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Table des matières
Projet de loi de finances pour 2026 (Suite)
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances
Après l'article 3 (Amendements précédemment réservés)
Ordre du jour du samedi 29 novembre 2025
SÉANCE
du vendredi 28 novembre 2025
25e séance de la session ordinaire 2025-2026
Présidence de Mme Sylvie Robert, vice-présidente
La séance est ouverte à 10 h 30.
Projet de loi de finances pour 2026 (Suite)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.
Première partie (Suite)
Article 1er
Mme la présidente. - Amendement n°I-641 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Cet amendement vise à faire sortir le Gouvernement de l'ambiguïté dans laquelle il se drape sur le dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico). Quelle est la nature de ce dispositif ?
En 2025, il représente environ 1 milliard d'euros, dont 90 % prennent la forme d'un emprunt forcé tandis que les 10 % restants sont placés dans un fonds dont les critères de répartition entre collectivités seront, dites-vous, fixés ultérieurement. En 2026, on passerait à 2 milliards d'euros, dont 80 % d'emprunt forcé, remboursable en cinq ans, et 20 % placés dans ce même fonds.
Le Dilico est-il à la fois une imposition de toute nature pour les sommes placées dans le fonds et un emprunt forcé ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. - La commission des finances considère qu'il ne s'agit pas d'une imposition de toute nature. S'agissant du terme « emprunt forcé » que vous employez, nous y reviendrons à l'occasion de l'examen d'un prochain amendement... Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics. - Le Dilico n'est pas un impôt : il modifie l'affectation d'une quote-part du produit de taxes reversées aux collectivités ; l'impôt est collecté par l'État et au lieu d'être versé aux collectivités, il est versé, puis repris ; contrairement à un impôt, il n'a pas de taux ; il est défini par une liste, de manière administrative.
Les modalités de restitution répondent à une demande des collectivités, afin de valoriser les dépenses d'investissement par rapport aux dépenses de fonctionnement. Il n'est pas question d'entrer dans une dynamique d'emprunt forcé. Retrait de cet amendement d'appel ?
M. Thierry Cozic. - Votre réponse n'est pas satisfaisante. Si ce n'est pas une imposition de toute nature, qu'est-ce donc ? Pas un vrai prélèvement sur recettes, car 80 % du montant prélevé en 2026 seraient remboursés aux collectivités territoriales ; c'est un prêt contraint.
Où vont les 20 % restants ? Dans le budget ? Est-ce une recette de l'État ? Où leur remboursement figure-t-il ? Quid du fonds de répartition ? Autant de questions qui resteront lettre morte.
L'amendement n°I-641 est retiré.
L'article 1er est adopté.
Article 2
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances . - L'article 2 proroge en 2026 la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR). La commission des finances a recommandé son adoption sans modification au vu de la situation dégradée des finances publiques, à condition que cette recette soit ciblée et temporaire. La CDHR, au mécanisme complexe, est une mesure exceptionnelle de rendement. Cela dit le Gouvernement n'a toujours pas indiqué combien elle rapporterait : 2 milliards d'euros ou moitié moins ?
J'émettrai un avis défavorable à l'ensemble des amendements qui pérennisent ce dispositif ou prorogent son application jusqu'au retour du déficit à 3 % du PIB ; cette contribution doit rester exceptionnelle et temporaire.
Je serai aussi défavorable aux amendements qui visent à limiter son assiette. Le rendement est incertain, et sera sans doute inférieur aux prévisions. Ne le réduisons pas.
Je solliciterai l'éclairage du Gouvernement sur certains points.
M. Thierry Cozic . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Cet article tente difficilement de faire croire que le Gouvernement souhaite mettre à contribution les plus riches du pays. Nous ne nous ferons pas avoir cette année ! Cette mesure ne doit pas cacher la forêt des injustices fiscales. Tout est organisé pour que le rendement soit minoré - et il l'est de 40 % par rapport aux prévisions, soit à peine 1,2 milliard d'euros. Les plus riches pourront dormir encore sur leurs deux oreilles. C'est incompréhensible et inaudible au moment où l'Insee a mis en lumière la sidérante augmentation de leurs revenus : doublement de leur revenu moyen entre 2003 et 2022, une augmentation 2,6 fois plus importante que pour le reste des foyers fiscaux. Or le taux d'imposition des foyers à très haut revenu est passé de 29,2 % en 2003 à 25,7 % en 2022. C'est à l'aune de ces chiffres édifiants que nous apprécions la timidité de cet article 2...
Mme la présidente. - Amendement n°I-42 rectifié bis de M. Capus et alii.
M. Emmanuel Capus. - Ma position est radicalement opposée à celle de M. Cozic, puisque je propose la suppression de cet impôt.
Nous sommes hostiles à toute hausse d'impôt. La solution doit venir de la baisse des dépenses. On a dit que c'était temporaire, ciblé, provisoire...
M. Olivier Paccaud. - Nous avons voté !
M. Emmanuel Capus. - On a voté, et hop, cela revient cette année. Quid de la crédibilité de la parole publique ?
Quelle image donne-t-on aux investisseurs internationaux si on change les règles tous les ans ? (M. Daniel Fargeot renchérit.)
Enfin, il y a des difficultés techniques. Le rapporteur général souligne dans son rapport que c'est une usine à gaz au rendement incertain.
Une des conséquences stupides de cet impôt est qu'il entraîne une baisse des dons aux associations et à l'économie solidaire. Le groupe socialiste a d'ailleurs déposé un très bon amendement à ce sujet.
Et le masque tombe : Gabriel Zucman veut taper sur les milliardaires et les centimillionnaires ; mais là on parle du plombier en fin de carrière ou du coiffeur de Bernard Arnault, qui gagnera peut-être 450 000 euros en vendant son salon ; ou des bénéfices exceptionnels des TPE-PME !
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Les positions sont diamétralement opposées. M. Cozic dit que ce n'est pas assez, pour un rendement attendu de 1,5 milliard d'euros en 2025 et 2026, tandis que M. Capus estime que cette mesure devait être temporaire et s'inquiète de ses effets de bord.
Dans une récente étude, la DGFiP et les instituts statistiques ont montré néanmoins que la grande efficacité de nos mécanismes de crédits et de réductions d'impôts conduisait à une bizarrerie : le taux d'imposition moyen sur le revenu, après abattements et crédits d'impôts, augmente jusqu'au dernier décile, mais diminue pour les derniers centiles, jusqu'à environ 18 %. Il atteint plutôt 25 % pour les 95èmes centiles, puis redescend.
Avoir une mesure « balai » n'est pas absurde, pour conserver un taux de 20 %.
Un long débat a eu lieu à l'Assemblée nationale pour savoir s'il fallait maintenir ce mécanisme jusqu'à ce que le déficit revienne à 3 % du PIB. Conservons plutôt la position du Gouvernement : maintenir le dispositif en l'état pour l'année prochaine. Rien de confiscatoire ici, juste le maintien du principe de la progressivité de l'impôt sur le revenu, qui fait l'unanimité sur ces bancs.
L'amendement n°I-42 rectifié bis n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°I-2522 rectifié bis de M. Delcros et alii.
M. Bernard Delcros. - Nous modifions la détermination de l'assiette de la CDHR, par souci de cohérence et pour renforcer son rendement. Il faut éviter que des revenus puissent être déduits deux fois : une première fois parce qu'ils n'entrent pas dans son calcul, et une seconde fois parce qu'ils intègrent la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), qui est elle-même déduite. Même chose pour les revenus exceptionnels, qui ne sont pris en compte qu'à hauteur d'un quart.
Mme la présidente. - Amendement n°I-2505 rectifié ter de M. Delcros et alii.
M. Bernard Delcros. - Nous corrigeons une anomalie : pour des revenus produits en France, le résident français contribue à la CEHR et à la CDHR, tandis que le résident français à l'étranger ne contribue qu'à la CEHR.
Mme la présidente. - Amendement n°I-2539 rectifié ter de M. Delcros et alii.
M. Bernard Delcros. - Nous voulons maintenir la CDHR le temps nécessaire pour ramener le déficit à 3 % du PIB.
Mme la présidente. - Amendement n°I-642 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - L'amendement pérennise la CDHR. Le taux initial de 20 % est trop faible : relevons-le à 30 % pour garantir que les contribuables les plus riches ne bénéficient pas d'un avantage fiscal injustifié.
Mme la présidente. - Amendement n°I-643 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Amendement de repli. Entre 2017 et 2022, le patrimoine des 500 plus grandes fortunes françaises est passé de 20 % à 45 % du PIB. Pendant ce temps, la pauvreté et la précarité ont explosé. Ne reproduisons pas les mêmes erreurs.
Mme la présidente. - Amendement n°I-2210 de M. Dossus et alii.
M. Thomas Dossus. - Nous voulons nous aussi pérenniser la CDHR. Nous voulons concilier les positions de MM. Cozic et Capus : le rendement est trop faible, car le caractère temporaire de cette contribution a conduit à plusieurs tentatives d'esquive, qui ont enrichi cette année quelques fiscalistes...
En la pérennisant, nous faisons contribuer les plus hauts revenus, alors que huit ans de macronisme ont fait plonger le budget de la France.
Mme la présidente. - Amendement n°I-1254 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - C'est la même idée. La CDHR agit comme un filet de rattrapage. Avec une cible à 250 000 euros pour une personne seule et 500 000 euros pour un couple, elle concerne seulement 65 000 foyers. L'évitement fiscal s'organise en haut de la redistribution. Pérennisons donc cet impôt.
Mme la présidente. - Amendement n°I-1352 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - L'an passé, le gouvernement Barnier a dit qu'il augmenterait la fiscalité, un peu et temporairement. Fake ! Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) avait souligné que les deux tiers de l'effort reposaient sur une hausse de fiscalité, et un tiers seulement sur des économies. Depuis, aucune réforme structurelle...
Il faudra un effort durable sur la fiscalité jusqu'en 2029, voire jusqu'en 2031. Dire le contraire, c'est mentir.
Cette contribution différentielle est-elle légitime ? Si on répond oui, il faut l'inscrire dans la durée. Mon amendement prévoit que cet impôt perdure tant que nous n'aurons pas atteint un déficit sous les 3 % du PIB, ou tant que nous n'atteindrons pas un excédent primaire - conformément aux critères de Maastricht.
Allons chercher l'argent où il se trouve !
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je demande l'avis du Gouvernement sur l'amendement n°I-2522 rectifié bis.
Merci à Bernard Delcros de préciser le calcul de l'impôt effectivement acquitté au titre de la CEHR et de l'impôt sur le revenu pour le calcul de la CDHR. Il rapproche aussi les modalités de calcul du revenu fiscal de référence de celles utilisées pour la CEHR et précise les modalités d'imposition des contribuables s'installant sur le territoire ou le quittant.
Avis défavorable à l'amendement n°I-2505 rectifié ter, car il complexifierait davantage la fiscalité des non-résidents, notamment pour les modalités de déclaration et de recouvrement. La CDHR, imparfaite, doit rester exceptionnelle et temporaire.
Avis défavorable aux autres amendements, pour les mêmes raisons.
Madame la ministre, les modalités de recouvrement de la CDHR sont kafkaïennes. Le site internet de la DGFiP recommande aux contribuables qui y sont assujettis de se faire accompagner par un comptable. C'est dire l'expertise requise...
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Avis favorable à l'amendement n°I-2522 rectifié bis de M. Delcros, qui apporte des clarifications bienvenues : les enjeux liés aux revenus exceptionnels seront ainsi mieux traités. Cet impôt devait porter sur les revenus de l'année N-1. Mais, à cause de la censure du gouvernement Barnier, la CDHR porte sur les revenus de l'année en cours. Il est difficile de revenir en arrière désormais.
Avis défavorable à l'amendement n°I-2505 rectifié ter. La volonté du précédent gouvernement était d'appliquer cette contribution différentielle aux résidents, non à nos compatriotes domiciliés à l'étranger. C'est à leur pays de résidence fiscale de leur fixer éventuellement un plafond.
Sagesse sur l'amendement n°I-2539 rectifié ter.
Monsieur Cozic, le taux que vous proposez reviendrait à une augmentation massive, déguisée, de la flat tax. Avis défavorable aux amendements nosI-642 et I-643.
Monsieur Blanc, la rédaction de l'amendement n°I-1352 n'est pas conforme à ce que vous proposez. Retrait.
Mme Isabelle Briquet. - La préservation de notre pacte social est en jeu. Alors que les inégalités ont atteint des niveaux historiques, cette contribution reste un mécanisme de rappel visant à limiter les effets des stratégies d'optimisation des plus aisés. Les 10 % des plus riches perçoivent 24 % des revenus, quand les 10 % des plus pauvres en perçoivent 3 %. Où est la justice fiscale, quand une petite minorité profite d'exemptions et paie proportionnellement moins d'impôts que la moyenne des Français ? J'invite à voter ces amendements.
M. Yannick Jadot. - Selon le rapport du comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital, publié en octobre 2023, le passage de l'ISF à l'IFI et l'instauration d'une flat tax ont coûté 4 milliards d'euros de recettes fiscales. Cela devait favoriser l'investissement et la création d'emploi. Bilan : investissement, zéro ; création d'emplois, zéro ! En revanche, des dividendes énormes et de la spéculation immobilière. Ces réformes non seulement coûtent cher à l'État mais dégradent le pouvoir d'achat des Français, à travers la spéculation immobilière. Pérennisons ce dispositif parfaitement légitime.
M. Grégory Blanc. - Je rends mon amendement n°I-1352 identique au n°I-2539 rectifié ter de M. Delcros, sur lequel le Gouvernement a émis un avis de sagesse. (M. Bernard Delcros s'en réjouit.)
Avis défavorable à l'amendement n°I-2505 rectifié ter. Le précédent gouvernement voulait appliquer cette contribution différentielle aux résidents, non à nos compatriotes domiciliés à l'étranger. C'est à leur pays de résidence fiscale de leur fixer éventuellement un plafond.
M. Bernard Delcros. - Je persiste : pourquoi les contribuables français établis hors de France qui ont des revenus en France seraient-ils exclus de la CDHR, alors qu'ils sont soumis à la CEHR ? Il faut corriger cette anomalie.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - La CEHR est une extension de l'impôt sur le revenu : vous y êtes soumis si vous avez des revenus de source française, même si vous résidez à l'étranger. La situation est très différente pour la CDHR, qui est une contribution différentielle : les non-résidents peuvent ne pas y être soumis du fait des conventions fiscales. Les acronymes sont proches, mais leur base juridique est différente.
M. Olivier Rietmann. - La proportionnalité de l'impôt, cela existe, madame Briquet ! Les Français les plus défavorisés ne paient pas d'impôt ; les 10 % que vous évoquez assument 75 % des 82 milliards d'euros d'impôt sur le revenu ! (M. Jean-Raymond Hugonet renchérit.) Toujours la même petite musique... Vous voulez opposer les plus pauvres aux plus riches, les petites entreprises aux grandes, les retraités aux actifs. Cessez d'opposer les catégories de Français entre elles, sous peine de dévoyer le débat. (« Très bien » et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées des groupes UC et INDEP)
M. Thierry Cozic. - Les riches doivent-ils payer moitié moins d'impôts que les classes moyennes ?
M. Emmanuel Capus. - Ce n'est pas le sujet !
M. Grégory Blanc. - Si !
M. Thierry Cozic. - C'est tout le débat soulevé par l'article. Il s'agit de garantir, avec la CDHR, que les plus aisés - 0,06 % des foyers fiscaux - paient au moins 20 % d'impôts, comme les classes moyennes ; nous n'opposons pas les catégories les unes aux autres ! Le rapport de l'Insee de novembre 2025 a mis en lumière la sidérante envolée du revenu moyen des plus riches, qui a progressé de 120 % entre 2003 et 2022 ! (M. Olivier Rietmann lève les bras au ciel.)
M. Daniel Fargeot. - Les plus pauvres ne paient pas d'impôt !
M. Thierry Cozic. - En 2003, les très hauts revenus gagnaient 95 fois plus que les ménages les plus modestes ; en 2022, 167 fois plus !
M. Olivier Rietmann. - Et alors ?
M. Thierry Cozic. - Nous n'opposons pas les classes sociales les unes aux autres, nous essayons simplement de rétablir de la justice fiscale. Nous voterons tous ces amendements.
Madame la ministre, l'amendement n°I-2522 rectifié bis modifie-t-il le rendement de la CDHR ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Non, il n'a pas d'impact.
M. Thomas Dossus. - Il y a trois jours, la droite de l'hémicycle a choisi de geler les allocations de six millions de bénéficiaires de prestations sociales ; aujourd'hui, elle se refuse à faire contribuer les plus riches ! (M. Olivier Rietmann s'exclame.) Assumez donc vos choix !
Réduire la fiscalité sur les plus hauts revenus, comme le fait Emmanuel Macron depuis huit ans, n'a eu aucun impact sur l'économie. Qui va payer la note ? Nous voulons faire contribuer les plus riches ; vous, les plus pauvres ! (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)
MM. Daniel Fargeot et Franck Dhersin. - Ils ne paient pas d'impôt !
Mme Ghislaine Senée. - Cet impôt corrige une anomalie. Avant la CDHR, les très hauts revenus ne payaient que 14 % d'impôts, loin des 20 % prévus par la loi. Tant que l'injustice perdurera, il y aura un problème de consentement à l'impôt. Vous refusez les dispositifs qui corrigent des inégalités. Les plus aisés paient beaucoup d'impôts, car ils gagnent beaucoup d'argent, mais ils ne paient pas plus que le reste de nos concitoyens. Il faut rétablir la justice fiscale.
M. Victorin Lurel. - Monsieur Rietmann, comment établir un régime fiscal sans tenir compte des capacités contributives de chacun ? Quand on en tient compte, sociologie simpliste, il y a des différences, et cela ne revient pas à opposer riches et pauvres. Chacun doit contribuer en fonction de ses facultés : riches, classes moyennes, revenus faibles. Ce n'est pas une politique de classe.
M. Jean-Raymond Hugonet. - Mais si !
M. Victorin Lurel. - Ne soyez pas dans le déni, votez ces amendements avec nous.
M. Alexandre Ouizille. - Les pauvres ne paient pas d'impôts, monsieur Capus ? Première nouvelle ! (Protestations sur les travées des groupes UC et INDEP) Connaissez-vous la TVA ? Les plus pauvres consomment l'intégralité de leur revenu : ils paient tous l'impôt !
M. Cozic a évoqué la dynamique des revenus du premier décile. Soit on n'en tient pas compte, soit on ajuste notre régime fiscal à cette réalité. La CDHR est un petit pas, nous voudrions aller beaucoup plus loin. Regardez les dynamiques économiques - revenus, patrimoine - et comprenez que la société se fige, se crispe (M. Olivier Rietmann manifeste son exaspération par un geste de la main), sans quoi vous irez droit dans le mur, en klaxonnant...
M. Pierre Barros. - Lors de la direction générale, hier, nous sommes engagés à faire un travail sérieux, responsable. Aujourd'hui, nous démarrons avec un débat caricatural opposant les riches, faits pour être très riches, et les pauvres, faits pour être très pauvres. Si nous en restons là, nous allons souffrir.
La justice fiscale consiste à faire contribuer chacun au financement des services publics, proportionnellement à ses revenus. Cela exige une actualisation permanente, car l'optimisation existe. La fiscalité est vivante ; la faire évoluer n'est pas agressif. Le rattrapage, c'est du bon sens. La CDHR est un levier pour plus de justice fiscale. Quand on prend un peu à ceux qui ont beaucoup, il leur en reste encore pas mal. Il n'y a là rien de confiscatoire.
M. Emmanuel Capus. - À gauche, on nous parle de la taxe Zucman...
M. Thierry Cozic. - Nous parlons de la CDHR !
M. Emmanuel Capus. - ... et du dernier centile. Ce n'est pas le sujet. Notre débat porte sur la CDHR, qui touche ceux qui gagnent 250 000 euros par an : c'est beaucoup, mais ce ne sont pas les ultra-riches, les milliardaires et les centimillionaires !
Olivier Rietmann a rappelé que plus de 50 % de la population ne paie pas l'impôt sur le revenu. En réalité, ces personnes ont une contribution négative, c'est-à-dire qu'ils touchent plus de l'État qu'ils ne versent en TVA et en impôts.
Le sujet, c'est l'impôt sur le revenu. Les « riches » sont ceux qui créent l'emploi et paient 75 % de l'impôt sur le revenu. (M. Grégory Blanc lève les bras au ciel ; M. Yannick Jadot proteste.) On me rétorque que ceux qui ne paient pas l'impôt sur le revenu paient la TVA ? Dans ce cas, dites aussi que les riches paient 17,2 % de prélèvements sociaux, qui ne sont pas pris en compte dans la CDHR ! (Mme Nadine Bellurot renchérit.)
Mme Florence Blatrix Contat. - En vingt ans, les plus hauts revenus ont plus que doublé. En cinq ans, nous devrons trouver 120 milliards d'euros. Il faudra faire des efforts, demandons-les à ceux dont les revenus ont le plus augmenté. C'est injuste de faire peser les efforts sur les plus pauvres, avec l'année blanche notamment. Chacun doit contribuer en proportion de ses revenus. Je suis favorable à la prolongation de cette taxe jusqu'au retour sous les 3 % de déficit.
M. Daniel Fargeot. - Il faut être mesuré, comme l'a dit mon collègue du Val-d'Oise, Pierre Barros : n'opposons pas les mauvais riches aux gentils pauvres, sinon nous n'y arriverons jamais. On sait que tout le monde acquitte la TVA, et heureusement ! Avançons, s'il vous plaît.
M. Simon Uzenat. - Les plus riches paient aussi des cotisations sociales, oui, mais dans quelle proportion cela pèse-t-il sur leur pouvoir d'achat ? C'est marginal. (M. Olivier Rietmann proteste.) Nous aurons le même débat sur la taxe d'habitation, qui représentait 9 milliards d'euros de recettes. Les plus aisés se demandaient-ils s'ils pouvaient la payer ? Absolument pas !
Nous n'opposons pas les uns aux autres, nous disons simplement qu'il faut contribuer davantage lorsqu'on a davantage de moyens. Les plus fortunés s'inquiètent-ils de l'état de l'école publique ? De l'hôpital public ? Ils disposent de moyens de contournement, en allant vers le privé.
M. Olivier Rietmann. - Vous mélangez tout !
M. Simon Uzenat. - La défense de nos services publics réclame des moyens supplémentaires : c'est le patrimoine de ceux qui n'en ont pas.
Quand on a pris des risques, il n'est pas choquant de gagner davantage. Le consentement à l'impôt...
Mme la présidente. - Il faut conclure.
M. Simon Uzenat. - ... naît lorsque chacun est sollicité de façon juste.
Mme Christine Lavarde. - Le consentement à l'impôt dépend aussi de la qualité des services publics et de ce qui est fait de nos impôts.
Nous ne voterons pas les amendements visant à prolonger la CDHR jusqu'à ce que le déficit repasse sous les 3 % - non que nous ne souhaiterions pas tenir cet objectif, bien au contraire, mais parce que nous estimons qu'il existe d'autres solutions que de créer de la fiscalité pour créer de la fiscalité. (Murmures à gauche)
À force d'empiler les dispositifs, on aboutit à des Frankenstein dont personne ne veut.
M. Grégory Blanc. - Il fallait le dire l'année dernière !
Mme Christine Lavarde. - Si la CDHR devait être pérennisée, il faudrait réécrire son dispositif. Nous en validons le principe cette année, mais ce n'est pas un blanc-seing pour les années à venir. Je le répète : nous sommes favorables à un retour sous les 3 % de déficit. (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Franck Dhersin. - Excellent !
M. Raphaël Daubet. - Notre groupe estime que cette mesure limite l'optimisation fiscale et répare une bizarrerie, une injustice fiscale. Nous sommes favorables à la pérennisation de la CDHR jusqu'au retour sous les 3 % de déficit, et à une réécriture pour limiter l'optimisation fiscale.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. - Chacun s'est exprimé, je n'y reviendrai pas. Il serait bon que l'on tranche la question aujourd'hui, en votant le maintien de la CDHR jusqu'à ce que le déficit soit repassé sous les 3 % ; on éviterait de créer un marronnier supplémentaire. (Mme Christine Lavarde ironise.)
M. Albéric de Montgolfier. - On ne risque pas de revenir à 3 % dans ces conditions.
M. Claude Raynal, président de la commission. - Adoptons ensemble ce principe, ce serait une avancée collective. (M. Alexandre Ouizille applaudit.)
M. Albéric de Montgolfier. - Et les 3 %, à la Saint - Glinglin !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - L'amendement n°I-2522 rectifié bis sécurise la base juridique du dispositif ; cela évitera des contentieux à l'État. Hormis cette avancée, son rendement net est peu important.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - J'émets donc un avis de sagesse sur cet amendement.
M. Thierry Cozic. - Je rends l'amendement n°I-643 identique à l'amendement n°I-2539 de M. Delcros. (M. Bernard Delcros acquiesce.)
L'amendement n°I-2522 rectifié bis, modifié par la suppression du gage, est adopté.
L'amendement n°I-2505 rectifié ter n'a plus d'objet.
À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nosI-2539 rectifié ter, I-643 rectifié, I-1352 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°63 :
| Nombre de votants | 345 |
| Nombre de suffrages exprimés | 322 |
| Pour l'adoption | 128 |
| Contre | 194 |
L'amendement nosI-2539 rectifié ter, I-643 rectifié et I-1352 rectifié ne sont pas adoptés.
Les amendements nosI-642 et I-2210 n'ont plus d'objet.
L'amendement n°I-1254 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°I-911 rectifié septies de M. Fouassin et alii.
M. Stéphane Fouassin. - L'année dernière, des exemptions de CDHR ont été prévues pour un certain nombre de réductions d'impôt liées à des investissements outre-mer. Pourquoi ne seraient-elles pas reconduites ? Dans un souci de justice fiscale et pour préserver l'orientation de l'épargne vers l'outre-mer, nous proposons de manière transpartisane de prolonger le retraitement intégral de ces réductions.
Mme la présidente. - Amendement identique n°I-1915 de M. Lurel.
M. Victorin Lurel. - L'absence de rétrocession abîmerait l'attractivité fiscale d'investissements nécessaires à nos territoires. L'amendement suivant vise uniquement la part rétrocédée à l'exploitant ultramarin.
Mme la présidente. - Amendement n°I-912 rectifié septies de M. Fouassin et alii.
M. Stéphane Fouassin. - Repli. Sans retraitement, le calcul de la CDHR serait faussé : ce serait à la fois injuste pour le contribuable et préjudiciable aux investissements en outre-mer.
Mme la présidente. - L'amendement identique n°I-1916 de M. Lurel vient d'être défendu.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Nous touchons du doigt la complexité de cette taxe, imaginée dans l'urgence et censée ne s'appliquer qu'une année. Certaines niches fiscales y ont été incluses sans qu'on sache vraiment pourquoi. Difficile d'y voir clair dans ce dispositif brinquebalant... Faute d'un travail de fond préalable, retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - La CDHR repose sur un principe : remonter le taux d'imposition moyen de contribuables qui perçoivent beaucoup de revenus du capital ou recourent massivement aux crédits d'impôt. Mais tous les crédits d'impôt directement liés à l'activité productive sont exclus, afin d'éviter des effets négatifs. Pour les crédits d'impôt bénéficiant aux particuliers, il a été décidé de ne pas toucher au stock d'investissements faits. En revanche, à partir de 2026, les personnes se détermineront en connaissance de cause.
La CDHR est en quelque sorte une mesure balai, destinée à garantir un taux d'imposition effectif d'au moins 20 %. Si nous commençons à introduire des niches dans un dispositif anti-abus - en d'autres termes, anti-maximisation des niches -, il perdra son sens. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Victorin Lurel. - Quand il s'agit des outre-mer, on est prêt à chambouler tout le régime existant ! Acceptez au moins nos amendements de repli. Vous allez désespérer des contribuables qui ont conçu, selon la formule poétique employée par le rapporteur général, des « espérances légitimes »... La mesure adoptée, vous aurez largement le temps de revoir l'économie du dispositif. Après les méchancetés votées dans le PLF contre l'attractivité de nos territoires, certes corrigées depuis, le rejet de nos amendements serait grave.
M. Emmanuel Capus. - Ces amendements sont une preuve de plus qu'on a monté une usine à gaz. Les Indépendants les voteront.
M. Grégory Blanc. - Par cohérence, nous ne voterons pas ces amendements. L'abattement Madelin n'est pas intégré dans la CDHR, d'autres dispositifs non plus. Si nous voulons réhabiliter l'impôt, il faut un seuil mécanique, sans exceptions. Sinon chacun défendra ses niches, jugées plus légitimes que les autres... (Mme Amélie de Montchalin acquiesce.) L'enjeu est bien de garantir une contribution minimale.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Monsieur Lurel, aucune disposition ne défavorise spécifiquement les investissements en outre-mer. Pour tous les investissements réalisés jusqu'au 31 décembre 2025 dans l'immobilier de loisir et les résidences hôtelières à vocation sociale, les dispositifs Madelin, Pinel et autres s'appliquent. À partir du 1er janvier 2026, ceux qui investissent le feront en connaissance de cause, conscients de l'existence de la CDHR. Nous voulons nous assurer que le taux d'imposition effectif est d'au moins de 20 % pour les très hauts revenus.
Les amendements identiques nosI-911 rectifié septies et I-1915 ne sont pas adoptés, non plus que les amendements identiques nosI-912 rectifié septies et I-1916.
Mme la présidente. - Amendement n°I-560 rectifié ter de M. de Legge et alii.
M. Dominique de Legge. - Cet impôt qui devait être exceptionnel et provisoire semble devoir durer... Le retour aux 3 % n'étant pas pour demain, partons au moins sur des bases saines. Retirons du calcul les sommes versées au titre du mécénat, d'autant que les fonds publics alloués aux projets risquent de ne pas aller croissant.
Mme la présidente. - Amendement identique n°I-644 de M. Kanner et du groupe SER.
Mme Florence Blatrix Contat. - Nous proposons la même mesure, destinée à préserver le mécénat.
Mme la présidente. - Amendement identique n°I-1338 rectifié ter de M. Lemoyne et alii.
