Disponible au format PDF Acrobat
Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.
Table des matières
Lutte contre les fraudes sociales et fiscales (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
Lutte contre les fraudes sociales et fiscales (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
Ordre du jour du mardi 18 novembre 2025
SÉANCE
du jeudi 13 novembre 2025
14e séance de la session ordinaire 2025-2026
Présidence de Mme Sylvie Robert, vice-présidente
La séance est ouverte à 10 h 30.
Lutte contre les fraudes sociales et fiscales (Procédure accélérée - Suite)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales.
Discussion des articles (Suite)
Article 8
M. Olivier Jacquin . - Je me réjouis de retrouver M. Farandou dans ses nouvelles fonctions.
La plateformisation de l'emploi est l'un des principaux défis auxquels notre modèle social doit faire face. Quand certains se félicitent d'une opportunité en matière d'activité économique et de développement de services, d'autres - et parfois les mêmes - s'inquiètent d'un saut dans le vide pour les droits sociaux et le financement de notre modèle social.
Noter groupe défend avec constance la requalification des travailleurs de plateformes en salariés et la valorisation de modèles alternatifs, dont la coopérative d'activité et d'emploi (CAE). Dans cet esprit, nous proposions d'anticiper la transposition de la directive Schmit, qui instaure une présomption de salariat, mais notre amendement n'a pas été jugé recevable.
D'autre part, il nous semble incompréhensible que, dans un texte sur la fraude, la situation des livreurs à vélo ne soit pas abordée. Hélas, mon amendement sur le sujet a également été jugé irrecevable. La fraude est particulièrement développée dans ce secteur, où de nombreux sans-papiers sont exploités - un phénomène parfaitement décrit dans L'Histoire de Souleymane. C'est d'ailleurs aujourd'hui que démarre le procès Frichti, dans lequel je suis partie civile après avoir procédé à un signalement au titre de l'article 40 du code de procédure pénale. Et, hier, les représentants des livreurs à vélo ont quitté la table des négociations à l'Autorité de régulation des plateformes, qui est un véritable échec.
Mme la présidente. - Amendement n°64 de M. Jacquin et du groupe SER.
M. Olivier Jacquin. - On ne peut pas être pour l'État de droit et ne pas vouloir lutter contre la fraude qui gangrène le secteur des VTC. Nous entendons donc supprimer l'article 8, un cheval de Troie qui renforcera in fine les plateformes.
La fraude des plateformes est avérée, liée notamment à l'utilisation de gestionnaires de flottes et de sociétés écrans, souvent temporaires, permettant de se soustraire au paiement de cotisations. Or cet article affirme que les plateformes ne sont pas donneuses d'ordres et crée un devoir de vigilance au rabais qui perpétuera leur déresponsabilisation, en contradiction avec la directive Schmit. Alors qu'un débat important sur le devoir de vigilance est prévu aujourd'hui même au Parlement européen, supprimons cet article.
Mme la présidente. - Amendement identique n°73 de M. Fernique et alii.
M. Jacques Fernique. - Le rapporteur Duffourg l'a reconnu hier : cet article s'attaque aux fraudes dans le secteur des VTC de manière assez minime. Pourtant, les fraudes en question n'ont rien de minime : elles sont même systémiques, se montant à plusieurs centaines de millions. On estime que près de 60 % des flux échappent à la TVA et aux cotisations.
Les sociétés écrans sont au fondement de ce modèle. Hélas, les mesures d'encadrement prises jusqu'à présent n'y ont pas changé grand-chose, et cet article ne fait pas exception. De fait, il maintient la fiction selon laquelle les chauffeurs seraient indépendants, alors que nous devons transposer la directive Schmit, qui instaure une présomption de salariat, avant la fin 2026. Compte tenu de sa faible portée, il serait plus clair de le supprimer.
Mme la présidente. - Amendement identique n°224 de M. Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Cet article entre en contradiction totale avec la directive européenne de 2024 visant à garantir des droits sociaux aux travailleurs de plateformes. La notion de vigilance renforcée qu'il introduit ouvre en réalité une brèche dans laquelle les plateformes vont s'engouffrer.
En quoi ce dispositif est-il bénéfique pour les chauffeurs ? Pour les recettes publiques ? En quoi permet-il de lutter contre la concurrence déloyale ? Les plateformes ont une autorité et un pouvoir d'organisation sur les travailleurs, sans responsabilités sociales. Désormais, elles pourront, comme aux États-Unis, s'abriter derrière des intermédiaires fictifs - tout le contraire de ce que prévoit la directive.
Il y a un choix à faire : les travailleurs ou les plateformes. Notre droit du travail doit être fidèle à l'esprit de justice sociale du droit européen !
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Je partage parfaitement votre avis sur les VTC, que cet article n'encadre, en effet, que de façon minime. En revanche, celui-ci n'est en rien contraire à la directive européenne, qui prévoit une présomption de relation de travail contractuelle. Il aurait mieux valu ne pas voter, en 2009, le texte ouvrant la voie aux VTC : nous n'en serions pas là. Pour des raisons techniques et juridiques, avis défavorable aux amendements.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre du travail et des solidarités. - En ce jour anniversaire du 13 novembre 2015, j'ai une pensée pour les victimes des attentats et leurs familles, ainsi que pour les forces de sécurité et les services d'urgence qui sont intervenus.
Le Gouvernement ne partage pas l'analyse des auteurs des amendements.
M. Olivier Jacquin. - Et la directive ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Au contraire, cet article responsabilise davantage les plateformes de mise en relation, soumises à des obligations de vérifications nouvelles. Si elles ne sont pas soumises aux obligations de vigilance des donneurs d'ordres, elles devront contrôler plus étroitement les activités des gestionnaires de flottes.
La transposition de la directive, qui couvre un champ beaucoup plus large, relèvera d'un autre véhicule législatif. L'article ne remet en aucun cas en cause la possibilité pour un chauffeur de faire reconnaître son statut de salarié par le juge.
Notre objectif est bien de lutter contre les gestionnaires de flotte et de protéger les travailleurs indépendants. Cet article est en réalité complémentaire de la directive. En outre, les accords s'appliqueront désormais aux chauffeurs rattachés. Avis défavorable.
M. Pascal Savoldelli. - Un petit point de vocabulaire : nous ne parlons pas de plateformes de mise en relation, mais de plateformes numériques de travail. Pour le ministre du travail, le mot « travail » a du sens.
Cet article est un cavalier législatif. En réalité, la pression économique des plateformes s'invite dans nos débats. Tout le monde sait que des sociétés fictives se mettront en place à la faveur de la brèche ouverte par cet article.
Le ministre a dit : les travailleurs qui veulent être reconnus comme salariés peuvent aller au tribunal. Mais le rôle du législateur est d'éviter qu'ils aient besoin de le faire pour faire valoir leurs droits !
Les plateformes sont les seuls acteurs économiques qui se soustraient à leurs responsabilités sociales et fiscales. Faisons front commun contre ces fraudes.
M. Olivier Jacquin. - L'enfer est pavé de bonnes intentions. De fait, cet article est nocif ; il est, je le répète, un véritable cheval de Troie.
Depuis 2018, la stratégie des plateformes et du Gouvernement est de tenter d'empêcher la requalification en salariés des « indépendants fictifs », pour reprendre l'expression de la Cour de cassation. C'est ainsi que le Gouvernement a combattu la directive Schmit. Aujourd'hui, on nous propose d'inscrire dans la loi que les plateformes ne sont pas donneuses d'ordres, alors que la Cour de justice de l'Union européenne a qualifié Uber d'« opérateur de transport ».
Pour Uber, le coup d'après sera le détournement des CAE afin de transformer les chauffeurs en salariés au rabais et de gagner encore plus de parts de marché.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Cet article n'existe que parce que vous ne voulez pas transposer la directive européenne. Uber, c'est le grand chantier de Macron... Pour faire valoir vos droits, dites-vous, allez donc devant le juge. C'est incroyable ! La directive européenne inverse la charge de la preuve en instaurant une présomption de salariat. Mais vous n'en voulez décidément pas ! Il faudra pourtant vous décider à l'appliquer.
Mme Marion Canalès. - Aujourd'hui même, un vote important est prévu au Parlement européen sur le devoir de vigilance, domaine dans lequel nous avons régressé à travers les textes Omnibus - avec, hélas, le soutien de la France.
Dans l'étude d'impact du projet de loi, on apprend que votre première piste était une charte d'engagements volontaires. Vous avez compris qu'il faut être plus offensif, mais le dispositif proposé n'est toujours pas à la hauteur. Entendez tous ceux qui vous disent qu'il faut aller plus loin !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Bien sûr, nous voulons transposer la directive ; une concertation avec les partenaires sociaux est en cours dans cette perspective, et nous irons au bout de ce travail. La directive marque de réelles avancées, notamment pour faciliter les procédures de reconnaissance devant le juge. Non, nous n'ouvrons pas de brèches : au contraire, nous en colmatons et construisons des digues.
Les amendements identiques nos64, 73 et 224 ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°55 rectifié sexies de M. Pellevat et alii.
Mme Corinne Bourcier. - J'ai à mon tour une pensée pour les victimes des attentats du 13 novembre et leurs familles.
Cet amendement vise à reconnaître pleinement le statut d'entrepreneur salarié associé au sein d'une CAE dans le cadre de la réglementation applicable aux exploitants de VTC. En particulier, la coopérative pourra, comme mandataire, enregistrer directement ses chauffeurs au registre des VTC, sous réserve de respecter des conditions prouvant son sérieux.
Le modèle des CAE dans le secteur des VTC n'est pas suffisamment protégé, ce qui ouvre la voie à des pratiques frauduleuses, notamment à travers les gestionnaires de flotte. Le protéger, c'est lutter plus efficacement contre la fraude.
Mme la présidente. - Amendement identique n°190 rectifié de Mme Havet et alii.
Mme Nadège Havet. - J'ai moi aussi une pensée pour les victimes du 13 novembre 2015 et leurs familles.
Cette explication vaudra également pour l'amendement n°191 rectifié.
La fraude dans le secteur des VTC coûte cher. L'article 8 prévoit une réponse importante, que nous proposons de renforcer encore en sécurisant le modèle alternatif des CAE, qui est à la fois une solution pour les chauffeurs et un outil de lutte contre la fraude. Il permet aux chauffeurs de concilier protection sociale, autonomie professionnelle et accompagnement administratif.
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Une coopérative, c'est un groupe de personnes qui s'unissent pour travailler dans un intérêt commun. Ici, il s'agit d'autoriser des intermédiaires supplémentaires, qui risquent d'être les relais de nouvelles fraudes.
M. Pascal Savoldelli. - C'est pour cela qu'il faut supprimer l'article !
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Nous ne sommes pas favorables à la mise en place d'une relation triangulaire. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - La dérogation proposée pour les CAE n'est pas nécessaire. Ce modèle est compatible avec le droit actuel, et de telles coopératives sont déjà inscrites au registre. Créer une exception pourrait ouvrir une brèche de contournement par les plateformes de leurs obligations, que l'article renforce. Les mêmes règles doivent s'appliquer à tous. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Olivier Jacquin. - Dès 2019, avec Monique Lubin, nous avons défendu le modèle coopératif comme alternative à la plateforme. Je pense à Maze, un cas intéressant et vertueux.
Je remercie le rapporteur Duffourg d'avoir ouvert l'ensemble de ses auditions. Au cours de l'une d'elles, un syndicat de taxis a mis en évidence les dérives liées au CAE pour réduire la part taxable des salaires et maintenir les travailleurs dans un statut au rabais - à travers, notamment, les indemnités kilométriques et les frais de repas. Pour Uber, la CAE, c'est le coup d'après !
L'amendement n°190 rectifié est retiré.
M. Pascal Savoldelli. - Les arguments qu'on nous oppose confirment que la suppression de l'article, que nous proposions, était la meilleure solution. Nous ouvrons des brèches, dans lesquelles certains s'engouffreront pour créer des sociétés fictives sans responsabilités fiscales ni sociales. Il y a donc, de votre côté, une petite contradiction à gérer - mais nous y sommes habitués...
M. Jacques Fernique. - Le ministre parle de colmater des brèches, mais il les élargit. Les CAE seront détournées, et la fraude continuera !
À la demande de la commission, l'amendement n°55 rectifié sexies est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°25 :
| Nombre de votants | 344 |
| Nombre de suffrages exprimés | 342 |
| Pour l'adoption | 103 |
| Contre | 239 |
L'amendement n°55 rectifié sexies n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°54 rectifié quinquies de M. Pellevat et alii.
Mme Corinne Bourcier. - M. Pellevat propose de sécuriser le modèle de la CAE, qui permet aux chauffeurs de disposer d'un contrat et d'une protection sociale. La rédaction actuelle de l'article le met en péril, en interdisant, indirectement, l'enregistrement d'une coopérative sur le registre des VTC.
Mme la présidente. - Amendement identique n°191 rectifié de Mme Havet et alii.
L'amendement identique n°191 rectifié est retiré.
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Je l'ai déjà dit, je ne suis pas favorable à cette organisation triangulaire entre une coopérative, des chauffeurs et la plateforme ; elle ne ferait qu'alimenter les fraudes sociales et fiscales. De plus, les salariés auraient un contrat de travail et un contrat d'entreprise, ce qui est assez paradoxal. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Même avis.
