Projet de loi de finances pour 2026 (Suite)
Seconde partie (Suite)
Défense (Suite)
Examen des crédits de la mission (Suite)
Article 49 - État B (Suite)
Mme la présidente. - Amendement n°II-2049 de Mme Gréaume et M. Xowie et du groupe CRCE-K.
Mme Michelle Gréaume. - Défendu.
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. - Lorsque des travaux sont effectués, la dimension environnementale est prise en compte. Retrait.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Même avis, pour les mêmes raisons.
L'amendement n°II-2049 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-2327 de M. Temal et du groupe SER.
M. Rachid Temal. - Amendement d'appel pour renforcer la DRSD, qui protège les emprises militaires et les entreprises de notre BITD.
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. - Il n'est jamais bon d'aller chercher de l'argent sur l'équipement des forces.
M. Olivier Cigolotti. - Très bien !
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. - C'est toujours ce programme qui trinque : donc retrait. Mais sur le fond, j'aurais tellement aimé donner un avis favorable...
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Nous aurons un débat sur la DRSD, la DGSE, la direction du renseignement militaire (DRM). D'ici là, je vous invite à retirer l'amendement.
L'amendement n°II-2327 rectifié est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°II-1457 rectifié de M. Le Gleut et alii.
M. Ronan Le Gleut. - Il s'agit de faciliter les travaux de recherche de l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) sur l'IA, les drones, la cybersécurité, entre autres.
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. - Le budget de l'Inria relève du programme 172, mais rien n'interdit à cet opérateur de répondre à des appels d'offres du ministère des armées. Retrait.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Le ministère des armées sera ravi de travailler avec l'Inria, acteur majeur de la recherche. Retrait.
L'amendement n°II-1457 rectifié est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°II-2051 de Mme Gréaume et M. Xowie et du groupe CRCE-K.
Mme Michelle Gréaume. - La tolérance zéro contre les violences sexistes et sexuelles n'est pas négociable, quelle que soit l'institution. Je sais que les armées veulent progresser sur ce sujet.
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. - Oui, les armées progressent, sans qu'il soit besoin de modifier les imputations budgétaires. Retrait.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Quelques chiffres : en 2024, 400 signalements pour des faits de violences sexistes et sexuelles, contre 226 en 2023 ; 250 saisines du procureur au titre de l'article 40, contre 50 en 2023 ; 190 plaintes judiciaires par la victime, contre 104 en 2023 ; 70 suspensions contre 4 en 2023. Oui à la libération de la parole et à la vigilance de la ministre ! Mais ce n'est pas un enjeu budgétaire : retrait.
L'amendement n°II-2051 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-2050 de Mme Gréaume et M. Xowie et du groupe CRCE-K.
Mme Michelle Gréaume. - Défendu.
M. Dominique de Legge. - Même réponse que pour le précédent.
Mme Catherine Vautrin, ministre. - Nous déployons des formations à l'égalité professionnelle, ainsi qu'à la prévention des violences sexistes et sexuelles. Ce problème est inacceptable.
L'amendement n°II-2050 n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Défense » sont adoptés.
L'article 68 est adopté.
La séance est suspendue à 13 heures.
Présidence de M. Didier Mandelli, vice-président
Mise au point au sujet d'un vote
M. Laurent Burgoa. - Lors du scrutin public n°112, Elsa Schalck et Nadine Bellurot souhaitaient voter contre.
Acte en est donné.
Médias, livre et industries culturelles Compte spécial - Avances à l'audiovisuel public
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte spécial « Avances à l'audiovisuel public » du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial de la commission des finances . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Les crédits de la mission, de 707,6 millions d'euros en AE et 690,2 millions d'euros en CP, sont en diminution respectivement de 2,8 % et 4,1 % par rapport à 2025.
Une grande part de cette baisse est absorbée par le soutien aux 750 radios associatives locales, dotées en 2024 de 35 millions d'euros. La baisse prévue devait être encore plus sévère, mais par un prompt renfort, en arrivant au port, une quinzaine d'amendements ajoutent des crédits au fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER). Je ne préempte pas le débat à venir.
La moitié des crédits de la mission est fléchée vers le soutien à la presse écrite. Les aides à la presse diminuent de 6 %, notamment les aides à la modernisation, tandis que les aides à la distribution augmentent. Or il faudrait une remise à plat totale des aides, face à la transformation du secteur.
Fragilisée, Agence France-Presse (AFP), qui reçoit 143 millions d'euros, doit faire face à la transformation numérique et au développement de l'intelligence artificielle. Elle a engagé un plan d'économies pour 12 millions d'euros. Nous devrons être vigilants.
L'enveloppe dédiée à la Bibliothèque nationale de France (BNF) s'établit à 248,2 millions d'euros en CP. La BNF va devoir engager 500 à 600 millions d'euros pour rénover ses bâtiments vétustes - qui n'ont pourtant que 30 ans d'âge.
Le Centre national de la musique (CNM) subit une légère baisse de sa dotation, compensée par le dynamisme de deux taxes affectées, dont la taxe streaming qui dépasse son plafond et atteint 20 millions d'euros.
Le budget du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) évolue de manière incontrôlée : en dix ans, ses recettes ont bondi de 25 %, soit 168 millions d'euros supplémentaires. La dépense fiscale a augmenté de 275 % pour le crédit d'impôt audiovisuel et de 108 % pour le crédit d'impôt cinéma. Enfin, les dépenses du fonds de soutien devraient atteindre 810,3 millions en 2026, 16 % de plus qu'en 2019. L'inspection générale des finances a proposé des pistes de maîtrise des aides au cinéma. Aucune ne devrait prospérer dans l'immédiat, mais elles peuvent inspirer des réformes futures.
La loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public a pérennisé l'affectation d'une part de TVA aux sociétés d'audiovisuel public. Pour faire participer ces dernières à l'assainissement budgétaire, le Sénat avait adopté l'an dernier un amendement réduisant les crédits de 80 millions d'euros. En 2026, la baisse est de 70 millions d'euros. Le Sénat a validé cette économie en adoptant l'article 36 en première partie. France Télévisions supportera 65 de ces 70 millions d'euros.
Le récent rapport de la Cour des comptes sur France Télévisions est alarmant. La seule piste d'économies durables est celle d'une réforme globale. C'est un impératif pour que l'audiovisuel public puisse enfin faire face aux défis actuels.
La commission des finances propose d'adopter les crédits de la mission et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ». (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Roger Karoutchi, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Mireille Jouve applaudit également.) Levons le suspense : nous proposons l'adoption des crédits pour l'audiovisuel public extérieur.
J'exprime maintenant mon mécontentement. Si France Médias Monde récupère 8 à 9 millions d'euros supplémentaires par rapport à l'année dernière, TV5 Monde, en revanche, stagne à 84 millions d'euros.
Nous devons avoir des moyens pour lutter dans la guerre informationnelle qui nous est livrée. Or la France y consacre 400 millions d'euros, soit 10 % à 15 % de ce que met la Chine ! La Turquie ou la Russie font bien plus. Comment demander à l'audiovisuel public extérieur, avec ces montants, d'être présents en Afrique, en Asie, en Amérique latine ?
Je ne veux pas déshabiller France Télévisions de 1 ou 2 millions d'euros pour habiller France Médias Monde. Mais il faudrait peut-être quelques crédits des ministères de la défense ou des affaires étrangères.
France Médias Monde risque de devoir fermer son antenne en espagnol à Bogotá, TV5 Monde ne peut pas rénover son studio pour 10 millions d'euros... On demande à l'audiovisuel public extérieur de faire beaucoup, mais avec des moyens trop limités par rapport à ses compétiteurs. Je souhaite une vraie réforme de l'audiovisuel public extérieur, un regroupement, peut-être une étude sur les financements, afin qu'il reste puissant. J'ai dit aux deux présidentes de chaîne qu'un peu plus de contrôle déontologique ne nuirait pas, car il y a eu des dérapages. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Michel Laugier applaudit également.)
Mme Mireille Jouve, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères . - France Médias Monde est confrontée à un problème de financement de sa stratégie numérique : le programme 148 qui devait y contribuer est maintenu, mais sans crédits, alors qu'il faudrait 5 millions d'euros d'ici à 2028.
La suspension des crédits de l'audiovisuel public américain par l'administration Trump pourrait avoir des incidences sur une centaine de radios africaines, partenaires de RFI. En réponse, France Médias Monde et Deutsche Welle ont élaboré un bouclier informationnel, avec des programmes de substitution. France Médias Monde développe son hub à Bucarest pour diffuser en moldave, en arménien, en géorgien, en russe.
TV5 Monde a pour priorité une hyperdistribution ciblée et un renouvellement de ses programmes. Elle développe ses audiences en Afrique du Nord - le Maroc envisage une adhésion - mais le signal est coupé au Mali ou au Burkina Faso. Se pose la question de l'élargissement de sa gouvernance à plusieurs pays africains. À rebours, la Suisse cessera de contribuer à TV5 Monde en 2029, ce qui privera la chaîne de 8 millions d'euros, de 11 % des programmes de l'antenne et de 21 % des programmes de la plateforme. C'est un dangereux précédent.
En conclusion, le pire a été évité pour 2026 concernant l'audiovisuel public extérieur, mais toutes les garanties ne sont pas là. Je donne un avis favorable à l'adoption des crédits, mais un sursaut est indispensable.
M. Michel Laugier, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Cette année encore, les perspectives économiques de la presse sont sombres. En vingt ans, les recettes ont diminué de moitié côté vente et de deux tiers côté publicité. Le papier, rentable, se vend de moins en moins ; le numérique se développe, mais rapporte peu. L'information journalistique est concurrencée par des formes de communication numérique de plus en plus diverses et parfois par la désinformation.
C'est pourquoi les aides publiques sont indispensables. Dans ce PLF, elles baissent de 5,8 %. Leur ventilation favorise-t-elle l'adaptation de la presse à ce contexte hostile ? Partiellement seulement. Certes, une réforme de l'aide à la distribution est engagée, avec la fin de l'aide directe à France Messagerie et un contrat de modernisation de la distribution. Mais le fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) est amputé de 20 % - la commission défendra un amendement pour rétablir ses crédits.
L'AFP a perdu de nombreux financements, à la suite de la rupture brutale de contrats avec l'administration américaine et avec Meta. Elle engage donc un nouveau plan d'économies. Nous y serons attentifs.
Enfin, la presse doit affronter deux chantiers numériques : la négociation de nouveaux accords sur les droits voisins avec les plateformes, qui se présente mal vu la situation politique américaine ; l'IA, qui dépouille les éditeurs de presse de leurs contenus. Des avancées législatives seront nécessaires pour y remédier.
Enfin, la commission a déposé un amendement pour rétablir les crédits du FSER, car les radios associatives sont essentielles à la démocratie. Sous le bénéfice de ces observations, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits.
M. Jérémy Bacchi, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport . - Seulement 135 millions d'entrées en 2025, 16 % de moins qu'en 2024 : la fréquentation des cinémas est au plus bas depuis vingt-cinq ans. C'est peut-être un trou d'air, dû à l'absence de blockbuster hollywoodien ou de locomotive française, mais la tendance est aussi structurelle, entre basculement vers les plateformes et dépenses de loisirs prudentes.
Le CNC a réagi par une augmentation de 5 millions d'euros du soutien à l'exploitation, rendue possible par sa bonne santé financière. Mais la récurrence d'une ponction sur cet opérateur - 50 millions d'euros cette année - pourrait donner des arguments aux plateformes américaines soumises aux taxes affectées. Par ailleurs, l'amendement relatif à la taxe sur la publicité, adopté en première partie, diminuera les ressources du CNC dès 2026.
Nous nous félicitons que des amendements prolongeant le crédit d'impôt international aient été votés par le Sénat.
Le rachat partiel d'UGC par Canal+ est un signal positif, mais il ne faudrait pas que trop de concentration réduise la diversité.
La chronologie des médias est contestée devant le Conseil d'État par les Netflix et Amazon, qui veulent avancer leurs fenêtres d'exploitation à 12 mois. Espérons un compromis à ce sujet.
La formation des équipes de tournage sur les violences sexuelles et sexistes (VSS) conditionne désormais l'accès aux aides du CNC.
Enfin, le CNC a modifié le décret sur les services de médias audiovisuels à la demande (Smad) pour financer les films d'animation. Il faudra soutenir ce texte à Bruxelles qui prévoit un mécanisme vertueux de financement de la création audiovisuelle.
La commission émet un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissement sur les travées du groupe CRCE-K)
M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport . - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Les industries culturelles ont retrouvé leur chiffre d'affaires d'avant-crise, mais la situation est contrastée. La presse, le cinéma, la radio reculent ; la vidéo progresse fortement ; la musique enregistrée est portée par le streaming ; le jeu vidéo connaît un léger recul, mais la France reste très bien positionnée, notamment grâce à son crédit d'impôt.
La BNF est confrontée à la dégradation du site François Mitterrand. L'enveloppe des travaux indispensables a été chiffrée à 600 millions d'euros. Quel plan d'investissement est envisagé ? Pourra-t-on éviter la fermeture du site pour travaux avant 2030 ?
Six ans après sa création, le CNM a trouvé sa place. La dotation baisse de 26 à 20 millions, mais le plafond de deux taxes affectées est rehaussé de 8 millions. Nous nous en félicitons. Des réflexions sont-elles en cours sur l'extension du champ compétences de l'opérateur ?
L'IA générative préoccupe tout particulièrement le monde de l'édition. Les éditeurs ont formé un recours en justice contre Meta. Alors que plus de 200 000 livres ont été piratés, et que des milliers de faux livres, écrits par l'IA, sont vendus à vil prix sur des plateformes bien connues, ils réclament plus de transparence pour mieux exercer leurs droits. Nous serons vigilants.
Les crédits du programme 234 contribuent à l'effort de modération. Nous nous félicitons du déblocage de 7 millions d'euros pour la Maison du dessin de presse, dont l'ouverture est prévue pour 2027.
La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles ».
M. Cédric Vial, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Laure Darcos applaudit également.) C'est un moment de vérité pour notre audiovisuel public. Quelle place, quel rôle et quel avenir pour un service public à la croisée des chemins ? Dans une société traversée par les tensions, marquée par la rapidité de la circulation de l'information et parfois sa déformation, l'audiovisuel public offre un référentiel commun indispensable.
La Cour des comptes dénonce toutefois la fragilité du modèle économique de France Télévisions et la lenteur des transformations attendues. L'inspection générale des finances (IGF) plaidait déjà en 2014 pour une culture de l'efficience. Les crédits qui nous sont soumis traduisent un effort, avec une nouvelle baisse de 71 millions d'euros en 2026, après 78 millions en 2025.
Si l'audiovisuel public doit participer à l'effort, il ne peut plus subir de coupes imprévues en cours d'année. Ces crédits sont désormais définitifs, grâce à la loi organique que j'ai eu l'honneur de porter. C'est un progrès en termes de sécurité, de sincérité et de responsabilité.
Les économies doivent reposer sur des réformes structurelles et non les programmes. Or le plan d'économies de France Télévisions pèsera sur la création des programmes de flux.
Malraux disait : « la culture ne s'hérite pas, elle se conquiert ».
M. Laurent Lafon. - Bravo !
M. Cédric Vial, rapporteur pour avis. - Or ces programmes sont la raison d'être de l'audiovisuel public ! Ce n'est pas sur l'information et la culture que les efforts doivent porter. Des pistes existent : moderniser le cadre social, rapprocher France 3 et France Bleu, renforcer les synergies.
L'État doit retrouver la main, fixer un cap et définir un périmètre. La réforme de la gouvernance est annoncée depuis 2019 sans jamais aboutir. Faute de contrat d'objectifs et de moyens (COM), les entreprises avancent sans visibilité. Il faudra tôt ou tard redéfinir leurs priorités.
Paul Valéry le disait, le problème de notre temps ce n'est pas l'absence de solution, mais l'absence de direction. (On apprécie.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Que de citations !
M. Pierre-Alain Roiron. - Quel talent !
M. Cédric Vial, rapporteur pour avis. - L'audiovisuel public doit contribuer à l'effort national, en s'appuyant sur trois principes : vérité budgétaire, priorité aux réformes structurelles et retour d'une vision stratégique de l'État. Parce que ces crédits offrent de la visibilité tout en poussant les entreprises à se réformer, la commission émet un avis favorable à leur adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Bernard Fialaire . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Ce que recouvre cette mission, c'est la liberté d'expression, l'accès à l'information et la démocratisation de l'accès au savoir et à la culture. Or, pour la troisième année consécutive, ses crédits diminuent, de 3 % en AE et 4 % en CP.
Cela a des conséquences pour les acteurs, à commencer par les médias de proximité. Le FSER, déjà amputé de moitié l'an dernier, reste très loin de son niveau historique. Pourtant les radios associatives locales assurent des missions essentielles dans nos territoires ruraux, nos quartiers, nos outre-mer. Comment leur demander de se moderniser, d'assurer des emplois durables, si nous les privons durablement de moyens ? Le RDSE présentera un amendement rétablissant un niveau de crédits cohérent avec l'exécution 2024.
Le programme 180 recule de 6 %. La subvention à l'AFP progresse mécaniquement et les aides à la presse sont maintenues, mais les radios locales ainsi que les médias associatifs et éducatifs voient leurs marges d'action se réduire encore. L'État ne peut pas saluer leur rôle dans l'éducation aux médias et la lutte contre la désinformation tout en laissant s'éroder les outils qui les soutiennent.
J'appelle à un véritable code de déontologie des médias, avec un ordre des journalistes. On ne peut plus se contenter de comités d'éthique à géométrie variable - ni que l'essentiel de la presse nationale soit contrôlé par quelques grandes fortunes. Alors que le mastodonte Netflix absorbe le mastodonte Warner Bros, nous devons être vigilants sur l'effet de la concentration sur le pluralisme et la démocratie.
Le secteur de la presse écrite connaît un déclin structurel alarmant. La diffusion payante ne cesse de reculer.
Le programme 334 voit ses CP diminuer, mais ses AE augmenter en prévision des investissements immobiliers pour la BNF. Nous serons vigilants à la légère contraction de la subvention du CNL.
Le CNC conserve des moyens solides soutenus par des taxes affectées dynamiques.
Le CNM est plus fragile. La taxe sur le streaming musical rapporte moins que prévu, alors que les coûts explosent : inflation, soutien aux petites scènes, production d'événements. Il faut compter sur le relèvement du plafond des taxes et un meilleur rendement.
La ponction de 1,8 % sur l'audiovisuel public est essentiellement supportée par France Télévisions et le financement de la création. Je partage la nécessité de réformer l'audiovisuel public, sans le privatiser.
M. Laurent Lafon. - Bravo !
M. Bernard Fialaire. - La confiance n'exclut pas le contrôle.
Cette mission est l'armature de notre vie démocratique et culturelle. Face aux menaces de nouveaux empires, nous devons garantir un soutien à ce rempart. (Applaudissements sur les travées du RDSE)
M. Pierre-Antoine Levi . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Dans un pays qui se dit attaché à la culture et à la liberté de la presse, celles-ci peuvent-elles devenir des variables d'ajustement budgétaires ? Il ne s'agit pas ici de loisirs de privilégiés, mais d'industries qui maillent nos territoires : 15 500 bibliothèques, 2 000 salles de cinéma, plus de 100 000 emplois dans le cinéma.
Le prélèvement de 50 millions d'euros sur le CNC s'inscrit dans un effort collectif ; nous en prenons acte. Il ne doit pas être d'un montant supérieur, ou réitéré après 2026. Le président du CNC rappelle que son institution n'est pas une tirelire. La limite doit être respectée.
Avec 181 millions d'entrées en 2024, le cinéma français est un modèle envié, un secteur performant, un vecteur d'influence. Toutefois, la fréquentation 2025 est en baisse de 15 %. Nous produisons plus de 300 films par an, une diversité qui reflète la pluralité de notre société.
Face aux menaces sur cette richesse, nous avons fait adopter une prorogation du crédit d'impôt international jusqu'en 2028, une clause de sécurité juridique pour les projets en cours et un doublement du plafond du crédit d'impôt pour l'animation. Nous espérons leur maintien.
Mais d'autres menaces demeurent, pour les Sofica, pour la chronologie des médias, attaquée par les plateformes américaines, pour les 480 cinémas en régie municipale. Nos bibliothèques, premier réseau culturel, doivent être préservées. Le CNM voit sa subvention en partie remplacée par des taxes affectées : cela ne doit pas être prétexte à un désengagement de l'État. La presse, garante de notre démocratie, traverse une crise profonde, d'où l'importance vitale des aides publiques.
Le groupe de l'Union centriste refuse la logique purement comptable. L'accès à la culture et à l'information libre n'est pas un luxe, mais une condition de la cohésion sociale et de l'égalité républicaine.
Nous voterons ces crédits, par responsabilité, en étant attentifs à ce que les engagements soient tenus. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
M. Michel Laugier. - Bravo !
Mme Laure Darcos . - Cette mission a une résonance particulière. Les politiques qui en découlent ont des implications majeures sur l'accès à la culture et à l'information de nos concitoyens. Elles contribuent au pluralisme des idées et des oeuvres.
Or ces secteurs font face à d'importants bouleversements. Tous ont été impactés, par internet hier, par l'IA aujourd'hui.
Le programme « Livres et industries culturelles » voit ses crédits baisser par rapport à 2025. Le livre a besoin d'un réel accompagnement ; or la dotation du CNL baisse de plus de 4 millions d'euros dans ce budget. Il devra puiser dans son fonds de roulement.
La stabilité des moyens de la BNF est appréciable, mais ne permettra pas la rénovation du site François Mitterrand, très dégradé, et qui fait face à un mur d'investissement.
J'ai déposé un amendement, à l'instar de Sylvie Robert, visant à revaloriser la part État du droit de prêt, qui n'a pas évolué depuis vingt-deux ans, malgré l'inflation.
Amazon exonère de frais de livraison les commandes de livres récupérées dans les grandes surfaces. Cette pratique illégale met en difficulté nos librairies que la loi de 2021 avait voulu protéger.
Le secteur du cinéma est en perte de vitesse, avec une fréquentation décevante. Dans ce contexte, la ponction sur le CNC est une mauvaise manière. Heureusement, en première partie, nous avons reconduit le crédit d'impôt international, très performant, et évité un plafonnement des taxes affectées au CNC. Grâce à Cédric Vial, nous avons doublé le plafond du crédit d'impôt audiovisuel pour les films d'animation, ce qui confortera la compétitivité de nos studios.
Les aides à la presse diminuent de 5,8 %, soit 10,8 millions d'euros. Le FSDP doit être réabondé. Le soutien de l'État est déterminant pour les entreprises de presse, confrontées à l'érosion du lectorat, à l'assèchement des revenus publicitaires et à une distribution erratique.
Le montant des avances à l'audiovisuel public est également en baisse. France Télévisions portera l'essentiel de la diminution, malgré sa situation dégradée. L'audiovisuel public doit rester une valeur sûre. L'enjeu n'est plus seulement d'informer, mais de défendre la vérité dans un environnement saturé de contenus douteux. Si nous soutenons le pluralisme des médias, nous croyons par-dessus tout en la vertu pédagogique et la qualité de l'information diffusée.
L'audiovisuel public est aussi une force de frappe culturelle - séries de qualité, podcasts érudits, partage des savoirs, création. Il doit être correctement financé. France Télévisions a déjà supprimé 10 % de ses effectifs en quatre ans : les nouvelles coupes ne seront pas sans conséquence. Je le regrette.
Enfin, il nous faut redoubler de vigilance face au défi sans précédent de l'IA. À nous d'agir face au fléau du moissonnage des contenus culturels, qui privent les ayants droit d'une juste rémunération.
Le groupe Les Indépendants votera ces crédits. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains ; M. Michel Laugier applaudit également.)
M. Max Brisson . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La situation financière ramène chacun au sens des réalités. Nous sommes au bout du chemin. Pour sauver notre modèle, il nous faut repenser nos approches.
Les différents secteurs culturels doivent participer à l'effort, via des prélèvements sur certains opérateurs ou la baisse de l'enveloppe allouée à l'audiovisuel public.
L'audiovisuel public remplit des missions de diffusion culturelle, de lien social et d'accès à l'information dans nos territoires. Les apports à la promotion de la culture, à l'expression des territoires et à l'accès à l'information doivent être préservés. Nous n'y dérogerons pas.
Pour autant, les baisses de financement pour 2026, que nous soutenons, ne régleront pas les maux dont souffre notre modèle. Il faut s'intéresser aux missions et cahiers des charges des acteurs culturels. Le rabot n'a jamais constitué une politique. Nous devons questionner le fonctionnement et le coût de l'audiovisuel public, non le placer sous une cloche immunisante.
L'absence de COM 2024-2028 nous interroge. Comment expliquer qu'on dépense chaque année plus de 3,5 milliards d'euros en dotation sans aucune exigence de performance en retour ? Pour préserver notre audiovisuel public, nous devons d'abord redéfinir ses missions essentielles et son périmètre d'action, mettre en place une nouvelle organisation et évaluer les coûts, puis fixer un budget ajusté et justifié.
Il faut en finir avec un modèle qualifié de « non soutenable dans la durée » par la Cour des comptes. C'est la seule façon de renouer la confiance entre l'audiovisuel public et les citoyens.
Ce recentrage devra s'accompagner de réformes structurelles, pour plus de souplesse, d'efficacité et de compétitivité. Le Sénat y a déjà beaucoup travaillé, avec la proposition de loi Lafon créant une holding, dont nous attendons l'examen par l'Assemblée nationale. Nous attendons également la traduction des états généraux de l'information dans un projet de loi.
Nous voterons les crédits de cette mission, mais appelons à un changement de méthode. Nous sommes choqués par les propos de la présidente de France Télévisions, qui considère que tout doit continuer comme avant. Non ! C'est parce que nous apprécions l'audiovisuel public que nous voulons redéfinir ses missions et son périmètre : c'est le seul chemin pour assurer sa pérennité. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
M. Mikaele Kulimoetoke . - (M. Michel Laugier applaudit.) Cette mission a pour but de soutenir la presse et les médias dans leur diversité, de développer la culture et la création littéraire et de préserver des industries culturelles précieuses pour notre économie.
Avec 707,6 millions en AE et 626,2 millions en CP, la mission participe à l'effort national de maîtrise des déficits.
Les conclusions des états généraux de la lecture viennent d'être présentées. Alors que le temps de lecture des Français se réduit, il faut donner le goût du livre dès le plus jeune âge et favoriser l'accès aux bibliothèques, qui font partie de notre patrimoine. Nous partageons les inquiétudes du rapporteur sur le financement des travaux de la BNF.
Six ans après sa création, le CNM a su s'imposer. Pour 2026, les taxes affectées augmenteront de 8 millions d'euros : cela permet de maintenir ses crédits, malgré la baisse des dotations. Une réflexion doit néanmoins être menée pour répondre aux craintes.
