 du code de procédure pénale)
Port du bracelet anti-rapprochement en cas de condamnation pénale

1. Le dispositif initial de la proposition de loi

Dans sa version initiale, la proposition de loi tendait à modifier deux articles du code pénal :

- d'une part, l'article 131-4-1, dans sa rédaction issue de la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, relatif à la peine de détention à domicile sous surveillance électronique.

La peine de détention à domicile sous surveillance électronique est une peine autonome qui représente une alternative à l'emprisonnement. Elle emporte, pour le condamné, l'obligation de demeurer dans son domicile et de porter un dispositif intégrant un émetteur permettant de vérifier le respect de cette obligation. Le condamné n'est autorisé à s'absenter de son domicile pendant des périodes déterminées par la juridiction ou le juge de l'application des peines que pour le temps nécessaire à l'exercice d'une activité professionnelle, au suivi d'un enseignement, d'un stage, d'une formation ou d'un traitement médical, à la recherche d'un emploi, à la participation à la vie de famille ou à tout projet d'insertion ou de réinsertion.

Il était proposé que, lorsque la peine de détention à domicile sous surveillance électronique est prononcée à l'encontre de l'auteur d'un délit commis sur le conjoint, concubin ou partenaire de pacte civil de solidarité (PACS) et qu'elle est assortie d'une interdiction de rencontrer la victime, cette dernière puisse se voir proposer un « dispositif électronique permettant de signaler à distance que la personne condamnée se trouve à proximité », c'est-à-dire un bracelet anti-rapprochement . Le coût du dispositif aurait été à la charge de la personne condamnée ;

- d'autre part, la proposition de loi tendait à modifier l'article 131-36-12-1 du code pénal, qui concerne les personnes condamnées à un suivi socio-judiciaire . Le suivi socio-judiciaire vise à favoriser la réinsertion et à prévenir la récidive en soumettant le condamné, sous le contrôle du juge de l'application des peines (JAP), à des mesures de surveillance et d'assistance, comme une injonction de soins par exemple. Il peut être prononcé en complément d'une peine privative de liberté.

À titre de mesure de sûreté, le suivi socio-judiciaire peut déjà prévoir un placement sous surveillance électronique mobile, c'est-à-dire l'obligation pour le condamné de porter un bracelet électronique. Le bracelet électronique permet de s'assurer de la présence du condamné à son domicile à certaines heures déterminées. Cette possibilité est notamment ouverte, à l'article 131-36-12-1, lorsqu'une expertise médicale a constaté la dangerosité d'un individu condamné pour des faits de violences ou de menaces, commis contre son conjoint, concubin ou partenaire de PACS ou contre les enfants du foyer.

Dans ce cadre, et si le suivi socio-judiciaire comporte une interdiction pour le condamné de rencontrer la victime , la proposition de loi indiquait que cette dernière aurait pu se voir proposer un bracelet anti-rapprochement , aux frais du condamné. Cette mesure aurait pu s'ajouter au placement sous surveillance électronique mobile, le même bracelet permettant de contrôler le respect des deux mesures.

2. Un dispositif largement remanié à l'Assemblée nationale

La commission des lois de l'Assemblée nationale a entièrement réécrit l'article 3 en adoptant, avec l'avis favorable du rapporteur, deux amendements identiques CL 81 et CL 91, présentés respectivement par les membres du groupe La République en Marche (LaREM) et par le Gouvernement.

a) Présentation du dispositif

Cette nouvelle rédaction tend à prévoir que le port du bracelet anti-rapprochement pourra être imposé dans le cadre du sursis avec mise à l'épreuve (SME), auquel se substituera le sursis probatoire à compter du 24 mars 2020, en application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice 69 ( * ) .

Le SME (ou le sursis probatoire) est un dispositif, prévu à l'article 132-40 du code pénal, qui permet à une juridiction qui prononce une peine d'emprisonnement d'ordonner qu'il soit sursis à son exécution, en contrepartie d'un certain nombre d'obligations que le condamné doit respecter pendant la durée de sa mise à l'épreuve (ou de sa période de probation). Le condamné peut être incarcéré s'il ne respecte pas les obligations auxquelles il est astreint.

L'article 132-44 du même code fixe la liste des mesures de contrôle auxquelles tout condamné doit se soumettre dans le cadre d'un SME ou d'un sursis probatoire (répondre aux convocations du JAP, recevoir les visites d'un travailleur social, etc .).

L'article 132-45 du code pénal contient ensuite une liste, plus longue, de mesures que la juridiction peut choisir d'imposer au condamné : par exemple, exercer une activité professionnelle, réparer le dommage qu'il a causé, accepter de suivre un traitement médical, effectuer un stage ou encore s'abstenir de paraître en certains lieux ou de rencontrer certaines personnes, dont la victime.

Il est d'abord proposé (au du paragraphe I du présent article) de compléter l'article 132-45 du code pénal pour ajouter à la liste des obligations qui peuvent être imposées au condamné le fait de respecter une interdiction, contrôlée par un dispositif électronique, de se rapprocher d'une victime de violences commises au sein du couple .

Puis il est proposé (au du paragraphe I ) d'insérer dans le code pénal un nouvel article 132-45-1 pour définir le régime applicable à ce « dispositif électronique », c'est-à-dire au bracelet anti-rapprochement.

Le nouvel article 132-45-1 préciserait d'abord pour quelles infractions la juridiction pourrait ordonner le recours au bracelet électronique :

- pour les infractions commises contre le conjoint, le concubin, ou le partenaire de PACS, même lorsqu'ils ne cohabitent pas (ce qui permettrait de sanctionner un compagnon qui n'a jamais emménagé avec la victime) ;

- pour les infractions commises par l'ancien conjoint, l'ancien concubin ou l'ancien partenaire de PACS ;

- à condition que les infractions précitées soient punies d'au moins trois ans d'emprisonnement, ce qui permettrait de couvrir toutes les violences entre conjoints et certaines menaces (menace avec ordre 70 ( * ) , menace de mort).

Afin que le port du bracelet électronique soit possible en cas de menace sans ordre commise par le conjoint, le concubin ou le partenaire de PACS, le du paragraphe I propose de porter à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 euros d'amende la peine encourue, au lieu de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende comme c'est le cas aujourd'hui. Cette modification permettrait d'élargir les cas de recours au bracelet anti-rapprochement et de couvrir toutes les hypothèses de violences ou menaces au sein du couple .

Le recours au bracelet électronique serait décidé soit à la demande de la victime, soit à l'initiative de la juridiction de jugement, mais avec l'accord exprès de la victime recueilli par tout moyen.

Le port du bracelet viendrait à l'appui d'une interdiction faite au condamné de se rapprocher de la victime à moins d'une certaine distance .

Afin d'assurer le respect de cette interdiction, le condamné serait astreint au port, pendant toute la durée de la mesure, d'un bracelet intégrant un émetteur permettant à tout moment de déterminer à distance sa localisation sur le territoire et permettant de déterminer s'il s'approche de la victime, à laquelle serait attribué un dispositif de téléprotection permettant également de déterminer sa localisation.

La pose du bracelet ne pourrait être effectuée sans le consentement du condamné ; toutefois, un refus constituerait une violation de ses obligations pouvant justifier la révocation du SME ou du sursis probatoire , et donc son incarcération.

Le dispositif serait homologué par le ministre de la justice, sa mise en oeuvre devant garantir le respect de la dignité, de l'intégrité et de la vie privée de la personne sans entraver son insertion sociale.

Un décret, pris après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), préciserait les modalités d'application de l'article.

Ce décret devra en particulier autoriser la mise en oeuvre d'un traitement automatisé de données à caractère personnel assurant le contrôle à distance de la localisation du condamné et de la victime, en reprenant, le cas échéant, les finalités du traitement prévu par l'article 763-13 du code de procédure pénale. Cet article 763-13, qui concerne les personnes placées sous surveillance électronique, autorise les officiers de police judiciaire (OPJ) habilités à consulter les données figurant dans ce traitement dans le cadre des recherches relatives à une procédure concernant un crime ou un délit.

Les personnes contribuant au contrôle à distance pourront être des personnes privées, habilitées dans des conditions prévues par ce même décret, étant précisé que ce contrôle ne pourra avoir pour effet d'imposer la présence du condamné dans certains lieux.

b) Un champ d'application plus large par le jeu des renvois

Le bracelet anti-rapprochement pourra être utilisé dans d'autres hypothèses que le SME ou le sursis probatoire dans la mesure où plusieurs dispositions renvoient à l'article 132-45 du code pénal.

Ainsi, il pourra être utilisé dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire, d'une libération conditionnelle 71 ( * ) , d'une libération sous contrainte 72 ( * ) , d'une surveillance judiciaire 73 ( * ) ou d'une surveillance de sûreté 74 ( * ) . Le bracelet anti-rapprochement pourra donc être ordonné non seulement par la juridiction de jugement mais aussi par les juridictions de l'application des peines .

Pour la peine de détention à domicile sous surveillance électronique créée, à compter du 24 mars 2020, par la loi du 23 mars 2019 précitée, ce renvoi a été omis par le législateur. Le du paragraphe I du présent article 3 comble cette lacune.

Le du même paragraphe corrige une erreur de rédaction à l'article 131-22 du code pénal, relatif à la peine de travail d'intérêt général (TIG). Cette peine a également été créée par la loi du 23 mars 2019 et elle entrera elle aussi en vigueur en mars 2020. Il s'agit ici de supprimer le renvoi à l'article 132-45, qui n'a pas de raison d'être dans le cadre d'un TIG.

c) Les mesures de coordination dans le code de procédure pénale

Le paragraphe II a été introduit en séance publique à l'initiative du rapporteur, avec l'avis favorable du Gouvernement.

Il contient deux mesures de coordination dans le code de procédure pénale.

La première porte sur l'article 471 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 23 mars 2019, qui entrera en vigueur le 24 mars 2020. Il s'agit de prévoir que la peine de détention à domicile sous surveillance électronique puisse faire l'objet d'une exécution provisoire, sans quoi l'appel de la personne condamnée en première instance ferait obstacle à la pose du bracelet anti-rapprochement dans l'attente du prochain jugement.

La seconde porte sur l'article 712-19 du même code et concerne également la future peine de détention à domicile sous surveillance électronique : elle vise à donner la possibilité au JAP d'ordonner une incarcération provisoire si le condamné ne respecte pas ses obligations, dans l'attente du débat contradictoire qui pourra décider de son emprisonnement définitif.

3. La position de votre commission

Le bracelet anti-rapprochement, dont les modalités de fonctionnement ont été précisées dans l'exposé général du présent rapport, constitue un outil intéressant dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Cet outil a fait ses preuves en Espagne , où il est utilisé depuis une dizaine d'années, comme moyen de dissuasion des hommes violents et de prévention des agressions.

L'utilisation de ce bracelet dans le cadre pénal ne suscite pas d'objections de principe : le port du bracelet viendrait à l'appui d'une interdiction de rapprochement décidée par la juridiction de jugement, au terme d'une procédure qui garantit le respect des droits de la défense et de la présomption d'innocence. Le juge pénal, habitué à prononcer des mesures privatives ou restrictives de liberté, ne devrait pas rencontrer de difficultés pour s'approprier cet outil et le mettre en oeuvre dans l'intérêt de la protection des victimes.

Le succès de la mesure dépendra donc surtout de la capacité du Gouvernement à réunir rapidement les conditions techniques et organisationnelles nécessaires à son succès et à promouvoir ce nouveau dispositif auprès des juridictions.

Favorable au déploiement du bracelet anti-rapprochement, la commission a seulement adopté à cet article un amendement COM-25 de précision rédactionnelle du rapporteur. Cet amendement vise tout d'abord à employer l'expression de « dispositif électronique mobile anti-rapprochement » dans le code pénal, afin de bien distinguer ce nouveau dispositif des bracelets électroniques qui existent aujourd'hui et qui permettent de contrôler que le condamné se trouve bien à son domicile. Ensuite, l'amendement propose de retenir l'expression « dispositif électronique » pour désigner le boîtier remis à la victime, au lieu de l'expression « dispositif de téléprotection », qui est déjà utilisée dans le code pénal pour désigner le téléphone grand danger, ce qui pourrait être source de confusion. Enfin, l'amendement impose que le décret d'application soit un décret en Conseil d'État, ce qui se justifie par la sensibilité de la matière, qui touche aux libertés individuelles, mais aussi par un souci d'harmonisation avec l'article 2 de la proposition de loi qui renvoie déjà à un décret en Conseil d'État.

La commission a également adopté un amendement COM-6 , déposé par notre collègue Jean-Pierre Grand, qui procède à une coordination à l'article 745 du code de procédure pénale.

Cet article prévoit que lorsque le condamné à une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve est soumis à une interdiction de paraître en certains lieux ou à une interdiction d'entrer en contact avec la victime, cette dernière est informée, par le juge de l'application des peines ou par le service pénitentiaire d'insertion et de probation, de la fin de la mise à l'épreuve. L'amendement étend cette obligation d'information au cas où le condamné serait soumis à une interdiction de rapprochement. Votre rapporteur a fait observer que cette information serait nécessairement dispensée puisque la victime sera invitée à restituer son boîtier électronique. La commission a néanmoins jugé utile de le préciser dans la loi afin de s'assurer que cette information sera effectivement dispensée.

Votre commission a adopté l'article 3 ainsi modifié .

Article 4
(art. 138 et 138-3 nouveau du code de procédure pénale)
Port du bracelet anti-rapprochement pendant la phase pré-sentencielle

Le port du bracelet anti-rapprochement peut aussi avoir son utilité pendant la phase d'enquête, avant qu'un jugement soit rendu, pour s'assurer notamment que les obligations imposées dans le cadre d'un placement sous contrôle judiciaire sont bien respectées.

1. Le dispositif initial de la proposition de loi

Dans sa version initiale, la proposition de loi tendait à autoriser le recours au bracelet anti-rapprochement dans le cadre d'une assignation à résidence exécutée sous le régime du placement sous surveillance électronique.

Cette assignation à résidence sous surveillance électronique, prévue aux articles 142-5 et suivants du code de procédure pénale, est une alternative à un placement en détention provisoire, qui peut être ordonnée par un juge d'instruction ou un juge des libertés et de la détention (JLD).

Elle peut notamment être décidée, en application de l'article 142-12-1, lorsque la personne est mise en examen pour des faits de violences ou de menaces, punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement et commis contre son conjoint, concubin ou partenaire de PACS ou contre ses enfants ou ceux du conjoint, concubin ou partenaire. Elle peut aussi être décidée à l'initiative du procureur de la République dans le cadre d'une procédure de comparution immédiate, d'une convocation par procès-verbal ou en cas de comparution à délai différé, en application des articles 394 à 397-7 du code de procédure pénale.

2. Un dispositif réécrit à l'Assemblée nationale

Avec l'avis favorable de son rapporteur, la commission des lois a adopté deux amendements identiques CL 82 et CL 92 de réécriture globale de l'article, présentés respectivement par les membres du groupe La République en Marche et par le Gouvernement.

Ils tendent à modifier la sous-section du code de procédure pénale relative au contrôle judiciaire .

En application de l'article 138 du code de procédure pénale, le placement sous contrôle judiciaire peut être ordonné par le juge d'instruction ou par le JLD lorsque la personne mise en examen encourt une peine d'emprisonnement correctionnel ou une peine de réclusion criminelle. En l'absence de mise en examen, il peut également être ordonné dans le cadre de la procédure de comparution immédiate ou de la procédure de convocation par procès-verbal, en application de l'article 397-3 du même code, ainsi que dans le cadre de la procédure de comparution immédiate à délai différé, prévue à l'article 397-1-1 et issue de la récente loi du 23 mars 2019.

