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Table des matières
Revalorisation des astreintes hospitalières
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Aide au financement du permis de conduire
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Transport des élèves handicapés
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Prévention des risques liés aux bruits et aux sons amplifiés par les organisateurs de festivals
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Coût de l'archéologie préventive pour les collectivités territoriales
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Créole et ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Désinformation relative au sida chez les jeunes
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Compensation de la suppression du FSDAP
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Balisage des zones de baignade
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
REP des emballages professionnels
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi
Vaccination contre les épizooties
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire
Installation des jeunes agriculteurs
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire
Sécuriser la procédure de démission d'un élu
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Projet d'implantation d'une brigade de gendarmerie à Aincourt
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Déplacement du commissariat de Gap
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Reconnaissance de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Projet de base aérienne de sécurité civile à Mont-de-Marsan
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Brigade de gendarmerie de Vivonne
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur
Privatisation des lignes de bus de petite couronne
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité
Faits de violences sexistes et sexuelles au sein d'Air France
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité
Ligne nouvelle Paris-Normandie
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité
Programme Petites villes de demain
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité
Contrats d'assurances des collectivités territoriales
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique
Troisième programmation pluriannuelle de l'énergie
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique
Remise en cause des crédits de l'économie sociale et solidaire
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique
Intégration des chambres d'hôtes dans le régime fiscal des meublés de tourisme
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique
Redevances liées aux concessions hydroélectriques
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique
Coordination régionale des classes de défense
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique
Mise au point au sujet d'un vote
Convention internationale (Procédure simplifiée)
Refondation de Mayotte (Procédure accélérée - Suite)
Modification de l'ordre du jour
Refondation de Mayotte (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
Après l'article 23 (Appelé en priorité)
Article 1er (Rapport annexé - Seconde délibération)
Département-Région de Mayotte (Procédure accélérée - Suite)
Ordre du jour du mercredi 21 mai 2025
SÉANCE
du mardi 20 mai 2025
92e séance de la session ordinaire 2024-2025
Présidence de M. Alain Marc, vice-président
Secrétaires : M. Guy Benarroche, Mme Catherine Di Folco.
La séance est ouverte à 09 h 30.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
Revalorisation des astreintes hospitalières
Mme Anne Souyris . - Le 11 avril, l'ensemble des organisations syndicales représentatives des praticiens hospitaliers et hospitalo-universitaires a déposé un préavis de grève illimité de la permanence des soins à partir du 1er mai.
Le Gouvernement s'était engagé à revaloriser ces astreintes il y a six mois ; des crédits avaient été inscrits dans les dernières LFSS. Alors que les hospitaliers assurent 80 % de la permanence des soins, les syndicats exigeaient une majoration immédiate et rétroactive à compter du 1er janvier 2024 de 100 % de l'ensemble des forfaits liés aux astreintes.
Mi-avril, un protocole d'accord a finalement été signé ; les syndicats ont obtenu des avancées. Cependant, des questions demeurent. Comment réguler les astreintes sans créer de nouvelles inégalités ? Les actes de télémédecine et les déplacements seront-ils décomptés du temps de travail ? Les forfaits liés aux astreintes très pénibles seront-ils définis au niveau régional ? Pourquoi le Gouvernement a-t-il autant attendu ? Comment répondre à ces attentes légitimes ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - À la suite du rapport de l'Igas, le ministère de la santé a mené une concertation avec les acteurs.
Conformément aux engagements pris, la revalorisation entrera en vigueur le 1er novembre prochain. Les textes réglementaires, qui seront publiés prochainement, visent trois objectifs : la simplification du régime d'indemnisation ; la prise en compte de l'intensité des astreintes ; une forfaitisation plus fine, avec des marges de souplesse laissées aux établissements dans une fourchette allant de 70 à 280 euros.
Le Gouvernement est conscient de l'urgence exprimée par les professionnels de santé. Après le dépôt du préavis de grève, Yannick Neuder a signé un protocole d'accord prévoyant une mesure transitoire du 1er juillet au 31 octobre prochain : celui-ci prévoit une revalorisation de 50 % de l'indemnité forfaitaire de base et une revalorisation totale de 30 % des astreintes déjà forfaitisées. L'arrêté d'application sera publié en juin, afin que cette mesure soit effective dès cet été.
Gestion des Dasri
M. Jean-Pierre Corbisez . - Les déchets d'activités de soins à risques infectieux (Dasri) bénéficient du statut de déchets dangereux ; le principe de précaution s'applique lors de leur traitement. Les règles applicables et les bonnes pratiques sont recensées dans un guide, en cours de mise à jour.
Avant même le changement de réglementation, de nombreux professionnels constatent le déclassement d'un grand nombre de ces déchets et leur réorientation vers la filière des déchets non dangereux. D'où une complexification du geste de tri pour les professionnels de santé, déjà particulièrement sous pression, et un risque important pour les opérateurs chargés de la collecte et du tri.
Des accidents ont déjà été recensés ; le déclassement en cours pourrait multiplier leur nombre à l'avenir.
La responsabilité des professionnels de santé pourrait-elle être engagée ? Quelles mesures compte prendre le Gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Il s'agit d'un enjeu crucial de santé publique, tant pour la sécurité des professionnels de santé que pour celle des opérateurs de collecte, mais aussi la population et l'environnement.
En 2022, la direction générale de la santé (DGS) a engagé une révision complète du guide national, qui datait de 2009.
Ce nouveau guide, fruit d'un travail collaboratif, se veut à la fois pédagogique et rigoureux ; il sera publié très prochainement.
Conformément au code de la santé publique et au code de l'environnement, l'évaluation du risque infectieux repose sur le producteur du déchet. Ce principe, ancien, ne sera pas remis en cause, car celui-ci est le plus apte à apprécier sa dangerosité, en fonction du contexte.
Les professionnels de santé ne sont pas pour autant isolés. Le guide fournit des critères objectifs et des exemples. En cas de doute, la règle est claire : le déchet doit être orienté vers la filière Dasri. Des formations de terrain seront organisées avec l'appui des ARS. La gestion des Dasri reste donc une priorité de santé et de sécurité publiques.
Aide au financement du permis de conduire
Mme Marie-Lise Housseau . - Depuis le 1er janvier 2024, les jeunes peuvent passer leur permis de conduire à 17 ans, afin de faciliter leur insertion professionnelle.
Toutefois, l'aide de 500 euros allouée aux apprentis pour financer leur permis de conduire n'a pas été adaptée : lorsqu'un jeune dépose sa demande auprès de l'Agence de services et de paiement (ASP), celle-ci est systématiquement rejetée.
Quand le Gouvernement compte-t-il résoudre cette incohérence ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Je sais que ce dispositif est important pour de nombreux jeunes, notamment dans votre département, le Tarn.
Cette aide vise à faciliter les déplacements des apprentis et à favoriser leur insertion professionnelle. Elle intervient en complément d'autres mesures prises par plusieurs régions ou départements. Les dispositifs foisonnent, d'où la demande de Matignon de cartographier, département par département, l'ensemble des aides prévues pour les jeunes de 17 et 18 ans.