M. Olivier Jacquin. - Le principe de la CAE est intéressant, mais, monsieur le ministre, vous devrez être vigilants sur les coopératives qui ne manqueront pas de foisonner dans ce secteur. Là comme ailleurs, il faut renforcer les contrôles, en accordant à l'inspection du travail et à l'Urssaf les moyens nécessaires pour les mener.
Je le redis, je regrette que rien ne soit prévu pour les livreurs à vélo, au moment où s'ouvre le procès Frichti. La fraude est particulièrement développée dans ce secteur et L'Histoire de Souleymane illustre bien les conditions de travail sordides et l'esclavage par l'algorithme auxquels sont soumis certains livreurs.
À la demande de la commission, l'amendement n°54 rectifié quinquies est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°26 :
| Nombre de votants | 343 |
| Nombre de suffrages exprimés | 343 |
| Pour l'adoption | 103 |
| Contre | 240 |
L'amendement n°54 rectifié quinquies n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°133 de Mme Goulet.
Mme Nathalie Goulet. - Les dispositions de cet article consistant à demander des preuves négatives me laissent perplexe : personne ne dira jamais qu'il emploie des salariés non déclarés...
Cet amendement de précision vise à mieux lutter contre le blanchiment en exigeant la vérification des conditions d'achat du véhicule. De fait, il n'est pas rare de voir circuler de grosses cylindrées, disproportionnées par rapport aux moyens légaux de leur propriétaire.
Mme la présidente. - Veuillez poursuivre, pour votre amendement n°134.
Mme Nathalie Goulet. - Les vérifications rendues obligatoires doivent être régulières : c'est pourquoi je propose d'ajouter l'adverbe « périodiquement ».
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Je salue l'engagement de Mme Goulet en matière de lutte contre les fraudes fiscales et sociales, mais l'amendement n°133 n'est pas opportun : ces contrôles ne relèvent pas d'une société privée, mais de l'administration. En revanche, avis favorable à l'amendement n°134.
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées. - Avis défavorable également à l'amendement n°133 : ce n'est pas le rôle des plateformes de contrôler les conditions d'acquisition des véhicules.
Quant à l'amendement n°134, il n'est pas utile, un décret en Conseil d'État devant préciser les modalités de vérification. Retrait, sinon rejet.
M. Olivier Jacquin. - Nous voterons ces deux amendements pour renforcer la lutte contre la fraude. Merci à Mme Goulet, qui porte un regard vif et acéré sur ces sujets. Je regrette d'ailleurs le rejet, hier soir, de son amendement très judicieux relatif à la transmission de données en matière de TVA par les plateformes de services à la personne. L'ubérisation gagne dans de nombreux domaines, jusqu'à la santé : je pense à Mediflash, qui propose des infirmières autoentrepreneurs. Il faut plus de contrôles !
M. Jean-Luc Fichet. - Ces plateformes ne répondent de rien et ne sont même pas employeurs. Les chauffeurs, eux, sont souvent dans des situations de précarité et de vulnérabilité. Responsabilisons un tant soit peu les premières ! Elles ne peuvent plus continuer à se cacher derrière des algorithmes auxquels même les tribunaux n'ont pas accès.
M. Pascal Savoldelli. - Avançons en matière de vocabulaire... Je le redis, nous ne parlons pas de plateformes de mise en relation : ce sont des plateformes numériques de travail ! Le véhicule est bien un outil de travail : c'est pour cela qu'il doit faire l'objet de vérifications. Nous voterons ces amendements.
L'amendement n°133 est adopté, de même que l'amendement n°134.
Mme la présidente. - Amendement n°41 rectifié ter de Mme Antoine et alii.
Mme Jocelyne Antoine. - Nous voulons renforcer la lutte contre la fraude sociale liée la sous-déclaration des revenus des chauffeurs. Les techniques sont connues : indemnités kilométriques illégales, paniers repas exorbitants... Les plateformes, qui ont une vision globale de l'activité des chauffeurs, sont en mesure de détecter des incohérences.
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Là encore, il n'appartient pas à une entreprise de procéder à ces vérifications ; c'est le rôle de l'administration, des services de police et de l'Urssaf. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Le Gouvernement partage l'objectif de lutte contre la fraude sociale. Depuis la loi Grandguillaume de 2016, des obligations sont prévues, que l'article 8 de ce projet de loi renforce. Un décret en Conseil d'État précisera les vérifications incombant aux plateformes en fonction des informations disponibles. Avis défavorable.
M. Olivier Jacquin. - Madame Antoine, votre amendement mentionne des salaires. J'apprécie ce qui est peut-être un lapsus...
Mme Jocelyne Antoine. - Ce n'est pas un lapsus !
M. Olivier Jacquin. - Fort bien : vous anticipez donc la requalification prévue par la directive Schmit. Un syndicaliste m'a montré une annonce sur Leboncoin pour le recrutement de chauffeurs, qui précisait : pas de charges, mais maintien des aides. Voilà la dérive. Nous voterons cet amendement.
M. Jean-Luc Fichet. - Sur les chantiers, il existe une responsabilité des maîtres d'ouvrage donneurs d'ordre à l'égard des entreprises sous-traitantes, même de deuxième ou troisième rang. Nous sommes dans un cas de figure voisin : les plateformes, qui mettent en action des travailleurs, doivent avoir un minimum de responsabilités en matière de législation du travail. N'oublions pas qu'elles ont un pouvoir de sanction ! Un livreur considéré comme ne faisant pas bien son travail se voit de moins en moins sollicité.
Mme Nathalie Goulet. - Nous sommes un certain nombre à vouloir essayer de sortir du Far West. Peut-être ces amendements ne sont-ils pas toujours libellés précisément comme il faudrait, mais il reste que nous avons un énorme problème de blanchiment et de relations de travail. Des sociétés jetables se multiplient pour frauder l'Urssaf, des personnes sont esclavagisées et les plateformes bénéficient d'une immunité complète. Il faut que cela cesse.
L'amendement n°41 rectifié ter est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°74 de M. Fernique et alii.
M. Jacques Fernique. - Puisque cet article a un effet minime, comme il a été dit, tâchons de le muscler un peu. En complément des amendes prévues, l'administration doit pouvoir prononcer, à l'encontre d'une plateforme coupable de travail dissimulé, une interdiction temporaire, d'une durée pouvant atteindre un an, de contracter avec un nouvel exploitant. La fraude ne doit pas devenir un levier de développement fondé sur une concurrence déloyale !
On m'a opposé en commission que cette mesure porterait une atteinte excessive à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle. Je ne le pense pas, puisque les chauffeurs resteraient libres de contracter avec d'autres plateformes. Quant à celle ayant fraudé, elle subirait une sanction suffisamment forte pour cesser de franchir la ligne jaune.
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Je partage l'intention de sanctionner plus sévèrement les plateformes qui ne respectent pas leur devoir de vigilance en matière de travail dissimulé. La commission a d'ailleurs considérablement rehaussé le plafond de l'amende prévue par ce texte, de 150 000 à 3 millions d'euros par an.
Votre proposition comporte certaines fragilités : le délai envisagé est long et, en pratique, ce sont surtout les chauffeurs qui seraient sanctionnés.
Monsieur le ministre, il serait intéressant de compléter l'article en prévoyant la possibilité de suspendre temporairement une plateforme ne respectant pas son obligation de vigilance. Êtes-vous d'accord pour y travailler dans la suite de la navette ? Pour l'heure, avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Qu'il n'y ait pas de malentendu : notre objectif est bien de durcir la lutte contre la fraude - et aussi de mieux recouvrer les sommes dues.
L'article 8 prévoit une obligation de vigilance renforcée assortie de sanctions administratives et financières que nous estimons proportionnées. L'amende, que vous avez aggravée, peut désormais atteindre 3 millions d'euros, ce qui est dissuasif. La sanction complémentaire proposée pose un problème de proportionnalité, donc de sécurité juridique. En outre, des exploitants réguliers pourraient pâtir de cette interdiction, s'ils opèrent dans une zone où les plateformes sont peu nombreuses. Enfin, une interdiction de contracter serait, en pratique, difficile à faire appliquer.
C'est pour ces raisons, et non parce que nous serions laxistes, que nous estimons plus raisonnable d'émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. Olivier Jacquin. - On peut le déplorer, mais les VTC sont une réalité du monde des transports : il y a autant de chauffeurs de VTC que de taxis. À nous de préserver un équilibre complexe. Nous voterons cet amendement qui renforce le devoir de vigilance, création française de 2017 du député Dominique Potier. Il a été difficile de l'imposer en France, et il est difficile de l'imposer désormais en Europe, car le Parlement européen risque de le détricoter.
J'espère que la France choisira la responsabilité et non l'impunité.
M. Jacques Fernique. - J'entends les arguments de M. le ministre et l'avis défavorable du rapporteur d'un point de vue formel ; j'y vois d'ailleurs une invitation à ce que le Gouvernement agisse dans le sens de l'amendement.
Donnons le bon signal politique : un article 8 un peu musclé.
M. Pascal Savoldelli. - Nous voterons cet amendement. Le devoir de vigilance prévu dans l'amendement n'est pas contraire à l'objectif de l'article. Monsieur le ministre, souvenez-vous, en mars 2022, l'entreprise Deliveroo France a été condamnée à une amende de 375 000 euros pour travail dissimulé ; mais s'est ajoutée une autre condamnation : l'interdiction faite à ses deux dirigeants d'être patrons pendant deux ans.
Il y a bien eu une double lame ; c'était justice. Cet amendement va dans le droit fil d'une décision de justice. Ce serait mieux de l'inscrire dans la loi que de dire : allez devant le tribunal.
La preuve du pudding, c'est qu'on le mange !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Durcir l'article 8, cela nous va bien, monsieur le rapporteur.
À la demande de la commission, l'amendement n°74 est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°27 :
| Nombre de votants | 343 |
| Nombre de suffrages exprimés | 343 |
| Pour l'adoption | 116 |
| Contre | 227 |
L'amendement n°74 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°63 rectifié ter de M. Pillefer et alii.
Mme Jocelyne Antoine. - Nous souhaitons accélérer la mise en oeuvre des dispositions de l'article 8, pour une loi plus efficace et immédiatement applicable.
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Raccourcir le délai de mise en oeuvre de dix-huit à trois mois me semble difficile au vu du nombre important de chauffeurs. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Effectivement. On rêverait d'aller plus vite, mais nous avons besoin de ce délai de dix-huit mois. Si on peut aller plus vite, on le fera. Avis défavorable.
M. Olivier Jacquin. - Avec le rapporteur, j'ai assisté à l'audition des plateformes. Elles évoquaient un délai de six mois pour mettre en place les nouveaux statuts en se fondant sur une expérimentation d'Uber à Marseille. Dix-huit mois, c'est beaucoup, mais trois mois, c'est trop peu.
À la demande de la commission, l'amendement n°63 rectifié ter est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°28 :
| Nombre de votants | 343 |
| Nombre de suffrages exprimés | 309 |
| Pour l'adoption | 3 |
| Contre | 306 |
L'amendement n°63 rectifié ter n'est pas adopté.
L'amendement n°156 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°42 rectifié ter de Mme Antoine et alii.
Mme Jocelyne Antoine. - À ce jour, les services du ministère de l'économie et des finances ne disposent que du chiffre d'affaires global versé aux exploitants, sans détail chauffeur par chauffeur, ce qui interdit de vérifier les revenus de ces derniers. Grâce à la transmission du chiffre d'affaires individuel, nous pourrions traquer plus efficacement le travail dissimulé et les sous-déclarations.
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Premièrement, la directive européenne DAC7 sur les intermédiaires fait l'objet de discussions, pour définir un cadre européen coordonné ; évitons que la France ne surtranspose, ce qui mettrait à mal la compétitivité des acteurs domiciliés en France. Deuxièmement, l'administration fiscale collecte des informations selon des modalités définies au niveau européen.
Retrait sinon avis défavorable.
M. Olivier Jacquin. - Nous voterons cet amendement qui renforce la responsabilité des plateformes, à l'inverse de l'article 8, qui établit à tort qu'elles ne sont pas des donneurs d'ordres.
Mme Jocelyne Antoine. - Je maintiens l'amendement. Monsieur le ministre, j'entends vos arguments. Cela me chagrine que notre administration fiscale ne puisse pas contrôler finement, à cause de règles européennes. Cet amendement transcrit ce que nous voulons pour notre pays : coincer les fraudeurs. Ces plateformes, tentaculaires, font fi de notre droit, du droit européen. Même s'il est difficilement applicable, mon amendement est un voeu pour l'avenir.
L'amendement n°42 rectifié ter est adopté.
Mme Raymonde Poncet Monge. - (On s'impatiente sur de nombreuses travées.) Cet article ne fait que temporiser. Le mieux serait de transposer la directive européenne. Face au secteur le plus fraudogène, ce texte n'est pas à la hauteur. D'après Alternatives économiques, les microentreprises éludent entre 20 et 24 % des cotisations ; et pour le secteur de la livraison, c'est entre 50 et 70 % !
M. Olivier Jacquin. - Cet article contredit la directive Schmit. Ce débat a lieu pendant que le Parlement européen débat du devoir de vigilance. Je regrette, monsieur le ministre, que vous n'ayez pas eu un mot pour les livreurs à vélo, dont les représentants ont quitté hier la table de l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (Arpe).
Je me rends maintenant au tribunal pour l'audience de l'affaire Frichti, à la suite de mon signalement au titre de l'article 40 après la publication d'un article dans Libération. L'entreprise a été liquidée pour travail irrégulier et travail dissimulé. Nous continuerons à lutter.