La presse connaît une crise structurelle. Il faut renforcer son pluralisme, soutenir sa diffusion et l'accompagner dans sa mutation technologique. Avec 176 millions d'euros en CP, les aides à la presse représentent plus de la moitié des financements du programme 180. Les crédits de l'AFP progressent de 4,2 millions d'euros. Je salue également la création de la Maison du dessin de presse.
Le nombre d'amendements sur le FSER reflète les inquiétudes sur la survie des radios associatives locales - 600 dans l'Hexagone, 130 outre-mer - qui sont un espace de parole précieux dans nos territoires. Les coupes budgétaires représentent une réelle menace.
Les sociétés de l'audiovisuel public contribuent au redressement des finances publiques. Les économies demandées, de 71 millions d'euros, représentent un défi pour France Télévisions au regard de la dégradation de sa situation financière. Des coupes trop importantes nuiraient à la qualité de l'information et de la programmation. Cette situation souligne la nécessité d'engager une réforme d'ampleur, en poursuivant l'examen de la proposition de loi sur l'audiovisuel public.
En dépit de ces réserves, le RDPI votera les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Sylvie Robert . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La démocratie est en danger. La Ligue des droits de l'homme (LDH) évoque même une démocratie en décrochage. En 2025, la France a perdu quatre places dans le classement de Reporters sans frontières.
M. Olivier Paccaud. - Ce n'est pas non plus la Corée du Nord !
Mme Sylvie Robert. - Seuls 30 % des Français pensent qu'on peut avoir confiance dans ce que disent les médias.
M. Olivier Paccaud. - Et Élise Lucet...
Mme Sylvie Robert. - En revanche, ils sont 70 % à avoir une bonne image de l'audiovisuel public et 63 % à faire confiance aux médias locaux, pourtant les plus maltraités par ce budget ! Les crédits alloués au FSER sont divisés par deux, au risque de fragiliser les 750 stations qui maillent le territoire.
Le soutien aux médias locaux est mal calibré. Notre groupe proposera la création d'un fonds d'urgence temporaire pour les médias de proximité, afin de les aider à traverser la crise liée à la déperdition des recettes publicitaires. En cinq ans, entre 120 et 150 millions de recettes annuelles ont quitté l'écosystème et vingt-cinq titres de presse locale ont disparu. Le tour de France du Président de la République témoigne d'une prise de conscience, hélas tardive. Après les grandes déclarations, nous attendons des actes. Madame la ministre, à quand le projet de loi sur les états généraux de l'information ?
Quant au traitement réservé à l'audiovisuel public, il relève de l'acharnement : encore 70 millions d'euros de moins, après une baisse de 80 millions en 2025. Le décrochage par rapport au COM atteint 300 millions d'euros !
Que doit faire l'audiovisuel public pour mériter un minimum de considération de sa tutelle et de soutien budgétaire ? Réformer, entend-on. Je n'ai jamais été contre, mais comment se réformer quand on sabre vos ressources ? Avez-vous des arguments de fond ?
Les économies imposées cette année sont de trop. Jean-Raymond Hugonet l'a dit : ce sont les programmes de flux et la création audiovisuelle qui seront affectés. Derrière, ce sont des emplois. On enclenche un cercle vicieux ; France Télévisions va devoir revendre ses actifs, ses droits sportifs, alors que l'heure est à la bataille des contenus.
À l'heure de la désinformation et des ingérences étrangères, nous devrions nous retrouver pour investir dans l'audiovisuel public, plutôt que se laisser happer par des débats subsidiaires orchestrés par une l'extrême droite qui assume de vouloir détruire l'audiovisuel public.
Retrouvons de la concorde pour défendre ce rempart démocratique, comme nous y invite le règlement européen sur la liberté des médias, et donnons-lui les moyens continuer à produire des contenus diversifiés et une information de qualité. Il y va de notre souveraineté démocratique.
Le septième art est un puissant vecteur d'influence et de rayonnement. La France est le premier producteur en Europe et l'un des premiers pays représentés dans les festivals. Le soutien du CNC est aussi la condition d'une réussite artistique, culturelle, économique - j'ajouterai, géopolitique. Face à l'hégémonie des plateformes, à la vision américaine d'un effacement civilisationnel de l'Europe, soutenir le cinéma français et européen est un acte de résistance démocratique.
Ce modèle vertueux, qui fait de la diversité sa force, est confronté aux assauts de l'extrême droite. Certains appellent à la suppression du CNC, d'autres le voient comme une cassette dans laquelle piocher. Non ! Supprimer ou amputer le CNC serait un désarmement qui minerait notre souveraineté culturelle et nous interdirait de continuer à choisir librement les histoires qui nous font rêver. Veillons à ne pas déstabiliser sa fiscalité affectée ni accentuer les prélèvements sur sa trésorerie.
Le CNM aura subi une baisse de 10 millions d'euros en deux ans, alors que le rendement des taxes affectées a été plafonné. L'État n'a pas respecté le contrat, et le CNM risque de devoir rogner sur les aides transversales. Le principe de solidarité pourrait être remis en cause au détriment de certaines esthétiques. Nous défendrons un amendement pour revenir sur la restriction des crédits.
Le groupe SER s'opposera au budget de cette mission, en particulier pour ce qui est de l'audiovisuel public.
Au Royaume-Uni, votre homologue, Ian Murray, a sonné le tocsin pour sauver la BBC, attaquée par l'extrême droite de Nigel Farage. Quel dommage, madame la ministre, que vous n'ayez pas fait preuve du même volontarisme ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Jérémy Bacchi applaudit également.)
Mme Michelle Gréaume . - Les crédits de la mission actent un retrait méthodique de l'État qui transforme en profondeur l'écosystème de l'information, de la création et de la diffusion culturelles.
Ce budget est le vecteur d'une politique qui considère les médias, la culture et le livre non comme des biens communs, mais des secteurs soumis aux seuls impératifs de rentabilité et de concurrence.
Dans un contexte d'inflation, chaque euro en moins réduit la capacité d'action de l'audiovisuel public. La trajectoire pluriannuelle est éloquente : c'est une asphyxie budgétaire organisée. France Télévisions perd 65 millions, Radio France 4,1 millions, l'INA 1,43 million, France médias monde voit son budget gelé. Comment garantir la qualité, la diversité, la création et l'information quand on réduit les capacités de produire ? Premières victimes : le débat, la culture, l'éducation, la fiction, le documentaire, tout ce qui construit sur le temps long.
Depuis 2024, aucun COM n'a été signé, en violation de la loi de 1986. Les acteurs sont privés de visibilité. Cette instabilité fragilise l'audiovisuel public et ne respecte pas la loi européenne sur la liberté des médias.
Un service public sous-financé est vulnérable aux pressions politiques. Il faudrait développer les ressources propres ? France Télévisions externalise déjà des émissions d'information et de débat à des sociétés comme Mediawan, ou Banijay. Résultat : l'argent public finance des profits privés. L'austérité devient un outil de la privatisation.
Les aides à la presse baissent de 6 %, alors que les coûts de production explosent. Les titres les plus fragiles sont menacés. Dans un secteur dominé par cinq méga-acteurs, toute baisse de subvention renforce la dépendance et affaiblit le pluralisme.
Le FSER subit une baisse brutale. Des radios vont perdre 3 500 à 5 000 euros, soit entre 3 % et 5 % de leur budget ; l'expression locale et la diffusion des cultures minoritaires s'en ressentiront. Là encore, c'est renforcer la domination des groupes privés et appauvrir la diversité.
Enfin, le PLF 2026 diminue les dépenses fiscales qui financent le cinéma. En fragilisant la création indépendante, il substitue une logique commerciale à une logique d'intérêt général. Cela conduit à une triple dynamique : austérité, mise en concurrence, concentration.
Nous voterons contre ces crédits qui ouvrent la voie à une marchandisation de l'espace médiatique et artistique. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)
Mme Monique de Marco . - Sommes-nous tous drogués à l'urgence ? Celle-ci conduit à des erreurs d'analyse. La démocratie a besoin de temps pour fonctionner, et de médias pour nourrir l'esprit critique.
Le monde qui vient est un monde dominé par les médias d'opinion, où la presse indépendante est fragilisée, où les multinationales menacent les acteurs culturels, les librairies, les cinémas, les festivals.
Le secteur du livre se porte mal. Amazon cherche à contourner la taxe sur les frais de port. Récemment, TikTok a investi le secteur. Que restera-t-il à nos librairies ? Les auteurs demandent des garanties non amortissables et les éditeurs, une taxe sur les ventes de livres d'occasion. Madame la ministre, à quand un projet de loi ?
Lors de votre première intervention sur France Inter après votre nomination, vous manifestiez votre attachement au service public. Il n'a jamais été aussi fragilisé : où sont les preuves d'amour ?
Au lieu de cela, nous avons perdu des heures à débattre de la création d'une holding, idée fixe de certains, avec pour objectif non le renforcement, mais la mise au pas de l'audiovisuel public et l'affaiblissement de ses ressources.
Quel sera votre bilan pour renforcer l'information des Français ? Il manque 5 millions d'euros à l'AFP pour faire face à la dégradation de la couverture médiatique internationale. Permettrez-vous à l'AFP de remplir ses missions d'intérêt général en lui accordant les recettes nécessaires ?
Nous attendons toujours la loi promise après les états généraux de l'information. La proposition de loi de Sylvie Robert avait été soutenue par tous les groupes politiques. (M. Olivier Paccaud le conteste.) Pourquoi ne pas s'appuyer sur les rares initiatives parlementaires qui font consensus ?
J'ai peu de points communs avec le Président de la République, mais, depuis ses récentes déclarations, je crois que la valeur de l'information journalistique doit être restaurée et qu'une opinion doit être distinguée d'une information vérifiée.
M. Olivier Paccaud. - Il faut le dire à Élise Lucet ! (On s'en amuse sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Monique de Marco. - Selon le professeur de droit public Thomas Hochmann, dans son ouvrage On ne peut plus rien dire, le constat de débats plus vifs, notamment dans un contexte d'essor de réseaux sociaux, « ne traduit ni l'affaiblissement de la libération d'expression, mais la décence, la patience, la tolérance à la controverse. Lorsqu'une affirmation déclenche une avalanche de réponses courroucées, ce n'est pas une restriction de la liberté d'expression (...), mais une multitude de ses usages. L'idée selon laquelle on ne peut plus rien dire signifie qu'on ne peut plus rien dire sans être contredit. »
M. Laurent Burgoa. - C'est intéressant.
Mme Monique de Marco. - La liberté d'expression n'est pas la liberté de parler sans être contredit.
Madame la ministre, vous qui ne manquez ni de civilité, ni de patience, ni de décence dans la controverse, soutenez-vous cette idée du Président de la République qu'il faut agir pour distinguer le vrai du faux, pour combattre la désinformation ? Et si oui, comment ? (Mme Colombe Brossel applaudit.)
Mme Catherine Morin-Desailly . - (Applaudissements les travées du groupe UC) Les crédits de l'audiovisuel public s'élèvent à 3,878 milliards d'euros, en baisse de 71 millions par rapport à 2025. Entre 2016 et 2023, le budget de cette mission n'a pas augmenté, hormis en 2024 pour compenser la suppression de la contribution à l'audiovisuel public.
France Télévisions supportera l'essentiel de la baisse des crédits. La Cour des comptes souligne que le retard des réformes structurelles fragilise l'entreprise. La position de la tutelle a été velléitaire et changeante ces dernières années. Notre commission a préconisé de longue date une réforme globale, ambitieuse et cohérente, ajustant missions et charges, moyens, modèles économiques et gouvernance. Demander des économies, supprimer la contribution à l'audiovisuel public du jour au lendemain ne fait pas une politique. Le Parlement a dû intervenir pour assurer l'avenir du financement de l'audiovisuel public au travers d'une loi organique. Nous ne voyons pas de réforme stratégique aboutir. La proposition de loi du président Lafon attend sa réinscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
De même, nous attendons de pouvoir légiférer sur les propositions des états généraux de l'information pour repréciser les missions spécifiques de l'audiovisuel public.
Alors que les discussions se poursuivent à Bruxelles autour du règlement sur la liberté des médias et le bouclier démocratique, il faudra réformer en cohérence et en profondeur pour assurer la pérennité des missions spécifiques et irremplaçables de l'audiovisuel public. En réunion à Bruxelles ce lundi avec les parlementaires engagés sur l'IA, j'ai plaidé pour la stricte application du règlement sur l'IA pour protéger le droit d'auteur et les droits voisins, mais également pour un plan stratégique et de soutien de la Commission européenne à nos entreprises.
J'espère que la baisse de crédits n'aura pas de conséquences dommageables sur la création. Où en sont les contrats d'objectifs et de moyens ?
La bonne nouvelle de ce budget est la sanctuarisation des crédits de l'audiovisuel public extérieur, grâce à un apport de 10 millions d'euros des crédits de l'aide au développement à France Médias Monde. Les dotations d'Arte et TV5 Monde restent stables.
Dans un contexte de guerre de l'information, l'audiovisuel public joue un rôle majeur pour porter une information libre, indépendante, vérifiée, en français et en plusieurs langues pour dénoncer la désinformation et les manipulations. Confortons ces moyens face à ceux qui, à l'image de la Russie, mènent des stratégies d'influence et de désinformation agressives contre les démocraties occidentales.
Le groupe de l'Union centriste votera ces crédits.
Mme Else Joseph . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Michel Laugier et Mme Élisabeth Doineau applaudissent également.) Cette mission concerne la lecture, nos bibliothèques publiques, la musique et l'avenir de la presse. La lecture est une porte d'entrée du savoir avec la BNF et la BPI. Qu'en est-il du volet local où se joue la bataille de la lecture ? Je veux que des pages continuent à se tourner et non tourner la page du livre, mais les inquiétudes liées aux usages de l'IA augmentent.
D'ambitieuses réformes sont prévues pour l'AFP et les aides à la distribution qui sont en hausse, mais la survie de certains journaux est en jeu. Attention à la presse quotidienne régionale (PQR) : face à l'océan numérique, nous avons besoin d'une presse locale forte et soutenue.
J'attire votre attention sur les radios locales, médias écoutés et pépinières de talents, qui insèrent des publics en situation difficile. Un amendement sur les radios associatives a été déposé. Le coeur du pluralisme bat aussi dans les territoires.
Nous ne pouvons avoir d'ambition dans le secteur du livre sans un soutien fort aux auteurs. Le droit d'auteur doit être respecté. (M. Jean-Raymond Hugonet renchérit.) La hausse de la contribution de l'État sur les prêts dans les bibliothèques sera-t-elle suffisante ? Les livres produits grâce à l'IA, à bas prix et alléchants, induisent en erreur le lecteur et sont à la source de préjudices pour les éditeurs. Il faut agir pour faire cesser cette concurrence déloyale. Comment exiger des plateformes qu'elles soient plus transparentes sur les sources entraînant les IA ? Il existe un règlement européen sur l'intelligence artificielle qui prévoit des obligations, malheureusement non appliquées.
En 2025, la subvention au CNM a baissé, à périmètre inchangé, contrairement aux engagements du ministère. Elle recule encore en 2026, et la hausse des plafonds ne garantit rien. Nous avons besoin de lisibilité sur la répartition des fonds, et craignons un tour de passe-passe comptable. La gestion comptable tient plutôt de l'artifice dilatoire et dérisoire au regard de l'enjeu de soutien à la filière et à la survie de toutes les musiques.
Le CNM a montré ce qu'il savait faire pendant la crise sanitaire pour sauver le spectacle vivant. Il doit continuer à le faire dans nos territoires. Nous avons besoin d'un soutien franc, massif, effectif. Entre les annonces et la réalité, il y a un gouffre. Le juge ultime est le maintien de tous les festivals qui animent nos territoires. Madame la ministre, n'abandonnons pas nos territoires, rappelons la vraie finalité de la réorganisation du CNM. J'attends des réponses de votre part, et je ne doute pas de les obtenir. Nous voterons les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Jean-Gérard Paumier . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Madame la ministre, vous avez déclaré : « Je sais ce que je dois aux livres ». Ils nous permettent de nous ouvrir aux autres et au monde. Le livre et la lecture sont la première politique culturelle communale et intercommunale, avec 16 000 bibliothèques et 60 000 bénévoles.
Mais, en début d'année, le CNL faisait état d'une baisse de la lecture, dont la pratique est au plus bas depuis dix ans. Les réseaux sociaux dévorent le temps libre des jeunes, empiétant sur le sport et la lecture, les exposant à une obésité mentale et physique, selon l'expression américaine. Les moins de 25 ans passent en moyenne 25 heures par semaine devant les écrans. Les états généraux de la lecture jeunesse ont confirmé ce phénomène, faisant écho au baromètre du CNL : les 7-19 ans passent dix fois plus de temps devant un écran que devant un livre, et l'accès à la lecture reste fortement marqué par des inégalités géographiques, culturelles et sociales.
Pas moins de 38 des 56 départements ruraux sont couverts par des contrats départementaux lecture pour renforcer l'action des bibliothèques locales, souvent en réseau. Plus de 10 000 boîtes à livres sont installées sur le territoire, contre 2 000 en 2017.
Pour lutter contre le large usage des réseaux sociaux chez les jeunes, nous pourrions faire évoluer le cadre juridique, comme en Australie et en Suède. La technique suivra la loi si la loi est claire.
Plusieurs ombres au tableau de ce budget : la baisse de 4,3 millions d'euros des crédits du CNL, pesant sur son fonds de roulement, même si les dépenses d'intervention dans les territoires sont préservées. Cette ponction ne peut être durable, au risque de déstabiliser l'établissement et les contrats entre l'État et les collectivités pour la lecture. La BNF doit mener urgemment des travaux sur son site de Tolbiac.
Enfin, vous vous êtes montrée rassurante en commission sur la ponction prévue sur le FSER. Les radios locales sont précieuses.
Mobilisons tous les outils pour la lecture. Il y va de la santé de nos enfants, de nos industries culturelles, et de la langue française, tant la lecture contribue au développement de l'orthographe, du vocabulaire et de l'esprit critique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Sonia de La Provôté et Annick Billon applaudissent également.)
Mme Rachida Dati, ministre de la culture . - Nous savons tous que le contexte budgétaire est extrêmement contraint. Le redressement de nos comptes est un impératif. Le ministère de la culture y contribue légitimement à sa juste mesure. Ce budget connaît donc une diminution de 4 %.
Le Gouvernement est aussi pleinement attentif au contexte adverse auquel les médias et la presse, notamment, font face, du fait de la concurrence des grandes plateformes, qui ne rémunèrent pas suffisamment les contenus.
Ces secteurs doivent être préservés pour préserver la création de valeur et le rayonnement de la France. Je dois donc répondre à la nécessité de redressement, tout en accompagnant les priorités pour ces secteurs.
Nos médias traditionnels représentent des acteurs clés de la vie démocratique. L'enjeu est de disposer d'une information pluraliste, fiable, de qualité, mais aussi de préserver la qualité du débat public.
Monsieur Karoutchi, madame Robert, je présenterai très prochainement le texte issu des états généraux de l'information.
Il y a aussi un enjeu économique. Les éditeurs de presse sont en difficulté. Les aides au pluralisme seront maintenues à 23,2 millions d'euros. Les aides à la distribution, en baisse l'an dernier, augmenteront de 4,5 millions d'euros pour accompagner la modernisation des réseaux de distribution. Préserver notre presse imprimée nécessite de réformer un outil industriel devenu trop coûteux. Le Gouvernement a déposé un amendement créant une aide à la restructuration de 5 millions d'euros pour accompagner les salariés des imprimeries.
Je sais l'émoi légitime suscité par la baisse de 50 % du FSER. Je me suis engagée à poursuivre les discussions, et nous pourrons trouver une solution.
Les politiques publiques du livre sont une nécessité absolue. Le programme 334 s'élève à 343 millions d'euros. Sa baisse, limitée à 2 %, ne remet absolument pas en cause les grands projets. La construction du pôle de conservation de la BNF à Amiens, le relogement de la BPI ou la création de la maison du dessin de presse, par exemple, sont préservés.
Les états généraux de la lecture pour la jeunesse ont mobilisé plus de 36 000 participants, en Hexagone comme dans les outremers, dont plus de 6 000 jeunes. Leurs conclusions sont centrées autour de trois axes : renouer avec le plaisir de lire, faire de la lecture une présence continue en systématisant les coopérations avec les professionnels de la jeunesse et réduire le temps d'écran - conformément aux souhaits d'Agnès Evren. (Mme Agnès Evren apprécie.)
En 2026, tous les territoires sont couverts par un contrat départemental lecture. Plus de 250 projets d'extension des heures d'ouvertures des bibliothèques ont entraîné une hausse de la fréquentation de 30 %, avec 7 millions d'inscrits, un record.
Les plafonds des taxes affectées au CNM sont relevés de 8 millions d'euros pour compenser la baisse des crédits. Cet engagement est tenu.
Le budget de l'audiovisuel public participe au redressement des comptes publics, avec une baisse de 70 millions d'euros, dont 65 millions pour France Télévisions.
Monsieur Karoutchi, en 2026, le Quai d'Orsay participera à hauteur de 10 millions d'euros à France Médias Monde. Les synergies entre Deutsche Welle et France Médias Monde pourront contribuer aux efforts. J'ai pris l'initiative d'européaniser Arte, qui deviendra Arte+. J'ai convaincu mes homologues et ce sera à l'ordre du jour du Conseil européen, pour faire face à la recrudescence des grandes plateformes américaines qui veulent revenir sur notre exception culturelle.
Les crédits de France Télévisions baissent de 2,6 %. Cette société fait face à des charges qui sont devenues trop rigides, à cause de réformes structurelles « ajournées », selon la Cour des comptes. Madame Robert, vous trouvez que je manque d'engagement et de volontarisme politique. Que serait-ce si c'était le cas !
France Télévisions en vient à réduire ses soutiens à la création audiovisuelle, faute de marges. Pourquoi ? L'ensemble des rapports parlementaires, toutes tendances politiques confondues, l'ont rappelé : parce que les réformes ont été toujours ajournées.
M. Max Brisson. - Absolument.
Mme Rachida Dati, ministre. - Madame Robert, vous voulez l'immobilisme. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; protestations sur les travées du groupe SER)
Mme Sylvie Robert. - Vous ne m'avez pas écoutée.
Mme Rachida Dati, ministre. - Dommage que vous n'ayez pas fait ce constat avant. C'est vous qui affaiblissez France Télévisions ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Laurent Lafon applaudit également.)
Il faut réformer la société.
Mme Sylvie Robert. - Cela fait des années qu'on le dit !
Mme Rachida Dati, ministre. - Auparavant, je n'étais pas ministre de la culture. Ces réformes ont été trop longtemps repoussées, ce qui a affaibli la société. Alourdir les économies demandées l'empêcherait de se reformer. L'investissement dans les programmes est aussi un investissement dans la diversité de notre création.
Le premier enjeu est de donner à l'audiovisuel public un cap et une plus grande efficacité. C'est tout l'enjeu de mon volontarisme.
Oui, monsieur Vial, grâce à votre initiative, l'audiovisuel public a pu sanctuariser son financement sans impact au cours du temps. L'audiovisuel public peut vous remercier. La meilleure réponse, c'est l'ambition de la proposition de loi Lafon, avec une réforme pour lui permettre de se projeter. Les salariés de ces sociétés ont fait le choix du service public. Il faut redonner du sens et de la visibilité à leur mission. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC et du RDPI)
M. Laurent Lafon. - Tout à fait !
Examen de crédits de la mission et du compte spécial
Article 49 - État B
M. le président. - Amendement n°II-2148 du Gouvernement.
Mme Rachida Dati, ministre. - Nous pérennisons la distribution de la presse imprimée, confrontée à une diminution de 10 % des volumes. Nous prévoyons 5 millions d'euros en 2026 pour soutenir les salariés de plus de 59 ans, dans le cadre de plans de sauvegarde de l'emploi ou de ruptures conventionnelles collectives. Au total, 15 millions d'euros seront mobilisés sur trois ans.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Cet amendement tire les conséquences de l'amendement n°II-2149, qui crée un congé spécial - une allocation égale à un pourcentage du salaire, pris en charge par l'État - dans le cadre du plan de transformation des entreprises de presse ; cela aurait dû être présenté dans un autre texte qu'en loi de finances. Un congé spécial de 36 mois est dérogatoire. J'ai aussi des doutes sur la légalité, à cause du renvoi à un décret. Retrait, sinon avis défavorable. (Exclamations ; les membres du groupe SER incitent vivement leurs collègues à adopter cet amendement.)
L'amendement n°II-2148 est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-658 de M. Durox et alii.
L'amendement n°II-658 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°II-664 de M. Durox et alii.
L'amendement n°II-664 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°II-2043 de M. Bacchi et du groupe CRCE-K.
M. Jérémy Bacchi. - Nous souhaitons ouvrir un chantier devenu indispensable : une réforme profonde des aides à la presse, incapables de garantir le pluralisme qu'elles sont pourtant censées défendre. Ces fonds subventionnent des titres appartenant aux plus grands groupes qui dominent déjà le paysage médiatique.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Cet amendement sur la concentration des médias n'a pas sa place en loi de finances. Cela aboutirait à doubler les aides à la presse.
Mme Rachida Dati, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°II-2043 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2044 de M. Bacchi et du groupe CRCE-K.
M. Jérémy Bacchi. - Nous voulons rééquilibrer l'aide à la distribution de la presse quotidienne nationale, actuellement concentrée sur les éditeurs. Aidons les autres acteurs de la distribution qui font face à des charges croissantes et qui participent à la même finalité.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - La ministre de la culture a confié à Sébastien Soriano une mission sur ce sujet. Un projet de contrat de modernisation a été transmis aux acteurs le 1er août, prévoyant un accompagnement social et à l'investissement. Ce PLF prévoit déjà une aide de 4,5 millions d'euros. Les aides à la diffusion représentent déjà 73 % des aides directes à la presse. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Rachida Dati, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°II-2044 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2020 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Les aides au pluralisme ont baissé de plus de 10 %, ce qui fragilise un secteur déjà déstabilisé. Il faut les rétablir au niveau de 2024. Il faudrait réformer les aides à la presse dans un contexte de concentration croissante des médias.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - La réduction des aides est concentrée sur les quotidiens d'information générale. La problématique est plus la fixation, au niveau réglementaire, de la définition des titres qu'un manque de moyens. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Rachida Dati, ministre. - Même avis.
Mme Sylvie Robert. - On parle beaucoup de pluralisme en ce moment. Le rapporteur spécial a dit que c'était une question réglementaire. La ministre pourrait-elle répondre ? J'attends que la ministre réforme enfin les aides à la presse alors que l'on dit qu'il faut les réformer depuis de longues années...
Vous dites que vous nous transmettrez « prochainement » les conclusions des états généraux de l'information : qu'entendez-vous par « prochainement » ?