L'aide à destination des jeunes de 17 ans est en suspens. Nous pourrons de nouveau aborder le sujet lors du prochain PLF, une fois la cartographie réalisée, car les régimes sont très différents selon les collectivités territoriales.
Je suis très engagée sur ce dossier, car les freins à la mobilité sont source de difficultés pour la formation et l'insertion professionnelle de nos jeunes.
Mme Marie-Lise Housseau. - Merci pour votre réponse, qui ne me satisfait que partiellement. Dans nos départements ruraux, il est difficile de se déplacer en transports en commun, c'est une question de justice sociale. Tout ce que vous pourrez faire sera le bienvenu, madame la ministre.
Prépa-apprentissage
Mme Laure Darcos . - La prépa-apprentissage, supprimée depuis le 31 décembre 2024, permettait aux jeunes de 16 à 29 ans et aux personnes en situation de handicap sans qualification de réussir leur entrée en apprentissage grâce à un accompagnement d'une durée de quelques jours à plusieurs mois. Les jeunes pouvaient ainsi acquérir des compétences de base et découvrir le monde du travail.
Le centre de formation d'apprentis (CFA) de la faculté des métiers de l'Essonne accompagnait chaque année 150 personnes vers la formation, l'apprentissage et l'emploi. Le bilan était excellent, avec un taux de sortie positif de 80 % - que ce soit en apprentissage, en CDD ou en CDI.
N'aurait-il pas fallu faire évoluer le dispositif, en le recentrant sur les acteurs les plus pertinents et en ciblant les financements, plutôt que le supprimer purement et simplement ?
Le Gouvernement compte-t-il le réactiver ? L'expertise acquise par les CFA risque d'être perdue, d'où un coût plus important pour les finances publiques, car ces personnes, qui se battent souvent plus que les autres pour s'en sortir, seront à la charge de la solidarité nationale.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - La prépa-apprentissage a fait l'objet d'un appel à projets de 2019 à 2023, avec une prolongation des financements jusqu'à la fin 2024. Elle constituait un sas d'entrée dans l'apprentissage pour 20 000 jeunes par an.
Les actions menées étaient très hétérogènes selon les départements. Surtout, les résultats étaient peu probants : le taux d'entrée en alternance s'élevait à seulement 35 % au niveau national, bien loin des 80 % que vous évoquez. Le dispositif fonctionnait peut-être en Essonne, mais ce n'était pas le cas pour d'autres départements.
Le réseau pour l'emploi, composé, entre autres, de France Travail, des missions locales et des collectivités locales, assurera un meilleur fléchage et une meilleure orientation des jeunes.
Plutôt que d'empiler les politiques, mieux vaut se concentrer sur les dispositifs de droit commun, à l'instar de la préparation opérationnelle à l'emploi (POE), proposée par France Travail. Il faut investir massivement dans ces mesures utiles pour l'emploi de nos jeunes.
Transport des élèves handicapés
M. Hervé Reynaud . - Les départements rencontrent de plus en plus de difficultés pour assurer le transport des élèves handicapés, qui relève de leurs compétences.
Dans mon département, la Loire, le nombre d'élèves à prendre en charge a doublé en moins de dix ans, avec 1 200 élèves et un budget de 8,5 millions d'euros sans compensation financière d'aucune sorte.
Or l'inclusion scolaire et les nouveaux dispositifs intégrés, tels que les stages ou les horaires aménagés, nécessitent une adaptation constante des moyens à mobiliser. Il faut aussi former de nouveaux conducteurs et les fidéliser afin d'assurer un transport en toute sécurité : ces contraintes augmentent le coût du service. Même chose pour les aides attribuées aux particuliers utilisant leur véhicule, lorsque les trajets collectifs ne sont pas pertinents.
Que compte faire le Gouvernement pour permettre aux départements d'assurer pleinement cette compétence ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - L'organisation et le financement des transports scolaires sont une compétence des collectivités territoriales, en premier lieu des régions. Les frais de déplacement des élèves handicapés fréquentant un établissement d'enseignement général, agricole ou professionnel, public ou privé, relèvent de la compétence des conseils départementaux, dont on connaît aujourd'hui les difficultés financières.
Le Gouvernement s'engage à conduire des travaux avec les différents acteurs afin d'identifier les leviers d'optimisation, de financement adapté et de recrutement.
La filière fait en effet face à des difficultés de recrutement ; elle pourrait s'appuyer sur les travailleurs de plus de 55 ans ou ceux déjà à la retraite.
Le Gouvernement s'appuiera sur les récentes recommandations de l'Igas relatives à la transformation de l'offre médico-sociale, ainsi que sur un soutien technique financé par la Commission européenne pour s'inspirer de solutions trouvées ailleurs en Europe.
M. Hervé Reynaud. - J'insiste : les départements rencontrent de nombreuses difficultés pour exercer ces politiques de solidarité empreintes d'humanité. L'inclusion de ces enfants est importante pour eux, mais aussi pour leur famille. Ma question est un appel à l'aide pour que les départements puissent travailler dans de meilleures conditions.
Prévention des risques liés aux bruits et aux sons amplifiés par les organisateurs de festivals
M. Damien Michallet . - Chaque année en France, comme en Isère, les festivals ou les concerts suscitent de plus en plus de plaintes des riverains, en raison des potentiels dépassements des valeurs limites des émissions sonores. L'application du code de la santé publique, du code de l'environnement et du code général des collectivités territoriales conduit à des fragilités juridiques qui exposent ces événements à des annulations.
Or ils sont indispensables pour faire vivre l'économie, créer du lien social et amener la culture au coeur des territoires. En l'état de la réglementation, il n'existe pas de dérogation formelle assurant le maintien de l'événement : un seul requérant peut obtenir son annulation jusqu'à la dernière minute ou pendant son déroulement. Les élus et les organisateurs doivent pouvoir dépasser ponctuellement les valeurs limites en accord avec la préfecture et l'ARS.
De quels moyens les élus locaux disposent-ils pour sécuriser de tels événements ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Comme d'autres activités potentiellement bruyantes, les festivals doivent respecter des valeurs limites d'émergence sonores globales. Les services de l'État encouragent la concertation avec les riverains afin qu'ils tiennent compte de la bonne volonté des organisateurs et des progrès enregistrés.
Selon les conclusions de l'expérimentation, pilotée par l'association AGI-SON avec le festival Marsatac à Marseille, présentées aux ministères de la culture, de l'environnement et de la santé, il est difficile pour certains festivals de respecter les seuils définis dans le code de la santé publique. Un groupe de travail, constitué sous l'égide de la direction générale de la création artistique en associant la direction générale de la santé et celle de la prévention des risques, oeuvre actuellement à des évolutions concrètes de la réglementation. Ses propositions sont attendues pour octobre 2025.
Coût de l'archéologie préventive pour les collectivités territoriales
M. Fabien Genet . - L'archéologie préventive représente une charge croissante pour de nombreuses collectivités territoriales ; les tarifs en vigueur freinent la réalisation de nombreux projets d'aménagement.