M. Martin Lévrier. - Défendu - et fort bien !
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'assiette de la CDHR est minorée par de nombreuses niches, essentiellement liées à l'activité professionnelle et aux entrepreneurs individuels. Il s'agit d'éviter une différence de traitement entre les entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu et celles soumises à l'impôt sur les sociétés. Ce problème ne se pose pas pour les dons. Par ailleurs, nous aurons après l'article 3 un débat sur la juste imposition.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - La réduction d'impôt sur les dons permet de réduire son revenu fiscal de référence jusqu'à 20 %. Nous sommes heureux que des ménages aisés contribuent à des actions d'utilité publique dans de nombreux domaines ; cette niche a une croissance de 6 % par an, ce qui est une bonne nouvelle.
M. Albéric de Montgolfier. - Les ménages pallient les défaillances de l'État...
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - En revanche, l'exclure du calcul de la CDHR poserait un problème de cohérence.
M. Emmanuel Capus. - Je suis d'accord avec Dominique de Legge et, ce qui arrive moins souvent, Patrick Kanner... Dommage qu'il ne soit pas là pour le constater. (On ironise sur les travées du groupe SER.)
Quand vous avez donné, vous avez donné : il serait aberrant que ces sommes soient incluses dans les revenus soumis à taxation ! Les Indépendants voteront ces amendements.
Les amendements identiques nosI-560 rectifié ter, I-644, I-1338 rectifié ter sont adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°I-1353 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Les non-résidents qui réalisent des plus-values ou perçoivent des revenus en France ne sont pas passibles de la CDHR. Ainsi, un Français installé à Bruxelles, qui réaliserait des plus-values, immobilières ou économiques, ne serait pas concerné. Mettons un terme à cette injustice et valorisons plutôt ceux qui choisissent notre pays !
L'amendement n°I-1353, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 2, modifié, est adopté.
M. Thomas Dossus. - Rappel au règlement, sur le fondement de l'article 44, alinéas 6 et 7.
Hier soir, le Gouvernement a demandé l'examen par priorité des articles 11, 12, 18, 19 et 26, ainsi que des amendements portant articles additionnels. Or, suivant le dérouleur, une partie de ces articles et amendements figurent toujours dans l'ordre normal de la discussion.
Je comprends qu'il faille tenir compte des disponibilités de tel ou tel ministre, mais nous avons besoin d'explications, pour la clarté de nos débats et pour nous organiser.
Acte en est donné.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Roland Lescure souhaite être présent pour l'examen des dispositions touchant à la fiscalité des entreprises, par égard pour la Haute Assemblée ; c'est la raison de l'appel en priorité d'une série de mesures.
Les dispositions relatives à la fiscalité du logement ou à la fiscalité locale figurant après l'article 12 restent placées dans l'ordre normal de la discussion.
Après l'article 2
Mme la présidente. - Amendement n°I-1262 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Nous voulons maintenir pendant dix ans la résidence fiscale en France d'un contribuable qui s'établirait dans un territoire où la fiscalité est de moitié inférieure à la nôtre. Il ne s'agit pas de mettre en place une fiscalité fondée sur la nationalité, mais d'instaurer une clause anti-abus, limitée et proportionnée. Les expatriés ne sont pas concernés, puisqu'ils perçoivent des revenus à l'étranger. Ce sont les délocalisations fiscales de très hauts patrimoines que nous visons. La Suède applique déjà ce mécanisme, qui est donc conforme au droit européen. Acceptons-nous de laisser subsister une brèche ou assumons-nous de protéger l'assiette fiscale des stratégies d'évitement ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Vous risquez d'introduire un critère de nationalité dans la détermination de l'impôt. Sur le plan technique, la mesure s'appliquerait sous réserve de, tout de même, 130 conventions fiscales internationales. Quant à votre critère d'une fiscalité inférieure de plus de 50 % à celle de la France, bonne chance pour l'appliquer année après année... Enfin, un problème se poserait pour nos compatriotes binationaux. Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Vous soulevez une très bonne question, que la France a mise à l'agenda du G20 et de l'OCDE l'année dernière, conjointement avec le Brésil et avec le soutien de l'Allemagne et de l'Espagne. Il s'agit, au fond, d'instaurer un impôt minimal sur les personnes, après les multinationales. Représentante de la France à l'OCDE, j'ai eu à défendre des idées assez proches de la vôtre, mais qu'il faut intégrer dans les conventions fiscales. Cette idée intéressante doit être promue dans le bon cadre, qui hélas n'est pas le Sénat, mais l'OCDE...
L'amendement n°I-1262 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°I-2419 de M. Chantrel et alii.
Mme Colombe Brossel. - M. Chantrel et Mme Conway-Mouret proposent un cadre fiscal de résidence principale pour la résidence détenue en France par les contribuables résidant en dehors de l'Union européenne. Détenir un bien sur le territoire national leur permettrait de maintenir un lien fort avec notre pays. Des discussions sont en cours depuis trois ans en vue d'un nouveau cadre fiscal ; construisons-le avec le souci d'une plus grande justice sociale entre Français.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Depuis 2014, une exonération de taxe d'habitation sur les résidences secondaires est prévue pour le logement qui constituait la résidence principale avant l'expatriation. Je ne vois pas la nécessité de ce nouvel avantage fiscal. Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis. Le concept est intéressant mais très difficile à appliquer, d'autant que le droit européen ne permet pas de discriminer selon la nationalité. Au reste, la loi de finances pour 2024 prévoit une exonération de taxe d'habitation sur les résidences secondaires l'année du retour en France.
L'amendement n°I-2419 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°I-306 rectifié quater de M. Lévrier et alii.
M. Martin Lévrier. - Mme Dupont a travaillé toute sa vie, sans toujours réussir à avoir un plein temps : elle touche une retraite de 1 035 euros par mois. Elle ne paie pas d'impôts, mais elle a un revenu fiscal de référence.
M. Durand, qui n'a jamais travaillé, bénéficie de l'ASPA ou du minimum vieillesse, pour 1 035 euros aussi. Mais comme il n'a pas de revenu fiscal de référence, il peut toucher certaines allocations sociales.
Cet exemple illustre l'objet de notre amendement : intégrer toutes les aides sociales, imposables ou non, dans le revenu fiscal de référence, par équité.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Résoudre ce problème suppose une réforme de très grande ampleur. La ministre va certainement nous en dire davantage. Retrait ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Cet amendement d'appel attire l'attention sur un problème dont je ferai l'une de mes priorités, avec la réforme de la taxe sur les salaires, si je suis toujours en fonction, à partir du 2 janvier... (Sourires)
Le revenu fiscal de référence n'est plus vraiment une référence : deux cents catégories de revenus et prestations n'entrent pas dans son calcul. Le problème, c'est que l'ensemble des barèmes sociaux sont construits sur ce fondement. Il convient, d'une part, d'intégrer tous les revenus dans ce calcul, ce qui suppose des changements informatiques ; d'autre part, d'ouvrir le chantier, social et politique, de la rénovation des barèmes d'accès aux prestations. La création d'une allocation sociale unique, annoncée par le Premier ministre, sera aussi une réponse.
J'associerai tous les parlementaires volontaires à ce chantier de lisibilité et de consentement à l'impôt. Au bénéfice de cet engagement ferme, j'invite M. Lévrier à retirer son amendement.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Un amendement d'appel pas du tout téléphoné...
M. Martin Lévrier. - Non, il n'y a eu aucun coup de téléphone. D'ailleurs, je n'avais aucune envie de le retirer ! Un président d'office d'HLM m'a exposé cette situation, qui m'a paru complètement dingue.
M. Albéric de Montgolfier. - En effet, c'est un vrai sujet !
M. Martin Lévrier. - Mais je suis satisfait de la réponse de la ministre, à qui je fais confiance. (M. Olivier Paccaud rit.)
L'amendement n°I-306 rectifié quater est retiré.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je suis moi aussi satisfait, car j'avais également appelé au retrait... (Sourires)
Mme la présidente. - Vous n'aviez pas les mêmes arguments... (Nouveaux sourires)
Amendement n°I-1269 de M. Barros et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - Il s'agit de l'imposition commune des couples mariés ou pacsés. La règle de base, c'est la fusion : un foyer, un quotient familial, un taux. Cette approche est liée à une vision ancienne de l'institution maritale : un chef de famille, une personne à charge, un barème conçu en conséquence.
Nous proposons une option d'imposition distincte, pour que chacune et chacun puisse choisir. C'est le prolongement fiscal de l'évolution du code civil : une femme ne doit pas être fiscalement définie par les revenus de son conjoint. Si cela peut contribuer, même modestement, à réduire les inégalités de genre, à diminuer la dépendance économique au sein des couples et à donner à chaque personne la maîtrise de son revenu, ce sera une belle avancée !
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La législation a déjà bien évolué vers la déconjugalisation. Votre amendement présente des effets de bord que nous ne maîtrisons pas. Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - L'approche par foyer s'enracine dans notre code civil. Mais le taux de prélèvement à la source est par défaut individualisé, alors que, précédemment, le taux par défaut était le taux moyen : c'est une avancée. La déconjugalisation totale du calcul coûterait à l'État plus de 1,5 milliard d'euros et serait sans doute censurée par le Conseil constitutionnel. Retrait sinon avis défavorable, mais je suis prête à travailler avec vous sur le chiffrage du coût de ce nouveau régime.
L'amendement n°I-1269 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°I-1354 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Dans son rapport d'octobre 2024, le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) souligne l'accroissement des inégalités par le quotient conjugal. Recentrons ce mécanisme sur les foyers pour lesquels il a une justification sociale. Près de 40 % des gains liés à la conjugalisation profitent aux 15 % des ménages les plus aisés, pour plus de 10 milliards d'euros ! Nous proposons d'exclure les foyers dont le revenu fiscal de référence dépasse 120 000 euros.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Le phénomène que vous décrivez traduit la concentration de l'impôt sur le revenu. Votre mesure induirait un effet de seuil dangereux : si un conjoint gagne 10 000 euros par mois et que l'autre n'a pas de revenus, le fait pour le second de prendre un emploi faiblement rémunéré pourrait être sans effet sur les revenus du couple. Il faut peut-être y retravailler ; en tout cas, avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis. Notre impôt sur le revenu est en effet très concentré : 10 % des foyers acquittent 75 % de l'impôt, 3 % en acquittent 13 %. Les chiffres que vous donnez ne font que le refléter. D'aucuns diront que c'est parce que les revenus sont aussi très concentrés, mais c'est aussi parce que la courbe de progressivité n'est pas linéaire. D'autre part, votre amendement entraînerait un effet de seuil énorme ; je pense que le Conseil constitutionnel ne laisserait pas passer. Enfin, que feriez-vous des parts fiscales ? Proposez-vous la fin de la familialisation ?
M. Grégory Blanc. - C'était un amendement d'appel, inspiré par le rapport du CPO, qui n'est pas un organe révolutionnaire...
L'amendement n°I-1354 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°I-1355 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Il s'agit de plafonner l'avantage fiscal lié au quotient conjugal à 7 000 euros. L'avantage demeure, mais nous en réduisons le coût pour l'État - je le répète, plus de 10 milliards d'euros.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Avis défavorable.
M. Grégory Blanc. - Il s'agit d'une préconisation du CPO. Quand il y a des effets d'aubaine de cette ampleur, nous devrions les corriger !
L'amendement n°I-1355 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°I-1255 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - Le niveau de vie des femmes diminue de 22 % après une séparation, contre 3 % pour les hommes. C'est la conséquence de décennies de temps partiel subi, de travail domestique gratuit, bref d'un système qui repose encore sur l'exploitation du travail des femmes.
La prestation compensatoire est censée corriger cet écart. Si elle est versée rapidement, la bénéficiaire n'est pas imposée. Mais si son versement est étalé sur huit ans, ce capital devient imposable. Or la nature de la prestation ne change pas ! La fiscalité aggrave l'inégalité qu'elle est censée corriger. Restaurons une cohérence : une prestation compensatoire doit rester compensatoire, quel que soit son mode de versement. C'est une mesure de justice, de cohérence, féministe et de classe, car les femmes les plus touchées sont celles qui ont travaillé toute leur vie pour des salaires modestes dans des métiers pénibles.
Mme la présidente. - Amendement n°I-2065 rectifié de M. Canévet et alii.
M. Michel Canévet. - L'amendement a été brillamment défendu ; je partage pleinement cette analyse.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable. Le dispositif proposé manque sa cible, car les plus modestes ne payent pas l'impôt sur le revenu. Par ailleurs, le conjoint peut, s'il a des enfants à charge, bénéficier du quotient familial et de la demi-part fiscale pour parent isolé. Or vous ne prévoyez pas de fiscalisation de ces sommes pour l'ex-conjoint débiteur. Cette double exonération des revenus ne peut être acceptée.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Avis défavorable. Ces amendements ont des effets de bord. Il s'agit d'une prestation compensatoire. Celui qui la reçoit est imposé parce qu'elle est déduite chez son débiteur. Quand elle est versée de façon périodique, elle est assimilée à une pension alimentaire. Le juge aux affaires familiales (JAF) prend en compte la différence de capacité contributive pour définir les montants demandés. Le système actuel est stabilisé. Retrait, sinon avis défavorable.
Les amendements suivants concernent les pensions alimentaires. Là aussi, il y a des effets de bord.
Mme Colombe Brossel. - Traiter différemment ceux qui perçoivent et ceux qui versent est profondément injuste.
Sur les pensions alimentaires, je suis impatiente de connaître les effets de bord, madame la ministre. Nous découvrons ce sujet... (On ironise et renchérit sur les travées du groupe SER.)
Cet amendement manque son objet, car les plus précaires ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu, dit M. Husson. Or, selon le Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA), la plus grande inégalité ne concerne pas les plus précaires, mais les femmes qui gagnent entre 1,1 et 1,3 fois le Smic. Votre réponse, monsieur le rapporteur général, tombe à côté.
M. Michel Canévet. - Je retire mon amendement, compte tenu des explications du rapporteur général et du Gouvernement.
L'amendement n°I-2065 rectifié est retiré.
L'amendement n°I-1255 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°I-2625 rectifié de Mme Vogel et alii.
M. Thomas Dossus. - Les trois quarts des décisions de justice confient la garde des enfants à la mère exclusivement ; pourtant les femmes sont désavantagées par le cadre qui régit les pensions. Elles sont 75% à avoir un revenu inférieur à celui de leur conjoint. Le niveau de vie des femmes chute de 20 % à la suite d'une séparation, contre 3 % pour les hommes. Or le montant des pensions - 190 euros par mois en moyenne - ne couvre pas les coûts réels, qui sont de 625 euros.
Les pensions alimentaires sont déductibles du revenu du débiteur, mais imposables chez le créancier, souvent des femmes isolées avec enfants. Cette fiscalité des pensions alimentaires est un cadeau de l'État aux hommes des classes moyennes supérieures, renforçant les inégalités avec leur ex-conjointe. Réattribuons la charge fiscale au débiteur.
Mme la présidente. - Amendement n°I-1256 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - La pension alimentaire garantit le droit de l'enfant à être entretenu par ses deux parents. Pourtant, elle révèle une fracture profonde, sociale et genrée. Le montant des pensions est quatre fois trop faible. Les mères prennent souvent en charge la différence, avec des revenus fragiles. Résultat, les familles monoparentales sont les plus exposées à la pauvreté.
Intégrer la pension dans le revenu imposable de la mère est une absurdité. Cesser de fiscaliser les pensions alimentaires coûterait 400 millions d'euros - mais l'effort budgétaire serait moindre en réalité, car de nombreuses mères seules ne sont pas imposables. Et quand bien même, est-ce trop cher pour améliorer les conditions de vie de centaines de milliers d'enfants ?
Mme la présidente. - Amendement n°I-1660 rectifié de M. Iacovelli et alii.
Mme Nadège Havet. - Défiscalisons la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants, avec un plafond de 4 000 euros par enfant et 12 000 euros par an. Le parent débiteur pourra aussi intégrer les enfants dans le quotient familial.
Mme la présidente. - Amendement n°I-645 de M. Cozic et du groupe SER.
Mme Colombe Brossel. - La pension alimentaire est-elle un revenu ? Non. Elle contribue à l'éducation des enfants. Il est donc injuste qu'elle puisse être déduite du revenu imposable du parent verseur et prise en compte dans le revenu imposable du parent à qui elle est versée. Je me fais le relais des femmes solos entendues par la délégation aux droits des femmes dans le cadre de notre rapport sur les familles monoparentales.
Lorsque le parent non gardien est défaillant, la solidarité nationale prend le relais. Mais l'allocation de soutien familial (ASF) n'est pas imposable, contrairement à la pension alimentaire.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable. Ces amendements ne touchent pas forcément leur cible.
En 2022, seulement 20 % des ménages recevant une pension alimentaire étaient redevables de l'impôt sur le revenu.
Ensuite, la fiscalisation de ces sommes conduirait à un surcoût d'impôt significatif qui aurait pour conséquence de diminuer le montant estimé de la capacité contributive que le juge prend en compte pour déterminer le montant des pensions alimentaires.
Enfin, l'attribution d'un quart de part fiscale pour le parent débiteur me semble contradictoire.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Ce qui a été voté à l'Assemblée nationale aboutissait en réalité à 500 millions d'euros de recettes en plus pour l'État, soit 500 millions de revenu en moins pour les pères, et donc 500 millions d'euros de pensions alimentaires en moins.
Vos principes sont légitimes, mais votre proposition a des effets de bord, sauf à revoir tous les barèmes des juges. (Mme Frédérique Espagnac acquiesce.)
Si on adoptait votre amendement, une double imposition s'appliquerait pour les enfants majeurs : fiscalisation pour le père et pour la mère. (Mme Colombe Brossel le conteste.)
Nous pourrons travailler ensemble sur le sujet. Mais, en l'état, sans révision du barème des juges, ces amendements reviendraient à moins de pensions alimentaires pour celles qui élèvent leurs enfants seules.
Mme Colombe Brossel. - Nous serons ravies de vous voir, avec Dominique Vérien, pour avancer sur ce sujet.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Le 2 janvier !
Mme Colombe Brossel. - Oui, ou même le 3...
Il n'existe pas un seul barème, mais deux : celui de la CAF et celui du ministère de la justice, qui sont radicalement différents ! C'est un vrai problème pour les mères solos. Passez le message à vos collègues, il faut retravailler le barème. (Mme Amélie de Montchalin acquiesce.)
Les conclusions du HCFEA ne rejoignent pas les propos de M. Husson. Et avec vos arguments, madame la ministre, on aboutit à un paradoxe un peu choquant : il est plus intéressant pour une mère solo de bénéficier de l'ASF plutôt que de percevoir la pension alimentaire qui lui est due. Ce n'est pas juste. Nous ne pouvons faire assumer par la solidarité nationale notre incapacité à faire évoluer le code général des impôts. (MM. Victorin Lurel et Thierry Cozic applaudissent.)
M. Pascal Savoldelli. - Nous pensions retirer notre amendement au profit d'un autre mieux rédigé.
En finance, je connais l'effet levier : utiliser l'endettement pour augmenter la capacité d'investissement. En revanche, il faudra me préciser la notion d'effet de bord. Je dois manquer de culture...
On considère que la pension alimentaire est un revenu et non un transfert de la solidarité nationale. C'est un vrai sujet, pas uniquement fiscal, mais qui relève d'un choix de société. Voilà le débat.
Monsieur Husson, vous nous servez l'argument de l'impôt sur le revenu. Le dispositif profiterait aux femmes aisées ? Mais ce n'est pas le sujet ! Il s'agit là de progressivité de l'impôt.
Enfin, une mère qui ne reçoit pas de pension ne bénéficie d'aucun avantage fiscal. Or nous allons débattre pendant des jours d'exonérations et de niches fiscales !
Mme la présidente. - Il faut conclure.
M. Pascal Savoldelli. - C'est le sens de ces amendements.
M. Patrick Kanner. - Le Premier ministre a dit : « Le Gouvernement propose, nous débattons, vous votez. » Mais quelle est votre proposition, sur ce sujet de société qui concerne des dizaines de milliers de familles ? Pourquoi le Gouvernement n'a-t-il pas présenté d'amendement ? Il y a là une faille politique, un trou dans la raquette.
Mme Christine Lavarde. - Nous voterons contre ces amendements. Vous parlez sans cesse de justice fiscale. Or cet amendement augmenterait de 500 millions d'euros les recettes de l'État, par un effet de bord. Où est la justice ?
Le JAF tient compte des revenus de chacun des deux parents pour déterminer le montant de la pension. Votre amendement aurait dû porter sur le futur. En l'état, il produit un effet rétroactif sur toutes les décisions.
L'amendement n°I-1660 rectifié est retiré.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Qu'inclut-on dans les barèmes de référence ?
Une telle réforme dépasse le périmètre des comptes publics et ne peut se faire par amendement au PLF...
On veut aider les femmes qui élèvent seuls leur enfant. Effet de bord : 500 millions d'euros de pensions alimentaires en moins.
Un effet de bord, ce sont les effets en cascade qui adviennent quand une bonne proposition aboutit au résultat contraire à ce qui est souhaité. C'est un dommage collatéral.
Je tâcherai d'être la plus claire possible, au cours de nos débats, sur ces effets en cascade.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je suis d'accord avec le président Kanner. Du fait des conséquences durables de la funeste dissolution, nous avons peu de matière quand arrivent les budgets. D'où notre frustration sur des sujets d'importance : famille, mais aussi sécurité ou agriculture.
Mme Isabelle Briquet. - Il nous semble injuste de fiscaliser les pensions perçues, mais l'amendement n°I-645 ne prévoit pas de fiscaliser en contrepartie le verseur de ces pensions. Madame la ministre, je ne comprends pas votre objection.
Mme Frédérique Espagnac. - Nous ne comprenons pas pourquoi notre amendement a été mis en discussion commune avec les autres, car il ne va pas dans le même sens. Tout cela est incompréhensible.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Cet amendement est effectivement différent des deux autres. (On renchérit sur les travées du groupe SER.) Toutefois, il pose un autre problème. En plafonnant la valeur, on introduit un gain fiscal au divorce. Je le dis avec beaucoup de précaution. Vous créez des masses de revenus qui ne seront imposées ni d'un côté ni de l'autre. Votre amendement permet d'organiser une forme de fraude.
M. Patrick Kanner. - Vous voyez le mal partout !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Sur un tel sujet, il faut une réflexion d'ensemble. Dans les situations difficiles, augmenter la part de quotient familial, qui prévoit une forme d'exonération, aurait plus de sens. Votre proposition revient à transférer des masses de revenus sans imposition. Je suis prête à y travailler dès le lundi 5 janvier.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - En une demi-heure, vous avez reculé de trois jours... (Sourires)
L'amendement n°I-2625 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nosI-1256 et I-645.
Mme la présidente. - Amendement n°I-2587 rectifié de M. Canévet et alii.
M. Michel Canévet. - Les ruptures conventionnelles du contrat de travail sont un bon dispositif, mais on constate des abus. Une réflexion doit être menée à ce sujet, pour éviter les effets d'aubaine.
Cet amendement fiscalise les indemnités de rupture conventionnelle.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Retrait.
Cette exonération d'impôt sur le revenu n'est ni inconditionnelle ni illimitée. La retirer supprimerait le caractère incitatif de la rupture conventionnelle, pour le salarié comme pour l'employeur. Enfin, votre proposition entraînerait une différence de traitement, puisque les indemnités de licenciement sont exonérées d'impôt sur le revenu, dans une certaine limite.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - C'est un vrai sujet, auquel le PLFSS a apporté quelques éléments de réponse. Près de 25 % des dépenses de l'assurance chômage sont liées aux ruptures conventionnelles.
Ce régime doit rester dans une logique assurantielle. Les partenaires sociaux doivent y travailler. Une proposition de baisse du plafond a été émise. Avis défavorable, à ce stade.
L'amendement n°I-2587 rectifié est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°I-2123 de M. Gay et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Corrigeons une incohérence profonde de la fiscalité maritime. Nous voulons remplacer la référence au registre international français par les termes « sous pavillon français », afin d'aligner le régime fiscal de tous les marins français, quelles que soient les modalités administratives de leurs registres. Ne créons pas d'inégalités entre nos marins, qui font face à une concurrence internationale féroce.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - À bas les privilèges ! (M. Pierre Barros s'en amuse.) Avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - J'allais dire : même avis que le rapporteur général... (Sourires)
Notre régime dérogatoire me semble difficile à étendre à l'ensemble des pavillons français. La concurrence internationale est rude, et les marins soumis au registre international français (RIF) sont dans une situation particulière. Les marins des ferries ne sont pas du tout dans une situation comparable.
Débattons plutôt, à l'amendement suivant, de l'extension du régime plus favorable à Wallis-et-Futuna. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Un avis favorable est réservé à l'amendement suivant. Avis défavorable à celui-ci.
M. Pascal Savoldelli. - Merci pour « À bas les privilèges ! »
M. Olivier Rietmann. - On est tous d'accord !
M. Pascal Savoldelli. - Nous ne doutons pas de votre sincérité, mais serons vigilants sur les effets de bord... (Sourires)
L'amendement n°I-2123 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°I-160 rectifié de Mme Jacques et alii.
Mme Micheline Jacques. - Rétablissons l'égalité fiscale entre les marins français inscrits au registre de Wallis-et-Futuna et ceux qui sont inscrits au RIF. Les marins du RIF bénéficient d'une exonération d'impôt sur l'impôt sur le revenu, contrairement aux marines de Mata'Utu ; cela est contraire au principe d'égalité devant l'impôt.
Les conditions sociales d'exercice sont déjà conformes aux standards internationaux. L'absence d'exonérations fiscales crée une distorsion de concurrence et un frein au recrutement.
Mme la présidente. - Amendement identique n°I-2122 de M. Gay et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Défendu. Cela ne nous gêne pas de voter un amendement du groupe Les Républicains, quand il est identique au nôtre. (M. Jean-François Husson s'en amuse.)
Mme la présidente. - Amendement n°I-308 rectifié quinquies de M. Lévrier et alii.
M. Martin Lévrier. - Je rectifie mon amendement pour le rendre identique aux deux précédents. (Mme Micheline Jacques et M. Pascal Savoldelli apprécient.)
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis triplement favorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Sagesse ouverte.
Mme Annick Girardin. - Il existe de la sagesse fermée ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je préférais la première version de l'amendement de M. Lévrier. La navette précisera les choses.
M. Victorin Lurel. - Il n'y a que deux ou trois compagnies immatriculées à Mata'Utu. Je suis heureux que cette inégalité de traitement soit enfin corrigée.
Mme la présidente. - Madame la ministre, levez-vous le gage ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je lève le gage.
Les amendements identiques nosI-160 rectifié et I-2122 ainsi que l'amendement n°I-308 rectifié sexies, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés et deviennent un article additionnel.
La séance est suspendue à 13 h 05.
Présidence de M. Didier Mandelli, vice-président
La séance reprend à 14 h 35.
M. le président. - Amendement n°I-861 de M. Hochart et alii.
M. Aymeric Durox. - Cet amendement exonère d'impôt sur le revenu les médecins et infirmiers libéraux qui cumulent leur emploi et une pension de retraite. Leurs motivations sont diverses : passion du métier et attente d'un successeur entrent en ligne de compte. Mais l'incitation fiscale joue aussi un rôle important. Face à la pénurie de médecins, cet amendement relève du bon sens.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable. L'article 5 du PLFSS étend le régime simplifié des professions médicales aux médecins libéraux exerçant en cumul emploi-retraite. Son article 6 exonère toutes les cotisations dues par les médecins libéraux exerçant en cumul emploi-retraite intégral, afin de lutter contre les déserts médicaux.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Cet amendement me pose une grande difficulté : son dispositif touche toutes les professions libérales, à l'inverse de son objet qui ne vise que les infirmières et les médecins libéraux. Si vous aviez ciblé uniquement ces derniers, ma réponse aurait été la même que celle du rapporteur général.
Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°I-861 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-2591 rectifié bis de M. Canévet et alii.
M. Franck Dhersin. - Cet amendement supprime les abattements fiscaux pour les indemnités temporaires et pour les prestations et rentes viagères servies aux victimes d'accident du travail et à leurs ayants droit.
Au vu de l'état de nos finances publiques, la suppression de cet avantage fiscal est une mesure d'équité, qui permet en outre de lutter contre les abus.
M. le président. - Amendement n°I-603 rectifié de M. Fargeot et alii.
M. Daniel Fargeot. - Cet amendement aligne le régime fiscal des indemnités d'accident du travail sur celui des autres revenus de remplacement, qui sont entièrement imposables. Les indemnités d'accident du travail bénéficient d'une exonération de 50 % sur l'impôt sur le revenu, ce qui n'est pas le cas des indemnités maladie et des allocations de chômage. Pour mémoire, un salarié placé en accident du travail perçoit 100 % de son salaire.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Demande de retrait. Nous sommes pour le statu quo. Nous étudierons le sujet des personnes en affections de longue durée (ALD) à l'article 5. Nous souhaitons aligner le régime des ALD sur celui des accidents du travail.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Depuis 2010, l'exonération des indemnités AT-MP (accidents du travail et maladies professionnelles) est passée de 100 % à 50 %. Je ne souhaite pas faire évoluer ces règles ; nous aurons ce débat à l'article 5.
Cela dit, je comprends votre logique : vous souhaitez que la fiscalité du revenu de remplacement soit la même que celle du revenu qu'il remplace. Cette année, je propose plutôt d'aligner les indemnités versées au titre de l'ALD sur le régime des accidents du travail : ce serait déjà une première harmonisation.
Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°I-2591 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°I-603 rectifié.
M. le président. - Amendement n°I-1257 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Je salue la cohérence des collègues centristes qui veulent fiscaliser les ruptures conventionnelles tout en défiscalisant les heures supplémentaires. Chacun ses contradictions !
Sur les heures supplémentaires, deux visions du travail s'opposent. Pour vous, ce serait un outil miracle qui n'affecterait pas l'emploi. C'est votre argumentation.
Première réalité : quand on défiscalise les heures supplémentaires, on fait mécaniquement baisser le coût d'une heure travaillée par rapport au coût d'un emploi. Le choix est évident pour l'employeur : on augmente les heures et on n'augmente pas les postes.
Deuxième réalité : les heures supplémentaires défiscalisées remplacent les augmentations de salaire.
Troisième réalité : c'est la collectivité qui paie. Cette niche fiscale atteint 2,3 milliards d'euros en 2025 qui n'iront ni aux retraites, ni à la santé, ni à l'assurance chômage.
M. le président. - Amendement n°I-301 rectifié quater de M. Lévrier et alii.
M. Martin Lévrier. - Le plafond des heures supplémentaires est fixé à 7 500 euros. Si une heure est rémunérée 15 euros, cela représente 41 heures par mois. Cela fait beaucoup, on s'approche d'un CDD dont ne bénéficie pas quelqu'un d'autre. Je propose 5 000 euros.