Mme Laure Darcos. - Chaque année, on parle du même trou dans la raquette : la presse spécialisée. Je déplore de devoir le rappeler encore et encore.
M. Michel Canévet. - La presse spécialisée, notamment dans l'agriculture, fait face à d'importantes hausses du coût d'acheminement. Il faut le prendre en compte dans le cadre du redéploiement des aides.
L'amendement n°II-2020 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-474 de M. Laugier, au nom de la commission de la culture.
M. Michel Laugier. - Cet amendement, voté à l'unanimité par la commission de la culture, transfère 3,3 millions d'euros pour rétablir les crédits du fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP).
C'est un des seuls moyens pour soutenir les actions s'engageant dans les transformations structurelles demandées par le rapport IGA-IGF de 2023 et inscrites dans le contrat proposé par Sébastien Soriano. Je demande la levée du gage.
M. le président. - Amendement identique n°II-1203 rectifié de Mme Robert et du groupe SER.
Mme Sylvie Robert. - C'est le même ; je remercie le rapporteur pour avis de son soutien.
M. le président. - Amendement identique n°II-2019 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Idem.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Le montant du FSDP a été divisé par deux entre la loi de finances initiale pour 2025 et le PLF 2026, une partie ayant été gelée en 2025. Il est dommage que les économies se fassent sur un outil de modernisation. Sagesse.
Mme Rachida Dati, ministre. - Avis défavorable.
Les amendements identiques nosII-474, II-1203 rectifié et II-2019 sont adoptés.
M. le président. - Amendement n°II-2006 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Malgré l'augmentation de 4,2 millions d'euros des crédits pour l'AFP en conformité avec le contrat d'objectifs et de moyens, plusieurs syndicats nous ont alertés sur la rupture des contrats avec l'administration américaine. Le démantèlement de l'US Agency for Global Media a également eu un effet important.
Enfin, Meta a mis fin à son contrat avec l'AFP. Il faut donc augmenter le financement public de l'AFP.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - La hausse de 4,2 millions d'euros prévue par le PLF est conforme au contrat d'objectifs et de moyens. L'AFP fait face à des problèmes structurels que 5 millions d'euros ne pourront régler ; l'IA impacte la presse écrite et encore davantage l'AFP. Avis défavorable.
Mme Rachida Dati, ministre. - Le budget augmente déjà de plus de 4 millions d'euros, conformément au contrat d'objectifs et de moyens 2024-2028. L'État respecte ses engagements et l'AFP prévoit un budget à l'équilibre. Avis défavorable.
L'amendement n°II-2006 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-662 de M. Durox et alii.
L'amendement n°II-662 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°II-53 rectifié bis de Mme Borchio Fontimp et alii.
M. Cédric Vial. - Nous rétablissons les crédits du FSER, qui permet aux 770 radios associatives - 2 400 emplois et des milliers de bénévoles - de fonctionner pour l'intérêt général et éduquer les jeunes sur tous les territoires.
Après avoir échangé avec les membres de la commission de la culture, je souhaite rendre cet amendement identique à l'amendement n°II-1428 de la commission, à 15,7 millions d'euros au lieu de 18 millions.
M. le président. - Amendement identique n°II-146 rectifié bis de M. Dhersin et alii.
Mme Anne-Sophie Patru. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°II-295 rectifié quater de M. Chevalier et alii.
M. Daniel Chasseing. - Je rends mon amendement identique à l'amendement n°II-1428.
M. le président. - Amendement identique n°II-484 rectifié de Mme Havet et du RDPI.
M. Mikaele Kulimoetoke. - Il faut rétablir le FSER : ces médias associatifs présents dans tous les territoires remplissent une mission d'intérêt général, souvent dans des zones isolées. Une baisse mettrait en question leur survie. Ce rétablissement est crucial pour la liberté d'expression. Cet amendement a déjà été adopté dans la loi de finances pour 2025.
M. le président. - Amendement identique n°II-2005 rectifié de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Nous le portons à 15,7 millions d'euros en le rendant identique à l'amendement n°II-1428.
M. le président. - Amendement identique n°II-2045 de M. Bacchi et du groupe CRCE-K.
M. Jérémy Bacchi. - Idem.
M. le président. - Amendement n°II-1202 rectifié ter de Mme Robert et du groupe SER.
Mme Sylvie Robert. - Idem. Madame la ministre, pourriez-vous lever le gage ?
M. le président. - Amendement n°II-2018 rectifié bis de M. Delcros et alii.
Mme Anne-Sophie Patru. - Nous le rendons identique aussi.
M. le président. - Amendement n°II-103 rectifié quater de Mme Billon et alii.
Mme Annick Billon. - Le montant est à 15,7 millions d'euros. Le Gouvernement propose une baisse de 45 % de ce budget, ce qui mettrait en péril près de la moitié des radios et plus de 80 % des emplois. Pour RCF Vendée, cela reviendrait à supprimer un poste de salarié à temps plein, soit un quart des effectifs. La radio de l'île d'Yeu fermerait tout simplement.
M. le président. - Amendement identique n°II-897 de M. Lahellec et Mme Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. - Je souscris aux arguments développés et j'en ajoute un : c'est une source d'emplois et d'offres locales médiatiques et culturelles variées. C'est aussi ce qui fait la vitalité de nos langues régionales. Cette baisse des crédits serait une menace envers celles et ceux qui soutiennent cette information de qualité et contribuent au maintien des richesses culturelles que sont les langues régionales.
M. le président. - Amendement identique n°II-1065 rectifié de Mme Devésa et alii.
Mme Anne-Sophie Patru. - Identique donc défendu.
M. le président. - Amendement identique n°II-1691 rectifié bis de Mme Carrère et alii.
Mme Maryse Carrère. - Dans les Hautes-Pyrénées, ces radios de proximité sont ancrées dans la vie sociale et démocratique des territoires, apportant une information locale indépendante. Elles donnent la parole à tous et constituent souvent le seul média de communication quotidienne de nombreuses communes rurales et de montagne. La baisse des crédits les mettrait en danger, ainsi que le pluralisme médiatique local.
M. le président. - Amendement identique n°II-1428 de M. Laugier, au nom de la commission de la culture.
M. Michel Laugier. - Cet amendement, adopté à l'unanimité par la commission, rétablit les crédits du FSER à leur niveau de 2025. Je demande au Gouvernement de lever le gage.
M. le président. - Amendement n°II-127 rectifié ter de M. Lefèvre et alii.
M. Pierre-Antoine Levi. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°II-2073 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Cet amendement garantit le financement de la part complémentaire du FSER. Cette part complémentaire concerne les radios situées dans les zones France Ruralités Revitalisation (FRR), dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) ou en outre-mer.
M. Mikaele Kulimoetoke. - Je rends l'amendement n°II-484 rectifié identique à celui de la commission.
M. Pierre-Antoine Levi. - De même avec l'amendement n°II-127 rectifié ter.
M. le président. - Tous les amendements en discussion commune sont donc rendus identiques à l'amendement n°II-1428 de la commission, hormis l'amendement n°II-2073 de Mme de Marco ? (Assentiment)
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Les temps de concorde dans un hémicycle sont assez rares, profitons-en ! Avis favorable à l'amendement n°II-1428 et aux identiques.
Sagesse sur l'amendement n°II-2073.
Mme Rachida Dati, ministre. - Avis favorable sur les amendements à 15,7 millions d'euros. Je m'y étais engagée : j'ai obtenu l'accord du Premier ministre pour lever le gage. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP ; Mme Monique de Marco applaudit également.) Avis défavorable à l'amendement n°II-2073.
Les amendements identiques nosII-53 rectifié quater,II-146 rectifié quater, II-295 rectifié sexies, II-484 rectifié ter, II-2005 rectifié ter, II-2045 rectifié bis, II-1202 rectifié ter, II-2018 rectifié quater, II-103 rectifié quinquies, II-897 rectifié,II-1065 rectifié bis, II-1428 rectifié, II-1691 rectifié teret II-127 rectifié quinquies sont adoptés.
L'amendement n°II-2073 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1205 de Mme Robert et du groupe SER.
Mme Sylvie Robert. - La situation des médias de proximité s'est dégradée. En trois ans, les recettes publicitaires ont fondu, représentant parfois une perte jusqu'à 150 millions d'euros. Très appréciés, les médias locaux ont la confiance de nos concitoyens. En revanche, leur soutien est mal calibré. Leur modèle économique est très fragilisé : la moitié des télévisions locales ont un revenu négatif ; 55 % de la presse locale est déficitaire ; une radio locale sur trois est en cessation de paiement. Par cet amendement, nous créons un fonds d'urgence temporaire pour éviter leur disparition.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Dans le contexte budgétaire actuel, l'heure n'est pas aux fonds d'urgence. De nombreuses aides actuelles viennent déjà en aide à la presse quotidienne régionale (PQR). Retrait.
Mme Rachida Dati, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°II-1205 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-248 rectifié de Mme Belrhiti et alii.
M. Jean-Jacques Panunzi. - Défendu.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Le DAB+ a de nombreux avantages, mais un amendement de crédit pour ce type de subvention à une association de promotion n'est pas une bonne méthode. Avis défavorable.
Mme Rachida Dati, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°II-248 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-1766 rectifié de M. Gold et alii.
M. Bernard Fialaire. - Cet amendement rétablit le niveau de dotation du CNM pour qu'il continue ses missions sans rupture.
M. le président. - Amendement identique n°II-2007 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Le CNM effectue un suivi précis des acteurs de la filière. Le PLF ampute sa dotation de 7 millions d'euros, ce qui le fragiliserait. Même si le Gouvernement affirme que cette coupe sera compensée par le relèvement du plafond des taxes affectées, cela semble insuffisant. Revenons sur cette baisse de 7 millions d'euros.
M. le président. - Amendement n°II-1204 de Mme Robert et du groupe SER.
Mme Sylvie Robert. - Les taxes affectées et la subvention du CNM ne sont pas de même nature. Ponctionner 7 millions d'euros mettrait en péril les missions fondamentales du CNM et créerait des tensions entre les acteurs de la filière, qui aggraveraient l'ensemble de l'écosystème musical. Quand nous avons créé le CNM au Sénat, nous avions demandé au Sénat de stabiliser les subventions de fonctionnement, ce qui n'est pas le cas. Revenons sur cette décision.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Le CNM m'est cher, mais soyons pondérés. L'État a été au rendez-vous pendant la crise du covid. Ses recettes ont augmenté de 15 millions d'euros entre 2024 et 2026. Les ressources publiques du CNM ne diminuent pas entre 2025 et 2026. Au Sénat, nous avions adopté la taxe streaming pour garantir son indépendance par rapport aux subventions budgétaires. Ne pas diminuer la subvention reviendrait à vouloir le beurre et l'argent du beurre... Avis défavorable.
Mme Rachida Dati, ministre. - Le PLF relève déjà de 5 et 3 millions d'euros les plafonds des taxes sur les spectacles de variétés et le streaming. Avis défavorable.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Je suis particulièrement impliquée dans le secteur de la musique « de patrimoine et de création », qui est fragile. Le CNM soutient les musiques actuelles mais aussi des dizaines d'orchestres et ensembles indépendants. Comme il demeure une incertitude sur le plafonnement des deux taxes, soyons prudents.
Les amendements identiques nosII-1766 rectifié et II-2007 ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°II-1204.
M. le président. - Amendement n°II-1690 de Mme Daniel et du groupe SER.
Mme Karine Daniel. - Nous abondons le budget du CNM de 1,6 million d'euros. L'an dernier, le Président de la République a décidé l'organisation de la French Music Week, qui a coûté 7 millions d'euros dont 4,6 millions d'euros devaient être couverts par le CNM. Or seuls 3 millions ont été remboursés. L'État doit respecter ses engagements et réparer cette injustice.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Retrait ou avis défavorable, comme pour les amendements augmentant les crédits du CNM. La Cour des comptes a recommandé une rationalisation des dispositifs du CNM. Il faudrait aussi franciser le nom de cette French Music Week... (Mme Catherine Morin-Desailly renchérit.)
Mme Rachida Dati, ministre. - Il s'agit de la France Music Week. Cette compensation permet de ne pas porter atteinte au modèle économique de l'établissement ni aux aides qu'il verse. Avis défavorable.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Au nom du groupe d'études Francophonie du Sénat, je demande, de grâce, que le ministère de la culture s'attelle à défendre la francophonie, souvent battue en brèche, d'autant que le français serait assez transparent dans cette expression.
Mme Karine Daniel. - On peut s'interroger sur la capacité d'un opérateur à limiter ses opérations quand la commande vient du Président de la République...
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - C'est une autre affaire !
L'amendement n°II-1690 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1207 rectifié bis de Mme Robert et du groupe SER.
Mme Sylvie Robert. - Cet amendement revalorise la part État du droit de prêt, calculée sur le nombre d'usagers inscrits en bibliothèque, qui n'a pas évolué depuis 2003. Il sert à financer partiellement les cotisations de retraite complémentaire des auteurs de livre.
Ce serait un rattrapage en faveur des auteurs, auquel a souscrit le Président de la République lors du dernier Salon du livre.
M. le président. - Amendement identique n°II-1644 rectifié de Mme Darcos.
Mme Laure Darcos. - Madame la ministre, vous étiez présente avec nous, il y a six mois, quand le Président de la République s'est engagé sur ce sujet, lors d'une table-ronde sur les livres d'occasion ; mais les prêts en bibliothèques sont bien plus nombreux.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Les engagements du Président de la République devraient nous inciter à la méfiance, ou à nous placer en retrait. (Mme Karine Daniel s'en amuse.) Pour que cet amendement de crédit soit opérant, il faudrait modifier la loi de 2003. Retrait. (Mme Sylvie Robert manifeste son incompréhension.)
Mme Rachida Dati, ministre. - L'engagement du Président de la République portait sur le livre d'occasion. (Mme Laure Darcos manifeste son mécontentement.) D'autres propositions du Syndicat national de l'édition (SNE) remettent en cause cette proposition. Ils m'ont demandé l'instauration de droits voisins pour le livre d'occasion. Nous avons consulté le Conseil d'État, qui estime que ce n'est pas juridiquement faisable. À aucun moment, le droit de prêt n'a été remis sur la table. Avis défavorable.
Mme Sylvie Robert. - Nous demandons la revalorisation de la part État du droit de prêt en bibliothèque. Il n'est pas question des livres d'occasion. Le Président de la République avait très bien compris.
Mme Rachida Dati, ministre. - Vous dites que je n'ai rien compris ! C'est sympathique... Je vous dis que le droit de prêt a été évoqué pour les livres d'occasion. (Mmes Sylvie Robert et Laure Darcos manifestent leur perplexité.)
L'amendement nosII-1207 rectifié bis et II-1644 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°II-1206 de Mme Robert et du groupe SER.
Mme Sylvie Robert. - Nous mettons en cohérence les discours et les actes, en revenant sur la baisse du budget du CNL.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - La subvention pour charges de service public du CNL devrait diminuer pour atteindre 22,4 millions d'euros en 2026. Cela ne devrait pas limiter l'intervention du CNL. La trésorerie du CNL est particulièrement élevée et reste supérieure au niveau d'avant la crise sanitaire. J'ai incité le CNL à mobiliser davantage son fonds de roulement, qui représente près d'une année de budget. Retrait, à défaut avis défavorable.
Mme Rachida Dati, ministre. - J'ai obtenu de Bercy que le CNL puisse mobiliser son fonds de roulement. Ainsi, il n'y aura pas de baisse. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°II-1206 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n° II-1648 de M. Ouzoulias et alii.
M. Jérémy Bacchi. - Cet amendement d'appel de M. Ouzoulias alerte sur la situation préoccupante de la BNF. Elle ne peut y faire face sans un engagement fort de l'État.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - La BNF fera face à de très grandes difficultés d'investissement sur son site de Tolbiac. Si j'étais mauvaise langue, je suggérerais qu'elle prenne l'attache de la Maison de la radio. Les montants en jeu sont compris entre 600 et 900 millions d'euros, pour un bâtiment qui a moins de trente ans. Retrait.
Mme Rachida Dati, ministre. - Avis défavorable. Il est possible pour la BNF de mobiliser son fonds de roulement. Il n'y aura donc pas d'impact budgétaire.
L'amendement n°II-1648 est retiré.
Les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », modifiés, sont adoptés.
Après l'article 78
M. le président. - Amendement n°II-2149 rectifié du Gouvernement.
Mme Rachida Dati, ministre. - C'est la création du dispositif d'aide aux éditeurs, en cohérence avec le premier amendement n°II-2148 que j'avais présenté.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Comme sur l'amendement n°II-2148, retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°II-2149 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
Article 51 (Crédits du compte spécial) - État D
M. le président. - Amendement n°II-1733 rectifié de M. Canévet et alii.
M. Michel Canévet. - Radio France et France Télévisions ne doivent pas être exonérées des efforts de rationalisation : réduisons de 25 millions d'euros les crédits de l'une et de l'autre.
M. le président. - Amendement n°II-2002 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Mes amendements demandent l'inverse : rétablissons les crédits de Radio France, France Télévisions et l'INA à leur niveau de 2025.
Depuis plusieurs années, l'audiovisuel public fait l'objet d'attaques répétées de la part de la droite : il serait coûteux, idéologique, dépassé... (Protestations à droite) Mais moins de moyens, c'est moins d'indépendance et moins de création.
Une partie de la droite ne cherche pas à moderniser l'audiovisuel public, mais à le raboter, à l'étouffer jusqu'à ce qu'il ne respire plus.
L'audiovisuel public n'est pas un luxe, c'est un pilier de la démocratie.
M. le président. - Amendement n°II-2003 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Défendu.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Si je comprends bien, nous avons le choix entre le rabot breton ou la louche girondine. (Sourires) Mais le résultat sera le même, car la quasi-intégralité de la diminution prévue en 2026 est supportée par France Télévisions, à hauteur de 65 millions d'euros, qui s'ajoutent à la baisse de 63 millions votée l'an passé. Restons-en à la proposition initiale d'économies, compte tenu de la situation financière fragilisée de France Télévisions.
Cela dit, il faudra revoir le périmètre de l'audiovisuel public et faire une vraie réforme.
Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Rachida Dati, ministre. - Même avis.
M. Max Brisson. - Madame de Marco, soyez rassurée : non, nous ne voulons pas la disparition de l'audiovisuel public et je ne voterai pas l'amendement de M. Canévet. Votre discours ne correspond pas à la réalité. (Mme Monique de Marco s'exclame.)
Je vous redis mon attachement à l'audiovisuel public, sur tous les tons ! Mais il faut le réformer, pour le préserver. Nous ne voulons pas le mettre sous cloche : il doit tenir compte de l'évolution de la société et des pratiques de consommation audiovisuelle.
Nous sommes les meilleurs partisans de l'audiovisuel public (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Jean-Jacques Panunzi. - Bravo !
M. Vincent Delahaye. - Nous sommes aussi favorables à l'audiovisuel public : nous ne souhaitons pas sa disparition, mais sa réforme et sa restructuration. Dix chaînes publiques de télévision et autant de radio, c'est beaucoup trop. Nous pourrions avoir des moyens mieux ciblés.
J'ai cosigné cet amendement, car il faut faire des économies partout, en les accompagnant de réformes. Voilà des années que l'on en parle, mais il ne se passe jamais rien !
M. Max Brisson. - Si, la réforme Lafon !
M. Michel Canévet. - Ce n'est pas parce que nous proposons de réduire les crédits que nous sommes opposés au service public de l'information ! Je suis attaché au pluralisme des médias, mais aussi à nos finances publiques.
M. Adel Ziane. - Nous aussi sommes préoccupés de l'état de nos finances publiques. Mais l'état du débat public nous préoccupe également. En commission, j'ai été choqué d'entendre qu'il y aurait un « droit à faire le procès de l'audiovisuel public »... On assiste à une attaque en règle contre le pluralisme et la liberté d'opinion. Voyez le sénateur Durox, qui a déposé des amendements pour supprimer les aides à la presse - mais il n'était pas présent pour les défendre...
Nous ne sommes pas opposés à une réflexion sur la réforme de l'audiovisuel public, mais il doit demeurer un espace de liberté d'expression.
M. Yannick Jadot. - Tout le monde est pour l'audiovisuel public ; comme tout le monde est pour les petites lignes, mais à force de réduire les budgets, on les ferme ; comme tout le monde est pour la lutte contre le dérèglement climatique, mais à force de réduire les crédits de la transition écologique, on s'étonne de ne pas être à la hauteur de l'accord de Paris...
À vous entendre, on croirait que l'audiovisuel public est sclérosé depuis des décennies. Mais non, regardez la série sur le Bataclan, elle est magnifique ! Volontairement ou pas, vous faites le jeu de Bolloré. (Protestations à droite ; M. Guillaume Gontard applaudit.)
M. Max Brisson. - Et la Cour des comptes ?
M. Cédric Vial. - Notre débat est plus apaisé que l'an dernier, je m'en réjouis. L'effort demandé à l'audiovisuel public, comme aux autres services publics, est important, mais supportable.
L'effort budgétaire demandé à France Télévisions est de 65,3 millions d'euros. Son déficit, 44 millions d'euros, ne sera pas pris en charge par l'État cette année. Et la non-prise en compte du GVT porte l'effort à 148 millions d'euros. Cela doit conduire la société à engager des réformes structurelles.
Mme Sylvie Robert. - J'observe avec plaisir que certains collègues se proclament défenseurs de l'audiovisuel public - dont acte.
J'ai toujours dit que je n'étais pas contre la réforme, et qu'il fallait examiner ensuite les moyens nécessaires. Au lieu de cela, vous fragilisez l'opérateur en diminuant ses crédits.
La démocratie et le pluralisme sont en jeu.
Mme Colombe Brossel. - Frustrés par le 49.3 sénatorial de l'été, nous avons besoin de reparler de l'audiovisuel public...
La question n'est pas faut-il réformer ou pas ? Nous disons tous qu'il faut réformer. C'est plutôt : réformer ou dénigrer ?
Beaucoup de mensonges ont été proférés : telle radio serait une radio de vieux ? Alors que c'est la radio du service public la plus écoutée !
Soutenir l'audiovisuel public, ce n'est pas le dénigrer tous les matins sur CNews et dans le JDD. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)
M. Laurent Lafon. - Voilà un sujet qui attise les passions !
Soyons raisonnables et sortons l'audiovisuel public de l'étau caricatural dans lequel le mettent ceux qui sont obnubilés par CNews et ceux qui n'ont que le mot privatisation à la bouche.
Chers collègues et amis du groupe de l'Union centriste, l'audiovisuel public fait déjà un effort budgétaire, avec une dotation qui diminue de 71 millions d'euros cette année, après une baisse l'an passé.
L'audiovisuel public ne peut pas être statique, alors que l'environnement audiovisuel international est en profonde mutation. Il doit donc se réorganiser. Le dire n'est pas lui porter atteinte, mais le soutenir.
D'où ma proposition de création d'une holding, qui résulte d'un travail conjoint. (Protestations à gauche ; MM. Max Brisson et Jean-Jacques Panunzi applaudissent.)
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Cet intermède politique était sympathique. Mais lisez ou relisez le rapport de la Cour des comptes : « la situation financière n'est pas soutenable. » Les capitaux propres se sont effondrés, 294 à 179 millions d'euros en huit ans ! La présidente commence à comprendre qu'il y a péril.
M. Max Brisson. - Elle commence...
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - L'accord collectif de France Télévisions a été dénoncé.
Mais nous devrons revoir tout cela, car le compte n'y est pas.
L'amendement n°II-1733 rectifié n'est pas adopté,non plus que les amendementsnosII-2002 et II-2003.
M. le président. - Amendement n°II-2004 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Il s'agit de l'INA, qui doit se moderniser, en particulier grâce à l'IA.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. - Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Rachida Dati, ministre. - Même avis.
L'amendement n°II-2004 n'est pas adopté.
Les crédits du compte spécial « Avances à l'audiovisuel public » sont adoptés
La séance est suspendue pour quelques instants.
Santé
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial de la commission des finances . - Le budget de la mission « Santé » s'élève à 1,668 milliard d'euros, en augmentation de près de 11 %. Cela peut sembler beaucoup, mais c'est trompeur, car ces crédits englobent des fonds européens destinés au financement des hôpitaux, qui seront reversés à la sécurité sociale. Hors ces fonds européens, les crédits de la mission sont stables.
Cette mission a été déshabillée au fil du temps. N'y subsistent presque que les crédits de l'aide médicale de l'État (AME) - 90 % des crédits de la mission. Le reste, c'est un saupoudrage d'actions de prévention, l'aide à Wallis-et-Futuna, les subventions pour l'Anses et l'Institut national du cancer (Inca). Ce dernier bénéficiera de 9,5 millions d'euros pour mettre en place le registre national des cancers, à la suite de la proposition de loi de Sonia de La Provôté. Je serai donc, bien entendu, favorable à cette augmentation des crédits de l'Inca.
Les crédits destinés à l'AME seront une nouvelle fois insincères. Alors qu'ils sont fixés, comme en 2025, à 1,207 milliard d'euros, la réalisation 2025 est attendue à 1,4 milliard d'euros ! Je ne comprends pas : pourquoi ne pas budgéter les crédits nécessaires ?
En 2024, les dépenses ayant dépassé de 185 millions d'euros le budget, nous avons créé une dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale. Idem en 2025, pour plus de 200 millions d'euros. Si nous ne changeons rien, à la fin de l'année 2026, nous aurons creusé le trou de la sécurité sociale de 670 millions d'euros ! Cela n'est pas raisonnable.
L'AME est un guichet ouvert pour les personnes en situation irrégulière. Mais on ne peut plus continuer comme cela. Un certain nombre d'éléments du rapport Évin-Stefanini et de mon propre rapport devaient être repris dans des projets de décret. Madame la ministre, est-ce toujours d'actualité ? Où en sont ces projets ?
En n'exigeant plus l'acte de naissance et en excluant du panier les soins non urgents, comme le souhaite la commission des finances, nous pourrions tenir le budget. (Mmes Anne-Sophie Patru et Christine Lavarde et M. Marc Laménie applaudissent.)
Mme Pascale Gruny, en remplacement de Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Anne-Sophie Patru et Sonia de La Provôté applaudissent également.) L'augmentation de 12,8 % des crédits de la mission résulte de crédits européens délégués à la France pour financer le volet investissement du Ségur de la santé.
Hors ce mécanisme comptable, les crédits de paiement sont reconduits à l'identique. Cette stabilité inscrit dans la durée la contraction des crédits consacrés à la prévention et confirme le décalage entre crédits ouverts et crédits exécutés concernant l'AME.
Depuis 2009, les dépenses d'AME ont progressé de 6 % en moyenne par an, mais de 40 % entre 2021 et 2025. En 2025, l'État aura accumulé 243 millions d'euros de dette envers la sécurité sociale, soit 20 % des crédits. Soit nous avons la volonté de contenir les dépenses d'AME, soit il faut doter le programme de moyens suffisants. Nous choisissons la maîtrise des dépenses : d'où les deux amendements de Florence Lassarade.