L'article 138 du code de procédure pénale prévoit que la personne placée sous contrôle judiciaire est astreinte à respecter une ou plusieurs obligations décidées par le juge : par exemple ne pas se rendre en certains lieux, répondre aux convocations, s'abstenir de rencontrer certaines personnes, ne pas détenir ou porter une arme, etc.

Le 17° de l'article 138 concerne plus particulièrement l'hypothèse où la personne placée sous contrôle judiciaire a commis une infraction contre son conjoint, concubin ou partenaire de PACS, ou contre ses enfants ou ceux du conjoint, concubin ou partenaire. Dans ce cas, le juge peut ordonner à la personne mise en examen de résider hors du domicile du couple, voire de s'abstenir de paraître dans ce domicile ou à ses abords immédiats. Il peut également lui ordonner de suivre une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique. Ces mesures peuvent également concerner un ancien conjoint, concubin ou partenaire.

Il est proposé d'insérer après cet alinéa un nouvel alinéa 17° bis pour ajouter à la liste des obligations pouvant être imposées par le juge dans le cadre d'un contrôle judiciaire le fait de respecter l'interdiction de se rapprocher d'une victime de violences commises au sein du couple sous le contrôle d'un dispositif électronique , c'est-à-dire d'un bracelet anti-rapprochement.

Il est ensuite proposé d'insérer dans le code de procédure pénale un nouvel article 138-3 qui définit le régime applicable au bracelet anti-rapprochement dans le cadre d'un contrôle judiciaire .

Cet article 138-3 reprend mutatis mutandis les termes de l'article 132-45-1 nouveau du code pénal, présenté dans le commentaire de l'article 3. Les dispositions qui concernaient le condamné à l'article 132-45-1 s'appliquent ici à la personne placée sous contrôle judiciaire.

Sous cette réserve, les dispositions sont identiques : une infraction punie d'au moins trois ans d'emprisonnement doit avoir été commise contre le conjoint, le concubin ou le partenaire de PACS, ou contre l'ancien conjoint, concubin ou partenaire ; le juge doit avoir prononcé une interdiction de se rapprocher de la victime, sous le contrôle d'un bracelet anti-rapprochement ; le consentement de la personne placée sous contrôle judiciaire est exigé, mais son refus peut entraîner son placement en détention provisoire ; enfin, les modalités d'application sont renvoyées à un décret, pris après avis de la CNIL.

3. La position de votre commission

Il est fréquent qu'une personne placée sous contrôle judiciaire se voie interdire de se rendre dans certains lieux ou de rencontrer certaines personnes. La nouvelle interdiction de rapprochement s'insère donc naturellement dans ce dispositif qui vise à éviter que la personne mise en cause ne commette une autre infraction.

La combinaison des articles 3 et 4 permettra d'utiliser le bracelet anti-rapprochement à toutes les étapes de la procédure pénale : avant le jugement, au moment de la condamnation puis en phase post-sentencielle , ce qui paraît adapté pour exploiter au mieux les potentialités de ce dispositif technique.

Il est à noter que la décision d'ordonner le port du bracelet reviendra toujours à un juge du siège, gardien des libertés, ce qui constitue une garantie appréciable pour le justiciable.

Votre commission a adopté un amendement de précision rédactionnelle COM-26 du rapporteur, analogue à celui adopté à l'article 3.

Elle a également adopté un amendement COM-8 , déposé par notre collègue Jean-Pierre Grand, qui procède à une coordination à l'article 141-4 du code de procédure pénale. Cet article prévoit que les forces de police et de gendarmerie peuvent appréhender une personne placée sous contrôle judiciaire à l'encontre de laquelle il existe des raisons plausibles de penser qu'elle a manqué aux obligations de son contrôle judiciaire. Par cohérence, il est proposé d'ajouter à la liste de ces obligations la nouvelle interdiction de rapprochement créée par la proposition de loi.

Votre commission a adopté l'article 4 ainsi modifié .

Article 4 bis (nouveau)
(art. 230-19 du code de procédure pénale)
Inscription dans le fichier des personne recherchées

Régi par l'article 230-19 du code de procédure pénale, le fichier des personnes recherchées (FPR) recense les personnes faisant l'objet d'une mesure de recherche ou de vérification de leur situation juridique. Il vise à faciliter les recherches et les contrôles effectués par les gendarmes, les agents de la police nationale ou les agents des douanes.

Il est divisé en vingt-et-une catégories qui se distinguent par le motif de l'inscription au fichier : recherche de personne disparue, recherche de police judiciaire, débiteur du Trésor public, mineur en fugue, etc .

Le présent article, inséré par votre commission à l'initiative de votre rapporteur, par l'adoption de l' amendement COM-30 , tend à compléter, par coordination, la liste des personnes inscrites au FPR.

À l'heure actuelle, les personnes qui sont soumises à des obligations ou à des interdictions dans le cadre d'un contrôle judiciaire y sont inscrites. Il paraît cohérent que celles qui seraient soumises à une interdiction de rapprochement, contrôlée par un bracelet électronique , y figurent également. Tel est l'objet du de l'article, qui complète à cette fin le 2° de l'article 230-19 du code de procédure pénale.

De même, les personnes soumises à des obligations ou à des interdictions dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve, d'un suivi socio-judiciaire, d'un aménagement de peine, d'une libération conditionnelle, d'une surveillance judiciaire ou d'une surveillance de sûreté sont inscrites au FPR. Il est logique qu'y soient inscrites également les personnes soumises à une interdiction de rapprochement dans le cadre de ces différentes mesures, comme le prévoit l'article 3 de la proposition de loi. Le de l'article modifie en ce sens le 8° de l'article 230-19.

En matière civile, enfin, les interdictions de contact et les interdictions de port d'arme prononcées par le juge aux affaires familiales sont inscrites au FPR. Il est proposé d'y ajouter, par cohérence, les interdictions de paraître en certains lieux introduites par l'article 2 de la proposition de loi. Dans ce but, le de l'article complète le 17° de l'article 230-19.

Votre commission a adopté l'article 4 bis ainsi rédigé .

Article 5
(art. 15-3-1 du code de procédure pénale)
Information de la victime au moment du dépôt de plainte

Cet article vise à ce que les victimes soient bien informées de leur possibilité de bénéficier du nouveau dispositif de bracelet anti-rapprochement.

1. Le dispositif initial de la proposition de loi

Dans sa version initiale, l'article 5 tendait à prévoir qu'il serait possible d'utiliser le bracelet anti-rapprochement dans le cadre de mesures d'aménagement de peine : peine exécutée sous le régime du placement sous surveillance électronique (articles 132-26-1 du code pénal et 723-7 du code de procédure pénale) ou libération conditionnelle (article 731-1 du code de procédure pénale).

2. Un article entièrement réécrit à l'Assemblée nationale

Considérant que l'article 5, dans sa rédaction initiale, était satisfait par la nouvelle rédaction adoptée pour l'article 3 de la proposition de loi, la commission des lois a adopté, avec l'avis favorable du rapporteur, un amendement des membres du groupe La République en Marche qui procède à une réécriture complète de l'article.

Dans sa nouvelle rédaction, l'article 5 tend à insérer dans le code de procédure pénale, dans la section consacrée aux dispositions générales relatives à la police judiciaire, un nouvel article 15-3-2 qui crée une obligation d'information à la charge des officiers et agents de police judiciaire (OPJ et APJ).

Lorsqu'ils reçoivent une plainte déposée pour une infraction punie d'au moins trois ans d'emprisonnement commise contre le conjoint, le concubin ou le partenaire de PACS, y compris lorsqu'ils ne cohabitent pas, ou commise par l'ancien conjoint, concubin ou partenaire, ils devront ainsi informer la victime qu'elle peut demander à bénéficier d'un bracelet anti-rapprochement ou qu'elle peut consentir à en bénéficier s'il est ordonné par la juridiction compétente.

3. La position de votre commission

Les personnes entendues par votre rapporteur ont souvent souligné que les victimes de violences au sein du couple étaient souvent perdues et en demande d'information sur les démarches à accomplir.

Pour cette raison, la mesure proposée à cet article apparaît bienvenue. Le succès du bracelet anti-rapprochement dépend de la qualité de l'information qui sera dispensée aux victimes susceptibles d'en bénéficier.

Considérant qu'il pourrait être intéressant d'étoffer l'information donnée à la victime, la commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement COM-38 prévoyant que l'information portera également sur la possibilité de bénéficier d'un bracelet anti-rapprochement dans le cadre d'une ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales.

Elle a également adopté un amendement COM-10 , dans une rédaction modifiée, de notre collègue Jean-Pierre Grand. Cet amendement prévoyait que l'information serait donnée à la victime en lui remettant un document. Le rapporteur a fait valoir que ce document pourrait ne pas être lu ou compris. Dans un esprit de synthèse, la commission a décidé que l'information serait donnée oralement puis qu'un document serait remis à la victime venue porter plainte.

La commission a enfin adopté un amendement rédactionnel COM-29 de son rapporteur visant à inscrire également à cet article l'expression de dispositif électronique mobile anti-rapprochement.

Votre commission a adopté l'article 5 ainsi modifié .

Article 6
(art. 721 du code de procédure pénale)
Conditionnement des réductions de peine automatiques
dont peuvent bénéficier les auteurs de violences intrafamiliales
au respect de leur obligation de soins

L'article 6 de la proposition de loi permet au juge de l'application des peines (JAP) d'ordonner le retrait des réductions automatiques de peines en cas de refus de traitement de la part d'une personne condamnée pour violences commises sur son conjoint, concubin ou partenaire de PACS.

1. Le dispositif proposé

En application de l'article 721 du code de procédure pénale, tous les détenus bénéficient de crédits automatiques de réduction de peine calculés en fonction de la durée de la condamnation prononcée, à raison de :

- trois mois de réduction de peine pour la première année d'emprisonnement ;

- deux mois pour les années suivantes ;

- sept jours par mois pour les durées calculées sur une période inférieure à une année (dans la limite de l'attribution de deux mois maximum pour toute période dépassant la première année d'écrou).

Ces réductions sont accordées automatiquement dès le début de l'exécution de la peine sans demande de la part de la personne condamnée afin de favoriser son bon comportement.

Elles peuvent cependant être retirées, en tout ou partie, par le JAP, notamment en cas de mauvaise conduite du condamné pendant l'exécution de sa peine, ou par une juridiction de jugement en cas de nouvelle condamnation à une peine privative de liberté pour un crime ou un délit commis par la personne condamnée après sa libération pendant une période égale à la durée du crédit de réduction de peine dont elle a bénéficié.

En outre, le JAP peut ordonner le retrait des crédits de réduction de peine lorsque le détenu a été condamné pour les crimes ou délits, commis sur un mineur, de meurtre ou assassinat, torture ou actes de barbarie, viol, agression sexuelle ou atteinte sexuelle et qu'il refuse, pendant son incarcération, de suivre le traitement qui lui est proposé, sur avis médical .

Cette possibilité de proposer un traitement au condamné est prévue par l'article 717-1 du code de procédure pénale ; elle suppose qu'un médecin estime que la personne condamnée soit susceptible de faire l'objet d'un tel traitement. Ce traitement peut, par exemple, consister en un traitement inhibiteur de libido si cela est jugé approprié pour traiter un délinquant ou criminel sexuel. Un traitement peut également être proposé, en application de l'article 763-7 du même code, dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire, assorti d'une injonction de soins.

La modification proposée par l'Assemblée nationale tend à élargir aux crimes ou délits commis contre le conjoint, le concubin ou le partenaire de PACS la possibilité aujourd'hui offerte en cas de crime ou délit commis sur un mineur.

Ainsi, le JAP aurait la possibilité d'ordonner le retrait des crédits de réduction de peine lorsque la personne condamnée pour des faits de meurtre ou assassinat, torture ou acte de barbarie, viol, agression sexuelle ou atteinte sexuelle commis à l'encontre de son conjoint, concubin ou partenaire de PACS, refuse le traitement qui lui est proposé sur avis médical.

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement rédactionnel présenté par le rapporteur.

2. La position de votre commission

Votre commission juge pertinente la mesure adoptée par l'Assemblée nationale en ce qu'elle donne au juge de l'application des peines un moyen supplémentaire d'inciter certains détenus à suivre un traitement médical adapté.

Ce suivi médical peut constituer, pour une partie des condamnés, un outil efficace pour lutter contre la récidive. Un nombre important de personnes incarcérées souffrent de troubles psychiatriques et ont besoin d'un accompagnement thérapeutique. Les moyens consacrés à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice apparaissent cependant insuffisants et mériteraient d'être mis à niveau pour donner sa pleine efficacité à la mesure prévue à cet article.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission a adopté l'article 6 sans modification .

CHAPITRE III
DE L'ACCÈS AU LOGEMENT

L'intitulé de ce chapitre a été modifié 75 ( * ) à l'initiative de votre rapporteur par l'adoption de l'amendement COM-19 afin de le mettre en cohérence avec les articles 7 à 7 ter qui comportent des dispositifs relatifs à l'accès au logement, et non à l'hébergement d'urgence 76 ( * ) .

À titre liminaire, votre rapporteur rappelle que chaque fois que la victime le souhaite et que cela est compatible avec sa sécurité, il est impératif de favoriser son maintien dans le logement conjugal ou commun en mobilisant les outils légaux 77 ( * ) existant pour le lui attribuer et évincer son conjoint violent 78 ( * ) .

Toutefois, les données issues des appels au « 3919-Violences Femmes Info » en 2017 établissent que 55 % des victimes veulent quitter le domicile qu'elles partagent avec l'auteur des violences 79 ( * ) . C'est ainsi que, selon une étude statistique du ministère de la justice 80 ( * ) , 6 % des personnes qui ont sollicité une ordonnance de protection en 2016 résidaient dans un foyer d'urgence 81 ( * ) .

Les solutions de mise à l'abri immédiate des victimes - qui sont, dans la très grande majorité des cas, des femmes accompagnées d'enfants mineurs 82 ( * ) - ne sont qu'une réponse d'urgence et de court terme . Il est crucial que, dans un deuxième temps, une formule de relogement plus pérenne puisse leur être proposée.

Les dispositions du présent chapitre visent à améliorer l'accès des victimes de violences intrafamiliales au logement et à compléter les dispositifs existants, dont certains ont été introduits récemment par la loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté 83 ( * ) ou la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique dite loi ELAN 84 ( * ) .

Article 7
(art. L. 442-8-1 du code de la construction et de l'habitation)
Expérimentation de deux dispositifs pour faciliter l'accès au logement
des victimes de violences intrafamiliales

L'article 7 de la proposition de loi tend à favoriser l'accès au logement des victimes de violences intrafamiliales au moyen de deux expérimentations, l'une prévoyant un dispositif de sous-location de logements du parc locatif social et l'autre, un accompagnement adapté spécifique pour faciliter le relogement, quel que soit le parc locatif concerné.

Cet article a été totalement réécrit par l'Assemblée nationale en première lecture, par l'adoption en séance de deux amendements identiques n° 173 du Gouvernement et n° 174 de notre collègue député Guillaume Vuilletet et des membres du groupe La République en Marche, sous-amendés par le rapporteur et auteur de la proposition de loi, Aurélien Pradié.

1. Le dispositif initial de la proposition de loi : la création à titre expérimental d'une aide personnalisée au logement spécifique

Le texte initial prévoyait, pour une durée de trois ans, la mise en oeuvre d'un dispositif expérimental d' aide personnalisée au logement à destination des victimes bénéficiant d'une ordonnance de protection.

Cette aide était conçue pour être attribuée, à la demande de la victime et sous conditions de ressources, au moment où celle-ci cesse de jouir effectivement du logement conjugal ou commun - même si c'est de son propre chef - pendant la période de protection ou à son terme.