Quelques exemples concrets dans mon département de Saône-et-Loire : dans une commune, une étude préalable aux travaux d'aménagement d'un espace public de 1 000 m2 a été évaluée à 252 000 euros pour 10 % de la superficie totale, alors que l'entreprise bénéficiait de la mise à disposition gratuite du matériel nécessaire par la municipalité ; dans une autre commune, le prix proposé atteignait 690 000 euros TTC pour 1 400 m2 de fouilles et une estimation initiale inférieure de moitié.
Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Je réponds en l'absence de la ministre de la culture. Les fouilles d'archéologie préventive sont réalisées par l'Institut national de recherches archéologiques préventives, par des opérateurs ou des services des collectivités territoriales. Les fouilles constituant une activité concurrentielle, l'État ne peut pas réguler les prix.
Leur financement repose sur les maîtres d'ouvrage. Les aménageurs peuvent bénéficier d'aides du Fonds national pour l'archéologie préventive (Fnap) : entre 2016 et 2024, 44 % des fouilles préventives ont reçu un soutien financier de l'État ; en 2024, 44 millions d'euros d'aides ont été accordés. En juillet 2021, le périmètre du Fnap a été élargi : les communes situées en ZRR peuvent donner mandat à l'opérateur de fouilles, ce qui leur assure une moindre sortie de trésorerie.
En tant que ministre du travail et de l'emploi, j'ajoute que cette réponse mérite d'être étayée au vu des charges des collectivités et des retards pris par des projets de développement économique.
M. Fabien Genet. - Interroger la ministre de la culture en plein festival de Cannes n'était peut-être pas opportun. Je salue l'écoute du Gouvernement. La meilleure façon d'aider les collectivités à faire des économies, c'est de réduire leurs charges.
Créole et ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires
M. Frédéric Buval . - La France n'a toujours pas ratifié la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, adoptée par le Conseil de l'Europe en 1992, qu'elle a pourtant signée en 1999, ce qui empêche sa mise en oeuvre. Cette ratification suscite beaucoup d'attentes pour la valorisation du créole.
Langue régionale française parlée par des millions de personnes des territoires d'outre-mer, le créole est essentiel pour la diversité culturelle de notre pays et a été inscrit sur la liste de l'Unesco en 2010.
Certains soulèvent un obstacle constitutionnel à cette ratification, lié au principe d'indivisibilité de la République. Mais si l'article 2 de la Constitution dispose que « la langue de la République est le français », l'article 75-1 reconnaît que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».
Quelles solutions sont envisagées pour surmonter les obstacles à cette ratification ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Si la France n'a pas ratifié la Charte, elle s'efforce d'appliquer pleinement ses trente-neuf engagements.
La décision du Conseil constitutionnel portait sur les principes d'indivisibilité de la République, d'égalité devant la loi, d'unicité du peuple français et d'usage officiel de la langue française et non sur l'ensemble du texte. Le Gouvernement met donc tout en oeuvre pour que nos politiques publiques soient au service de la diversité culturelle et linguistique.
On peut citer ainsi l'adoption de la loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion en 2021, la création du Conseil national des langues et cultures régionales en 2022, la tenue régulière des états généraux du multilinguisme dans les outre-mer. En outre, pas moins de 900 000 euros en 2022 et 2 millions d'euros depuis ont été consacrés à la promotion des langues régionales.
Nous faisons vivre ce plurilinguisme dans le respect de l'unicité de la nation française.
Désinformation relative au sida chez les jeunes
M. Stéphane Demilly . - Selon l'étude de l'association Sidaction, la désinformation des jeunes sur le VIH progresse. Ainsi, 42 % des personnes interrogées pensent encore que le virus se transmet par un baiser et, pour un tiers d'entre eux, en partageant son assiette avec une personne séropositive. C'est un véritable échec collectif !
Depuis la loi du 4 juillet 2001, une information et une éducation à la sexualité doivent être dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d'au moins trois séances annuelles, mais moins de 15 % des élèves en avaient bénéficié ces dernières années selon le Cese.
Selon l'étude de Sidaction, seul un tiers des jeunes de 15 à 24 ans interrogés s'étaient fait dépister dans les douze mois précédents, alors que le dépistage est gratuit, sans rendez-vous et sans ordonnance, dans tous les laboratoires d'analyses médicales de France depuis le 1er janvier 2022.
Comment renforcer la prévention et la sensibilisation de nos jeunes concernant le VIH ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Les chiffres cités sont édifiants et nous partageons le constat.
La lutte contre les infections sexuellement transmissibles (IST), a fortiori contre le VIH, passe par la sensibilisation, la lutte contre les fausses informations et le dépistage.
La semaine dernière, lors des Assises de la santé scolaire, la ministre de l'éducation nationale, Mme Élisabeth Borne, et le ministre de la santé, M. Yannick Neuder, ont annoncé des mesures pour promouvoir la santé de manière globale.
Le 30 janvier dernier, le Conseil supérieur de l'éducation a adopté le nouveau programme d'éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle qui inclut la prévention contre le VIH et les IST dès la classe de quatrième. Appliqué dès la rentrée prochaine, il sera obligatoire avec au moins trois séances par an. Une page de ressources en ligne a été publiée pour fournir des informations aux personnels de l'éducation nationale.
Compensation de la suppression du FSDAP
M. Michel Masset . - Le fonds de soutien au développement des activités périscolaires (FSDAP) prendra fin le 1er septembre prochain. Nombre de communes du Lot-et-Garonne, comme Cancon, Monbahus, Villeréal, ont opté pour la semaine de quatre jours et demi qui offre aux élèves un rythme d'apprentissage plus adapté à leurs besoins.
Supprimer ce fonds de manière abrupte et sans concertation n'est pas satisfaisant pour nos élus locaux. Il faudrait a minima prévoir une compensation pour assurer le maintien et la gratuité des activités périscolaires. Le 8 avril dernier, un protocole a été signé entre le Gouvernement et l'AMF, mais aucune information ni solution concrète n'a été transmise aux collectivités.
Quelles mesures et quels moyens prévoyez-vous de mobiliser pour accompagner les communes qui ont fait ce choix courageux voilà bientôt dix ans pour le bien de leurs élèves et leurs familles ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Le FSDAP avait une durée limitée ; la loi de 2013 qui l'a institué était très claire. Depuis un décret de 2017, la plupart des communes concernées sont passées à une organisation du temps scolaire sur quatre jours et ne bénéficient donc plus de ce fonds.
Pour l'année scolaire 2016-2017, 20 000 communes en bénéficiaient contre 1 200 communes désormais, dont une quinzaine dans le Lot-et-Garonne.
Sur les 37 millions d'euros du dispositif, 50 % sont dévolus à quinze communes, dont Paris à hauteur de 5 millions d'euros. Le fonds bénéficiant à quelques grosses communes, son extinction a été programmée pour la rentrée 2023, puis reportée pour répondre à l'inquiétude des élus, sans remettre en cause sa suppression à la rentrée 2025, décidée par la loi de finances pour 2024.