La commission s'est émue de la baisse des crédits du programme 204, qui aura perdu plus du quart de ses financements entre 2024 et 2028, affectant de nombreux acteurs : les associations, l'Oniam (Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales), l'agence de santé de Wallis-et-Futuna.
Nous saluons les crédits complémentaires attribués à l'Inca pour le registre national des cancers, qui permettra d'améliorer la prévention et la prise en charge. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Marc Laménie applaudit également.)
Mme Guylène Pantel . - (Applaudissements sur les travées du RDSE ; Mme Émilienne Poumirol applaudit également.) Nous débattons d'une mission essentielle pour les personnes les plus vulnérables. Ses crédits semblent augmenter d'un peu plus de 10 %, mais prudence : si l'on exclut le transit de fonds européens, les crédits sont stables.
Ce budget de responsabilité ciblée permet à l'État d'assurer la protection sanitaire, la prévention de certains risques et la prise en charge de ceux qui n'ont accès à aucun autre dispositif.
L'AME y occupe une place centrale. Comme l'an dernier, les rapporteurs ont déposé des amendements pour minorer les crédits de l'AME et refondre le dispositif.
Mais le RDSE rappelle que l'AME est un instrument de santé publique. Retarder des soins peut s'avérer in fine plus coûteux. Avant de modifier l'équilibre du dispositif, nous avons besoin de recueillir des éléments et d'associer les professionnels de santé. La majorité d'entre nous s'opposera donc aux amendements de minoration, non pas par refus de débattre, mais parce que leurs effets sont trop incertains. Maintenons un dispositif dont la fonction sanitaire est indispensable.
Sur le volet prévention de la mission, Nathalie Delattre a déposé un amendement majorant de 10 millions d'euros le programme 204 afin de créer un fonds d'indemnisation des dommages sanitaires de l'acétate de cyprotérone et d'autres progestatifs de synthèse. Il s'agit de reconnaître des souffrances et de réparer des préjudices.
Le RDSE ne peut cautionner des réductions de crédits qui aggravent les inégalités d'accès à la santé et affaiblissent les politiques de prévention. Les crédits de la mission seront votés par une majorité du RDSE si leurs montants sont inchangés. (Applaudissements sur les travées du RDSE)
Mme Brigitte Bourguignon . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La mission « Santé », quoique modeste en crédits, est révélatrice de nos choix politiques. La crise sanitaire nous a légué le « quoi qu'il en coûte », mais aussi un solennel « plus jamais ça ». Mais la priorité affichée hier devient aujourd'hui une variable d'ajustement : l'Oniam est sous-doté, l'agence de Wallis-et-Futuna évolue sans visibilité, la validation des acquis de l'expérience (VAE) de nos soignants devient optionnelle... Il s'agit pourtant de la sécurité sanitaire de la nation ! Le Gouvernement doit considérer ces politiques comme un socle, non comme un curseur.
De quoi parle-t-on quand on parle d'AME ? De 0,47 % des dépenses de santé et de fraudes qui ne touchent que 0,026 % des dossiers. Est-ce marginal ? Oui. Faut-il pour autant fermer les yeux ? Non. Ne faisons pas de ce dispositif fondamentalement humaniste un remède tout trouvé à l'épidémie de xénophobie.
Notre commission a rappelé des faits que l'on entend trop rarement sur les plateaux de télévision : la dépense moyenne par bénéficiaire est plus faible que celle d'un assuré classique ; ces soins protègent la population générale, notamment des maladies infectieuses ; il s'agit de rembourser des soins que les soignants sont juridiquement et éthiquement tenus de dispenser.
Ce n'est ni un robinet ouvert, ni le symptôme d'un eldorado du tourisme médical, mais un outil de santé publique qui doit être encadré, comme les autres.
Le Sénat pointe toutefois une programmation insincère : alors que les dépenses augmentent, les crédits stagnent. Soit on contraint la dépense, en se dotant d'outils, soit on assume son niveau réel.
Une AME mieux maîtrisée passe par l'extension raisonnable de l'accord préalable pour les soins programmés, comme la commission l'a proposé. Mais cela ne doit pas être un cheval de Troie pour transformer l'AME en simple aide médicale d'urgence, qui conduirait les plus précaires à renoncer massivement aux soins. Ces patients réapparaîtront aux urgences plus tard, dans un état bien plus grave...
Sommes-nous capables d'assumer ce que nous faisons, en le finançant sincèrement et en le contrôlant avec sérieux ? C'est la ligne que défend le groupe UC. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP)
M. Daniel Chasseing . - Si l'on ne tient pas compte des abondements des fonds européens, les crédits stagnent.
Le programme 204, doté de 213 millions d'euros, est stable par rapport à 2025 et en diminution par rapport à 2024. La dotation à l'Inca est en hausse de 22 % pour permettre la mise en oeuvre du registre national des cancers, ce dont nous nous réjouissons, trois ans après le vote du Sénat et alors que le cancer est la première cause de décès.
Le programme 379 permet le versement à la sécurité sociale de 242 millions d'euros de crédits européens pour le Ségur.
Les dépenses d'AME ont augmenté de 6 % par an entre 2009 et 2020 et de 40 % entre 2021 et 2025. Les crédits sont stables, mais les dépenses réelles plus élevées. Comme les bénéficiaires sont remboursés quel que soient le montant des crédits budgétés, on atteint en 2025 un montant cumulé de dette à la sécurité sociale de 362 millions d'euros. La prévision de dépense pour 2025 semble être plutôt de 1,3 milliard d'euros que de 1,2 milliard comme budgété. D'autant que le nombre de bénéficiaires augmente : entre 2021 et 2023, il a crû de 20 %, pour atteindre 461 000.
Une baisse des dépenses est-elle possible en limitant l'accès aux soins non urgents comme le proposait le rapport Évin-Stefanini ? On peut envisager de soumettre certains soins à un accord préalable, par exemple. Avec plusieurs de mes collègues, nous voterons les amendements de nos rapporteurs : l'un qui étend le régime de l'accord préalable de l'assurance maladie à une liste de soins non urgents ; l'autre qui minore de 200 millions d'euros les crédits. Bien entendu, les personnes seront soignées, même si les dépenses dépassent l'enveloppe budgétaire.
Il n'est pas interdit de rationaliser ces dépenses. Notre groupe sera prêt à voter des propositions dans ce sens, sous réserve qu'elles respectent un équilibre entre humanisme et réalisme et qu'elles permettent de lutter contre les abus. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)
Mme Marie-Do Aeschlimann . - (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) Hors programme 379, les crédits de la mission sont stables.
Le programme 183, doté de 1,2 milliard d'euros, concentre l'essentiel des crédits, très éloignés cependant des dépenses réelles - 1,387 milliard d'euros en 2024. Pas moins de 400 millions d'euros de dette cumulée envers la sécurité sociale sont attendus à la fin de l'année 2025.
La question de l'AME doit être adressée sans tabou. En 2023, la Première ministre Borne s'était engagée à faire évoluer cette aide ; en septembre dernier, le Premier ministre Bayrou a annoncé une réforme ; puis le Premier ministre Lecornu a dit vouloir en durcir l'accès ; il faut maintenant passer aux actes, car il est urgent de juguler cette dépense.
Le nombre de bénéficiaires a triplé en vingt ans, passant de 154 000 en 2004 à 465 000 aujourd'hui. Le rapport IGF-Igas de 2019 a montré que la migration pour soins était loin d'être marginale, concernant un quart des personnes en situation irrégulière. Le rapport de Vincent Delahaye fait apparaître que 14 % des bénéficiaires sont des déboutés du droit d'asile et que plus de 5 800 d'entre eux sont un risque pour l'ordre public...
Le panier de soins de l'AME est quasiment identique à celui de l'assurance maladie. Les soins sont gratuits, sans reste à charge ni autorisation préalable. La France a-t-elle les moyens d'offrir le système le plus généreux d'Europe ? Nous ferions mieux de nous inspirer de nos voisins, qui concilient humanité et responsabilité budgétaire.
Il est regrettable que la dérive de cette dépense de guichet qui déraille ne soit pas jugulée. Pourtant des pistes existent, dont celles du rapport Évin-Stefanini et de celui de notre collègue Delahaye : l'exécutif doit s'en saisir.
L'instauration d'un accord préalable pour les soins non urgents, telle que proposée par notre commission des affaires sociales, permettrait d'économiser 200 millions d'euros. Recentrer l'AME sur les soins urgents serait conforme à sa philosophie d'origine. J'ai déposé un amendement fléchant ces économies sur des actions de prévention.
Justement, la prévention est l'autre priorité de cette mission, via le programme 204. On note une hausse de la dotation de l'Inca, pour la mise en place du registre national du cancer. Alors que l'Inca en évalue le coût à 6 millions d'euros, seuls 4,6 millions lui sont délégués. La lutte contre le cancer - première cause de décès chez l'homme, deuxième chez la femme - doit rester une priorité nationale.
Une dépense publique maîtrisée, ce n'est pas moins de solidarité, mais la condition de sa pérennité. Le groupe Les Républicains votera les crédits de la mission. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)
M. Martin Lévrier . - Ce budget est en trompe-l'oeil : hors reversement à la sécurité sociale des fonds européens, les crédits sont stables.
Le programme 204, qui ne porte que 13 % des crédits, est pourtant décisif pour la prévention, la sécurité sanitaire et l'organisation de l'offre de soins. Les besoins explosent - vieillissement, maladies chroniques, inégalités territoriales - , mais les crédits diminuent très légèrement, après une baisse beaucoup plus substantielle l'an dernier.
Nous nous réjouissons de la hausse de plus de 9,6 millions d'euros de la dotation de l'Inca. Le registre national des cancers est essentiel.
L'agence de santé de Wallis-et-Futuna est en situation financière fragile. La construction d'un hôpital à Futuna, qui permettra de limiter les évacuations sanitaires vers la Nouvelle-Calédonie et l'Hexagone, est une bonne chose. Notre collègue Kulimoetoke nous alerte souvent sur les besoins de son territoire.
Nous nous réjouissons de l'amendement du Gouvernement visant à créer des places en instituts de formations sanitaires et sociales.
Le programme 183, presque intégralement consacré à l'AME, voit ses crédits reconduits à l'identique. C'est devenu, au Sénat, un totem politique. Nous assistons aux mêmes surenchères, caricatures et amalgames chaque année, alors qu'il s'agit d'un dispositif de santé publique qui permet d'éviter des renoncements aux soins, des risques épidémiques et des hospitalisations tardives et coûteuses.
Les amendements de la commission des finances fragiliseront l'accès aux soins, alors qu'un panier de soins existe déjà et qu'un accord préalable est demandé pour certains soins. Évitons les vieilles rengaines et les complexifications inutiles. S'il doit y avoir un débat pour trouver des économies, que celui-ci porte sur l'ajustement du panier ou des critères de santé publique, sans jeter la suspicion sur les plus précaires.
Les deux projets de décrets de la ministre sont conformes à l'équilibre entre impératif sanitaire, responsabilité budgétaire et lisibilité du droit auquel nous sommes attachés. Le RDPI s'abstiendra sur ces crédits tels qu'issus de nos débats.
Mme Laurence Rossignol . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Nous ne trouvons pas dans ce budget les moyens qu'il faudrait consacrer au fameux virage de la prévention que nous défendons.
Je me réjouis que l'Anses ait échappé à la tronçonneuse de la commission spéciale de l'Assemblée nationale chargée d'examiner le projet de loi Simplification de la vie économique, qui a préconisé la suppression de presque toutes les agences indépendantes. L'Anses était dans le viseur, sous prétexte que parler de sécurité sanitaire mettait en danger la compétitivité de l'agriculture française.... Pourtant, nous n'avons jamais eu autant besoin de cette agence, qu'il s'agisse des PFAS ou de la santé au travail.
Je déplore un manque de moyens pour la prévention du VIH ou des risques liés au chemsex et préconise la création d'une agence de la santé sexuelle et reproductive qui permettrait de piloter cette politique.
L'AME est un marronnier, une obsession de la majorité sénatoriale, qui préfère l'affichage politique à l'efficacité budgétaire et sanitaire.
Levons certains fantasmes.
Non, l'AME ne rembourse pas de soins non essentiels, procréation médicalement assistée (PMA), cures thermales ou chirurgie esthétique. Cinq personnes en 2023 se sont fait recoller les oreilles ; depuis, on en parle tout le temps, comme si c'était le quotidien des bénéficiaires de l'AME. Or ils font surtout l'objet de soins obstétriques, de dialyses et de chimiothérapies.
Seules 0,5 % de nos dépenses de santé sont consacrées à l'AME. C'est loin d'être exorbitant. L'AME coûte moins cher que son absence. Les médecins ont déjà prévenu : le serment d'Hippocrate leur impose de soigner tout le monde. Écoutons-les !
Non, l'AME ne contribue pas aux fameux appels d'air migratoires, puisque 50 % de ses potentiels bénéficiaires ne font jamais valoir leurs droits.
Comme chaque année, au lieu de parler de prévention, on agite un chiffon rouge qui ne vise peut-être qu'à rapprocher la droite de l'extrême droite... Je n'invente rien, je ne fais que répéter ce que dit Nicolas Sarkozy. Le groupe SER votera contre ces crédits (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
Mme Céline Brulin . - Le contexte est particulier : celui de l'adoption du PLFSS à l'Assemblée nationale, qui ne revient sur aucune des exonérations de cotisations aux effets pourtant plus que douteux sur l'emploi. Pendant ce temps, les collectivités territoriales et SDIS voient leurs cotisations augmenter à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL).
Les difficultés d'accès aux soins continuent de progresser. La situation ne s'améliorera pas en 2026, puisque les crédits de cette mission ne progressent qu'en raison de la suppression de l'éphémère programme 379.
Les politiques d'austérité ont abîmé notre service public de santé. Elles alimentent les crises futures et font exploser le déficit des hôpitaux.
La mission prévoit une baisse de 14 % des crédits de pilotage de la politique de santé publique, soit 8 millions d'euros en moins pour 2026. Cela fait écho aux annonces sur les ARS. Le Premier ministre a en effet déclaré vouloir déplacer une partie des missions des ARS vers les départements. Pas moins de onze anciens ministres de la santé se sont prononcés contre. Souvent critiques des ARS, nous sommes prêts à débattre de l'architecture la plus pertinente, mais ce qui a été annoncé ressemble plus à un transfert de responsabilités pour alléger les finances de l'État qu'au souhait d'assurer un pilotage de proximité. Pourtant, c'est l'échelon local qui est le plus pertinent pour définir des politiques publiques de santé.
Le principal problème des ARS est qu'au lieu de planifier, elles sont tenues de faire appliquer l'austérité dans les régions.
L'AME est instrumentalisée à des fins politiciennes peu glorieuses. On compte 465 000 bénéficiaires, mais un taux de non-recours de 49 %. Réduire le budget de l'AME entraînerait inévitablement des surcoûts pour nos hôpitaux déjà asphyxiés. Nous estimons que l'AME devrait être intégrée au régime général de la sécurité sociale.
Nous regrettons le manque d'ambition pour le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante.
Le CRCE-K ne votera pas ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)
Mme Anne Souyris . - (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Colombe Brossel applaudit également.) Madame la ministre, j'ai une mauvaise nouvelle.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - S'il n'y en avait qu'une...
Mme Anne Souyris. - Étant donné votre département de résidence, vous avez une espérance de vie moindre que tous les orateurs qui m'ont précédée. Selon une étude européenne, 44,5 % des moins diplômés sont en mauvaise santé, contre 21,2 % des diplômés du supérieur. En cause, l'inégalité dans l'accès aux soins et les déterminants environnementaux.
Les crédits de cette mission affichent une faible hausse, mais rapportés à l'inflation, ils diminuent. Plus que jamais, la prévention, la sécurité sanitaire et l'offre de soins doivent être renforcées.
Les crédits de la prévention n'augmentent que de 0,98 %, après une baisse de 22 % l'an dernier. L'absence de prévention entraîne toujours des coûts supérieurs.
La santé environnementale doit être une priorité. L'Anses a révélé que l'acide trifluoroacétique (TFA), un résidu des substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), était présent dans 92 % des eaux testées. Nous y reviendrons. Les risques liés aux PFAS sont multiples. Il faudra agir, chers collègues, et pas seulement regarder les trains passer, sous peine de sacrifier les générations futures.
La prévention est un enjeu de santé majeur. Nous souhaitons étendre l'ordonnance verte strasbourgeoise à tous les territoires.
L'État veut-il la mort des associations de lutte contre le VIH ? Le ministère a annoncé une coupe de 20 % dans leurs subventions. Si vous voulez vraiment la fin du VIH en France, votez notre amendement.
Je m'étonne de la stabilité des crédits de l'AME, alors que les dépenses augmentent mécaniquement, tant il devient difficile pour un étranger d'avoir un rendez-vous en préfecture. (Mme Cathy Apourceau-Poly le confirme) Ne cédons pas à une droite qui s'éloigne toujours plus des valeurs républicaines. Les amendements des rapporteurs sont inquiétants. Réduire le panier de soins et élargir les accords préalables est incompatible avec nos principes de solidarité. C'est inefficace et coûte plus cher in fine.
Ce budget n'est pas à la hauteur des enjeux, il ne protège pas mieux. Par nos amendements, nous défendrons les plus fragiles, la santé environnementale et la prévention. (Applaudissements sur les travées du GEST)
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées . - Cette mission incarne, à côté du budget de la sécurité sociale, notre ambition pour un système de santé plus solide, plus innovant et plus proche des attentes des Français. Les crédits atteignent 1,67 milliard d'euros.
Le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » se voit affecter 214 millions d'euros en CP. Il a pour objet de coordonner nos opérateurs, l'Inca et l'Anses. La dotation de l'Inca augmente de 9,6 millions d'euros pour prendre en compte le bon déploiement des registres nationaux du cancer, prévus par une récente loi.
Le soutien à la recherche et l'innovation est essentiel. Il faut soutenir les travaux interdisciplinaires. Le programme 204 finance des initiatives portées par des acteurs institutionnels et associatifs.
Nous voulons aussi renforcer la gestion des crises sanitaires. Cela passe par la formation des agents, l'appui à Corruss (centre opérationnel de régulation et de réponse aux urgences sanitaires et sociales) et la constitution de stocks stratégiques européens.
Le programme participe aussi à la modernisation de l'offre de soins. Nous défendons, avec le Premier ministre, la création du réseau France santé. Nous renforçons les services d'accès aux soins.
Concernant l'outre-mer, le Gouvernement déposera un amendement pour financer l'acquisition d'un scanner à Wallis-et-Futuna et garantir le fonctionnement de son agence de santé.
Le Gouvernement défendra un amendement pour augmenter les crédits de 215 millions d'euros, afin de financer de nouvelles places en institut de formation en soins infirmiers (Ifsi).
Le programme 183 traduit l'effort de la solidarité nationale pour les plus vulnérables. Il s'agit en particulier de financer le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) et l'AME. Ces crédits sont reconduits avec les mêmes montants depuis la loi de finances 2024.
L'AME a un triple objectif : humanitaire, sanitaire et budgétaire. Elle contient la propagation de maladies contagieuses et favorise une prise en charge précoce qui évite des hospitalisations tardives, plus coûteuses. Claude Évin et Patrick Stefanini ont formulé des propositions pour prévenir les abus. Les travaux doivent se poursuivre.
Le programme 379 permet de reverser à la sécurité sociale les crédits européens. Quelque 6 milliards d'euros sont investis sur cinquante ans dans nos établissements de santé et Ehpad et dans des outils numériques en santé.
Nous conjuguons redressement des finances publiques et garantie des droits pour les plus vulnérables. Nous oeuvrons pour la prévention, la sécurité sanitaire et une offre de soins de qualité sur tout le territoire. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Examen de crédits de la mission Article 49 - État B
M. le président. - Amendement n° II-2075 rectifié du Gouvernement.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Cet amendement augmente de 215 millions d'euros les crédits du programme 204 pour financer les créations de places en Ifsi dans les régions.
M. le président. - Amendement n° II-2032 de M. Ouizille.
L'amendement n°II-2032 n'est pas défendu.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Un protocole État-région a été signé en 2022 pour trois ans. Il est aujourd'hui achevé. La formation professionnelle relève a priori de la compétence des régions. L'amendement demande la poursuite du cofinancement.
En première partie, nous avons voté 214 millions d'euros d'aide pour les régions. N'allons pas voter deux fois cette aide ! Retrait.
M. Hussein Bourgi. - La présidente de Régions de France et tous les autres présidents de région ont un accord avec le Gouvernement. Pourquoi venir devant le Sénat proposer des sommes à la baisse ? Ce n'est pas une manière de faire. Nous ne comprenons pas cette duplicité.
Mme Anne Souyris. - Le GEST votera cet amendement, car nous avons besoin de soignantes et soignants dans nos territoires. Une question cependant : quelle est la politique du Gouvernement sur la formation en santé ? Défendrez-vous les propositions de loi du Parlement ? Quid des écoles normales des métiers de la santé ? Nous avons beaucoup de questions !
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Le protocole État-région prenait fin en 2025. François Bayrou avait pris des engagements que nous traduisons. Le risque de doublon entre première et deuxième partie sera résolu dans la navette.
L'amendement n°II-2075 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1684 de Mme Brulin et du groupe CRCE-K.
Mme Céline Brulin. - Cet amendement étend la prime Ségur à certaines catégories de personnel. Il a fallu plaider la cause de professions les unes après les autres, mais il reste encore des oubliés.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Avis défavorable. Nous ne contestons pas les besoins de rémunération de certains soignants, mais il faut rappeler que le Ségur de la santé a coûté 14 milliards d'euros, non financés. Ces dispositions relèvent de la sécurité sociale et non de la mission « Santé ».
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis, notamment pour des raisons juridiques.
M. Daniel Chasseing. - Cet amendement est fondé, même s'il n'est pas proposé au bon endroit. Il reste des personnels qui ne bénéficient pas du Ségur, malgré les promesses. Certes, les 14 milliards n'ont pas été financés.
Mme Céline Brulin. - Quand les salaires ne sont pas revalorisés régulièrement, on se retrouve devant un mur budgétaire. Si les mesures du Ségur étaient du salaire et non des primes, elles entraîneraient des cotisations supplémentaires à la sécurité sociale.
L'amendement n°II-1684 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2057 de Mme Souyris et alii.
Mme Anne Souyris. - Le Ségur de la santé était une mesure d'équité, mais pour nombre de structures associatives, c'est devenu un fardeau insoutenable. Elles n'ont reçu aucune compensation pérenne pour financer cette prime qui représente 5 000 euros par employé. Seules 6 % des associations peuvent assumer cette charge. Pour le planning familial d'Ille-et-Vilaine, c'est 60 000 euros par an.
L'État a annoncé l'extension du Ségur : à lui d'assumer. Il manque 450 millions d'euros côté ARS, 85 millions d'euros côté départements.
Soutenir ces associations, c'est soutenir la prévention et la lutte contre les inégalités. Ne laissons pas mourir nos associations.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Même avis que précédemment : avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis.
L'amendement n°II-2057 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2332 du Gouvernement.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Cet amendement prévoit 6 millions pour un nouveau scanner à l'hôpital de Mata-Utu et pour sécuriser le budget de fonctionnement de l'agence de santé de Wallis-et-Futuna.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Nous avons eu connaissance de cet amendement juste avant la séance publique.
Il me surprend. La situation de l'agence de Wallis-et-Futuna est connue depuis longtemps. Il faut transporter des patients jusqu'en Nouvelle-Calédonie voire en métropole, ce qui coûte cher. Cette sous-budgétisation est connue de longue date. Il faudrait une structure sur place qui permette de déplacer les soignants et non les patients, ce qui entraînerait des économies à terme. À titre personnel, sagesse.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Dans le PLFSS, nous avons ajouté 100 millions d'euros supplémentaires dans le fonds d'intervention régional (FIR) pour les outre-mer. Wallis-et-Futuna n'a pas d'agence régionale de santé, il est donc cohérent d'accorder cette aide.
L'amendement n°II-2332 est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1107 de M. Hochart et alii.
L'amendement n°II-1107 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°II-1099 de M. Hochart et alii.
L'amendement n°II-1099 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°II-27 de M. Delahaye, au nom de la commission des finances.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Les moyens sont insuffisants pour faire face aux dépenses réelles de l'AME. Nous ne préconisons pas sa suppression, mais une meilleure régulation. Nous pourrions nous aligner sur l'Allemagne, qui est un pays solidaire.
Le décalage est de 200 millions d'euros. Pour le réduire, madame la ministre, il faudrait prendre un décret afin de revoir le panier de soins d'urgence et les conditions d'éligibilité. Je défendrai un article additionnel au nom de la commission pour que l'accord préalable de la CPAM soit exigé, quelle que soit la durée du titre de séjour - je ne parle que des soins non urgents.
M. le président. - Amendement identique n°II-1412 de Mme Lassarade, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Pascale Gruny. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°II-299 rectifié septies de Mme Aeschlimann et alii.
Mme Marie-Do Aeschlimann. - Cet amendement réduit de 200 millions d'euros les crédits de l'AME pour recentrer le panier de soins sur les soins vitaux et urgents, en accord avec ce qui se fait dans les autres pays européens. L'AME ne coûtait que 678 millions d'euros en 2015. Le nombre de bénéficiaires a été multiplié par trois en vingt ans. La prise en charge est intégrale, sans reste à charge, y compris pour des soins non urgents. (Mme Émilienne Poumirol proteste.) Revoir le panier de soins serait source d'économies.
Cet amendement flèche aussi 50 millions d'euros vers les dépenses de prévention.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Retrait. J'ignore si cet amendement complète les deux amendements de la commission des lois et de la commission des finances. Même montant, mais objet différent : réduction du panier de soins, et non accord préalable.
Quel est l'avis du Gouvernement ? Que compte-t-il faire s'agissant de l'AME ? Prendrez-vous enfin des mesures ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Retrait, sinon avis défavorable aux amendements concernant l'AME. Les travaux autour du rapport Évin-Stefanini sont en cours.
Mme Valérie Boyer. - Il faut voter ces deux amendements. C'est du bon sens. Cela fait dix ans que ça dure et qu'on discute. (M. Thomas Dossus s'exclame.) Les Français en ont assez qu'on leur demande des efforts, ils sont à bout ; et nous savons qu'il y a tant d'abus sur l'AME !
Mme Corinne Féret. - C'est faux !
Mme Valérie Boyer. - Il faut prendre des décisions. L'amendement de Mme Aeschlimann est un amendement de bon sens que nous adoptons depuis des années. Il répond aux attentes de tous, aussi je ne comprends même pas la demande de retrait. La pression monte !