L'article 8, modifié, est adopté.
Après l'article 8
Mme la présidente. - Amendement n°193 rectifié de Mmes Goulet et Antoine.
Mme Nathalie Goulet. - Depuis ce matin, nous tournons autour du pot. Je propose une solution radicale et parfaite (sourires) : assujettir les plateformes aux obligations de Tracfin. On aura réglé en une fois tous les problèmes de conformité et de lutte contre le blanchiment.
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Notre collègue conclut en beauté ce débat. (Sourires) Qu'en dit le Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - C'est une mesure forte. Vous avez raison d'être ambitieuse ! La fraude sociale est estimée à 13 milliards d'euros, le travail dissimulé jouant un rôle prépondérant. Je suis hésitant... Sagesse. (Mme Jocelyne Antoine applaudit.)
M. Alain Duffourg, rapporteur pour avis. - Sagesse, dès lors.
L'amendement n°193 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Les articles 9 et additionnels après 9 ont été précédemment examinés.
Article 10
Mme la présidente. - Amendement n°104 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'extension du droit de communication aux agents des CPAM doit être encadrée. Seuls les agents ayant reçu une délégation expresse doivent avoir accès à des données à caractère personnel. Nous maintenons ainsi la responsabilité des directeurs et directrices.
Cela permet d'assurer la traçabilité. La délégation explicite est aussi un outil de bonne administration. Enfin, elle garantit la confiance entre les organismes de sécurité sociale, les tiers et les citoyens, dans un bon équilibre entre lutte contre la fraude et respect des droits fondamentaux.
M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales. - Cet article desserre les conditions de communication, mais précise que les agents agissent sous la responsabilité du directeur. Avis défavorable à cet amendement trop restrictif.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Ce droit de communication est une prérogative de puissance publique, certes. L'article 10 prévoit de l'étendre à des agents des CPAM pour contrôler la complémentaire santé solidaire et renforcer la lutte contre la fraude. Vous considérez que cela pourrait porter atteinte à la vie privée. Sagesse.
L'amendement n°104 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°105 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - C'est une recommandation de la Défenseure des droits ; j'aimerais que ses avis soient un peu plus pris en compte dans cet hémicycle...
Les organismes bénéficiaires du droit de communication devraient informer les assurés de l'existence de ce droit, de la nature des informations et des tiers concernés. Cela renforcerait la transparence et la confiance.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Cette obligation nous semble disproportionnée et risquerait, en entraînant une multiplication des recours, d'invalider les procédures. Le code prévoit déjà que l'organisme informe l'assuré lorsqu'une procédure est lancée. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Les formulaires informent déjà des possibilités de contrôle et des sanctions encourues en cas de fausse déclaration. Une obligation d'information supplémentaire n'est pas nécessaire. Avis défavorable.
L'amendement n°105 n'est pas adopté.
L'article 10 est adopté.
Article 10 bis
Mme la présidente. - Amendement n°302 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales. - Nous renforçons les prérogatives de l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS).
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°302 est adopté.
L'article 10 bis, modifié, est adopté.
Article 10 ter
Mme la présidente. - Amendement n°289 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement rédactionnel n°289, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°290 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur - Renforçons les prérogatives du parquet général de la Cour des comptes.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°290 est adopté.
L'article 10 ter, modifié, est adopté
Après l'article 10 ter
Mme la présidente. - Amendement n°240 Mme Silvani et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - Depuis le covid, des milliards d'euros ont été versés au secteur privé de la santé. Il est temps de rendre des comptes. Imposons aux groupes privés de transmettre leurs comptes consolidés, pour savoir réellement où va l'argent de la sécurité sociale. Des groupes privés ferment des lits tout en rémunérant leurs actionnaires. C'est la surcompensation des profits réalisés sur le dos de la collectivité. Certains affichent des marges de plus de 10 %, alors que les hôpitaux et les soignants sont à bout.
Chaque euro doit servir à soigner et non pas à spéculer. Les profits seraient limités à 2 % du chiffre d'affaires et les surplus seraient réinvestis dans le secteur hospitalier.
L'État doit cesser d'être le guichet automatique du capital privé de la santé, pour redevenir le garant de l'intérêt général.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Je comprends l'objet, mais avis défavorable. Le législateur a déjà renforcé le contrôle de ces organismes.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Nous débattrons du financement des établissements de santé prochainement. La loi Bien vieillir renforce la moralisation : elle oblige à tenir une comptabilité analytique pour attester de l'utilisation des fonds publics - le décret va bientôt être publié. Avis défavorable.
L'amendement n°240 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°303 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Facilitons l'accès des agents de l'Urssaf au Système d'immatriculation des véhicules (SIV).
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Sagesse, car nous n'avons pas étudié la faisabilité de l'amendement avec le ministre de l'intérieur.
L'amendement n°303 est adopté et devient un article additionnel.
Article 11
Mme la présidente. - Amendement n°291 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet amendement précise le périmètre des agents pouvant recourir à une identité d'emprunt dans le cadre d'enquêtes relatives aux organismes de formation professionnelle.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°291 est adopté.
L'article 11, modifié, est adopté.
Après l'article 11
Mme la présidente. - Amendement n°210 rectifié ter de Mme Lermytte et alii.
Mme Marie-Claude Lermytte. - Les organismes amenés à gérer des fonds mutualisés de la formation professionnelle doivent pouvoir faire l'objet de contrôles.
Mme la présidente. - Amendement identique n°271 rectifié de M. Iacovelli et alii.
M. Xavier Iacovelli. - Défendu.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Le Sénat hésite quand il s'agit de renforcer les contrôles sur les instances paritaires. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Avis favorable. Aucun contrôle de l'État n'existe actuellement en la matière.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis favorable.
Les amendements identiques nos210 rectifié ter et 271 rectifié sont adoptés et deviennent un article additionnel.
Article 12
Mme la présidente. - Amendement n°292 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement rédactionnel n°292, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°202 rectifié de M. Canévet et alii.
Mme Nadia Sollogoub. - Défendu.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet amendement, qui vise à faire respecter le contradictoire, est bienvenu. Avis favorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Cet amendement est satisfait. Aussi, retrait sinon avis défavorable. Le respect du contradictoire, principe auquel nous sommes très attachés, est déjà prévu dans les différentes procédures applicables.
L'amendement n°202 rectifié est adopté.
L'article 12, modifié, est adopté.
Après l'article 12
Mme la présidente. - Amendement n°308 du Gouvernement.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Le Gouvernement partage les objectifs des amendements nos 62 rectifié, 79, 86 rectifié ter et 160 rectifié bis, qui se font l'écho des régimes spéciaux d'assurance maladie, comme celui de la RATP, pour qu'ils puissent prononcer les pénalités prévues par le code de la sécurité sociale. Toutefois, ces amendements ne sont pas applicables en l'état.
Mon amendement n°308 a été travaillé avec les caisses. Il permet d'inclure la Caisse d'assurance vieillesse invalidité et maladie des cultes (Cavimac). Je vous propose de retirer vos amendements à son profit.
Les amendements identiques nos62 rectifié, 79, et 86 rectifié ter sont retirés.
Mme la présidente. - Amendement identique n°160 rectifié bis de Mme Goulet et alii.
Mme Nathalie Goulet. - Ne peut-on pas le mettre en conformité avec celui du Gouvernement ? Nous aurions ainsi un avis favorable...
M. Olivier Henno, rapporteur. - La commission avait déjà prévu d'émettre un avis favorable à l'amendement du Gouvernement. Avis favorable à l'amendement de Mme Goulet, s'il lui est rendu identique.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Dès lors, avis favorable à l'amendement n°160 rectifié ter.
Les amendements identiques nos308 et 160 rectifié ter sont adoptés et deviennent un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°198 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Cet amendement sanctionne les employeurs coupables de fraude aux cotisations sociales via le recours aux entreprises éphémères. Le réseau de l'Urssaf est la première victime de la fraude, pour un montant de près de 7 milliards d'euros. Le niveau de recouvrement est très en deçà des détections : seuls 10 % des sommes non perçues au titre du travail dissimulé sont recouvertes.
Nous proposons de reprendre le dispositif, déjà adopté par le Sénat, visant les employeurs ne remplissant pas leurs obligations déclaratives, avec une sanction dissuasive à hauteur de 15 % du plafond mensuel de la sécurité sociale par salarié.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable. Non pas que le sujet des entreprises éphémères ne soit pas important, mais le dispositif contraindrait les entreprises à effectuer des déclarations supplémentaires. Établir la limite entre le contrôle et la suradministration est toujours difficile.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Nous partageons l'objectif, mais sommes réservés sur le dispositif, qui risque de ne pas être opérant. La présomption de fraude est une notion fragile juridiquement : la fraude ne se présume pas... En outre, l'amendement complexifierait les déclarations des entreprises.
Nous sommes au regret de devoir émettre un avis défavorable.
Mme Raymonde Poncet Monge. - J'entends vos arguments. Pas de présomption de la fraude, donc ; on juge sur les cas d'espèce. Je vous invite à appliquer ce principe lorsque nous examinerons les articles traitant de la fraude des assurés...
M. Jean-Luc Fichet. - Ce n'est pas de la suradministration : nous demandons simplement aux entreprises d'être en conformité avec la loi. Les enjeux sont importants.
Nous ne disposons pas d'assez de contrôleurs pour lutter contre la fraude fiscale. Or il s'agit de récupérer des milliards d'euros !
L'amendement n°198 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°109 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Nous soutenons la mesure prévue à l'article 12. Pour lutter contre la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), il faut suivre les recommandations du rapport de 2024 de la commission établie par l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale : renforçons l'arsenal de contrôle et de sanctions en permettant à la Cnam de sanctionner les non-déclarations d'AT-MP.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet objectif est déjà satisfait. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Même avis.
L'amendement n°109 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°250 rectifié du Gouvernement.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Il s'agit de renforcer la protection des agents affectés au contrôle et au recouvrement des cotisations sociales, en assurant leur anonymat via un numéro d'immatriculation administrative qui se substituerait à leur prénom et à leur nom. Certains agents de l'administration fiscale et des douanes disposent déjà de cette faculté, qui garantit leur sécurité et la sérénité de leur vie privée.
Mme la présidente. - Amendement n°270 rectifié de M. Iacovelli et alii.
M. Xavier Iacovelli. - Défendu.
Mme la présidente. - Sous-amendement n°304 de M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Nous élargissons cette faculté aux agents de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) et des Urssaf.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Avis favorable au sous-amendement n°304.
Le sous-amendement n°304 est adopté.
L'amendement n°250 rectifié, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n°270 rectifié n'a plus d'objet.
Mme la présidente. - Amendement n°107 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Les employeurs coupables de fraude peuvent bénéficier d'une attestation de paiement des cotisations par le simple fait de déposer un recours. C'est incroyable ! Cette attestation, qui permet de répondre à des appels d'offres ou d'obtenir des subventions, ne devrait leur être délivrée que lorsque les cotisations manquantes ont été effectivement payées. Je le répète : la fraude aux cotisations représente 56 % de la fraude sociale.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet amendement réduirait le droit de recours des employeurs concernés. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Nous partageons votre souhait de lutter contre la fraude sociale. Il convient toutefois de ne pas restreindre les droits de l'ensemble des cotisants en raison du comportement abusif d'une minorité.
Comme le prévoit le droit en vigueur, l'absence de délivrance de l'attestation doit être réservée aux cas les plus graves, c'est-à-dire le travail dissimulé. C'est le bon équilibre : avis défavorable.
M. Jean-Luc Fichet. - L'attestation est remise à une entreprise fragile. Quid de la loyauté envers le maître d'ouvrage ? Cet amendement clarifie les relations entre ces deux parties.
L'amendement n°107 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°153 rectifié quater de M. Rochette et alii.
M. Pierre Jean Rochette. - Nous proposons un contrôle régulier des arrêts de travail pour affections de longue durée (ALD) et des mi-temps thérapeutiques.
Mme la présidente. - Amendement n°152 rectifié quater de M. Rochette et alii.
M. Pierre Jean Rochette. - Défendu.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Nous préférons le ciblage, principe validé par les caisses qui opèrent ces contrôles. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Même avis.
M. Pierre Jean Rochette. - Des contrôles réguliers réduiraient certains abus ; des mi-temps thérapeutiques ne sont pas toujours justifiées. À la différence de beaucoup ici, j'émets tous les mois 200 fiches de paie ; or parmi ces salariés, il y a des situations qui ne leur sont pas favorables. Je pense à ceux souffrant de dépression : il serait préférable que certains reviennent au travail.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Un article du PLFSS répond à votre attente. Le dispositif que vous proposez est impraticable, car vous le systématisez pour tous les salariés.
M. Pierre Jean Rochette. - Pas impraticable ! Toutefois, je retire les amendements ; nous aurons le débat lors du PLFSS.
Les amendements nos153 rectifié quater et 152 rectifié quater sont retirés.
Mme la présidente. - Amendement n°249 du Gouvernement.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - La loi Travail et dialogue social de 2016 prévoit le partage d'informations entre les financeurs de la formation professionnelle. La plateforme Agora facilite l'exploitation des données entre les acteurs de la formation professionnelle. Nous proposons, conformément à une recommandation de l'Igas, un dispositif permettant d'identifier les fraudeurs agissant au détriment des collectivités, de France Travail ou de la Caisse des dépôts et consignations. Cela ne se limite pas au compte personnel de formation (CPF).