Ce dispositif social, cumulable avec l'aide personnalisée au logement (APL) 85 ( * ) , devait comprendre :

- la prise en charge de la caution locative ;

- une avance sur le paiement des six premières échéances locatives mensuelles ;

- la prise en charge de la garantie locative ;

- une aide complémentaire à l'aide personnalisée au logement (APL).

Parallèlement, il était envisagé une modification des catégories d'emploi des ressources de la participation des employeurs à l'effort de construction mobilisables par Action Logement, pour y ajouter « la mise en oeuvre d'expérimentations, prévues par la loi, relatives au logement des victimes de violences conjugales ». Cette disposition a ensuite été supprimée en commission à l'initiative du rapporteur, les auditions ayant fait apparaître qu'Action Logement pouvait déjà agir pour le relogement des personnes victimes de violences au titre de ses engagements en faveur des personnes défavorisées, sans qu'il soit nécessaire de faire évoluer son cadre d'emploi 86 ( * ) .

La mission historique d'Action Logement :
faciliter l'accès au logement pour favoriser l'emploi

Le groupe Action Logement est un organisme paritaire qui collecte la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) créée en 1953 87 ( * ) . Sa vocation est de faciliter l'accès au logement pour favoriser l'emploi .

En conséquence, Action Logement accompagne essentiellement les salariés et les personnes en recherche d'emploi . Dans ce cadre, elle propose divers dispositifs, dont la garantie Visale 88 ( * ) pour faciliter la location d'un logement du parc privé, l'avance LOCA-PASS qui permet le financement du dépôt de garantie et le service d'accompagnement social CIL-Pass Assistance 89 ( * ) .

Lorsqu'une personne n'est pas éligible à l'accompagnement mis en place par Action logement, elle peut notamment faire appel au fonds de solidarité pour le logement (FSL) de son département. Les FSL, créés en 1990 90 ( * ) , sont financés par les départements et accordent des aides similaires : « aides financières sous forme de cautionnements , prêts ou avances remboursables , garanties ou subventions à des personnes [éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l'inadaptation de leurs ressources ou de leurs conditions d'existence] et qui entrent dans un logement locatif ».

À l'issue de l'expérimentation, il était enfin prévu que le Gouvernement remette un rapport « destiné à évaluer la pertinence de l'instauration d'une aide personnalisée au logement pour les victimes de violences conjugales et du maintien de ce dispositif ».

2. Un dispositif largement remanié à l'Assemblée nationale : le lancement de deux expérimentations

L'Assemblée nationale a entièrement réécrit l'article 7 en adoptant, avec avis favorable de la commission des lois, deux amendements identiques : l'un du Gouvernement, l'autre du groupe La République en Marche, tous deux sous-amendés par le rapporteur.

Il ne s'agirait plus de lancer une, mais deux expérimentations : la première, nouvelle, permettrait la sous-location à titre temporaire de logements du parc locatif social, et la seconde reprendrait le dispositif initial avec modifications. Ces deux expérimentations débuteraient six mois après l'entrée en vigueur de la loi et auraient une durée de trois ans . Elles donneraient lieu à un rapport d'évaluation au Parlement quatre ans après la promulgation de la loi.

Elles bénéficieraient toutes deux aux personnes justifiant de violences conjugales attestées, soit par une décision du juge aux affaires familiales prononçant des mesures urgentes dans le cadre d'une procédure en divorce, en application de l'article 257 du code civil, soit par une ordonnance de protection, en application du titre XIV du livre I er du même code.

Toutefois, la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice - qui a simplifié la procédure de divorce judiciaire en supprimant la tentative de conciliation préalable à l'assignation - a prévu l'abrogation de l'article 257 précité à une date fixée par décret et au plus tard au 1 er septembre 2020 91 ( * ) . En conséquence, à compter de cette date, les deux expérimentations ne pourraient donc être mises en place qu'auprès des personnes ayant obtenu une ordonnance de protection, cette procédure devenant la seule disponible pour obtenir les mesures urgentes nécessaires dans un contexte de violences entre époux.

Un comité de pilotage, composé de deux députés et deux sénateurs désignés par le président de chaque assemblée ainsi que de représentants de l'État, serait chargé d'en suivre le déroulement.

a) Une nouvelle expérimentation de sous-location temporaire au sein du parc locatif social

Le I A de l'article 7 institue, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, une nouvelle dérogation à l'interdiction, édictée par l'article L. 442-8 du code de la construction et de l'habitation, « de sous-louer un logement, meublé ou non, sous quelque forme que ce soit, sous peine d'une amende de 9 000 euros » dans tous les immeubles destinés à la location et financés par des aides de l'État.

Il s'agirait d'autoriser les bailleurs sociaux à louer des logements, meublés ou non, à des organismes déclarés ayant pour objet de les sous-louer à titre temporaire aux personnes justifiant de violences conjugales attestées par une décision du juge prise en application de l'article 257 du code civil (cf. supra ) ou par une ordonnance de protection.

Ce même mécanisme existe déjà en faveur des personnes âgées, des personnes présentant un handicap, des personnes de moins de trente ans ou à des actifs dont la mobilité professionnelle implique un changement de secteur géographique 92 ( * ) .

Cette formule de sous-location temporaire permet d'accéder, sous conditions de ressources identiques 93 ( * ) , à un logement social sans passer par le long processus d'attribution. Elle constituerait donc, pour les victimes de violence intrafamiliale, une solution d'attente plus pérenne que l'hébergement d'urgence, avant de pouvoir bénéficier en direct d'un bail social.

Elle se distingue du mécanisme mis en place par la loi ALUR du 24 mars 2014 94 ( * ) qui permet aux bailleurs sociaux de louer des logements au bénéfice d'opérateurs d'intermédiation locative ou de centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) afin de proposer des places d'hébergement d'urgence et d'hébergement relais aux victimes de violences conjugales. Dans cette hypothèse, les personnes hébergées ne bénéficient pas, en effet, d'un contrat de sous-location en bonne et due forme.

b) Une expérimentation d'accompagnement au relogement remaniée

À l'initiative du Gouvernement et du groupe LaREM, le mécanisme de l'expérimentation initial a été réécrit. Le dispositif d'aide personnalisée a été transformé en dispositif d'accompagnement adapté et le public des bénéficiaires élargi - de manière temporaire du fait de la future abrogation de l'article 257 du code civil - aux victimes de violences bénéficiant de mesures urgentes ordonnées par le juge aux affaires familiales après l'introduction d'une requête en divorce, en plus de celles qui ont obtenu une ordonnance de protection.

Les mesures d'accompagnement incluses dans le dispositif seraient notamment, selon la précision rédactionnelle apportée par le rapporteur de l'Assemblée nationale, « la caution locative, les garanties locatives, les premiers mois de loyer » et correspondraient aux aides déjà mises en oeuvre par Action Logement ou les FSL (cf. supra ). L'accompagnement serait mis en oeuvre à la demande de la victime et sous conditions de ressources, au moment où elle cesse de jouir effectivement du logement conjugal ou commun, y compris si elle a choisi de le quitter de son propre chef.

2. La position de votre commission

S'agissant de l'expérimentation de sous-location temporaire de logement locatif social, votre rapporteur relève que les victimes de violences peuvent déjà bénéficier depuis 2009 95 ( * ) d'une sous-location dans un logement social via l'intermédiation locative autorisée par l'alinéa 2 de l'article L. 442-8-1. Mais elles sont alors en « concurrence » avec un large public : « toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l'inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d'existence » selon l'article L. 301-1 du code de la construction et l'habitat.

L'ajout d'une dérogation qui leur serait spécifiquement destinée semble donc être une avancée puisqu'elle permettrait de mettre à leur disposition de nouveaux logements dans des conditions financières favorables. Le dispositif expérimenté ne pourrait toutefois être qu'une étape vers un logement pérenne puisqu'il est temporaire et suppose, pour être efficace, que les victimes ne soient pas seulement logées, mais également accompagnées , ce qui nécessite des moyens supplémentaires.

Votre commission n'a pas souhaité codifier cette disposition compte tenu de son caractère temporaire. Elle a adopté, à l'initiative de son rapporteur, l'amendement COM-20 pour faire sortir cette expérimentation du code de la construction et de l'habitat et supprimer la mention relative aux ordonnances délivrées au titre de l'article 257 du code civil dans la mesure où, selon les informations obtenues de la Chancellerie, son abrogation devrait intervenir à bref délai , d'ici la fin de l'année.

S'agissant de l'expérimentation du dispositif d'accompagnement adapté, la rédaction retenue ne permet pas de déterminer quel en serait le contour exact. Les auditions menées par votre rapporteur laissent à penser que l'expérimentation servirait en fait à mieux coordonner, mobiliser et faire connaître les dispositifs existants . La diversité des acteurs et des aides disponibles, ainsi que la complexité des situations rendent en effet nécessaire de concevoir l'accompagnement des victimes de manière plus globale et coordonnée.

Votre commission est favorable à cette initiative qui permettrait de renforcer l'efficacité des actions en faveur de l'accès au logement des victimes de violences intrafamiliales. Elle y a apporté une simple précision rédactionnelle et supprimé la référence à l'article 257 du code civil bientôt abrogé en adoptant, à l'initiative de votre rapporteur, l' amendement COM-21 . Elle a également modifié le mode de computation du délai de remise du rapport au Parlement et supprimé la remise d'un rapport d'étape au bout d'un an d'expérimentation par adoption de l' amendement COM-24 du rapporteur.

Elle a enfin souhaité supprimer les dispositions instituant un comité de pilotage au sein duquel la présence de deux députés et deux sénateurs désignés par les présidents de chacune des assemblées est prévue. La création d'un organisme extraparlementaire aux seules fins de superviser une expérimentation temporaire ne semble pas justifiée et contraire au travail de rationalisation qui a été mené dans le cadre de la loi du 3 août 2018 96 ( * ) . L' amendement COM-37, présenté par le rapporteur, a été adopté en conséquence.

La commission a adopté l'article 7 ainsi modifié .

Article 7 bis
(art. L. 441-2-2 du code de la construction et de l'habitation)
Impossibilité de motiver le refus d'attribution d'un logement social par la qualité de propriétaire lorsque le candidat a bénéficié d'une ordonnance de protection

L'article 7 bis vise à permettre aux victimes de violences conjugales bénéficiaires d'une ordonnance de protection d'accéder à un logement social, nonobstant le fait qu'elles puissent être propriétaires d'un logement, ce qui peut constituer actuellement un motif de refus en application de l'article L. 441-2-2 du code de la construction et de l'habitation 97 ( * ) .

La mesure proposée permettrait de compléter les dispositions de l'article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation, introduites en 2009 98 ( * ) , qui permettent déjà à une personne bénéficiant d'une ordonnance de protection :

- de ne voir que ses seules ressources prises en compte pour l'attribution d'un logement social ;

- et de ne pas se voir opposer le fait qu'elle bénéficie d'un contrat de location au titre du logement occupé par le couple.

L'article 7 bis est issu d'un amendement présenté par notre collègue députée Josy Poueyto et d'autres membres du groupe Mouvement Démocrate, qui ont ainsi relayé les travaux de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes de l'Assemblée nationale.

Votre commission est favorable à cette disposition qui permettrait de donner accès au parc locatif social à des femmes qui ont fui le logement qu'elles partageaient avec l'auteur des violences, sans que la propriété de ce logement, dont elles n'ont plus la jouissance, puisse leur être opposée.

À l'initiative de votre rapporteur, elle a adopté un amendement de précision COM-23 et l'article 7 bis ainsi modifié .

Article 7 ter
(art. L. 441-2-2 du code de la construction et de l'habitation)
Attribution en urgence par le préfet d'un logement de droit commun
pris sur le contingent de logements réservés de l'État
aux femmes victimes de violences

Des quotas de logements sont actuellement réservés dans le parc de logements sociaux au profit des différents financeurs, au premier rang desquels l'État. Son représentant dans le département dispose à ce titre d'un droit de réservation de 30 % du parc social conventionné de chaque bailleur social, dont 25 % est destiné aux publics prioritaires et 5 % aux fonctionnaires de l'État 99 ( * ) . C'est le « contingent préfectoral ».

L'article 7 ter de la proposition de loi tend à permettre au préfet d'attribuer en urgence aux femmes victimes de violences un logement social pris sur ce contingent.

La disposition a été introduite à l'Assemblée nationale en séance, à l'initiative de nos collègues députés Vincent Descoeur, Jacques Cattin et d'autres députés du groupe Les Républicains. Leur amendement a été adopté, contre l'avis de la commission et du Gouvernement, pour donner « un bon signal » 100 ( * ) . Toutefois, telle n'est pas la vocation de la loi, même si l'objectif est louable.

Une priorité d'attribution de logement social existe depuis 2009 101 ( * ) au bénéfice des « personnes mariées, vivant maritalement ou liées par un pacte civil de solidarité justifiant de violences au sein du couple ou entre les partenaires », et ce sur l'ensemble du parc locatif social.

La circulaire du 8 mars 2017 relative à l'accès au logement des femmes victimes de violences ou en grande difficulté rappelle cette priorité en donnant pour instruction aux préfets de « prendre en compte le besoin de traitement particulier de situations d'urgence des femmes victimes de violences [...] pour procéder à l'attribution en urgence d'un logement sur le contingent de logements réservés de l'État ».

Cette instruction a été rappelée dans le plan quinquennal pour le Logement d'abord et la lutte contre le sans-abrisme (2018-2022), présenté le 11 septembre 2017 à Toulouse par le Président de la République, qui vise notamment à « faciliter l'accès des femmes victimes de violences à un logement sûr et pérenne par la mise en oeuvre de la circulaire du 8 mars 2017 relative à l'accès au logement des femmes victimes de violence ou en grande difficulté ».

Dans ces conditions, l'ajout dans la loi d'une disposition, non normative de surcroît, semble inutile.

Sur proposition du rapporteur, votre commission a adopté l' amendement COM-22 et supprimé l'article 7 ter .

Article 8
(article 41-3-1 du code de procédure pénale)
Attribution du téléphone grave danger

Cet article tend à modifier l'article 41-3-1 du code de procédure pénale qui dispose qu'« en cas de grave danger menaçant une personne victime de violences de la part de son conjoint, de son concubin ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, le procureur de la République peut attribuer à la victime, pour une durée renouvelable de six mois et si elle y consent expressément, un dispositif de téléprotection lui permettant d'alerter les autorités publiques. Avec l'accord de la victime, ce dispositif peut, le cas échéant, permettre sa géolocalisation au moment où elle déclenche l'alerte ».

1 . Le dispositif proposé

Le dispositif de téléprotection est communément appelé « téléphone grave danger » (TGD). Le TGD est un appareil de mise en relation avec les services de sécurité, par l'intermédiaire d'une plateforme confiée à un opérateur. Lors de son appel, la victime est géolocalisée, ce qui facilite l'intervention des forces de l'ordre.

Les conditions d'attribution du TGD sont assez strictes. Pour obtenir l'appareil, il faut être majeur et ne plus vivre avec son agresseur. Celui-ci doit avoir l'interdiction d'entrer en contact avec la victime. La victime doit être en situation de danger, lequel est apprécié par le parquet qui peut requérir une association d'aide aux victimes de son ressort aux fins d'évaluation de l'opportunité du dispositif. La décision d'attribution relève du procureur, qui attribue le téléphone pendant six mois, renouvelables. Chaque tribunal dispose d'un nombre déterminé de téléphones, ceux-ci pouvant être mutualisés dans le ressort d'une cour d'appel.

Deux modifications sont proposées afin d'encourager le recours au TGD.

Le 1° du présent article dispose que l'attribution du dispositif peut être sollicitée par tout moyen . Cette précision tend à mettre fin à la pratique de certains procureurs ayant délégué l'instruction des demandes à une unique association de victimes, ce qui a pu constituer localement un frein au déploiement du dispositif. À l'heure actuelle, dans un contexte de forte augmentation du nombre de TGD, 60 % seulement des TGD disponibles sont attribués à une victime.