Mme Laurence Rossignol. - La pression, c'est vous qui la créez.
Mme Valérie Boyer. - Nous demandons juste de restreindre le panier de soins à l'instar des autres pays européens.
Mme Émilienne Poumirol. - Nous nous opposerons fermement à ces deux amendements qui ne relèvent pas du bon sens, mais d'un dogme ou d'un chiffon rouge. Qu'entendez-vous par « urgence » ? Ceux qui vont mourir dans l'heure ? Est-ce à dire que nous laisserons de côté des personnes atteintes de cancer et qui doivent suivre des traitements ? (Mme Laurence Rossignol renchérit.)
Mme Corinne Féret. - Vous avez une vision caricaturale de la situation. Vous dites que cela fait dix ans qu'on n'en peut plus. L'AME, c'est 0,05 % des dépenses de santé. Le taux de non-recours est de 49 %, c'est très élevé. Ceux qui recourent à l'AME devraient-ils culpabiliser ? Il est faux de dire que les abus sont importants.
Les restrictions concernent l'obstétrique, la dialyse, la chimiothérapie, la radiothérapie... Ce n'est pas urgent ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)
Mme Anne Souyris. - Cette notion d'urgence implique deux questions. La première est humaniste : quand soigne-t-on quelqu'un ? On peut vivre avec une jambe cassée ; mais en cas d'infection ?
Deuxième question : si l'on soigne tardivement, on soigne plus cher.
C'est donc une double peine : une peine de démocratie et de dignité, mais aussi une peine budgétaire. Nos hôpitaux, déjà sous l'eau, devront éponger la dette.
M. Daniel Chasseing. - Il n'est pas question de remettre en cause toutes les affections de longue durée (ALD). En revanche, les prothèses de genou ou de hanche ne sont pas des urgences.
Mme Émilienne Poumirol. - Mais il y a déjà un protocole pour cela !
M. Daniel Chasseing. - Un protocole est effectivement prévu, tout comme une condition de neuf mois de résidence. Mais les contrôles devraient être plus approfondis.
Voter ces amendements empêche-t-il de soigner les gens ? L'État les prendra en charge de toute façon. Nous pouvons cependant tenter de réduire les soins pris en charge au titre de l'AME en contrôlant plus.
Mme Céline Brulin. - Ces arguments sont surprenants. Le budget est insincère en raison de dépenses d'AME plus importantes que ce qui est budgété... Et vous en diminuez les crédits ! Mais à défaut de nous écouter, nous, sur ces bancs, écoutez les professionnels de santé ! Si vous n'écoutez pas ce que votre humanité vous dicte, écoutez vos aspirations à faire des économies.
Dans la plupart des cas, l'assurance maladie donnera son accord à ces soins, aussi cela ne coûtera pas moins cher.
Voilà pourquoi je parle d'instrumentalisation politicienne. Nous devrions en débattre sereinement ; ce n'est pas le cas - c'est regrettable.
M. Laurent Somon. - Cela fait deux ans que nous le demandons.
M. Olivier Rietmann. - On l'a eu, ce débat !
Mme Marie-Do Aeschlimann. - Personne n'est là pour distribuer des brevets d'humanité. Nous fixons des règles et des protocoles à respecter, et nous n'en sommes pas moins humains.
Mme Valérie Boyer. - Bravo !
Mme Marie-Do Aeschlimann. - Réguler l'AME comme je le propose n'est pas exclusif des amendements des deux commissions. Le potentiel d'économies de 200 millions d'euros est bien réel.
J'ai apprécié les propos de Daniel Chasseing qui souligne qu'il s'agit d'une dépense de guichet. Actuellement, 1,2 milliard d'euros de crédits sont ouverts ; or aujourd'hui, 1,387 milliard de crédits ont été consommés. Il faut donc encadrer cette dépense. (Mme Émilienne Poumirol s'exclame.) Nous demandons à nos concitoyens de faire des efforts ; les bénéficiaires de l'AME doivent aussi en faire. (Mme Corinne Féret proteste.)
Sébastien Lecornu a déclaré qu'il n'était pas favorable à la suppression de l'AME, mais à des mesures techniques pour l'encadrer. C'est ce que je propose.
M. Martin Lévrier. - Tout le monde veut conserver l'AME. Voilà une bonne nouvelle !
Mme Sophie Primas. - Ceux qui veulent la supprimer ne sont pas là !
M. Martin Lévrier. - Ensuite, attention à ne pas confondre réalité et ressenti - 0,5 % des dépenses de l'assurance maladie, c'est bien peu - , sans quoi on transforme un débat de santé publique en débat politique qui pourrait dériver vers des sujets un peu malsains.
Je ne suis pas médecin. Le rôle d'un parlementaire n'est pas de savoir ce qui relève de l'urgence médicale, mais de savoir comment tout cela fonctionne, et comment éventuellement réduire la dépense. (Mme Valérie Boyer proteste.) Je ne suis pas compétent en tant que parlementaire pour définir ce qui doit être dans le panier de soins. Comme l'a dit la ministre, prenons le temps de travailler sur les conclusions du rapport Évin-Stefanini.
Mme Laurence Rossignol. - Il est très bien, Lévrier !
Mme Annie Le Houerou. - Cet amendement est dogmatique, et il stigmatise les bénéficiaires.
Rappelons la position de la grande majorité des médecins et de huit anciens ministres de la santé (M. Olivier Rietmann s'exclame.) qui ont mis en garde contre la remise en cause de l'AME.
M. Thomas Dossus. - Cela fait des années que nous débattons ainsi. Vous vous acharnez à vouloir réduire l'AME pour consolider votre discours raciste qui veut faire peser sur les étrangers les efforts budgétaires. (Vives protestations à droite)
M. le président. - Ne vous adressez pas ainsi à vos collègues.
M. Thomas Dossus. - Nous appelons un chat un chat ! Vous faites porter les efforts budgétaires toujours sur les mêmes, et jamais sur ceux qui ont le plus bénéficié des cadeaux du Gouvernement.
Ces économies ne sont même pas garanties, car vous allez reporter le coût des pathologies sur l'hôpital. Nous combattrons chaque année ce type d'amendement.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Quelques réponses.
Certains disent que 49 % des potentiels bénéficiaires n'y recourent pas. Toutes les personnes en situation irrégulière sur notre territoire n'ont pas besoin de soins ; la plupart sont jeunes, c'est donc logique qu'ils n'aillent pas chercher leur carte d'AME. D'autres font valoir les files d'attente en préfecture, or c'est à la CPAM qu'on la retire. J'y suis allé, et les choses se passent très bien.
Ensuite, nous voulons modifier l'AME, pas la supprimer. L'Allemagne et d'autres pays ont des paniers de soins non urgents plus restreints que les nôtres, excluant les actes de masso-kinésithérapie, les actes de réadaptation, l'appareillage auditif, la pose de prothèses dentaires...Ce ne sont pas des actes urgents.
Madame Aeschlimann, votre amendement est satisfait par les amendements des deux commissions. Ils tiennent compte du panier de soins et reposent aussi sur un accord préalable avant de bénéficier des soins. Retrait de l'amendement.
M. Jean-Raymond Hugonet. - Rappel au règlement sur la base de l'article 33. Monsieur Dossus, insulter des collègues en les traitant de racistes est inadmissible.
M. Thomas Dossus. - Je qualifie une démarche.
M. Jean-Raymond Hugonet. - La démarche est initiée par des individus. Un peu de mesure, s'il vous plaît.
À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nosII-27 et II-1412 sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°113 :
| Nombre de votants | 341 |
| Nombre de suffrages exprimés | 336 |
| Pour l'adoption | 200 |
| Contre | 136 |
Les amendements identiques nosII-27 et II-1412 sont adoptés.
L'amendement n°II-299 rectifié septies n'a plus d'objet.
M. le président. - Amendement n°II-1683 de Mme Brulin et du groupe CRCE-K.
Mme Céline Brulin. - Cet amendement pointe les déficits chroniques de nos hôpitaux. Selon la Fédération hospitalière de France (FHF), le déficit serait compris entre 2,7 et 2,9 milliards d'euros.
Le sous-financement est chronique. Ces déficits viennent de la non-compensation des mesures du Ségur de la santé et de la hausse des cotisations à la CNRACL. Il est temps de donner des moyens aux hôpitaux pour compenser des décisions prises par l'État.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Cet amendement alloue 1 milliard d'euros aux hôpitaux. Le déficit atteint des records : presque 3 milliards d'euros. Le financement des hôpitaux relève largement du PLFSS. Or le PLFSS adopté à l'Assemblée nationale prévoit une hausse de 3,5 milliards d'euros des crédits par rapport à 2025. Pour garantir des tarifs stables à l'hôpital, le Premier ministre a accordé 850 millions d'euros supplémentaires.
En outre, le milliard d'euros demandé est pris sur l'AME. Au regard de l'attachement de Mme Brulin à l'AME, me voilà surpris.
Mme Céline Brulin. - Vous connaissez les règles budgétaires !
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - La reprise du déficit des hôpitaux devrait être faite par la Cades. Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Nous en avons débattu lors de la première lecture du PLFSS. L'Ondam hospitalier augmentera de 3,3 %. Nous retrouverons une trajectoire correcte pour nos hôpitaux.
Mme Céline Brulin. - Monsieur le rapporteur, j'imagine que c'était un trait d'humour que de relever sur quelle ligne ces crédits étaient pris... Ce n'était qu'une invitation à lever le gage.
L'amendement n°II-1683 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-377 rectifié ter de M. Théophile et alii.
M. Martin Lévrier. - Nous renforçons les moyens des Maisons de femmes, dernier rempart pour les victimes de violences conjugales.
Les chiffres sont effrayants : une femme tuée tous les quatre jours.
Cet amendement ajoute 5 millions d'euros au programme pour garantir un accompagnement digne de ce nom. C'est une nécessité absolue.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Le financement de cette association importante me semble relever davantage de la mission « Solidarités ». Retrait sinon avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Merci d'attirer l'attention sur les Maisons des femmes. Le PLFSS y consacre 8,7 millions d'euros. Retrait sinon avis défavorable.
L'amendement n°II-377 rectifié ter est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-1228 rectifié bis de M. Théophile et alii.
M. Martin Lévrier. - Les maisons sport-santé (MSS) sont un acteur majeur de la prévention. Mais leur modèle économique est fragilisé par le recours aux CDD et les disparités d'une région à l'autre. Il faut une dotation socle nationale pour un fonctionnement stable. L'investissement est de 5 millions d'euros.
M. le président. - Amendement n°II-1235 rectifié bis de M. Théophile et alii.
M. Martin Lévrier. - Cet amendement soutient les personnes les plus éloignées de la prévention, qui cumulent les facteurs de risque mais bénéficient le moins des dispositifs existants. Nous augmentons de 2 millions d'euros les actions ciblées des MSS.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Les MSS relèvent autant de l'État que des collectivités. Le financement par l'État est passé de 9,3 millions à 16,5 millions d'euros en 2025. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis.
L'amendement n°II-1228 rectifié bis est retiré de même que l'amendement n°II-1235 rectifié bis.
M. le président. - Amendement n°II-1234 rectifié bis de M. Théophile et alii.
M. Martin Lévrier. - Depuis 2016, l'activité physique adaptée sur ordonnance est un outil reconnu, mais faute de suivi, les bilans à trois et six mois sont appliqués de manière peu homogène selon les territoires. Plus de 200 000 usagers sont concernés. Nous allouons 3 millions d'euros pour financer ces bilans de façon plus homogène. Cela réduirait les risques de complication de 30 %.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Le financement des MSS ne relève pas de la mission « Santé ». C'est une question de réglementation plus que budgétaire. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Le Gouvernement soutient déjà les MSS et l'activité physique adaptée. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°II-1234 rectifié bis est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-2072 rectifié de M. Joly et alii.
Mme Émilienne Poumirol. - Nous proposons de rembourser les frais de transport des personnes résidant dans des déserts médicaux lorsqu'ils se rendent en consultation chez leur médecin généraliste. Cette expérimentation serait menée dans trois régions.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Cela relève plutôt du PLFSS. D'autres dispositifs sont plus adaptés, comme la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins dans les territoires, adoptée par le Sénat en mai dernier. Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis.
Mme Émilienne Poumirol. - Les départements fortement dotés en médecins continuent à l'être, les départements sous-dotés se désertifient toujours plus. Dans la Nièvre, département de M. Joly, les patients doivent parcourir des kilomètres pour consulter un généraliste.
M. Daniel Chasseing. - Cet amendement est pertinent. Les personnes en ALD qui ont perdu leur médecin et qui doivent parcourir de grandes distances pour consulter ne sont pas remboursées. C'est un amendement d'appel, mais le problème est réel en milieu rural.
L'amendement n°II-2072 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1425 rectifié bis de Mme Schillinger et alii.
M. Martin Lévrier. - Vous connaissez l'engagement de Mme Schillinger contre la précarité menstruelle. Il faut briser le tabou. Plusieurs collectivités ont voulu instaurer un congé menstruel, mais toutes ont vu leur décision annulée faute de base légale. La circulaire du 21 mai 2025 a encore verrouillé les choses.
Pourtant, les cas sont fréquents. Ne pas offrir de solution, c'est renvoyer les femmes vers les congés maladie et les jours de carence.
Cet amendement permet aux collectivités volontaires de délivrer des autorisations spéciales d'absence en cas de menstruations incapacitantes ou de symptômes liés à la ménopause, en toute sécurité juridique.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - L'absence de base légale semble avoir été palliée par une circulaire. Ce n'est pas une question financière : retrait, sinon avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Je suis assez sensible au sujet, ayant moi-même proposé dans mon rapport sur la ménopause que les managers soient formés à ce problème. Toutefois, les ressources humaines des collectivités ne relèvent pas du périmètre de cette mission. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Martin Lévrier. - Je retirerai l'amendement... (Mme Laurence Rossignol proteste.) Bien, je ne le retire pas. Mais les circulaires n'ont pas de valeur juridique.
M. Hussein Bourgi. - Non seulement la circulaire n'a pas de valeur juridique, mais à supposer que celle-ci soit respectée par les préfets, elle n'a aucune force contraignante pour les juridictions administratives. C'est pourquoi il faut aller plus loin. Aidez-nous à avancer sur ce point, madame la ministre.
Mme Laurence Rossignol. - L'amendement de Mme Schillinger a le mérite d'ouvrir le débat. Il faut porter la durée de validité des certificats médicaux à un ou deux ans, supprimer les jours de carence pour les salariés du privé et permettre aux collectivités qui le souhaitent d'instaurer un tel dispositif. Madame la ministre, nous attendons des solutions.
L'amendement n°II-1425 rectifié bis n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1685 de Mme Brulin et du groupe CRCE-K.
Mme Céline Brulin. - Nous créons un fonds national de prévention de l'usage récréatif du protoxyde d'azote doté de 20 millions d'euros. Les drames provoqués et les alertes des hôpitaux et du Samu sont connus. Il est temps d'agir.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Sans nier l'importance, bien au contraire, de cette question, il convient tout d'abord de bien appliquer la loi de 2021 qui interdit la vente de ce produit aux mineurs. En outre, les crédits de la prévention sont en hausse de 18 % - certains pouvant être fléchés sur cette problématique. Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Ce sujet est difficile. Nous avons tous autour de nous des jeunes à qui nous devons rappeler que c'est une drogue dangereuse qui peut provoquer des paralysies à vie !
C'est une attention collective que nous devons porter à ces jeunes. Il existe des campagnes de prévention comme « Le proto, c'est trop risqué d'en rire » ; le site internet parlons-proto.fr est également très bien conçu.
Le fonds de lutte contre les addictions est en outre doté de 130 millions d'euros. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Michel Masset. - Nous voterons cet amendement. Il est urgent d'apporter une réponse. Une proposition de loi d'Ahmed Laouedj a été votée par le Sénat, mais elle est en attente. Pourquoi ?
Mme Anne Souyris. - Nous voterons cet amendement. Une mesure de prévention majeure serait d'interdire la vente du protoxyde d'azote aux particuliers. Une proposition de loi en ce sens a été adoptée à l'Assemblée nationale. Bien sûr, on peut l'acheter sur internet, mais c'est plus difficile, notamment pour les mineurs. Actuellement, on peut en acheter dans n'importe quel supermarché.
Mme Émilienne Poumirol. - Sur tous les bancs, nous sommes tous d'accord sur l'urgence à agir. Il faut réserver ce gaz au seul usage médical. Madame la ministre, il est temps de nous proposer un projet de loi sur le sujet.
L'amendement n°II-1685 est adopté.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur plusieurs travées du groupe SER.)
M. le président. - Amendement n°II-1092 de M. Ouizille.
L'amendement n°II-1092 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°II-2056 de Mme Souyris et alii.
Mme Anne Souyris. - Rabot après rabot, les associations contre le VIH voient leur action menacée. Quand Aides prépare actuellement un plan de suppression de postes, c'est toute l'hypocrisie de ce gouvernement qui fait surface. C'est un choix politique de décider que la prévention, le dépistage et l'accès à la prophylaxie pré-exposition (PrEP) peuvent attendre. Pourtant, nous déplorons 3 400 nouvelles contaminations chaque année.
Nous augmentons de 3 millions d'euros les crédits afin de doter les associations d'un budget stable. Une France sans sida est possible ; elle est entre vos mains.
M. le président. - Amendement n°II-1452 rectifié de Mme Imbert et alii.
M. Laurent Somon. - Dans la même veine, nous abondons de 3 millions d'euros la prévention du VIH et des infections sexuellement transmissibles (IST).
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Mme Souyris évoque des coups de rabot. Mais le budget des actions de prévention augmente de 18 % cette année ! Presque 10 millions d'euros sont prévus pour le programme 204. Vos amendements sont satisfaits, il me semble : retrait, sinon avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis.
L'amendement n°II-2056 n'est pas adopté.
L'amendement n°II-1452 rectifié est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1957 rectifié de Mme Romagny et alii.
M. Daniel Chasseing. - Défendu.
L'amendement n°II-1957 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2061 de Mme Souyris et alii.
Mme Anne Souyris. - Une étude a révélé les effets du bisphénol S sur le comportement des bébés. Cela montre, s'il en était besoin, que nous devons nous doter d'une politique ambitieuse contre les perturbateurs endocriniens.
Connaissez-vous la Fédération française des trucs qui marchent ? Elle labellise des démarches innovantes mises en place par les collectivités territoriales. J'ai un truc qui marche à leur proposer : les ordonnances vertes, expérimentées à Strasbourg, qui permettent aux femmes enceintes d'obtenir chaque semaine un panier de fruits et légumes, ce qui les sensibilise aux risques des perturbateurs endocriniens.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Une ordonnance verte, pourquoi pas ? Mais cela me semble relever des autorités sanitaires plus que de la mission « Santé ». Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis.
L'amendement n°II-2061 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1681 de Mme Cukierman et du groupe CRCE-K.
Mme Céline Brulin. - Le gouvernement français s'est engagé auprès du gouvernement polynésien pour augmenter les financements d'un centre de prévention et de désintoxication alors que « l'ice » - une méthamphétamine - est de plus en plus consommée dans ce territoire, ciblant les plus jeunes.
L'amendement n°II-1681, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2060 de Mme Souyris et alii.
Mme Anne Souyris. - La stratégie nationale sur le chemsex doit être intégrée à la stratégie nationale sur la santé sexuelle.
Il faut renforcer les réseaux locaux et pérenniser les dispositifs ayant prouvé leur efficacité, comme le projet Accompagnement en réseau pluridisciplinaire amélioré-Chemsex, dit Arpa-Chemsex.
Nous manquons de données pour comprendre les trajectoires des usagers, évaluer les interventions et anticiper les risques liés aux nouvelles substances.
Madame la ministre, prenons ce sujet à bras-le-corps, sans tabou ni morale envers les pratiquants du chemsex. Les outils existent !
M. le président. - Amendement n°II-2055 rectifié bis de Mme Linkenheld et alii.
M. Hussein Bourgi. - Cet amendement évoque un sujet tabou, un vrai fléau qui provoque des dégâts personnels. Certaines personnes pensent augmenter leurs performances sexuelles en employant des produits stimulants. Je rends hommage à Jean-Luc Romero-Michel qui a connu ce drame dans son couple et a eu le courage de témoigner.
Nous proposons de financer une campagne de prévention contre le chemsex, qui est une drogue et qui, comme toutes les drogues, tue.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Il faut faire de la prévention sur ce sujet, mais les crédits du programme 204 sont suffisants pour financer une telle campagne. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis. Nous travaillons à l'amplification du projet Arpa-Chemsex. J'ai demandé au professeur Benyamina de formuler des recommandations opérationnelles.
L'amendement n°II-2060 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°II-2055 rectifié bis.
M. le président. - Amendement n°II-2058 de Mme Souyris et alii.
Mme Anne Souyris. - Nos territoires ruraux, 70 % de la surface de notre pays, sont les oubliés de la réduction des risques. Si l'accès aux substances psychoactives dangereuses est le même qu'en ville, ce n'est pas le cas pour l'accès aux soins, les centres médicaux étant trop éloignés. « L'aller-vers » fonctionne. Mais sans moyens, les actions sont sporadiques. C'était une préconisation du rapport sur les opioïdes.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Je vous rejoins sur l'intérêt de ce sujet. Mais ces centres reçoivent déjà 564 millions d'euros de l'assurance maladie. Retrait.
L'amendement n°II-2058 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2059 de Mme Souyris et alii.
Mme Anne Souyris. - La consommation de tabac tue 75 000 personnes en France chaque année : plus de 200 décès par jour. Depuis le 1er juillet, fumer aux abords des établissements scolaires, des bibliothèques et dans les parcs est interdit. Mais l'interdiction n'est pas forcément respectée. Il faut lutter contre l'image « cool » de jeunes fumant ou vapotant devant leur établissement. Nous prévoyons 300 000 euros pour lutter contre ce fléau.
L'amendement n°II-2059, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2030 de Mme de Marco et alii.
Mme Monique de Marco. - Plusieurs études démontrent qu'un scanner thoracique à faible dose chez les sujets à risque permet de détecter des cancers du poumon, améliorant la survie. En décembre 2022, le Conseil européen a encouragé les États membres à lancer des programmes pilotes. Plusieurs pays européens ont déployé un dépistage systématique. Mais les subventions versées à l'Inca sont en baisse depuis 2022. Il est temps de généraliser ce dépistage précoce.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Je suis attentive aux résultats des études en cours. Dans l'attente de leurs conclusions, retrait.
L'amendement n°II-2030 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1682 de Mme Cukierman et du groupe CRCE-K.
Mme Céline Brulin. - Défendu.
L'amendement n°II-1682, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2070 rectifié de Mme de La Provôté et alii.
Mme Sonia de La Provôté. - Le 23 juin 2025, le Parlement a définitivement adopté la proposition de loi sur le registre national des cancers. Le 9 décembre dernier, le Sénat adoptait l'amendement n°II-1894 de Mme Souyris visant à donner des moyens suffisants à l'Inca pour créer le registre.
En outre, le PLF prévoit une augmentation de la subvention versée à l'Inca de 9,5 millions d'euros, dont 4,2 millions découlent d'un changement de périmètre : le transfert de crédits auparavant attribués à Santé Publique France sont attribués à l'Inca, au titre de la gestion des registres locaux du réseau Francim, qui regroupe les données territorialisées sur l'évolution des cancers. Mon amendement annule ce transfert pour assurer la pérennité des registres locaux Francim. Il ne nuira pas au financement prévu pour l'Inca.
M. Vincent Delahaye, rapporteur pour avis. - J'entends les arguments de notre collègue qui connaît très bien ces sujets. Nous avons adopté les crédits de l'Inca. Je n'avais pas connaissance du prélèvement des 4,2 millions d'euros sur les registres locaux. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Il s'agit en quelque sorte d'une recentralisation des crédits pour que les registres soient établis au niveau de l'Inca. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Sonia de La Provôté. - Honnêtement, il n'y a aucune nécessité à transférer ces crédits vers l'Inca. Conservons le mode de financement actuel : cela sécurisera les registres locaux et le registre des cancers pédiatriques.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Sagesse.
Mme Nadia Sollogoub. - Cette question est technique. Mme de La Provôté maîtrise le sujet, je propose de suivre son avis. (M. Max Brisson renchérit.)
Mme Corinne Féret. - Notre groupe votera cet amendement. Nous devrions tous le voter, d'ailleurs.
Mme Anne Souyris. - Je voterai cet amendement. La création d'un registre national avait déjà été votée l'an passé. Mais le recentrage sur l'Inca posait problème. Cet amendement couvre l'ensemble du territoire.
M. Laurent Somon. - Devant l'urgence de cette disposition, nous voterons l'amendement de Sonia de La Provôté.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Ma tâche n'est pas facile... La recentralisation permet de regrouper non seulement les données de santé, mais aussi les données environnementales. Votre amendement retire des financements à l'Inca.
L'amendement n°II-2070 rectifié est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1645 rectifié bis de Mme Delattre et alii.
Mme Guylène Pantel. - Cet amendement corrige une injustice sanitaire dont sont victimes les patients exposés à l'acétate de cyprotérone et autres progestatifs de synthèse, qui risquent de développer des méningiomes.
L'Anses a prévu des mesures d'encadrement dès 2018, mais rien n'a été prévu pour les personnes déjà touchées. Des dispositions similaires ont été prises pour les victimes de la Dépakine et du Mediator.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Retrait.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis.
Mme Émilienne Poumirol. - Nous sommes nombreux à avoir été sollicités par des victimes de ces traitements, dont les effets secondaires sont problématiques. Prévoir une indemnisation me semble une piste intéressante. Le Gouvernement devrait se pencher sur ce dossier.
Mme Anne Souyris. - Nous sommes très favorables à cet amendement, mais le gage porte sur l'AME. Si le Gouvernement s'engage à lever le gage, nous le voterons ; sinon, nous nous abstiendrons.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Retrait, sinon avis défavorable
L'amendement n°II-1645 rectifié bis n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-1978 rectifié quater de M. Théophile et alii.
M. Martin Lévrier. - Cet amendement de bon sens étend la gratuité intégrale du dépistage du chlordécone aux Antillais résidant dans l'Hexagone.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Retrait, sinon avis défavorable
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Même avis.
L'amendement n°II-1978 rectifié quater n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2062 de Mme Souyris et alii.
Mme Anne Souyris. - L'Anses a relevé que l'eau potable est contaminée par le TFA, un PFAS toxique. Les normes sanitaires sont insuffisantes : madame la ministre, allez-vous le considérer comme un métabolite contre lequel il faut nous protéger ?
Antoinette Guhl a mis en lumière le scandale des eaux en bouteille. Finissons-en avec l'omerta sur les pollutions dans l'eau !