M. le président. - Amendement n°I-300 rectifié quinquies de M. Lévrier et alii.
M. Martin Lévrier. - Cet amendement de repli exclut les cadres du dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires. Les cadres gagnent très bien leur vie : réservons cette facilité aux personnes qui doivent améliorer leur pouvoir d'achat.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Retrait, sinon avis défavorable. Les déciles 2 à 6 sont les principaux bénéficiaires de la défiscalisation des heures supplémentaires. Je souhaite déconstruire le mythe d'un dispositif qui bénéficie seulement aux cadres ; les ouvriers, notamment du secteur de la construction, en tirent aussi profit.
Des secteurs d'activité ont du mal à trouver de la main-d'oeuvre : quelque 500 000 offres d'emploi ne sont actuellement pas pourvues. Recourir aux heures supplémentaires permet à ceux qui le souhaitent de travailler plus pour gagner plus. Il est bon de continuer dans ce sens.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Nous en avons déjà débattu pour partie lors de l'examen du PLFSS, avec la baisse des charges patronales des entreprises de plus de 250 salariés. C'était une mesure intéressante pour homogénéiser les charges, quelle que soit la taille de l'entreprise.
Le plafond actuel de défiscalisation est bien calibré. Dans certains secteurs, le recours aux heures supplémentaires permet de gérer la saisonnalité des emplois. En moyenne, ce sont 2 000 à 4 000 euros par an d'heures supplémentaires qui sont déclarées. Cette niche représenterait 5 milliards d'euros, mais c'est autant de pouvoir d'achat en plus pour les travailleurs. Retrait, sinon avis défavorable aux deux amendements.
M. Martin Lévrier. - Je ne remets pas en cause ce système utile et performant pour des salariés qui disposent de revenus faibles. Mais je trouve dommage que cette exonération de cotisations sociales profite à ceux qui n'en ont pas besoin. Votons au moins mon amendement n°I-300 rectifié quinquies pour que les cadres n'aient pas accès à ce dispositif.
M. Pascal Savoldelli. - Les exonérations de charges patronales pour les entreprises de plus de 250 salariés relèvent du PLFSS. Nous voyons ici un autre effet de bord.
Quelque 90 % des 41 millions de contrats signés sont des CDD, de l'intérim ou de l'auto-entreprenariat. Seuls 10 % des contrats sont des CDI. Il y a un problème !
L'amendement n°I-1257 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos I-301 rectifié quater et I-300 rectifié quinquies.
M. le président. - Amendement n°I-1258 rectifié de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Nous proposons, en repli, de corriger les excès de la défiscalisation des heures supplémentaires. Le plafond a été relevé en 2022 à 7 500 euros. Même si certains sont convaincus de l'utilité du dispositif, nous pourrions nous mettre d'accord pour mieux le cibler, ou, à tout le moins, de l'évaluer. Nous finançons à l'aveugle. L'Institut des politiques publiques montre que la défiscalisation des heures supplémentaires n'a pas profité à l'emploi. Revenons à 5 000 euros, ce qui permettrait une économie de 500 millions d'euros.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°I-1258 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-2588 rectifié de M. Canévet et alii.
M. Franck Dhersin. - Nous soumettons à l'impôt sur le revenu les sommes perçues par les arbitres et les juges sportifs. Le coût de cette exonération s'élève à 7 millions d'euros.
M. Thomas Dossus. - Carton rouge !
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Comme l'an dernier, je répondrai qu'aucune évaluation n'a été faite. Retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Une évaluation a été menée, monsieur le rapporteur général ! (MM. Jean-François Husson et Franck Dhersin s'en réjouissent.)
Ce mécanisme est très plafonné. La partie exonérée ne peut pas dépasser 6 800 euros. Ce n'est donc pas un bénéfice énorme. Nombre d'arbitres sont des bénévoles. L'objectif de cette mesure était de les fidéliser, alors que les fédérations estiment ne pas être en mesure d'augmenter leurs rémunérations. Ce mécanisme est un subtil équilibre entre ce qui est à la charge de l'État et à la charge des fédérations.
L'amendement n°I-2588 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-208 rectifié ter de Mme Girardin et alii.
Mme Annick Girardin. - En dix ans, le marché de l'art a explosé de plus de 55 %, enrichissant les propriétaires d'oeuvres. La fiscalité française appliquée à l'art est une des plus favorables au monde. Tous ces dispositifs ne sont pas à jeter ; il faut bien sûr continuer à aider les artistes et la création en encourageant la transmission d'oeuvres entre particuliers. Mais certains avantages fiscaux ne sont pas justifiés.
En vue de mieux imposer les plus-values de cession, nous portons le taux forfaitaire de 6 à 12 %, bien inférieur aux 30 % du prélèvement forfaitaire unique (PFU) appliqué aux autres plus-values mobilières. Nous remplaçons l'abattement pour durée de détention par l'indexation du prix d'acquisition sur le taux d'inflation moyen constaté durant la durée de détention.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable. La hausse est assez brutale et pourrait donner lieu à une optimisation. Nous en débattrons lorsque nous évoquerons le régime applicable aux entreprises en cas de cession de biens somptuaires.
Votre amendement serait difficilement opérant : les ventes d'oeuvres d'art dépendent de l'état du marché, non de l'inflation.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Vous avez déposé plusieurs amendements sur ce sujet. Je n'ai pas pu me pencher sur leurs conséquences directes et indirectes.
Vous proposez d'harmoniser le régime des oeuvres d'art avec celui des métaux précieux, des bijoux et autres biens de valeur. Actuellement, le régime est différencié : une partie est fiscalisée à 11 % dès le premier euro pour certains métaux tels que l'or. Le taux n'est que de 6 % pour les cessions de bijoux, d'objets d'art et de collection supérieures à 5 000 euros - ainsi, les brocantes en sont exemptées, entre autres.
Votre proposition bouleverserait l'équilibre. Retrait.
M. Grégory Blanc. - Je remercie notre collègue d'avoir déposé ces amendements.
La France est le deuxième pays au monde pour les ventes d'oeuvres d'art. Les conclusions de la commission d'enquête relative à la criminalité organisée ont montré qu'une part croissante des activités de blanchiment passait par le commerce des oeuvres d'art.
Si nous voulons lutter activement contre la fraude et le crime organisé, le nombre de déclarations de soupçon sur le trafic d'oeuvres d'art doit augmenter ; pour ce faire, nous devons réformer notre fiscalité, inadaptée. Je voterai cet amendement et les suivants. Leur rédaction pourra être améliorée lors de la navette ou de la CMP, le cas échéant.
Mme Annick Girardin. - Nous réduisons les incitations à la détention purement privée : on ne vise que les particuliers et non pas les entreprises pratiquant le mécénat. Notre proposition favorise donc l'accès à l'art pour le grand public. Nous rétablissons l'équité fiscale entre un collectionneur d'art et un investisseur en bourse, qui ne bénéficient pas du même traitement lors de la cession. Enfin, nous mettons fin à un système qui avantage l'achat d'oeuvres par un prince saoudien plutôt que par un Français. (M. Grégory Blanc renchérit.)
L'amendement n°I-208 rectifié ter n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-209 rectifié quater de Mme Girardin et alii.
Mme Annick Girardin. - Vendre un objet d'art à l'exportation est plus intéressant que vendre à un Français, car les plus-values de cession ne sont alors pas imposées. Notre droit fiscal encourage la fuite d'oeuvres d'art. En outre, les critères sont opaques et ne protègent pas toutes les oeuvres qui suscitent l'appétit des investisseurs. En 2014, le Qatar est devenu le propriétaire de l'autoportrait Le Désespéré de Gustave Courbet, sans aucune retombée fiscale pour notre pays. Quand déciderons-nous enfin d'agir différemment ?
En parallèle, l'amendement prévoit de soutenir les jeunes artistes. D'un côté on taxe, de l'autre on aide.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable. (Mme Annick Girardin s'émeut de la brièveté de l'intervention.)
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Ce sujet est lié au précédent, tout en étant quelque peu différent. Les conventions fiscales disposent que la taxe s'applique au lieu de résidence du propriétaire du bien.
Avec votre amendement, nous serions le seul pays au monde à faire différemment. Résultat : les transactions se feraient ailleurs et nous perdrions les activités qui y sont liées, même si celles-ci ne génèrent pas directement de recettes fiscales.
Par ailleurs, porter le taux quand il s'agit du premier achat n'est pas une bonne solution. Retrait.
M. Pascal Savoldelli. - Nos collègues ont été raisonnables en faisant passer le taux de 6 % à 12 %, alors que le PFU est à 30 %... Certaines oeuvres d'art coûtent plus cher que de l'immobilier. Nous devrions tous être d'accord avec cette proposition.
L'amendement n° I-209 rectifié quater n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-602 rectifié de M. Fargeot et alii.
M. Daniel Fargeot. - Cet amendement rend intégralement déductibles la CSG et la CRDS de l'assiette de l'impôt sur le revenu. Il remédie à une situation injuste : les contribuables paient de l'impôt sur l'impôt.
Pour une rémunération brute de 2 000 euros, l'impôt sur le revenu du contribuable est calculé sur une base de 1 826 euros, alors que son revenu réel net de CSG-CRDS s'élève à 1 779 euros. Chaque mois, il est donc imposé sur 47 euros dont il ne dispose pas.
Les recettes de CSG et de CRDS étant destinées aux organismes de sécurité sociale, il serait juste et logique de les traiter comme des cotisations obligatoires, en les rendant intégralement déductibles du revenu imposable.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Vous indiquez dans l'objet de votre amendement que cette mesure serait gagée par un relèvement du taux intermédiaire de TVA, ce qui n'est pas le cas dans votre dispositif.
Je devine la réponse de la ministre... Vu la situation de nos finances publiques, avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Notre système social et notre système fiscal sont imbriqués de façon très complexe. Peut-être feront-ils l'objet de propositions de simplifications lors de la campagne présidentielle.
En attendant, voilà un amendement à plusieurs milliards d'euros - voire plusieurs dizaines de milliards d'euros. Je ne sais pas comment nous pourrions le compenser. Je le prends comme un amendement d'appel ; l'idée d'une hausse de la TVA peut exister dans le débat, mais, à ce stade, ce n'est pas une proposition du Gouvernement.
L'amendement n°I-602 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-756 rectifié bis de M. Fargeot et alii.
M. Daniel Fargeot. - Quelque 36 % des familles françaises ont un enfant, 42 % en ont deux, mais l'attribution des parts du quotient familial est plus avantageuse à partir de 3 enfants, soit 21 % des familles. Attribuons une part entière dès le premier enfant. Cela renforcerait immédiatement le gain fiscal alors que la natalité est historiquement basse.
M. le président. - Amendement n°I-890 de M. Durox et alii.
M. Aymeric Durox. - Notre pays traverse une crise existentielle de la natalité, avec un taux de naissance au plus bas depuis 1945.
Actuellement, chacun des deux premiers enfants permet de bénéficier d'une demi-part fiscale. Ce n'est plus satisfaisant : nous souhaitons accorder une part pleine dès le deuxième enfant pour rendre du pouvoir d'achat aux Français et permettre le renouvellement des générations.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Prenons garde aux amendements que nous déposons. Cet amendement représente un coût de 3 milliards d'euros. Comme beaucoup, je regrette que la natalité baisse. Mais ce n'est pas la fiscalité qui règle les problèmes - et cela vaut pour beaucoup de sujets.
Retrait, sinon avis défavorable aux deux amendements.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - L'amendement de M. Durox coûte 3,5 milliards d'euros, celui de M. Fargeot, au moins le double.
Faut-il attribuer les allocations familiales dès le premier enfant ? Le débat est intéressant. En tout état de cause, les dispositifs actuels, trop nombreux et trop disparates, sont illisibles.
Le logement est l'un des principaux freins cités par les familles. Les dispositions en faveur de l'accès à la propriété ou à la location me semblent beaucoup plus efficaces pour accompagner les jeunes parents, et ce pour des coûts bien moindres.
Le PLFSS prévoit en outre un congé de naissance élargi. Nous faisons donc déjà un effort substantiel.
Retrait, sinon avis défavorable.
M. Daniel Fargeot. - J'entends vos arguments. Pour autant, je suis favorable à une réforme de la redistribution. Ces milliards d'euros contraints pourraient être repris sur d'autres lignes budgétaires au profit de la famille.
M. Aymeric Durox. - Je le maintiens aussi. Ce ne sont que 3 milliards d'euros pour relancer la natalité, même si la fiscalité n'est pas le seul élément d'action. Des pays du sud de l'Europe ont un taux de natalité encore plus faible que le nôtre, alors que les problèmes de logement sont moindres. (Mme Amélie de Montchalin le conteste.)
Nous traversons une crise existentielle. Si cela ne vous paraît pas important...
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Ce n'est pas ce que l'on a dit.
L'amendement n°I-756 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°I-890.
M. le président. - Amendement n°I-856 de M. Hochart et alii.
M. Aymeric Durox. - La suppression de la demi-part fiscale des veufs et veuves sous la présidence de Nicolas Sarkozy, confirmée durant celle de François Hollande, est vécue comme une injustice par nos aînés. Certes, elle a été partiellement rétablie au profit des veuves d'anciens combattants, mais cela ne concerne qu'un nombre restreint de personnes. Cet amendement, qui rétablit cette demi-part pour toutes les veuves et veufs, relève de la justice fiscale.
M. le président. - Amendement identique n°I-1011 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Cet amendement est commun aux groupes SER, CRCE-K et au GEST.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Et au RN...
M. Thierry Cozic. - On connaît l'effet négatif de la suppression de cette demi-part fiscale, décidée en 2008. À la douleur du deuil, le gouvernement d'alors avait ajouté une peine fiscale. Rétablissons cette demi-part fiscale, nécessaire pour les personnes bénéficiant de petites pensions. Il rappelle notre devoir républicain envers les plus fragiles. Refusons que le deuil devienne un impôt. N'abandonnons pas ceux qui ont tant perdu.
M. le président. - Amendement identique n°I-1428 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Ouzoulias. - J'ajoute deux arguments. D'abord, contrairement à une fiction entretenue, le coût de la vie ne se divise pas par deux lorsque le couple cesse d'exister : des frais fixes importants reposent sur le dernier survivant. En outre, nous ne sommes pas égaux face à la mort. Les femmes affrontent davantage le veuvage ; or ce sont aussi elles qui ont les pensions les plus faibles.
M. le président. - Amendement identique n°I-1496 de M. Dossus et alii.
M. Thomas Dossus. - Il s'agit de neutraliser les effets fiscaux induits, de tenir compte des situations particulières et de prévenir la dégradation supplémentaire du niveau de vie des personnes isolées. C'est une mesure de justice fiscale envers nos aînés.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'avis est le même depuis trois ou quatre ans...
Une demi-part supplémentaire est déjà prévue pour les personnes aux revenus modestes ou pour celles vivant seules et qui ont supporté la charge d'un enfant pendant cinq ans, notamment. En outre, certaines peuvent recevoir la pension de réversion du conjoint disparu.
Si vous voulez un ciblage plus juste, rédigez différemment ces amendements. Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis. Nous débattrons à l'article 7 de la réforme de l'abattement de 10 % pour les retraités. Ce système est favorable aux veufs : l'abattement est le même pour un couple ou pour une personne seule, contrairement aux règles applicables aux actifs, pour lesquels l'abattement est individualisé.
La demi-part octroyée aux personnes seules qui ont élevé des enfants seules pendant au moins cinq ans coûte 650 millions d'euros. Elle est d'ailleurs assez contestée : les bénéficiaires disposent de cet avantage au motif qu'elles ont élevé seules des enfants il y a 30 ou 40 ans. Je ne remets pas en cause ce mécanisme, mais nous sommes parvenus à un point d'équilibre. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Marc Laménie. - Les collègues qui ont défendu ces amendements sont animés par la recherche d'équité. Voilà trois ou quatre ans, nous avions adopté un amendement pour rétablir la demi-part fiscale pour les veuves du monde combattant.
Les finances publiques sont ce qu'elles sont, même si nous sommes tous favorables à l'équité. Notre groupe suivra la position du rapporteur général.
M. Grégory Blanc. - Depuis trois semaines, des propos tenus ici et là sur la « folie fiscale » ont fait les gros titres de la presse...
Le rapporteur général et la ministre expliquent qu'à la suite de dispositions prises ces dernières années, des corrections ont été apportées. En vérité, il y a des trous dans la raquette.
Dans mon département, des veuves de mineurs décédés précocement, alors qu'ils ont contribué à redresser le pays, sont non seulement touchées par l'impôt sur le revenu, mais aussi par des effets de bord, notamment le coefficient familial. Ceux qui ont des petits revenus et qui ne peuvent pas être accompagnés par des fiscalistes ne doivent pas être touchés. Il faut baisser la fiscalité pour ceux qui en ont besoin : ce n'est pas un tabou.
Ceux qui ont des revenus plus élevés doivent contribuer à la solidarité nationale.
M. Pascal Savoldelli. - Le niveau de vie moyen des veuves qui le sont depuis plus de 25 ans est inférieur de 11 % à la moyenne. Cette observation nous encourage à voter ces amendements.
À la demande du groupe SER, les amendements identiques nosI-856, I-1011, I-1428 et I-1496 sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°64 :
| Nombre de votants | 345 |
| Nombre de suffrages exprimés | 343 |
| Pour l'adoption | 122 |
| Contre | 221 |
Les amendements identiques nosI-856, I-1011, I-1428 et I-1496 ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°I-2345 de Mme Renaud-Garabedian et alii.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. - Nous voulons aligner le traitement fiscal de la prestation compensatoire sur celui de la pension alimentaire pour les Français résidant à l'étranger.
Ces deux prestations procèdent d'une même logique juridique. Ce n'est ni un choix ni une dépense facultative. Elles procèdent aussi d'une même logique fiscale. Dans les deux cas, cela diminue le revenu disponible. Or de jurisprudence fiscale constante, un revenu ne peut être imposable que s'il est disponible. C'est d'ailleurs ainsi que sont traitées les pensions alimentaires.
La loi de finances pour 2019 a défiscalisé les pensions alimentaires pour nos compatriotes de l'étranger. Le Sénat a adopté la défiscalisation des prestations compensatoires pour les Français de l'étranger lors de l'examen du PLF 2020, à mon initiative, dans la proposition de loi Retailleau, en mai 2020 et lors de l'examen des PLF pour 2023 et 2025, sur l'initiative de Yan Chantrel.
M. le président. - Amendement identique n°I-2416 rectifié de M. Chantrel et du groupe SER.
Mme Florence Blatrix Contat. - Défendu.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Demande de retrait. Nous aurions besoin de chiffrer le coût de cette mesure. Combien de contribuables sont-ils concernés ? La défiscalisation des pensions alimentaires avait un caractère dérogatoire.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. - Je ne vous comprends pas, monsieur le rapporteur général : la dernière fois, considérant que nous devions faire preuve « de logique et de continuité » dans nos votes, votre avis était de sagesse. Pourquoi un avis différent aujourd'hui ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Cet amendement me pose un problème de principe. La France permet la déduction des prestations compensatoires versées par un résident français à un bénéficiaire domicilié à l'étranger. C'est à l'État de résidence de la personne qui verse la prestation d'appliquer sa législation fiscale. Vous nous proposez donc d'écraser le droit de l'État de résidence...
L'arrêt Schumacker de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) autorise cette défiscalisation dans le cadre de l'Union européenne. Mais nous n'avons aucun fondement juridique pour le faire hors Union européenne. De plus, cela pourrait entraîner des fraudes.
À l'Assemblée nationale, je me suis montrée ouverte à un travail de chiffrage - qui pourrait être réalisé par le Parlement -, mais il y a aussi un problème de principe. Retrait, sinon avis défavorable.
Les amendements identiques nosI-2345 et I-2416 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°I-640 rectifié de M. Delahaye et alii.
M. Vincent Delahaye. - L'impôt sur le revenu est très progressif sur les premières tranches. Entre 29 000 et 83 000 euros de revenu annuel, on passe de 11 % à 30 % d'imposition. D'où notre proposition de création d'un taux intermédiaire à 22 % pour la tranche 56 000-83 000 euros.
Je compense le manque à gagner pour les finances publiques par l'augmentation de la TVA, car le travail doit payer plus et la consommation - notamment nos importations - doit être mise à contribution. Notre taux de TVA est le quatrième plus bas d'Europe, où il est en moyenne de 24 % : relevons-le de 20 % à 21 %.
M. le président. - Amendement n°I-1259 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Nos amendements sont en discussion commune, mais ce n'est pas le même esprit...
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La discussion est commune, pas le programme !
M. Pascal Savoldelli. - L'impôt sur le revenu devrait être l'instrument principal de la justice fiscale.
M. Albéric de Montgolfier. - La moitié des contribuables ne le paie pas !
M. Pascal Savoldelli. - Il représente 25 % de nos recettes fiscales ; la TVA, qui est l'impôt le moins progressif, en représente 50 %. Il faut en finir avec le mythe selon lequel certains ne paieraient pas d'impôts : ceux qui ont peu paient proportionnellement davantage avec la TVA. (M. Daniel Fargeot fait non de la tête.)
Un salarié qui gagne 30 000 euros - pas par mois, je vous rassure - et un autre qui en gagne 80 000 sont imposés au même taux. (M. Daniel Fargeot le conteste.) Mais leur reste à vivre est-il comparable ? Non. Nous proposons d'affiner la progressivité de l'impôt sur le revenu, avec dix tranches. Quelque 26,5 millions de foyers seraient gagnants. Un effort serait demandé à 14 % des foyers, ceux qui touchent la moitié des revenus.
C'est une autre approche que l'augmentation la TVA, impôt aveugle.
M. le président. - Amendement n°I-2133 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Ouzoulias. - Sans indexation du barème de l'impôt sur le revenu, ce sont les salariés, les ouvriers, les employés de catégorie C, les retraités qui verront leur impôt augmenter, non parce qu'ils vivent mieux, mais parce que les prix ont augmenté. Les Français qui gagnent 1 580 euros par mois seront soumis à l'impôt. C'est tout à fait injustifié.
M. le président. - Amendement n°I-1192 de M. Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. - Alors que l'indexation de la première tranche bénéficiera à l'ensemble des contribuables, l'indexation à 50 % et 25 % des deuxième et troisième tranches donnerait un signal bienvenu aux classes moyennes.
M. le président. - Amendement n°I-256 rectifié bis de Mme Pantel et alii.
M. Michel Masset. - Cet amendement réindexe les trois premières tranches du barème sur l'inflation. Autrement, des milliers de contribuables - tout particulièrement des classes moyennes - payeront plus d'impôts, alors que leur revenu réel baisse. Un point d'inflation non compensé, c'est entre 150 et 350 euros d'impôt annuel supplémentaire pour un foyer moyen. Protégeons ceux pour qui chaque euro compte.
M. le président. - Amendement identique n°I-1260 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Notre démarche est commune avec les socialistes et les écologistes. Nous proposons d'indexer les trois premières branches du barème, sans quoi nous ferons entrer mécaniquement 200 000 nouveaux contribuables dans l'impôt, pour 1,9 milliard d'euros de recettes qui porteront uniquement sur des revenus du travail. Le Gouvernement avait annoncé qu'il n'imposerait pas davantage les revenus du travail : ce n'est manifestement pas le cas.
M. le président. - Amendement identique n°I-1391 de M. Cozic et du groupe SER.
Mme Isabelle Briquet. - Il est inacceptable que l'impôt sur le revenu amplifie les difficultés des ménages, en les poussant artificiellement dans une tranche supérieure. C'est particulièrement injuste. On frappe davantage ceux qui n'ont pas les moyens d'absorber la hausse des prix : jeunes ménages, familles monoparentales, foyers de la classe moyenne.
C'est un choix politique : les deux tranches supérieures resteraient désindexées, dans une logique de partage de l'effort.
M. le président. - Amendement identique n°I-1502 de M. Dossus et alii.
M. Thomas Dossus. - Ne pas ajuster les seuils d'imposition, c'est augmenter les impôts de façon déguisée. Notre mesure de justice fiscale garantit la cohérence de notre pacte social en protégeant les travailleurs.
M. le président. - Amendement n°I-177 rectifié de M. Patriat et du RDPI.
M. Stéphane Fouassin. - Nous proposons de revaloriser de 1 % le plafond de la première tranche. C'est un compromis équilibré qui préserve 1,7 milliard d'euros de recettes supplémentaires sur le 1,9 milliard prévu, tout en protégeant les plus modestes. C'est ciblé, responsable et juste.
M. le président. - Amendement identique n°I-238 rectifié ter de Mme Lavarde et alii.
M. Mathieu Darnaud. - Le gel intégral du barème aurait fait entrer 200 000 foyers dans l'impôt sur le revenu. Nous indexons la première tranche sur l'inflation.
M. le président. - Amendement identique n°I-384 rectifié de M. Canévet et du groupe UC.
M. Vincent Delahaye. - Nous indexons, nous aussi, la première tranche du barème sur l'inflation. J'en profite : tous les Français devraient s'acquitter d'un impôt sur le revenu, à un taux très faible le cas échéant.
M. le président. - Amendement n°I-605 rectifié de M. Fargeot et alii.
M. Daniel Fargeot. - Il s'agit de revaloriser la valeur de la demi-part fiscale de 1 791 à 2 870 euros, pour prendre en compte l'inflation cumulée depuis 2013 - 22,9 % - et soutenir les foyers avec enfants.
M. le président. - Amendement n°I-1657 rectifié de M. Fargeot et alii.
M. Daniel Fargeot. - Dans un contexte de baisse de la natalité, indexons la valeur de la demi-part fiscale sur l'inflation, afin d'éviter la diminution du pouvoir d'achat des familles.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis favorable aux amendements identiques nosI-177 rectifié, I-238 rectifié ter et I-384 rectifié qui indexent sur l'inflation la seule première tranche du barème. Comme l'a dit notre collègue Stéphane Fouassin, c'est ciblé, responsable et juste. Avis défavorable aux autres amendements.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Avis favorable aux amendements identiques nosI-177 rectifié, I-238 rectifié ter et I-384 rectifié. Ainsi 82 % des ménages - 55 % en dessous de la première tranche, 27 % dans ladite tranche - sont couverts.
M. Vincent Capo-Canellas. - À quelle hauteur ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Seulement 18 % des foyers seraient concernés par le gel du barème. La tranche à 45 % concerne 0,15 % des Français ; la tranche à 41 %, 1,02 % ; celle à 30 %,17 %. C'est un bon compromis. Vous supprimez toutefois la moitié du rendement du gel : 1 milliard d'euros - ce n'est pas rien.
Sachez que le Royaume-Uni a aussi décidé de geler son barème de son impôt sur le revenu, jusqu'en 2031. Notre gel ne porte que sur un an. C'est équilibré, alors que nos finances publiques ne le sont pas.
Retrait, sinon avis défavorable aux autres amendements.
M. Grégory Blanc. - Madame la ministre, vous êtes bien favorable à la neutralisation du gel de la première tranche et non pas des trois premières, comme le proposent les groupes de gauche ? (Mme Amélie de Montchalin le confirme.). Parce que vous nous dites que seulement 18 % des Français seraient concernés par le gel... Les classes moyennes qui gagnent plus de 29 000 euros seront touchées. (Mme Amélie de Montchalin le confirme.)
Qui va payer ? Est-on dans une logique de rééquilibrage fiscal en allant chercher l'argent sur les plus hauts patrimoines ou veut-on faire payer les classes moyennes ?
M. Vincent Delahaye. - Mon amendement n°I-640 rectifié va dans votre sens, monsieur Blanc, puisqu'il favorise les classes moyennes. De 29 000 à 56 000 euros de revenus annuels, on est dans la classe moyenne. Je regrette que le rapporteur général et la ministre n'aient pas pris le temps d'évoquer mon amendement, qui encourage le travail et mérite débat.
M. Vincent Capo-Canellas. - Parler comme la ministre de 82 % des ménages couverts est un abus de langage, puisqu'on ne les couvre que sur la part de leurs revenus correspondant à la première tranche. D'où mon geste sur les deuxième et troisième tranches. Mais j'entends l'avis du rapporteur général et retire donc mon amendement.
S'agissant des retraites, nous devons regarder l'ensemble des mesures envisagées, y compris l'abattement et la CSG. Attention à ne pas désespérer ceux qui sont juste au-dessus des plus démunis.
L'amendement n°I-1192 est retiré.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Comme seulement 1,17 % des ménages sont imposés à 41 % et 45 %, si vous indexez la tranche à 11 % et celle à 30 %, vous couvrez 99 % de nos concitoyens et ne mettez à contribution que 1,17 % des ménages.
M. Grégory Blanc. - Oui !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je préfère mettre à contribution 18 % des ménages. On ne se rend pas compte à quel point le nombre de ménages des tranches les plus élevées est faible...
Monsieur Delahaye, votre proposition de tranche intermédiaire entre 11 % et 30 % est intéressante, parce que la situation de ces 17 % de ménages est très hétérogène. (M. Daniel Fargeot renchérit.) Toutefois, l'augmentation de la TVA que vous proposez est budgétairement efficace, mais politiquement, les esprits ne sont pas prêts. Une vraie réforme de simplification fiscale et sociale me semblerait essentielle dans le cadre de la campagne présidentielle de 2027.
M. Yannick Jadot. - Madame la ministre, vous nous dites que l'échelle des revenus est très déséquilibrée, avec un petit pourcentage de foyers tout en haut du barème.
Dans le PLFSS, vous avez raboté les prestations des plus précaires. Ici, vous augmentez les impôts des classes moyennes. Et sur les plateaux télé, vous affirmez que vous n'augmentez pas les impôts !
Mme Sophie Primas. - Comparés à vous, on a de la marge !
M. Yannick Jadot. - Pourtant, le moment est inflammable.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée. - J'aimerais l'éclairage du Gouvernement sur l'amendement n°I-1657 rectifié. Pour un coût modique, une telle indexation de la demi-part fiscale garantirait aux familles une stabilité fiscale, alors que la plupart des prestations familiales sont sous conditions de ressources. Ce serait raisonnable compte tenu de l'état de notre démographie et de la situation des jeunes actifs avec enfants.
M. Alexandre Ouizille. - Monsieur Delahaye, on peut taxer la consommation, le travail ou le capital. Nous partageons l'idée que ceux qui travaillent doivent voir leur salaire net augmenter. D'où notre proposition de baisse de la CSG.