Dans sa version initiale, la proposition de loi tendait à ce que le téléphone soit attribué à la victime à sa demande, sans possibilité d'appréciation par le procureur de la République.

Il a été réécrit en commission, le rapporteur ayant rétabli la capacité d'appréciation du procureur sur l'attribution des téléphones. Lors des débats en séance publique, Aurélien Pradié a indiqué que « ce qui fait que le téléphone grave danger fonctionne, c'est qu'il n'est distribué que dans les situations qui le nécessitent, de telle sorte que, lorsqu'il est activé, l'intervention des forces de l'ordre est très efficace. Il convient donc de bien veiller à ne pas en généraliser l'attribution, sous peine de perdre l'efficacité immédiate de cette intervention ».

La gestion des TGD demande également un suivi et une anticipation des situations. Comme le relève la Chancellerie, une partie de l'écart entre le nombre de TGD disponibles et le nombre de téléphones attribués découle du fait que certains sont réservés par les juridictions en prévision d'une sortie de prison de l'auteur des violences.

Le complète la rédaction du deuxième alinéa de l'article 41-31-1 du code de procédure pénale pour prévoir un nouveau cas d'attribution du TGD.

Le TGD pourrait être attribué en cas de « danger avéré et imminent », à condition que l'auteur des violences soit en fuite ou n'ait pu encore être interpellé, ou lorsque l'interdiction judiciaire d'entrer en contact avec la victime dans le cadre d'une procédure judiciaire n'a pu encore être prononcée. Ces nouvelles hypothèses, qui correspondent déjà à la pratique de certains procureurs, doivent permettre une attribution plus rapide des TGD.

2 . La position de votre commission

Depuis la mise en place du dispositif, plusieurs centaines de victimes ont pu bénéficier de ce téléphone et être, dans le même temps, accompagnées par les différents partenaires tels que les associations d'aide aux victimes ou les centres d'information sur les droits des femmes et des familles. En plus d'être un instrument efficace de protection, ce dispositif permet de tranquilliser les victimes sur le suivi dont elles font l'objet.

On observe une montée en charge du dispositif au cours des trois dernières années, relancée par la circulaire du 9 mai 2019 relative à l'amélioration du traitement des violences conjugales et à la protection des victimes. Les chiffres communiqués par la Chancellerie à votre rapporteur indiquent que, à la date du 8 octobre 2019, 1 028 TGD étaient déployés et 611 attribués. Au 10 juillet 2019, 857 TGD seulement étaient déployés et 523 attribués.

Les informations données à votre rapporteur tendent à indiquer que les parquets gèrent de façon satisfaisante ce dispositif en lien avec les opérateurs et les autres parties prenantes qui sont parfois, mais pas encore systématiquement, réunis au sein d'un comité de pilotage départemental. Outre les services de la justice et les associations de victimes qui jouent un rôle central dans la mise en oeuvre du dispositif, les conseils départementaux en font partie et participent parfois au financement du dispositif 102 ( * ) .

Le dispositif du TGD est d'abord un instrument technique au service de la protection des personnes et de la mise en oeuvre des mesures décidées par les juges. Son déploiement rapide, qui repose sur les moyens mis en place par le ministère de la justice et l'appui fourni aux procureurs de la République pour l'exercice de cette mission, et qui fait l'objet d'une impulsion ministérielle notable, ne peut être qu'encouragé.

Votre commission a adopté l'article 8 sans modification .

Article 9 (supprimé)
Rapport sur la conception d'une application destinée
aux personnes victimes de violences intrafamiliales

L'article 9, supprimé en commission à l'Assemblée nationale, sollicitait du Gouvernement la remise d'un rapport au Parlement destiné à explorer les perspectives de développement, de certification et de mise à disposition du grand public d'une application, librement téléchargeable, permettant à une personne victime de violences de signifier à l'autorité publique qu'elle se trouve en situation de grave danger.

Le rapporteur de l'Assemblée nationale a fait valoir que cette demande de rapport pouvait être perçue comme une tentative de substituer au téléphone grave danger une application à laquelle un nombre plus élevé de victimes aurait pu recourir, ce qui n'était pas l'objectif poursuivi.

La commission des lois de l'Assemblée a donc adopté un amendement de suppression présenté par son rapporteur afin que cette demande de rapport ne figure plus dans le chapitre IV de la proposition de loi, relatif au téléphone grave danger. La demande de rapport a été ensuite réintroduite, avec une rédaction remaniée, à l'article 10 A de la proposition de loi ( cf. infra ).

Votre commission a maintenu la suppression de l'article 9.

Article 10 A (supprimé)
Rapport sur la conception d'une application destinée
aux personnes victimes de violences intrafamiliales

Cet article additionnel, qui demande au Gouvernement la remise d'un rapport, a été inséré dans le texte par la commission des lois de l'Assemblée nationale, sur proposition de son rapporteur.

Il se substitue à l'article 9 de la proposition de loi initiale que la commission des lois a choisi de supprimer et qui demandait également la remise d'un rapport ( cf. supra ).

Le rapport demandé porterait sur les perspectives de développement, de certification et de mise à disposition du grand public d'une application, librement téléchargeable, permettant à une personne victime de violences d'obtenir toutes les informations utiles quant aux démarches à effectuer, aux professionnels du droit et de la santé installés à proximité de son domicile et susceptibles de l'aider et aux associations et services prêts à l'accompagner dans ses démarches.

Cette application, qui pourrait être téléchargée sur un smartphone, permettrait ainsi d'aider la personne victime de violences à accéder facilement aux informations utiles.

Elle jouerait un rôle complémentaire de celui du 39 19, le numéro d'écoute destiné aux femmes victimes de violences (violences conjugales, sexuelles, psychologiques, harcèlement...), qui permet d'entrer en contact avec une plateforme d'écoute et d'orientation ouverte sept jours sur sept. Elle complèterait également les sites d'information publics ou gérés par des associations consultables en ligne 103 ( * ) .

Le rapport serait remis au Parlement dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi.

D'une manière générale, votre commission est peu encline à accepter les demandes de rapport, dont l'utilité lui paraît souvent limitée. Certains rapports peuvent néanmoins fournir un moyen d'attirer l'attention de l'exécutif sur une question nouvelle qui mériterait d'être explorée.

En l'espèce, cette demande de rapport paraît peu justifiée dans la mesure où une application , qui ressemble beaucoup à celle dont la création est demandée, a déjà été développée par l'association Résonantes, avec le soutien du ministère de la justice et du secrétariat d'État à l'égalité entre les femmes et les hommes.

Il s'agit de l'application « App-Elles », lancée en 2015 pour aider les femmes victimes. Cette application gratuite propose trois services : alerter un proche, joindre les services d'urgences et informer les victimes sur l'accompagnement dont elles peuvent bénéficier. Cette application a déjà été téléchargée des milliers de fois. Sans doute peut-elle être encore améliorée, mais sans qu'il soit nécessaire de prévoir au préalable la rédaction d'un rapport.

Pour ces raisons, à la suite de l'adoption de l' amendement COM-31 présenté par le rapporteur, votre commission a supprimé l'article 10 A.

Article 10 B (supprimé)
Rapport sur la prise en charge par les juridictions
et les forces de l'ordre des violences faites aux femmes

Cet article additionnel, inséré dans le texte par la commission des lois de l'Assemblée nationale, est issu d'un amendement présenté par le député Erwan Balanant (Modem) et plusieurs de ses collègues, en dépit de l'avis défavorable du rapporteur.

Il prévoit que le Gouvernement remette, chaque année, au Parlement, un rapport relatif à la prise en charge des violences faites aux femmes par la police et la gendarmerie nationales, ainsi que par les juridictions civiles et pénales.

Ce rapport aurait notamment pour objet de dresser un bilan des dispositifs existants et de préconiser d'éventuelles réponses à apporter afin d'améliorer la prise en charge de ces violences et l'accompagnement des victimes.

D'une manière générale, votre commission est peu favorable aux demandes de rapport : parfois non remis, ou avec retard, ils n'ont souvent pas fait la preuve de leur utilité.

En l'occurrence, le Gouvernement serait invité à évaluer l'activité des services qu'il dirige. Cette forme « d'auto-évaluation » n'apparaît pas satisfaisante : au nom du principe de séparation des pouvoirs, il est préférable que ce soit le Parlement qui assume cette mission d'évaluation des politiques publiques. Chaque assemblée dispose, en particulier, d'une délégation aux droits des femmes et à l'égalité entre les femmes et les hommes qui peut mener à bien ce type de travaux de contrôle. La commission des lois pourrait également se saisir de ce dossier qui entre dans son champ de compétence.

Il existe en outre un Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes qui travaille régulièrement sur les violences faites aux femmes. En novembre 2018, celui-ci a ainsi publié un rapport d'évaluation de la politique menée contre les violences faites aux femmes.

Enfin, le Gouvernement peut à tout moment diligenter une mission d'inspection pour contrôler le fonctionnement d'un service.

Pour l'ensemble de ces raisons, la commission a adopté l' amendement COM-32 du rapporteur et, en conséquence, a supprimé l'article 10 B.

Article 10 (suppression maintenue)
Coordination et entrée en vigueur

Sur proposition des membres du groupe La République en Marche, et avec l'avis favorable de son rapporteur, la commission des lois de l'Assemblée nationale a supprimé l'article 10, devenu sans objet.

L'article 10 visait à renvoyer à une date fixée par décret, et au plus tard un an après l'entrée en vigueur de la loi, l'entrée en vigueur du 1° de l'article 3, soit la disposition relative à l'utilisation du bracelet anti-rapprochement dans le cadre d'une condamnation à une peine de détention à domicile sous surveillance électronique.

Cette entrée en vigueur différée était justifiée par le fait que la peine de détention à domicile sous surveillance électronique n'entrerait en vigueur que le 24 mars 2020.

Dans la mesure où la nouvelle rédaction proposée pour l'article 3 prend déjà en compte cette entrée en vigueur différée, l'article 10 devient effectivement sans objet.

Votre commission a en conséquence maintenu la suppression de l'article 10.

Article 11 (suppression maintenue)
Gage financier

L'article 11 prévoyait que les charges pouvant résulter pour l'État de l'application du texte devaient été compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs.

Soutenant les objectifs de la proposition de loi, le Gouvernement a proposé à la commission de lever le gage en adoptant cet amendement de suppression, conformément à une pratique courante en matière de recevabilité financière.

Votre commission a maintenu la suppression de l'article 11.

Article 12 (nouveau)
(art. 804 du code de procédure pénale et 711-1 du code pénal)
Application outre-mer

Cet article additionnel a été inséré dans le texte par la commission des lois de l'Assemblée nationale, à la suite de l'adoption, avec l'avis favorable du rapporteur, d'un amendement présenté par les membres du groupe La République en Marche (LaREM).

Cet amendement vise à rendre applicables les dispositions civiles et pénales introduites par la proposition de loi dans les collectivités d'outre-mer régies par les articles 74 et 77 de la Constitution.

Les collectivités qui relèvent de l'article 74 de la Constitution - soit la Polynésie française, les îles Wallis-et-Futuna, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon - sont en principe soumises au principe de spécialité législative, selon lequel les lois et règlements n'y sont applicables que sur mention expresse. La Nouvelle-Calédonie est soumise à ce même principe de spécialité législative, mais sur le fondement de l'article 77 de la Constitution précisé par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999.

Les statuts de Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon prévoient toutefois que la plupart des lois et règlements y sont applicables de plein droit, par dérogation au principe de spécialité. Il n'y a donc pas lieu de prévoir, pour ces collectivités, une mention expresse pour que la proposition de loi leur soit applicable.

Le paragraphe I du présent article tend à rendre applicables en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna les articles 1 et 2 de la proposition de loi, relatifs à l'ordonnance de protection.

Pour rendre applicables dans ces trois collectivités les modifications apportées au code de procédure pénale, le paragraphe II tend à actualiser le « compteur » qui figure à l'article 804 dudit code.

La technique du « compteur » consiste à indiquer qu'une disposition est applicable dans une collectivité régie par le principe de spécialité législative dans sa rédaction résultant d'une loi déterminée, ce qui permet de savoir si les modifications ultérieures de cette disposition ont été ou non étendues.

Le paragraphe III a enfin pour objet de mettre à jour le « compteur » figurant à l'article 711-1 du code pénal afin de rendre applicable dans ces trois collectivités les modifications apportées au code pénal par la proposition de loi.

La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale ne mentionne pas les articles 7 et suivants de la proposition de loi, relatifs au logement, dans la mesure où le logement fait partie des compétences transférées à la Polynésie, à la Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna dans le cadre de leur autonomie interne.

Votre commission a adopté à cet article un amendement de coordination COM-33 de votre rapporteur, afin que les articles additionnels 1 er bis et 2 bis , insérés par l'Assemblée nationale, soient applicables en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna.

Votre commission a adopté l'article 12 ainsi modifié .

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXAMEN EN COMMISSION

_________

MERCREDI 30 OCTOBRE 2019

M. Philippe Bas , président . - Nous examinons le rapport de Mme Marie Mercier sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à agir contre les violences au sein de la famille. Le Gouvernement a demandé la mise en oeuvre de la procédure accélérée sur ce texte, ce qui est exceptionnel pour une proposition de loi. Ce texte a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale, ce qui n'est pas nécessairement un gage de perfection.

M. Alain Richard . - Ce n'est pas toujours rassurant.

M. Philippe Bas , président . - Mais cela témoigne que l'ensemble des députés, quelles que soient les sensibilités politiques de chacun, partagent les intentions des auteurs de ce texte. Je ne doute pas qu'il en soit également ainsi au Sénat.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Les violences commises par le conjoint ou par l'ex-conjoint demeurent une réalité insupportable dans notre pays. Dans neuf cas sur dix, c'est une femme qui est la victime de ces violences - aussi, pardonnez-moi si je parle de femmes et pas toujours de victimes.

Depuis le début de l'année, 121 femmes sont tombées sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint, selon le décompte effectué par un collectif d'associations féministes, soit autant que sur l'ensemble de l'année 2018. Le plus souvent, l'homicide, ou la tentative, fait suite à une longue série de comportements violents. Chaque année, environ 220 000 femmes sont victimes de violences physiques ou sexuelles commises par leur conjoint ou par leur ex-conjoint, selon l'Observatoire national des violences faites aux femmes. De nombreux drames pourraient donc être évités si une action efficace était conduite par les pouvoirs publics dès le déclenchement des premiers faits de violence. Il faut se saisir de ce problème très en amont.

Le 3 septembre dernier, le Gouvernement a lancé un « Grenelle des violences conjugales », qui va se prolonger jusqu'au 25 novembre prochain, date de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes.

Sans attendre les conclusions du Grenelle, le Gouvernement a rendu publiques, dès le 3 septembre dernier, dix mesures d'urgence. Certaines peuvent être mises en oeuvre sans l'intervention du législateur : par exemple, l'ouverture de 1 000 nouvelles places d'hébergement, l'audit des commissariats et des gendarmeries pour évaluer les conditions d'accueil des femmes victimes, la possibilité de déposer plainte dans les hôpitaux, un retour d'expérience pour analyser les failles en cas de féminicide... D'autres, en revanche, nécessitent des mesures législatives. Cette proposition de loi tend à mettre en oeuvre certaines de ces mesures.

Déposée par notre collègue député Aurélien Pradié, qui en a également été le rapporteur, cette proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale, le 15 octobre, par 553 voix sur 553 suffrages exprimés. Par ce vote, l'Assemblée nationale a montré que la représentation nationale pouvait se rassembler, par-delà les clivages partisans, autour de cette grande cause qu'est la lutte contre les violences faites aux femmes.