J'en profite pour saluer le travail de l'Anses, visée par des attaques qui rappellent le mouvement antiscience en vogue aux États-Unis. Sans elle, pas de politique de santé publique et de santé environnementale ! N'organisons pas le chaos en supprimant de telles agences.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Avis défavorable.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Votre demande est satisfaite. En nous appuyant sur la loi Thierry et sur les travaux de l'Anses, nous publierons un décret ajoutant le TFA et le 6:2-FTSA aux vingt PFAS à surveiller dans le cadre du contrôle sanitaire.
Mme Émilienne Poumirol. - Dans mon département de Haute-Garonne, les résultats sur la qualité de l'eau nous ont fait dresser les cheveux sur la tête ! Nous voterons cet amendement. L'Anses, qui joue un rôle majeur en matière de santé publique, est indispensable.
L'amendement n°II-2062 n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Santé », modifiés, sont adoptés.
Article 78
M. le président. - Amendement n°II-29 de M. Delahaye, au nom de la commission des finances.
M. Vincent Delahaye. - Il s'agit de justifier la baisse de 200 millions d'euros votée plus tôt. Le délai d'ancienneté de neuf mois serait supprimé pour appliquer le régime de l'accord préalable sur les soins non urgents à l'ensemble des bénéficiaires de l'AME.
M. le président. - Amendement identique n°II-1413 de Mme Lassarade, au nom de la commission des affaires sociales.
Mme Pascale Gruny. - Défendu.
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Avis défavorable.
À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nosII-29 et II-1413 sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°114 :
| Nombre de votants | 341 |
| Nombre de suffrages exprimés | 315 |
| Pour l'adoption | 197 |
| Contre | 118 |
Les amendements identiques nosII-29 et II-1413 sont adoptés et deviennent un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°II-380 rectifié bis de M. Théophile et alii.
M. Martin Lévrier. - Cet amendement corrige une lacune persistante : l'absence de programmation pluriannuelle pour les hôpitaux ultramarins. Les rapports récents de l'Igas, de la Drees et de la Cour des comptes montrent que les hôpitaux ultramarins figurent parmi les plus fragiles du pays. Il faut identifier les besoins et définir les interventions nécessaires.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. - Avis défavorable
Mme Stéphanie Rist, ministre. - Je présenterai prochainement les investissements pour les dix années à venir, afin que les équipes puissent se rassembler autour d'un projet de long terme.
Les investissements s'élèvent à 7,5 milliards d'euros pour l'ensemble du territoire. Les outre-mer ne sont pas oubliés, puisqu'ils ont reçu une enveloppe de 700 millions d'euros. Des crédits sont également prévus pour le CHU de la Guadeloupe. Retrait sinon avis défavorable.
L'amendement n°II-380 rectifié bis est retiré.
La séance est suspendue à 19 h 55.
Présidence de Mme Sylvie Robert, vice-présidente
La séance reprend à 21 h 30.
Mise au point au sujet d'un vote
Mme Marie-Claude Lermytte. - Lors du scrutin public n°112, Pierre-Jean Verzelen souhaitait s'abstenir.
Acte en est donné.
Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation
M. Marc Laménie, rapporteur spécial de la commission des finances . - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, du RDPI et au banc des commissions) Je salue ma collègue rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales et me félicite de la qualité du travail accompli par nos deux commissions sur la présente mission, qui prend cette année un nouveau nom : « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ». Opéré à périmètre constant, ce changement n'a pas de conséquences budgétaires.
Comme chaque année, les crédits baissent, sous l'effet de la démographie. Mais la diminution prévue pour 2026 est particulièrement forte : 120 millions d'euros. Le programme 169, qui regroupe la quasi-totalité des crédits, est doté de 1,73 milliard d'euros. Par ailleurs, les dépenses fiscales rattachés à la mission se montent à 563 millions d'euros, liés notamment à la demi-part fiscale des anciens combattants et conjoints survivants.
Les populations bénéficiaires de l'allocation de reconnaissance du combattant et de la pension militaire d'invalidité (PMI) - 1,08 milliard d'euros au total - continuent de baisser. Ces deux prestations ne sont pas revalorisées. À l'exception de ceux destinés au lien armée-jeunesse, tous les autres crédits de la mission sont en baisse.
En particulier, les crédits consacrés à la mémoire sont ramenés à 8 millions d'euros, une baisse prévisible compte tenu de la fin du cycle anniversaire des années 1944 et 1945, marqué par une programmation mémorielle forte. Les crédits d'entretien du patrimoine mémoriel sont stables, à 16,2 millions d'euros. Rappelons toutefois qu'ils ont été annulés à hauteur de 8 millions d'euros l'année dernière et le seront cette année au niveau de 4,4 millions d'euros, ce qui n'a pas permis de réaliser tous les travaux nécessaires sur le patrimoine de pierre. Je salue le travail accompli par le Souvenir français sous l'autorité du général Serge Barcellini.
Pour la première fois depuis la loi du 23 février 2022, l'effort de réparation en faveur des rapatriés recule, de 5,3 millions d'euros. Je proposerai de le maintenir au niveau de cette année.
S'agissant du lien armée-jeunesse, les crédits, stables, doivent permettre la généralisation de la journée défense et citoyenneté (JDC) nouvelle génération, recentrée sur sa dimension militaire et qui comportera notamment une cérémonie des couleurs, un tir sportif laser, un jeu de rôles et une immersion en réalité virtuelle, sans oublier une présentation du service militaire volontaire (SMV).
J'ai régulièrement souligné que les efforts demandés aux trois opérateurs de la mission, Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG), l'Institution nationale des invalides (INI) et l'Ordre de la Libération, devaient être soutenables. Cette année, je vous alerte sur leur situation. La subvention pour charges de service public du premier n'a pas été revalorisée pour tenir compte de l'inflation et des revalorisations salariales, sans compter que sa trésorerie a été ponctionnée. Les besoins sont importants aussi à l'INI, qui poursuit d'importants travaux immobiliers.
Je rends hommage aux bénévoles et aux porte-drapeaux qui oeuvrent au sein des associations patriotiques et de mémoire, ainsi qu'à tous nos militaires et membres des forces de sécurité.
Au nom de la commission des finances, je vous invite à voter les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, Les Républicains et UC)
Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales . - Je me réjouis du nouvel intitulé de la mission : c'est l'aboutissement d'une longue bataille pour l'expression « monde combattant ». Reste au ministère à suivre le même chemin...
Les crédits prévus pour 2026 sont en baisse de 6,27 %, à 1,7 milliard d'euros. Ce repli s'explique par la diminution du nombre de bénéficiaires de la PMI et des autres prestations versées, mais aussi par l'absence de revalorisation du point de PMI. Son évolution est indexée sur celle de l'indice de traitement brut de la fonction publique. Le Gouvernement se retranche derrière la stabilité de l'indice pour ne pas faire évoluer le point de PMI, en dépit d'une inflation de 1,1 % cette année.
L'absence de revalorisation pour le monde combattant n'est ni juste ni acceptable, alors que le gel général des pensions et allocations sociales a été rejeté par l'Assemblée nationale. Le Gouvernement doit accepter de prendre une mesure dérogatoire, comme par le passé. Je rappelle que le point de PMI sert également au calcul de l'allocation de reconnaissance du combattant, de 835,64 euros par an.
L'enveloppe d'action sociale de l'ONaCVG connaît une baisse importante, de 17,2 %.
Notre commission déplore la diminution des crédits de la politique mémorielle, qui n'est pas liée seulement à la fin du cycle commémoratif des débarquements et de la Libération. L'ONaCVG perdra 800 millions d'euros pour les actions mémorielles et la rénovation des monuments.
Un motif de satisfaction, toutefois : la préservation des crédits destinés au lien armée-jeunesse. Je me réjouis en particulier des moyens stables du service militaire volontaire, à l'issue duquel le taux d'insertion professionnelle atteint 86 %. De même, nous saluons le maintien des crédits de la JDC pour le déploiement de sa nouvelle génération, plus militarisée.
Malgré ces réserves, soucieuse de ne pas priver le monde combattant d'un budget, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (M. Marc Laménie, Mmes Solanges Nadille et Émilienne Poumirol applaudissent.)
Mme Nadia Sollogoub . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Solanges Nadille applaudit également.) Quelle satisfaction d'étudier enfin un budget du « monde combattant » ! Ce nouvel intitulé conjugue au présent les liens entre la France et ses défenseurs.
Hélas, les crédits regroupés sous cette appellation baissent. À bien des égards, ce n'est pas un bon signal.
L'allègement progressif des pensions versées est naturel, mais la non-revalorisation du point de PMI serait indigne alors que l'Assemblée nationale a rejeté le gel des pensions.
La fin du cycle lié au 80e anniversaire des débarquements et de la Libération n'explique pas toute la baisse des crédits de la politique de la mémoire. L'ONaCVG connaîtra une perte de 800 millions d'euros pour les actions mémorielles et l'entretien du patrimoine.
Madame la ministre, nous sommes une assemblée d'élus locaux, qui n'ont jamais économisé ni leur temps ni les deniers qui leur étaient confiés pour les cérémonies mémorielles et l'entretien des lieux de mémoire. La logique comptable qui se fait sentir dans ce domaine n'est pas dans notre ADN. Le retrait de l'État sur ces missions sera compensé par les budgets communaux et associatifs.
Je pense aux bénévoles du Souvenir Français de la Nièvre, qui recensent et rénovent les tombes des soldats morts pour la France, tirant certains d'eux de l'oubli, « pour qu'aucun de ces gars ne soit oublié », comme le dit le président départemental. C'est une belle mission, mais est-ce la leur ? Ce glissement de compétence, pour ne pas dire ce transfert, n'est-il pas un aveu de faiblesse ?
Les moyens en faveur de la jeunesse sont maintenus, en particulier pour la montée en puissance du service militaire volontaire. Dans le contexte international actuel, je repense à cette phrase de Simone Veil : « Le malheur contraint à reconnaître comme réel ce que l'on ne croit pas possible ». Si nous refusons d'imaginer le retour d'un conflit armé sur notre sol, c'est bien une logique de réarmement qui sous-tend le PLF, et c'est entendable.
Présidente du groupe d'amitié France-Ukraine, je partage de loin avec les députés de la Rada, les associations et mes amis ukrainiens, un quotidien de guerre, avec son lot de drames et de larmes. Au printemps dernier, nous avons reçu une délégation de députés ukrainiens : nous avons été accueillis de façon inoubliable par votre prédécesseure, Patricia Mirallès, pour une présentation des maisons Athos, destinées à la prise en charge des traumatismes de guerre. Le ministère ukrainien des vétérans porte une charge considérable, et le retour à la vie civile est une problématique essentielle.
Ce budget n'est donc pas en voie d'extinction. Alors que l'heure est à la remilitarisation, les moyens du soutien au monde combattant doivent suivre. Nous désirons ardemment la paix mais préparons la guerre, nous souvenant de l'avertissement de Winston Churchill : « Mieux vaut prendre le changement par la main avant qu'il nous prenne par la gorge ». (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Marc Laménie, Mmes Jocelyne Guidez et Émilienne Poumirol applaudissent également.)
M. Daniel Chasseing . - La Nation dépasse le peuple : elle réunit les générations à travers la mémoire.
Ce qui s'est passé peut se reproduire, disait Primo Levi. Hélas, l'actualité nous rappelle chaque jour que la paix n'est jamais acquise.
Des hommes et des femmes se sont battus pour la paix, pour la France et pour nos valeurs : les honorer est notre devoir, et c'est le sens de cette mission. N'oublions jamais ce que nous leur devons. « La plus belle sépulture, c'est la mémoire des hommes », disait André Malraux.
Je me félicite du changement d'intitulé de la mission, car la notion d'anciens combattants ne reflétait pas sa réalité. Ce ne sont pas seulement des vétérans de la Seconde Guerre mondiale, d'Algérie, de Tunisie et du Maroc que la mission soutient, mais aussi des militaires ayant participé à des opérations extérieures récentes. L'engagement militaire et les risques qui l'accompagnent sont toujours d'actualité.
Aux générations plus récentes du monde combattant, nous devons le meilleur accompagnement possible. Nous nous réjouissons donc de la consolidation des maisons Athos, destinées à l'accompagnement des militaires blessés psychiques.
Il est prévu de geler point de PMI. Il est impératif que le montant des prestations versées reste digne et équitable. Une augmentation identique à celle des retraites aurait pu être prévue.
Nous souhaitons que cette mission conserve toute l'attention et les moyens qu'elle mérite compte tenu de sa portée symbolique et sociale. La mémoire et le lien armée-nation touchent à l'éducation citoyenne, à la transmission et à la cohésion sociale. De ce point de vue, on peut regretter la baisse des crédits alloués aux actions mémorielles et à l'entretien des monuments aux morts.
Je félicite le rapporteur spécial, Marc Laménie, pour le travail qu'il mène sur cette mission depuis plus de dix ans et son engagement pour les anciens combattants au plan local.
Les Indépendants voteront les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Marc Laménie remercie l'orateur.)
Mme Pascale Gruny . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nadia Sollogoub et M. Marc Laménie applaudissent également.) Pensons avec gratitude à ceux qui se sont engagés, parfois sacrifiés, au service de la France. Cette mission matérialise la solidarité de la Nation envers eux. Son changement de nom est bienvenu pour mieux reconnaître les combattants d'aujourd'hui, revenus d'Afghanistan, du Sahel ou du Levant.
La baisse des crédits destinés à la PMI et à l'allocation de reconnaissance du combattant s'explique principalement par la diminution du nombre de bénéficiaires, mais aussi par l'absence de revalorisation. La stagnation du point de PMI est un motif de préoccupation dans le monde combattant, car sa valeur n'a pas suivi l'inflation et le pouvoir d'achat des pensionnés s'est érodé. À l'instar de la rapporteure pour avis, j'appelle à un coup de pouce en 2026.
Je m'inquiète de la dégradation de la santé financière de l'ONaCVG, au sein duquel j'ai l'honneur de représenter notre assemblée, sous l'effet de la hausse des coûts de fonctionnement et des ponctions opérées sur sa trésorerie, désormais inférieure à un mois. Cette situation est déplorable, comme la baisse de 5 millions d'euros de la subvention d'action spéciale, destinée aux actions de solidarité.
La préservation des moyens consacrés au lien armée-jeunesse est l'un des seuls motifs de satisfaction. Les crédits de la JDC sont maintenus, après la forte hausse de cette année. Recentré sur sa dimension militaire, ce dispositif permettra toujours de détecter l'illettrisme. Comme le rapporteur spécial, je regrette qu'il ne comporte plus de sensibilisation aux enjeux de la mémoire.
À chaque cérémonie, chaque déplacement dans une école, je mesure l'importance de transmettre la mémoire, incarnée par des souvenirs personnels ou de famille. De ce point de vue, la baisse de 22 % des crédits de la politique de la mémoire est injustifiable. Elle est aussi incohérente à l'heure où le Président de la République entend ranimer la flamme du patriotisme et le lien de la Nation avec son armée.
En dépit de ces réserves, Les Républicains voteront les crédits de la mission, car l'instabilité politique ne doit en aucun cas fragiliser notre solidarité envers le monde combattant. Nous le devons à tous ceux qui, un jour, se sont battus pour la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Solanges Nadille . - (Mmes Sophie Primas, Émilienne Poumirol et Jocelyne Guidez et MM. Michel Masset et Marc Laménie applaudissent.) Symboliquement essentielle, cette mission matérialise notre reconnaissance à l'égard de celles et ceux qui ont servi la France et finance notre politique de mémoire, ainsi que la préservation de notre patrimoine mémoriel. Elle est un vecteur de cohésion et de résilience de la Nation.
La baisse des crédits de l'action mémorielle s'explique avant tout par la fin du cycle de commémoration des 80 ans de la Libération, après d'importants efforts en 2024 et 2025.
Le changement de nom de la mission n'est pas anodin : le monde combattant appartient au présent, et nous devons reconnaître pleinement les générations Opex.
Le programme 169 traduit des orientations stratégiques essentielles, dont l'accompagnement des harkis. La mise en oeuvre de leur droit à réparation, prévu par la loi de février 2022, se poursuit, et nous veillerons à ce que leur mémoire continue d'être mise en valeur. Le programme consolide aussi le dispositif de réhabilitation psychosocial Athos, qui offre aux blessés psychiques un soutien essentiel.
L'essentiel des crédits sont liés à la PMI et à l'allocation de reconnaissance du combattant. Cette année, la valeur du point de PMI demeure stable. Nous débattrons d'amendements visant à le revaloriser de 1 %, au niveau de l'inflation.
Enfin, les crédits en faveur de la jeunesse sont stabilisés. Le nouveau format de la JDC renforcera le lien entre les jeunes et les militaires et l'attractivité des armées. Quant au service militaire volontaire (SMV), il joue un rôle essentiel pour des jeunes en situation de précarité.
Le RDPI votera ces crédits essentiels à la reconnaissance de ceux qui ont servi la France avec courage et dévouement. (Applaudissements au banc des commissions)
Mme Émilienne Poumirol . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) J'exprime l'immense respect du groupe SER pour l'ensemble du monde combattant, d'hier et d'aujourd'hui.
Comme l'an dernier, les crédits de la mission baissent alors que la reconnaissance mémorielle est l'un des fondements du vivre-ensemble. Si budget recule principalement en raison de la baisse du nombre de bénéficiaires de la PMI et des autres prestations, nous regrettons la non-revalorisation du point de PMI, malgré l'inflation. Les crédits alloués à la PMI baissent de 6,8 %, alors que la diminution du nombre d'ayant-droit aurait pu permettre une revalorisation.
De même, nous déplorons la baisse des crédits d'action sociale de l'ONaCVG, de 5 millions d'euros, en particulier la fin de la mesure « pupilles majeurs ». Pourtant, les besoins augmentent avec la troisième génération du feu.
La baisse touche aussi les crédits destinés aux harkis et rapatriés, alors que les moyens alloués à l'instruction des 12 600 demandes en attente sont insuffisants. Chacun doit bénéficier rapidement de l'indemnisation prévue par la loi de 2022. Nous soutenons également l'indemnisation des dix-huit supplétifs de statut civil de droit commun encore exclus, ainsi que l'extension de la rente viagère de 700 euros à toutes les veuves, quelle que soit la date de décès de leur ex-conjoint.
L'ONaCVG perd 800 000 euros pour les actions et le patrimoine mémoriels : c'est regrettable, alors que la transmission est essentielle. Nous saluons toutefois la consolidation des maisons Athos, qui jouent un rôle d'accompagnement psychologique remarquable. Une sixième est en cours de construction dans le Haut-Rhin. J'avais assisté avec Mme Mirallès à l'inauguration de la précédente, dans le Lauragais. Nous alertons toutefois sur l'insuffisance des recrutements dans ces structures.
Enfin, nous prenons acte de la stabilisation des crédits pour le lien armée-jeunesse, dans la perspective de la généralisation de la JDC nouvelle génération, plus immersive afin de susciter plus de vocations.
Conscient de l'importance de cette mission pour le monde combattant, le groupe SER en votera les crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Marc Laménie applaudit également.)
Mme Cathy Apourceau-Poly . - L'examen des crédits de cette mission s'inscrit dans une évolution lexicale et politique inquiétante. Son changement de nom reflète la place plus importante accordée aux générations Opex, alors que les anciens combattants sont toujours en vie et subissent le gel du point de PMI et de l'allocation de reconnaissance du combattant.
Le nouvel intitulé reflète l'évolution de la politique de défense de notre pays, qui prépare les esprits au retour des conflits armés. Lorsque le chef d'état-major des armées affirme qu'il faut se préparer à un choc face à la Russie d'ici trois ou quatre ans, il nourrit le discours belliciste. Lorsqu'il ajoute que notre pays doit être prêt à perdre ses enfants, un cap est franchi dans la rhétorique guerrière.
Jamais nous n'accepterons de perdre des enfants dans des conflits fabriqués par le capitalisme, qui cherche dans l'économie de guerre les profits qu'il n'arrive plus à trouver dans la financiarisation. Nous refuserons que nos enfants meurent pour les intérêts d'une poignée de puissants ! Ce sont toujours les enfants des ouvriers et des employés qu'on envoie au front, pendant que ceux des milliardaires jouent à la guerre sur leurs écrans de télévision.
Bon soldat de l'Otan, le Président de la République a annoncé un nouveau service national militaire - encore volontaire, mais qui pourra devenir obligatoire. Pendant ce temps, le gouvernement allemand entend bâtir l'armée conventionnelle la plus puissante d'Europe. Le modèle de l'Europe Erasmus se fissure au profit de la concurrence militaire. Vos discours atlantistes nous ont conduits de L'Auberge espagnole à Voyage au bout de l'enfer.
En 1895, Jean Jaurès déclarait à la Chambre : « Toujours votre société violente et chaotique, même quand elle veut la paix, même quand elle est à l'état d'apparent repos, porte en elle la guerre comme la nuée dormante porte l'orage. Il n'y a qu'un moyen d'abolir enfin la guerre entre les peuples, c'est d'abolir la guerre entre les individus et d'abolir la guerre économique ; c'est de substituer à la lutte universelle pour la vie, qui aboutit à la lutte universelle sur les champs de bataille, un régime de concorde sociale et d'unité. »
Nous dénonçons votre vision impérialiste et voterons contre ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)
M. Guillaume Gontard . - (Applaudissements sur les travées du GEST) La baisse de 6,46 % des crédits de la mission ne s'explique qu'en partie par la diminution du nombre d'anciens combattants et victimes de spoliations et par la fin de la récente phase commémorative. Elle pose la question de la transmission de la mémoire.
Comme vous tous, j'échange avec des résistants et des anciens combattants lors de cérémonies officielles ou dans le cadre scolaire. Ces rencontres sont toujours marquantes, car elles nous rappellent le prix de la liberté. Hélas, elles se font de plus en plus rares. Au même moment, nous assistons au retour des discours belliqueux promus par l'extrême-droite ; la cohésion sociale s'affaiblit sous l'effet des discours et des actes racistes, antisémites et négationnistes.
Le devoir de mémoire est plus important que jamais. Je regrette donc vivement la baisse de plus de 23 % du budget consacré à la mémoire et proposerai de l'abonder de 3 millions d'euros. La tentative de François Bayrou de supprimer le jour férié commémorant la victoire contre l'occupant nazi n'a, fort heureusement, pas abouti. Mais une baisse de cette importance du budget de la mémoire serait un très mauvais signal.
Je regrette aussi la transmission parfois très partiale de cette mémoire. Alors que 57 % des Français estimaient en 1945 que l'URSS était la nation qui avait le plus contribué à la défaite du Troisième Reich, contre 20 % pour les États-Unis, les proportions se sont inversées. Si la contribution évidente des seconds est largement transmise, c'est beaucoup moins le cas de celle de la première.
De même, la transmission des guerres coloniales, notamment d'Indochine et d'Algérie, reste trop faible. Alors que des représentations caricaturales inondent le débat public et que l'enjeu mémoriel reste central dans nos relations avec l'Algérie, la réalité de ces guerres doit être enseignée. Le sang versé par les tirailleurs sénégalais ou les francs-tireurs et partisans - main-d'oeuvre immigrée - n'a pas moins de valeur que celui des autres ! Inscrire cette mémoire dans le roman national permettrait aussi de développer le sentiment d'appartenance de milliers de jeunes Français héritiers de cette mémoire.
Les écologistes voteront les crédits de la mission tout en restant attentifs à ce que la politique mémorielle ne soit pas sacrifiée sur l'autel de l'austérité. (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Marc Laménie applaudit également.)
M. Michel Masset . - La disparition progressive des générations qui ont connu les conflits du XXe siècle entraîne mécaniquement une baisse du nombre de bénéficiaires de cette mission. Mais notre reconnaissance ne s'effacera pas pour ceux qui ont défendu notre pays. Cette mission est la concrétisation de notre obligation morale envers eux et leurs familles.
La hausse des crédits destinés à la réparation pour les harkis répond à la nécessité d'honorer des décisions de justice restées trop longtemps sans suites. Cette mémoire est bien vivante, notamment en Lot-et-Garonne : je pense aux camps de Bias et Sainte-Livrade, qui ont accueilli des familles de harkis après avoir accueilli des Français d'Indochine. Leur histoire fait partie de l'histoire du département et de notre pays.
Je salue le travail de nos communes : aucune ne manque à son devoir d'honorer la mémoire de nos anciens combattants. L'action en milieu scolaire est également essentielle. En particulier, il faudrait généraliser le concours organisé par l'Association nationale des anciens combattants et ami(e)s de la Résistance (Anacr) dans les collèges et les lycées du Sud-Ouest.
Enfin, le programme consacré à l'indemnisation des victimes de persécutions antisémites et d'actes de barbarie voit le nombre de ses bénéficiaires baisser, mais l'État doit traiter les derniers dossiers relatifs à la restitution des biens spoliés. La loi du 22 juillet 2023 facilite les restitutions. De même, aucun orphelin de victimes de persécutions antisémites ou d'actes de barbarie ne doit être laissé sans réponse.
Fidèle à son engagement pour la mémoire combattante et les valeurs républicaines, le RDSE votera les crédits de la mission. (M. Hussein Bourgi et Mme Jocelyne Guidez applaudissent.)
Mme Else Joseph . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Cette mission unit le passé et l'avenir, le monde des combattants et la jeunesse. C'est une mission de mémoire et de transmission, au service de la cohésion du pays : elle concerne donc aussi notre présent.
La quasi-totalité des crédits sont en baisse, en raison de l'attrition des populations bénéficiaires.
Je salue Marc Laménie, rapporteur spécial ; les Ardennes, que nous représentons, sont intimement concernées par cette mission.
Pour ne pas fragiliser l'application de la loi du 23 février 2022, je soutiens le maintien des crédits destinés aux harkis, autres supplétifs et rapatriés au niveau de 2025. Je regrette que les supplétifs de statut civil de droit commun ne bénéficient pas de l'allocation de reconnaissance : cette injustice doit être réparée.
Les crédits consacrés à la mémoire ont connu une augmentation lors des récentes commémorations. Mais leur forte baisse risque de fragiliser le patrimoine mémoriel : restons attentifs aux nécropoles et carrés militaires et ne perdons pas de vue que les réparations coûtent d'autant plus cher qu'elles sont différées. Saluons le rôle des associations qui font vivre ces lieux de mémoire.
Les crédits de la JDC et du service militaire volontaire sont stables. Dans le contexte actuel, ces institutions sont appelées à jouer un rôle important. La guerre en Ukraine s'invite indirectement dans cette mission, de même que l'instabilité globale. Comment réévaluer la JDC à l'aune de l'inévitable remilitarisation de l'Europe et faciliter le service militaire volontaire, appelé à prendre de l'ampleur ? Comment continuer à détecter, outre l'illettrisme, ce qui manque à notre cohésion ?
Enfin, nous sommes préoccupés par la situation de l'ONaCVG, dont la subvention pour charges de service public n'est toujours pas revalorisée, ce qui compromet sa capacité à recruter à hauteur de son plafond d'emplois.