Mais il y a deux manières de gager une telle baisse d'imposition ; sur la consommation comme vous le proposez, alors que les prix repartent à la hausse, notamment ceux des biens de première nécessité, et cela nous semble dangereux. Nous proposons, quant à nous, de taxer davantage le capital, dont la dynamique de revenus est exceptionnelle.
M. Pascal Savoldelli. - On vient d'apprendre de la bouche de Mme la ministre qu'elle avait prévu de faire 1 milliard d'économies sur le dos des classes populaires ! (Mme Amélie de Montchalin le conteste.)
Chers collègues Les Républicains, commencez par trouver un compromis avec vos collègues de l'Assemblée nationale qui ont voté la désindexation totale !
M. Albéric de Montgolfier. - Nous sommes au Sénat.
M. Mathieu Darnaud. - Alors on va parler de la suspension de la réforme des retraites !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Monsieur Savoldelli, nous tous ici, dont le taux marginal d'imposition dépasse les 11 %, allons bénéficier du dégel de la première tranche. D'où le coût de 1 milliard d'euros. Évidemment, 200 000 nouveaux contribuables ne s'acquittant que de 20 euros en moyenne annuelle, ça ne fait pas 1 milliard d'euros.
L'amendement n°I-640 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nosI-1259 et I-2133.
Les amendements identiques nosI-256 rectifié bis, I-1260, I-1391 et I-1502 ne sont pas adoptés.
Les amendements identiques nosI-177 rectifié, I-238 rectifié ter et I-384 rectifié, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés et deviennent un article additionnel.
L'amendement n°I-605 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°I-1657 rectifié.
M. le président. - Amendement n°I-2417 rectifié de M. Chantrel et alii.
Mme Florence Blatrix Contat. - Cet amendement simplifie la fiscalité des non-résidents en soumettant leurs revenus de sources française et étrangère au taux moyen, donc au barème progressif de l'impôt sur le revenu.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°I-2417 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-1924 de M. Cadic.
M. Olivier Cadic. - Nous supprimons la CEHR. Créée en 2012 pour être temporaire, elle complexifie la fiscalité du revenu, superpose les couches d'imposition, accroît la pression fiscale. Surtout, elle nuit à notre attractivité, en pénalisant les contribuables les plus mobiles. En outre, on n'a aucune preuve de son efficacité.
M. le président. - Amendement n°I-1267 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K
M. Pascal Savoldelli. - Clin d'oeil aux Républicains : la CEHR, c'est vous ! Elle a été créée en 2011 par François Baroin dans un gouvernement Fillon.
M. Albéric de Montgolfier. - Tout le monde fait des erreurs !
M. Pascal Savoldelli. - Depuis, les taux n'ont pas bougé. En revanche, d'autres choses ont beaucoup changé : il y a davantage de dividendes, de plus-values, de placements, d'ingénierie fiscale et patrimoniale - ça crève les yeux. Nous proposons de passer les taux de 3 % et 4 %, à 8 % et 10 %.
Le rapporteur général parlait l'an dernier le ras-le-bol fiscal. Mais cela touche moins les contribuables qui gagnent plus de 250 000 euros par an que ceux qui ne peuvent pas optimiser. Cette année, vous reconnaissez que l'optimisation est telle qu'il faut la contenir. Corrigeons les comportements agressifs.
Enfin, le produit de la CEHR n'apparaît plus clairement dans les documents budgétaires. Mme la ministre peut-elle nous éclairer ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable aux deux amendements. M. Cadic veut supprimer la contribution, mais nous sommes dans une période difficile, qui appelle à des efforts plus équilibrés. M. Savoldelli n'y va pas avec le dos de la cuillère, en portant le taux marginal d'imposition à plus de 50 % !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Ces amendements sont diamétralement opposés. Restons-en là où nous en sommes. Cette contribution exceptionnelle, qui s'applique dès le premier euro, a rapporté 2 milliards d'euros en 2024 - c'est loin d'être négligeable. Votre amendement aurait pour effet de rehausser le taux moyen de 20 % à 25 % : 5 points en un amendement !
Monsieur Cadic, nous connaissons le produit - 2 milliards d'euros - et le nombre de ménages concernés par cette surimposition - 60 000. Le groupe UC fourmille d'idées de réforme fiscale. Oui, nous aurons besoin d'une réforme d'ensemble, mais pas dans ce PLF.
M. Olivier Cadic. - Merci, madame la ministre, pour ces éléments. J'apprécie de vous entendre parler de surimposition. (M. Guy Benarroche s'exclame.)
L'amendement n°I-1924 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°I-1267.
M. le président. - Amendement n°I-1268 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Ouzoulias. - La CDHR, qui se distingue de la CEHR, fonctionne comme un mécanisme correcteur. Mais seulement 24 300 foyers s'en acquittent effectivement, sur les 62 500 concernés. Nous en rehaussons le taux de 20 % à 30 %, pour récupérer les 40 000 foyers qui manquent à l'appel.
L'amendement n°I-1268, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-2211 de M. Dossus et alii.
M. Thomas Dossus. - C'est un amendement d'appel pour sécuriser l'écosystème des fondations et associations. La CDHR doit tenir compte de la réduction d'impôt sur les dons des particuliers.
M. le président. - Amendement identique n°I-2492 de M. Éblé et alii.
M. Vincent Éblé. - La CDHR a été conçue pour neutraliser les effets de l'optimisation fiscale. Mais le mécénat n'a rien à voir : au contraire, le mécène s'appauvrit volontairement.
Or la CDHR supprime toute incitation au mécénat pour les personnes physiques autres que les entrepreneurs individuels. La prolongation de la CDHR à 2026 et jusqu'à ce que le déficit retombe en dessous de 3 % - autant dire, pour la nuit des temps - risque fort de tarir le mécénat des particuliers. Or certaines actions culturelles ou sociales en sont tributaires, a fortiori quand les crédits de l'État et des collectivités territoriales n'augmentent pas...
Cette situation se justifie d'autant moins que l'incitation est maintenue pour le mécénat d'entreprise. Or les dons des particuliers sont tout aussi utiles.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Ces amendements sont satisfaits par l'adoption ce matin des amendements nosI-560 rectifié ter de M. de Legge, I-644 de M. Kanner et I-1338 rectifié ter de M. Lemoyne. Retrait ?
M. Albéric de Montgolfier. - C'est consensuel.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Effectivement, l'adoption de ces amendements - contre mon avis ! - rend inutile que vous les revotiez.
Les amendements identiques nosI-2211 et I-2492 sont retirés.
M. le président. - Amendement n°I-1922 rectifié de M Cadic et alii.
M. Olivier Cadic. - Nous créons un bouclier fiscal pour qu'aucun contribuable ne paie plus de 50 % de ses revenus en impôts directs - y compris la taxe foncière et la taxe d'habitation sur les résidences secondaires. Le contribuable doit pouvoir garder au moins la moitié de ce qu'il gagne, tout en laissant à l'État les moyens nécessaires pour financer les services publics et la solidarité. Cela encouragerait le travail, la prise de risque et l'investissement, bénéfiques à l'activité économique et in fine aux finances publiques.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Demande de retrait de cet amendement d'appel dont la rédaction laisse à désirer.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Le Conseil constitutionnel vérifie que l'impôt n'est pas confiscatoire. Avis défavorable.
M. Olivier Cadic. - Chacun peut déterminer ce qui lui semble confiscatoire. Pourquoi s'en remettre au Conseil constitutionnel ?
L'empilement des taxes est devenu incompréhensible.
En 2017, nous avons instauré une taxe sur les yachts, qui devait rapporter 10 millions d'euros. Huit ans plus tard, il n'y a plus que cinq yachts en France, et la taxe rapporte 60 000 euros... L'efficacité de toutes ces taxes créées au gré des PLF mériterait d'être étudiée. Un cadre fiscal clair favoriserait le consentement à l'impôt.
Oui c'est un appel, monsieur le rapporteur général, à respecter tous les contribuables.
L'amendement n°I-1922 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°I-1001 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Nous proposons la déconjugalisation des dettes fiscales en cas de séparation. Actuellement, la solidarité fiscale se poursuit après la séparation, quelles que soient la nature et l'origine de ces dettes. Et le régime de la séparation de biens n'y change rien. L'ancien conjoint n'a pas à payer les dettes de l'autre.
M. le président. - Amendement identique n°I-2401 rectifié bis de Mme Guillotin et alii.
M. Raphaël Daubet. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°I-1270 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Le Sénat a déjà adopté cette déconjugalisation en 2024. La proposition de loi Ott a permis des avancées et simplifié les démarches. (Mme Amélie de Montchalin le confirme.) Mais il reste un angle mort : quand la dette provient d'un contrôle fiscal portant exclusivement sur les revenus du conjoint. La décharge est parfois refusée en raison d'une interprétation trop large de la solidarité entre les époux. Nous proposons donc une clarification.
M. le président. - Amendement n°I-1271 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Ouzoulias. - Nous précisons la manière dont est appréciée la situation financière d'une personne sollicitant une décharge : tous les revenus ne sont pas disponibles pour acquitter une dette fiscale. Certains sont des revenus de protection pour garantir un niveau de vie minimal. Nous excluons donc quatre cas : prestations familiales, allocation aux adultes handicapés (AAH), APL et pensions alimentaires.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable aux quatre amendements. M. Savoldelli pose une question juste, mais son amendement n'y répond pas. Madame la ministre, la situation a-t-elle évolué ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Votre travail est très utile : depuis la loi du 31 mai 2024, il est possible de demander une décharge gracieuse. Depuis, le nombre de dossiers traités est passé de 250 à 500 ; 90 % des dossiers ont obtenu une décharge gracieuse, et souvent totale, puisque 98 % des montants font l'objet d'une décharge.
Le système est désormais vertueux ; il n'est pas nécessaire de changer la législation.
M. Pascal Savoldelli. - Nous avons salué votre travail, qui a été bien mené. La seule question qui reste - raison pour laquelle je maintiens mon amendement - c'est sur la fraude personnelle de l'ex-conjoint. Il faudrait dans ce cas aller à 100 %. Nos services doivent aller au bout de la question.
Les amendements identiques nosI-1001 et I-2401 rectifié bis ne sont pas adoptés, non plus que les amendements nosI-1270 et I-1271.
M. le président. - Amendement n°I-297 rectifié de M. Levi et alii.
M. Daniel Fargeot. - Nous prorogeons l'exonération des pourboires d'impôt sur le revenu et de cotisations dans les secteurs de l'hôtellerie-restauration, qui arrivera à échéance le 31 décembre 2025.
M. le président. - Amendement n°I-43 rectifié ter de M. Capus et alii.
M. Emmanuel Capus. - C'est le même objectif que l'amendement précédent. Nous pourrions peut-être intégrer cette exonération définitivement dans la loi.
M. le président. - Amendement identique n°I-178 rectifié de M. Patriat et du RDPI.
M. Stéphane Fouassin. - Cette exonération fonctionne : elle renforce l'attractivité de ce secteur. Pour ces travailleurs modestes, les pourboires sont un soutien au pouvoir d'achat essentiel. Les salariés augmentent ainsi leur revenu net. Ce dispositif a fait ses preuves depuis 2022. Votons cet amendement de bon sens, très utile aux territoires touristiques.
M. le président. - Amendement identique n°I-214 rectifié bis de Mme Delattre et alii.
M. Raphaël Daubet. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°I-239 rectifié ter de Mme Lavarde et alii.
M. Bruno Retailleau. - J'ajoute une dernière raison. Le choix n'est pas fiscal, mais philosophique : souhaitez-vous privilégier la gratitude ou l'ingratitude ? Les anciens Grecs disaient : remercier, c'est déjà être heureux. Voulez-vous nous rendre heureux ?
M. Yannick Jadot. - C'est un nouveau Bruno ! Bruno le renouveau !
M. le président. - Amendement n°I-919 de M. Szczurek et alii.
L'amendement n°I-919 n'est pas défendu.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Un petit moment de bonheur, cela n'est jamais désagréable. La question a été posée : pourquoi ne pas pérenniser définitivement cette exonération ?
Revenons en arrière. Il faudrait une évaluation. Si cela va bien, il faudrait le dire. Il y a au moins trois ou quatre types de pratiques. En brasserie, une grande part de salaire est liée à la répartition des tables.
Sans doute faudra-t-il pérenniser le dispositif.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je souhaite vous rendre heureux, tout comme ceux qui travaillent dans les restaurants ou les théâtres.
M. Albéric de Montgolfier. - Favorable !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je l'ai dit depuis quelques jours, je me réjouis de cette unanimité nationale. Avis favorable.
M. Daniel Fargeot. - Je rends mon amendement identique aux suivants.
Les amendements identiques nosI-297 rectifié bis, I-43 rectifié ter, I-178 rectifié, I-214 rectifié bis et I-239 rectifié ter, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés et deviennent un article additionnel.
M. le président. - Tout le monde est heureux ! (Sourires)
Amendement n°I-2679 rectifié du Gouvernement.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Nous sécurisons la mise en place d'un système informatique pour les rentes viagères à titre onéreux. Je vous remercie pour votre confiance dans les services fiscaux...
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sagesse.
L'amendement n°I-2679 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
Article 3
M. Thierry Cozic . - La question que pose cet article est la suivante : pourquoi les ultra-riches, quelques centaines de personnes, sont-ils moitié moins imposés que les autres Français ?
Puisque la taxe exempte les biens professionnels, 90 % des holdings patrimoniales y échapperont. En outre, la trésorerie n'est pas ciblée. C'est un filet à sardines qui laisse passer les baleines. Le rendement sera réalisé sur 4 000 des 30 000 établissements, soit moins de 0,1 % des acteurs économiques. Tout est fait pour que cette taxe ne touche personne.
Le différentiel coûte chaque année 18 milliards d'euros à l'État. Autrement dit, si les ultra-riches étaient imposés comme les autres, cela rapporterait 18 milliards d'euros à l'État.
Est-il normal que quelques centaines de personnes possèdent 40 % du PIB, et que leur taux d'effort fiscal soit de 25 %, soit deux fois moins que la moyenne des Français ?
M. Grégory Blanc . - Nous avons eu un débat ici il y a quelques mois sur la taxe Zucman - nous l'aurons de nouveau - qui nous a permis d'évoquer la suroptimisation fiscale et a conduit le Gouvernement à reconnaître l'existence du problème.
Il est impossible de penser que le pouvoir macroniste, qui revendiquait sa bienveillance, devienne soudain malveillant à l'égard des hauts patrimoines. Cette taxe, ce n'est pas de la malveillance... Il s'agit simplement d'empêcher l'abus de fiscalité.
La droite sénatoriale nous propose d'affaiblir encore plus ce dispositif, censé combler des failles. Les Français ne sont pas dupes ; ils savent que certains s'adonnent à la suroptimisation fiscale.
M. Bruno Retailleau . - Dans cette foire aux taxes, une des initiatives qui ont le plus choqué, à part la taxe Zucman, c'est cette taxe sur les holdings. D'abord parce qu'elle a été vue comme un dispositif punitif. En effet, elle taxe l'entrepreneur non sur ce qu'il touche, mais sur ce qu'il aurait pu toucher s'il n'avait pas réservé des fonds pour un investissement futur. C'est une taxation par anticipation.
Deuxième raison : le seuil de participation de 5 %, qui exclut les plus gros patrimoines.
Troisièmement, votre taxe est juridiquement fragile. Vous traitez deux contribuables différemment, selon qu'ils investissent via les holdings ou non.
Quatrièmement, c'est une taxe confiscatoire : j'ai un exemple concret de contribuable qui serait taxé à 262 %. Vous allez taxer des entreprises familiales de nos territoires ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. le président. - Amendement n°I-44 rectifié bis de M. Capus et alii.
M. Emmanuel Capus. - Ce nouvel impôt ne sert à rien, c'est une aberration qu'il faut supprimer.
J'ai été rapporteur sur la taxe Zucman - mon rapport n'est d'ailleurs guère cité par le vôtre, monsieur le rapporteur général. À la page 48, vous dites la même chose : nous créons cette taxe pour répondre au lobbying de Gabriel Zucman, alors que nous parlons de 0,0002 % des contribuables, pour qui l'imposition serait dégressive.
Tout cela part d'un triple postulat, complètement faux : on assimile les actions à du revenu ; on ne tient pas compte de l'impôt sur les sociétés ni de l'impôt qui va être payé. Considérer que ce qui appartient à une société appartient à des individus est contraire au principe de personnalité fiscale.
M. le président. - Amendement identique n°I-500 rectifié de M. Levi et alii.
M. Daniel Fargeot. - Supprimons cette nouvelle taxe punitive sur les entreprises. Nous devrions plutôt mettre en avant l'outil de production et la création de valeur.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La ministre s'inquiète. (Sourires) Non, pas d'inquiétude : avis défavorable.
Nous sommes un certain nombre à penser que les débats - ISF, temps de travail - font penser à un retour de la gauche au pouvoir. (On ironise à gauche.) Ce débat est sain, mais décalé, car le monde a changé. Nous sommes attentifs à ceux qui créent de la richesse, qu'ils soient dans l'innovation, l'industrie traditionnelle.
Ils créent des holdings. Attention à ne pas nous effrayer de ce mot anglais. Je suis plutôt fier de voir le drapeau français sur une multinationale : énormément d'acteurs économiques travaillent pour elles. Soyons attentifs à nos messages. Encourageons notre économie.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Cela fait quelques mois que cette taxe est en débat. De quoi parlons-nous ? De la holding, un mécanisme qui permet d'investir et de diversifier les activités. Nous n'avons rien, contrairement à ce qu'a dit M. Retailleau, contre le fait que des revenus ne soient pas distribués et que les holdings gardent de la trésorerie pour leurs besoins futurs. Mais un certain nombre de nos compatriotes utilisent ces entités et la fiscalité des entreprises pour se constituer un patrimoine personnel.
M. Grégory Blanc. - Tout à fait !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Une partie de leurs actifs personnels - immobilier, PEA, assurance vie - se retrouvent logés dans une holding. Or la fiscalité des entreprises est beaucoup plus clémente, puisque pensée pour réinvestir.
Il est normal qu'une holding ait une trésorerie d'un an ou deux. Mais nous souhaitons que les contribuables qui mettraient des biens personnels dans une holding soient traités de la même façon que s'ils ne les avaient pas mis. Ce qui compose votre patrimoine personnel doit être imposé. C'est une mesure balai.
Ensuite, nous pouvons débattre : quel seuil de trésorerie fixer ?
Mais M. le rapporteur général peut venir à Bercy.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Ne nous demandez pas de venir trop souvent !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je ne veux pas combattre l'investissement, mais les abus.
M. Yannick Jadot. - Je suis d'accord avec M. Retailleau : c'est une taxation par anticipation. Mais pourquoi en arriver là ? Parce qu'un certain nombre de détenteurs de capital ont cru pouvoir contourner une juste fiscalité de leurs revenus. Le monde a changé ! La holding sert aussi à éviter l'impôt. Corrigeons le tir.
Seules les entreprises créent de la richesse ? Oui, les chefs d'entreprise créent de la richesse, mais pas tous seuls. Sans éducation, sans salariés protégés par la sécurité sociale, sans infrastructures... Ils ne peuvent rien. (Mme Sophie Primas proteste.)
M. Olivier Rietmann. - Je n'aime pas le terme de holding, je préfère parler de société mère. (M. Pascal Savoldelli s'en amuse.) Une société mère travaille avec ses filiales pour les rendre plus compétitives, et les protéger. La première protection d'une entreprise, c'est la compétitivité.
Cher collègue Jadot, j'ai dit hier dans la discussion générale qu'une entreprise est un tout, un écosystème, de l'ouvrier au dirigeant.
Mais là nous mettons le doigt dans la taxation du patrimoine professionnel. Exploitant agricole, j'avais un troupeau de vaches. On me disait : si tu as une difficulté, tu vends une ou deux vaches. Mais à ce rythme-là, au bout de quelques années, il n'y a plus de troupeau. Je voterai donc les amendements de suppression. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées du groupe Les Républicains)
M. Thierry Cozic. - Nous voterons contre ces amendements. Si la France est accueillante, c'est pour les milliardaires : il y en a 147, contre 128 en Allemagne et 43 en Suède. (Mme Sophie Primas s'exclame.)
M. Olivier Rietmann. - Tant mieux, tout le monde en profite !
M. Thierry Cozic. - En six ans, les cinq familles les plus riches de France ont vu leur patrimoine boursier progresser de 400 %. Le salaire des Français, lui, progressait de 8 %.
Madame la ministre, quelle est la recette escomptée ? Ce n'est pas très clair. En général, vous présentez des chiffres élevés - pas assez à nos yeux - , mais les résultats sont bien moindres. La contribution sur la rente inframarginale de la production d'électricité (Crime) devait rapporter 12 milliards d'euros ; résultat, moins de 1 milliard. La taxe sur les superprofits a rapporté 200 millions d'euros au lieu des 700 millions escomptés.
Plus de 90 % des holdings échapperaient à cette taxe. Je le redis : c'est un filet à sardines qui laisse passer les baleines.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Vous me donnerez la maille !
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Dans notre pays, il y a des juges. L'abus de droit existe en droit fiscal. Pourquoi ne nous appuyons-nous pas sur le juge pour qualifier les faits ?
Ce que le Gouvernement propose, c'est de taxer des revenus potentiels. Nos jeunes pousses peuvent avoir une valorisation incroyable en année n, mais s'effondrer en année n+3. (M. Emmanuel Capus applaudit.)
M. Grégory Blanc. - Beaucoup d'entrepreneurs dans notre pays engagent leur patrimoine pour créer une TPE, une PME, mais personne n'en parle. Pendant ce temps, de grandes entreprises logent leurs bénéfices dans d'autres pays, ce qui réduit les recettes d'impôt sur les sociétés.
Que dit le rapporteur général ? Il dit que l'interposition d'une holding permet au contribuable de réduire son revenu imposable, le taux de l'impôt sur les sociétés étant très inférieur à celui de l'impôt sur le revenu. Ce ne sont pas les mots d'un homme de gauche, mais du rapporteur général. Il est proposé un taux de 2 % ; si ça c'est confiscatoire, alors tout l'est !
Il faut raison garder. Il n'y a peut-être pas d'abus, mais de la suroptimisation fiscale, qui permet aux hauts patrimoines d'être taxés beaucoup moins que de petits entrepreneurs.
M. Patrick Kanner. - La justice fiscale reste notre boussole. Nous voulons éviter l'optimisation fiscale flagrante et récupérer des recettes. Supprimer cet article, c'est donner raison à ceux qui présentent la France comme un pays de cocagne pour ultra-riches. (M. Albéric de Montgolfier proteste.)
M. Olivier Rietmann. - Cela se saurait !
M. Patrick Kanner. - Nous demandons à ceux qui ont quadruplé leur patrimoine un effort somme toute raisonnable. Nous voterons contre ces amendements et nous espérons que nous pourrons aller plus loin dans la suite du débat. Sans la soutenir, nous accompagnons la démarche du Gouvernement.
M. Olivier Cadic. - Je voterai ces amendements. J'ai entendu « pays de cocagne ». Le Royaume-Uni a mis fin au régime des res non-doms qui permettent de ne pas imposer les revenus à l'étranger. Depuis, ceux qui partent ...
M. Albéric de Montgolfier. - En Italie, à Milan !
M. Olivier Cadic. - ...ne vont pas en France, mais en Suisse. Ils sont ensuite attirés par le régime des nouveaux résidents, l'Italie ayant mis en place un impôt forfaitaire de 100 000 euros par an.
Dans cette compétition fiscale, les mots ont un poids : dire aux milliardaires imposés en France qu'ils sont dans un pays de cocagne n'est pas bon. Nous devrions plutôt les remercier. (M. Grégory Blanc proteste.)
M. Patrick Kanner. - Vous validez les yachts !
M. Olivier Cadic. - Ce n'est que 2 % et bientôt ce sera plus. Pour certains, on dépassera 100 % ! (M. Yannick Jadot proteste.)
M. Patrick Kanner. - Caricature !
Mme Sophie Primas. - Monsieur le président Kanner, les yachts sont interdits ! Et les juges peuvent tout à fait venir à bout des fraudes. Vous dites qu'il faut limiter la casse ? Mais la trésorerie dans les holdings sert à investir dans les filiales.
M. Patrick Kanner. - Ce n'est pas ce qui est visé, madame !
Mme Sophie Primas. - Ne cassons pas la capacité des entreprises à investir. Certains profitent de ces holdings pour faire progresser leur patrimoine personnel, mais il existe des lois pour l'empêcher. Sachons raison garder. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; MM. Yannick Jadot et Patrick Kanner protestent.)
M. Pascal Savoldelli. - Si ces amendements de suppression sont adoptés, nous ne pourrons plus toucher à l'assiette ni au seuil. On ne parle pas de propriétaires d'un troupeau de vaches, mais de holdings !
Mme Sophie Primas. - Qui font d'autres investissements !
M. Pascal Savoldelli. - L'assiette, les titres cotés, le private equity, l'immobilier... tout cela, nous n'aurons pas le droit d'en parler.
Il y aura des votes, n'ayez pas peur ! M. Cadic pourra nous proposer de rendre de l'argent à des milliardaires. Madame la ministre, vous nous avez dit qu'il y avait un gouffre financier, mais vous proposez un rendement de 1 milliard. Ce n'est pas connaître ces gens-là : ils vont optimiser. (M. Emmanuel Capus frappe son pupitre.)
M. Thomas Dossus. - Il y a trois jours, vous avez défendu le gel des prestations sociales, et là, vous défendez avec ardeur l'esquive fiscale des plus hauts patrimoines. C'est caricatural. On vous explique qu'il y a une accumulation incroyable du capital, que le nombre de milliardaires est supérieur en France par rapport à des pays similaires...
M. Olivier Rietmann et Mme Sophie Primas. - Mais tant mieux !
M. Thomas Dossus. - Nous voulons simplement qu'ils paient leur juste valeur de leur impôt, pas les mettre au bagne ! Arrêtez de nous faire pleurer sur le départ de certains ; il est marginal selon une étude du Conseil d'analyse économique (CAE) de cet été.
Cet article 3 est de consensus. Lorsque nous avons débattu avec le Gouvernement sur la taxe Zucman, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il fallait resserrer le filet autour des holdings - ou des sociétés mères, comme vous voudrez.
M. Michel Canévet. - Le groupe UC est attaché à l'esprit d'entreprise. (M. Olivier Cadic applaudit.) Il ne faut pas confondre le patrimoine et les revenus, le stock et le flux. (M. Patrick Kanner acquiesce.) Ce n'est pas parce que des gens ont un patrimoine d'actions important qu'ils ont de forts revenus.
La majorité des membres du groupe UC suivra l'avis du rapporteur général. (Mme Amélie de Montchalin s'en réjouit.) En effet, un détournement a été révélé et chacun doit payer sa juste part d'impôt. Nous devons corriger le tir. C'est le sens des propositions du rapporteur général, auxquelles la majorité du groupe UC souscrit.
M. Vincent Louault. - Quelle méconnaissance des sociétés mères et filles ! Moi, l'agriculteur que je suis, j'utilise la holding pour loger le patrimoine de mes terres...
M. Olivier Rietmann. - Et vous n'êtes pas milliardaire, que je sache !
M. Vincent Louault. - Je paie mon impôt sur les sociétés, mais je paierai surtout à la sortie ; quand je revendrai, je me ferai matraquer !
Dans la vraie vie, il y a des sociétés de portage de foncier agricole pas embêtées pour acheter des dizaines de milliers de terres agricoles en les logeant au Luxembourg. C'est ce que je dis aux agriculteurs : une holding au Luxembourg, c'est un coup de téléphone, trois clics de souris, et ça coûte 5 000 euros par an. (M. Yannick Jadot proteste.) On va faire fuir tout le monde !
La réalité, c'est que ce système sert aux entreprises, tous les jours. Le groupe Tereos a des dizaines de millions d'euros dans ses comptes. Ils s'en servent comme garanties pour leurs filiales. C'est la sève de notre économie. (M. Emmanuel Capus applaudit.)
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je vous rassure : ce que vous décrivez n'est pas couvert par cet article.
M. Vincent Louault. - On commence par la main, puis tout le bras y passe !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Si vous êtes agriculteur, vous achetez un bien professionnel, de la terre pour une activité professionnelle, nous n'y toucherons pas. (M. Grégory Blanc acquiesce.) Le problème, c'est si vous investissez votre trésorerie en actions dans une proportion plus importante qu'un fond normal de trésorerie. Nous voulons alors taxer comme un PEA ou une assurance vie.
M. Daniel Fargeot. - C'est une prise de risque !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Nous ne sommes pas en train de proposer quoi que ce soit qui porte atteinte à l'activité opérationnelle, productive. Sinon, j'y serai tout aussi défavorable que vous. Je parle de holding patrimoniale ; c'est-à-dire des holdings qui n'ont pas d'activité opérationnelle.
Aujourd'hui, madame Primas, il n'est pas interdit d'avoir un yacht dans une holding que vous utiliserez cinquante et une semaines à titre personnel, et que vous louez une semaine par an...
M. Patrick Kanner et M. Grégory Blanc. - Eh oui !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - C'est bien pour cela que nous parlons d'un dispositif anti-optimisation.
Vous parlez des jeunes pousses. Si leur valeur a augmenté, c'est parce qu'elles ont innové ; elles ont développé des marchés et donc plus de personnes veulent y investir.
L'article 3 sert à lutter contre le dévoiement des holdings pour constituer un patrimoine personnel.
À la demande du groupe SER, les amendements identiques nosI-44 rectifié bis et I-500 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°65 :
| Nombre de votants | 341 |
| Nombre de suffrages exprimés | 341 |
| Pour l'adoption | 32 |
| Contre | 309 |
Les amendements identiques nosI-44 rectifié bis et I-500 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°I-1394 de Mme Blatrix Contat et du groupe SER.
Mme Florence Blatrix Contat. - Cet amendement vise à mieux encadrer la fiscalité des bénéfices non distribués et non réinvestis dans l'économie réelle. Les multiples exemptions actuelles permettent de différer indéfiniment la taxation des dividendes. Instaurons une taxe de 30 % sur les flux dépassant un certain seuil, selon des modalités proportionnées. L'investissement est préservé. L'objectif est clair : encourager la circulation des capitaux, qui doivent financer l'activité et l'innovation.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis. Nous devons être vigilants : il est normal qu'il y ait de la trésorerie dans les holdings, par exemple à hauteur de deux ans de bénéfices, en vue d'agrandir une ligne de production ou de racheter une petite entreprise qu'on consolide. Les montants ne peuvent donc pas être fixes. Dans le cas de très grandes entreprises, le plafond de 150 000 euros empêcherait ces structures de jouer leur rôle productif.