Un nouveau report ne peut être envisagé. Dans un contexte budgétaire contraint, Élisabeth Borne a recentré ses crédits sur d'autres priorités, notamment la refondation de Mayotte.
Nous sommes à l'écoute de vos propositions pour le budget 2026.
M. Michel Masset. - Je suis prêt à travailler avec vous pour trouver une issue heureuse dans le futur budget 2026 afin de protéger nos communes rurales.
Balisage des zones de baignade
Mme Béatrice Gosselin . - De nombreuses collectivités littorales, notamment dans mon département de la Manche, ont des difficultés à organiser la sécurisation des zones de baignade à cause de la superposition de deux cadres techniques : l'arrêté du 27 mars 1991, qui impose un balisage flottant par des bouées spécifiques dans la bande littorale des 300 mètres, et la norme Afnor Spec X50-001, qui recommande des dispositifs terrestres comme les drapeaux de baignade et les panneaux d'information. Ces deux dispositifs sont parfois imposés simultanément par les autorités préfectorales, engendrant des charges logistiques et financières considérables pour les communes, sans toujours améliorer la sécurité.
La situation est préoccupante, notamment dans les territoires à fort marnage comme la côte ouest de la Manche et la baie du Mont-Saint-Michel, où un balisage flottant permanent est souvent irréalisable. Cela expose les collectivités à un risque juridique accru en cas d'accident. Comment comptez-vous clarifier et adapter les règles aux réalités géographiques locales ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Les deux dispositifs cités ne sont pas contradictoires ni redondants, mais complémentaires et constituent des outils à la disposition du maire qui, aux termes du code général des collectivités territoriales, décide si les zones de sa commune nécessitent des mesures réglementaires pour la pratique des activités nautiques, en fonction de la fréquentation, de la typologie des activités et de la configuration des lieux. Dans ce cas, il doit en informer le public par une publicité adaptée sur les lieux, dont les deux dispositifs cités visent à faciliter la lisibilité sur l'ensemble du territoire national.
L'arrêté de 1991 définit la forme du balisage maritime s'il doit être mis en place, tandis que la norme Afnor-Spec définit le format des signalisations à terre. L'articulation de ces deux outils dépend du dispositif réglementaire établi localement et des nécessités de publicité, qui peuvent varier d'un site à l'autre en fonction de la configuration des lieux et des pratiques observées sur place.
Mme Béatrice Gosselin. - C'est complexe pour les zones où le marnage est important : les bouées sont parfois malmenées. Cela ajoute des coûts supplémentaires. Je comprends la volonté d'informer le public, mais il faut également s'adapter au territoire. Les préfets devraient pouvoir autoriser les communes à pouvoir s'adapter selon leurs capacités et leurs configurations géographiques.
REP des emballages professionnels
M. Guislain Cambier . - Parler de simplification, c'est bien. En faire, c'est mieux. On en est loin concernant la responsabilité élargie du producteur (REP) des emballages professionnels. Le ministère a en effet annoncé la publication de textes réglementaires « à l'été » pour une mise en oeuvre au 1er janvier 2026. Six mois, c'est court si l'on veut être efficace. Les processus d'agrément par l'État des éco-organismes ou des systèmes individuels prendront entre trois et six mois. Comment voulez-vous que les entreprises s'organisent pour un processus long et complexe : choix de l'éco-organisme, identification en interne des emballages concernés, mise à jour des outils informatiques, révision des contrats et réorganisation logistique, intégration des nouvelles consignes de tri, formation des équipes... ?
Un moratoire est-il envisageable ? Il ne faudrait pas reproduire ce qui se passe actuellement pour la filière des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - La filière REP pour les emballages professionnels aurait dû entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier de cette année selon le droit européen. C'est le cas chez nos voisins : nous sommes déjà en retard.
Le projet de décret a fait l'objet d'une large concertation en fin d'année dernière et sera prochainement examiné par le Conseil d'État. Un arrêté portant cahier des charges est en cours de finalisation et fera l'objet d'une large concertation.
Un quart seulement des emballages en plastique, qui représentent un gisement d'environ 1 million de tonnes, sont aujourd'hui recyclés. La France est le pays qui paye le plus à l'Union européenne - 1,5 milliard d'euros chaque année - à cause de cela. Il y a urgence.
Un moratoire n'est donc pas envisageable. Vous pouvez compter sur Agnès Pannier-Runacher pour que le dispositif retenu soit équilibré et performant, notamment dans le cadre de la deuxième concertation.
M. Guislain Cambier. - Nous allons donc continuer à faire de la surtransposition : il n'y avait que cinq filières REP dans la réglementation européenne et nous allons passer à vingt-cinq. Nos entreprises se verront imposer des délais très contraints et des contraintes que d'autres n'ont pas : c'est un désavantage compétitif, d'autant plus dommageable que les entreprises sont volontaires. Mais encore faut-il ne pas leur mettre des bâtons dans les roues !
Cétacés du parc Marineland
Mme Mathilde Ollivier . - L'ONG TideBreakers a récemment diffusé des images saisissantes de deux orques, Wikie et son fils Keijo, tournant en rond dans un bassin couvert d'algues au parc Marineland d'Antibes.
L'urgence pour ces cétacés détenus est connue de tous : les scientifiques, les ONG et une majorité croissante de Français dénoncent ces conditions de captivité indignes pour les orques et les dauphins. Les travaux scientifiques ont largement documenté les besoins complexes de ces espèces qui rendent leur maintien en bassin particulièrement problématique au regard de leur bien-être.
La loi de novembre 2021 est un tournant, mais elle laisse un angle mort inquiétant : que deviennent ces animaux encore captifs ? À Marineland, deux orques et douze dauphins sont quasi à l'abandon. Récemment, l'Espagne a refusé leur transfert. Rien n'est clair : pas de solution concrète, ni même un plan de transition.
Des sanctuaires marins, zones côtières fermées et protégées semi-naturelles mais restant sous supervision humaine, pourraient être une solution. Des projets existent, notamment en Grèce, où j'ai pu aborder le sujet lors d'un de mes déplacements.
La situation avance-t-elle ou enterre-t-on le dossier en silence ? Nous ne pouvons pas laisser ces animaux finir leur vie dans l'oubli parce que cela dérange ou coûte trop cher. Je vous demande un engagement clair : allons-nous offrir à ces cétacés une fin de vie digne dans un environnement adapté ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Le ministère a exploré les possibilités de relocalisation des orques dans des enclos marins. Un appel à manifestation d'intérêt (AMI) a été lancé au printemps 2024, mais aucun projet n'a présenté des garanties suffisantes en matière de bien-être animal à court terme.
Concernant les dauphins, le ministère a réuni les parties prenantes au premier trimestre 2025. Bien que prometteurs, les projets d'enclos prévus en Italie et en Grèce ne sont pas encore opérationnels. Agnès Pannier-Runacher réunira un groupe de travail dans les prochains jours avec ses homologues italiens, grecs et espagnols pour en améliorer la faisabilité.