Sur ce sujet, certains États ont été précurseurs, notamment l'Espagne, qui s'est dotée, depuis une dizaine d'années, de juridictions spécialisées et d'un dispositif anti-rapprochement ayant fait ses preuves.

L'introduction en France du bracelet anti-rapprochement constitue la mesure phare de cette proposition de loi, mais elle n'est cependant pas la seule : le texte comporte un volet de droit pénal, un volet de droit civil, autour de l'ordonnance de protection, et des mesures destinées à faciliter le relogement des victimes de violences conjugales.

Concernant les mesures pénales, le texte prévoit d'autoriser le recours au bracelet anti-rapprochement à toutes les étapes de la procédure : au moment de la condamnation, dans le cadre notamment d'une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve ; à l'occasion d'une mesure d'aménagement de peine, par exemple une libération conditionnelle ou un placement en semi-liberté, mais aussi au stade présentenciel, lorsque la personne mise en cause est placée sous contrôle judiciaire. À chaque fois, c'est un magistrat du siège qui prendra la décision d'ordonner le recours au bracelet anti-rapprochement.

Ce bracelet se compose de deux éléments : le bracelet proprement dit, qu'un agent de l'administration pénitentiaire attache à la cheville de la personne condamnée ou placée sous contrôle judiciaire ; et un boîtier électronique confié à la victime de violences conjugales, qui peut tenir dans son sac à main ou dans une poche. Il permet de géolocaliser en permanence le conjoint violent et la victime. Si le conjoint violent s'approche trop près de la victime, une alerte se déclenche dans un centre de surveillance ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre. À la première alerte, le centre de surveillance appelle le conjoint violent pour lui demander de s'éloigner. S'il n'obtempère pas, une deuxième alerte se déclenche : le centre de contrôle peut alors appeler les forces de police ou de gendarmerie pour qu'elles interviennent, et il peut également prévenir la victime pour qu'elle s'éloigne ou se mette à l'abri. Il reviendra au juge de fixer la distance minimale devant les séparer et de fixer le périmètre d'une « zone tampon », plus étendue.

Pour favoriser le recours à ce dispositif, il est prévu d'informer les victimes, au moment du dépôt de plainte, qu'elles pourront en bénéficier. De son côté, le conjoint violent pourra, en théorie, refuser de porter ce bracelet, mais son refus pourra entraîner la révocation par le juge de la mesure dont il bénéficie, et donc son incarcération ou son placement en détention provisoire. Cette perspective devrait suffire, je crois, à convaincre la grande majorité d'entre eux d'accepter de porter le bracelet.

Sous réserve d'améliorations rédactionnelles ou de mesures de coordination que je vous présenterai tout à l'heure, je suis plutôt favorable à la mise en oeuvre du bracelet anti-rapprochement. Depuis dix ans, les résultats obtenus en Espagne apparaissent probants : le nombre de décès a été réduit d'un tiers ; une seule femme a été assassinée par son conjoint, car elle avait oublié d'emporter son boîtier le jour où elle a été agressée.

Le Gouvernement envisage de déployer environ un millier de bracelets anti-rapprochement, ce qui supposera un investissement initial évalué à 5,6 millions d'euros, puis un budget de fonctionnement à hauteur de 1,8 million d'euros en rythme de croisière. Un effectif de 45 équivalents temps plein (ETP) est notamment prévu pour faire fonctionner le centre de surveillance.

La proposition de loi vise ensuite à encourager le recours au téléphone grave danger (TGD). Déployé en 2014 après une phase d'expérimentation en Seine-Saint-Denis, le TGD est un appareil portable qui permet de joindre, en cas de danger, une plateforme d'assistance. Ce dispositif est de plus en plus utilisé : en 2017, 282 interventions avaient été sollicitées, tandis que l'on en a dénombré 420 en 2018, soit une hausse de près de 50 % en un an. Néanmoins, il est possible de favoriser encore le recours au TGD dans l'intérêt de la protection des victimes. Aussi, la proposition de loi procède à deux ajustements. Il s'agit d'abord de préciser que la demande de téléphone est adressée au procureur de la République « par tout moyen » ; ensuite, d'introduire un nouveau cas dans lequel l'attribution du TGD serait autorisée, en cas d'urgence, sans attendre une décision judiciaire.

J'en arrive au volet civil, qui porte essentiellement sur l'ordonnance de protection. Introduite dans le Code civil en 2010, celle-ci consiste en un dispositif hybride, à mi-chemin entre le droit civil et le droit pénal. Délivrée en urgence, elle permet à une victime de violences conjugales de bénéficier de mesures de protection ordonnées par le juge aux affaires familiales (JAF).

L'ordonnance est délivrée par le juge lorsque celui-ci estime qu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés. Détecter ces violences, qui durent parfois depuis longtemps, n'est pas toujours évident.

Dans le cadre de l'ordonnance de protection, le juge peut prendre des mesures civiles assez classiques, par exemple en matière d'autorité parentale ou de résidence séparée ; des mesures de protection de la victime, par exemple pour la faire bénéficier sans délai de l'aide juridictionnelle ou pour l'autoriser à dissimuler sa nouvelle adresse au cours de la procédure ; des mesures à connotation pénale, imposées à l'auteur des violences, par exemple l'interdiction d'entrer en contact avec certaines personnes désignées par le juge ou encore l'interdiction de détenir ou de porter une arme.

Pourtant, le nombre d'ordonnances de protection demandées chaque année reste faible : on en a dénombré 3 300 en 2018, et le JAF ne les a accueillies favorablement que dans 60 % des cas. Le délai moyen de délivrance est aujourd'hui de 42 jours, ce qui paraît élevé pour une procédure d'urgence. Comme ce délai est de dix jours dans certaines juridictions, on imagine la durée dans d'autres tribunaux...

Dans ce contexte, la proposition de loi envisage d'agir dans plusieurs directions. D'abord, en levant les obstacles à la délivrance des ordonnances : dans certains tribunaux, les JAF ont pris l'habitude d'exiger le dépôt d'une plainte avant d'enregistrer le dossier ; le texte rappelle donc que l'ordonnance peut être demandée même sans plainte ; il précise ensuite que l'ordonnance peut concerner tous les couples, même ceux qui n'ont jamais cohabité. Puis, pour accélérer la délivrance des ordonnances, le texte fixe au juge un délai : l'ordonnance devrait être rendue dans les six jours suivant la fixation de la date de l'audience. Enfin, il enrichit le contenu des ordonnances de protection : le juge devra solliciter les observations des parties sur l'ensemble des mesures que la loi lui permet d'ordonner ; l'interdiction de détenir ou de porter une arme sera systématique, sauf décision spécialement motivée ; le juge pourra interdire au conjoint violent de paraître en certains lieux où se trouve habituellement la victime ; enfin, lorsqu'il interdit au conjoint violent d'entrer en contact avec la victime, le JAF pourra ordonner le port d'un bracelet électronique anti-rapprochement, à condition que les deux parties l'acceptent.

La partie du texte consacrée à l'ordonnance de protection est sans doute la plus innovante et la plus créative. Elle renforce la connotation pénale du dispositif en donnant de nouvelles prérogatives au JAF.

Certaines personnes que j'ai entendues ont émis des doutes sur la capacité des JAF à se saisir de ces nouvelles mesures coercitives, notamment le bracelet anti-rapprochement. À la différence du juge pénal, le JAF n'a pas l'habitude d'ordonner des mesures restrictives de liberté. D'autres ont fait valoir que la mesure adoptée par l'Assemblée nationale concernant le délai pour rendre l'ordonnance a une valeur plus indicative que véritablement contraignante.

J'ai entendu ces remarques, mais je souhaite donner sa chance à cette ordonnance de protection rénovée, qui peut offrir une issue à des femmes qui hésitent à porter plainte. Je vous proposerai donc de soutenir le dispositif, en donnant cependant un caractère temporaire au bracelet anti-rapprochement en matière civile, particulièrement innovant : au bout de trois ans, sur la base d'une évaluation, nous pourrions prolonger cette mesure ou la faire évoluer si les réserves exprimées se révélaient fondées.

Pour en terminer sur le volet civil, je signale que le texte prévoit d'interdire au JAF de proposer une mesure de médiation en vue d'un exercice consensuel de l'autorité parentale lorsque des violences intrafamiliales sont alléguées. Cette mesure ne me paraît pas soulever de difficultés, la médiation familiale étant effectivement peu opportune dans un tel contexte.

Concernant le volet logement, je rappelle que la loi fait de l'éviction du mari violent du domicile conjugal la règle de principe. Il peut arriver cependant que la victime ne souhaite pas regagner son domicile parce que celui-ci est associé à des souvenirs traumatiques ou parce qu'elle juge plus prudent de déménager, afin de se sentir plus en sécurité.

Le texte propose de mener, pendant une durée de trois ans, deux expérimentations destinées à faciliter le relogement des victimes.

La première consiste à mettre en place un mécanisme de sous-location temporaire de logements relevant du parc locatif social : des associations d'aide aux victimes se verraient confier la gestion de logements sociaux qu'elles pourraient sous-louer, sous condition de ressources, aux femmes qui s'adressent à elles. Ces logements seraient ainsi attribués selon une procédure souple et rapide, en-dehors de la procédure d'attribution classique d'un logement social.

La deuxième vise à créer un dispositif d'accompagnement adapté s'appuyant sur des dispositifs existants, comme par exemple la garantie locative Visale, qui permet de couvrir des impayés de loyers, ou le Loca-Pass, qui permet de financer le dépôt de garantie.

L'Assemblée nationale a complété le volet logement par une mesure pérenne consistant à prévoir que la victime de violences conjugales bénéficiant d'une ordonnance de protection pourrait postuler à un logement social même si elle est propriétaire d'un logement répondant à ses besoins.

Pour conclure, je vous proposerai de soutenir la proposition de loi qui nous a été transmise par l'Assemblée nationale, sous réserve de l'adoption d'un certain nombre d'amendements. Il est possible que nous ayons à débattre à nouveau, dans les prochains mois, de la question des violences faites aux femmes, car le Grenelle pourrait faire émerger d'autres propositions. Il est d'ailleurs regrettable que le Gouvernement ait annoncé des mesures sans en attendre la fin. Néanmoins, je pense que l'introduction du bracelet anti-rapprochement apportera une réponse concrète à de nombreuses situations de danger. Je suis convaincue que la société est prête à soutenir une politique ambitieuse et volontariste en matière de lutte contre les violences faites aux femmes et que nous devons être à la hauteur de ce rendez-vous - qui ne sera pas, malheureusement, le dernier sur ce sujet.

M. Philippe Bas , président . - Merci pour ce rapport précis sur la réalité de ce phénomène et les dispositifs juridiques existants, et merci pour votre appréciation des réponses proposées.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Voilà un débat important, sur un objet parlementaire inédit : une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale par un groupe d'opposition et adoptée à l'unanimité ! Les objectifs sont majeurs, et c'est la mobilisation de toute la société civile qui nous place dans cette situation. Quels que soient les points à amender, nous ne devons pas manquer l'occasion, car elle n'est pas si fréquente. Je regrette néanmoins que l'examen en séance ait été programmé si rapidement : ce texte a été adopté à l'Assemblée nationale le 15 octobre, nous l'examinons aujourd'hui en commission, et la semaine prochaine en séance publique ! Or il s'agit d'un sujet technique et, même si je salue l'investissement du rapporteur - que je remercie de m'avoir associée à ses auditions - nous n'avons pas le recul nécessaire à un bon travail de fond. Or, je sais combien notre président est attentif à la qualité du travail de notre commission. D'ailleurs, il y a un Grenelle des violences conjugales, mais cette proposition de loi ne sera pas coordonnée aux mesures qui seront annoncées. Il y a un problème de cohérence. Il est regrettable, au fond, que tout cela ne soit pas regroupé en un projet plus vaste, tant les divers aspects du problème sont imbriqués, et tant la question des moyens est cruciale. L'exemple de l'Espagne montre bien que tout un champ de dispositions est nécessaire, assorti de moyens budgétaires considérables. Nous ne devons pas donner l'impression d'avoir fait tout notre possible, alors qu'en réalité cela ne suffira pas. Mon groupe adhère à cette proposition de loi et, sauf dénaturation majeure, le votera.

Pour autant, je regrette que ce texte ne fasse pas le choix d'une juridiction spécialisée, dont l'exemple espagnol montre la nécessité, unanimement reconnue par tous les professionnels. La compétence du juge est civile, mais avoisine le pénal : cela impose une coordination. L'ordonnance de protection existe déjà, mais est peu utilisée - et n'est pas toujours accordée. L'idée est de réduire le délai de délivrance à six jours. Ce délai n'est jamais tenu chez nous, mais l'Espagne fait 72 heures. Il faut aller plus vite. Comment faire ?

Quant au bracelet, il ne pose pas de difficulté quand la personne a été condamnée, ou fait l'objet d'un contrôle judiciaire. Mais confier cette mesure à un juge civil, sur la seule base des allégations de la victime, alors qu'il s'agit d'une privation de liberté, est plus délicat. Aussi l'accord de la personne concernée est-il indispensable. C'est pourquoi nous devons aller vers une intervention du Parquet. Nous pouvons conserver le délai de six jours, mais il faut trouver un moyen pour qu'il soit plus efficace, en permettant l'intervention des juges compétents - et le respect des droits de la défense. À cet égard, la convocation du défendeur par voie administrative raccourcirait les délais au maximum - nous le proposerons.

Il n'y a pas de dispositions relatives à l'autorité parentale. Comment se déroulera-t-elle ? Nous devrons faire des propositions. Nous avons travaillé en bonne intelligence avec le rapporteur. Sans doute faudra-t-il envisager d'étendre la durée de l'ordonnance de protection - et prévoir que le défendeur puisse en demander la levée. Mais nous ne sommes pas favorables à ce que cette loi revête un aspect temporaire, car cela réduirait son efficacité. En tous cas, nous souhaitons préserver ses points essentiels : raccourcissement du délai d'octroi de l'ordonnance, instauration du bracelet, extension du TGD et mesures d'aide au logement de la victime.

M. Philippe Bas , président . - Vous avez raison d'insister sur l'efficacité. Celle-ci ne tient pas seulement aux dispositions du texte, mais aussi aux moyens qui seront mis en oeuvre. Rien ne serait pire que de créer une fausse sécurité pour les victimes en brandissant un texte de loi qui ne bénéficierait pas de moyens suffisants pour être bien appliqué. Nous devons donc être attentifs aux moyens d'appliquer le texte. Or le dispositif évoqué par Mme Mercier est, à ce stade, largement théorique. Certes, ce texte ne doit pas être temporaire. Mais si certaines dispositions ne semblent pas opérationnelles, et que nous ne parvenons pas à les améliorer, il faut nous donner le temps de les évaluer. Nous ne sommes pas là pour faire du window dressing , c'est-à-dire pour prendre des mesures de façade, mais pour être efficaces - et l'unanimité n'est pas un gage d'efficacité. Sur des sujets aussi sensibles, quand le débat public est aussi éloigné des réalités, on court de grands risques de chocs en retour.

M. Dany Wattebled . - C'est un texte très utile : une centaine de décès, ce n'est pas négligeable... Comment se déclenchera le bracelet, et surtout, en laissant quel délai ? Un premier rappel est prévu : à quelle distance ? Puis, une alerte est émise. Quel délai laisse-t-elle à la police ? Pour le reste, je suis d'accord avec cette proposition de loi.