Notre dispositif vise à distinguer la partie opérationnelle de ce qui tient à la vie d'un dirigeant qui utilise la holding à des fins personnelles. Le vôtre n'est pas adapté à la réalité de nombreuses entreprises, qui fonctionnent normalement, sans schéma de suroptimisation. En ce qui les concerne, je ne veux rien changer.
L'amendement n°I-1394 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-647 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Rémi Féraud. - La majorité sénatoriale avance des arguments très hostiles à cette taxe, mais ne vote pas sa suppression. C'est sans doute pour adopter l'amendement du rapporteur général qui en réduit considérablement la portée.
Pour notre part, nous allons au bout du raisonnement en donnant au contraire à la taxe une portée beaucoup plus générale. Plus précisément, nous intégrons les biens professionnels, c'est-à-dire les titres de participation financière.
J'entends les arguments liés à l'attractivité, mais j'en verse au débat deux autres : l'accroissement des inégalités de patrimoine et la nécessité de recettes supplémentaires pour plusieurs milliards d'euros. Nous ne cesserons pas de demander plus de justice fiscale !
M. le président. - Amendement identique n°I-1289 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Ouzoulias. - Je me réjouis que la majorité sénatoriale ait voté avec nous contre l'abrogation de l'article 3... Vous reconnaissez donc qu'il existe un gisement fiscal dans les holdings patrimoniales. (M. Emmanuel Capus s'exclame.) Vous n'êtes que trente à être persuadés du contraire.
Le dispositif gouvernemental ne prend pas en compte les titres cotés, les biens professionnels, le capital-investissement - je préfère le dire en français -, l'immobilier, les actifs professionnels et la trésorerie. Nous craignons que ces exonérations ne donnent lieu à de nouveaux contournements.
M. le président. - Amendement n°I-1 de M. Husson, au nom de la commission des finances.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Nous voulons recentrer la taxe sur ce qu'on appelle les biens somptuaires : yachts, chevaux de course, vin, logements mis à disposition. Il s'agit d'instaurer un dispositif anti-abus et, dans cet esprit, nous portons le taux à 20 %. Il ne s'agit pas de faire du rendement : il ne faut pas faire du rendement à n'importe quel prix. Nous instaurons un plafonnement pour respecter le principe constitutionnel d'égalité devant les charges publiques.
M. le président. - Sous-amendement n°I-1375 rectifié bis de Mme Lavarde et alii.
Mme Christine Lavarde. - Dans la continuité du propos du rapporteur général, ce sous-amendement retire de l'assiette les biens, notamment culturels, mis à disposition du public. S'agissant des logements, il reprend pour leur évaluation la notion de passif inscrite dans la rédaction initiale du Gouvernement. Il exclut tous les biens affectés à une activité opérationnelle. Par exemple, les stocks de vins ou spiritueux d'une entreprise de ce secteur n'ont pas vocation à être taxés ; de même pour les chevaux d'une société ayant une activité de course.
M. le président. - Sous-amendement n°I-2062 rectifié quater de Mme Darcos et alii.
Mme Laure Darcos. - Il est essentiel d'exonérer toutes les oeuvres d'art ou de collection, dans la mesure où elles sont exposées au public ou aux salariés. Près de 200 000 emplois dans les galeries d'art et, plus largement, le monde de l'art, seraient menacés sans cette restriction. De plus, n'oublions pas que les collections publiques sont souvent, au départ, des collections privées constituées sur plusieurs générations.
M. le président. - Sous-amendement n°I-2660 rectifié bis de M. Jean-Pierre Vogel et alii.
M. Jean Pierre Vogel. - L'amendement du rapporteur général recentre la taxe sur les actifs strictement patrimoniaux aux finalités d'optimisation fiscale, ce qui est légitime. Mais l'inclusion dans la liste des biens dits somptuaires des chevaux de course et de concours est un contresens économique majeur.
Assimiler ces équidés à des biens de confort patrimonial, c'est oublier leur nature d'actifs productifs pleinement intégrés dans une filière agricole et sportive d'excellence. Le dispositif doit cibler des actifs improductifs, pas ceux qui créent de la valeur dans nos territoires ! La filière équine française représente 66 000 emplois directs et 11 milliards d'euros de chiffre d'affaires, et nos 18 000 courses annuelles contribuent au dynamisme rural et au rayonnement international de notre pays.
Nous proposons donc d'exclure les chevaux de course et de concours du dispositif. Ce ne sont pas des biens somptuaires, mais des actifs agricoles créateurs de valeurs dans nos territoires.
M. le président. - Sous-amendement n°I-2751 de M. Rietmann.
M. Olivier Rietmann. - Il s'agit de préciser l'amendement de notre rapporteur général préféré (Sourires) en ce qui concerne les chevaux de course et de concours ainsi que les vins et alcools : lorsqu'il s'agit d'actifs professionnels, ils doivent être exemptés. Ce sous-amendement serait satisfait en cas d'adoption de celui de Mme Lavarde.
M. le président. - Sous-amendement n°I-2694 de M. Canévet.
M. Michel Canévet. - Ce dispositif empêche que le départ à l'étranger d'une holding ne permette d'échapper à l'impôt.
M. le président. - Sous-amendement n°I-2750 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Ouzoulias. - Les grandes fortunes du XXIe siècle ne sont pas celles du XIXe. Elles n'investissent pas dans des voiliers, des chevaux ou des tableaux, mais se logent dans les portefeuilles financiers et les actifs numériques, des instruments parfaitement passifs, mobiles et optimisables. Il faut viser en particulier les cryptoactifs, qui ne sont pas des biens somptuaires mais des actifs somptueusement spéculatifs, ne servant qu'à une chose : soustraire du patrimoine à l'impôt.
M. le président. - Amendement n°I-1783 rectifié bis de Mme Schillinger et alii.
M. Stéphane Fouassin. - Cet amendement, élaboré avec l'Institut des avocats-conseils fiscaux, apporte une correction technique indispensable pour que le dispositif soit cohérent et applicable. Il s'agit de tenir compte des dettes directement liées aux disponibilités et titres taxables, pour éviter de taxer une valeur brute qui ne reflète pas la réalité économique.
M. le président. - Amendement n°I-762 rectifié de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Il s'agit d'exclure les investissements dans l'épargne de fonds communs qui soutiennent les capitaux propres de sociétés non cotées et renforcent ainsi la compétitivité des PME françaises et européennes.
M. le président. - Amendement n°I-2012 rectifié de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Tous les véhicules dont l'objet principal est d'investir dans l'économie réelle française et européenne doivent être exemptés, quelles que soient les modalités d'investissement.
M. le président. - Amendement n°I-2013 rectifié de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Les holdings investissant dans des fonds de capital-risque ou capital-investissement doivent conserver des sommes et des titres afin d'honorer les appels de capitaux : il ne s'agit pas d'une thésaurisation abusive.
M. le président. - Amendement n°I-648 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Nous portons de 2 % à 20 % le taux de la taxe sur les actifs non professionnels des holdings patrimoniales. Aux États-Unis, les sociétés sans activité opérationnelle et dont au moins 60 % du revenu provient de revenus passifs se voient appliquer une surtaxe de 20 % sur leurs revenus non distribués.
M. le président. - Amendement n°I-2213 de M. Dossus et alii.
M. Thomas Dossus. - Proposer de nouveaux moyens d'optimisation est une étrange façon de lutter contre la suroptimisation... Nous sommes plutôt satisfaits de la prise en compte des holdings, même si nous voudrions bien sûr aller plus loin. Portons au moins le taux de la taxe de 2 % à 4 % pour en améliorer le rendement.
M. le président. - Amendement n°I-2698 de M. Husson, au nom de la commission des finances.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Amendement rédactionnel.
Avis défavorable aux amendements identiques nosI-647 et I-1289, qui visent les biens professionnels.
Sagesse sur les sous-amendements nosI-1375 rectifié bis et I-2694. Avis défavorable au sous-amendement n°I-2062 rectifié quater, qui exclut toutes les oeuvres d'art. Retrait du sous-amendement n°I-2660 rectifié bis au profit du sous-amendement n°I-2751, auquel je donne à titre personnel un avis de sagesse. Avis défavorable au sous-amendement n°I-2750.
Avis défavorable à l'amendement n°I-1783 rectifié bis. Retrait de l'amendement n°I-762 rectifié. Avis défavorable aux amendements nosI-2012 rectifié, I-2013 rectifié, I-648 et I-2213.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Le rapporteur général propose de substituer au mécanisme anti-optimisation large souhaité par le Gouvernement un mécanisme anti-abus et une majorité de cet hémicycle y semble disposée. Je m'en remets à votre sagesse.
Si tel est votre choix, il serait logique que vous adoptiez le sous-amendement de Mme Lavarde, ce qui satisferait ceux de Mme Darcos et M. Rietmann. Avis défavorable à celui de M. Jean-Pierre Vogel : nous visons des chevaux considérés comme un investissement. Avis favorable à celui de M. Canévet.
En résumé, avis favorable aux sous-amendements nosI-1375 rectifié bis et I-2694. Pour plus d'efficacité, j'indiquerai mes avis sur les autres amendements dans le cas où celui de la commission ne serait pas adopté. (On s'en félicite à droite.)
Mme Sylvie Robert. - À titre personnel, je ne suis pas pour taxer les oeuvres d'art et trouve intéressante la proposition de Mme Darcos, dans la mesure où l'exposition publique des oeuvres est prévue en contrepartie de l'exonération. Veillons à ne pas fragiliser le marché de l'art et l'écosystème de la scène contemporaine française. Mme Darcos a eu raison de rappeler aussi que les donations de collections privées alimentent les collections publiques dans l'ensemble de nos territoires.
M. Grégory Blanc. - Je suis pour les holdings ! C'est un dispositif intelligent qui peut permettre le développement de notre économie. Ce que nous visons, ce sont des montages économiques permettant d'éviter l'impôt. Il s'agit simplement d'appliquer une taxe dans certaines situations exorbitantes de l'activité économique, au nom de la justice fiscale.
En revanche, le dispositif de la commission ne taxe pas les placements dans des fonds communs de placement à risque (FCPR) ou les véhicules financiers. Ce n'est pas moral ; je le dis d'autant plus que j'ai proposé d'intégrer les FCPR dans les PEA et PEA-PME. Avis défavorable de la commission... Soyons cohérents ! Il ne peut pas y avoir une fiscalité pour les hauts patrimoines, une fiscalité pour les autres.
M. Olivier Rietmann. - J'entends parler des milliardaires. S'ils s'installent dans notre pays et y paient des impôts, c'est tant mieux ! Mais ce n'est pas parce qu'on crée une holding qu'on est milliardaire : plus de neuf sur dix sont détenues par des patrons de PME.
On a parlé aussi de trésorerie. Mais qui est à même de juger si une trésorerie est excessive ou non ? La trésorerie, c'est le nerf de la guerre pour nos entreprises, ce qui leur a permis de passer la crise du covid, ce qui leur permet d'obtenir des prêts et d'innover. N'y touchons surtout pas !
Enfin, il n'y a peut-être pas beaucoup de personnes qui quitteront le pays si nous appliquons une taxe sur les holdings. Mais combien n'y entreront pas, y avez-vous pensé ? (Mme Sophie Primas et M. Emmanuel Capus applaudissent.)
Mme Florence Blatrix Contat. - Tant mieux que nous ayons des milliardaires : nous pouvons être d'accord. Mais la justice fiscale est importante aussi ! Le Gouvernement a pris conscience que, du fait de l'optimisation, une petite partie de nos concitoyens - dans les 0,05 % les plus aisés - ne contribuent pas à hauteur de leurs moyens parce qu'ils sont en mesure d'éviter l'impôt. C'est contre ces pratiques que nous voulons lutter, pas contre les holdings ni même les milliardaires !
Cet article 3 était un premier pas, mais nous proposions d'aller plus loin en intégrant les titres de participation et en relevant le taux. Hélas, le dispositif est complètement vidé de son contenu par l'amendement du rapporteur général. Certes, le taux est de 20 %, mais 20 % de pas grand-chose, cela donne un impôt qui rate complètement son objectif de lutte contre l'optimisation.
M. Victorin Lurel. - On passe insensiblement d'un dispositif anti-optimisation à un dispositif anti-abus. Le résultat ? L'optimisation et l'évitement continueront. L'amendement du rapporteur général, derrière le relèvement du taux, dévitalise complètement le dispositif.
Quant au Gouvernement, lorsque nous avions proposé, à l'occasion du projet de loi de lutte contre les fraudes sociales et fiscales, que l'industrie de l'optimisation fasse des notifications à l'AMF ou à Bercy, ce qui n'aurait pas coûté un centime, il s'y est opposé !
Mme Ghislaine Senée. - L'ultra-richesse s'est fortement développée ces sept dernières années.
M. Olivier Rietmann. - Et après ?
Mme Sophie Primas. - Ce n'est pas grave.
Mme Ghislaine Senée. - Ce qui est grave, c'est que la pauvreté ne cesse d'augmenter !
Oui, certains font de la suroptimisation. Toutes les holdings ne servent pas à ces pratiques, nous en sommes bien conscients. Mais multiplier les exemptions, c'est faciliter l'optimisation et cela n'a pas de sens.
Comment voulez-vous que les Français comprennent qu'une grande holding spécialisée dans le BTP possède des chevaux de course, des vins de luxe ou des bijoux ? On ne peut pas accepter de tels biens somptuaires sans lien avec l'activité économique ! La réalité, c'est que certains ne paient quasiment aucun impôt sur le revenu parce qu'ils vivent à travers leur holding.
M. Thierry Cozic. - Le Gouvernement proposait une taxe passoire. Avec l'amendement de la commission, ce sera une taxe trou noir ! Monsieur le rapporteur, quel rendement en espérez-vous ? Et à quoi bon même voter l'article avec toutes ces exceptions ? Le coût des heures de travail à Bercy pour monter votre usine à gaz sera supérieur au rendement... Épargnons-nous le ridicule !
M. Jean Pierre Vogel. - D'aucuns voudraient faire croire que les chefs d'entreprise font un peu n'importe quoi. Mais, pour être déductibles du résultat fiscal, les dépenses doivent être engagées dans l'intérêt de l'entreprise. Il y a des garde-fous : la DGFiP, les commissaires aux comptes. Les chefs d'entreprise sont des gestionnaires et ils ne font pas n'importe quoi. Non, on ne peut pas entrer dans des holdings des yachts, des avions ou des bijoux si ce n'est pas conforme à son objet ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP)
M. Emmanuel Capus. - CQFD !
M. Pierre Ouzoulias. - Monsieur Rietmann, vous avez défendu la nécessité de la trésorerie. Je vous invite à le redire lorsque nous débattrons du budget de l'enseignement supérieur et de la recherche et qu'il sera question des trésoreries des universités, du CNRS et de l'Agence nationale de la recherche... (Applaudissements à gauche ; Mme Laure Darcos et M. Marc Laménie applaudissent également.)
M. Alexandre Ouizille. - Quand on parle de fraude sociale, nul ne trouve d'excuse à vos yeux. Mais lorsqu'il s'agit d'éviter des comportements scandaleux que la ministre a évalués à plus de 1 milliard d'euros, toutes les excuses sont bonnes ! Ce grand écart est incompréhensible. Comment voulez-vous que les Français comprennent qu'une entreprise a besoin de bijoux ou de vins ?
M. Emmanuel Capus. - Aucune entreprise n'a des bijoux ! C'est du délire !
M. Alexandre Ouizille. - Vous videz le dispositif anti-optimisation de toute substance, assumez-le devant les Français !
Mme Sophie Primas. - Oui !
M. Olivier Rietmann. - Nous l'assumons !
Mme Christine Lavarde. - Ne caricaturez pas. Lorsque des biens sont des valeurs économiques qui participent à la vie de l'entreprise, il n'y a pas lieu de les taxer - j'ai pris l'exemple de l'entreprise de vins et spiritueux. D'autre part, madame Robert, mon sous-amendement va dans le sens de celui de Mme Darcos. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Roger Karoutchi. - Très bien !
Le sous-amendement n°I-2660 rectifié bis est retiré, ainsi que le sous-amendement n°I-2751.
Les amendements identiques nosI-647 et I-1289 ne sont pas adoptés
Le sous-amendement n°I-1375 rectifié bis, modifié par la suppression du gage, est adopté.
Le sous-amendement n°I-2062 rectifié quater n'a plus d'objet.
Le sous-amendement n°I-2694 est adopté.
Le sous-amendement n°I-2750 n'est pas adopté.
L'amendement n°I-1, sous amendé, est adopté.
Les amendements nosI-1783 rectifié bis, I-762 rectifié, I-2012 rectifié, I-2013 rectifié I-648, I-2213 et I-2698 n'ont plus d'objet.
M. le président. - Amendement n°I-1784 rectifié bis de Mme Schillinger et alii.
Mme Nadège Havet. - Il s'agit de ne pas appliquer immédiatement cette taxe aux personnes qui arrivent en France, par cohérence avec la règle définie pour l'impôt sur la fortune immobilière (IFI).
M. le président. - Amendement n°I-2695 de M. Husson, au nom de la commission des finances.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Rédactionnel.
M. le président. - Amendement n°I-1514 rectifié de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - La taxe frapperait un résident fiscal français contrôlant une holding étrangère sans tenir compte de l'ancienneté de sa résidence fiscale en France. Or les personnes qui transfèrent leur domicile fiscal en France peuvent détenir des participations dans des holdings ayant leur siège à l'étranger et qu'il ne leur est pas loisible de transférer en France, compte tenu des autres actionnaires. Dans sa définition actuelle, la taxe frapperait ces participations dès l'arrivée en France des personnes physiques.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Ces deux amendements visent à intégrer le régime des impatriés dans la taxe holdings. L'adoption de l'amendement de la commission les satisfait pour l'essentiel. Retrait ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Avis favorable à l'amendement du rapporteur général. Demande de retrait des amendements nosI-1784 rectifié bis et 1514 rectifié.
Les amendements nosI-1784 rectifié bis et I-1514 rectifié sont retirés.
L'amendement n°I-2695 est adopté.
M. le président. - Amendement n°I-761 rectifié de Mme Paoli-Gagin et alii.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Le contrôle serait présumé en cas de détention de plus de 33,33 % des droits de vote ou des droits financiers, conformément à la règle inscrite dans le code de commerce. Mais il faut écarter la présomption lorsqu'un autre associé détient une fraction supérieure.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'adoption de l'amendement de la commission vous satisfait. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Le dispositif a été tellement rétréci, ce que je déplore, qu'on peut considérer que vous êtes satisfaite. Retrait ?
L'amendement n°I-761 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°I-2696 de M. Husson, au nom de la commission des finances.
L'amendement rédactionnel n°I-2696, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°I-2697 de M. Husson, au nom de la commission des finances.
L'amendement rédactionnel n°I-2697, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°I-470 de M. Daubresse.
L'amendement n°I-470 n'est pas défendu.
M. Thomas Dossus. - Cet article a été fortement encadré, selon le rapporteur général. Il a été vidé de sa substance, oui ! Quel rendement en attendez-vous ?
M. Thierry Cozic. - Excellente question !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - C'est de l'ordre de la centaine de millions d'euros en considérant qu'il n'y a aucun changement de comportement. Mais un dispositif anti-abus a pour objectif de supprimer les abus, donc son assiette, ce qui conduit à un rendement nul. C'est ce qui s'est passé avec les mesures contre les rachats d'actions. Ce serait une bonne nouvelle que les abus ne perdurent pas.
M. Thierry Cozic. - L'amendement de la commission a éviscéré le dispositif. Dans ces conditions, nous voterons contre l'article 3, à regret.
M. Grégory Blanc. - Nous sommes passés d'un dispositif anti-optimisation à un dispositif anti-abus. Je ne vois plus l'intérêt de voter cet article. Comment pensez-vous lutter contre l'évitement fiscal ?
L'article 3, modifié, est adopté.
Après l'article 3
M. le président. - Amendement n°I-258 rectifié de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Si j'ai bien compris, on avance un risque d'inconstitutionnalité contre la taxe Zucman, mais ce risque n'a jamais été démontré. La taxe toucherait 1 800 foyers soit 0,003 % de la population. Son taux, de 2 %, n'est pas très élevé. Il est impensable de ne pas toucher à ces 0,003 % ! Pour reprendre la distinction que j'ai faite en défendant la question préalable, ce serait peut-être légal, mais pas légitime dans le pays - y compris dans l'électorat de droite.
M. le président. - Amendement identique n°I-1012 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - En quinze ans, la fortune des plus riches a été multipliée par six, alors même que le taux de pauvreté atteint des sommets. Comment la nation des droits de l'homme peut-elle accepter un tel niveau d'inégalités ?
Instaurons une contribution minimum de 2 % sur les patrimoines nets supérieurs à plus de 100 millions d'euros. Ce dispositif est soutenu par sept prix Nobel. Tous prélèvements confondus, les millionnaires paient 26 % de leurs revenus, contre 54 % pour l'ensemble des Français.
Les injustices n'ont cessé de croître sous Emmanuel Macron, faisant de la France le pays avec le plus de milliardaires en Europe.
M. Arnaud Bazin. - Propagande !
M. Thierry Cozic. - Les plus riches ne doivent pas payer proportionnellement moins d'impôts que leur secrétaire !
M. le président. - Amendement identique n°I-1498 de M. Dossus et alii.
M. Thomas Dossus. - Nos comptes publics sont dans le rouge et nous devons décider qui doit contribuer à leur redressement. Lors de l'examen du PLFSS, vous avez répondu : les allocataires de minima sociaux. Vous venez de renoncer à lutter contre l'optimisation des plus hauts patrimoines. Acceptez au moins de cibler les 0,01 % les plus fortunés, qui paient moitié moins d'impôts que vous, moi et 99,9 % des Français ! Ce sont eux qui ont profité des huit années de mandat d'Emmanuel Macron.
M. le président. - Amendement n°I-1734 rectifié bis de Mme Pantel et alii.
M. Michel Masset. - Une partie du RDSE soutient la taxe Zucman, qui s'attaque à un angle mort de notre fiscalité. Cet amendement réaffirme le principe simple selon lequel les très grandes fortunes doivent contribuer à hauteur de leur puissance économique.
Faisons un choix républicain fort : protéger l'égalité devant l'impôt pour protéger l'égalité entre les citoyens. Alors que les inégalités se creusent et que le consentement à l'impôt s'effrite, il n'est plus tenable qu'une minorité contribue proportionnellement moins qu'un salarié ou un artisan. Cette mesure vise simplement à rétablir l'équité fiscale, devenue indispensable.
M. Thomas Dossus. - Très bien !
M. le président. - Amendement n°I-185 rectifié de Mme Blatrix Contat et alii.
Mme Florence Blatrix Contat. - Cet amendement de repli abaisse le taux à 1 %. C'est un compromis plus que raisonnable, qui pourrait être largement partagé quand on entend l'appel de sept prix Nobel à instaurer ce type de mécanisme. Difficile de trouver proposition plus modérée !
Au sommet de la pyramide, l'impôt réellement payé après optimisation est proportionnellement inférieur à celui acquitté par les classes moyennes ou même supérieures.
M. le président. - Amendement identique n°I-2640 rectifié bis de Mme Pantel et alii.
M. Michel Masset. - Le RDSE, qui ne manque pas d'idées, propose également une taxe Zucman à 1 %.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sans surprise, avis défavorable. Nombre des arguments que je pourrais présenter ont déjà été avancés lors de l'examen de la proposition de loi dédiée. Son rapporteur, Emmanuel Capus, avait souligné les risques d'inconstitutionnalité. Le Conseil d'État l'a confirmé dans son avis.
Répond-on ainsi à un sentiment d'urgence vis-à-vis de la dérive des comptes publics ? Ne doit-on pas plutôt repenser, réorienter et simplifier notre fiscalité ? Nous avons créé une CDHR et une CEHR. N'allons pas plus loin dans l'alphabet. (Sourires)
Simplifions la fiscalité des ménages et des entreprises en recherchant des assiettes plus larges, plutôt que viser une petite réserve de très riches à qui il faudrait demander beaucoup, voire trop. (M. Thomas Dossus et Mme Ghislaine Senée protestent.)
Commençons par lutter contre un certain nombre d'abus - nous nous y sommes déjà employés. Continuons en ce sens.
Attention aux signaux envoyés en matière de mobilisation des capitaux. La France doit retrouver un caractère attractif pour les investisseurs notamment étrangers. Elle est déjà le pays le plus imposé de l'OCDE. Quand on a beaucoup d'impôts, une dépense publique excessive et une croissance faible, c'est qu'on a un problème de modèle.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Les ménages les plus riches de notre pays paieraient moins d'impôts que les ménages les plus pauvres ? Je veux tordre le cou à cette idée selon laquelle les ménages pauvres seraient contributeurs nets au système fiscal : c'est faux. Certes, avec la TVA, les plus modestes consomment 100 % de leur revenu disponible. Mais ils sont bénéficiaires nets compte tenu des prestations et des transferts monétaires.
Mme Sophie Primas. - Très bien !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Comment sont calculées les valorisations des entreprises ? On s'appuie sur la dernière levée de fonds. Si quelqu'un paye 1 million d'euros pour prendre 1 % de l'entreprise, le magazine de l'été calcule que l'entreprise vaut 100 millions d'euros. Mais personne n'a proposé d'acheter l'entreprise pour 100 millions d'euros ! C'est donc une extrapolation qui est faite sur les dernières levées de fonds - en général pour de très petites parts du capital que les investisseurs sont prêts à payer cher. Les licornes valent des milliards, sans que personne n'imagine que le fondateur empoche les milliards en question s'il vend. Non, ces milliards ne se baladent pas dans l'économie.
Le dispositif proposé pose problème au regard de la Constitution. Le Conseil d'État s'est exprimé sur l'amendement de Mme Mercier à l'Assemblée nationale, qui était similaire aux vôtres. Il note que le Conseil constitutionnel a toujours considéré qu'un taux supérieur à 0,5 % était potentiellement confiscatoire. Quand le taux est élevé, comme pour l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), il y a toujours eu un plafond, en pourcentage du revenu. Entre 1981 et 1983, pendant quelques mois, l'impôt sur les grandes fortunes (IGF) a inclus les biens professionnels ; cela a été retiré avant d'être appliqué car on a constaté qu'on ne pouvait pas imposer les biens professionnels. Taux, absence de plafond, bien professionnels : la jurisprudence nous dit que le Conseil constitutionnel ne validerait pas un tel impôt.
Avis défavorable à ces amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)
M. Louis-Jean de Nicolaÿ. - Très bien !
M. Pierre Ouzoulias. - Le débat n'est ni technique ni fiscal, il est politique. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Olivier Rietmann. - (Frottant pouce contre index) On en revient toujours à ça !
M. Pierre Ouzoulias. - Les inégalités n'ont jamais été aussi fortes, le sentiment d'injustice fiscale de même.
Mme Sophie Primas. - Vous le nourrissez !
M. Pierre Ouzoulias. - Vous savez très bien qu'il y a là les ferments d'une crise sociale et politique majeure.
Vous nous parlez de constitutionnalité ? La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui constitue l'identité de la France, énonce, dans son article 13 : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. » Aujourd'hui, nous ne respectons pas cet article. (M. Jean-Raymond Hugonet le conteste.) Si ce n'est par la taxe Zucman, nous aurons d'autres propositions pour y parvenir.
M. Alexandre Ouizille. - C'est vrai, notre système fiscal est redistributif : 60 % des Français sont bénéficiaires nets, et c'est heureux. Mais il y a dans notre pays une reconcentration des patrimoines qui met en danger la classe moyenne patrimoniale, ce grand acquis de l'après-guerre. Les revenus du capital ont tant augmenté par rapport aux revenus du travail que nous avons un problème à régler. Pierre Ouzoulias l'a dit : si ce n'est la taxe Zucman, il faut apporter une réponse dans ce budget à cette question qui abîme le corps social. Dans ce pays qui a l'égalité au centre de son identité, il y a une bulle au sommet de la pyramide sociale. Que prévoyez-vous pour traiter ce problème ?
M. Emmanuel Capus. - Rappel au règlement sur la base de l'article 36, alinéa 3, ainsi que de l'article 54 du règlement intérieur.
Monsieur le président, il est important de savoir ce qui a été adopté ou pas. Lors du vote sur l'article 3, la majorité sénatoriale n'a pas levé la main, sans doute par distraction. Les caméras le montreront. Vous avez proclamé que l'article n'était pas adopté - puis vous vous êtes immédiatement repris. Ce n'est pas clair.
Vous ne pouvez pas corriger le vote de vos collègues. Il faudrait une seconde délibération. Ceux qui ne votent pas ne votent pas ! L'article n'a pas été adopté, faute de majorité.
M. Michel Canévet. - Si !
M. Grégory Blanc. - Ils sont pour la taxe Zucman !
M. Emmanuel Capus. - Ce vote est déterminant pour la suite des débats. C'est très grave !
M. Roger Karoutchi. - Vous n'avez pas à contester les décisions de la présidence.
M. le président. - L'article 3 a été adopté.
M. Yannick Jadot. - Je ne sais pas si le niveau des inégalités est le plus élevé que le pays ait connu, mais c'est le plus élevé depuis trente ans selon l'Insee, ce qui est déjà considérable.
Nous ne proposons pas de revenir aux taux d'imposition des Trente glorieuses, époque de progrès social et économique, avec une fiscalité très redistributive...
Mme Sophie Primas. - Période de croissance et de création d'emplois !
M. Yannick Jadot. - Vous dites qu'il y a trop de prélèvements ? Regardez le niveau du Smic. Ces dix dernières années, la France est le pays de l'OCDE qui a le moins augmenté le salaire minimum. Statistique Eurostat. Chez tous nos voisins immédiats, il a pris 50 % ; chez nous, 25 %. Si l'on augmentait les salaires, on aurait moins besoin de redistribuer !
Une bonne politique publique repose sur l'équité, l'efficacité et l'exemplarité.
Équité ? C'est la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qu'a rappelée notre collègue Ouzoulias.
Efficacité ? Une mesure qui rapporte 15 à 20 milliards d'euros, juste ou injuste, c'est efficace ! (MM. Vincent Delahaye et Olivier Rietmann le contestent avec véhémence.)
Mme Sophie Primas. - C'est efficace une année !