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis favorable.
L'amendement n°249 est adopté et devient un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°108 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Nous soutenons la mesure prévue à l'alinéa 13 de l'article 12. Nous transposons les recommandations du rapport sur la sous-déclaration des AT-MP et demandons un rapport évaluant les procédures déclaratives des AT-MP pour réduire le nombre de dossiers incomplets.
Tous les trois ans, la commission que j'ai évoquée tout à l'heure formule des recommandations dont aucune n'est suivie. La lutte contre la sous-déclaration dans la branche AT-MP souffre d'un manque de volonté.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable, conformément à la position constante du Sénat sur les demandes de rapport.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Nous partageons votre préoccupation, comme l'illustrent les dispositions de l'article 12.
La branche AT-MP s'est engagée à mieux accompagner les victimes, notamment les plus fragiles.
Vous soulignez que la commission ad hoc a recommandé de lancer des travaux sur les procédures ; ceux-ci sont en cours. Avis défavorable.
L'amendement n°108 n'est pas adopté.
Article 13
Mme la présidente. - Amendement n°121 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Avec cet article, les indemnités des travailleurs privés d'emploi devraient être versées obligatoirement sur des comptes bancaires domiciliés en France ; d'après la Défenseure des droits, c'est une dérogation au principe de prohibition des discriminations sur le fondement de la domiciliation bancaire en matière de protection sociale.
Refuser de verser une prestation sur un compte bancaire en raison de sa domiciliation ne semble pas nécessaire. En effet, l'organisme peut vérifier la condition de résidence en France par d'autres moyens. Les garanties de sécurité assorties à l'Iban de chaque compte en banque sont identiques, que la banque soit domiciliée au sein ou en dehors de la zone Sepa (espace unique de paiement en euros).
La Défenseure des droits recommande la suppression de cet article.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Nous sommes favorables à l'article 13, qui est une demande de France Travail. Avis défavorable à cet amendement de suppression, donc.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - L'obligation introduite par l'article 13 de verser les prestations sur un compte domicilié dans l'Union européenne n'est pas discriminatoire ; elle participe de la lutte contre la fraude. Les opérateurs sont susceptibles de rencontrer des difficultés pour récupérer les indus avec des comptes situés hors Union européenne. Au demeurant, rien n'empêche les bénéficiaires d'avoir un deuxième compte.
L'article se contente de transposer des dispositions existant déjà dans le domaine social au profit de France Travail. Avis défavorable.
L'amendement n°121 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°241 rectifié de Mme Silvani et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - Cet article 13 est une vraie mesure de stigmatisation malgré son apparence technique. Il est inutile : aucune étude ne permet de croire qu'une domiciliation bancaire hors de France serait une présomption de fraude...Nous aurions d'un côté une assignation à résidence pour les chômeurs, et de l'autre une liberté de délocalisation pour les plus riches. (Mme Pascale Gruny proteste.)
Plus de 99 % des allocataires reçoivent leurs indemnités sur un compte en France ou dans l'Union européenne : vous créez un dispositif pour un problème qui n'existe pas ! En outre, cela pénaliserait les transfrontaliers, les saisonniers et les précaires et cela créerait une charge administrative inutile pour France Travail et les banques, sans effet tangible sur les fraudes.
En réalité, cet article cherche un symbole au détriment des droits. Il transforme la lutte contre la fraude en lutte contre les chômeurs. Supprimons ces dispositions.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable à cet amendement, qui, pour ainsi dire, est de repli.
Tous les demandeurs d'emploi qui perçoivent une allocation chômage doivent être domiciliés en France.
Mme Silvana Silvani. - Ce n'est pas la même chose !
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Ce n'est pas la loi qui a mis en place cette règle, mais les partenaires sociaux !
Mme Silvana Silvani. - C'est un abus de langage !
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Nous ne faisons que renforcer cette règle.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Avis défavorable.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Bien sûr, il faut être domicilié en France. Vous dites qu'un tel compte est un indice...
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Un !
Mme Raymonde Poncet Monge. - Dans quelle étude ? Monsieur le ministre, vous dites que France Travail a été en mesure de vous dire que des cas de cet ordre ont été constatés dans le passé. Je crois que c'est plutôt un indice fantasmé.
La fraude à France Travail, c'est déjà peanuts ! Là, c'est epsilon d'epsilon ! (M. Daniel Fargeot s'impatiente.)
Mme Silvana Silvani. - C'est un abus de langage, madame la rapporteure. On ne parle pas de domiciliation, mais du compte bancaire. Ce sont deux choses différentes. Les allocataires sont bien domiciliés en France.
Vous évoquez des faits avérés. Mais lorsque nous avons introduit hier les travaux, tout le monde a convenu que nous avions très peu de données tangibles et communes - les amendements réclamant des rapports pour les obtenir ont été malheureusement rejetés.
M. Pascal Savoldelli. - Je soutiens ces deux interventions. Il ne faut pas confondre domiciliation bancaire et personnelle. Mme Goulet ne me démentira pas : vous pouvez avoir un compte en France dans une banque qui a 143 filiales à l'étranger, y compris dans des paradis fiscaux. Vous introduisez un élément de suspicion sans étude d'impact. Cette mesure ne résout pas le problème, puisqu'il n'y en a pas !
Mme Nathalie Goulet. - Nous avons mis cinq ans, après un rapport que j'ai rédigé avec Carole Grandjean pour Édouard Philippe sur la fraude et le non-recours aux prestations sociales, pour établir que les prestations sociales soient versées sur des comptes en France ou dans l'espace économique européen, car nous avions constaté des flux vers des pays étrangers.
Les allocations chômage avaient été oubliées dans le dispositif : il s'agit simplement de rattraper un oubli ; nulle stigmatisation ici.
Au moment où des djihadistes partaient en Syrie et en Irak, François Rebsamen avait dû mettre le holà au versement de prestations sociales qui partaient bien plus loin.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Premièrement, nous complétons un dispositif qui existe déjà.
Deuxièmement, il est plus simple de procéder à un recouvrement forcé lorsque le compte est en Europe.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Nous sommes républicains ; il n'y a pas de discrimination.
Je n'ai pas le détail, mais France Travail évalue ces fraudes à 56 millions d'euros. Cela vaut la peine que nous nous y intéressions : les petits ruisseaux font les grandes rivières.
Je suis prêt à continuer à travailler avec vous sur la lutte contre la fraude.
L'amendement n°241 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°311 du Gouvernement.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Coordination avec l'amendement n°247.
L'amendement n°311, accepté par la commission, est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°76 rectifié bis de Mme Romagny et alii.
Mme Anne-Sophie Romagny. - Les organismes de formation ne reçoivent pas d'informations essentielles sur les inscriptions et les certifications. La Caisse des dépôts pourrait les leur transmettre, pour une meilleure sécurisation.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis favorable à cette correction.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Nous comprenons votre intention. Pour l'heure, seule la Caisse des dépôts et consignations est en mesure de contrôler et de sanctionner l'obligation de présentation à l'examen, prévue à l'article 13 du texte. Les organismes de formation peuvent déjà collecter ces informations directement auprès des stagiaires. Toutefois, sagesse.
L'amendement n°76 rectifié bis est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°110 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Nous nous opposons aux alinéas qui, en prévoyant un remboursement lors de l'absence à des examens, fragilisent le droit à la formation en dissuadant des personnes qui pourraient craindre de passer des examens, à la suite de parcours scolaires chaotiques.
En outre, la mesure les pénalisera financièrement alors qu'elles auront satisfait à l'obligation de présence.
Selon l'Observatoire sur la réussite en enseignement supérieur, l'anxiété de performance est souvent associée aux situations d'évaluation. Le salarié qui a suivi la formation ne peut être contraint à rembourser celle-ci.
Mme la présidente. - Amendement n°111 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Amendement de repli : une pénalité remplacerait le remboursement. Tous les titulaires de CPF ne sont pas égaux dans leur rapport aux évaluations. Les valeurs véhiculées dans une société de performance ne sont pas partagées. Les situations d'évaluation ont tendance à accroître les inégalités dues aux origines sociales et aux genres. La mesure prévue relève de la violence symbolique définie par Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron. (M. Olivier Rietmann et Mme Micheline Jacques montrent des signes d'impatience.)
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cette disposition relève pourtant du bon sens : elle tire les gens vers le haut. Cette obligation est un engagement auquel les bénéficiaires de la plateforme « Mon compte formation » doivent souscrire. Avis défavorable aux amendements nos110 et 111.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Même avis. L'objectif central du CPF est que chaque titulaire puisse, avec l'apport de la solidarité nationale, se former à de nouvelles compétences utiles sur le marché du travail.
Les formations éligibles au CPF sont celles qui mènent aux examens de certification professionnelle. La Caisse des dépôts a relevé un raffinement des comportements frauduleux et un sentiment d'impunité chez les titulaires de compte. C'est une mesure de responsabilisation, car les CPF sont financés par la solidarité nationale.
Mme Raymonde Poncet Monge. - (Marques d'ironie à droite) Un autre de mes amendements dans ce domaine a été jugé irrecevable.
Vous avez durci sensiblement les conditions de remboursement pour les salariés contraints à le faire. Si le salarié fait un recours motivé dans les quinze jours - comme si tous en étaient capables... - les frais de justice s'ajouteraient au coût de la formation. (Protestations à droite)
Or lorsque les entreprises déposent un recours, on continue de leur délivrer des attestations.
L'amendement n°110 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°111.
Mme la présidente. - Amendement n°248 rectifié du Gouvernement.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Le CPF permet à chaque actif, sans aucun tiers prescripteur, d'acquérir de nouvelles compétences. Celles-ci sont attestées par une certification enregistrée auprès de l'un des deux répertoires de France Compétences. Cette mesure réaffirme le principe du CPF.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis favorable à cette mesure de responsabilisation des stagiaires. La Caisse des dépôts nous a en effet signalé des fraudes, notamment des transferts de droits à des tiers...
L'amendement n°248 rectifié est adopté.
L'article 13, modifié, est adopté.
Commissions (Nominations)
Mme la présidente. - Des candidatures ont été publiées pour siéger au sein de la commission des affaires économiques et de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre règlement.
La séance est suspendue à 13 h 05.
Présidence de M. Didier Mandelli, vice-président
La séance reprend à 14 h 35.
Lutte contre les fraudes sociales et fiscales (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
Après l'article 13
M. le président. - Amendement n°211 rectifié ter de Mme Lermytte et alii.
Mme Marie-Claude Lermytte. - Cet amendement renforce l'efficacité du dispositif de recouvrement de cotisations indûment versées par la Caisse des dépôts en instituant une majoration de retard pour les organismes de formation. Les absences de remboursement imposent à la Caisse des dépôts de procéder à des mises en recouvrement forcé.
Cette majoration a deux objectifs : un objectif préventif, en décourageant les titulaires de CPF ou les organismes de se lancer dans des manoeuvres frauduleuses, et un objectif d'équité, en alignant le régime du CPF sur celui applicable à d'autres organismes publics.
M. le président. - Amendement identique n°273 rectifié bis de M. Iacovelli et alii.
L'amendement identique n°273 rectifié bis n'est pas défendu.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis favorable. Cette mesure responsabilisera les organismes de formation.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°211 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°212 rectifié ter de Mme Lermytte et alii.
Mme Marie-Claude Lermytte. - Le répertoire de gestion des carrières unique (RGCU) centralise les données sur les carrières. Cet amendement vise à étendre la consultation des données de carrière pour le contrôle des droits. C'est notamment utile pour les personnes qui approchent de la retraite ou qui l'ont prise avec décote, ces dernières pouvant encore mobiliser leurs droits.
M. le président. - Amendement identique n°272 rectifié de M. Iacovelli et alii.
L'amendement n°272 rectifié n'est pas défendu.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis favorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Ce nouvel outillage de la Caisse des dépôts est bienvenu. Avis favorable.
L'amendement n°212 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°186 rectifié bis de M. Fargeot et alii.
M. Daniel Fargeot. - Certaines prestations sociales exigent une résidence réelle et stable en France. Or les contrôles révèlent régulièrement des situations de résidence à l'étranger non déclarées, avec des indus parfois massifs.
Il faut des outils simples de contrôle. Nous proposons d'instaurer une obligation de preuve dématérialisée de résidence, dont la périodicité devra être définie. Cette mesure est proportionnée et sécurisée.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet amendement serait complexe à mettre en oeuvre. Des contrôles ciblés existent déjà. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Les vérifications de résidence sont nécessaires, mais présentent des difficultés, à moins d'instaurer une surveillance généralisée. Des vérifications sont mises en oeuvre périodiquement, par exemple par les CPAM. Le contrôle de la résidence existe déjà. De plus, la loi autorise la sécurité sociale à demander toute pièce justificative. L'amendement est donc satisfait. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Daniel Fargeot. - Les organismes gèrent déjà des millions de démarches dématérialisées, je ne vois rien d'insurmontable. D'autres pays le font sans difficulté. C'est la fraude qui mine la solidarité. (Mme Raymonde Poncet Monge s'exclame.)
Mme Nathalie Goulet. - Des dispositifs prévoient le contrôle périodique des conditions de résidence. Monsieur le ministre, vous avez raté mon excellente intervention en discussion générale (sourires) : selon l'Igas, 2,4 millions de personnes bénéficient de prestations sans répondre aux conditions de résidence.
Ce qu'il faudrait savoir, c'est combien il y a de contrôles effectifs.
Commençons par appliquer ce qui existe.