Marineland a sollicité un transfert à l'étranger, notamment des orques vers le Japon, mais la ministre a refusé au vu des risques d'un transfert de longue durée. Un transfert vers l'Espagne a été rejeté par les autorités espagnoles. Les animaux restent sous la responsabilité de Marineland qui veille à les maintenir en bonne santé en l'attente d'une nouvelle solution. Le Gouvernement reste pleinement mobilisé.
Régime fiscal du HVO100
M. Simon Uzenat . - Le HVO100, huile végétale hydrotraitée, ne bénéficie d'aucun régime fiscal incitatif dans les usages maritimes et fluviaux professionnels.
La décarbonation du transport maritime est un levier stratégique. Issu principalement de la valorisation de déchets, de graisses animales et d'huiles usagées, le HVO100 peut être utilisé directement dans les moteurs diesel des navires, des bateaux de pêche ou des engins fluviaux. Il permet une réduction des émissions de CO2 pouvant dépasser les 80 %. Déjà produit en France et en Europe, il contribue à sécuriser l'approvisionnement énergétique et à réduire la dépendance aux énergies fossiles.
Il est pourtant traité comme un carburant fossile sur le plan fiscal, ce qui limite son attractivité économique pour les professionnels. Ceux engagés dans une démarche de verdissement de leur flotte craignent que le HVO100 soit progressivement écarté du mix énergétique du fait de son coût élevé par rapport à d'autres biocarburants et d'un arbitrage défavorable de la part des opérateurs pétroliers.
Un cadre fiscal spécifique dans les usages maritimes et fluviaux professionnels permettrait de soutenir les acteurs économiques dans leur transition énergétique, de renforcer la souveraineté énergétique française et d'aligner la fiscalité sur nos objectifs climatiques nationaux. Qu'en pense le Gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Les principaux leviers identifiés pour la décarbonation du secteur maritime sont le changement d'énergie et la sobriété, principalement liés à la réduction de vitesse des navires.
Le HVO100, utilisé dans les moteurs diesel, permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux carburants traditionnels, mais une baisse des accises ne serait pas le levier adapté et ne suffirait pas à compenser les écarts de prix avec les carburants traditionnels, car les taux sont déjà nuls pour ces secteurs.
Des incitations ciblées sont plus adaptées, comme la taxe incitative relative à l'utilisation d'énergie renouvelable dans les transports pour le transport routier que nous souhaitons faire évoluer vers un mécanisme de réduction de l'intensité carbone dans les transports, qui pourrait inclure le secteur maritime et fluvial. Nous avons lancé une consultation sur ce projet de mécanisme ; celle-ci, qui a débuté le 12 mai, se terminera le 10 juin.
Extractions judiciaires
M. Cédric Chevalier . - Alors que le Président de la République a récemment honoré la mémoire de Fabrice Moello et d'Arnaud Garcia, tués à Incarville en mai 2024, une réforme en profondeur des extractions judiciaires - qui sont au nombre de plus de 300 000 par an, parfois pour des audiences très brèves - est urgente.
Le protocole d'accord signé l'an dernier pour améliorer l'équipement et l'armement des agents, ainsi que la prise en charge des détenus, n'est pas une solution pérenne. Les extractions se font au détriment d'autres missions essentielles comme la sécurité des établissements. La tendance en Europe est clairement à leur réduction grâce à la visioconférence, désormais jugée fiable et légitime ; le Royaume-Uni l'utilise massivement depuis 2020. L'Italie, pays référence en la matière, organise des audiences pour les détenus les plus dangereux dans les établissements pénitentiaires, soit par visioconférence, soit par le déplacement des magistrats.
La France reste très en retrait. Le garde des sceaux a récemment annoncé une accélération de la numérisation des procédures pénales et un investissement dans les équipements de visioconférence, mais il faut passer aux actes. Le Gouvernement entend-il prendre les mesures pour que celle-ci devienne la norme et l'extraction physique une exception motivée par le juge ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - La loi Narcotrafic, qui illustre la détermination collective à renforcer la sécurité des personnels pénitentiaires, est en cours d'examen par le Conseil constitutionnel. Une circulaire d'août dernier rappelle aux juridictions la nécessité de délocaliser certains actes juridictionnels au sein des établissements pénitentiaires et recommande le recours à la visioconférence pour les détenus présentant un risque d'évasion ou de troubles à l'ordre public grave.
Cette loi mettra de terme définitif aux activités criminelles menées depuis la détention. La visioconférence pendant l'instruction devient le principe pour les personnes détenues dans les quartiers de lutte contre la criminalité organisée et la comparution physique l'exception. Nous travaillons aux dispositions d'application nécessaires au respect des droits de la défense et de l'accès aux juges.
M. Cédric Chevalier. - Il faudra que cela soit suivi d'investissements importants ; cela permet d'assurer la sécurité du personnel, de faire des économies et - même si Agnès Pannier-Runacher n'est pas là - de décarboner la justice.
Centres éducatifs fermés
Mme Marion Canalès . - En 2017, Emmanuel Macron promettait de doubler le nombre de centres éducatifs fermés (CEF). En 2018, la Commission nationale consultative des droits de l'homme considérait qu'ils étaient l'antichambre de la prison, et non de la réinsertion. En 2022, une mission sénatoriale sur la délinquance des mineurs recommandait une pause dans leur création. En octobre 2023, la Cour des comptes en faisait le bilan : absence d'étude d'impact et coût élevé de la création de ces 22 nouveaux centres - 6 millions d'euros pièce. Malgré cela, leur construction se poursuit, dans le droit fil de la proposition de loi ultra répressive sur la justice des mineurs récemment adoptée. Une étude a été récemment diligentée par le ministère de la Justice : pouvez-vous m'en dire plus ? Elle est confidentielle, mais le sujet est d'intérêt général.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - La Cour des comptes recommande de produire des données de suivi et d'évaluation des jeunes qui sortent d'une prise en charge par la protection judiciaire de la jeunesse, et notamment des CEF, pour effectuer des comparaisons entre dispositifs. Malheureusement, nous ne disposons pas de suffisamment de données, même si cela s'améliore avec le déploiement du système d'information de la justice des mineurs. Le ministère de la justice réalise des études régulières, mais sur des cohortes réduites et insuffisamment représentatives. Nous devons mieux apparier les différents systèmes d'information - justice, éducation nationale, emploi - car la réitération et la récidive ne sauraient être les seuls indicateurs d'efficacité.
Mme Marion Canalès. - Les cohortes seraient insuffisantes, dites-vous ? Mais 600 jeunes sont accueillis dans les 52 centres existants !
Vaccination contre les épizooties
M. Daniel Gremillet . - Une grave épizootie de fièvre catarrhale ovine (FCO), avec différents variants, frappe tous nos élevages - caprins, ovins, bovins. Les pertes de production et les taux de mortalité sont énormes. La région Grand Est est particulièrement touchée, notamment le département des Vosges qui compte 13,5 millions d'euros de pertes indirectes en 2024. Avons-nous assez de vaccins adaptés aux variants ? Je plaide aussi pour une politique européenne plus offensive. Et qu'en est-il du fonds d'indemnisation ? Car les pertes de certains éleveurs sont terribles et cela crée du mal-être dans les familles.