En dépit de ces réserves, je confirme que le groupe Les Républicains votera les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions)
Mme Alice Rufo, ministre déléguée auprès de la ministre des armées et des anciens combattants . - Je m'excuse d'avoir oublié mon bleuet, mais je saisis cette occasion de saluer la promotion exceptionnelle du bleuet de France cette année, à laquelle vous avez contribué.
Lors de ses adieux à la Deuxième DB, le général Leclerc invitait ses hommes à conserver en temps de paix un « patriotisme agissant ». Je vous remercie d'avoir parlé dans le même sens.
Oui, il s'agit de développer l'esprit de défense au moment où les dangers s'accumulent. Non, la reconnaissance due à ceux qui se sont battus pour nous n'est pas un acte tourné vers le passé, mais vers l'avenir.
Madame Sollogoub, j'ai rencontré il y a peu la ministre ukrainienne des vétérans et nous soutenons son action.
Le monde combattant m'apprend beaucoup - comme vos rapporteurs m'ont beaucoup appris. J'inscris mon action dans une démarche de coconstruction.
Cette mission a un caractère particulier, lié à sa dimension morale ; elle touche à une part de nous-mêmes. Elle change de nom cette année, et nous savons, madame la rapporteure pour avis, ce que cette évolution vous doit. Son sens n'est pas belliqueux : il s'agit de reconnaître la quatrième génération du feu.
Le nombre de bénéficiaires de la mission devrait passer de 1,6 million à 550 000 en vingt ans. En outre, le contexte budgétaire impose des efforts. Je rends hommage à ma prédécesseure, qui s'est battue pour préserver le budget.
S'agissant du point PMI, la règle d'indexation a été fixée en 2022, avec le Gouvernement, les associations du monde combattant et les parlementaires. Vous avez raison de soulever le sujet. Un rapport attendu début 2026 permettra d'évaluer l'écart.
Je ne peux lever le gage : ce que l'on ajoute quelque part, il faut le prendre ailleurs. J'en appelle à la responsabilité collective. J'entends les préoccupations du monde combattant, mais gardons-nous de modifier un dispositif d'indexation satisfaisant en raison d'une situation ponctuelle.
Il s'agit ici d'une allocation, d'un élément de reconnaissance, pas d'une retraite. Veillons à la solidité du dispositif pour les années suivantes, et continuons à y réfléchir.
Un mot sur le plan Blessés. Je serai demain à Colmar pour inaugurer une nouvelle maison Athos, après avoir visité celles de Toulon et Bordeaux. C'est un dispositif très important qui mérite d'être consolidé. Pas moins de 80 % des 120 mesures du plan 2023-2027 sont déjà mises en oeuvre. Ce budget nous donne des crédits pour aller au bout.
Le budget de l'INI reste stable à 14,4 millions d'euros, plus 7,5 millions d'euros pour des investissements - travaux de mise aux normes et acquisition de logiciels.
Je me joins à l'hommage rendu à la directrice générale de l'ONaCVG. Le PLF 2026 préserve les moyens de l'Office en effectifs et en subvention de fonctionnement ; le logiciel de traitement des dossiers et de paiement des allocations sera rénové. L'évolution du nombre de ressortissants de l'Office conduit à une contraction de l'enveloppe consacrée à l'action sociale. J'ai demandé à ce que la commission mise en place en 2024-2025 soit maintenue, pour conforter l'aide aux pupilles majeures, dossier par dossier.
L'ONaCVG a signé un nouveau contrat d'objectifs et de performance (COP). Nous aurons besoin de vos recommandations pour anticiper la nécessaire adaptation de l'Office.
Notre action en faveur des harkis est maintenue et soutenue.
Les crédits mémoire baissent en raison de la fin du cycle mémoriel des 80 ans, mais je vous ai entendu sur la restauration des monuments : j'y veillerai. (M. Marc Laménie applaudit.)
Examen des crédits de la mission
Article 49 - État B
M. le président. - Amendement n°II-1737 rectifié de M. Canévet et alii.
M. Michel Canévet. - Les dépenses publiques s'envolent, il faut les maîtriser. Modestement, réduisons de 20 millions d'euros les crédits de la mission, pour faire des économies, étant donné la situation de nos finances publiques.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - Merci pour vos témoignages dans le débat général.
Le rabot de 5 % que vous proposez est dur. Compte tenu des enjeux de cette mission, avis défavorable, hélas.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - Cette mission est une dette, au sens noble. S'il n'y a pas d'argent magique, il n'y a pas d'économies magiques non plus. Avis défavorable.
Mme Émilienne Poumirol. - Mission après mission, M. Canévet demande avec constance des baisses drastiques de dépenses. Ce serait une erreur de diminuer les sommes allouées à cette mission, car le lien armée-nation doit être conservé. Je regrette votre attitude dogmatique, surtout que vous avez rejeté toutes nos propositions de recettes mettant à contribution les hauts revenus.
M. Michel Canévet. - On ne juge pas les résultats d'une mission à l'aune de l'augmentation de ses crédits. Il est temps de remettre en cause certaines politiques publiques si l'on veut réduire le déficit - 124 milliards d'euros. Nos concitoyens nous demandent de réduire les dépenses, ils en ont ras le bol d'être imposés et le disent dans les enquêtes d'opinion (Mme Émilienne Poumirol s'exclame.) Si l'on ne répond pas à leurs attentes, il ne faudra pas s'étonner du résultat dans les urnes.
M. Hussein Bourgi. - Si les Françaises et les Français nous demandent de faire des économies, ce n'est certainement pas sur le budget des anciens combattants. Preuve en est le respect et la gratitude qu'ils leur témoignent dès qu'ils en ont l'occasion.
Nous avons fait des propositions pour trouver les recettes, mais la majorité sénatoriale ne nous a pas suivis. (Exclamations à droite et au centre.) Il faut raison garder et ne pas pinailler sur le dos des anciens combattants et des associations mémorielles et patriotiques.
L'amendement n°II-1737 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-2036 rectifié bis de M. Fernique et alii.
M. Jacques Fernique. - Depuis le 11 novembre, une plaque aux Invalides rend hommage aux Alsaciens et Mosellans incorporés de force dans l'armée allemande pendant la Deuxième Guerre mondiale : ils furent 130 000, contraints de porter les armes sous un uniforme qu'ils détestaient ; 40 000 ne sont pas revenus - soit, pour ces trois départements, 18 % des militaires français morts pendant la guerre.
Cette plaque redonne dignité à ceux qui vécurent avec l'opprobre d'être traités de traîtres. L'injustice s'est prolongée, avant que l'on ne consente à parler d'annexion et non d'occupation. De cette annexion a résulté le crime de masse qu'a été l'incorporation de force.
Pour les orphelins - 3 000, très âgés - il n'y a pas eu d'aide financière, contrairement aux autres orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie. Cet amendement, porté notamment par Elsa Schalck, Sabine Drexler, Christine Herzog, Claude Kern, Ludovic Haye et Christian Klinger, propose un geste concret envers ces orphelins victimes d'un manquement national puis d'un crime de masse.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - Malgré tout mon respect pour nos collègues de Moselle et d'Alsace, demande de retrait.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - Nous devons cette mémoire aux incorporés de force. Le ministère soutient la recherche historique. Demain, je me rendrai au mémorial de Schirmeck pour témoigner de notre soutien à l'affirmation de cette mémoire, qu'il faudra décliner dans les manuels scolaires. Les orphelins des incorporés de force sont des ressortissants de l'ONaCVG, ils sont traités à égalité avec les orphelins de morts pour la France. Demande de retrait.
M. Jacques Fernique. - L'apprentissage de cette mémoire est une avancée qu'il faut approfondir. C'est un héritage mémoriel spécifique très douloureux, trop longtemps dissocié de la mémoire nationale. L'éducation nationale devra y remédier, le Président de la République s'y est engagé. En déclarant, comme on l'a fait après la guerre, qu'ils étaient, comme les autres, morts pour la France, on a alimenté un déni du crime de masse dont ils ont été victimes. Nous avons une dette particulière à l'égard de ces orphelins. Ce geste serait un acte de dignité.
Mme Sabine Drexler. - Notre amendement répond à une exigence de justice. La République admet qu'à situation exceptionnelle, réparation exceptionnelle. Or les orphelins des incorporés de force alsaciens-mosellans n'ont jamais eu droit à réparation. Ils sont 3 500 encore en vie. Leur douleur a été entendue, mais jamais indemnisée, alors que leur situation est comparable à d'autres ; nous ne créons pas un précédent, mais mettons fin à une inégalité de traitement.
L'amendement n°II-2036 rectifié bis est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-1992 de Mme Monier et du groupe SER.
Mme Émilienne Poumirol. - Depuis le décret de 2004, les orphelins de résistants morts fusillés peuvent être indemnisés, tandis que celles et ceux dont les parents sont tombés les armes à la main au combat dans la lutte contre le nazisme ne le peuvent pas. Pourtant, la cause du décès est identique : le sacrifice pour la liberté et contre la barbarie.
Réparons cette injustice en créant un quatrième dispositif d'indemnisation dédié aux orphelins de résistants morts au combat.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - Avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - Le Gouvernement est attaché au périmètre actuel d'indemnisation. Ce dispositif doit garder sa particularité liée au caractère hors norme de la barbarie nazie et à la complicité du régime de Vichy. Cela n'enlève rien à la reconnaissance que la France porte aux résistants morts au combat, qui bénéficient de toutes les dispositions qui accompagnent les « morts pour la France ». Ils sont considérés comme combattants volontaires de la résistance, au même titre que les engagés dans les Forces françaises libres. Leurs orphelins sont ressortissants de l'ONaCVG. Il n'y a pas de raison de leur accorder des droits différents, même si nous reconnaissons leur souffrance et la dette qui leur est due.
L'amendement n°II-1992 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-20 de M. Laménie, au nom de la commission des finances.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - Rétablissons un crédit de 12 millions d'euros, conformément à la loi de février 2022 sur les harkis.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - En 2025, 70 millions d'euros ont été débloqués pour tenir compte de la décision Tamazount de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).
Le PLF prévoit 58,8 millions d'euros au titre du droit à réparation. Il tient compte des 37 nouveaux sites ouvrant droit à réparation. Le coût est estimé à 8 millions d'euros. Le dispositif sera maintenu jusqu'en 2027, le temps pour la Commission nationale indépendante des harkis (CNIH) d'analyser d'éventuels ajouts à la liste ou droits à réparation.
Le budget prévu correspond aux besoins estimés, la gestion 2025 ayant permis de prendre de l'avance : 30 000 dossiers ont été traités, soit la plupart des personnes concernées.
L'amendement n°II-20 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-1995 de Mme Poumirol et du groupe SER.
Mme Émilienne Poumirol. - Accordons la même allocation viagère à toutes les veuves de harkis, que le conjoint soit mort avant ou après 2016. La distinction actuelle est incompréhensible.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - Retrait. L'amendement est satisfait.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - En effet : en loi de finances pour 2024, le ministre des armées a modifié l'article 6 de la loi de 2005 pour aligner les rentes des veuves de harkis au meilleur montant.
L'amendement n°II-1995 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°II-1731 rectifié de Mme Micouleau et alii.
Mme Else Joseph. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement identique n°II-1994 de Mme Poumirol et du groupe SER.
Mme Émilienne Poumirol. - Il ne reste plus que dix-huit membres rapatriés des forces supplétives de statut civil de droit commun. Le Conseil constitutionnel ayant censuré la mesure prise en 2016, accordons-leur l'indemnité unique de 4 195 euros prévus par la LPM pour solder définitivement cette injustice. Ce n'est pas cela qui va grever le déficit.
Mme la présidente. - Amendement identique n°II-2037 de Mme Apourceau-Poly et du groupe CRCE-K.
Mme Cathy Apourceau-Poly. - La LPM a attribué le versement d'une allocation unique de 4 195 euros aux anciens supplétifs de statut civil de droit commun, sous certaines conditions. Dix-huit personnes sont en attente du versement. Réparons cette injustice pour clore ce dossier.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - L'ONaCVG a étudié cette question. Comme chaque année, demande de retrait.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - Le besoin des dix-huit personnes identifiées a été réévalué : elles ne demandent pas d'accès au dispositif. Je vous confirme néanmoins qu'un accompagnement individualisé demeurera en place. Demande de retrait.
Mme Émilienne Poumirol. - Chaque année, on nous dit qu'on va réexaminer : bientôt, il n'y aura plus personne à indemniser ! Je m'étonne que vous ayez pu faire une enquête et déterminer que ces personnes n'ont besoin de rien.
M. Hussein Bourgi. - Je rends hommage à Patricia Mirallès, auteure de la proposition de loi que nous avons évoquée. À l'époque, nous avions établi une distinction entre les harkis dans les centres de rétention et dans les hameaux de forestage - dans mon département de l'Hérault, il y a les deux. Je suis gêné des discriminations - j'ose le terme - contre les forces supplétives de droit commun, ou entre les veuves, selon la date du décès de leur époux. Ces dix-huit personnes vivent avec une blessure ouverte et un sentiment d'injustice. N'attendons pas qu'elles disparaissent pour faire justice.
Les amendements identiques nosII-1731 rectifié, II-1994 et II-2037 sont adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°II-1993 de Mme Poumirol et du groupe SER.
Mme Émilienne Poumirol. - Nous revalorisons le point de PMI.
Mme la présidente. - Amendement n°II-2038 de Mme Apourceau-Poly et du groupe CRCE-K.
Mme Cathy Apourceau-Poly. - Il s'agit de rattraper le retard pris vis-à-vis de l'inflation depuis vingt ans. Le point de PMI a été gelé depuis 2005 : cela correspond à une perte de pouvoir d'achat de 10 points pour les pensionnés. Il restera bloqué cette année, du fait du gel du point d'indice des fonctionnaires. Augmentons les crédits de 1 %.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - Respect, reconnaissance. Avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - Je n'ai pas de solution, car je ne pourrai pas lever le gage. Je m'engage à étudier le problème de l'inflation dès le premier semestre de l'an prochain.
L'amendement n°II-1993 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°II-2038.
Mme la présidente. - Amendement n°II-675 rectifié de M. Longeot et alii.
M. Pierre-Antoine Levi. - Il prévoit 5 millions d'euros afin de compenser la baisse des crédits d'action sociale de l'ONacVG, destinés aux pupilles de la Nation et orphelins de guerre majeurs.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - Compte tenu du contexte, retrait.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - Je souhaite que l'Office soit attentif à la situation des pupilles de la Nation. La commission sera maintenue, malgré la baisse tendancielle. La disparition d'une enveloppe fléchée ne signifie pas un désengagement. J'en ai informé les associations concernées. Retrait ?
L'amendement n°II-675 rectifié est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°II-1727 de M. Gontard et alii.
M. Guillaume Gontard. - Nous voulons faire vivre la mémoire des guerres d'Indochine et d'Algérie, notamment en organisant des projets mémoriels et culturels dans le cadre scolaire. Nous dotons la sous-action Mémoire et patrimoine mémoriel de 3 millions d'euros supplémentaires.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - Retrait, même si les actions pédagogiques sont importantes.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - Nous allons travailler avec le monde combattant et le ministère de l'éducation nationale sur le développement de ces actions mémorielles. Les budgets des musées, qui ne sont pas sur ce programme, y contribuent aussi beaucoup. Les 80 ans, c'est aussi un retour d'expérience d'une opération qui s'est très bien passée. J'en tirerai les conclusions avec mes collègues pour développer des actions concrètes. Retrait.
L'amendement n°II-1727 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-411 rectifié ter de Mme Lermytte et alii.
Mme Marie-Claude Lermytte. - Les militaires décédés accidentellement lors d'entraînements ou d'exercices à haute intensité pourraient bénéficier de la mention « mort pour le service de la Nation », créée par la loi du 21 décembre 2012, qui ouvre des droits à leurs proches. Or le décret du 18 mars 2016 restreint son attribution au décès causé par un acte volontaire d'un tiers. De nombreux militaires morts en préparation opérationnelle ne peuvent plus en bénéficier alors qu'ils sont morts dans des situations proches de celles du combat. Cet amendement d'appel ajoute un euro pour ouvrir la réflexion.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. - S'agissant d'un amendement d'appel, retrait.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. - Depuis 2021, trois mentions coexistent : « mort pour la France » pour les décès survenus au feu, à la guerre ou en Opex ; « mort pour le service de la Nation » lorsque le décès résulte de l'acte volontaire d'un tiers ; et « mort pour le service de la République » pour les décès survenus lors de missions présentant un risque particulier, notamment lors d'exercices militaires. Nous sommes attachés à la singularité de chacune de ces mentions et vous invitons, en conséquence, à retirer votre amendement.
M. Hussein Bourgi. - Pour les sapeurs-pompiers, la mention « mort au feu » diffère de la mention « mort en service commandé ». Il faudrait faire la même chose pour les militaires.
L'amendement n°II-411 rectifié ter n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », modifiés, sont adoptés.
Engagements financiers de l'état Compte spécial - Participations financières de l'État Compte spécial - Accords monétaires internationaux Compte spécial - Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics Remboursements et dégrèvements
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle l'examen des crédits : de la mission Engagements financiers de l'État, du compte spécial « Participations financières de l'État », du compte spécial « Accords monétaires internationaux », du compte spécial « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » et de la mission « Remboursements et dégrèvements » du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial de la commission des finances . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce budget deviendra bientôt le premier poste de dépense de l'État, hélas. En 2026, la mission « Engagements financiers de l'État » constitue déjà le deuxième poste, derrière l'enseignement scolaire, avec 60,4 milliards d'euros en crédits de paiement. Ses crédits augmentent de plus de 4 milliards d'euros en AE et en CP, sous l'effet de l'alourdissement de la charge de la dette, dans un contexte d'endettement historique et de remontée des taux souverains.
Fin octobre 2025, l'encours de la dette négociable de l'État atteignait 2 760 milliards d'euros et la dette publique dépassait 3 400 milliards d'euros, soit 115,6 % du PIB. Avant la crise de 2008, nous étions au niveau de l'Allemagne, autour de 60 %. L'augmentation est de 110 milliards sur les six premiers mois de l'année.
La charge de la dette devrait atteindre en 2026 des niveaux records. Les taux à long terme sont en hausse depuis le début 2025 : le Gouvernement prévoit un taux à dix ans de 3,7 % fin 2025 et 3,8 % fin 2026. Un choc de taux de seulement cent points de base...
M. Michel Canévet. - On y arrive !
M. Albéric de Montgolfier. - ... représenterait 3,2 milliards d'euros en un an et plus de 33 milliards à neuf ans. L'instabilité politique et les incertitudes entourant la soutenabilité budgétaire sont scrutées par les investisseurs et les agences de notation.
Nous allons devoir emprunter cette année une somme record : 310 milliards d'euros minimum, pour les émissions de nouvelle dette et les rachats des dettes qui arrivent à échéance. En 2026, la charge de la dette atteindrait 58 milliards euros en comptabilité budgétaire - plus 7,5 % - et 64 milliards en comptabilité générale - plus 15,3 %. Si la trajectoire se poursuit, elle dépasserait 70 milliards d'euros en 2027 et franchirait la barre des 100 milliards autour de 2030.
Les crédits dédiés aux appels en garantie de l'État sont en baisse, à 790 millions d'euros, c'est une bonne nouvelle. Pour les prêts garantis par l'État (PGE), la prévision est de 471 millions d'euros pour 2026.
Le compte spécial « Accords monétaires internationaux » n'est pas doté de crédits. Le compte spécial « Prêts et avances » devrait, lui, dégager un excédent.
La commission des finances propose, à regret, d'adopter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Claude Raynal, rapporteur spécial de la commission des finances . - Je concentrerai mon propos sur le compte d'affectation spéciale (CAS) « Participations financières de l'État ». Cet instrument dérogatoire retrace les opérations que l'État réalise en qualité d'actionnaire.
Prenons un exemple. En juin 2025, l'opérateur satellitaire européen Eutelsat a annoncé une augmentation de capital, ayant racheté en 2023 l'entreprise britannique OneWeb, pionnière dans les constellations de satellites en orbite basse. Depuis son rachat, ses perspectives de croissance sont importantes, mais sa situation financière complexe, entre endettement élevé et besoin d'investissement substantiel. L'État participe donc à hauteur de 750 millions d'euros à une augmentation de capital de 1,5 milliard.
Concernant le volet recettes, d'importantes recettes de cessions sont prévues - rupture avec les dernières années - à hauteur de 3,2 milliards d'euros, soit quatre fois plus qu'en 2025. Nous vérifierons si le quantum de recettes atteint sa cible, et si cette inflexion est conjoncturelle ou si elle s'inscrit dans un cycle pluriannuel.
Concernant les dépenses, le rachat par l'État du département Advanced Computing du groupe Atos mobilisera 400 millions d'euros de crédits du compte spécial. Nous préservons ainsi un actionnariat souverain pour une activité hautement stratégique. L'usine d'Angers est la seule en mesure de fabriquer les supercalculateurs en Europe. C'est nécessaire pour assurer la crédibilité de notre dissuasion nucléaire.
Dans ces conditions, la commission des finances a rendu un avis favorable à l'adoption de ces crédits, pour donner à l'État les moyens de sa politique (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du GEST et du groupe INDEP ; M. Antoine Lefèvre applaudit également.)
M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial de la commission des finances . - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K) La mission « Remboursements et dégrèvements » est la plus importante du budget : 145 milliards d'euros en 2026, en légère baisse de 0,4 % par rapport à 2025. Cette évolution recouvre deux tendances opposées : une forte baisse des remboursements liés à la gestion des produits de l'État et une hausse des remboursements liés à la mécanique de l'impôt et à des politiques publiques.
Les remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État passent de 17,2 milliards euros en 2025 à 14,2 milliards d'euros en 2026, principalement en raison de remboursements exceptionnels intervenus en 2025, notamment sur l'exit tax. Un amendement, alors présenté comme technique par un membre du présent gouvernement, encore député fin 2023, a permis le remboursement intégral de cette taxe, y compris pour des titres cédés avant 2014, pour un coût cumulé de 2 milliards euros. L'amendement a été repris par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité. Le Parlement aurait dû être mieux informé d'une mesure d'un tel impact, d'autant plus que les 2 milliards d'euros en question sont noyés, en exécution budgétaire, dans la mission.
À l'inverse, les remboursements et dégrèvements liés aux politiques publiques progressent de 18,5 milliards d'euros à 19,4 milliards d'euros, sous l'effet d'un recours accru aux crédits d'impôt. Les acomptes, avances et restitutions d'impôt sur le revenu augmentent de 10 % en 2026, après plus 8 % en 2025, notamment du fait de la montée en charge du crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile : 1,8 milliard euros en 2025, 2,3 milliards d'euros en 2026. Les travaux de la Cour des comptes et du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) invitent à s'interroger sur le périmètre, le taux de prise en charge et les bénéficiaires de ces dépenses fiscales.
Le crédit d'impôt recherche continue également de croître, au-delà de 8 milliards d'euros en 2025-2026. La commission d'enquête sur les aides publiques aux entreprises a souligné ses limites : 42 % des crédits bénéficient aux grandes entreprises, pour un rapport efficacité-coût perfectible. Une réforme demeure nécessaire, avec une différenciation par type d'entreprise et par secteur, ainsi que des mécanismes de restitution en cas de manquement, conformément aux recommandations unanimes de la commission.
S'agissant des impôts locaux, les remboursements et dégrèvements atteignent 4,6 milliards d'euros et restent stables. Le programme a été cependant vidé de sa substance à la suite de la suppression de la taxe d'habitation. Les remboursements de taxe foncière ont presque doublé depuis 2018 et se stabilisent autour de 2 milliards d'euros. Ceux de la taxe d'habitation auraient dû diminuer davantage, mais ont été revus à la hausse en raison des dégrèvements liés au dispositif « Gérer mes biens immobiliers ».
La commission des finances a proposé l'adoption de ces crédits. (M. Marc Laménie applaudit.)
Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Les années 2023 et 2024 avaient été marquées par d'importantes acquisitions dans le secteur de la défense ; en 2025 l'agence de participation de l'État (APE) a été active dans le numérique : acquisition d'Alcatel Submarine Networks, entrée au capital d'Eutelsat Communications, financement de l'acquisition par IN Groupe d'une entreprise spécialisée dans la biométrie. L'Agence des participations de l'État a creusé le sillon de la souveraineté numérique, avec l'acquisition du département Advanced Computing d'Atos.
Pour les recettes, nous nous félicitons que la part prévisionnelle des financements budgétaires ne soit plus que résiduelle. Le CAS revient à son principe fondamental : financer les acquisitions par des produits de cessions. Les cessions d'actifs devraient atteindre 3,2 milliards d'euros - niveau inédit depuis le covid.
Nous recommandons que l'APE développe une méthode plus robuste, notamment dans le secteur industriel, de manière à se concentrer sur les entreprises présentant un risque systémique. Il faut préserver l'agilité de l'État au gré de besoins qui pourraient se multiplier.
Au total, la commission des affaires économiques soutient les priorités de l'État actionnaire et donne un avis favorable à l'adoption des crédits du CAS « Participations financières de l'État ».
M. Marc Laménie . - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Sur plusieurs travées, on s'interroge sur le coût des dépenses fiscales. C'est légitime. Les crédits d'impôt, spécificité française, servent à orienter les contribuables vers des dépenses vertueuses, à l'instar du CIR. Leur coût est élevé pour nos finances publiques.
Dès lors, questionnons leur raison d'être : ces crédits d'impôt existent uniquement parce que le coût du travail et les impôts sont trop élevés en France. Ce n'est qu'une fois que les charges fiscales seront réduites que les niches fiscales pourront l'être aussi.
Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » doivent nous alerter. Attardons-nous sur le poids de la charge de la dette. Nous ne pouvons pas espérer lever de nouveaux impôts sans annihiler leur rendement. Nous n'avons plus d'autre choix que de baisser les dépenses, pour réduire le déficit alimenté par des dépenses supérieures à nos recettes.
La dette explose, et avec elle les taux auxquels l'État emprunte. Les taux d'emprunt à dix ans sont plus élevés que pour l'Espagne, l'Italie, la Suisse, l'Allemagne, la Belgique ; nos emprunts coûtent plus cher que dans tous les pays, à l'exception de la Grèce - on connaît pourtant ses turpitudes budgétaires. Toutefois, en août, ce pays a emprunté à des taux inférieurs aux nôtres. Le stock trop important de dette à refinancer et les emprunts élevés conduisent à voir la charge de la dette s'aggraver.
En 2026 elle serait de 58 milliards d'euros. C'est le deuxième poste de dépenses de l'État après l'enseignement scolaire, devant les armées ! Cette hausse n'est pas terminée. Elle pourrait atteindre 92 milliards d'euros en 2029. Je ne le dis pas pour vous angoisser davantage, mais pour vous encourager à agir. Ne laissons pas ces mauvais présages se réaliser. Il faut réformer avec détermination notre pays pour réduire les dépenses ; nous verrons alors les taux d'emprunt baisser et la charge de la dette s'alléger.