M. Alain Marc . - L'ordonnance de protection peut être prise après un simple signalement. Ce qui me gêne dans le bracelet, c'est qu'il fera peser aussi une contrainte sur la victime. N'y a-t-il pas d'autres moyens ? Par exemple, l'interdiction de résider dans la commune - mais elle peut poser des problèmes professionnels. Puis, quand on avertira le conjoint violent qu'il se rapproche de la victime, cela ne l'empêchera pas de le faire. On parle de 1 000 bracelets. Cela paraît très peu, par rapport à ce qu'on entend. Combien en faudrait-il, à votre avis ?

M. Alain Richard . - Je redoute le climat dans lequel nous allons légiférer sur ce sujet. Il est habituel que le législateur reçoive des injonctions, et que celles-ci soient appuyées par l'exploitation d'un climat émotionnel. C'est le cas. On nous adresse des exigences immédiates et absolues, quand notre rôle est de légiférer avec mesure et de manière évaluable.

L'idée est d'instaurer un système amplifié de mesures individuelles contraignantes. À mon avis, la contrainte n'est pas disproportionnée par rapport à l'objet de la mesure, et la victime ne formulera pas d'objection à la nécessité de porter sur soi un appareil électronique. Mais sur les conditions dans lesquelles s'engage cette contrainte, la réflexion a besoin de se poursuivre. En effet, dans les cas d'urgence, il n'y a pas d'enquête. On se trouve face au risque du mensonge - même s'il est marginal. Vous me direz qu'on demande l'assentiment du présumé auteur. Mais à quoi s'expose-t-il s'il refuse ? De la détention ? Ce serait contraire à l' habeas corpus . Cette mesure, qui ressemble autant à de la police administrative qu'à un acte judiciaire, doit au moins être assortie d'un délai minimal, et prise pour un temps très limité - elle ne pourra être maintenue au-delà que si le travail d'enquête, contradictoire, démontre que le danger est constitué.

Nous ne voterons pas ce texte conforme : ce serait renoncer à notre travail de législateur. Nous recevrons des critiques, pour avoir demandé à réfléchir plus longuement à un système viable. Mais ce délai nous permettra d'entrer en convergence avec le travail du Gouvernement, lui aussi réalisé dans un climat émotionnel, ce qui génère de la fébrilité. Pour ma part, je ne crois pas que nos systèmes publics soient en mesure de garantir une réponse certaine. Il faudra se reposer, sur le terrain, sur un commissariat de police ou une brigade de gendarmerie - unités qui ne sont pas toujours totalement opérationnelles 24 heures sur 24, ayons le courage de le reconnaître. Notre mission est d'en faire le maximum, sans faire de fausses promesses.

M. Yves Détraigne . - Y a-t-il en Occident des pays qui aient vraiment réglé ce problème ? Si oui, s'inspire-t-on de leur expérience ?

M. Pierre-Yves Collombat . - Le plus important est, dans l'urgence, de mettre à l'abri les femmes. Or je suis frappé de la lourdeur des procédures, même en situation de danger. Même dans le cas du tueur qui faisait partie du ministère de l'Intérieur, on nous a dit que toutes les cases étaient cochées ! Dans une commune, avant d'alerter le ban et l'arrière-ban, on commençait par prendre des décisions conservatoires. Alors, pourquoi n'ont-ils pas déplacé ce fonctionnaire pour raisons de service ? Là aussi, l'urgence est de permettre à la femme de sortir du domicile, pour la protéger.

Mme Lana Tetuanui . - Je suis très sensible à ce sujet très épineux, pour ne pas dire à ce fléau. De tels faits, fréquemment jugés aux assises de Papeete, ternissent l'image de nos belles collectivités. J'ai deux griefs contre cette proposition de loi : la lourdeur, et la lenteur. Face à ce problème sociétal, je ne peux rester sans m'exprimer. En Polynésie française, comment appliquer ce texte ? En tous cas, il faut durcir le volet pénal et le rendre plus dissuasif. On devrait même interdire aux hommes de taper les femmes ! En pratique, les premiers alertés sont nos petits maires ruraux, qui s'efforcent d'envoyer l'épouse sur une autre île. Mais celle-ci doit ensuite revenir chez elle pour voir ses enfants... Oui au bracelet, mais comment le mettre en oeuvre ?

Mme Josiane Costes . - Nous soutenons ce texte : la mise à l'abri en urgence s'impose pour nombre de femmes. Il faudra une évaluation des moyens mis en oeuvre, pour s'assurer de l'efficacité de ces mesures. Quid de l'autorité parentale ? C'est un vrai sujet, et des suivis psychologiques s'imposent pour les enfants concernés.

M. Philippe Bas , président . - Je vois se dessiner, comme à l'Assemblée nationale, un large accord sur ce texte. Ce n'est pas un texte pour les situations d'urgence : en situation d'urgence, on n'attend pas six jours ! Il n'y a que deux solutions dans de telles situations. D'une part, la mise à l'abri de la victime dans un centre spécialisé - c'est elle qui s'en va, ce qui n'est pas juste, mais on est sûr de la protéger. D'autre part, la garde à vue et la détention avant jugement de la personne qui a effectivement commis des violences. Malheureusement, ces deux mesures - sociale et pénale - ne sont pas assez efficaces, au vu du nombre de victimes qui meurent sous les coups de leur conjoint.

Le dispositif que la proposition de loi améliore, l'ordonnance de protection, date d'il y a environ dix ans. Ce n'est pas une mesure pénale, mais elle peut avoir des effets sur le plan pénal. Elle est prise par le JAF, qui peut éloigner le conjoint du domicile. Si le conjoint ne se soumet pas à la prescription du JAF, alors il commet un délit. C'est uniquement sur ce dispositif que joue la proposition de loi. De nombreuses mesures pourront être améliorées par les propositions de notre rapporteur. D'autres nous semblent très difficiles à améliorer dans le cadre de la procédure accélérée. Ce sont celles qui clarifieraient le lien entre le JAF et le juge pénal. En effet, à la différence des autres prescriptions de l'ordonnance de protection, la prescription du bracelet anti-rapprochement est facultative. Elle suppose expressément le consentement des deux personnes. Or, comme l'a dit Alain Richard, la victime ou la femme qui craint de l'être portera ce bracelet parce que cela la protège. Mais l'agresseur potentiel peut nier et refuser de consentir au bracelet - et le JAF ne pourra pas le lui imposer, puisque c'est une mesure restrictive de liberté.

Dans le temps que notre rapporteur a eu pour procéder à toutes les consultations, il était pratiquement impossible de trouver une solution. Pour pouvoir rétablir l'architecture d'un texte, encore faut-il que les fondations soient solides. Et, sur le plan juridique, il y a de sérieuses questions... Aussi notre rapporteur va-t-elle vous proposer un dispositif original qui consistera à laisser une chance à ce dispositif, puis à l'évaluer avant de nous prononcer une seconde fois. L'idée de refuser ce dispositif parce qu'il est imparfait, alors que nous ne savons pas l'amender immédiatement, me paraît mauvaise, parce qu'il y a une attente très forte, à laquelle il faut tenter de répondre, même imparfaitement. Si on franchit un palier dans la bonne direction et qu'on provoque l'évaluation, alors le législateur pourra perfectionner ce dispositif. Quoi qu'il en soit, la vraie urgence ne peut pas être traitée à travers ce système.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Merci pour cette clarification. C'est un sujet sensible. Et ces mesures ne doivent pas être préjudiciables à la victime. La juridiction spécialisée est un vaste chantier, qui n'est pas réalisable dans le court délai que nous avions pour examiner cette proposition de loi, mais qui reste un objectif. On parle beaucoup de l'Espagne, parce que c'est de ce pays que le débat est parti. Là-bas, le juge fixe le plus souvent la distance de déclenchement de l'alerte à 500 mètres. En France, c'est également le juge qui statuera sur la zone tampon et sur les modalités. Voilà dix ans qu'on réfléchit au bracelet. Combien de mamans sont mortes depuis dix ans ? Je sais bien qu'il ne faut pas être dans l'émotionnel, mais nous ne sommes pas sous le coup d'un drame atroce qui serait survenu récemment - simplement dans la continuité de ces violences, qui perdurent encore et toujours. Voilà dix ans que la première expérimentation a été votée par le législateur. Nous sommes en 2019, et rien n'a été fait. Le dispositif est peut-être imparfait, mais nous devons avancer, sans nous arc-bouter sur des raisons purement techniques.

Il y a souvent une emprise de l'auteur sur la victime. Le problème du bracelet, c'est qu'il maintient un lien entre la victime et l'auteur. C'est un paradoxe psychologique, car on a envie que la victime casse le lien nauséabond qui la lie avec l'auteur des faits. Mais pour la protéger, on lui crée un lien avec lui ! Le bracelet n'est pas le seul élément de protection. La meilleure protection reste l'éducation : dans notre société de violence, violence verbale, sur internet, sur les réseaux sociaux, et de pauvreté des mots, on crée des maux quand on n'a pas les mots. Quand on ne sait pas s'exprimer autrement, on frappe sa femme - ce qui n'est pas tolérable.

L'Espagne semble le pays occidental où le plus d'efforts sont faits. Il y a aussi la Suède, mais nulle part le problème n'a été résolu. Il semble inhérent à l'âme humaine, et à une certaine forme de domination masculine. Il existe des structures d'aide d'urgence, monsieur Collombat, qui prennent les femmes en charge. Mais ce n'est pas l'objet de cette proposition de loi. Mille places ne suffisent pas en tant que telles : il faut un accompagnement. Concernant l'ordonnance de protection, si l'auteur des violences alléguées refuse le bracelet, le procureur, qui est associé à la procédure, est saisi et la perspective d'une enquête pénale peut être dissuasive. Beaucoup dépendra des moyens que nous aurons pour évaluer cette mesure, qu'il était difficile de faire évoluer en profondeur dans un temps si court. Notre but a été d'apporter une solution supplémentaire aux femmes, y compris en conservant le délai de six jours car il faut aller vite. Parfois, plus c'est urgent, plus il faut prendre du temps, car on n'a pas le droit à l'erreur.

EXAMEN DES ARTICLES

Chapitre 1 er : de l'ordonnance de protection

L'amendement COM-34 , qui modifie l'intitulé du chapitre est adopté.

Article 1 er

Mme Marie Mercier , rapporteur . - La demande d'une ordonnance de protection ne saurait être subordonnée au dépôt d'une plainte. Mon amendement COM-35 précise que cette règle concerne tous les types de plaintes pénales.

M. Philippe Bas , président . - Bonne idée !

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - C'est une précision utile pour éviter une interprétation restrictive du texte.

L'amendement COM-35 est adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Mon amendement COM-39 distingue les notions d'audience et d'auditions. Le juge convoquerait ainsi les parties à une audience de jugement, laquelle se tiendrait en chambre du conseil. Les auditions de chacune des parties ont lieu lors de cette audience et, si nécessaire, de manière séparée.

L'amendement COM-39 est adopté.

Article 1er bis (nouveau)

Mme Marie Mercier , rapporteur . - L'article 1 er bis protège tous les types de couples : ceux qui vivent ensemble, ceux qui viennent de se séparer, ceux qui sont séparés depuis longtemps, ceux qui n'ont pas vécu ensemble. L'article 132-80 du code pénal prévoit ainsi une circonstance aggravante en cas d'infraction commise par « le conjoint, le concubin ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, y compris lorsqu'ils ne cohabitent pas ». La référence, dans le code civil, à l'absence de cohabitation introduite à l'Assemblée nationale peut être une précision utile afin d'éviter toute incertitude. Mon amendement COM-36 poursuit le même objectif et clarifie la rédaction de l'article 515-9 du code civil pour que l'ordonnance de protection puisse être utilisée par tous les couples, même s'ils ne cohabitent pas, ou par les anciens couples, même s'ils n'ont jamais cohabité.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - C'est très important, car le juge a tendance à considérer que, sans cohabitation, il n'y a pas besoin de protection.

L'amendement CO0M-36  est adopté.

Article 2

Mme Marie Mercier , rapporteur . - L'amendement COM-1 permet au JAF d'ordonner au conjoint violent de se soumettre à des soins. On ne peut pas forcer un individu à subir un traitement. Avis défavorable.

M. Philippe Bas , président . - Ou alors, il faudrait préciser que c'est avec le consentement de la personne en question.

L'amendement COM-1 n'est pas adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Même avis sur l'amendement COM-2.

M. Philippe Bas , président . - Il est satisfait.

L'amendement COM-2 n'est pas adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - L'amendement COM-3 concerne l'extension de l'interdiction de paraître aux défendeurs dans les affaires de mariages forcés. Nous n'avons pas pu nous pencher sur ce sujet difficile. Je propose de renvoyer ce débat à la séance publique.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Nous déposerons à cet article un amendement sur l'attribution du bracelet anti-rapprochement. Le JAF devrait pouvoir saisir le parquet, qui saisira le juge de la détention et des libertés (JLD). Ce dernier est un juge pénal, qui pourra ordonner l'octroi d'un bracelet anti-rapprochement. Nous ne devons pas renoncer à trouver un bon dispositif. Et s'arrêter à une solution temporaire m'étonne connaissant votre rigueur.

M. Philippe Bas , président . - Notre rapporteur a longuement examiné cette option, mais y a renoncé, pour de solides raisons juridiques. Nous en délibérerons la semaine prochaine. Cette alternative est difficile à construire - mais elle mérite d'être étudiée.

L'amendement COM-3 n'est pas adopté.

Article additionnel après l'article 2

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Mon amendement COM-40 confère un caractère temporaire à l'article du code civil qui autorise le JAF à proposer un bracelet anti-rapprochement dans le cadre de l'ordonnance de protection. Ce nouveau dispositif électronique mobile anti-rapprochement est innovant en matière civile. Il convient donc, avant de le pérenniser, d'en évaluer la mise en oeuvre par les juridictions et d'en ajuster, si nécessaire, le dispositif.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Nous sommes défavorables à l'aspect temporaire. Et vous demandez un rapport...

M. Philippe Bas , président . - C'est un dispositif inspiré de celui adopté pour la loi de sortie de l'état d'urgence, afin de ne pas pérenniser dans la loi des dispositions qui nous paraissaient audacieuses.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Affirmer d'emblée qu'une disposition est temporaire, c'est l'affaiblir.

M. Philippe Bas , président . - L'alternative serait de mettre en place un dispositif efficace et fonctionnel.

L'amendement COM-40 est adopté.

Article 2 ter (nouveau)

L'amendement de suppression COM-27 est adopté.

Article 3

L'amendement rédactionnel COM-4 n'est pas adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - L'amendement COM-25 est rédactionnel.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Prévoir un décret en Conseil d'État n'est pas rédactionnel : nous savons ce que cela signifie en termes de lourdeur...

M. Philippe Bas , président . - Vous auriez pu dire : en termes de garanties supplémentaires apportées aux libertés !

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Mais je sais que vous allez proposer que, pour ce motif, le texte ne s'applique pas immédiatement.

L'amendement rédactionnel COM-25 est adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - L'amendement COM-5 propose d'inscrire au fichier des personnes recherchées les personnes concernées par une interdiction de rapprochement. Avis défavorable, au profit de mon amendement COM-30 , qui a le même objet mais qui est plus complet.

L'amendement COM-5  n'est pas adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Même avis sur l'amendement COM-6 , qui prévoit une information de la victime sur la fin du sursis avec mise à l'épreuve ou sursis probatoire, car il est satisfait : la victime rendra son boitier.

M. Philippe Bas , président . - La précision n'est pourtant pas inutile afin de s'assurer que l'information sera effectivement délivrée.

L'amendement COM-6 est adopté.

Article 4

L'amendement COM-9 n'est pas adopté.

L'amendement rédactionnel COM-26 est adopté.

L'amendement COM-7 n'est pas adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Par coordination, l'amendement COM-8 donne aux forces de l'ordre la possibilité d'appréhender une personne placée sous contrôle judiciaire qui aurait enfreint une interdiction de rapprochement.

L'amendement COM-8  est adopté.