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire . - Dès mon arrivée au ministère, mon obsession a été de gérer cette crise sanitaire qui frappe nos filières ovine, bovine et caprine.
Les vaccins contre la FCO 3 sont disponibles, les vétérinaires peuvent les commander et j'invite les éleveurs à faire vacciner leurs troupeaux : c'est la meilleure prévention. L'État a commandé 14 millions de doses contre la FCO 8, pour 37 millions d'euros, qui seront mises gratuitement à la disposition des filières ovine et bovine - même s'il y a beaucoup moins de pertes directes en FCO 8 sur les bovins que sur les ovins. Nous avons également réussi à obtenir un vaccin contre la FCO 1 auprès d'un laboratoire étranger - car hélas, nous ne sommes pas souverains sur le plan sanitaire - afin de créer une barrière sanitaire.
Dès mon arrivée, j'ai mis en place un fonds d'indemnisation de 75 millions d'euros. C'est le fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE), financé à 65 % par l'État, qui prendra en charge les pertes indirectes.
M. Daniel Gremillet. - Les taux de mortalité sont importants, y compris dans les élevages bovins. (Mme Annie Genevard le conteste.) Regardez les chiffres de l'équarrissage !
Mme Annie Genevard, ministre. - Je les ai.
M. Daniel Gremillet. - C'est un éleveur qui vous parle !
Le fonds d'indemnisation n'est pas à la hauteur. Ne faudrait-il pas une politique européenne plus offensive ?
Compostage de la laine
M. Jean-Claude Anglars . - Les exigences sanitaires relatives au compostage de la laine en suint sont plus strictes que pour d'autres sous-produits animaux, comme le lisier. La classification de la laine, matière naturelle aux multiples propriétés agronomiques et environnementales, en sous-produit animal de catégorie 3 entraîne de fortes contraintes en matière de collecte et de traitement. En l'absence de filière structurée, le co-compostage avec du fumier constitue, en dehors de l'incinération, la seule solution viable.
Or, pour composter de la laine en ferme, les exploitants doivent disposer d'un agrément sanitaire identique à celui exigé pour les plateformes industrielles, avec des exigences techniques difficilement atteignables. Certaines dérogations et souplesses existent, mais elles ne concernent jamais la laine. Allez-vous alléger la réglementation et prévoir une simple procédure d'enregistrement en lieu et place de l'agrément sanitaire, comme c'est déjà le cas pour le lisier ?
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire . - Les difficultés de valorisation de la laine sont bien connues de mes services, qui accompagnent le secteur ovin dans la structuration d'une filière laine. Ils travaillent à l'élaboration d'un dossier type de demande d'agrément sanitaire. Une expérimentation, lancée en juin 2024, est en cours dans deux exploitations agricoles pilotes, pour déterminer le processus de compostage à la ferme le plus adapté. Mes services ont également saisi l'Anses afin d'identifier les risques pour la santé humaine, la santé animale et pour l'environnement et faire des recommandations d'ici à octobre 2025.
M. Jean-Claude Anglars. - Je vois que vous êtes engagée sur ce sujet crucial pour le département de l'Aveyron, qui compte près d'un million de brebis.
Installation des jeunes agriculteurs
M. Bruno Rojouan . - Notre tissu agricole s'érode, menaçant la vitalité de nos territoires ruraux. En cinquante ans, le nombre d'agriculteurs est passé de 1,6 million à moins de 500 000 et la moitié des chefs d'exploitation ont plus de 55 ans. Alors que le renouvellement générationnel est urgent, les jeunes peinent à s'installer, notamment dans l'Allier où seuls deux départs sur trois sont remplacés.
L'accès au foncier reste un frein majeur : rareté des terres disponibles, prix élevé, procédures administratives complexes, difficile accès au crédit, etc. Il est pourtant crucial de soutenir toutes les initiatives qui participent à la relocalisation de l'alimentation, à la préservation de l'environnement, à la résilience des territoires et à la souveraineté alimentaire. Comment allez-vous lever ces freins et faciliter l'installation des jeunes agriculteurs ?
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire . - Oui, les jeunes doivent accéder au foncier ; c'est indispensable pour le renouvellement des générations. Nos outils sont tournés vers l'installation des jeunes. Ainsi, en 2023, les Safer ont soutenu 2 800 installations, correspondant au tiers des surfaces rétrocédées. La loi Sempastous a permis de libérer du foncier sous forme de bail ou de cession, quasi exclusivement à destination des jeunes. Je salue également le bon démarrage du fonds Entrepreneurs du vivant, doté de 400 millions d'euros. Les jeunes agriculteurs peuvent ainsi consacrer l'essentiel de leurs investissements au démarrage de leur entreprise et acquérir le foncier quelques années plus tard.
L'initiative nationale pour l'agriculture française (Inaf), instrument de garantie innovant, a permis de financer des projets d'investissement, dont 70 % de jeunes agriculteurs. Le lancement de la phase 2 est imminent, avec 2 milliards d'euros de prêts distribués par quatre partenaires bancaires.
Enfin, le réseau France Services Agriculture, créé par la loi d'orientation agricole, accompagnera tous les porteurs de projet à compter du 1er janvier 2027.
Préemption
M. Daniel Gueret . - Il existe une contradiction juridique entre le droit de préemption des communes, prioritaire sur celui de la Safer en zone agricole, et la limitation du droit de préemption communale aux seules zones urbaines ou à urbaniser. De nombreuses petites parcelles à proximité des zones urbanisées n'étant pas préemptées par les Safer, les communes doivent les acquérir au prix proposé par le vendeur - et non à celui évalué par les domaines. La jurisprudence reconnaît toutefois l'existence d'un droit de préemption de la commune quelle que soit la nature de la zone concernée. Pourquoi ne pas autoriser les Safer à déléguer leur droit de préemption à la commune ?
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire . - Son droit de préemption permet à la Safer d'acquérir des terrains pour y maintenir l'activité agricole, c'est important. En cas de préemption d'un même bien, la commune - comme l'État et toutes les collectivités publiques - est prioritaire sur la Safer. La commune a toujours la possibilité de proposer une autre offre en révision de prix ; à défaut d'acceptation, elle peut faire fixer le prix par la juridiction compétente.
L'exercice de cette préemption doit néanmoins répondre à des motifs d'intérêt général et ne saurait donc se substituer à celui des Safer que dans des cas bien identifiés, faisant l'objet d'une déclaration d'utilité publique. De plus, l'État et les collectivités usent parfois de leur droit de préemption au profit de projets agricoles.
Je souhaite qu'un rapport soit remis au Parlement afin de préciser l'articulation entre ces différents droits de préemption et de faire des propositions d'amélioration.
M. Daniel Gueret. - Ce rapport est une excellente initiative pour clarifier une situation ambiguë et délicate pour les maires. J'y serai attentif.