L'amendement n°186 rectifié bis n'est pas adopté.
L'article 13 bis est adopté.
L'article 13 ter est adopté.
Article 14
M. le président. - Amendement n°127 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Supprimons la mesure décidée en commission des affaires sociales, qui vise à étendre à l'ensemble des aides et prestations versées sous condition de ressources le principe selon lequel les revenus illicites doivent être pris en compte dans le calcul de l'aide par l'organisme versant.
C'est déjà possible. Dans ces conditions, quel est le sens de cet amendement ? Nous devons préserver le pouvoir d'interprétation des administrations. Évitons des lois bavardes, redondantes ou idéologiques.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable. Actuellement, cette mesure pourrait être imposée par une circulaire. Nous avons inscrit ces dispositions dans la loi, précisément parce qu'elles ne sont pas appliquées. Ne laissons pas au procureur et aux caisses un tel pouvoir d'interprétation : c'est à la loi de cadrer les choses.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Depuis la loi de finances rectificative (LFR) de 2009, il est possible de taxer les revenus tirés d'activités illicites. Le code de la sécurité sociale prévoit déjà des échanges de données entre administrations. Des instructions de la Cnaf ont été diffusées. Avis défavorable.
Mme Nathalie Goulet. - Il faut absolument maintenir ces mesures issues du travail de la commission, qui visent à lutter contre la criminalité organisée et le narcotrafic. Qu'il n'y ait aucun doute sur la volonté du Gouvernement et du Parlement de juguler et taxer les revenus illicites !
Mme Raymonde Poncet Monge. - Je maintiens cet amendement. Il me semble qu'il s'agit en fait d'interdire tout pouvoir d'interprétation, lequel est pourtant servi à toutes les sauces quand on parle de fraude fiscale. Ces dispositions sont inutiles, supprimons-les.
L'amendement n°127 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°122 Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Selon la Défenseure des droits (marques d'impatience sur les travées du groupe Les Républicains), le dispositif de l'article 14 comporte deux risques. L'administration fiscale pourrait transmettre à France Travail des éléments qui ne seraient pas caractérisés comme illicites. Cela porterait atteinte au secret de l'instruction et aux droits des allocataires. Obtenons le réexamen de la situation du demandeur d'emploi en présence de nouveaux éléments, tels qu'un jugement pénal définitif.
La rédaction actuelle ne permet pas de déterminer si le bénéficiaire serait privé de toutes ses prestations chômage ou si le montant des allocations serait réduit à hauteur des revenus illicites constatés. Le droit de la défense doit être respecté, pour les assurés comme pour les entreprises. Précisons que le montant des allocations est réduit uniquement à hauteur des revenus illicites constatés.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable à cet amendement qui affaiblit la portée de l'article 14. Il nous faut des politiques claires ! Mieux on réprimera, mieux la République se portera.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Les mesures prévues par ce texte visent à lutter contre la fraude. Par cet article, France Travail pourra recouvrer des trop-perçus. Votre proposition peut s'entendre, mais par principe les décisions de justice s'imposent aux autorités administratives. Le cadre juridique actuel prévoit déjà des sanctions dans ce cas.
Avis défavorable.
L'amendement n°122 n'est pas adopté.
L'article 14 est adopté.
M. le président. - L'article 15 a été précédemment examiné.
Article 16
M. le président. - Amendement rédactionnel n°293 de Mme Puissat et M. Henno au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement rédactionnel n°293, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°247 rectifié du Gouvernement.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Cet amendement est rendu nécessaire par les travaux de déploiement du passeport de prévention. Le passeport réunit les certificats et diplômes délivrés. Il faut donc éviter toute rupture dans son alimentation et sanctionner les organismes responsables qui n'auront pas répondu à leurs obligations.
Il faut aussi l'élargir à l'ensemble des titulaires d'un CPF.
Enfin, pour que ce soit un outil de pilotage de la formation à la prévention, il faut en faciliter le partage entre l'employeur et le salarié.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis favorable.
L'amendement n°247 rectifié est adopté.
L'article 16, modifié, est adopté.
Après l'article 16
M. le président. - Amendement n°184 rectifié bis de M. Fargeot et alii.
M. Daniel Fargeot. - La fraude au CPF repose sur un mécanisme simple : des formations fictives qui disparaissent en cas de contrôle. Or les services de contrôle n'ont aucun moyen de réaliser des achats tests. Cet amendement autorise les agents à réaliser sous une identité d'emprunt les contrôles. Nous les mettons en capacité d'agir.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet amendement est satisfait par l'article 11. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Même avis.
M. Daniel Fargeot. - Soit, mais chaque euro volé au CPF c'est un euro en moins pour la formation !
L'amendement n°184 rectifié bis est retiré.
Article 16 bis
M. le président. - Amendement n°128 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Avec cet article, tout organisme de formation qui sollicite des fonds publics se voit assigner certaines obligations.
Un tel article ne trouve pas de place légitime dans un texte luttant contre la fraude : il dresse un cahier des charges que les organismes de formation doivent respecter, ce qui ne relève pas du domaine de la loi. Cet article aurait dû être jugé irrecevable au titre de l'article 45, bien plus que de nombreux amendements qui luttaient pourtant contre la fraude.
En outre, une partie des mesures est déjà satisfaite.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable, car nous avons introduit cet article, après plusieurs alertes venues d'agences de l'État, notamment concernant des formations censées être assurées par des médecins, alors qu'ils ne l'étaient pas...
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Votre demande me surprend, car cet article, en luttant contre l'emprise ou l'exercice illégal de la médecine, est au coeur de la lutte contre la fraude ! Cet article vient caractériser des pratiques qui alimentent le blanchiment d'argent.
Avis défavorable.
L'amendement n°128 n'est pas adopté.
L'article 16 bis est adopté, de même que l'article 16 ter.
Article 17
M. le président. - Amendement n°113 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Cet amendement, suggéré par l'Ordre des médecins, supprime une mise sous objectifs souvent perçue comme une qualification implicite de fraude, ce qui pose un problème de principe. L'Ordre rappelle que la relation médecin-patient repose sur la confiance. La mise sous objectifs contrevient à l'obligation du médecin de délivrer des soins adaptés. La responsabilité doit rester à la CPAM.
M. le président. - Amendement identique n°277 rectifié de M. Patient et alii.
L'amendement identique n°277 rectifié n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°173 rectifié de M. Sol et alii.
M. Alain Milon. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°222 de Mme Silvani et du groupe CRCE-K.
Mme Céline Brulin. - J'imagine que cet article voulait s'attaquer aux centres de santé privés qui prolifèrent sur fond de déserts médicaux, et dont certains d'entre eux fraudent.
Luttons contre ces cabinets peu recommandables, mais ne privons pas les médecins de leur liberté de prescription, qui est au coeur de leur métier. Or vous demandez aux médecins de devenir des agents comptables de la sécurité sociale... Les contrôles qui sont déjà opérés sont souvent non pertinents ; la typologie des patients n'est pas prise en compte. Ces alinéas, en introduisant un rapport de subordination administrative, mettent un coup assez rude à la relation de confiance - primordiale - entre le médecin et le patient.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Il ne s'agit en rien de remettre en cause la liberté de prescription ; sinon, la commission serait favorable à ces amendements. La proportionnalité des mesures que nous votons est essentielle, notamment en matière de fraude.
Dans cet article, nous prévoyons une mise sous objectifs, outil efficace et proportionné qui permet une réduction de 30 % des prescriptions, tout en respectant le contradictoire. Ce contradictoire fonctionne, puisqu'un tiers des procédures sont abandonnées après les observations du médecin.
La mise sous objectifs sanctionne non une faute, mais des pratiques objectivement surprescriptives, à savoir des prescriptions supérieures de deux tiers à la moyenne.
Depuis septembre 2025, le ciblage est le plus fin possible, prenant en compte les caractéristiques de la patientèle et l'offre de soins locale.
Cette mise sous objectifs n'a concerné que 0,4 % des médecins en 2024, lesquels sont suivis individuellement par un pair.
Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Les abus des professionnels de santé coûtent 2 milliards d'euros selon le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS), même si les professionnels concernés sont peu nombreux. Avis défavorable aux amendements de suppression.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'argument selon lequel les médecins diminuent les prescriptions de 30 % n'est pas valable. Au cours des auditions, nous avons appris que les médecins, face aux pénalités, se conforment aux objectifs, quitte à ne pas prendre en compte la spécificité de chaque situation. Face à une pathologie, il n'y a pas des médecins qui respectent des recommandations et d'autres qui surprescrivent. (Mme Stéphanie Rist le conteste.)
C'est à la CPAM de prendre ses responsabilités.
L'amendement n°173 rectifié est retiré.
L'amendement n°113 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°222.
M. le président. - Amendement n°96 de M. Fichet et du groupe SER.
M. Jean-Luc Fichet. - Cet alinéa, ajouté par la commission des affaires sociales, prévoit que les prescriptions d'un médecin sanctionné cesseraient d'être remboursées. Mais les patients n'y sont pour rien ! Cela pourrait provoquer des ruptures de soins dans des zones sous-dotées. N'oublions pas que 60 % des Français déclarent renoncer ou reporter des soins pour des raisons financières.
Il faudrait plutôt s'interroger sur le secteur 3...
M. Olivier Henno, rapporteur. - Le déremboursement est pourtant nécessaire, car il traduit la rupture de confiance entre l'assurance maladie et le professionnel. Cela n'aura pas d'effet sur l'accès aux soins puisque cela ne concerne que 70 médecins par an - c'est marginal.
Sans goût pour la polémique, j'observe que vous proposerez dans un prochain amendement d'étendre le déremboursement à tous les médecins déconventionnés : où est la logique ? (Mme Raymonde Poncet Monge proteste.)
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Nous aurons ce débat lors de l'examen du PLFSS. Sagesse.
M. Jean-Luc Fichet. - Distinguons les médecins déconventionnés après sanction des médecins non conventionnés. (Mme Raymonde Poncet-Monge renchérit.) Les patients ne sont pas au courant de la première situation, alors qu'ils n'ignorent pas la seconde.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Oui, choisir le secteur 3 ou être déconventionné, ce n'est pas la même chose. Mais doit-on continuer à rembourser les prescriptions d'un médecin dont la consultation est à peine remboursée ?
Mme Céline Brulin. - Nous voterons cet amendement. Cet article punira les patients parce que leur médecin a fraudé ; si nous appliquions le même principe pour tous les dispositifs déjà votés, cela vous ferait bizarre, croyez-moi...
Malheureusement, nous ne sommes pas dans une société idéale où chacun aurait accès à un médecin - six millions de Français n'ont pas de médecin traitant. Un patient pourrait donc n'être pas remboursé sans possibilité de choisir un autre médecin : c'est la double peine !
Vous parlez de proportionnalité des sanctions... On en est assez loin.
L'amendement n°96 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°130 rectifié bis de Mme Demas et alii.
Mme Marie-Do Aeschlimann. - Lorsque des structures sont fermées pour fraude, certains professionnels impliqués peuvent se reconventionner et poursuivre leur activité. Nous prévoyons que la CPAM puisse refuser temporairement le conventionnement afin de responsabiliser les professionnels.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Cet amendement est justifié et proportionnel. Avis favorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Je suis favorable à cette proposition issue du rapport Charges et produits de la Cnam.
L'amendement n°130 rectifié bis est adopté.
L'article 17, modifié, est adopté.
Après l'article 17
M. le président. - Amendement n°106 rectifié de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Selon le HCFiPS, 10 % des fraudes concernent des prestations indues et 56 % des cotisations sociales évitées.
La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024 permet de recouvrer la participation de l'assurance maladie au financement des cotisations du professionnel frauduleux, mais ce recouvrement est facultatif et peut n'être que partiel. Rendons-le obligatoire et intégral.
On nous objecte que le recouvrement est difficile. Mais on a bien prévu de recouvrer toutes les allocations au-delà du revenu de certains assurés fraudeurs et même doublé les amendes...
M. le président. - Amendement n°88 de M. Fichet et du groupe SER.
M. Jean-Luc Fichet. - Nous souhaitons rendre automatique l'annulation de la prise en charge par l'assurance maladie des cotisations sociales du professionnel de santé fraudeur.
Un professionnel de santé qui a bénéficié de la solidarité nationale trahit un double devoir : la probité professionnelle et la solidarité collective. Détourner les ressources de notre modèle social, patrimoine de ceux qui n'en ont pas, c'est s'attaquer à l'un de ses piliers.
M. Olivier Henno, rapporteur. - L'annulation totale ne nous convient pas : avis défavorable à l'amendement n°106 rectifié.
Avis favorable à l'amendement n°88 qui, en permettant une annulation partielle, respecte les principes de gradation et de personnalisation.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - L'automaticité ne respecte pas le principe de personnalisation : avis défavorable aux deux amendements.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Je retire l'amendement n°106 rectifié au profit de l'amendement n°88.
Je remarque tout de même que les arguments sont orthogonaux selon les publics visés. Quand c'est l'assuré, il faut de l'automaticité, quand c'est le professionnel, il faut personnaliser... Vous avez eu le tort de vouloir traiter les deux fraudes dans le même texte, comme si les équipes de Ligue 1 ou de Ligue 2 jouaient dans la même catégorie... Cela révèle votre partialité.
L'amendement n°106 rectifié est retiré.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Les infirmières sont également concernées par de telles fraudes.
L'amendement n°88 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°171 rectifié bis de M. Iacovelli et alii.