Article additionnel après l'article 4

L'amendement de coordination COM-30 est adopté.

Article 5

Mme Marie Mercier , rapporteur . - L'amendement COM-10 porte sur les modalités d'information de la victime. Si c'est par un document, celui-ci peut ne pas être lu ou ne pas être bien compris.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Lorsqu'une personne vient déposer plainte, il est bon qu'elle reçoive un document, qu'elle pourra relire à tête reposée, lui donnant connaissance de ses droits.

M. Philippe Bas , président . - Faut-il lui donner cette connaissance par écrit, ou par oral ?

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - À votre avis ?

M. Philippe Bas , président . - Une majorité se dessine en faveur d'un document écrit.

M. Yves Détraigne . - Cela n'empêche pas une information orale : quand on donne un papier, on n'est pas sûr qu'il soit lu.

Mme Esther Benbassa . - Il faut les deux, en effet.

M. Philippe Bas , président . - Mme Troendlé propose de modifier l'amendement pour prévoir que la victime est informée par oral et se voit remettre un document. Nous l'acceptons.

L'amendement COM-10 ainsi modifié est adopté.

L'amendement rédactionnel COM-29 est adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Au moment du dépôt de plainte, la victime serait informée qu'elle peut bénéficier d'un bracelet anti-rapprochement. Mon amendement COM-38 propose que l'information porte également sur la possibilité de se voir délivrer un bracelet anti-rapprochement dans le cadre d'une ordonnance de protection délivrée par le JAF. Les victimes sont souvent désorientées face à la complexité des procédures et cette information peut les aider à identifier les démarches à accomplir.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - On cherche les meilleures modalités pour informer la victime des possibilités qui lui sont offertes. Où et quand cette information a-t-elle lieu ? Le dépôt de plainte est une étape clairement identifiée.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Cela se passe au moment du dépôt de plainte dans les locaux de la police ou de la gendarmerie.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Alors, l'amendement précédent suffit.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Uniquement pour le volet pénal.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Quand cela se passe-t-il, pour l'étape civile ?

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Lors du dépôt de plainte, aussi.

L'amendement COM-38 est adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - La mise en place du bracelet prendra un peu de temps après l'entrée en vigueur de la loi : un décret en Conseil d'État est prévu et il faudra mettre en place l'infrastructure technique nécessaire au fonctionnement du dispositif, ce qui nécessitera de passer des marchés publics. C'est pourquoi mon amendement COM-28 propose que l'obligation d'informer sur le bracelet soit un peu différée dans le temps, de façon à ne pas donner aux victimes une information sur un dispositif qui ne serait pas encore opérationnel.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Je suis défavorable à ce que nous inscrivions dans la loi une mise en oeuvre différée de ce dispositif. La seule chose qui ressortirait, c'est que nous souhaitons que ce soit différé dans un an. J'admire la volonté de pragmatisme, mais je ne vois pas l'utilité de l'écrire.

M. Philippe Bas , président . - Dès lors qu'on renvoie à un décret en Conseil d'État, la disposition ne sera applicable que quand le décret sera publié. Cet amendement n'est peut-être pas indispensable.

M. Jean-Pierre Sueur . - C'est réglementaire. Pourquoi l'indiquer dans la loi ?

L'amendement COM-28 est retiré.

Article additionnel après l'article 5

Mme Marie Mercier , rapporteur . - L'amendement COM-11 augmente le quantum de la peine encourue en cas de menace destinée à dissuader de porter plainte. La peine déjà prévue me paraît suffisamment dissuasive.

L'amendement COM-11 n'est pas adopté.

Article 6

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Mon amendement COM-19 propose de modifier l'intitulé du chapitre III, qui porte non sur des dispositifs d'hébergement d'urgence, mais sur l'accès au logement, que celui-ci soit temporaire ou pérenne. Il faut bien distinguer un hébergement d'urgence d'un logement.

L'amendement COM-19 est adopté.

Article 7

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Mon amendement COM-20 sort du code de la construction et de l'habitat l'expérimentation, qui est par nature temporaire et ne doit pas être codifiée.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - Avis défavorable. Cela fragilisera la disposition.

L'amendement COM-20 est adopté. L'amendement rédactionnel COM-21 est adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - L'amendement COM-12 de M. Grand renvoie à un décret pour préciser l'expérimentation et modifie les délais de remise de l'évaluation : avis défavorable sur le renvoi au décret ; quant aux délais de remise de l'évaluation, mon amendement COM-24 y pourvoit.

L'amendement COM-12 n'est pas adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Mon amendement COM-24 rapproche la date de remise du rapport au Parlement en prévoyant une remise six mois avant le terme de l'expérimentation, pour permettre une réflexion sur la pérennisation du dispositif.

L'amendement COM-24 est adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Mon amendement COM-37 supprime le comité de pilotage au sein duquel la présence de deux députés et de deux sénateurs est prévue. C'est contraire à la position du Sénat, qui n'aime pas les organismes extra-parlementaires...

M. Philippe Bas , président . - Ce n'est pas qu'il ne les aime pas : il vérifie que leur existence rend nécessaire la participation de parlementaires.

L'amendement COM-37 est adopté.

Article 7 bis (nouveau)

L'amendement COM-23 est adopté.

L'amendement COM-13 n'est pas adopté.

Article 7 ter (nouveau)

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Mon amendement COM-22 supprime cet article, qui n'est pas de niveau législatif.

L'amendement COM-22 est adopté. Les amendements COM-15 et COM-14 deviennent sans objet.

Article additionnel après l'article 7 ter (nouveau)

L'amendement COM-16 n'est pas adopté.

Article 8

L'amendement COM-17 n'est pas adopté.

Article 10 A (nouveau)

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Mon amendement COM-31 supprime cet article, qui demande un rapport.

M. Jean-Pierre Sueur . - Nous acceptons les rapports demandés par le Sénat, pas les autres...

Mme Marie-Pierre de la Gontrie . - C'est surtout que celui-ci demande d'étudier la mise en place d'une application qui existe déjà.

L'amendement COM-31 est adopté. L'amendement COM-18 devient sans objet.

Article 10 B (nouveau)

L'amendement de suppression COM-32 est adopté.

Article 12 (nouveau)

L'amendement de coordination COM-33 est adopté.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Concernant le champ des irrecevabilités de l'article 45, il me semble que le périmètre du texte devrait conduire à n'accepter ni des mesures qui toucheraient à la procédure pénale générale, mais qui n'auraient pas de lien avec la question des violences faites aux femmes ou des violences intrafamiliales, ni des mesures civiles ou pénales de fond, sans lien avec les violences faites aux femmes ou intrafamiliales.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans les tableaux suivants :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Chapitre I er
De l'ordonnance de protection

Mme Marie MERCIER, rapporteur

34

Modification de l'intitulé du chapitre

Adopté

Article 1 er
Conditions préalables requises pour la sollicitation d'une ordonnance de protection
et modalités de déroulement de l'audience devant le juge

Mme Marie MERCIER, rapporteur

35

Précision sur la notion de plainte pénale

Adopté

Mme Marie MERCIER, rapporteur

39

Précision rédactionnelle

Adopté

Article 1 er bis (nouveau)
Critères de conjugalité applicables à la délivrance
d'une ordonnance de protection

Mme Marie MERCIER, rapporteur

36

Précision concernant les couples n'ayant jamais cohabité

Adopté

Article 2
Délai de délivrance et contenu de l'ordonnance de protection

M. GRAND

1

Obligation de soins

Rejeté

M. GRAND

2

Signalement au procureur de toutes les ordonnances de protection

Rejeté

M. GRAND

3

Extension de l'interdiction de paraître aux défendeurs à une ordonnance de protection en cas de mariage forcé

Rejeté

Articles additionnels après l'article 2

Mme Marie MERCIER, rapporteur

40

Caractère expérimental du bracelet anti-rapprochement dans le cadre de l'ordonnance de protection

Adopté

Article 2 t e r (nouveau)
Interdiction d'acquérir et de détenir une arme
pour les personnes visées par une ordonnance de protection

Mme Marie MERCIER, rapporteur

27

Suppression de l'article

Adopté

Article 3
Port du bracelet anti-rapprochement en cas de condamnation pénale

M. GRAND

4

Précision rédactionnelle

Rejeté

Mme Marie MERCIER, rapporteur

25

Précision rédactionnelle et renvoi à un décret en Conseil d'État

Adopté

M. GRAND

5

Inscription au fichier des personnes recherchées des personnes concernées par une interdiction de rapprochement

Rejeté

M. GRAND

6

Information de la victime sur la fin du sursis avec mise à l'épreuve/sursis probatoire?

Adopté

Article 4
Port du bracelet anti-rapprochement pendant la phase pré-sentencielle

M. GRAND

9

Inscription au fichier des personnes recherchées des personnes placées sous contrôle judiciaire et soumises à une interdiction de rapprochement

Rejeté

Mme Marie MERCIER, rapporteur

26

Précision rédactionnelle et renvoi à un décret en Conseil d'État

Adopté

M. GRAND

7

Information de la victime lorsqu'une personne mise en examen fait l'objet d'une mesure d'interdiction de rapprochement

Rejeté

M. GRAND

8

Possibilité pour les forces de l'ordre d'appréhender une personne placée sous contrôle judiciaire qui aurait enfreint une interdiction de rapprochement

Adopté

Articles additionnels après l'article 4

Mme Marie MERCIER, rapporteur

30

Inscription dans le fichier des personnes recherchées des personnes soumises à une interdiction de rapprochement

Adopté

Article 5
Information de la victime au moment du dépôt de plainte

M. GRAND

10

Modalités d'information de la victime

Adopté avec modification

Mme Marie MERCIER, rapporteur

29

Précision rédactionnelle

Adopté

Mme Marie MERCIER, rapporteur

38

Information sur la possibilité de bénéficier d'un bracelet anti-rapprochement dans le cadre d'une ordonnance de protection

Adopté

Mme Marie MERCIER, rapporteur

28

Date d'entrée en vigueur

Retiré

Articles additionnels après l'article 5

M. GRAND

11

Augmentation du quantum de la peine encourue en cas de menace destinée à dissuader de porter plainte

Rejeté

Chapitre III
De l'hébergement d'urgence

Mme Marie MERCIER, rapporteur

19

Modification de l'intitulé du chapitre

Adopté

Article 7
Expérimentation de deux dispositifs pour faciliter l'accès au logement
des victimes de violences intrafamiliales

Mme Marie MERCIER, rapporteur

20

Non-inscription dans le code de la construction et de l'habitation de l'expérimentation de sous-location

Adopté

Mme Marie MERCIER, rapporteur

21

Précision rédactionnelle

Adopté

M. GRAND

12

Renvoi à un décret pour préciser l'expérimentation et délai de remise de l'évaluation

Rejeté

Mme Marie MERCIER, rapporteur

24

Fixation de la date de remise du rapport au Parlement et suppression du rapport d'étape

Adopté

Mme Marie MERCIER, rapporteur

37

Suppression du comité de pilotage requérant la présence de parlementaires

Adopté

Article 7 bis (nouveau)
Impossibilité de motiver le refus d'attribution d'un logement social
par la qualité de propriétaire lorsque le candidat a bénéficié d'une ordonnance de protection

Mme Marie MERCIER, rapporteur

23

Précision rédactionnelle

Adopté

M. GRAND

13

Précision de la durée pendant laquelle le motif de refus relatif à la propriété d'un logement ne peut être opposé à une victime de violences conjugales

Rejeté

Article 7 ter (nouveau)
Attribution en urgence par le préfet d'un logement de droit commun
pris sur le contingent de logements réservés de l'État aux femmes victimes de violences

Mme Marie MERCIER, rapporteur

22

Amendement de suppression

Adopté

M. GRAND

15

Nouvelle rédaction de l'article 7 ter

Satisfait ou sans objet

M. GRAND

14

Intégration des femmes victimes de violences conjugales dans les catégories prioritaires DALO

Satisfait ou sans objet

Articles additionnels après l'article 7 ter (nouveau)

M. GRAND

16

? ?Suppression de l'obligation d'un enregistrement préalable de la demande d'attribution de logements sociaux

Rejeté

Article 8
Attribution du téléphone grave danger

M. GRAND

17

Extension des cas d'attribution du TGD aux cas ou la partie défenderesse s'est vue interdire de se rendre dans certains lieux

Rejeté

Article 10 A (nouveau)
Rapport sur la conception d'une application destinée
aux personnes victimes de violences intrafamiliales

Mme Marie MERCIER, rapporteur

31

Suppression de l'article

Adopté

M. GRAND

18

Création d'un coffre-fort numérique

Satisfait ou sans objet

Article 10 B (nouveau)
Rapport sur la prise en charge par les juridictions et les forces de l'ordre
des violences faites aux femmes

Mme Marie MERCIER, rapporteur

32

Suppression de l'article

Adopté

Article 12 (nouveau)
Application outre-mer

Mme Marie MERCIER, rapporteur

33

Coordination

Adopté

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET CONTRIBUTION ÉCRITE

M. Aurélien PRADIÉ , député du Lot, auteur de la proposition de loi

Ministère de la justice

Direction des affaires civiles et du sceau (DACS)

Mme Sophie MAITRE , adjointe au chef de bureau du droit des personnes et de la famille (C1),

Mme Guilaine GANRY , rédactrice au sein de ce bureau

Direction des affaires criminelles et des grâces (DACG)

M. Manuel RUBIO-GULLON , magistrat, sous-directeur de la négociation et de la législation pénales

Mme Clara DUFOUR de NEUVILLE , magistrate au bureau de la législation pénale générale

M. Francis LE GUNEHEC , magistrat, chef du bureau de la législation pénale générale

Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales - Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature - Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages

M. François ADAM , directeur

Mme Hélène DONNIO , adjointe au chef de bureau des politiques sociales du logement

Conseil national des barreaux (CNB)

Conseil national des barreaux

Mme Carole PASCAREL , avocate

Mme Valérie DUEZ RUFF , avocate

Mme Sophie FERRY BOUILLON , avocate

Mme Corine MERIC , juriste

Barreau de Paris

Mme Anne-Laure CASADO , avocate

M. Julien AUBIGNAT , chargé des affaires publiques

Conférence nationale des procureurs de la République (CNPR)

M. Eric CORBAUX , procureur de la République de Pontoise

Magistrats

Mme Gwenola JOLY-COZ , présidente du Tribunal de grande instance de Pontoise, directrice de session à l'ENM sur la lutte contre les violences conjugales

Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille

Mme Marie-Hélène POMAREDE-NOIR , premier vice-président du Tribunal de grande instance d'Évry, service des affaires familiales

Syndicats de magistrats

Syndicat de la magistrature

Mme Sarah MASSOUD , secrétaire nationale

Associations de victimes

Observatoire des violences envers les femmes du Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis

Mme Ernestine RONAI , responsable

Fédération Nationale Solidarité Femmes ( FNSF)

Mme Fatiha BELKACEM , avocate de la FNSF au sein de la commission justice

Halte Aide aux Femmes Battues

Mme Colette BARNAY , présidente

Mme Véronique DELEPOUVE , directrice

Logement

Action Logement

Mme Marie-Angèle LOPES , présidente de l'Association pour l'accès aux garanties locatives (APAGL), filiale d'Action Logement gérant Visale

M. Jérôme DRUNAT , directeur général de l'APAGL

Mme Isabelle LE CALENNEC , directrice cadre de vie & cohésion sociale d'Action Logement Immobilier, créatrice et animatrice du groupe de travail Action Logement sur les moyens déjà mis en oeuvre pour aider les victimes de violences conjugales

Mme Valérie JARRY , directrice des relations institutionnelles d'Action Logement

Union sociale pour l'habitat

Mme Marianne LOUIS , directrice générale

Mme Francine ALBERT , conseillère pour les relations avec le Parlement

Contribution écrite

Unité magistrats Force ouvrière


* 1 Le terme de conjoint est ici employé par commodité pour désigner toutes les formes de conjugalités : époux, partenaires liés par un pacte civil de solidarité et concubins.