Sécuriser la procédure de démission d'un élu
M. Aymeric Durox . - C'est avec satisfaction que j'ai appris, hier, la suspension par le tribunal administratif de Strasbourg de la démission forcée de M. Julien Ruaro, conseiller municipal de Coin-lès-Cuvry en Moselle. Voilà enfin son honneur restauré, la veille de ma question au Gouvernement ! Quel heureux hasard qui fait si bien les choses. Je salue également l'extrême célérité du préfet de Moselle qui l'a prévenu dans l'heure. Je suis ravi d'avoir accéléré, par ma question, la restauration dans ses droits d'un citoyen privé injustement de son mandat d'élu.
Néanmoins, avec le développement des nouvelles technologies, il pourrait y avoir de nouveaux Julien Ruaro, démissionnaires involontaires, victimes de personnes mal intentionnées.
Je vous demande de sécuriser urgemment les mandats des conseillers municipaux, par une vérification systématique de l'authenticité des démissions par un organisme indépendant, l'obligation d'informer l'élu concerné avant toute prise d'acte définitive et la mise en place d'une procédure de contestation rapide en cas de doute.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Nous sommes ravis de la décision rendue.
La démission d'un conseiller municipal doit être adressée au maire, dans un document écrit sans équivoque, daté et signé librement. Si un maire a connaissance d'éléments de pression sur le démissionnaire, il doit demander à ce dernier de confirmer sa décision. S'assurer de la validité matérielle de la lettre relève de sa responsabilité, et le juge administratif veille au respect de cette exigence.
La loi prévoit que la démission est définitive dès réception du document par le maire, qui n'a aucun pouvoir d'appréciation, sauf en cas de suspicion de pression.
Saluons, en l'espèce, la rapidité du tribunal administratif et de la préfecture.
Nous pourrions examiner comment sécuriser davantage cette procédure lors de l'examen du texte sur le statut de l'élu.
M. Aymeric Durox. - Alors que le maire peut se révéler complice, la vérification de la lettre par une autorité indépendante me paraît nécessaire.
Projet d'implantation d'une brigade de gendarmerie à Aincourt
M. Daniel Fargeot . - Le 2 octobre 2023, le Président de la République annonçait le déploiement de 283 nouvelles brigades de gendarmerie d'ici à 2027, dont une à Aincourt, dans le sud-ouest du Vexin, un secteur rural du Val-d'Oise particulièrement exposé. Cette implantation très attendue répond à un besoin objectif de sécurité dans un territoire à la fois touristique, proche de grands pôles urbains et éloigné de toute présence opérationnelle.
Malgré l'identification du terrain et la possibilité d'une installation rapide dans des bâtiments modulaires, le projet semble au point mort depuis plus d'un an. Alors qu'une révision du PLU est nécessaire, aucune information concrète n'a été transmise, ni aux élus, ni aux services concernés.
L'incompréhension grandit, d'autant que ce territoire a déjà perdu une brigade en 2009. Les discours actuels sur la maîtrise de la dépense publique font craindre un abandon du projet.
Où en est-on ? Quelles sont les prochaines étapes et selon quel calendrier ?
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Déjà 80 des 239 nouvelles brigades ont été installées dans 64 départements de l'Hexagone et 8 en outre-mer, en 2024. Le Gouvernement souhaite poursuivre ce déploiement. Dans le Val-d'Oise, une brigade mobile a été créée à Domont et est opérationnelle depuis juillet dernier. En effet, une brigade fixe doit être implantée à Aincourt. Le projet n'est aucunement remis en cause mais il reste un arbitrage financier à rendre avant de pouvoir engager définitivement la création de cette brigade.
M. Daniel Fargeot. - Je transmettrai vos propos rassurants à tous les acteurs du territoire.
Déplacement du commissariat de Gap
M. Jean-Michel Arnaud . - Le 13 mars dernier, le Gouvernement a confirmé le principe d'un déplacement du commissariat de Gap, actuellement hébergé dans la cité administrative Desmichels, vers le bâtiment occupé par la Banque de France.
Dès le 13 juillet 2021, j'avais interpellé le Gouvernement sur la baisse des effectifs ainsi que sur la vétusté des locaux du commissariat. Je me réjouis donc de cette annonce. Néanmoins se pose la question de la création d'un hôtel des polices mutualisé, réunissant la direction interdépartementale de la police nationale, les douanes et la police municipale, ainsi que le centre de surveillance urbaine de Gap. Quand la police nationale déménagera-t-elle ? Le Gouvernement soutient-il le regroupement des services, qui a reçu l'approbation du maire de Gap ?
Alors qu'un programme de modernisation de la cité administrative Desmichels a été engagé depuis plusieurs années, et qu'en 2021, il m'avait été indiqué que la création du secrétariat général commun départemental au sein de la préfecture devrait conduire à des modifications dans l'occupation de la cité administrative, quelles mesures seront prises pour valoriser la cité administrative ?
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Le Parlement a préservé les crédits du ministère de l'intérieur pour 2025, ce qui permet de continuer à aménager et construire des commissariats de police et des brigades de gendarmerie.
Le projet de regroupement dans la cité administrative Desmichels n'est pas remis en cause, mais les surfaces disponibles ne répondent pas aux besoins totaux. Le bâtiment occupé actuellement par la Banque de France, qui devrait se libérer courant 2026, sera examiné pour reloger les services de police, car il répond à ses besoins. Néanmoins, le budget ne permet pas de mener cette année les études de faisabilité, auxquelles l'éventuelle création d'un hôtel de police regroupant les différents services sera intégrée.
Dans l'attente, les locaux actuels font l'objet de travaux réguliers : l'accueil a été rénové en 2017 ; en 2020 et au cours des cinq premiers mois de 2021, plus de 50 000 euros ont été engagés.
M. Jean-Michel Arnaud. - Je remercie le ministre de ces précisions. Il est important d'engager rapidement ces études. Le maire de Gap est particulièrement attaché à la sécurité de sa ville. Nous avons le souvenir de l'abandon d'un projet sur le parc de la Commanderie, il y a plusieurs années. Les Gapençais ne doivent pas pâtir d'une sécurité à demi-prix.
Reconnaissance de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires
Mme Elsa Schalck . - Maillons essentiels de la sécurité et de la protection des citoyens, les sapeurs-pompiers volontaires représentent 80 % des effectifs de pompiers et réalisent 67 % du temps d'intervention globale. Leur caractère indispensable n'est plus à démontrer.
En 2023, nous avons voté une bonification de trimestres de retraite en leur faveur, afin de reconnaître leur engagement. Or nous attendons toujours le décret d'application. Ce retard empêche les sapeurs-pompiers volontaires de bénéficier de leurs nouveaux droits. Ce serait pourtant déterminant, alors qu'il en manque 50 000 dans notre pays.
À l'heure où ils subissent des violences totalement inacceptables, il est essentiel de les soutenir, alors qu'ils s'engagent et sacrifient leur temps pour aider, secourir et protéger, parfois au péril de leur vie.