M. Xavier Iacovelli. - Ajoutons le respect des règles de prescription aux éléments contrôlés par l'assurance maladie. Sanctionnons les dérives constatées dans certains actes de télésanté. C'est un dispositif de bon sens et de justice.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Notre principe est de lutter contre toutes les fraudes, partout et tout le temps. Nous ne sommes pas plus indulgents envers certains. (Mme Raymonde Poncet Monge ironise.) C'est pourquoi nous sommes attentifs à l'application des principes de graduation et de proportionnalité - d'où notre avis défavorable à cet amendement, qui porte atteinte à la liberté de prescription des professionnels de santé.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Pour les mêmes raisons, retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°171 rectifié bis est retiré.
M. le président. - Amendement n°115 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Augmentons les sanctions pour la fraude aux cotisations patronales. Selon le HCFiPS, l'Urssaf est la première victime de la fraude sociale, à hauteur de 7 milliards d'euros. C'est une estimation basse, qui ne prend pas en compte les redressements comptables d'assiette, à hauteur de 4,6 milliards d'euros. Au total, le montant de cette fraude s'élèverait à près de 12 milliards d'euros.
Cet amendement, adopté l'an dernier à l'Assemblée nationale, n'avait curieusement pas été retenu par le gouvernement de Michel Barnier dans le PLFSS transmis au Sénat...
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - J'apprécie peu le ton de votre présentation. Nous sommes tous mobilisés pour lutter contre le travail dissimulé. Vous aviez déposé un premier amendement, proportionné, que nous avons adopté. Votre deuxième amendement, disproportionné, n'a pas été retenu. Vous auriez peut-être pu ne pas le redéposer, nous aurions gagné du temps. Avis défavorable.
Mme Laurence Rossignol. - C'est quoi ce mépris ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Avis défavorable.
Mme Raymonde Poncet Monge. - On n'est pas à l'école... Lors de la discussion générale, j'ai dit que j'avais été agréablement surprise que vous ayez retenu mon amendement de repli.
Sur les 12 milliards d'euros que j'évoquais, combien récupérons-nous ? Tout contrôleur rapporte plus qu'il ne coûte ; alors récupérons tous ceux dont le poste a été supprimé depuis dix ans.
Le travail dissimulé, souvent de façon partielle, dans le BTP ou dans la restauration, c'est toujours un pari gagnant ! L'amende doit donc être dissuasive.
Je ne suis pas une ingrate parce que je maintiens mon premier amendement !
L'amendement n°115 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°12 rectifié decies de Mme Goulet et alii.
Mme Nathalie Goulet. - C'est rafraîchissant d'avoir de nouveaux ministres au banc, cela m'évite d'avoir l'impression de radoter, vu que je fais les mêmes demandes depuis des années.
Je tiens à votre disposition des rapports de l'Igas et de la Cour des comptes qui montrent que l'écart entre le répertoire national interrégime des bénéficiaires de l'assurance maladie (RNIAM) et le recensement de la population par l'Insee s'élève à 2,5 millions d'assurés qui ne rempliraient plus les conditions d'activité et de résidence. L'Igas estime l'écart « aporétique »... Nous attendons des explications, d'où ma demande de rapport, pour en finir !
M. Olivier Henno, rapporteur. - Je m'en tiendrai à la doctrine du Sénat sur les demandes de rapport : avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Les bases de l'Insee et du RNIAM ne sont pas les mêmes, voilà l'explication. Elles n'ont ni les mêmes périmètres ni les mêmes critères d'entrée et de sortie. D'où des chiffres différents. On pourrait travailler à la mise en cohérence des deux bases.
Mme Nathalie Goulet. - Votre explication en vaut une autre. La carte Vitale d'un étranger qui voit son titre de séjour expirer et son contrat de travail prendre fin n'est pas désactivée... Nous en rediscuterons au PLFSS, j'ai l'habitude - je suis ici jusqu'en 2029. (Sourires)
M. Olivier Henno, rapporteur. - Voire plus !
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Un rapport ne réglera pas le problème. Je préconise plutôt un travail de l'assurance maladie sur les droits des assurés.
L'amendement n°12 rectifié decies n'est pas adopté.
L'article 17 bis est adopté.
Article 17 ter
M. le président. - Amendement n°98 de M. Fichet et du groupe SER.
Mme Marion Canalès. - Ici encore, la commission a considéré qu'il aurait été dommage de ne pas en remettre une petite couche sur la potentielle fraude des assurés... Or en 2024, quelque 800 pénalités ont été prononcées par la CPAM contre des offreurs de soins, pour un montant de 628 millions d'euros : les fraudeurs sont à 68 % des professionnels !
Supprimer le tiers payant est disproportionné : les fraudeurs ont déjà été condamnés et sanctionnés. C'est la double peine, avec de surcroît un risque de non-recours aux soins !
M. le président. - Amendement identique n°114 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Les dispositions ajoutées par la commission ne sont pas proportionnées. Vous sachant attachés au principe de gradation, je ne doute pas que vous voterez notre amendement... Cette sanction uniforme est manifestement excessive : pour une fraude d'un petit montant, on peut être privé du bénéfice du tiers payant pour une hospitalisation ou un traitement innovant onéreux.
La suspension du tiers payant est plus une mesure de trésorerie qu'une véritable sanction : l'assuré reste remboursé, mais a posteriori. Rien ne permet d'affirmer qu'une telle suspension serait dissuasive.
Et ce type de mesure de rétorsion n'existe pas pour les autres types de fraudes : on ne supprime pas temporairement les allègements aux entreprises redressées pour travail partiellement dissimulé !
M. Olivier Henno, rapporteur. - Un fraudeur est un fraudeur. La rupture de confiance induite par la fraude explique la suspension temporaire du tiers payant. C'est un frein à la récidive. Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Le tiers payant évite le renoncement aux soins. Sagesse.
Mme Marion Canalès. - Un fraudeur est un fraudeur, nous sommes d'accord. Mais les cabinets de conseil qui organisent la fraude fiscale n'ont pas de double ou de triple peine, eux !
Mme Raymonde Poncet Monge. - Allez jusqu'au bout de votre raisonnement, madame la ministre, en émettant un avis favorable. Cette mesure superfétatoire n'a pas lieu d'être. Le renoncement aux soins induit coûtera finalement plus cher à la sécurité sociale ! Croyez-vous vraiment que ce sera dissuasif ? Pensez-vous que les assurés suivent nos débats ?
Mme Laurence Rossignol. - Considérez-vous que priver un individu de soins est une sanction juste et compatible avec la déontologie des médecins, l'État de droit et notre conception des droits humains ? Oui ou non ?
M. Olivier Henno, rapporteur. - Avoir recours à une question fermée est une manoeuvre rhétorique bien connue... Il ne s'agit de priver personne de soins, mais de suspendre temporairement le tiers payant, car c'est dissuasif. Arrêtez les caricatures ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
M. Laurent Burgoa. - Bravo !
Mme Laurence Rossignol. - Quand on vote, c'est bien pour ou contre !
Les amendements identiques nos98 et 114 ne sont pas adoptés.
L'article 17 ter est adopté.
Après l'article 17 ter
M. le président. - Amendement n°38 rectifié quater de M. Menonville et alii.
Mme Nathalie Goulet. - Cet amendement suspend le tiers payant complémentaire pour les professionnels condamnés pour fraude.
M. le président. - Amendement identique n°91 rectifié de Mme Le Houerou et du groupe SER.
Mme Annie Le Houerou. - Permettons à l'assurance maladie de suspendre le tiers payant dès l'ouverture d'une enquête ou dès la notification d'un déconventionnement.
Le tiers payant est une avancée majeure pour le droit des personnes malades. Il évite le renoncement aux soins. Mais depuis quelques années, certains professionnels de santé ont détourné ce dispositif à leur profit, au détriment des patients les plus vulnérables. Près de 237 millions d'euros de fraudes sont le fait des professionnels de santé.
Le montant des fraudes aux prestations d'assurance maladie s'élèverait à 3,8 ou 4,5 milliards d'euros, soit plus du tiers du déficit de la branche. Cet amendement contribue à la protection de notre système de santé.
M. le président. - Amendement n°264 rectifié septies de Mme Aeschlimann et alii.
Mme Marie-Do Aeschlimann. - Alors que l'assurance maladie a la possibilité de déroger aux délais de remboursement en cas de contrôle pour fraude, les organismes complémentaires ne le peuvent pas. Corrigeons cette incohérence. L'amendement corrige aussi une erreur matérielle dans le code de la sécurité sociale.
M. le président. - Amendement n°274 rectifié septies de Mme Aeschlimann et alii.
Mme Marie-Do Aeschlimann. - Certains professionnels détournent le tiers payant à des fins frauduleuses. Le code de la sécurité sociale prévoit déjà la possibilité de suspendre le tiers payant pour un professionnel reconnu fraudeur, mais cela ne concerne que l'activité concernée, alors que le professionnel peut en avoir d'autres ? dans d'autres lieux, sous d'autres statuts. Avec cet amendement, l'ensemble des activités professionnelles seraient concernées.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements identiques nos38 rectifié quater et 91 rectifié qui ne respectent ni la présomption d'innocence des professionnels de santé ni leur droit au recours.
Avis favorable à l'amendement n°264 rectifié septies qui respecte le principe de proportionnalité et renforce la coordination entre l'assurance maladie et les organismes complémentaires dans la lutte contre la fraude.
Avis favorable également à l'amendement n°274 rectifié septies, qui renforce la capacité de l'assurance maladie à retarder temporairement le versement du tiers payant dans des situations à risque, tout en sécurisant juridiquement la faculté de dérogation.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Sagesse. Je comprends l'objectif, mais la mise en oeuvre des amendements semble complexe. L'expertise des acteurs concernés est souhaitable.
Les amendements identiques nos38 rectifié quater et 91 rectifié ne sont pas adoptés.
L'amendement n°264 rectifié septies est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n°274 rectifié septies est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°94 de Mme Le Houerou et du groupe SER.
Mme Annie Le Houerou. - Aligner le remboursement des ordonnances sur le conventionnement du prescripteur responsabiliserait ceux-ci et désinciterait à la prise de rendez-vous avec des médecins de secteur 3, dont les pratiques ne sont pas alignées avec les valeurs de notre système de sécurité sociale.
Le conventionnement garantit la qualité des prescriptions et du suivi. Les plus vulnérables ne doivent pas être victimes de ceux qui profitent du système.
La taxation accrue sur le secteur 2 Optam, prévue par le PLFSS, risque d'entraîner une fuite vers le secteur 2 hors Optam, voire vers le secteur 3, ce qui affaiblirait l'accès aux soins.
M. Olivier Henno, rapporteur. - Ne pas être conventionné n'est pas frauder ! Dérembourser l'ensemble des prescriptions émises par les médecins déconventionnés serait abusif. Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Sagesse.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Il faut distinguer le non-conventionnement - le secteur 3 - et le déconventionnement pour cause de fraude. Un médecin en secteur 3, non conventionné, prescrit ce qu'il veut : nous remboursons, sans aucun droit de regard.
Gare à ne pas favoriser une fuite des secteurs 1 et 2. Nous en reparlerons lors du PLFSS, ce n'est que partie remise.
L'amendement n°94 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°95 de Mme Le Houerou et du groupe SER.
Mme Annie Le Houerou. - Cet amendement renforce les moyens des services de contrôle médical pour qu'ils enrichissent leurs bases de données afin de mieux détecter les abus : mobilisation des informations des complémentaires, réduction des délais de décision et du volume des indus, harmonisation de l'évaluation médicale entre les payeurs.
M. Olivier Henno, rapporteur. - L'amendement me semble satisfait par l'article 5 sur les échanges d'information. Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis.
L'amendement n°95 n'est pas adopté.
M. le président. - Les articles 18 à 20 quater ont été précédemment examinés.
Article 21
M. le président. - Amendement n°46 rectifié bis de Mme Guillotin et alii.
M. Michel Masset. - Il s'agit d'étendre la procédure de flagrance sociale à l'ensemble des fraudes caractérisées, afin de sécuriser le recouvrement des indus par l'Urssaf. Les fraudes les plus coûteuses ne relèvent pas toujours du travail dissimulé, mais reposent sur des montages complexes : fausses déclarations, sociétés-écrans, etc.
La Cour des comptes évalue la fraude aux cotisations sociales à près de 8 milliards d'euros par an. Le temps que les agents de l'Urssaf puissent agir, les fonds fraudés ont déjà disparu !
M. le président. - Amendement n°286 de M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet amendement, travaillé avec le Gouvernement, joint les deux périmètres pour permettre à l'Urssaf de recouvrer les créances nées des remboursements d'exonérations perçues en cas de travail dissimulé.
Avis défavorable à l'amendement n°46 rectifié bis.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Retrait, sinon avis défavorable sur l'amendement n°46 rectifié bis, car l'article visé ne crée pas en lui-même de dette sociale. Avis favorable sur l'amendement n°286.
L'amendement n°46 rectifié bis n'est pas adopté.
L'amendement n°286 est adopté.
M. le président. - Amendement n°284 de M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet amendement fonde le recours sur la décision du directeur de l'organisme de procéder à des mesures conservatoires, et non sur le procès-verbal de flagrance.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Avis favorable. La décision du directeur fait grief au cotisant et doit donc faire l'objet d'un recours.
L'amendement n°284 est adopté.
M. le président. - Amendement n°285 de M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement de coordination n°285, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 21, modifié, est adopté.