M. Yannick Jadot. - Exemplarité ? Je ne dis pas que tous les maux de la société sont dus aux ultrariches, mais qu'ils doivent être exemplaires aux yeux des classes moyennes et populaires.
Mme Sophie Primas. - Vous raisonnez à l'envers !
M. Olivier Rietmann. - L'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dit que chacun doit contribuer au fonctionnement de l'État. En quoi une entreprise, une personne morale, est-elle un citoyen ? Vous faites une confusion qui alimente le sentiment d'inégalité.
M. Pierre Ouzoulias. - On ne peut pas dire cela !
M. Olivier Rietmann. - Je veux bien augmenter les salaires, monsieur Jadot, mais quand vous ponctionnez une entreprise, c'est autant de salaires en moins à distribuer. Ce sont des vases communicants.
M. Yannick Jadot. - Et l'explosion des dividendes ?
M. Olivier Rietmann. - S'en prendre à une entreprise, c'est s'en prendre aux femmes et aux hommes qui la composent.
M. Grégory Blanc. - Ça se saurait !
M. Olivier Rietmann. - Avant redistribution, l'écart de revenu entre les plus riches et les plus défavorisés est de 1 à 18. Après redistribution, il est de 1 à 3. Cessez d'alimenter sur tous les plateaux, toutes les antennes, le sentiment d'inégalité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; protestations à gauche)
M. Grégory Blanc. - Ce n'est pas un sentiment !
M. Thierry Cozic. - La taxe Zucman ne porte pas sur les entreprises, mais sur les personnes physiques, sur 1 800 foyers.
Mme Sophie Primas et M. Olivier Rietmann. - Avec le patrimoine des entreprises !
M. Thierry Cozic. - C'est une taxe différentielle de 2 % sur le patrimoine des personnes physiques de plus de 100 millions d'euros. On recherche la justice fiscale.
Plus on est riche en France, moins on paie d'impôts en proportion. En 1996, les plus fortunés possédaient 80 milliards d'euros, soit 6,4 % du PIB. En 2024, c'est 1 228 milliards d'euros, soit 42 % du PIB. La fiscalité du capital en France est loin d'être spoliatrice, la France est loin d'être un enfer fiscal. La fiscalité du capital ne pèse qu'à hauteur de 6,3 % des recettes fiscales, soit le même niveau que l'Allemagne. La Norvège, la Suède, l'Irlande ou les États-Unis taxent proportionnellement davantage le capital que la France.
Mme Ghislaine Senée. - Tout le monde se braque. La taxe Zucman est un impôt plancher. Plancher mordant, d'ailleurs.
Mme Sophie Primas. - Non.
Mme Ghislaine Senée. - On doit payer ses impôts à hauteur de ses moyens.
La richesse des 500 plus grandes fortunes représente 42 % du PIB. Il y a huit ans, cela n'existait pas. Il y a un devoir d'exemplarité quand on a autant d'argent supplémentaire.
M. Olivier Rietmann. - Mais ce n'est pas de l'argent !
Mme Ghislaine Senée. - Si on a 100 millions d'euros de richesse, on paie 2 millions. C'est beaucoup - mais qu'est-ce que ces 2 millions, par rapport à des milliards ? Il est incroyable que l'on puisse défendre un tel écart de richesse. Comment accepter que des personnes aient 180 milliards d'euros de richesse ? C'est incompréhensible.
M. Michel Canévet. - Ce débat est récurrent. À vous entendre, on a l'impression qu'il y aurait des gens qui ont beaucoup d'argent et qui ne paient pas tout l'impôt qu'ils doivent.
M. Thomas Dossus. - Ce n'est pas une impression !
M. Michel Canévet. - Heureusement, nombre de propriétaires d'actifs importants sont des contributeurs tout aussi importants ! Souvent, on cite un Français qui figure au palmarès mondial des grandes fortunes, mais le groupe qu'il préside paie une part très significative de l'impôt sur les sociétés.
Ce n'est pas parce qu'un groupe de sociétés a une valeur très importante que tout cela est dans la poche des propriétaires de ces sociétés. Quand l'argent est placé dans les entreprises, il sert à les faire fonctionner.
Le groupe UC est d'accord pour taxer les flux, c'est-à-dire les revenus, mais pas les stocks. Ceux que l'on veut taxer pourraient même ne pas avoir les moyens de payer.
Mardi, nous avons reçu le Nobel Philippe Aghion, qui a clairement dit qu'avec la taxe Zucman, il n'y aurait pas d'intelligence artificielle en France. (On se gausse sur les travées du GEST.) Soyons conscients des risques.
Mme Florence Blatrix Contat. - La redistribution fonctionne en France, nous pouvons en être fiers, mais cela n'empêche pas l'augmentation des inégalités et de la pauvreté.
Nous alimenterions un « sentiment » d'injustice fiscale ? Non, ce sont les faits. Les 0,01 % les plus riches contribuent deux fois moins que les millionnaires.
Les 500 plus grandes fortunes ont vu leur fortune passer de 200 milliards d'euros dans les années 2010 à 1 200 milliards aujourd'hui. C'est bien que l'on a échoué à taxer les flux, qui s'accumulent dans des holdings et évitent l'impôt.
La taxe Zucman a le mérite d'avoir une assiette importante qui fait contribuer ceux qui échappent proportionnellement à l'impôt, et de répondre à un principe constitutionnel consacré par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
M. Pascal Savoldelli. - Il faut distinguer le chef d'entreprise et l'entreprise. Les 500 premières fortunes françaises, qui sont passées de 124 milliards à 1 128 milliards, ne sont pas des chefs d'entreprise pour une grande partie d'entre eux. Ils ne dirigent pas d'entreprises.
Cet argent va-t-il à l'économie réelle ? Répond-il à des besoins, à une activité économique ? Ce n'est pas le sujet : on ne parle pas de patrons !
Ceux qui ont 100 millions d'euros ont déjà une assise solide : ils ne souffriront pas, ce n'est pas confiscatoire !
Lors de l'instauration de l'IGF, il y a eu, neuf mois durant, un débat entre constitutionnalistes, dont certains considéraient cet impôt comme inconstitutionnel ; c'est la force du politique et la force sociale qui ont su l'imposer. (M. Olivier Rietmann proteste.)
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Ces personnes n'ont pas 100 millions d'euros ! Elles ont des parts d'entreprises valorisées. Or, la valeur est une extrapolation. Si quelqu'un achète 1 % de l'entreprise à 1 million d'euros, on valorise à 100 millions d'euros. Mais le fondateur qui en possède, mettons, 25 %, n'a pas un compte en banque crédité de 25 millions d'euros !
M. Alexandre Ouizille. - Il s'agit d'entreprises cotées !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Imaginez : Arthur Mensch quitte Mistral. Qui va racheter ses parts ? Le jour où le fondateur vend, la valeur n'est plus la même.
M. Thomas Dossus. - Vous citez toujours le même !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - C'est un exemple parlant.
La concentration de richesses est à l'oeuvre dans tout l'Occident qui vieillit (M. Guy Benarroche ironise), parce que nous avons une accumulation générationnelle (M. Grégory Blanc le confirme) due au fait, inédit depuis quatre-vingts ans, que nous n'avons connu ni guerre ni crise inflationniste.
MM. Pascal Savoldelli et Pierre Ouzoulias. - C'est la rente.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Exactement ! Autrefois, les compteurs étaient remis à zéro tous les trente ou quarante ans.
M. Yannick Jadot. - Nous avons tout de même 12 millions de pauvres !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Actuellement, le patrimoine augmente avec l'âge, y compris après 70 ans. Pour les jeunes dans tout l'Occident européen, il est très difficile d'accéder à la propriété, de se lancer dans la vie. Attention à ne pas apporter à cette anxiété générationnelle une fausse solution.
Ces débats sont intéressants, mais vos propositions ne sont pas la bonne réponse. Avis défavorable.
M. Grégory Blanc. - Notre problème, c'est une accumulation de stock qui ne bouge plus. Il faut au contraire favoriser les flux, orienter l'argent vers une économie plus productive.
Si on ne taxe pas les stocks, on aura un problème sur la taxe foncière. Je voterai l'impôt sur la fortune improductive proposé par M. Canévet - mais c'est bien une imposition sur les stocks.
Depuis 2019, la politique de facilités de crédit de la BCE et la politique budgétaire de la France ont conduit à une accélération de l'accumulation de richesses pour certains. L'écart s'est creusé entre les plus hauts et les plus faibles revenus.
Si on ne trouve pas un autre dispositif anti-évitement, on aura de nouveau les gilets jaunes - en pire.
M. le président. - Concluez.
M. Grégory Blanc. - On ne peut pas à la fois dérembourser les médicaments et rejeter la taxe Zucman !
M. Simon Uzenat. - En écoutant la ministre, je conclus que, pour revenir à plus d'égalité, il faudrait une bonne guerre. (Exclamations indignées à droite)
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. Simon Uzenat. - Dans le pays de la liberté, de l'égalité et de la fraternité, nous parlons de choix politiques. L'inégalité n'est pas un sentiment, mais une réalité. L'écart de revenus entre les 20 % les plus aisés et les 20 % les plus modestes est quasiment identique à ce qu'il était dans les années 1970.
M. Olivier Rietmann. - Avant redistribution !
M. Simon Uzenat. - Comment l'accepter ? Les jeunes les plus modestes partent dans la vie avec un boulet à chaque pied quand d'autres, nés au bon endroit au bon moment, ont un turbo ! Le mérite ne suffit plus, quand on part avec de tels handicaps dans la vie.
Il ne s'agit pas de pénaliser ceux qui ont réussi, mais les écarts doivent être régulés, dans l'intérêt du pays.
M. Olivier Rietmann. - Ils le sont.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je crois m'être exprimée avec nuance. Je n'ai évidemment pas dit qu'il fallait une guerre ! J'ai dit que se cumulaient deux faits nouveaux : une espérance de vie très longue et un cycle inédit, sans guerre ni crise inflationniste. Résultat, la concentration de patrimoine est beaucoup plus générationnelle qu'on ne le dit. J'ai décrit une situation.
Vous dites qu'il faut faire circuler le patrimoine par l'impôt ; d'autres idées existent. Nous pourrons en débattre. C'est un phénomène qui concerne beaucoup d'autres pays, preuve que c'est un enjeu économique et non uniquement fiscal.
M. Thomas Dossus. - L'hyperconcentration du capital n'est pas uniquement liée au vieillissement et à la paix. C'est aussi le résultat de politiques fiscales ultralibérales qui ont réduit la fiscalité sur le capital et les gros patrimoines. C'est ainsi qu'en touchant un très petit nombre de foyers par la taxe Zucman, on peut obtenir un rendement très efficace. Il s'agit bien de corriger une politique fiscale. (Mme Ghislaine Senée applaudit.)
Les amendements identiques nosI-258 rectifié, I-1012 et I-1498 ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°I-1734 rectifié bis et les amendements identiques nosI-185 rectifié et I-2640 rectifié bis.
Demande de réserve
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je demande que la discussion sur les amendements nosI-1332 à I-752, qui sont en discussion commune, soit réservée.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Le Gouvernement ne s'y oppose pas, nous laissons le Sénat décider de l'organisation de ses débats.
La réserve, acceptée par le gouvernement, est de droit.
M. le président. - Amendement n°I-2451 rectifié ter de M. Kanner et du groupe SER.
M. Patrick Kanner. - Depuis huit ans, les gouvernements successifs ont pratiqué une injustice fiscale manifeste. Les débats à l'Assemblée nationale ont échoué à faire entendre le besoin de justice fiscale et sociale. Nous porterons cette exigence durant nos débats.
Le groupe SER a déposé plusieurs amendements pour dégager des recettes nouvelles et rééquilibrer la fiscalité, mais nous souhaitons également proposer d'autres hypothèses de travail pour renforcer, même temporairement, les ressources publiques. Parmi ces solutions, nous avons émis l'idée d'un emprunt obligatoire auprès des 20 000 foyers fiscaux les plus riches. Nous avons déposé trois versions de ce dispositif, dans cet amendement, dans le suivant et à l'amendement n°I-2626 rectifié bis, qui porte, lui, sur la valeur nette du patrimoine.
C'est un travail que nous acceptons de faire évoluer, éventuellement par des sous-amendements. Le Sénat pourrait alors s'enorgueillir d'avoir trouvé un accord sur cette proposition qui pourrait nous réunir.
Le Gouvernement a refusé de lever le gage, donc nous n'avons pas pu régler totalement la question du remboursement de cet emprunt.
Notre détermination est totale. Nous voulons une fiscalité juste.
M. le président. - Amendement n°I-2452 rectifié ter de M. Kanner et du groupe SER.
M. Patrick Kanner. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°I-2466 rectifié bis de M. Grégory Blanc.
M. Grégory Blanc. - Peu importe que le chat soit blanc ou gris, l'important est qu'il attrape la souris. Il faut que les plus hauts revenus accompagnent le redressement de notre pays.
Le groupe SER propose un emprunt obligatoire pour les plus hauts déciles. Ils doivent être mis à contribution pour éviter que notre pays emprunte aux taux du marché, 3,50 % à dix ans ou 2,50 % à cinq ans.
Nous pourrions envisager une rémunération inférieure de moitié à celle du livret A, ainsi qu'une possibilité de récupérer des liquidités en cas de difficulté ou de faillite.
M. le président. - Amendement n°I-2626 rectifié bis de M. Kanner et du groupe SER.
M. Patrick Kanner. - Défendu.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable à ces amendements. Je ne comprends pas la logique de cette proposition qui arrive comme une météorite. J'ai l'impression que c'est la recherche d'idées à tout prix.
M. Olivier Rietmann. - C'est pour pouvoir dépenser plus !
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Dans cet esprit, la commission des finances avait réfléchi, dans le cadre d'une table ronde, à la possibilité de mobiliser l'épargne des Français. On avait même évoqué, à ma demande, un grand emprunt public - mais il fallait les conditions politiques idoines. Nous aurions pu l'envisager à l'arrivée de Michel Barnier, cela a été écarté.
Cet amendement est petit bras. Les grosses fortunes devraient prêter sans intérêts, puis se signaler pour récupérer leur argent au bout de quatre ans... Tout cela est très amateur. (M. Grégory Blanc ironise.)
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - La France n'a pas de difficultés pour lever de l'argent. En 1983, la France s'était retrouvée en manque de financements - d'où l'emprunt forcé.
L'enjeu que pose le président Kanner est différent : un enjeu non de liquidité, mais de cohésion nationale.
M. Patrick Kanner. - De justice fiscale !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Il envisage une contribution des ménages les plus aisés au financement des grands défis du moment - notre défense, par exemple - plutôt que d'emprunter sur les marchés financiers.
Doit-on le faire de manière forcée et sans aucune rémunération ? Cela me pose problème.
Il existe un dispositif d'épargne réglementé, le livret A, rémunéré à 1,7 %, soit la moitié du taux d'emprunt sur les marchés. Soit dit en passant, cela signifie que le logement social se finance deux fois moins cher que l'État.
On pourrait imaginer un emprunt, pour la défense, par exemple, à un taux semblable à celui du livret A.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Plus !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Ou plus.
Cela peut être un outil de cohésion, pour faire contribuer les plus fortunés ou tous ceux qui voudraient. Le débat est ouvert.
À ce stade, avis défavorable, car le dispositif présenté ne me semble pas abouti.
M. le président. - Je suis saisi à l'instant de deux sous-amendements, nosI-2756 et I-2757
M. Claude Raynal, président de la commission. - Je viens de recevoir les deux sous-amendements. Le sous-amendement n°I-2757 est recevable, mais pas le sous-amendement n°I-2756, au titre de l'article 40 de la Constitution.
M. le président. - Sous-amendement n°I-2757 de M. Grégory Blanc.
M. Grégory Blanc. - Défendu.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - C'est la même logique. Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis.
M. Jean-Raymond Hugonet. - Hier, en discussion générale, le président de la commission des finances appelait avec sagesse au compromis, à la hauteur de vue - et voilà que nous arrive déjà un amendement météorite, pour reprendre l'expression du rapporteur général. Le groupe SER nous sort l'emprunt obligatoire. C'est le kolkhoze fleuri !
La taxe Zucman a été démasquée comme une supercherie et a explosé en vol. Vous proposez donc maintenant un racket. (M. Yannick Jadot proteste.)
Un emprunt d'État peut être intéressant, oui, mais un emprunt contraint est inacceptable. On parle de consentement à l'impôt ? Les Français, les très riches comme les moins riches, en ont surtout assez que leurs contributions arrosent le sable. (M. Yannick Jadot s'exclame.)
M. Guy Benarroche. - Pas d'école, pas d'hôpital !
M. Jean-Raymond Hugonet. - Que cela vous plaise ou non !
M. Vincent Capo-Canellas. - Le sujet n'est pas mûr. Par le passé, les grands emprunts étaient accompagnés d'éléments qui créaient la confiance et en expliquaient le sens. La ministre a eu raison de rappeler que notre signature demeurait solide et que l'État n'avait pas besoin de faire appel aux particuliers.
L'idée n'est pas mauvaise en soi, mais il y a trop d'improvisation depuis mardi. Nous sommes prêts à étudier la question, mais pas maintenant, pas comme cela. D'autant que la commission n'a même pas examiné le sous-amendement. Nous ne voterons pas ces amendements.
M. Victorin Lurel. - C'est un texte amateur, monsieur le rapporteur général, une météorite ? (M. Jean-François Husson le confirme.)
Permettez-moi de vous lire ce qu'écrivait votre prédécesseur, Philippe Marini, dans un rapport de juillet 2009 : « l'emprunt obligatoire, un moyen de financement qui pourrait se révéler utile ». Il soulignait ses avantages : « il est conforme à l'exigence de solidarité dont doivent témoigner les contribuables les plus aisés en temps de crise » et « il constitue une source de recettes aisément identifiable pour l'État, comme pour le citoyen, et serait prélevé sans coûts administratifs excessifs. »
Il ajoutait : « ll convient de bien réaliser que, dans le contexte actuel de très faible inflation, un emprunt obligatoire non rémunéré ou dont la rémunération serait inférieure à 1 % l'an ne représenterait qu'un « sacrifice » très modique pour les intéressés, sachant qu'ils bénéficieraient de la meilleure garantie possible de récupération de leur capital. Prétendre que cette opération serait assimilable à un impôt supplémentaire serait, par conséquent, contraire à la réalité économique ».
En quoi serait-ce une solution d'amateurs, un amendement loufoque ?
M. Thierry Cozic. - Ce débat est utile et nécessaire. Nos discussions animées témoignent de la vitalité de notre vie politique, notamment au Sénat.
Rappelons quelques chiffres : en 2026, la France devra emprunter 310 milliards d'euros et la charge d'intérêts atteindra les 59 milliards. Le déficit pour 2025 sera de 116 milliards d'euros. C'est le désarmement fiscal voulu par Emmanuel Macron - notamment ses 62 milliards de cadeaux fiscaux - qui a mis le pays dans cet état. Face à ces chiffres vertigineux, aucune mesure ne peut être écartée.
Le groupe SER a pris ses responsabilités pour réparer un pacte social gravement abîmé par huit ans de macronisme.
M. Patrick Kanner. - Les amateurs, ce sont ceux qui ont mis le pays au bord de la faillite. Tout est bon à prendre pour éviter ce désastre et ne pas faire payer ceux qui n'y sont pour rien.
Nous disons aux 0,05 % des contribuables concernés : vous devez contribuer aux politiques publiques dans un élan de patriotisme fiscal. Cela peut être pour la défense, comme le suggère Mme la ministre ; je pense quant à moi à l'hôpital public et à l'éducation nationale.
J'apprécie l'ouverture de M Capo-Canellas, qui reconnaît que cette piste mérite d'être étudiée.
M. Vincent Capo-Canellas. - Mais ni maintenant ni comme cela !
M. Patrick Kanner. - Avec le sous-amendement de Grégory Blanc, cette contribution exceptionnelle restituable sera rémunérée, à un taux modeste, inférieur aux 4 % à 7 % auxquels ces familles placent leurs fonds.
Ne balayez pas cet effort de patriotisme fiscal avec d'injustes propos.
M. Pascal Savoldelli. - Au départ, je me suis dit : c'est un emprunt sur ceux qui provoquent la dette - ce qui m'allait. (M. Olivier Rietmann s'en étonne.) Mais gare à la financiarisation de l'action publique : je préfère la fiscalité.
Nous avons un doute : cet emprunt n'est pas affecté, mais je crains qu'il aille au surarmement. Enfin, si pendant quatre ans nous rendons obligatoire cet emprunt, nous aurons du mal à taxer les ultra-riches. Nous nous abstiendrons.
M. Thomas Dossus. - Je n'étais pas très favorable à ce dispositif, mais tout de même, parler de racket alors que la contribution sera restituée !
La ministre nous dit que nous empruntons facilement, après nous avoir expliqué pendant des semaines que la charge de la dette allait devenir le premier poste de dépenses.
Votons ce dispositif pour le faire progresser dans la navette.
M. Alexandre Ouizille. - Les mots ont un sens : quand, dans un débat sur les impôts, on parle de racket, on dévalue le Parlement ! (M. Jean-Raymond Hugonet proteste.)
M. Olivier Rietmann. - Ce n'est pas un impôt !
M. Alexandre Ouizille. - Monsieur le rapporteur général, alors que nous cherchons un compromis, vos mots - amateur, météorite - annoncent le résultat : une CMP non conclusive et tout ira à la poubelle.
Chers collèges centristes qui êtes un peu plus raisonnables (Mme Christine Lavarde ironise) et cherchez le compromis, si vous écartez ces amendements, la règle de l'entonnoir fera qu'on ne pourra pas y revenir.
Bien sûr, chers collègues communistes, un emprunt est moins bien qu'un impôt. Mais cela nous permet de gagner un peu sur les taux d'intérêt.
J'en appelle à la responsabilité de chacun.
Mme Christine Lavarde. - La Guinée vient de lancer un appel public à l'épargne, au taux de 11 %. Ce qui est intéressant, c'est qu'elle poursuit une stratégie : élargir sa base d'investisseurs, renforcer son marché intérieur des capitaux, structurer son accès aux financements extérieurs. Alors que, dans votre dispositif, je ne comprends pas où ira cet argent. Nous ne voterons pas ces amendements.
Mme Sophie Primas. - Cela réduirait le déficit ? En aucun cas. Bien sûr le différentiel de taux fera gagner un peu d'argent. Mais ce qui réduit le déficit, c'est la baisse des dépenses publiques.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Eh oui !
M. Grégory Blanc. - Je vous invite à lire les rapports de la Cour des comptes : d'ici à notre pic d'endettement, en 2031, la charge de la dette va considérablement augmenter. Nous devrons trouver 180 à 200 milliards d'euros. Sans parler de la défense, de l'adaptation au réchauffement climatique et du vieillissement. Oui, nos services publics devront gagner en efficience, mais il faudra aussi demander des efforts aux plus hauts revenus.
Le rapporteur général parle de météorite ? Nous avons eu le budget le 14 octobre. Dans ce temps réduit, nous devons trouver un compromis. Si vous voulez de la stabilité, alors dites au pays : oui, les plus hauts revenus, les plus hauts patrimoines doivent contribuer.
Là, c'est uniquement un emprunt, qui sera restitué. Mais même cela, vous le refusez...
M. Emmanuel Capus. - C'est la journée des horreurs : CDHR, taxe sur les holdings - proclamée adoptée alors que ceux qui ont voté pour étaient minoritaires -, emprunt obligatoire...
Revenons aux fondamentaux ! Monsieur Jadot, que dit l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ? La propriété privée est inaliénable et sacrée ; nul ne peut y porter atteinte, sauf nécessité publique - quelle est-elle ici ? -, à la condition d'une juste indemnité. Un emprunt non rémunéré est totalement inconstitutionnel. (M. Yannick Jadot en doute.) Bien évidemment, on ne peut pas voter un tel truc ! (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et Les Républicains ; M. Vincent Capo-Canellas applaudit également.)
M. Olivier Rietmann. - La droite sénatoriale n'est pas contre l'emprunt : le général de Gaulle a lancé des grands emprunts, mais en expliquant pourquoi il y avait recours et en fédérant le peuple français. Jamais il n'aurait fait un tel bidouillage, car un emprunt doit avoir une affectation. Or Pascal Savoldelli l'a bien dit : nous ne serions pas forcément d'accord sur l'affectation. Je rejoins Emmanuel Capus : ce n'est pas de l'emprunt, c'est de la réquisition.
M. Yannick Jadot. - De Gaulle en a fait !
M. Olivier Rietmann. - En d'autres temps.
M. Claude Raynal, président de la commission. - Quand on s'enflamme, on perd ses repères. Deux idées sont fausses. D'abord, la non-affectation serait un oubli. Non : si l'emprunt avait été affecté, l'amendement serait tombé sous le coup de l'article 40 de la Constitution.
Mme Christine Lavarde. - Et l'exposé des motifs ?
M. Claude Raynal, président de la commission. - Ensuite, la non-rémunération : si nous avions prévu une rémunération - et donc la création d'une charge publique -, l'article 40 aurait aussi trouvé à s'appliquer. Ne faites pas semblant de le découvrir !
M. Olivier Rietmann. - Et l'exposé des motifs ?
M. Claude Raynal, président de la commission. - Cet emprunt obligatoire auprès des plus fortunés est possible, mais vous refusez d'en discuter en suscitant de faux débats. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)
M. Vincent Capo-Canellas. - Pas du tout !
M. Vincent Louault. - Cela me fait penser à la faillite du système de Law : sous Louis XV, le régent a instauré un emprunt obligatoire, vite transformé en emprunt perpétuel, avec des taux dérisoires. Tout a été mangé par l'inflation et la banqueroute n'a pas tardé.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Le débat a été intéressant, sur tous les bancs. J'entends qu'il s'agirait plus de cohésion nationale que de financement.
En tant que ministre, je dois vous dire que les amendements, tels que rédigés, ne sont pas opérationnels : le Gouvernement y est défavorable.
Mais le Parlement est souverain : à vous de décider si vous souhaitez poursuivre la réflexion dans la navette ou dans un autre cadre.
L'amendement n°I-2451 rectifié ter est retiré, de même que les amendements identiques nosI-2452 rectifié ter et I-2466 rectifié bis.
Le sous-amendement n°I-2757 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°I-2626 rectifié bis.
M. le président. - Nous pourrions poursuivre nos travaux samedi toute la journée, le soir et la nuit, puis dimanche à 14 h et le soir.
M. Claude Raynal, président de la commission. - Cela signifie que nous siégerions samedi jusqu'à 2 heures, voire 2 h 30 du matin.
La séance est suspendue à 20 heures.
Présidence de M. Pierre Ouzoulias, vice-président
La séance reprend à 21 h 30.
Après l'article 3 (Amendements précédemment réservés)
M. le président. - Amendement n°I-1332 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°I-1013 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Victorin Lurel. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°I-1499 de M. Dossus et alii.
L'amendement n°I-1499 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°I-1331 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Dans la France du XIXe siècle, marquée par la prédominance des rentiers, de nombreux auteurs d'inspiration libérale ont plaidé pour un impôt incitant à rendre le capital financier productif, notamment en 1977 l'économiste Maurice Allais, prix Nobel d'économie. En 1982, cela a débouché sur l'imposition annuelle des hauts patrimoines sous la forme de l'IGF.
Les exonérations étaient très faibles ; celle des biens professionnels était ciblée sur l'outil de travail des petits et moyens entrepreneurs, dans la limite de 2 millions de francs d'actifs. Le rapport Sansu-Mattei regrette que l'assiette de l'ISF ait été mitée par de nombreux dispositifs, notamment l'exonération des biens professionnels sans plafonnement à partir de 1989 ; qui rendait régressif l'ISF. C'est pourquoi le produit a été divisé par deux entre l'ISF - 5 milliards d'euros en 2012 - et l'IFI -2,3 milliards d'euros en 2022.
M. le président. - Amendement n°I-898 de M. Durox et alii.
L'amendement n°I-898 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°I-159 rectifié ter de M. de Montgolfier et alii.
Mme Christine Lavarde. - Nous avons réalisé une coordination de dernière minute avec le groupe UC afin de revenir sur un impôt malheureux créé en 2017, l'IFI. Le secteur du logement connaît d'importantes difficultés et cet impôt n'encourage absolument pas les particuliers à devenir propriétaire bailleur. C'est pourquoi nous portons une modification de cette assiette pour taxer uniquement les biens qui constituent un patrimoine mais ne contribuent pas à l'économie réelle.
Malheureusement, ce changement d'assiette, porté depuis plusieurs années par la majorité sénatoriale, a été complètement dévoyé à l'Assemblée nationale. En conservant le même nom, les députés y ont fait entrer des actifs qui n'ont pas lieu d'y être comme les plans d'épargne retraite (PER), les PEA, ou les fonds euros des assurances vie. Ces actifs participent à l'économie. Si tout le monde les retirait, le financement de notre dette serait en difficulté, et les ratios de solvabilité bancaires et assuranciels difficilement remplis. Il faut agir avec prudence. C'est tout le sens de cet amendement.
M. le président. - Amendement identique n°I-381 rectifié de Mme Vermeillet et du groupe UC.
M. Michel Canévet. - Cela fait plusieurs années que nous défendons la substitution d'un autre impôt à l'IFI. Le nom de contribution sur les hauts patrimoines est plus adapté. Je voudrais dire à Grégory Blanc que ce n'est pas une taxation des stocks, au sens où elle ne taxe pas les stocks de capital qui favorisent l'économie. On ne peut pas comparer la taxe sur les holdings et cette contribution sur le patrimoine.
Nous l'appelons contribution sur les hauts patrimoines parce que l'IFI va en sens inverse de nos souhaits. Il serait anormal de taxer le logement quand nous voulons le favoriser.
M. le président. - Sous-amendement n°I-2410 rectifié bis de Mme Morin-Desailly et alii.
Le sous-amendement n°I-2410 rectifié bis n'est pas défendu.
M. le président. - Sous-amendement n°I-2758 de Mme Girardin.
Mme Annick Girardin. - Ce sous-amendement intègre les oeuvres d'art dans l'assiette de ce nouvel IFI.
M. le président. - Amendement n°I-1203 de Mme Blatrix Contat.
Mme Florence Blatrix Contat. - Cet amendement a le même objet que les précédents avec une assiette un peu différente. Il modernise notre fiscalité patrimoniale. L'objectif n'est pas de créer un impôt mais de faire évoluer l'IFI en intégrant dans l'assiette notamment des actifs qui n'étaient pas pris en compte, notamment numériques. Adaptons-nous à la réalité des patrimoines.