Les Indépendants voteront les crédits de ces missions.
M. Marc Séné . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Une évidence, la dette, étrange banalité accumulée depuis des décennies, est désormais notre première source de vulnérabilité. Chaque année elle absorbe une part importante de nos marges de manoeuvre, repousse nos investissements d'avenir les plus essentiels. La charge de la dette atteint désormais un niveau qui transforme notre action publique et ses capacités.
La dette n'est pas une fin, mais un moyen. Bien utilisée, elle peut être un instrument de souveraineté ; mal pensée, elle limite notre capacité budgétaire, érode notre crédibilité.
Le PLF 2026 en est l'illustration saisissante : la charge de la dette s'élève à 60 milliards d'euros, soit une hausse de 7,5 % en un an. Elle rivalise avec les grandes missions régaliennes et constitue le deuxième poste de dépenses de l'État ; si rien ne change, elle atteindra le seuil des 100 milliards d'euros à la fin de la décennie, montant vertigineux. Ce niveau une fois atteint appellerait une réorientation profonde de notre stratégie financière.
En 2026, l'État devra émettre 310 milliards d'euros de dette à moyen et long terme, à cause des déficits passés et d'un environnement de taux élevés. Un choc d'un point entraînerait une augmentation immédiate de plusieurs milliards d'euros et de 30 milliards à l'échelle d'une décennie.
Nous payons un manque de courage et une absence de réforme.
Une dette soutenable, ce n'est pas seulement une dette qu'on arrive à refinancer ; c'est une dette adossée à une croissance solide, à des dépenses d'investissement et à un appareil public capable de se réformer.
Ne dramatisons pas la situation, mais retrouvons une trajectoire crédible, lisible et compatible avec nos ambitions nationales.
Trois orientations s'imposent.
D'abord, donner une priorité claire à l'investissement productif, améliorer nos infrastructures et faciliter nos réformes et nos transitions.
Ensuite, moderniser la dépense publique. Il ne faut pas savoir combien, mais pourquoi nous dépensons. La dynamique de dépense est trop forte. Une rationalisation est indispensable - nous l'avons conduit dans nos travaux budgétaires.
Enfin, renforcer le pilotage de la dette. Il faut des trajectoires claires, des hypothèses sincères et une vision pluriannuelle. Or il est établi que des décisions budgétaires récentes ont souffert d'une gestion déficiente, parfois insincère.
La dette n'est pas une fatalité. La charge de la dette ne doit pas financer nos renoncements collectifs. Il nous faut reprendre l'initiative ; c'est une exigence de responsabilité, c'est un devoir envers les générations qui nous suivront. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Marc Laménie applaudit également.)
M. Georges Patient . - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Ces missions ne financent aucune politique publique, mais ont un impact sur l'équilibre de nos finances. La mission « Engagements financiers de l'État » connaît une progression spectaculaire, en raison de la charge de la dette, soit 4,5 milliards d'euros de plus en un an.
Selon les projections de la commission des finances, cette charge pourrait atteindre 100 milliards d'euros en 2030. C'est d'autant plus préoccupant que le programme de financement atteindra 300 milliards d'euros en 2026. Nous finançons la dette passée, non l'investissement futur.
La mission « Remboursements et dégrèvements » révèle une dynamique tout aussi préoccupante : la montée continue des dépenses fiscales, notamment les crédits d'impôt - à hauteur de 145,45 milliards d'euros, soit 28 % des recettes fiscales brutes. En 2004, ce taux était de 16 %, et de 22 % en 2014 : il progresse de 6 points tous les dix ans.
Le crédit d'impôt recherche (CIR), qui s'élève à plus de 8 milliards d'euros par an, a un effet d'aubaine massif, concentré sur les grands groupes. La commission d'enquête recommande de renforcer la conditionnalité, de cibler les PME innovantes, de mettre fin à une logique de guichet sans contrôle.
Le crédit d'impôt services à la personne (Cisap) deviendra rapidement insoutenable. La Cour des comptes explique que parmi les 75 premiers centiles de revenus, le taux de recours au Cisap est inférieur à 10 % ; il est supérieur à 50 % parmi les 3 % les plus aisés.
Le phénomène est double : une charge de la dette qui dévore le budget de l'État et une dépense fiscale en expansion. La combinaison des deux crée une contrainte budgétaire majeure. Il nous faut débattre lucidement de la pertinence des dispositifs fiscaux qui grèvent notre budget, pour redonner à l'État des marges de manoeuvre. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Thierry Cozic . - En 1932, ici même, Joseph Caillaux alertait sur une crise « presque sans précédent », freinée artificiellement par des inflations monétaires distribuées à l'envi. Il s'interrogeait : peut-être rira-t-on de nos alarmes ? Que pourrions-nous lui répondre aujourd'hui ? Que, malgré les leçons de l'histoire, nous persistons à répéter les mêmes erreurs.
Regardons la réalité en face : notre dette atteint 3 400 milliards d'euros, un niveau jamais atteint, et cette trajectoire n'a rien d'inéluctable. Depuis 2017, la dette a augmenté de plus de 1 000 milliards d'euros ; seuls 150 milliards relèvent de la crise sanitaire, comme l'a rappelé la Cour des comptes. Les 850 milliards d'euros restants résultent de choix politiques assumés, d'une obstination qui conduit à une véritable gabegie. Pendant ce temps, l'inflation allège artificiellement le poids de la dette et retarde la crise économique, mais au prix du pouvoir d'achat des Français.
Cette fuite en avant a un coût : un coût direct - 65 milliards d'euros d'intérêts versés cette année, davantage que le budget de l'enseignement supérieur - et un coût indirect, celui de l'abandon progressif de notre souveraineté et de notre destin au profit de nos créanciers. Les projections pour 2026 prévoient encore une augmentation de 10 milliards d'euros. À ce rythme, la question n'est plus « si », mais « quand » la crise éclatera.
Pour 2026, 310 milliards d'euros devront être levés, dont 175 milliards d'euros pour rembourser des emprunts passés : nous roulons nos dettes comme un hamster dans sa roue, mais vers quel horizon ?
M. Antoine Lefèvre. - Il n'a plus de carotte à se mettre sous la dent.
M. Thierry Cozic. - Et le prix sera payé par les générations futures. L'endettement alimente la concentration des richesses : depuis 2017, les dividendes ont progressé de 114 %, quand le Smic n'a augmenté que de 19 %. C'est peut-être cela, la démocratie sous le macronisme : la solidarité entre les riches.
Pour quels résultats ? Un chômage à 7,6 %, une croissance limitée à 0,7 %, 68 000 défaillances d'entreprises - un record. Ce budget persiste pourtant dans une logique de rentabilité à court terme.
Certains disent que la dette est une promesse ? Pourtant, qu'en est-il des promesses faites aux Gilets jaunes, aux 10 millions de Français qui vivent sous le seuil de pauvreté, à ceux qui vivent dans des déserts médicaux, aux 4 millions de personnes qui souffrent de mal-logement ? Les promesses n'engagent que ceux qui y croient : le paiement de la dette serait-il facultatif ?
Le groupe SER refuse la résignation. Nous sommes prêts au compromis, mais pas au prix d'une politique qui sacrifie l'avenir des Français à une mécanique aveugle. Des choix s'imposent : continuer dans cette fuite en avant, ou décider enfin de reprendre le contrôle ?
Contrairement aux contemporains de Joseph Caillaux, ne détournons pas le regard. Un grand débat national sur la dette s'impose, avant qu'il ne soit trop tard. Pour toutes ces raisons, le groupe SER s'abstiendra sur la mission « Engagements financiers de l'État » et votera les crédits de la seconde mission. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Pierre Barros . - Le premier poste de dépenses de l'État, ce sont les remboursements et dégrèvements, qui atteindront 145 milliards d'euros en 2026. L'État consacre ses ressources à compenser des impôts qu'il a décidé de ne plus percevoir, quelle révélation !
Il y aurait trop d'impôt ? Il y a surtout trop de dégrèvements.
On peut évoquer la suppression de la taxe d'habitation, qui a conduit à une TVA affectée, contraire au principe d'autonomie financière des collectivités, ou encore la réforme de l'exit tax, du ministre Lefèvre, reprise par le Gouvernement dans son 49.3 : aucune étude d'impact, aucun débat, et au bout du compte 2 milliards d'euros de remboursements au profit des contribuables les plus fortunés. Le Parlement a été privé d'information, une anomalie démocratique, et une parfaite injustice fiscale !
Pas mieux du côté des crédits d'impôt... Même un outrenoir de Soulages renvoie davantage de lumière ! Les sommes consacrées au Cisap pourraient servir à la construction d'un vrai service public de l'aide à domicile. Nous défendrons la création d'un jaune budgétaire retraçant ces aides, conformément aux travaux de la commission d'enquête du Sénat.
Depuis 2017, 1 100 milliards d'euros de dette supplémentaire ont été accumulés ; la charge de la dette progressera de 4,2 milliards d'euros. Les marchés avancent et l'État recule. Les grandes banques se ruent sur les bons de l'Agence France Trésor, attirées par des taux qu'elles contribuent elles-mêmes à administrer via les agences de notation. Il faut sortir de cette idiosyncrasie des marchés, contraire à l'intérêt général.
S'agissant de l'État actionnaire, la situation n'est pas meilleure : cinq privatisations confidentielles, plutôt que de solliciter une contribution accrue des grandes fortunes. Ainsi, le solde du CAS atteindra son plus faible niveau depuis 2006.
Aucune doctrine claire, comme Alcatel l'illustre : Emmanuel Macron, ministre en 2016, validait la privatisation ; dix ans plus tard, il prend conscience de l'enjeu stratégique de nationaliser Alcatel Submarine Networks (ASN). Et que dire d'ArcelorMittal ?
Si l'État n'agit pas, il se heurtera aux conséquences de son inconséquence. Il doit retrouver doctrine, ambition et capacité d'intervention stratégique. Ces missions montrent combien l'État a capitulé face aux marchés financiers. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K)
M. Yannick Jadot . - (Applaudissements sur les travées du GEST) La situation est préoccupante, situation que l'instabilité politique liée à la dissolution a accentuée. Mais l'Institut Avant-garde le rappelle : la France a déjà connu et surmonté des niveaux d'endettement bien supérieurs. La charge de la dette est contenue à 1,8 % du PIB en 2025 - c'était 6,5 % en 1997, avant que la droite ne passe la main à la gauche, qui a réduit le déficit !
L'enjeu n'est pas insurmontable.
Le problème est la baisse non compensée des recettes publiques et la complaisance délibérée vis-à-vis de l'évasion et de l'évitement fiscal. Les remboursements et dégrèvements atteignent désormais 147 milliards d'euros, contre 113 milliards en 2017.
La dynamique est source d'injustice fiscale. Le Cisap l'illustre : 2,3 milliards d'euros, contre 1,3 milliard en 2022. La Cour des comptes parle d'un dispositif hétéroclite, socialement régressif, coûteux pour la trésorerie de l'État. Les 3 % des foyers les plus aisés concentrent 50 % du recours de la dépense.
Le CIR, bel outil, appelle un meilleur ciblage et des conditionnalités économiques et sociales. Même le prix Nobel Aghion, référence de la droite, le critique !
Les 250 dépenses fiscales pour les entreprises rendent notre système illisible. Le CPO ne peut pas les évaluer : trop nombreuses, trop opaques. Notre pays n'a plus les moyens de sa politique fiscale.
Nous avons réduit les marges d'action de l'État tout en concentrant à l'extrême les richesses. Ces mesures ont trop rarement soutenu l'investissement et l'emploi.
La question de la dette doit être traitée de manière sérieuse, et pas cyniquement instrumentalisée pour casser notre contrat social. L'intérêt général et la cohésion nationale doivent primer de nouveau les intérêts privés. (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Franck Montaugé applaudit également.)
M. Michel Masset . - Il s'agit d'évaluer l'efficacité de l'État, condition de notre souveraineté budgétaire, de notre stabilité financière et de notre capacité d'action.
Depuis 2017, la politique de l'offre et la baisse non financée de 2,5 points du PIB des prélèvements obligatoires ont créé plus de fragilités qu'elles n'en ont résolues. La dette a augmenté de 1 000 milliards d'euros, sa charge pourrait devenir la première dépense de l'État, devant l'éducation. Dans le même temps, le sentiment de ras-le-bol fiscal s'intensifie chez les entreprises comme chez les ménages.
L'horizon est préoccupant. Le choc de refinancement à venir pourrait alourdir la charge de la dette de 1,2 point de PIB ; une telle évolution compliquera la stabilisation de nos finances publiques. Nous craignons une paralysie de notre politique économique.
Dans ce contexte, le RDSE considère que la maîtrise de nos finances publiques ne sera crédible qu'assortie d'une réflexion sur le niveau de nos prélèvements obligatoires.
La stratégie de l'État actionnaire mérite aussi toute notre attention. Notre groupe salue les opérations en capital annoncées pour 2026, mais regrette l'absence persistante d'une doctrine claire et actualisée ; la dernière date de 2017 et n'intègre pas les récentes mutations.
Nous préconisons trois principes : résilience, performance et responsabilité, pour inscrire durablement l'action de l'État dans l'intérêt général.
L'État doit retrouver un droit fiscal lisible ; la complexité fiscale perdure et les restitutions augmentent chaque année depuis 2001.
La mauvaise gestion de la plateforme « Gérer mes biens immobiliers » doit inviter l'administration fiscale à moderniser ses outils.
Tout en restant attentif aux points d'alerte que j'ai évoqués, le RDSE votera majoritairement les crédits. (M. Marc Laménie applaudit.)
M. Vincent Delahaye . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains) Une heure et demie, pour discuter de 200 milliards d'euros et du soutien aux entreprises et à l'économie, c'est un peu court.
Nous avons souvent alerté sur la dette. Quand les taux étaient bas, la gauche de l'hémicycle nous invitait à en profiter. Nous disions, nous : attention au moment où l'alignement des planètes ne sera plus le même.
Le dernier président à avoir diminué la dette est Valéry Giscard d'Estaing. Depuis François Mitterrand, tous l'ont alourdie, sans exception. À un moment donné, il faut changer de recette. Non pas en augmentant les impôts, mais en baissant les dépenses.
La dette découle du déficit, qui découle de dépenses trop importantes et de recettes insuffisantes. Surtout, le déficit caché du système de retraite nous coûte très cher. (M. Thomas Dossus s'exclame.) Il représente la moitié du déficit et la moitié de la dette. Ce n'est pas en reportant la réforme de 2023 que l'on changera de système.
Attaquons-nous enfin à la dépense publique de manière sérieuse. Si nous ne le faisons pas nous-mêmes, nous y serons forcés par nos prêteurs.
Bientôt, les intérêts de la dette deviendront le premier budget de l'État - c'est inéluctable.
M. de Montgolfier a évoqué les prêts aux entreprises ; j'aurais voulu en savoir plus.
M. Albéric de Montgolfier. - Donnez-moi plus de temps !
M. Vincent Delahaye. - L'État devrait se montrer plus actif dans la gestion de ses participations. Dans certains domaines, il n'a plus à être actionnaire : il doit vendre ses participations. Les 3 milliards d'euros prévus sont insuffisants.
Sur les remboursements et dégrèvements, M. Savoldelli a présenté 145 milliards d'euros en cinq minutes... Il est très brillant ! S'il y a autant d'allègements d'impôts, c'est que les impôts sont beaucoup trop élevés. (M. Olivier Rietmann le confirme.) Je suis favorable à la baisse des aides accordées aux entreprises, en contrepartie de baisses d'impôts.
La France a l'impôt sur le capital le plus élevé au monde.
D'où viennent les difficultés de Brandt ? Des impôts, qui ont des répercussions sur les emplois et les salaires. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; M. Marc Laménie applaudit également.)
M. David Amiel, ministre délégué chargé de la fonction publique et de la réforme de l'État . - Notre période se caractérise par un stock de dette très élevé, comme le souligne l'Institut Avant-garde. Certes, le service de la dette est moindre que lorsque les taux d'intérêt étaient beaucoup plus élevés, mais nous pourrions être mis en difficulté si un choc géopolitique venait bouleverser la situation.
L'évolution des PGE se traduit par une baisse de 95 millions d'euros des crédits en 2026.
Les cessions augmentent, avec 3 milliards de recettes sur le CAS. Nous menons des opérations structurantes, à l'instar du rachat de l'activité Advanced Computing du groupe Atos ou d'autres opérations dans le secteur spatial et numérique.
Il faut faire tourner le portefeuille, vous avez raison, monsieur Delahaye - nos concurrents ne se gênent pas pour le faire - et actualiser la doctrine de l'État actionnaire.
Les dépenses fiscales de l'État s'élèvent à 140,8 milliards d'euros en 2026, contre 4,6 milliards pour les collectivités. Elles découlent largement des décisions prises en première partie du PLF.
Examen des crédits des missions et des comptes spéciaux
Article 49 (Engagement financiers de l'État) - État B
Mme la présidente. - Amendement n°II-2087 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Nous minorons les CP et AE de 37,46 millions d'euros sur le programme 336, car aucune contribution supplémentaire au capital du mécanisme européen de stabilité (MES) n'est prévue en 2026
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Avis favorable, même si je regrette que cela ne figure pas dans le PLF initial.
L'amendement n°II-2087 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-2021 de Mme Gisèle Jourda et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Nous proposons de créer un fonds de garantie pour la continuité industrielle et le soutien aux PME, doté de 150 000 euros.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Il existe déjà d'autres dispositifs poursuivant le même objectif, notamment au sein de Bpifrance. Retrait de cet amendement d'appel
M. David Amiel, ministre délégué. - Même avis.
L'amendement n°II-2021 n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », modifiés, sont adoptés.
Article 51 (Participations financières de l'État) - État D
Mme la présidente. - Amendement n°II-2150 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Amendement de cohérence avec le précédent sur le MES.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - Avis favorable à cet amendement de coordination.
L'amendement n°II-2150 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-2039 rectifié bis de M. Montaugé et du groupe SER.
M. Franck Montaugé. - ArcelorMittal est un acteur clé de la sidérurgie française. En contrepartie des aides, l'État doit contraindre l'entreprise à cesser les délocalisations et les suppressions d'emplois. Le groupe SER est favorable à la nationalisation ou à la mise sous tutelle de cette entreprise. Cet amendement d'appel abonde de 1 milliard d'euros un nouveau programme « Nationalisation d'ArcelorMittal France ».
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - Avis défavorable : cet amendement d'appel n'aurait aucun aspect contraignant... Si l'État souhaite acheter des actions d'ArcelorMittal, il est en mesure de le faire. La procédure serait différente pour une mise sous tutelle.
Les difficultés d'ArcelorMittal sont liées à la crise que traverse le secteur ; que l'État en soit propriétaire n'y changerait rien. Ce que vous voulez, c'est demander au ministre quelle est la vision du Gouvernement pour répondre à cette crise.
M. David Amiel, ministre délégué. - Avis défavorable. La crise de la sidérurgie est liée à la surproduction chinoise, comme dans d'autres secteurs - électroménager ou drones. C'est pourquoi nous défendons la préférence européenne à Bruxelles.
M. Pascal Savoldelli. - Nous voterons cet amendement d'appel. Puisqu'il y a une culture du débat et une méthode nouvelle au Gouvernement, pourquoi n'aurions-nous pas un débat sur l'avenir de l'acier français ? Pourquoi ne pas inscrire à notre ordre du jour la proposition de loi votée à l'Assemblée nationale sur le sujet ?
L'amendement n°II-2039 rectifié bis n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-2022 rectifié de MM. Canévet et Delahaye.
M. Michel Canévet. - Cet amendement, plus modeste, vise à favoriser l'actionnariat salarié chez EDF.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - Retrait : cet amendement est satisfait par la loi du 11 avril 2024. L'article L. 111-67 du code de l'énergie prévoit expressément que la société anonyme EDF est détenue intégralement par l'État, sous réserve d'une fraction qui peut être détenue par ses salariés ou anciens salariés.
Une telle décision relève de la responsabilité du Gouvernement et du groupe EDF, non de notre débat budgétaire.
Mon cher collègue, je vous pensais plus libéral que cela et plus enclin à laisser l'entreprise s'organiser avec ses actionnaires et ses salariés !
M. Olivier Rietmann. - Il est taquin !
M. David Amiel, ministre délégué. - Avis défavorable.
L'amendement n°II-2022 rectifié est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°II-1453 de M. Jadot et alii.
M. Yannick Jadot. - L'an dernier, la commission d'enquête TotalEnergies avait voté unanimement en faveur de l'achat par l'État d'une action spécifique. Roger Karoutchi, qui présidait la commission, avait lui-même défendu cet amendement.
Depuis le 8 décembre, l'entreprise, détenue majoritairement par des capitaux étrangers, est cotée à la fois à New York et à Paris. Le capital et les activités de TotalEnergies sont en train de se déplacer outre-Atlantique. Demain, son conseil d'administration pourrait décider de déménager son siège social des Hauts-de-Seine à New York ou ailleurs. Il faut intégrer l'énergie dans les secteurs stratégiques.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - La commission a émis un avis défavorable. À titre personnel, je réfléchis à cette question depuis longtemps, mais le dispositif reste inadapté pour garantir la préservation de nos intérêts stratégiques.
Certes, l'État peut créer une action spécifique, mais ce droit est strictement encadré : l'article 31-1 de l'ordonnance du 20 août 2014 limite le périmètre des entreprises concernées. TotalEnergies ne remplit pas les conditions requises. L'ordonnance réserve en outre ces actions spécifiques aux activités militaires, ou à celles relevant de la sécurité publique et de la défense nationale ; le secteur énergétique peut en faire partie, mais uniquement pour protéger la continuité de l'approvisionnement. L'exemple d'Engie, où l'État dispose d'une action spécifique, relève d'une situation différente, la part de l'État étant passée de 80 % à 24 % du capital.
Une action spécifique ne permettrait pas de contrôler et de piloter les projets de TotalEnergies, seulement d'empêcher la cession d'actifs stratégiques. Pour aller plus loin, l'État devrait acquérir une part du capital : 5 % vaudraient environ 6 milliards d'euros. Dans ces conditions, la commission maintient son avis défavorable à votre amendement d'appel, mais nous écoutons la position du ministre.
M. David Amiel, ministre délégué. - Le président de la commission des finances a rappelé les difficultés juridiques. Avis défavorable.
M. Yannick Jadot. - Les services juridiques du Sénat avaient évalué cette possibilité ; c'était une des principales recommandations de la commission d'enquête. Nous étions parvenus à un compromis de patriotisme industriel. Cette proposition avait été adoptée à l'unanimité des membres de la commission et votée sur ces bancs à la quasi-unanimité. Le Sénat doit faire montre de continuité dans ses positions !
M. Olivier Rietmann. - Le groupe TotalEnergies a son siège social en France et il est coté à l'Euronext à Paris. Il ne souhaite pas déménager, mais veut capter les capitaux privés américains pour se développer.
Votre amendement produirait l'effet inverse et enverrait un mauvais signal à un secteur hyperconcurrentiel ; cela nuirait à la valorisation boursière de l'entreprise et l'exposerait à des prédateurs. (M. Yannick Jadot lève les bras au ciel.)
En effet, certains d'entre nous avaient voté cette disposition l'an dernier. Churchill disait : ceux qui ne changent pas d'avis ne font jamais rien. Cette année, nous allons changer d'avis.
M. Yannick Jadot. - Il est beau, le patriotisme industriel !
L'amendement n°II-1453 n'est pas adopté.
Les crédits du compte spécial « Participations financières de l'État », modifiés, sont adoptés.
Les crédits du compte spécial « Accords monétaires internationaux » sont adoptés.
Les crédits du compte spécial « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » sont adoptés.
Article 49 (Remboursements et dégrèvements) - État B
Mme la présidente. - Amendement n°II-2086 du Gouvernement.
M. David Amiel, ministre délégué. - Nous tirons les conséquences de la révision des prévisions du PLFG, en réduisant les CP de la mission « Remboursements et dégrèvements » de 71 millions d'euros pour les impôts d'État et de 192 millions d'euros pour les impôts locaux.
Mme la présidente. - Sous-amendement n°II-2334 de Mme Lavarde et alii.
M. Vincent Delahaye. - Nous sincérisons les prévisions de la mission « Remboursements et dégrèvements » après le vote du Sénat supprimant la surtaxe de l'impôt sur les sociétés, pour 2 milliards d'euros.
M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial. - Avis favorable à l'amendement. Le sous-amendement étant arrivé à minuit vingt-quatre, je n'ai pas pu l'expertiser. L'avis du Gouvernement nous éclairera...
M. David Amiel, ministre délégué. - Avis défavorable au sous-amendement n°II-2334.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - On peut prendre le temps de débattre d'un amendement de 1,9 milliard d'euros...
Mme la présidente. - C'est vous qui me pressez souvent !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - La commission ne s'est pas réunie. Je pourrais le lui demander... J'aimerais bien que l'amendement soit retiré, car il pose un problème de méthode de travail pour la commission - deux de ses signataires étant parmi ses membres. Modifier un amendement de 70 millions à hauteur de 1,9 milliard d'euros, c'est un peu n'importe quoi. Son but est clair : la majorité sénatoriale ayant enlevé 8 milliards de recettes, vous souhaitez remettre 2 milliards d'euros de manière factice ! (M. Vincent Delahaye le conteste.) Ce n'est pas sérieux ! (MM. Thomas Dossus et Thierry Cozic applaudissent.)
M. David Amiel, ministre délégué. - La mission n'est pas liée aux bénéfices fiscaux de 2026, mais à ceux de 2025, via les acomptes. Les décisions que le Parlement prendra sur le niveau de l'impôt sur les sociétés en 2026 n'affecteront donc pas la sincérité de cette prévision. Avis défavorable.
À la demande du groupe Les Républicains, le sous-amendement n°II-2334 est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°115 :
| Nombre de votants | 341 |
| Nombre de suffrages exprimés | 321 |
| Pour l'adoption | 187 |
| Contre | 134 |
Le sous-amendement n°II-2334 est adopté.
L'amendement n°II-2086, sous amendé, est adopté.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - Le ridicule tue !
Les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », modifiés, sont adoptés.
La séance est levée à minuit quarante.
Prochaine séance, aujourd'hui, vendredi 12 décembre 2025 à 9 h 40.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du vendredi 12 décembre 2025
Séance publique
À 9 h 40, l'après-midi, le soir et la nuit
Présidence : M. Xavier Iacovelli, vice-président, Mme Anne Chain-Larché, vice-présidente, Mme Sylvie Robert, vice-présidente
1. Nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, de financement de la sécurité sociale pour 2026 (n°193, 2025-2026)
2. Projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2026 (n°138, 2025-2026)
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