Après l'article 21
M. le président. - Amendement n°135 de Mme Goulet.
Mme Nathalie Goulet. - Sur le sujet crucial de la fraude transfrontalière, nous attendons toujours le rapport, promis par Mme Bourguignon lorsqu'elle était ministre, faisant le point sur les conventions existantes avec nos voisins. Cet amendement prévoit, lui, une communication entre les organismes de sécurité sociale des États membres de l'Union européenne et de l'Espace économique européen.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Cet amendement est satisfait. Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Le système d'échange électronique d'informations sur la sécurité sociale permet aux institutions de sécurité sociale des États membres de communiquer entre elles en ligne pour instruire les dossiers, via une nouvelle interface publique de la Commission européenne. Sa mise en oeuvre opérationnelle se poursuit ; depuis octobre 2021, le service est étendu aux retraites. Votre amendement est donc satisfait.
Mme Nathalie Goulet. - Il n'est pas satisfait du tout ! Nos collègues transfrontaliers ne cessent de se plaindre de la fraude. Nous avons voté une proposition de résolution européenne sur le sujet !
J'y reviendrai lors du PLFSS. Nous avons besoin de savoir où en sont les conventions avec nos voisins.
L'amendement n°135 n'est pas adopté.
Article 22
M. le président. - Amendement n°39 rectifié ter de Mme Josende et alii.
Mme Florence Lassarade. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°125 rectifié ter de M. Brault et alii.
Mme Corinne Bourcier. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°163 rectifié de Grégory Blanc.
M. le président. - Amendement identique n°167 rectifié quater de Mme de Cidrac et alii.
M. le président. - Amendement identique n°176 de M. Longeot.
Les amendements identiques nos163 rectifié, 167 rectifié quater et 176 ne sont pas défendus.
M. le président. - Amendement identique n°189 rectifié bis de Mme Havet et alii.
M. Martin Lévrier. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°194 rectifié ter de M. Buis et alii.
M. Xavier Iacovelli. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°209 rectifié de M. Daubet et alii.
M. Michel Masset. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°218 rectifié ter M. Kern et alii.
Mme Nadia Sollogoub. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°181 rectifié bis de M. Fargeot et alii.
M. Daniel Fargeot. - Défendu.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Merci à nos collègues d'avoir été concis ! (Sourires) Ces amendements ont sans doute été travaillés avec le BTP local.
Premier constat : la dette sociale de l'Urssaf est de 7 milliards d'euros, or seuls 121 millions sont recouvrés en matière de travail illégal.
Deuxième constat : le recours à la sous-traitance en cascade se généralise - on l'a vu lors du déploiement du très haut débit, avec des conditions de travail assez rock'n'roll sur certains chantiers et des ouvriers, souvent étrangers, au statut incertain.
L'article 22 renforce la responsabilité du maître d'ouvrage, qui est en haut de la pyramide. Les amendements, eux, allègent le devoir de vigilance du donneur d'ordre, à l'échelon inférieur.
Si on allège ainsi la responsabilité du donneur d'ordre, on recouvrera encore moins !
Ces amendements suppriment également la périodicité des vérifications imposées aux maîtres d'ouvrage. Ce délai, défini par décret, est de six mois, ce qui n'est pourtant pas excessif - le directeur de l'Office central de lutte contre le travail illégal préconisait trois mois.
Avis défavorable à ces amendements qui sont contraires à l'objectif poursuivi par l'article.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Cet article nous fait avancer dans la solidarité financière. Maîtres d'ouvrage et donneurs d'ordre devront s'assurer que toute la chaîne de sous-traitance respecte la loi. Ils sont aussi responsables financièrement. En effet, certains sous-traitants recourent au travail dissimulé et disparaissent ensuite sans qu'on ait pu recouvrer les sommes dues.
Cet article a donné lieu à des débats nourris en commission, certains voulant durcir les termes, d'autres les alléger.
La solidarité financière doit s'appliquer au maître d'ouvrage, mais les donneurs d'ordre ont un lien contractuel plus fort avec les sous-traitants. Le maître d'ouvrage, c'est par exemple la collectivité territoriale qui lance un projet... C'est pourquoi nous limitons l'engagement de la responsabilité au cas où le maître d'ouvrage a méconnu son devoir de vigilance vis-à-vis des sous-traitants. Aller plus loin ferait peser sur eux une forte incertitude juridique.
Je vous proposerai au cours de la navette de revenir à l'équilibre initial, tout en conservant les ajouts de vos rapporteurs, que je salue.
Avis défavorable aux amendements nos39 rectifié ter et identiques qui videraient la mesure de sa substance en donnant un blanc-seing au donneur d'ordre et n'empêcheraient pas la disparition des entreprises visées. Avis défavorable également à l'amendement n°181 rectifié bis, qui supprime l'obligation de vérification périodique.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Je suis d'accord avec Mme la rapporteure. (Mme Frédérique Puissat s'en réjouit.) Revenir sur une obligation de vérification tous les six mois ? Franchement ! Les mêmes plaidaient pourtant pour que l'on contrôle les salariés en arrêt de travail tous les trois mois !
Ces amendements, que personne n'a défendus en séance, reprennent les desiderata de la Fédération française du bâtiment, secteur particulièrement fraudogène en matière de travail dissimulé. Accorder un blanc-seing pour une durée indéfinie n'est vraiment pas opportun.
Merci à la rapporteure de rappeler que moins de 200 millions d'euros sont recouvrés, sur 7 milliards d'euros de fraude. Cessons d'être aussi tolérants envers la fraude sociale !
M. Jean-Luc Fichet. - Nous sommes nombreux ici à avoir été maires : en tant que maîtres d'ouvrage, nous donnons mission aux donneurs d'ordre de vérifier le bon déroulement du chantier.
Quand on arrive à trois rangs de sous-traitance, cela devient franchement problématique. Pour répondre au travail dissimulé, commençons déjà par limiter la sous-traitance.
Les amendements nos189 rectifié bis et 194 rectifié sont retirés.
Les amendements identiques nos39 rectifié ter, 125 rectifié ter, 209 rectifié et 218 rectifié ter ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°181 rectifié bis.
M. le président. - Amendement n°203 rectifié de M. Canévet et alii.
Mme Nadia Sollogoub. - Le maître d'ouvrage n'exerce pas le même contrôle direct sur les sous-traitants et ne dispose pas de la même visibilité que le donneur d'ordre. Ne faisons pas peser sur lui les mêmes obligations que sur ce dernier.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - La commission a renforcé le devoir de vigilance imposé au maître d'ouvrage, sous deux conditions : que celui-ci ait méconnu son devoir de vigilance et qu'il y ait travail dissimulé. C'est une sanction d'équilibre. Entreprise du CAC 40 ou particulier, notre main n'a pas tremblé. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Sagesse. Je l'ai dit, il faudra sans doute y revenir au cours de la navette.
L'amendement n°203 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°90 de M. Fichet et du groupe SER.
M. Jean-Luc Fichet. - Un employeur fraudeur peut bénéficier d'une réduction de dix points du taux de majoration appliqué aux cotisations sociales redressées par l'Urssaf, à condition de régler dans les trente jours ou de présenter un plan d'échelonnement. C'est incompréhensible ! Le travail dissimulé est une atteinte directe au financement de notre protection sociale et à la concurrence loyale entre entreprises. Les fraudeurs ne méritent pas un traitement de faveur, ils doivent payer l'intégralité des majorations prévues !
La fraude aux cotisations coûte 7,5 milliards d'euros par an, dont seulement 829 millions sont récupérés. Chaque euro fraudé, c'est un euro de moins pour nos hôpitaux, nos retraites et la protection de nos concitoyens. Mettons fin à cette indulgence institutionnelle.
M. le président. - Amendement identique n°116 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Une entreprise fraudeuse doit payer l'intégralité des cotisations majorées, sans réduction, d'autant qu'elle peut présenter un plan d'échelonnement à l'Urssaf ; il n'y a donc pas de risque pour les salariés.
M. le président. - Amendement n°282 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Amendement rédactionnel.
Sur les amendements n°90 et 116, la réduction accordée est une mesure de recouvrement : quand vous réglez une amende immédiatement, vous payez moins cher. C'est le même principe. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Cette réduction est non pas un cadeau, mais une facilité pour favoriser le recouvrement effectif. Ce dernier est un enjeu primordial, sachant que 10 % seulement des sommes redressées au titre de la lutte contre le travail dissimulé sont recouvrées ! Il s'agit d'une mesure incitative, pour encourager le paiement rapide des sommes dues. Avis défavorable aux amendements n°90 et 116. Avis favorable à l'amendement n°282.
Mme Nathalie Goulet. - Nous venons de voter, dans la proposition de loi contre le blanchiment, des mesures de prévention concernant les entreprises éphémères, voire jetables, qui pratiquent la fraude à la TVA.
En Belgique, la Banque-Carrefour des Entreprises permet une détection précoce des fraudes à l'Urssaf et à la TVA. Inspirons-nous de ce système qui fonctionne très bien !
Mme Raymonde Poncet Monge. - Il s'agit de faciliter le recouvrement, dites-vous ? Avec 121 millions recouvrés sur 7 milliards d'euros de fraude, le système actuel ne marche manifestement pas ! Vous ne recouvrez quasiment rien ! Et vous faites cadeau aux fraudeurs de 10 % par-dessus le marché !
Les amendements identiques nos90 et 116 ne sont pas adoptés.
L'amendement n°282 est adopté.
M. le président. - Amendement n°287 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Nous reportons l'entrée en vigueur du présent article, initialement prévue au 1er janvier 2026.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°287 est adopté.
L'article n°22, modifié, est adopté.
L'article 22 bis est adopté.
Après l'article 22 bis
M. le président. - Amendement n°300 de M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Nous renforçons les moyens de la Mutualité sociale agricole (MSA) pour lutter contre la fraude.
M. le président. - Amendement identique n°305 du Gouvernement.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - C'est le même.
Les amendements identiques nos300 et 305 sont adoptés et deviennent un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°301 de M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - L'Office national antifraude (Onaf) doit pouvoir intervenir en matière d'escroquerie commise au préjudice d'un organisme de protection sociale.
M. le président. - Amendement identique n°307 du Gouvernement.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - C'est le même.
Les amendements identiques nos301 et 307 sont adoptés et deviennent un article additionnel.
M. le président. - L'article 23 et les articles additionnels avant et après l'article 23 ont été précédemment examinés.
Article 24
M. le président. - Amendement n°294 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement rédactionnel n°294, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 24, modifié, est adopté.
Article 24 bis
M. le président. - Amendement n°296 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Rédactionnel.
M. le président. - Amendement n°259 rectifié de M. Rambaud et alii.
M. Xavier Iacovelli. - Défendu.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°259 rectifié. Nous avons capé à deux ans la possibilité de cumuler le RSA avec le statut d'autoentrepreneur. Il faut faire rentrer tous les allocataires du RSA dans une logique de droits et de devoirs.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Avis défavorable aux amendements nos296 et 259 rectifié.
L'amendement n°259 rectifié est retiré.
L'amendement n°296 est adopté.
L'article 24 bis, modifié, est adopté.
Article 25
M. le président. - Amendement n°117 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'amendement consacre le principe de gratuité du recours reconnu au titulaire du CPF en cas de contrainte délivrée par la Caisse des dépôts, afin de renforcer la sécurité juridique tout en maintenant la possibilité de sanctionner les recours abusifs.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Il nous paraît cohérent de limiter la dispense de frais aux cas où l'opposition est jugée fondée. Dès lors qu'une personne engage une procédure, il n'est pas anormal qu'elle en assume les coûts. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Même avis.
L'amendement n°117 n'est pas adopté.
L'article 25 est adopté, de même que l'article 26.
Article 27
M. le président. - Amendement n°124 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Cet article permettrait à France Travail, en cas de manquement délibéré ou de manoeuvre frauduleuse, d'émettre des saisies administratives à tiers détenteur et de retenir la totalité des versements à venir d'assurance-chômage.
Le Conseil d'État a suggéré l'abandon de la seconde mesure, soulignant que le Gouvernement ne lui avait pas fourni d'informations permettant d'évaluer le nombre de cas concernés - peut-être le ministre le fera-t-il aujourd'hui ? - et le jugeant vraisemblablement marginal.
De manière convergente, la Défenseure des droits alerte sur le risque de priver certaines personnes du droit à bénéficier de moyens convenables d'existence. Rappelons que les retenues sont actuellement encadrées de manière stricte, en fonction des revenus du demandeur d'emploi et de la composition de sa famille, afin de lui assurer les moyens de subvenir à ses besoins essentiels.
Bref, on nous demande de légiférer pour des situations marginales et en risquant de priver certaines personnes d'un niveau de ressources minimal. Supprimons l'article !
M. le président. - Amendement identique n°239 rectifié de Mme Silvani et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - Défendu.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable. La commission tient à cet article. Il s'agit de renforcer les prérogatives de France Travail pour améliorer le taux de recouvrement des fraudes à l'assurance chômage - 84 millions d'euros au total. Je rappelle que ce dispositif ne vise que les manquements délibérés et manoeuvres frauduleuses.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - N'empêchons pas France Travail de disposer des moyens supplémentaires dont elle a besoin. Avis défavorable.
Il est exact que l'étude d'impact n'était pas complète au moment des premiers échanges avec le Conseil d'État. Désormais, un chiffrage est à votre disposition. Nous estimons à 20 % la hausse du taux de recouvrement qui résulterait de ce dispositif.