* 2 Cette estimation est issue des résultats de l'enquête de victimation annuelle « Cadre de vie et sécurité » (INSEE-ONRP-SSM-SI).

* 3 La procédure civile aux fins de mesures de protection des victimes de violence est codifiée aux articles 1136-3 et suivants du code de procédure civile.

* 4 Loi n° 2014-476 du 14 mai 2014 autorisant la ratification de la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l'égard des femmes et la violence domestique.

* 5 Convention d'Istanbul, article 53.

* 6 Cour européenne des droits de l'homme, 2 mars 2017, n° 41237/14, Tapis c/Italie et 23 mai 2017, n° 4964509/09, Bälsan c/Roumanie.

* 7 Règlement (UE) n° 606/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013 relatif à la reconnaissance mutuelle des mesures de protection en matière civile.

* 8 Article 515-11 du code civil.

* 9 Le ministère d'avocat n'est pas obligatoire dans cette procédure (article 1136-6 du code de procédure civile).

* 10 Elle peut également être demandée par une personne menacée de mariage forcé.

* 11 Article 515-11 du code civil.

* 12 Article 515-13 du code civil.

* 13 Article 1136-11 du code de procédure civile.

* 14 Le non-respect d'une ou plusieurs des obligations prévues par une ordonnance de protection est puni de deux ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

* 15 Le fait pour une personne tenue de verser une contribution ou des subsides au titre de l'ordonnance de protection de ne pas notifier son changement de domicile au créancier dans un délai d'un mois est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende.

* 16 Article L. 316-3 du code de l'entrée du séjour et du droit d'asile.

* 17 Conseil constitutionnel, décision n° 2014-700 DC du 31 juillet 2014 sur la loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.

* 18 Cour de cassation, première chambre civile, 8 juin 2016, n° 16-40.016.

* 19 Après avoir ordonné la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité, le juge aux affaires familiales, qui n'a pas sursis à statuer, a, par ordonnance irrévocable du 11 mars 2016, rejeté la demande d'ordonnance de protection présentée par la plaignante. L'instance à l'occasion de laquelle la question prioritaire de constitutionnalité a été soulevée n'étant plus en cours, la question est devenue sans objet et la Cour de cassation n'a pu la renvoyer au Conseil constitutionnel.

* 20 Guide pratique de l'ordonnance de protection, ministère de la justice, direction des affaires civiles et du Sceau, juillet 2019 . Ce document est accessible à l'adresse suivante :

http://www.justice.gouv.fr/include_htm/20190718_dacs_ordonnance_protection_guide.pdf

* 21 Infostat justice, septembre 2019, n° 171, bulletin d'information statistique du ministère de la justice, Les décisions d'ordonnance de protection prononcées en 2016 , Maud Guillonneau.

Ce document est accessible à l'adresse suivante :

http://www.justice.gouv.fr/statistiques-10054/infostats-justice-10057/les-decisions-dordonnance-de-protection-prononcees-en-2016-32605.html

* 22 Le contentieux du droit familial est un contentieux de masse en droit civil. Il représentait 407 978 affaires nouvelles en 2016 et 329 958 en 2017, d'après les statistiques du ministère de la justice. Elles sont accessibles à l'adresse suivante :

http://www.justice.gouv.fr/statistiques-10054/chiffres-cles-de-la-justice-10303/

* 23 Rapport d'information n° 4169, enregistré le 17 janvier 2012, de M. Guy Geoffroy et Mme Danielle Bousquet, fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, sur la mise en application de la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :

http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i4169.asp

* 24 Étude statistique du ministère de la justice sur les ordonnances de protection précitée.

* 25 Ibid supra .

* 26 Année 2016, ibid supra .

* 27 Ces statistiques ont été mentionnées par Mme Nicole Belloubet, garde des Sceaux, ministre de la justice, à l'occasion de son audition par la délégation aux Droits des femmes de l'Assemblée nationale le mercredi 18 septembre 2019. Le compte rendu du cette audition est disponible à l'adresse suivante : http://www.assemblee-nationale.fr/15/cr-delf/18-19/c1819032.asp

* 28 Étude statistique du ministère de la justice sur les ordonnances de protection précitée.

* 29 Les députés Philippe Gosselin et Sébastien Pietrasenta, conscients de cette difficulté, avaient proposé d'abaisser le seuil à trois ans, mais leur initiative avait été jugée irrecevable au regard de l'article 40 de la Constitution. En élargissant le nombre de personnes concernées par l'expérimentation, leur proposition aurait augmenté les charges publiques.

* 30 La Cour de cassation a confirmé que cette vraisemblance est soumise à l'appréciation souveraine des juges, dans une décision de la première chambre civile en date du 5 octobre 2016 (n° 15-24.180).

* 31 Article 515-11 du code civil.

* 32 Néanmoins, le dépôt de plainte (ou d'une main courante) au commissariat n'exclut pas le recours à une ordonnance de protection. De la même manière, la victime de violences vraisemblables qui obtient le bénéfice d'une ordonnance de protection peut, à tout moment, décider de déposer plainte auprès du commissariat ou auprès du procureur de la République.

* 33 Circulaire de la garde des Sceaux, ministre de la justice, du 9 mai 2019 relative à l'amélioration du traitement des violences conjugales et à la protection des victimes.

Ce document est consultable à l'adresse suivante :

http://circulaire.legifrance.gouv.fr/index.php?action=afficherCirculaire&hit=1&r=44706

* 34 Guide pratique de l'ordonnance de protection , ministère de la justice, direction des affaires civiles et du Sceau, juillet 2019. Ce document est consultable à l'adresse suivante :

http://www.justice.gouv.fr/include_htm/20190718_dacs_ordonnance_protection_guide.pdf

* 35 Infostat justice, septembre 2019, n° 171, bulletin d'information statistique du ministère de la justice, Les décisions d'ordonnance de protection prononcées en 2016 , Maud Guillonneau.

Ce document est consultable à l'adresse suivante :

http://www.justice.gouv.fr/statistiques-10054/infostats-justice-10057/les-decisions-dordonnance-de-protection-prononcees-en-2016-32605.html

* 36 Infostat 2019 du ministère de la justice sur les ordonnances de protection précité.

* 37 Il n'est partie à titre principal que lorsqu'il est à l'initiative de la procédure, avec l'accord de la victime, comme le prévoit l'article 515-10 du code civil. Cela concerne très peu de cas (12 seulement sur 3 100 demandes d'ordonnances de protection en 2016).

* 38 L'article 424 du code de procédure civile dispose que : « le ministère public est partie jointe lorsqu'il intervient pour faire connaître son avis sur l'application de la loi dans une affaire dont il a communication ».

* 39 Infostat justice, septembre 2019, n° 171, précité.

* 40 Conseil constitutionnel, décision n° 84-184 DC du 29 décembre 1984 sur la loi de finances pour 1985.

* 41 Rapport n° 564 (2009-2010) de M. François Pillet, fait au nom de la commission des lois sur la proposition de loi renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes, déposé le 17 juin 2010. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/rap/l09-564/l09-564.html

* 42 Infostat justice , septembre 2019, n° 171, précité.

* 43 Conseil constitutionnel, décision n° 2019-778 du 21 mars 2019 sur la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

* 44 Ibid supra .

* 45 Rapport n° 564 (2009-2010) de M. François Pillet, fait au nom de la commission des lois sur la proposition de loi renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes, déposé le 17 juin 2010. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/rap/l09-564/l09-564.html

* 46 Cour de cassation, première chambre civile, 12 février 2014, n° 13-13.873.

* 47 Conseil constitutionnel, décision n°99-419 DC du 15 novembre 1999 sur la loi relative au pacte civil de solidarité, considérants 26 et 28.

* 48 Cour de cassation, chambre criminelle, 5 octobre 2010, n° 10-81.743.

* 49 Conseil d'État, première et deuxième sous-sections réunies, 12 juin 2002, n° 216066.

* 50 Cour d'appel de Lyon, deuxième chambre A, 2 juillet 2013, n° 13/03189.

* 51 Infostat justice, septembre 2019, n° 171, précité.

* 52 Cour d'appel de Lyon, deuxième chambre A, 2 juillet 2013, n° 13/03189.

* 53 Guide pratique de l'ordonnance de protection , ministère de la justice, direction des affaires civiles et du Sceau, juillet 2019, p. 17. Ce document est consultable à l'adresse suivante :

http://www.justice.gouv.fr/include_htm/20190718_dacs_ordonnance_protection_guide.pdf

* 54 Rapport n° 807 (2012-2013) de Mme Virginie Klès sur le projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes, fait au nom de la commission des lois, déposé le 24 juillet 2013.

Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/rap/l12-807/l12-807.html

* 55 Infostat justice, septembre 2019, n° 171, précité.

* 56 Rapport n° 807 (2012-2013) de Mme Virginie Klès sur le projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes, fait au nom de la commission des lois, déposé le 24 juillet 2013.

* 57 Guide pratique de l'ordonnance de protection, ministère de la justice, direction des affaires civiles et du Sceau, p. 29, juillet 2019. Ce document est accessible à l'adresse suivante :

http://www.justice.gouv.fr/include_htm/20190718_dacs_ordonnance_protection_guide.pdf

* 58 Voir exposé général.

* 59 Voir par exemple article 373-2-9 du code civil.

* 60 Si la personne mise en examen encourt une peine d'emprisonnement correctionnel ou une peine plus grave.

* 61 Conseil constitutionnel, décision n° 2003-467 DC du 13 mars 2003 sur la loi pour la sécurité intérieure.

* 62 Conseil constitutionnel, décision n° 2005-527 DC du 8 décembre 2005 sur la loi sur le traitement de la récidive des infractions pénales.

* 63 Conseil constitutionnel, décision 94-352 DC, 18 janvier 1995 sur la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité.

* 64 Voir article 3 de la proposition de loi.

* 65 Rapport n° 839 (2015-2016) de M. Yves Détraigne sur le projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXI ème siècle, fait au nom de la commission des lois, déposé le 21 septembre 2016. Ce document est consultable à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/rap/l15-839/l15-839.html

* 66 Conseil constitutionnel, décision n° 2016-739 DC du 17 novembre 2016 sur la loi de modernisation de la justice du XXI e siècle.

* 67 Circulaire du 26 juillet 2017 de présentation de diverses dispositions en matière de droit des personnes et de la famille de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXI e siècle.

Ce document est consultable à l'adresse suivante :

http://www.textes.justice.gouv.fr/art_pix/JUSC1720438C.pdf

* 68 Voir commentaire de l'article 2 de la proposition de loi.

* 69 Le sursis probatoire se substituera également, à la même date, à la contrainte pénale, introduite en 2014, qui est une peine autonome consistant à soumettre le condamné, sous le contrôle du juge de l'application des peines (JAP), à des mesures de contrôle et d'assistance ainsi qu'à des obligations et interdictions destinées à prévenir la récidive et à favoriser sa réinsertion au sein de la société. Elle est très proche du SME dans ses modalités pratiques.

* 70 On parle de menace avec ordre lorsque la menace est assortie d'une demande de faire ou de ne pas faire quelque chose.

* 71 La libération conditionnelle est la libération d'un détenu avant l'expiration de sa peine carcérale. La justice prend en compte le comportement personnel du détenu, ou sa situation de fragilité liée à son âge, à son état de santé ou de grossesse, et à la présence d'un enfant. Certaines contraintes, dont le non-respect peut entraîner le retrait de la mesure, sont imposées au détenu qui bénéficie de la libération conditionnelle.

* 72 La libération sous contrainte permet à un détenu d'exécuter la fin de sa peine hors de prison. La mesure est prise uniquement pour les détenus qui remplissent certaines conditions. Le juge de l'application des peines examine la possibilité de libérer sous contrainte les détenus condamnés à une peine de moins de cinq ans d'emprisonnement et qui ont effectué les deux tiers de leur peine. Des obligations de suivi et de contrôle sont imposées au bénéficiaire de la mesure.

* 73 Cette mesure de suivi concerne les personnes condamnées à sept ans de prison ou plus - cinq ans ou plus pour un récidiviste - pour une infraction grave et ayant bénéficié de réductions de peine. Elle dure le temps des réductions de peine accordées.

* 74 La surveillance de sûreté consiste en des obligations imposées au détenu qui a purgé une peine criminelle, mais qui présente un risque de récidive élevé. La décision est prise par une juridiction spécialisée, à la fin de l'exécution de la peine ou à la fin des mesures de surveillance qui lui ont succédé.

* 75 Antérieurement intitulé « De l'hébergement d'urgence ».

* 76 Nuitées en hôtel, séjours en centre d'hébergement et de réinsertion sociale, etc.

* 77 Voir le commentaire de l'article 2.

* 78 Ce qui pose une autre difficulté évoquée par les associations auditionnées : celle du relogement du conjoint violent.

* 79 Observatoire des violences conjugales, Fédération Nationale Solidarité Femmes, novembre 2018.

* 80 Les décisions d'ordonnance de protection prononcées en 2016, Bulletin d'information statistique n° 171 de septembre 2019.

* 81 Contre 1 % des défendeurs.

* 82 Selon l'observatoire de la FNSF cité supra , 82 % des femmes qui appellent le 3919 ont au moins un enfant et 53% déclarent avoir entre 2 et 3 enfants.

* 83 Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017, création d'un contingent de logements réservés dans les plans départementaux d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées.

* 84 Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, désolidarisation du bail du locataire victime des violences.

* 85 Anciennement régie par les articles L. 313-3 et suivants du code de la construction et de l'habitation, l'APL est depuis le 1 er septembre 2019 définie par les articles L. 831-1 et suivants, à la suite de l'ordonnance n° 2019-770 du 17 juillet 2019 relative à la partie législative du livre VIII du code de la construction et de l'habitation.

* 86 « Interventions à caractère très social dans le domaine du logement, notamment sous la forme d'opérations relatives au logement ou à l'hébergement des personnes défavorisées et de dépenses d'accompagnement social » visées à l'article L. 313-3 du code de la construction et de l'habitation.

* 87 L'employeur soumis à l'obligation de participation doit consacrer au minimum une quote-part de 0,45 % de sa masse salariale en faveur du logement.

* 88 Caution accordée par Action Logement au locataire qui prend en charge le paiement du loyer et des charges locatives de la résidence principale, en cas de défaillance de paiement. Elle peut être obtenue par tous les jeunes de moins de 30 ans, quelle que soit leur situation au regard de l'emploi.

* 89 Assistance personnalisée par un conseiller, destinée aux salariés en difficulté dans leur parcours résidentiel qui permet d'accéder à des aides sous forme de subvention ou de prêt à taux 0 % ou 1 %.

* 90 Par la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement.

* 91 Article 22 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

* 92 Article L. 442-8-1, alinéa 3, du code de la construction et de l'habitation.

* 93 Article L. 442-8-2, alinéa 4, du code de la construction et de l'habitation.

* 94 Article L. 442-8-1-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 95 Introduit par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion.

* 96 Loi n° 2018-699 du 3 août 2018 visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination.

* 97 Ce motif de refus ne s'impose pas aux commissions d'attribution.

* 98 Article 80 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion.

* 99 Article R. 441-5 du code de la construction et de l'habitation.

* 100 Compte rendu intégral de l'Assemblée nationale, deuxième séance du jeudi 10 octobre 2019.

* 101 Loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion.

* 102 Les contributions financières s'effectuent par voie de fonds de concours.

* 103 Par exemple le site arretonslesviolences.gouv.fr ou stop-violences-femmes.gouv.fr.

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