L'Assemblée nationale a proposé un taux de 1 %. J'ai souhaité un barème progressif, plus juste, de 0,7 % à partir de 1,5 million d'euros, jusqu'à 2 % pour les patrimoines les plus élevés.
M. le président. - Amendement n°I-207 rectifié ter de Mme Girardin et alii.
L'amendement n°I-207 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°I-921 de M. Szczurek et alii.
L'amendement noI-921 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°I-1562 de M. Daubresse.
L'amendement n°I-1562 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°I-752 de Mme de Marco et alii.
Mme Ghislaine Senée. - Cet amendement réforme l'IFI applicable aux bois, forêts et parts de groupements forestiers pour en renforcer l'efficacité fiscale et écologique. Actuellement, l'exonération atteint 75 % en cas de présentation d'un simple document de gestion durable. Remplaçons-la par une exonération à 50 % en cas de respect d'écoconditions. Ainsi, nous respectons les engagements de la France en faveur de l'écologie.
Cette niche fiscale ne bénéficiait qu'à 2 % des contribuables les plus aisés.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable aux amendements nosI-1332, I-1013, I-1331 et I-752.
Avis favorable aux amendements identiques nosI-159 rectifié ter et I-381 rectifié. Retrait du sous-amendement n°I-2758 et de l'amendement n°I-1203.
Le retour de l'ISF, qu'il soit classique ou climatique, n'est pas souhaitable. Ce n'est pas un bon vecteur. Le climat et l'écologie doivent faire partie de la fiscalité de manière globale. Le risque, sinon, c'est d'aspirer davantage sans impliquer l'ensemble des politiques publiques.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Avis défavorable aux premiers amendements nosI-1332, I-1013, I-1331 et I-1203 qui incluent des biens professionnels ou des actions d'entreprises. Nous savons que lorsque cela a été le cas, un certain nombre d'entrepreneurs ont été découragés à faire croître leur entreprise. C'est un retour vers une fiscalité dont on a constaté les effets de bord négatifs, monsieur Savoldelli.
Les amendements nosI-159 rectifié ter et I-381 rectifié proposent d'étendre l'assiette de l'IFI aux valeurs mobilières placées sur des actifs liquides en excluant les investissements productifs.
Une troisième série d'amendements porte sur les forêts ou les oeuvres d'art.
Le Gouvernement ne souhaite pas revenir sur le modèle précédent de l'ISF.
Il n'est pas inintéressant par principe de discuter des orientations de l'investissement. Je suis juste étonnée que les amendements le lient à une baisse du rendement de la partie immobilière, madame Lavarde. Je comprends l'effort d'équilibrage, toutefois.
Je ne souhaite pas donner suite à l'amendement n°I-752 et au sous-amendement n°I-2758. On peut considérer que c'est un bénéfice pour notre pays que les oeuvres d'art soient exposées au public.
Sagesse sur les amendements nosI-159 rectifié ter et I-381 rectifié et avis défavorable aux autres amendements.
M. Thomas Dossus. - Pourquoi avons-nous souhaité cet ISF climatique ? Nous payons encore la suppression de l'ISF dans notre déficit public. Il n'y a pas eu plus de croissance ni de ruissellement.
Pourquoi le conditionner aux actifs les plus polluants ? Car 10 % des plus riches émettent 50 % des émissions de gaz à effet de serre tandis que les 50 % les plus pauvres n'émettent que 10 % des émissions.
Il faut inclure les actions, puisque nous avons à la fois besoin de moyens pour investir dans la transition, et réorienter les actifs des plus fortunés vers une économie plus vertueuse.
M. Emmanuel Capus. - Je suis sidéré : vous vous êtes tous passé le mot ? Autant de propositions d'impôts nouveaux, s'agit-il d'un concours ?
Mme Christine Lavarde. - Ce n'est pas un nouvel impôt !
M. Emmanuel Capus. - Il fallait nous prévenir qu'il y avait la compétition des impôts les plus stupides ! Nous avons déjà eu la CDHR, la taxe sur les holdings...
La gauche est dans son rôle, elle est perturbée depuis 1981, car il n'y a plus l'ISF. Mais, chers collègues de droite, nous n'allons pas recréer l'ISF ! Que vont penser nos électeurs ? À quoi cela sert-il de voter pour des sénateurs de droite si c'est pour qu'ils recréent l'ISF ? On recrée l'ISF uniquement car on n'aime pas Emmanuel Macron et on fait quelque chose de différent de lui ? Vous êtes tellement fiers de vous que vous changez le nom !
Mme Christine Lavarde. - Le nom a été dévoyé !
M. Emmanuel Capus. - Chaque année, on vote un impôt sur la fortune improductive, un peu en douce... Vous avez honte de recréer l'IFI ? Pourquoi réintroduire un tel impôt ? Nous avions l'occasion de sortir de ce dispositif en ne le votant pas. Grâce à la règle de l'entonnoir, il disparaissait de la deuxième lecture... À quoi sert-il d'avoir une majorité sénatoriale ? Je voterai contre ces amendements.
M. Alexandre Ouizille. - M. Emmanuel Capus a vendu la mèche : que diront nos électeurs ? C'est magnifique ! Que diront-ils si on taxe les gros patrimoines ? M. Emmanuel Capus était inquiet !
M. Emmanuel Capus. - (Très animé) Je suis très inquiet pour les entreprises françaises, pour les salariés français !
M. Alexandre Ouizille. - Les revenus du patrimoine explosent dans notre pays. Je regrette que l'ISF ne soit pas rétabli.
Personne n'a parlé de rendement. Quel serait le rendement de cet impôt, madame Lavarde ?
M. Vincent Capo-Canellas. - Le dispositif des amendements de Mme Vermeillet et de M. de Montgolfier est très différent de ce qu'a adopté l'Assemblée nationale.
Mme Vermeillet avait présenté ce dispositif à cinq reprises déjà, il a été étudié. Le groupe UC a proposé cette évolution, que l'on peut appeler de divers noms.
On ne crée pas de nouvel impôt, même si nous avons changé de nom, ce qui a pu troubler M. Capus. Nous avions déjà voté cela l'année dernière et celle d'avant.
Nous avons considéré que l'immobilier devait en être exclu.
M. Grégory Blanc. - Je suis angevin : nous cherchons toujours le consensus. (M. Thomas Dossus montre du doigt M. Emmanuel Capus, qui rit ; M. Jean-François Husson s'en amuse.)
Il faut trouver les éléments qui nous rassemblent. Les années précédentes, nous avions voté de la gauche au centre cet impôt imaginé par Mme Vermeillet. Une majorité se dégage pour élargir l'assiette.
Je souhaite qu'on aille plus loin. Mme Blatrix Contat et M. Savoldelli vont plus loin. Mais au minimum, reconnaissons qu'il faut élargir l'assiette de l'IFI ! Sinon, quel signal adresse-t-on ? Nous en avons aussi besoin pour que la CMP puisse travailler sur le dispositif.
Monsieur Canévet, une SCPI, une SCI ou une foncière, c'est bien du stock. Il est nécessaire de les taxer.
M. Pascal Savoldelli. - Ces amendements sont en discussion commune, mais ils ne sont pas tous de la même teneur. C'est le pluralisme.
L'amendement n°I-381 rectifié n'est pas un amendement de gauche. Il élargit l'assiette, mais double le seuil d'entrée pour le porter à 2,57 millions d'euros de patrimoine, ce qui fait chuter le nombre de redevables. Vous sortez l'immobilier locatif du champ de l'imposition.
Voyez la réalité : 11 % des ménages détiennent 46 % du parc immobilier ; 0,6% des ménages possèdent dix logements ou plus, et 8 % du parc. Quelque 30 000 ménages possèdent 20 logements ou plus, pour 2,4 % du parc total.
Nous ne sommes pas opposés à élargir l'assiette, mais pas en doublant ainsi le seuil. Ce n'est pas de la justice sociale !
M. Thierry Cozic. - Pourquoi avons-nous cette discussion ? Je m'interroge...
M. Emmanuel Capus. - Moi aussi !
M. Thierry Cozic. - L'impôt n'est accepté que lorsqu'il est perçu comme juste. Pour l'OCDE, il faut désormais six générations pour qu'un enfant de famille pauvre atteigne le revenu moyen. La suppression de l'ISF en 2018 a été le plus grand transfert au profit des riches.
Oui, il y a eu un effet de bord : l'État a perdu 4 milliards d'euros par an. L'ISF rapportait plus de 5,1 milliards d'euros, l'IFI 1,5 milliard. C'est une réduction massive.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Pas du tout, 3,1 milliards.
M. Thierry Cozic. - Cela a représenté un gain de 2 300 euros par an pour chacun des 5 % des ménages les plus aisés. Pour les 1 % les plus riches, le patrimoine mobilier représente plus de 70 % du patrimoine. Ce sont eux les grands gagnants de la suppression de l'ISF en 2018. Si l'ISF n'avait pas été supprimé, la contribution des plus aisées aurait été proportionnelle à leur capacité, comme prévu en 1789.
M. Victorin Lurel. - Dans l'assiette de l'impôt proposé par Albéric de Montgolfier figurent des liquidités, notamment des comptes courants, les livrets A. Je ne parle pas de patrimoine de l'héritage, mais du travail.
Vous estimez que les comptes courants sont improductifs ; mais pourquoi les inclure ?
Mme Christine Lavarde. - Nous parlons des patrimoines de plus de 2,5 millions d'euros. L'argent des comptes courants de ces personnes n'a pas le même effet que chez ceux qui ont moins. Le plafond du livret A est de 22 500 euros.
Sans relèvement du seuil, nous avions des effets indésirables.
Monsieur Capus, nous ne préparons pas 2027. Qui a mis en place l'IFI ? Quel Premier ministre ?
M. Emmanuel Capus. - Et bien voilà !
Mme Christine Lavarde. - Bien sûr, nous préférerions tous moins de taxes. Mais nous considérons que l'IFI freine les investissements dans les logements. Nous obéissons à un principe de réalité.
Nous n'avons pas peur de reconnaître que le rendement sera inférieur. Mais l'effet peut être intéressant en termes d'investissement.
Nous ne créons en aucun cas un nouvel impôt. (M. Emmanuel Capus le conteste.)
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Très bien.
M. Albéric de Montgolfier. - Cet amendement est connu : nous avions signé un rapport avec Vincent Éblé, alors président de la commission des finances, pour interroger la rente immobilière. Avec l'IFI, seul l'immobilier est taxé, y compris les logements et les usines.
Madame la ministre, je suis prêt à ne pas voter mon propre amendement, (M. Emmanuel Capus applaudit) si vous répondez à deux questions : y a-t-il une crise du logement et quelle est la logique à ne pas taxer les investissements en bitcoins et à taxer les investissements dans le logement ou les usines ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Mon avis est de sagesse.
M. Marc Laménie. - J'ai du mal à m'y retrouver. Il ne faut pas taxer le monde économique et les entreprises - je parle sous couvert du président Rietmann - car les entreprises sont aussi employeurs. Ces sujets sont importants. Néanmoins, par solidarité, j'irai dans le sens d'Emmanuel Capus.
M. Michel Canévet. - Nous ne créons pas un nouvel impôt, nous transformons un impôt existant. Pourquoi ? Nous avons un problème de logement dans notre pays.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Très juste.
M. Michel Canévet. - Nous avons besoin d'investir dans le logement. Nous voulons inciter ceux qui ont des moyens disponibles à les orienter vers les entreprises et la création d'emploi.
Nous pensons que la France s'en sortira par la croissance et la création d'emplois, qui apporteront des recettes à la sécurité sociale et financeront les services publics - lesquels doivent aussi être rénovés.
Il y a une épargne abondante dans notre pays. Orientons-la vers l'entreprise afin de soutenir l'emploi.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Très bien.
Mme Sophie Primas. - Je voterai cet amendement Nous connaissons une crise terrible du logement. Sans des moyens puissants - et sans doute un peu coûteux - nous n'en sortirons pas.
Cher Marc Laménie, nous ne créons pas d'impôt nouveau. (M. Emmanuel Capus le conteste.) Au contraire, nous en transformons un et nous l'atténuons.
M. Emmanuel Capus. - Certains seront taxés...
Mme Isabelle Briquet. - Nous cherchons à faire participer à l'effort collectif ceux qui le peuvent. Je suis sceptique sur la proposition de la majorité sénatoriale. Après avoir, à l'article 3, transformé le dispositif anti-optimisation en anti-abus - dont on ne sait comment il fonctionnera -, l'IFI est largement vidé de sa substance. Christine Lavarde annonce que le rendement serait de 300 millions d'euros de moins. Nous sommes donc plus que réservés.
Mme Annick Girardin. - Il me pose problème qu'on n'intègre pas les oeuvres d'art. Nous pourrions vous suivre si vous intégriez tous les biens improductifs, y compris les véhicules de luxe, les yachts. Sinon, on sait qu'on gagnera 300 millions d'euros de moins.
M. Olivier Rietmann. - Monsieur Savoldelli, je ne veux pas vous faire insulte, mais vous ne pouvez pas être plus royaliste que le roi... Vous ne pouvez pas dire tous les jours qu'il y a une crise du logement et refuser un dispositif qui favorisera la création de logements !
M. Pascal Savoldelli. - La rente, vous voulez dire !
M. Olivier Rietmann. - Ce qui intéresse nos concitoyens, ce n'est pas de savoir si leur propriétaire a un logement ou cinquante, mais d'en trouver un qui convienne à leurs besoins et à leur budget.
M. Pascal Savoldelli. - Ce sera 1 200 euros pour un T2 : je prends le pari !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Tel qu'il est calibré, le dispositif rapportera 600 millions d'euros de moins que l'IFI actuelle.
M. Guy Benarroche. - Pas grave ! On n'en a pas besoin...
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - J'ai donné un avis de sagesse dans la perspective de la navette parlementaire.
À l'article 12, nous présenterons un dispositif de soutien aux bailleurs privés. On doit étudier la cohérence du dispositif.
Merci à Grégory Blanc : élargir l'assiette à l'immobilier peut avoir un sens. Les amendements de M. de Montgolfier et de Mme Sylvie Vermeillet sont intéressants également : ils ouvrent une réflexion et pourraient, à terme, améliorer le rendement.
À l'Assemblée nationale, j'ai donné un avis défavorable à l'inclusion des fonds euros pour ne pas fragiliser notre financement souverain.
Je lèverai le gage sur les amendements nosI-159 et I-381 s'ils sont adoptés.
L'amendement n°I-1332 n'est pas adopté, non plus que les amendements identiques nosI-1013 et I-1331.
Le sous-amendement n°I-2758 n'est pas adopté.
À la demande du groupe INDEP, les amendements identiques nosI-159 rectifié ter et I-381 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°66 :
| Nombre de votants | 340 |
| Nombre de suffrages exprimés | 339 |
| Pour l'adoption | 204 |
| Contre | 135 |
Les amendements identiques nosI-159 rectifié ter et I-381 rectifié, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés et deviennent un article additionnel.
L'amendement n°I-1203 n'a plus d'objet, non plus que l'amendement n°I-752.
Après l'article 3 (Suite)
M. le président. - Amendement n°I-1843 rectifié bis de M. Le Rudulier et alii.
M. Jean-Raymond Hugonet. - Défendu.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - C'est un amendement à 18 milliards d'euros ! (On s'en amuse sur les travées du groupe Les Républicains.) Oui, on peut vouloir favoriser les transmissions aux petits-enfants. Aujourd'hui, 6 % des donations vont à des personnes de plus de 60 ans. C'est un excellent débat, mais il faut raison garder. Retrait, sinon avis très défavorable.
M. Jean-Raymond Hugonet. - C'est drôle, chez les Marseillais, cette manie d'exagérer... (M. Guy Benarroche s'exclame.) Nous retirons l'amendement.
M. Roger Karoutchi. - Je l'aurais voté !
L'amendement n°I-1843 rectifié bis est retiré.
M. le président. - Amendement n°I-1598 rectifié de M. Cardon et alii.
L'amendement n°I-1598 rectifié n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°I-637 rectifié de M. Delahaye et alii.
M. Vincent Delahaye. - Inspiré par l'économiste Jean-Baptiste Michau et issu des travaux de Génération Libre, cet amendement supprime l'imposition de l'abandon d'usufruit. Les donations en pleine propriété seraient taxées au même taux que les donations en nue-propriété, ce qui améliorerait l'allocation du capital entre générations et favoriserait l'investissement dans l'économie. Or tout ce qui est bon pour l'économie est bon pour le social !
M. Guy Benarroche. - Ça reste à prouver...
M. Thomas Dossus. - Et réciproquement !
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - C'est très coûteux. Demande de retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°I-637 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-1361 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Il y a donc 600 000 euros de moins sur l'IFI et le rendement de la taxe sur les holdings a beaucoup diminué... Au même moment, nous savons qu'il faut faire tourner l'épargne dans le pays pour qu'elle soit plus productive.
Je ne crois pas au grand soir d'une réforme de l'imposition des successions. Nous devrons améliorer les dispositifs année après année, par petites touches.
Cet amendement crée un abattement universel de 300 000 euros par bénéficiaire, ce qui est déjà beaucoup. (Mme Ghislaine Senée le confirme.) Actuellement, il y a plusieurs plafonds selon les liens familiaux. Cette architecture est complexe et source d'inégalités. L'abattement universel permettrait au contraire plus d'équité, la progressivité étant renforcée au-delà de 300 000 euros.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable. Je n'ai pas entendu d'évaluation chiffrée. Par petites touches, dites-vous ? Là, c'est une grosse touche... Outre que le seuil proposé ne convient pas, la rédaction n'est pas claire et il n'est pas sûr que l'amendement mettrait fin aux autres abattements.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - C'est l'inversion du système actuel : l'abattement serait calculé du point de vue du bénéficiaire. Ce n'est pas inintéressant, notamment parce que cela renforcerait la confiance. Les règles complexes donnent l'impression aux Français qu'ils seront soumis aux droits de succession, alors que 85 % des masses transmises ou héritées ne sont soumises à aucun droit. Néanmoins, l'écriture n'est pas opérante. Retrait ?
M. Grégory Blanc. - Je le retire, car je présenterai d'autres amendements sur le sujet. Ce système beaucoup plus lisible existe en Irlande. Le capital circule plus et le rendement fiscal est meilleur. N'ayons pas peur de ce débat !
L'amendement n°I-1361 est retiré.
M. le président. - Amendement n°I-1970 rectifié de Mme Guhl et alii.
Mme Ghislaine Senée. - Cet amendement lève deux obstacles majeurs qui freinent la transmission d'entreprises à des organismes d'intérêt général, en particulier les fondations et fonds de dotation : il étend aux fonds de dotation le régime d'exonération des plus-values latentes et sécurise le mécénat de titres.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Les fonds de dotation ne bénéficient pas du tout du même cadre juridique que les fondations. Soyons prudents. Retrait ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Quelques régimes fiscaux traitent de la même manière les fondations et les fonds de dotation, mais, sur ce point précis, je n'ai pas de chiffrage. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°I-1970 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-99 de M. Iacovelli et du RDPI.
Mme Nadège Havet. - M. Iacovelli propose de faire évoluer la fiscalité pour l'adapter à l'évolution de la société, dans laquelle les familles recomposées sont devenues courantes. Un enfant sur dix vit avec un beau-père ou une belle-mère qui l'élève et subvient à ses besoins. Or la législation fiscale reste prisonnière d'une vision archaïque : un parent de sang peut transmettre 100 000 euros en franchise de droits, mais pour un beau-parent l'abattement n'est que de 1 594 euros, le reste étant taxable à 60 %. Nous proposons d'aligner les régimes des parents et beaux-parents.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Demande de retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Retrait, sinon avis défavorable. Il faut réfléchir, de manière plus globale, aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO) en ligne indirecte. Je ne pense pas que 100 000 euros soit le bon seuil, mais l'idée est intéressante.
L'amendement n°I-99 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-2131 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Nous plafonnons à 600 000 euros l'abattement de 20 % applicable à la résidence principale. Sur un bien de 5 millions d'euros, l'abattement efface 1 million d'euros de valeurs taxables. Pourquoi laisser perdurer cet effet d'aubaine pour les successions les plus importantes ? Rappelons que 80 % des Français ne reçoivent jamais de donation et que neuf héritiers sur dix reçoivent moins de 100 000 euros, quand 0,1 % touchent en moyenne 13 millions d'euros.
M. le président. - Amendement n°I-1316 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Amendement de repli, avec un abattement à 800 000 euros. C'est déjà pas mal... (M. Roger Karoutchi s'exclame.) Eh oui : tout le monde n'habite pas les Hauts-de-Seine.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable. La France a des droits de succession parmi les plus élevés en Europe.
M. Grégory Blanc. - Ce n'est pas exact.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°I-2131 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°I-1316.
M. le président. - Amendement n°I-822 rectifié bis de M. Panunzi et alii.
Mme Marie-Do Aeschlimann. - Avec M. Panunzi, nous voulons favoriser la transmission du logement familial en exonérant de droits de mutation à titre gratuit (DMTG), dans la limite de 500 000 euros par héritier en ligne directe, la transmission de la résidence principale.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Demande de retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°I-822 rectifié bis n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-1668 rectifié bis de Mme Boyer et alii.
Mme Catherine Di Folco. - Valérie Boyer propose de renforcer la solidarité intergénérationnelle en favorisant la transmission d'immobilier, dans le prolongement du dispositif Balladur. Nous orientons une partie des donations vers les travaux de transition énergétique. (M. Thomas Dossus s'exclame.)
M. le président. - Amendement n°I-2549 rectifié de M. Bleunven et alii.
M. Michel Canévet. - Le logement est une préoccupation essentielle des Français. Nous nous inspirons d'une proposition de Guillaume Kasbarian... (On ironise sur les travées du GEST.)
M. Guillaume Gontard. - Ce n'est pas une bonne idée !
M. Michel Canévet. - ... pour favoriser l'accession des jeunes à la propriété.
M. le président. - Amendement n°I-1035 rectifié de Mme Muller-Bronn et alii.
L'amendement n°I-1035 rectifié n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement identique n°I-1039 rectifié ter de M. Jean-Baptiste Blanc et alii.
M. Antoine Lefèvre. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°I-1548 rectifié quater de M. Séné et alii.
Mme Marie-Do Aeschlimann. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°I-1736 rectifié bis de Mme Pantel et alii.
M. Michel Masset. - Nous prolongeons jusqu'au 31 décembre 2027 l'exonération des donations intrafamiliales jusqu'à 100 000 euros aux fins de réaliser des taux de rénovation énergétique d'un logement principal.
M. le président. - Amendement identique n°I-2372 rectifié ter de Mme Gacquerre et alii.
M. Vincent Capo-Canellas. - Il s'agit également de prolonger cette exonération.
M. le président. - Amendement n°I-1592 rectifié ter de M. Bourgi et alii.
M. Simon Uzenat. - Amendement similaire aux précédents.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Demande de retrait. L'an passé, nous avons proposé des conditions préférentielles de transmission ou de donation au bénéfice des membres de la famille. Nous souhaitions que cela dure deux ans et avons demandé un rapport pour l'été 2026. Restons cohérents, n'anticipons pas.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je suis d'accord avec le rapporteur général. Nous devons évaluer cette mesure avant de l'élargir à l'ancien et à la rénovation. Au reste, il existe déjà des mécanismes de donation tous les quinze ans. Nous avons 474 niches fiscales et, chaque année, nous en créons de nouvelles mais en supprimons très peu.
M. Olivier Rietmann. - On ne les évalue jamais !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Nous les évaluons : nous vous proposerons d'ailleurs des suppressions à l'article 5.
Mme Sophie Primas. - Ce dispositif n'est pleinement opérationnel que depuis quelques semaines. Il faut aussi en faire la promotion. Si le rapport doit être prêt pour le prochain budget, on ne pourra se baser que sur six mois d'application, ce qui paraît peu.
L'amendement n°I-1548 rectifié quater est retiré, de même que l'amendement n°I-1668 rectifié bis.
M. Michel Canévet. - Il faut en effet mesurer l'efficacité du système avant d'aller plus loin.
L'amendement n°I-2549 rectifié est retiré.
M. Guillaume Gontard. - Le plafond de rénovation est fixé à 100 000 euros. Dans le cadre de MaPrimeRénov', la rénovation globale était de 70 000 euros pour les foyers modestes, avant d'être ramenée à 30 000 euros. On n'est pas sur les mêmes ordres de grandeur... Nous devrions favoriser plutôt les foyers modestes. Et comment les travaux seront-ils contrôlés ?
Les amendements identiques nosI-1736 rectifié bis et I-2372 rectifié ter ne sont pas adoptés, non plus que les amendements nosI-1039 rectifié ter et I-1592 rectifié ter.
M. le président. - Amendement n°I-1359 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - À ce jour, la France pratique un effacement total des plus-values lors des transmissions à titre gratuit. Cet avantage fiscal consenti aux plus aisés sans justification économique aggrave la concentration du patrimoine. Nous proposons une taxation des plus-values latentes sur les transmissions supérieures à 2 millions d'euros.
M. le président. - Amendement n°I-652 de M. Ouizille et du groupe SER.
M. Alexandre Ouizille. - Pour les révolutionnaires, la fiscalité successorale avait quelque chose à voir avec le régime politique. Nous entrons aujourd'hui dans une société d'héritiers, où le travail ne permet plus d'acquérir les positions patrimoniales les plus élevées. Désormais, la richesse des individus provient aux deux tiers de l'héritage.
Dans les quinze ans à venir, 9 000 milliards d'euros, soit la moitié du patrimoine national, seront transmis. Si nous ne faisons rien, nous transmettrons l'inégalité en héritage et empêcherons la classe moyenne d'accéder à la propriété. Lorsqu'on parle de transmission, nous pensons encore à des jeunes de 25 ans, comme si nous étions en 1820 ; mais la séniorisation de l'héritage fait que les transmissions bénéficient pour l'essentiel à de jeunes retraités de 60 ans.
M. le président. - Amendement n°I-1747 de M. Ouizille et alii.
M. Alexandre Ouizille. - Défendu.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Retrait. Il y a un risque d'inconstitutionnalité.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Effectivement. Quand vous recevez 1 million d'euros, cela peut être une maison qui est passée de 800 000 à 1 million d'euros ou une entreprise qui a débuté avec 10 000 euros de fonds propres, mais le droit fiscal les traite de la même façon. On ne peut pas différencier l'impôt selon l'historique de l'actif. Retrait, sinon avis défavorable.
Sur les plus-values, deux réflexions sont en cours : l'une sur la purge, lors des successions, de l'impôt sur le revenu lié aux PER, qui n'ont pas été conçus comme un outil de transmission ; l'autre sur les plus-values en report dans le dispositif d'apport-cession.
L'amendement n°I-1359 n'est pas adopté, non plus que les amendements nosI-652 et I-1747.
M. le président. - Amendement n°I-1197 de M. Fouassin et du RDPI.
Mme Nadège Havet. - Nous souhaitons défiscaliser les dons des grands-parents sur les PER de leurs petits-enfants.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Retrait.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°I-1197 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-1360 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Le régime fiscal des contrats d'assurance vie est l'un des plus avantageux. L'abattement de 152 500 euros et les taux de prélèvement nettement inférieurs créent une distorsion d'équité que cet amendement corrige. Il y a actuellement 1 900 milliards d'euros d'encours sur les assurances vie : il y a matière à renflouer les caisses de l'État. L'intégration des capitaux d'assurance vie dans le barème de droit commun avec un abattement unique de 300 000 euros rapprocherait le traitement fiscal de l'assurance vie de celui des successions classiques et renforcerait l'équité fiscale. Cette mesure cible les grosses transmissions, sans pénaliser l'épargne populaire.
M. le président. - Amendement n°I-1357 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Cet amendement porte sur les primes d'assurance vie versées avant 70 ans. Nous remédions au déséquilibre fiscal en abaissant l'abattement à 100 000 euros et en alignant les taux de prélèvement sur le barème progressif applicable aux droits de succession.
M. le président. - Amendement n°I-1356 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Dans la même logique, mais en repli, cet amendement institue un rappel fiscal à vie afin que l'État puisse tenir compte de la plus-value latente même si la cession est différée ou n'intervient jamais.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable aux trois amendements. C'est une remise en cause significative du régime de l'assurance vie. Quand je vois l'émoi causé par la volonté de baisser l'abattement... Soyons prudents. L'assurance vie est à la fois un placement d'épargne et une façon de protéger des bénéficiaires. Cela permet aussi de financer très utilement notre économie. Évitons de déstabiliser un secteur qui fonctionne bien.
Cela ne nous empêche pas de chercher à fluidifier le marché, mais ne mettons pas en danger un système plébiscité par les Français.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Le taux marginal sur les transmissions d'assurance vie plafonne à 31 %. C'est donc un vrai sujet, mais il faut l'aborder de manière prudente et organisée, pour éviter de provoquer des mouvements de sortie, dans la situation actuelle.
Les abattements de l'assurance vie, des donations, des transmissions ne sont pas les mêmes et se cumulent partiellement. Un barème plus lisible serait préférable. Mais c'est contradictoire avec votre amendement précédent qui retenait une vision par receveur. Demande de retrait ou avis défavorable.
M. Grégory Blanc. - Il y a un débat sur les successions, et un débat sur l'épargne. Celle-ci est concentrée sur l'assurance vie, dont 80 % sont sur les fonds en euros, avec une part significative investie dans la dette souveraine d'États étrangers, qui a - encore - un meilleur rendement que la dette française. Nous voulons sortir cette épargne de l'assurance vie, qui est sécurisée, pour l'injecter dans l'économie productive.
Je proposerai de renforcer les PEA et PEA-PME, notamment, pour soutenir les jeunes entreprises non cotées.
Nous examinons un budget technique, administratif, arrivé le 14 octobre. Le rapporteur général dit qu'il faut être prudent, mais quelle est la situation du pays ? Il faut soutenir davantage les entreprises, dites-vous. Si nous ne le faisons pas avec énergie quand nous débattons de l'épargne, quand le ferons-nous ?
Je suis un grand lecteur de journaux qui expliquent comment défiscaliser : tous conseillent de mettre son argent dans une assurance vie. Il faut inverser la logique.
L'amendement n°I-1360 n'est pas adopté, non plus que les amendements nosI-1357 et I-1356.