En ce qui concerne l'argument tiré de la privation du droit à bénéficier de moyens convenables d'existence, je rappelle que l'article ne prévoit la non-opposabilité d'une quotité insaisissable qu'en cas de fraude, sans remise en cause de cette protection dans tous les autres cas.
Les amendements identiques nos124 et 239 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°123 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - La Défenseure des droits - hélas peu entendue jusqu'à présent... - souligne que la notion de manoeuvres frauduleuses ne correspond à aucune qualification prévue par la réglementation de l'assurance chômage. Afin de garantir la sécurité juridique des demandeurs d'emploi, elle recommande de n'autoriser les saisies à tiers détenteur et la retenue intégrale des versements à venir qu'en cas de fraude. Il s'agit aussi de distinguer nettement d'une part les cas où l'intention de frauder est établie, et de l'autre d'éventuelles erreurs ou négligences. Enfin, il doit être possible, après une radiation pour fraude, de faire valoir des droits nouveaux ou d'anciens droits acquis de manière légitime.
M. le président. - Amendement n°47 rectifié bis de Mme Pantel et alii.
M. Michel Masset. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°295 de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Rédactionnel. Avis défavorable aux amendements nos123 et 47 rectifié bis.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Avis défavorable aux amendements nos123 et 47 rectifié bis, favorable à l'amendement n°295.
Les amendements nos123 et 47 rectifié bis ne sont pas adoptés.
L'amendement n°295 est adopté.
L'article 27, modifié, est adopté.
Après l'article 27
M. le président. - Amendement n°67 rectifié quater de Mme Lermytte et alii.
Mme Corinne Bourcier. - Une incertitude entoure la possibilité pour les organismes gestionnaires d'un régime spécial de recouvrer une pénalité par voie de contrainte. Sécurisons cette faculté afin de renforcer la lutte contre la fraude.
M. le président. - Amendement identique n°80 rectifié de M. Milon.
L'amendement identique n°80 rectifié n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement identique n°87 rectifié quater de Mme Sollogoub et alii.
Mme Pascale Gruny. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°161 rectifié ter de Mme Romagny et alii.
Mme Nathalie Goulet. - Défendu.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis favorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Les organismes gestionnaires d'un régime spécial peuvent déjà procéder par voie de contrainte en vertu de l'article 133-4 du code de la sécurité sociale. S'agissant en particulier de la caisse de la RATP, bien que non distincte de l'établissement public, elle dispose de la personnalité morale. Par ailleurs, l'amendement vise l'ensemble des prérogatives des organismes de sécurité sociale, qui ne concernent pas toutes les régimes spéciaux.
Les amendements identiques nos67 rectifié quater,87 rectifié quater et 161 rectifié ter sont adoptés et deviennent un article additionnel.
Article 28
M. le président. - Amendement n°100 de M. Fichet et du groupe SER.
M. Jean-Luc Fichet. - Nous partageons l'objectif de lutter contre la fraude avec fermeté et discernement, mais cet article, introduit en commission, prévoit des moyens inacceptables. Il s'agit d'autoriser France Travail à accéder à des données sensibles, comme le fichier des compagnies aériennes et les données de connexion des usagers. Cette mesure porte une atteinte grave à la vie privée et mène à une société de surveillance généralisée. La lutte contre la fraude ne peut se faire au prix du renoncement aux libertés individuelles et d'une suspicion permanente. De plus, les allocations pourraient être suspendues sur la base de simples indices sérieux : certaines personnes risqueraient donc d'être privées de ressources par erreur. Nous refusons cette logique de défiance à l'égard des chômeurs !
M. le président. - Amendement identique n°118 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Monsieur le ministre, vous avez dit refuser toute surveillance généralisée. Mais, avec des prérogatives aussi intrusives confiées à France Travail, nous y sommes ! Vous introduisez un soupçon systématique et portez atteinte à la vie privée comme à la liberté de circulation. Ces mesures manifestement excessives méconnaissent les exigences de nécessité et de proportionnalité fixées par le RGPD. Elles ouvrent la voie à des dérives incompatibles avec l'État de droit.
S'agissant du registre des Français établis hors de France, le ministre de l'Europe estime que seulement 70 % d'entre eux y sont inscrits, cette démarche n'étant pas obligatoire. Quant à la possibilité d'accéder aux données de connexion, elle dessine un dispositif de traçage numérique. Enfin, la possibilité de suspendre une allocation sur la base d'une simple présomption introduit une insécurité juridique inacceptable.
M. le président. - Amendement identique n°238 rectifié de Mme Silvani et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Je souscris aux arguments des deux précédents orateurs. Une surveillance systématique des IP des allocataires, vous rendez-vous compte ? Quel autre corps social accepterait cela ? Rendre la misère systématiquement suspecte, je ne crois pas que cela soit conforme à nos valeurs républicaines. Je m'avoue assez effaré. Avez-vous sollicité l'avis de la Cnil ? Cette surveillance généralisée sent des époques noires que je n'ai pas envie de revivre. (Murmures désapprobateurs à droite)
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Nous assumons d'avoir introduit cet article : la fraude à l'assurance chômage, c'est 136 millions d'euros, et la fraude à la condition de résidence en est le premier motif. Nous ne pouvons pas demander aux agences de recouvrer davantage sans leur en donner les moyens. France Travail s'est dotée d'un service de lutte contre la fraude ; les partenaires sociaux le lui ont d'ailleurs demandé dans la convention Unédic. Toutes les agences devraient faire de même. De même, les départements ont mis en place des cellules antifraude au RSA. Mais, pour contrôler, il faut des outils : c'est l'objet de cet article. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Le Gouvernement remercie la commission de soutenir son action contre la fraude. J'entends la discussion sur le caractère licite de l'accès aux données visées. Faute d'avoir eu le temps d'éclaircir ce débat, avis de sagesse.
M. Pascal Savoldelli. - La Cnil n'a donc pas été consultée.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Nous avons eu trois semaines !
M. Pascal Savoldelli. - Si vous voulez dire que cette loi est mal écrite et confuse, c'est certain !
Systématiser le relevé des IP, c'est aller vers le scoring social. La Chine, est-ce là votre modèle ? Vous pouvez sourire, mais je ne trouve pas cela drôle. Je n'ai pas envie, moi, de vivre dans une société panoptique, surtout avec des algorithmes dont les biais discriminants entraînent jusqu'à 5 % de marge d'erreur. Or aucune garantie d'un contrôle humain n'est prévue.
Nous refusons cette amorce de société liberticide. Ne vous étonnez pas que la défiance progresse !
Mme Nathalie Goulet. - J'ai demandé un rapport sur le RNIAM et la violation de la condition de résidence, y compris par les dizaines de milliers de personnes domiciliées chez une autre de façon abusive. Le code de la sécurité sociale prévoit déjà des mesures de contrôle de la résidence : combien de contrôles ont-ils été opérés ? Nous aimerions le savoir avant le PLFSS. Tant que cette évaluation n'est pas faite, ce n'est pas la peine de mettre en oeuvre des moyens aussi intrusifs.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'assurance chômage, c'est 34 milliards d'euros ; la fraude, 0,3 % des prestations. Cela vaut la peine de lutter contre, mais cela justifie-t-il une surveillance généralisée ? Certes, il faut des outils, mais tous les outils ne sont pas privatifs de libertés fondamentales. Vous connaissez les risques qui pèsent sur notre pays : vous offrez aux partisans d'une société illibérale les moyens d'organiser une surveillance dont nous savons qu'elle serait ciblée. Ne méprisez pas les avis du Conseil d'État et de la Défenseure des droits. France Travail demande-t-elle ces outils ? En tout cas, les organisations syndicales, cela m'étonnerait.
M. Marc Laménie. - En commission des finances, nous avons examiné ce matin la mission « Travail et emploi ». France Travail est un opérateur de première importance, avec 50 000 agents. Le montant total des fraudes s'élève à 136 millions d'euros, dont 56 millions de fraudes à la résidence. Les amendements déposés sont légitimes et font la richesse de notre débat, mais Les Indépendants suivront l'avis de la commission.
Les amendements identiques nos100, 118 et 238 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°297 rectifié de Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Amendement de sécurisation juridique.
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°297 rectifié est adopté.
L'article 28, modifié, est adopté.
Article 29
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Monsieur le président, je précise que le Gouvernement est favorable à l'amendement n°259 rectifié, à la lumière de l'analyse du cadre constitutionnel.
M. Laurent Somon. - Cet amendement a été retiré !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. - Je m'engage à tenir Mme la rapporteure Puissat informée de la suite de notre travail et à proposer des actions concertées avec l'ensemble des acteurs de l'accompagnement des bénéficiaires du RSA.
M. le président. - Amendement n°99 de M. Fichet et du groupe SER.
Mme Marion Canalès. - La commission entend permettre aux organismes de sécurité sociale de suspendre à titre conservatoire le versement de prestations en cas de doute sérieux de fraude. Le doute n'est donc pas en faveur de la personne concernée.
Oui, il faut combattre la fraude avec fermeté, mais aussi discernement. Nous dénonçons cette logique de suspicion généralisée, qui risque de fragiliser davantage encore certaines personnes en l'absence de fraude avérée.
M. le président. - Amendement identique n°119 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Monsieur le ministre, vous avez argué tout à l'heure que la présomption de fraude ne pouvait entraîner d'effets sur les entreprises ; appliquez ici le même principe ! Un doute étayé par des indices entraînerait une suspension des aides sociales... Cette mesure, aux effets disproportionnés, présente de surcroît un risque d'arbitraire.
Ce sont les ménages les plus précaires qui subiraient le plus les effets de cette disposition. Pendant la suspension, l'allocataire pourrait en effet se retrouver sans ressources. L'article introduit un pouvoir de suspension conservatoire sur la base d'indices et non de condamnations : c'est inédit.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable à ces amendements de suppression de l'article 29, introduit par la commission. Pour les cas les plus graves, les organismes de sécurité sociale pourront utiliser ce pouvoir de suspension à titre conservatoire, le temps de l'enquête. Le recouvrement s'en trouverait amélioré.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Avis favorable. Les possibilités de suspension à titre conservatoire existent déjà dans le droit positif des caisses de sécurité sociale.
Mme Marion Canalès. - Je fonde mon argumentation sur l'étude d'impact. Mais nous ne disposons d'aucune explication pour cet article introduit par la commission. Quels sont ces cas les plus graves ? Quel est leur nombre ? Qui est concerné ?
Mme Raymonde Poncet Monge. - Il s'agit bien d'une mesure préventive, conservatoire ! Mesurez-vous la portée de cet article ?
Je le répète : jamais les entreprises ne subissent une suspension de leurs exonérations de cotisations ou de subventions. (Mme Sophie Primas proteste.)
Les amendements identiques nos99 et 119 ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°298 de M. Henno et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement rédactionnel n°298 est adopté.
L'article 29, modifié, est adopté.
Après l'article 29
M. le président. - Amendement n°243 rectifié bis de Mme Silvani et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - Ce projet de loi privilégie une approche essentiellement punitive sans prendre en compte la bonne foi des allocataires, alors que la confusion entre erreur et fraude conduit à des suspensions injustifiées de prestations. Cet amendement réintroduit de l'humanité dans un système qui broie les plus vulnérables. Des erreurs de bonne foi sont sanctionnées de la même manière que les fraudes délibérées. Par peur des contrôles, un allocataire sur trois renonce à ses droits.
Les révélations sur les dérives des algorithmes de la CAF et l'essor du contrôle algorithmique de France Travail montrent que nous basculons dans une société de la défiance, dans laquelle la machine décide à la place à l'humain.
Rétablissons la présomption d'innocence, instaurons un droit à l'erreur et privilégions l'accompagnement avant la sanction.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - De nombreux dispositifs existent déjà pour accompagner les assurés. Votre amendement est satisfait. Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis.
L'amendement n°243 rectifié bis n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°172 rectifié de M. Sol et alii.
M. Laurent Somon. - Cet amendement précise le mode de notification des sommes réclamées et le délai de réponse dont dispose le mis en cause pour présenter ses observations.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - Avis défavorable, non pas sur le fond, mais parce que nous n'avons pas eu le temps d'expertiser ce sujet.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Sagesse. Le droit positif et la pratique des caisses ne s'en trouveraient pas modifiés.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. - À titre personnel, avis favorable, compte tenu de la position du Gouvernement.
L'amendement n°172 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
Intitulé du projet de loi
M. le président. - Amendement n°245 de Mme Silvani et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - En politique, les mots ont un sens. L'ordre donné aux différentes fraudes dans l'intitulé du projet de loi n'est pas anodin : il traduit une hiérarchie idéologique. D'abord, les fraudes sociales, ensuite les fraudes fiscales, alors que les volumes sont inverses - sans commune mesure.
Mon amendement visait à inverser ces termes, mais, compte tenu des débats, le titre actuel reflète finalement bien vos priorités ! Je retire donc mon amendement.
L'amendement n°245 est retiré.
Prochaine séance, mardi 18 novembre 2025, à 14 h 30.
La séance est levée à 17 h 25.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du mardi 18 novembre 2025
Séance publique
À 14 h 30
Présidence : M. Gérard Larcher, président, M. Didier Mandelli, vice-président, M. Alain Marc, vice-président
1. Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur le projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales (procédure accélérée) (texte de la commission, n°112, 2025-2026)
2. Débat sur la dette publique (demande des groupes Les Républicains et Union Centriste)