M. Claude Raynal, président de la commission. - Nous débutons une discussion commune de 36 amendements, qui portent sur les droits de succession et le pacte Dutreil. Pour la clarté des discussions, et pour accélérer notre rythme, tâchons de ne pas scinder la discussion entre ce soir et demain.
Je propose que vous fassiez une présentation rapide d'une minute environ, de manière à laisser un peu plus de temps aux explications de vote (M. Roger Karoutchi proteste), en vous tenant à une explication de vote par groupe politique.
M. le président. - Amendement n°I-1317 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Pour mieux encadrer les héritages les plus élevés et mieux protéger les transmissions ordinaires, nous prolongeons le flux successoral, qui tient compte de tout ce qu'une personne reçoit dans sa vie, héritage comme donation. Ce n'est plus un raisonnement acte par acte, source de contournements.
Selon la Cour des comptes, 47 % des déclarations de succession en 2022 donnaient lieu à un paiement de droits. Autrement dit, plus de la moitié des transmissions passent entre les mailles du filet.
Toutes les transmissions inférieures à 550 000 euros seront gagnantes dans notre amendement.
M. le président. - Amendement n°I-654 de M. Alexandre Ouizille et du groupe SER.
M. Alexandre Ouizille. - Cet amendement concerne les successions supérieures à 3 millions d'euros, qu'il taxe au taux marginal de 50 %. Il n'est pas question ici de jeunes entrepreneurs en difficulté !
Mme la ministre dit qu'il faut repenser la transmission. Face à la grande transmission qui se profile, ne faut-il pas tout simplement augmenter l'impôt successoral ?
M. le président. - Amendement n°I-481 rectifié ter de M. Karoutchi et alii.
M. Roger Karoutchi. - C'est l'inverse : je veux réduire les droits de succession. Épargner est censé être une vertu, mais à quoi bon ? À la fin, l'État prend tout ! (Sourires) Cet amendement double les abattements si le destinataire s'engage à placer les fonds dans l'économie productive ou l'achat d'un logement.
M. le président. - Amendement n°I-480 rectifié ter de M. Karoutchi et alii.
M. Roger Karoutchi. - Celui-ci est plus théorique. Le taux maximum, hors filiation directe, est de 60 %. C'est un véritable scandale. Tous les ministres m'ont toujours répondu : oui, nous verrons un jour. Mais ce n'est jamais le moment, il n'y a jamais d'argent... Au moins, n'augmentons pas les droits de succession.
M. le président. - Amendement n°I-242 rectifié de M. Bilhac et alii.
M. Raphaël Daubet. - Nous renforçons la protection des transmissions au sein des familles de la classe moyenne.
L'abattement entre parents et enfants serait porté de 100 000 euros à 200 000 euros ; la résidence principale serait exonérée ; les beaux-enfants seraient traités comme les enfants, afin de tenir compte des nouvelles réalités familiales.
M. le président. - Amendement n°I-918 de M. Szczurek et alii.
L'amendement n°I-918 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°I-2649 rectifié de M. Bilhac et alii.
M. Raphaël Daubet. - La mort d'un parent ne doit pas affaiblir les droits d'un enfant. En permettant au parent survivant de conserver l'abattement du parent défunt, l'amendement garantit que l'enfant ne soit pas pénalisé fiscalement par un drame familial. C'est une mesure de justice et de protection.
Le dispositif est strictement encadré et exclut tout effet d'aubaine. Il ne s'applique qu'aux enfants du foyer initial. La solidarité nationale doit protéger les plus vulnérables, c'est-à-dire les enfants.
M. le président. - Amendement n°I-1358 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°I-1320 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Nous abrogeons le pacte Dutreil, dispositif jamais évalué, mais dont le nombre de bénéficiaires ainsi que la dépense fiscale associée explosent. Le récent rapport de la Cour des comptes évoque une sous-évaluation de plusieurs milliards d'euros.
Sa trajectoire est délirante avec un coût qui passe de 1,2 milliard d'euros en 2020 à 5,5 milliards en 2024. C'est de la prédation !
M. le président. - Amendement n°I-653 de M. Ouizille et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Depuis sa création en 2003, le pacte Dutreuil a été vidé de sa substance pour devenir un levier supplémentaire d'optimisation fiscale au bénéfice des plus grandes fortunes.
Notre amendement instaure une dégressivité de l'exonération fiscale, en trois tranches, pour en finir avec un énième effet d'aubaine.
M. le président. - Amendement n°I-1322 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Le Dutreil est-il un instrument de transmission professionnelle ?
M. Olivier Rietmann. - Oui !
M. Pascal Savoldelli. - Il ne doit pas devenir un passe-droit patrimonial. Il coûte 4,2 milliards d'euros ; malgré ces montants, l'administration ne sait pas combien de pactes sont en cours. Il n'y a presque aucun contrôle sur cette niche.
Le pacte Dutreil n'est plus le dispositif en faveur des PME qu'il a été : 40 % de la valeur des pactes concernent des transmissions de plus de 60 millions d'euros.
Une transmission de 10 millions, avec Dutreil, démembrement, et réduction avant 70 ans, peut voir son taux d'imposition passer de 42 % à 2,7 % ! Quel est le rapport avec l'aide aux PME ?
M. le président. - Amendement n°I-245 rectifié de M. Bilhac et alii.
M. Michel Masset. - Le barème progressif que nous proposons protège les TPE, PME et ETI familiales, tout en corrigeant la dérive pointée par la Cour des comptes. Comme l'a fait l'Allemagne, nous rétablissons une progressivité indispensable au respect de l'égalité devant l'impôt. C'est une réforme de responsabilité fiscale, mais surtout de cohésion économique.
M. le président. - Amendement n°I-1805 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Nous devons avoir un débat sur le Dutreil. Le récent rapport de la Cour des comptes montre l'explosion de son coût pour les finances publiques. J'ai repris certaines de ses propositions, sur la progressivité ou la consolidation des plus petites entreprises.
Sur les holdings, nous sommes passés de la logique de l'anti-évitement à celle de l'anti-abus. Il y a aussi des abus dans le Dutreil. Le Sénat devrait lancer un signal fort en recentrant le dispositif pour soutenir les PME et en supprimant les effets d'aubaine.
M. le président. - Amendement n°I-1325 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Avec cet amendement de repli et de responsabilité, nous mettons fin au coeur des abus en supprimant le cumul du Dutreil et du démembrement, qui ne sert qu'à faire fondre la base taxable - à tel point que dans certains montages, l'imposition successorale disparaît pratiquement. Selon le rapport de notre collègue député Nicolas Sansu, une donation de 10 millions peut voir son taux d'imposition passer de 42 % à 2,7 %. À ce tarif, c'est de l'évasion fiscalement homologuée !
M. le président. - Amendement n°I-247 rectifié de M. Bilhac et alii.
Mme Annick Girardin. - Il faut clarifier l'assiette du pacte Dutreil en limitant l'exonération aux seuls biens professionnels. C'est indispensable pour garantir la conformité du Dutreil avec le principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt, et le recentrer sur sa vocation initiale. Protéger les biens professionnels, oui. Dévoyer le pacte, non.
M. le président. - Amendement identique n°I-1002 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Le Dutreil est détourné dans une optique d'évitement fiscal depuis plusieurs années. Certains contribuables l'utilisent pour loger des actifs personnels : immobilier de jouissance, oeuvres d'art et j'en passe, pour éviter la fiscalité successorale. Recentrons ce dispositif sur sa vocation première : aider les PME qui participent à la vitalité économique de nos territoires.
M. le président. - Amendement identique n°I-1290 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Nous privilégions la conduite d'entreprise et supprimons donc les biens personnels de l'exonération de droits de mutation. Les députés du groupe GDR à l'Assemblée nationale ont présenté des amendements dans ce sens. La Cour des comptes le dit : « il en irait différemment si la loi limitait l'abattement aux seuls actifs professionnels. » Plusieurs de nos voisins ont exclu les actifs non professionnels. Ce serait donc une harmonisation européenne !
M. le président. - Amendement n°I-1291 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Il s'agit d'empêcher que les actifs numériques - cryptomonnaies, tokens, NFT spéculatifs - puissent être intégrés au pacte, qui n'a pas été fait pour cela. Il nous semble, madame la ministre, que l'absence de cadre comptable pour les cryptoactifs et la plasticité du Dutreil ouvrent une brèche béante. Il pourrait être intéressant de conserver cet amendement d'alerte dans la navette.
M. le président. - Amendement n°I-1803 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°I-161 rectifié quater de Mme Lavarde et alii.
M. Olivier Rietmann. - Je ne reviens pas sur l'impérieuse nécessité de conserver le Dutreil. À partir des années 1980, on a fortement augmenté l'imposition des transmissions d'entreprises. Nous avions alors autant d'ETI que l'Allemagne de l'Ouest. Au début des années 2000, nous en avions deux fois moins, et l'Allemagne, trois fois plus. Depuis le pacte Dutreil, nous avons triplé leur nombre, à 7 500 - mais l'Allemagne aussi, à plus de 17 000.
Notre amendement reprend des préconisations de la Cour des comptes, en vue d'éviter que le pacte Dutreil ne passe pour un effet d'aubaine : nous portons la durée de détention des parts transmises de quatre à six ans et recentrons le Dutreil sur l'activité professionnelle, dans le même esprit que pour la taxe sur les holdings.
M. le président. - Amendement identique n°I-382 rectifié bis de M. Canévet et du groupe UC.
M. Michel Canévet. - La France est riche de ses territoires et des entreprises qui font leur prospérité. Favorisons la transmission familiale ou vers les salariés, plutôt que de les vendre à des fonds d'investissement étrangers. Nous avons entendu les messages et ciblons la liste des biens qui ne doivent pas être couverts, pour éviter le contournement de l'impôt.
M. le président. - Amendement n°I-1327 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Il s'agit ici, comme dans les deux amendements suivants, d'interdire le cumul du Dutreil avec la réduction de 50 % pour donation en pleine propriété avant 70 ans.
À force de cumuler les dispositifs, les propriétaires d'entreprise ne paient plus du tout de droits de succession !
M. Olivier Rietmann. - Ce n'est pas vrai.
M. le président. - Amendement n°I-1326 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°I-1321 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°I-248 rectifié de M. Bilhac et alii.
M. Raphaël Daubet. - Cet amendement, adopté à l'Assemblée nationale, introduit un cadre d'âge pour les donataires : au moins l'un d'entre eux doit être âgé entre 18 et 60 ans, de manière à garantir une intention réellement entrepreneuriale.
M. le président. - Amendement identique n°I-1902 de M. Lurel et alii.
M. Victorin Lurel. - Le Dutreil avait été évalué à 500 millions, mais cela a coûté onze fois plus ! Nous instituons un cadre d'âge.
M. le président. - Amendement n°I-650 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Nous répondons à un problème d'équité successorale au sein des fratries. Dans la pratique, l'avantage fiscal profite presque toujours à un seul enfant, celui désigné pour reprendre l'entreprise. C'est une prime publique au repreneur, créant une rupture d'égalité entre héritiers. Pour bénéficier de l'exonération, la transmission devrait être équitable entre les enfants.
M. le président. - Amendement n°I-651 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Cet amendement assure une meilleure équité entre héritiers en intégrant l'avantage fiscal résultant du Dutreil.
M. le président. - Amendement n°I-1804 de M. Grégory Blanc et alii.
M. Grégory Blanc. - Il y a un point sur lequel le rapport de la Cour m'a scotché : le pacte réputé acquis, qui permet de bénéficier du régime Dutreil en phase d'engagement collectif, utilisé pour sécuriser des situations déjà constituées. C'est le family buy out : les héritiers ou donataires rachètent, via une holding endettée, les titres reçus, ce qui revient à transformer l'avantage en levier de désendettement familial. C'est quasiment de l'abus fiscal.
Cet amendement supprime les mécanismes du pacte réputé acquis et crée une clause anti-abus.
M. le président. - Amendement n°I-1328 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Revenons au concret. Nous portons la durée d'engagement individuel dans le pacte Dutreil de quatre à huit ans, pour montrer qu'il ne s'agit pas d'une opération opportuniste, mais bien d'une transmission professionnelle.
M. le président. - Amendement identique n°I-1899 de M. Lurel et alii.
M. Victorin Lurel. - Nous accroissons la durée de l'engagement individuel de quatre à huit ans.
M. le président. - Amendement n°I-246 rectifié de M. Bilhac et alii.
M. Michel Masset. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°I-1003 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Thierry Cozic. - Cet amendement augmente la durée de détention minimale d'actions transmises dans le cadre du pacte Dutreil.
M. le président. - Amendement n°I-249 rectifié de M. Bilhac et alii.
M. Raphaël Daubet. - Cet amendement conditionne l'exonération à un réinvestissement proportionné dans l'entreprise.
M. le président. - Amendement n°I-636 rectifié de M. Delahaye et alii.
M. Michel Canévet. - Aujourd'hui, un parent peut transmettre à ses enfants un don en argent de 31 865 euros tous les quinze ans. Nous proposons plutôt un seul don de 100 000 euros, pour faciliter la transmission entre générations.
M. le président. - Amendement n°I-1298 rectifié ter de M. Capus et alii.
M. Emmanuel Capus. - Même idée : un seul don, plus important. Les grands-parents sont disponibles pour transmettre à leurs petits enfants à un moment où ceux-ci en ont le plus besoin. Un don de 31 000 euros n'est pas suffisant pour une acquisition immobilière. Cette mesure ne coûterait rien.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sur les DMTG, je m'en tiens à un principe de précaution : ni refonte globale ni allègement des impôts. Avis défavorable aux amendements nosI-1317, I-654, I-242 rectifié et I-1358. Demande de retrait pour les amendements nosI-481 rectifié ter, très coûteux, I-480 rectifié ter, I-2649 rectifié et I-1298 rectifié ter.
J'en viens aux vingt-cinq amendements sur le pacte Dutreil.
Avis favorable à l'amendement n°I-161 rectifié quater qui allonge la durée de conservation de quatre à six ans et resserre l'assiette.
Demande de retrait pour les amendements nosI-247 rectifié, I-1002, I-1290, I-1803 et I-1326.
Sagesse sur l'amendement n°I-1291 qui exclut expressément les actifs numériques de l'assiette du Dutreil.
Les amendements identiques nosI-246 rectifié et I-1003 seront satisfaits par les amendements identiques nosI-161 rectifié quater et I-382 rectifié bis, qui reçoivent un avis favorable.
Avis défavorable aux amendements nosI-1899 et I-1328.
Sur les liens familiaux, avis défavorable aux amendements nosI-248 rectifié et I-1902. Idem pour les amendements nosI-650 et I-651.
Avis du Gouvernement sur l'amendement n°I-1804 qui reprend deux propositions de la Cour des comptes limitant les schémas d'optimisation.
Sur le plafonnement de l'exonération, avis défavorable aux amendements nosI-1805, I-245 rectifié et I-653. Sur une condition nouvelle de réinvestissement, avis défavorable à l'amendement n° I-249 rectifié. Défavorable également aux amendements nosI-1320, I-1322, I-1321, I-1327 et I-1325, qui s'éloignent du dispositif actuel.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je suis favorable à deux évolutions du pacte Dutreil : sur la durée de détention, et sur l'exclusion des biens dits somptuaires de l'assiette. Aujourd'hui, on peut y mettre jusqu'à 49 % de biens personnels, or ce n'est pas l'objectif du dispositif.
Sagesse favorable aux amendements identiques nosI-161 rectifié quater et I-382 rectifié bis. Même avis sur les amendements identiques nosI-246 rectifié et I-1003 qui étendent la durée de détention. Le Gouvernement souhaite donner un signal.
Le rapport de la Cour des comptes, rendu il y a moins d'une semaine, propose d'autres évolutions, sur l'âge ou le family buy out. À ce stade, le Gouvernement ne souhaite pas s'engager au-delà des biens somptuaires et des durées d'extension, car il y a un chiffrage à faire.
Avis défavorable aux autres amendements.
Sur les cryptoactifs, il existe une fiscalité sur les plus-values qui ressortent en argent. Je ne suis pas aussi enthousiaste que le rapporteur général sur l'amendement n°I-1291.
Restons-en là. Si on exclut les biens somptuaires et qu'on allonge la durée de détention, on fait déjà oeuvre utile.
M. Olivier Rietmann. - La délégation aux entreprises s'intéresse de près au pacte Dutreil, confer notre rapport de 2023 sur la transmission d'entreprises, avec Michel Canévet et Rémi Cardon.
Nous avons analysé le rapport de la Cour des comptes, que nous avons auditionnée dès le lendemain de la conférence de presse du premier président. Effectivement, certains pays sont beaucoup plus stricts sur les conditions de transmission des entreprises, notamment l'Allemagne. C'est pourquoi nous prolongeons la durée de détention des parts et excluons clairement un certain nombre de biens. Toujours est-il que ces pays ont à la sortie un taux d'imposition bien inférieur au nôtre : 5 % en moyenne en Europe, entre 11,5 % et 16 % en France !
Certains ont parlé d'effet d'aubaine. Mais si vous supprimez le pacte Dutreil, ce sera un effet d'aubaine pour les fonds de pension américains qui rachèteront et délocaliseront nos entreprises !
Oui, le pacte Dutreil a été beaucoup plus utilisé, et il le sera encore davantage à l'avenir, puisque 500 000 transmissions liées à l'âge des dirigeants se profilent. Mais mises à part trois récentes transmissions d'une importance exceptionnelle, le coût annuel moyen du pacte Dutreil se situe entre 500 millions et 800 millions d'euros.
Mme Florence Blatrix Contat. - Je suis ravie de ce débat plus consensuel que d'habitude sur ce sujet. Chaque année, nous proposons un recentrage. Le rapport de la Cour des comptes a éclairé la situation : l'efficience économique du dispositif est faible et son coût pour les finances publiques, élevé.
M. Olivier Rietmann. - (Brandissant le rapport) Cela n'est écrit nulle part !
Mme Florence Blatrix Contat. - Pendant longtemps, le coût du pacte Dutreil a été évalué à 500 millions d'euros. Mais il a été de plus de 5,5 milliards d'euros en 2024 ! Il est urgent de s'y pencher, compte tenu notamment de la démographie des dirigeants d'entreprise.
Il est également très concentré : pas moins de 65 % du montant bénéficie à 1 % des donataires.
Le groupe SER sera favorable aux amendements qui allongent la durée de détention, qui restreignent le bénéfice du dispositif aux biens professionnels, qui limitent l'optimisation et qui excluent les actifs numériques.
M. Grégory Blanc. - Nous demandons des évolutions du Dutreil depuis des années. Que nous ayons trouvé un accord pour durcir le dispositif, sur toutes les travées, est une bonne nouvelle.
Je maintiens mon amendement n°I-1804, que nous aurions intérêt à améliorer dans le cadre de la navette. J'espère que les lumières du Gouvernement éclaireront la CMP.
On ne peut pas cumuler désendettement familial et sous-fiscalisation de la transmission des parts : ce n'est pas l'objet du pacte Dutreil.
M. Emmanuel Capus. - Nous sommes tous attachés au Dutreil qui favorise le maintien de notre tissu économique de PME et ETI.
Un bémol toutefois sur les amendements nosI-161 rectifié quater de Christine Lavarde et I-382 rectifié bis de Michel Canévet, non sur les biens somptuaires - simple formalisation - , mais sur les six ans. La Cour des comptes n'est pas tous les jours dans les entreprises. Il y a six ans, il n'y avait pas eu le covid, ni de deuxième mandat de Trump ni de guerre en Ukraine. Les entreprises ont besoin de plus de souplesse - notamment pour leurs augmentations de capital - , alors que le monde est de plus en plus incertain et mouvant. D'accord pour quatre ans, mais six ans, c'est trop long.
M. Thierry Cozic. - Je me félicite que nous avancions enfin sur le pacte Dutreil. Voilà des années que nous nous battons, de ce côté-ci de l'hémicycle, pour le changer.
J'ai entendu l'avis de sagesse du Gouvernement sur l'allongement de la durée. Je souhaite rectifier mon amendement n°I-1003 pour le rendre identique aux amendements nosI-161 rectifié quater et I-382 rectifié bis.
M. le président. - Il devient l'amendement n°I-1003 rectifié.
L'amendement n°I-1317 n'est pas adopté, non plus que les amendements nosI-654, I-481 rectifié ter, I-480 rectifié ter, I-242 rectifié, I-2649 rectifié, I-1358, I-1320, I-653, I-1322, I-245 rectifié, I-1805, I-1325, et les amendements identiques nosI-247 rectifié, I-1002 et I-1290.
L'amendement n°I-1291 est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n°1803 n'est pas adopté.
Les amendements identiques nosI-161 rectifié quater, I-382 rectifié bis et I-1003 rectifié sont adoptés et deviennent un article additionnel.
L'amendement n°I-1327 n'est pas adopté, non plus que les amendements nosI-1326, I-1321, les amendements identiques nosI-248 rectifié et I-1902, et les amendements nosI-650, I-651.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je suis l'avis défavorable de la ministre sur l'amendement n°I-1804.
L'amendement n°I-1804 est adopté et devient un article additionnel.
Les amendements identiques nosI-1328 et I-1899 n'ont plus d'objet, non plus que l'amendement n°I-246 rectifié.
L'amendement n°I-249 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°I-636 rectifié est retiré.
L'amendement n°I-1298 rectifié ter n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-764 rectifié de M. Mérillou et du groupe SER.
M. Emmanuel Capus. - Alors qu'une entreprise sur deux sera transmise dans les sept prochaines années, le coût de transmission des entreprises françaises est deux fois supérieur à la moyenne européenne. Nous proposons donc un nouvel abattement, en contrepartie d'une durée de détention plus stricte.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Même avis, comme sur tous les amendements concernant le pacte Dutreil.
L'amendement n°I-764 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-1329 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Nous nous attaquons à la niche dans la niche - c'est très français - : les avantages fiscaux s'imbriquent, jusqu'à neutraliser totalement l'impôt.
Aujourd'hui, quand des titres sont transmis dans le cadre du pacte Dutreil, le calcul des droits ne prend en compte que 25 % de la valeur des titres. Mais ensuite, si les donataires revendent, la plus-value est calculée sur cette valeur réduite de 75 %. C'est comme si on commençait la course 3 kilomètres après la ligne de départ !
Nous proposons de retenir, pour le calcul de la plus-value, la valeur des titres avant réduction Dutreil. C'est simple et efficace !
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Avis défavorable : le changement est substantiel, le coût aussi.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Nous avons déjà modifié le pacte Dutreil - je me suis montrée prête à accompagner deux évolutions. Avis défavorable à tous les autres amendements sur le pacte Dutreil.
Pour éviter l'optimisation, l'allongement de la durée de détention des titres est la méthode la plus simple et la plus efficace. Votre objectif est donc satisfait.
L'amendement n°I-1329 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°I-1533 rectifié bis de M. Duffourg et alii.
Mme Denise Saint-Pé. - Nous portons de deux à trois ans avant ou après la cession la durée permettant de bénéficier d'une exonération de plus-values en cas de cession d'une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole.
M. le président. - Amendement n°I-1534 rectifié bis de M. Duffourg et alii.
Mme Denise Saint-Pé. - Nous voulons permettre aux pharmaciens qui partent en retraite de bénéficier de l'exonération des plus-values de cession en cas de vente de l'officine, dans un délai plus long : trois ans au lieu de deux. C'est crucial, notamment dans les zones rurales en raison de la désertification médicale.
M. le président. - Amendement n° I-1535 rectifié bis de M. Duffourg et alii.
Mme Denise Saint-Pé. - Il s'agit d'exonérer les plus-values de cession d'une pharmacie lorsque le cédant réinvestit au moins 30 % de sa plus-value dans l'officine cédée.
Les amendements nosI-1533 rectifié bis, I-1534 rectifié bis et I-1535 rectifié bis, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°I-1993 rectifié de Mme Paoli-Gagin et alii.
M. Emmanuel Capus. - Vous allez voir, c'est très simple : l'article 150-0 B ter du code général des impôts favorise le réinvestissement des produits de cession dans des fonds de capital-investissement, à condition qu'ils remplissent un quota fiscal spécifique partiellement inspiré de celui prévu par l'article 163 quinquies B. Nous alignons davantage le quota fiscal sur celui de cet article 163 quinquies B, en conservant toutefois le rehaussement du seuil à 75 %. J'espère n'avoir perdu personne... (On s'en amuse à droite.)
M. Olivier Rietmann. - Très clair !
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Nous débattrons de l'article 150-0 B ter après l'article 8. Je vous propose de retirer cet amendement, au profit d'un amendement sur lequel le Gouvernement donnera un avis favorable et qui oriente les investissements vers l'innovation.
L'amendement n°I-1993 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°I-1395 de M. Cozic et du groupe SER.
Mme Florence Blatrix Contat. - Nous proposons la suppression de la flat tax, qui n'a jamais eu les effets escomptés sur la croissance, comme l'a montré France Stratégie dans son rapport d'octobre 2021.
M. le président. - Amendement n°I-1312 de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pierre Barros. - Nous voulons l'abrogation la flat tax. Nos autres amendements sont de repli.
M. le président. - Amendement n°I-429 de M. Lurel et alii.
M. Victorin Lurel. - Afin de réduire l'écart entre la taxation du capital et celle du travail, nous rehaussons le taux du PFU de 30 % à 33 %.
M. le président. - Amendement n°I-1313 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Repli : nous relevons le taux du prélèvement de 12,8 % à 22,8 %. L'argent a financé la rente, la distribution de dividendes et les rachats d'actions. Dans le même temps, l'endettement des entreprises a crû. La flat tax n'a pas soutenu l'investissement, elle n'a fait qu'encourager la financiarisation.
M. le président. - Amendement n°I-1314 de MM. Savoldelli et Barros et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Repli : nous portons le taux à 17,8 %.
M. le président. - Amendement n°I-1315 rectifié de MM. Barros et Savoldelli et du groupe CRCE-K.
M. Pascal Savoldelli. - Repli : nous nous contentons de passer le taux à 15 %.
M. le président. - Amendement identique n°I-1396 de M. Cozic et du groupe SER.
M. Rémi Féraud. - Nous maintenons le PFU, mais en réduisons le coût pour les finances publiques.
M. le président. - Amendement identique n°I-1503 de M. Dossus et alii.
M. Thomas Dossus. - Mme la ministre nous expliquait que la concentration du capital était liée au vieillissement de la population et à la paix. Mais aussi à votre politique fiscale !
Rappelons que 1 % des foyers fiscaux concentrent 96 % des dividendes : c'est une dérive complète. Nous avons besoin d'augmenter le taux du PFU : 15,8 %, c'est tout à fait raisonnable.
M. le président. - Amendement n°I-243 rectifié de M. Bilhac et alii.
M. Raphaël Daubet. - Nous introduisons de la progressivité dans le PFU : 33 % jusqu'à 109 999 euros de revenus mobiliers ; 34 % entre 110 000 et 999 999 euros et 35 % au-delà.
M. le président. - Amendement n°I-428 de M. Lurel et alii.
M. Victorin Lurel. - Dans le même esprit, nous introduisons de la progressivité, avec deux seuils.
M. le président. - Amendement n°I-244 rectifié de M. Bilhac et alii.
M. Raphaël Daubet. - Repli : 30 % jusqu'à 109 999 euros ; 33 % entre 110 000 et 999 999 euros et 35 % au-delà.
M. le président. - Amendement n°I-1923 rectifié de M. Cadic et alii.
L'amendement n°I-1923 rectifié n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°I-191 rectifié de Mme Blatrix Contat et alii.
Mme Florence Blatrix Contat. - Nous introduisons une dimension environnementale en modulant le taux en fonction du caractère durable des entreprises. La neutralité fiscale de la flat tax - un taux uniforme, pour tous les revenus du capital - n'est pas tenable au regard des urgences climatiques. Le taux serait de 22,8 % pour les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La suppression du PFU réduirait notre attractivité retrouvée, pour des recettes incertaines. Avis défavorable à tous ces amendements, d'autant que leur rédaction me semble inopérante.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Contrairement à ce que l'on pourrait penser, la flat tax n'est pas plate, mais progressive : son taux varie de 23,8 % à 37,2 %, selon les situations.
La réforme n'a pas fait diminuer les recettes, au contraire. Tenons-nous-en là, d'autant que l'Assemblée nationale a voté une augmentation de la CSG sur les revenus du patrimoine dans le PLFSS.
M. Thomas Dossus. - Madame la ministre, l'augmentation de la CSG sur les revenus du patrimoine vous intéresse-t-elle ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Cela a été voté par de nombreux groupes à l'Assemblée nationale. Le Gouvernement a donné un avis de sagesse favorable de méthode, pour que cela soit dans le débat.
Vu la progressivité, et vu le débat sur la CSG sur les revenus du patrimoine - qui impactera la flat tax - , avis défavorable à tous les amendements.
M. Thierry Cozic. - L'acte de naissance du macronisme, c'est la flat tax : vos avis sont donc logiques, madame la ministre. On a déséquilibré l'imposition des revenus du travail et celle des revenus du capital. C'est un vieux rêve d'économiste libéral selon lequel la baisse des taux stimulerait les prélèvements obligatoires.
Emmanuel Macron a d'emblée offert des cadeaux aux plus aisés. Huit ans plus tard, nul n'a réussi à démontrer un lien de cause à effet avec la relance de l'investissement productif.
Aujourd'hui, 4 000 foyers captent un tiers des dividendes, 1 % des foyers en captent 96 %... Les dividendes ont doublé depuis 2017. Cadre supérieur dans une société, entre salaire et dividendes, vous préférez naturellement les seconds, taxés à 30 %.
Oui, le rendement de la fiscalité du capital n'a jamais été aussi élevé que depuis l'instauration de la flat tax. Mais pourquoi ? Parce qu'il n'y a jamais eu autant de dividendes. Le voilà, votre lien de cause à effet !
L'amendement n°I-1395 n'est pas adopté, non plus que les amendements nosI-1312, I-429, I-1313, I-1314, I-1315 rectifié, I-1396, I-1503, I-243 rectifié, I-428, I-244 rectifié et I-191 rectifié.
M. le président. - Nous avons examiné 215 amendements dans la journée ; il en reste 2 155.
Prochaine séance aujourd'hui, samedi 29 novembre 2025, à 9 h 30.
La séance est levée à minuit vingt-cinq.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du samedi 29 novembre 2025
Séance publique
À 9 h 30, l'après-midi, le soir et la nuit
Présidence : M. Didier Mandelli, vice-président, M. Pierre Ouzoulias, vice-président
. Projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2026 (n°138, 2025-2026)
=> Examen des articles de la première partie (Suite)