Quand les sapeurs-pompiers volontaires pourront-ils enfin bénéficier de cette bonification ?
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Quelque 200 000 sapeurs-pompiers volontaires s'engagent au quotidien, aux côtés de 42 000 professionnels. Il faut leur rendre hommage. Souvenons-nous de l'agression de Niccolo Scardi à Évian, il y a quinze jours.
Nous souhaitons protéger notre modèle. La loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2023 prévoit que les sapeurs-pompiers volontaires ayant accompli plus de dix ans de service bénéficient de trimestres de retraite, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État. C'est ce décret que nous attendons.
Dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile, nous avons repris ce dossier. Nous sommes favorables à ce que l'attribution de trimestres soit progressive et s'ajoute à des années complètes de cotisation. La concertation nécessite du temps.
En pratique, deux réunions interministérielles auront lieu cette semaine et la semaine prochaine pour trouver un accord sur la rédaction définitive du décret. L'objectif est une publication avant la fin juin, car les choses ont sans doute trop duré.
Mme Elsa Schalck. - Merci de cette réponse. Je ne doutais pas de la détermination du ministère de l'intérieur. Il est temps se mettre en adéquation avec ce que nous votons.
Projet de base aérienne de sécurité civile à Mont-de-Marsan
M. Hervé Gillé . - Une seconde base aérienne de sécurité civile à Mont-de-Marsan avait été annoncée à la suite des incendies dramatiques de l'été 2022 - c'était un souhait du président de la République, confirmé le 2 août 2023 par Gérald Darmanin. Cette annonce avait suscité une attente très forte dans les Landes et en Gironde, où s'étend le plus vaste massif de résineux d'Europe.
Or, nous avons récemment appris par courrier que ce projet n'était plus prévu. Ce désengagement soudain est incompréhensible. Pourquoi un tel changement, alors même que le dérèglement climatique accroît la fréquence et la violence des feux de forêt ?
Certes, la Gironde bénéficie du déploiement saisonnier de quatre avions Air Tractor et d'un hélicoptère bombardier d'eau, mais rien ne garantit leur maintien.
Pourquoi ce revirement ? Les moyens actuellement déployés seront-ils pérennisés ? Réévaluerez-vous l'opportunité de doter durablement le Sud-Ouest d'une implantation renforcée des moyens de la sécurité civile ?
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Lors des deux dernières saisons, des moyens aériens de la flotte de sécurité civile - un Dash, six Air-Tractor et un hélicoptère bombardier d'eau loués - ont été prépositionnés sur des aérodromes militaires de la zone concernée, accompagnés de toute la chaîne logistique nécessaire.
Ce prépositionnement estival, entre le 16 juillet et le 30 septembre 2024, a donné des résultats opérationnels très satisfaisants. Au total, ces moyens ont été engagés sur dix feux de forêt et de nombreux guets aériens. Le coût s'est élevé à 6,5 millions d'euros.
Ces détachements saisonniers seront reconduits pour 2025 et les années à venir. Ils pourront être complétés par d'autres moyens aériens. Ce dispositif agile et adaptable est piloté par un centre national de coordination avancé de sécurité civile.
Dans le contexte budgétaire actuel, les crédits d'investissement de la sécurité civile sont prioritairement orientés vers le renouvellement de la flotte d'aéronefs. La flotte d'hélicoptères est en cours de renouvellement pour 450 millions d'euros ; la flotte d'avions doit également faire l'objet d'une programmation budgétaire pluriannuelle pour être remplacée et renforcée.
Au-delà, le Beauvau de la sécurité civile est l'occasion de réfléchir à l'ambition capacitaire de nos moyens nationaux de sécurité civile et leur maillage territorial.
M. Hervé Gillé. - Vous confirmez donc l'abandon de la seconde base aérienne à Mont-de-Marsan. C'était pourtant une promesse du Président de la République et du ministre Darmanin.
Brigade de gendarmerie de Vivonne
M. Bruno Belin . - Je veux saluer le travail du colonel Assou, patron de la gendarmerie dans la Vienne, et les 550 gendarmes sous sa responsabilité.
Les sujets de préoccupation sont nombreux. La Vienne accueille notamment le centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne. Conçu pour 600 détenus, il en accueille 976... Cela implique des allers-retours, et fait peser sur la brigade de Vivonne la charge des enquêtes judiciaires. Ne faudrait-il pas créer une unité particulière chargée des questions de police judiciaire pour décharger la brigade de Vivonne ?
Les travaux dans les gendarmeries de Loudun et de Civray supposent de maintenir les ressources humaines sur le territoire et de dégager des moyens nouveaux. Une brigade nouvelle a été créée à Scorbé-Clairvaux l'année dernière ; quid de celle de Fontaine-le-Comte ? Aurons-nous les effectifs pour les faire fonctionner ?
Il y a besoin de ressources humaines et de nouveaux postes dans le département de la Vienne, monsieur le ministre.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Pour recentrer l'action des gendarmes et des policiers sur leur coeur de métier, un plan de transfert à l'administration pénitentiaire des missions de transfèrement et d'extraction judiciaires a été engagé en 2011. Il s'est accompagné du transfert de plus d'un millier d'ETP. La circulaire de juin 2024 réaffirme la volonté de limiter le recours aux gendarmes et aux policiers. Nous poursuivons l'optimisation des ressources en systématisant le recours aux visioconférences avec les magistrats.
Le surcroît d'activité induit par la présence d'un centre pénitentiaire est pris en compte dans le calibrage des effectifs. Depuis début 2025, la gendarmerie de Vivonne a assuré 62 transfèrements judiciaires ; elle assume également une activité de police judiciaire en lien avec le centre pénitentiaire. Outre la création de dix-sept postes depuis 2007, la brigade bénéficie d'un groupe d'appui judiciaire dédié, tenu par des réservistes opérationnels.
Dans ce contexte, il n'est pas envisagé de créer de brigade spécifiquement dédiée aux extractions judiciaires, mission qui n'est plus de la compétence du ministère de l'intérieur. De plus, dans le cadre du plan 239 brigades, les dix militaires de la future brigade de Fontaine-le-Comte pourront appuyer la brigade limitrophe de Vivonne.
M. Bruno Belin. - Dernièrement, un détenu de Vivonne a été transféré à la demande d'un magistrat pour une audition de quelques minutes à Toulouse, ce qui a nécessité quinze gendarmes. Facilitons donc les visioconférences ! J'ai pris note des dix postes créés à Fontaine-le-Comte : nous avons besoin d'unités supplémentaires autour de la maison d'arrêt de Vivonne.
Privatisation des lignes de bus de petite couronne
M. Fabien Gay . - Le processus de privatisation de la RATP s'est accompagné, sans surprise, d'une dégradation de la qualité du service et des conditions de travail. Pourtant, le conseil d'administration d'IDF Mobilités a voté le 10 avril une nouvelle vague de privatisation de 37 lignes de bus, au profit de Transdev et d'ATM ; en tout, 350 lignes sont concernées. À Paris et dans mon département, Transdev gérera, dès mai 2026, deux dépôts de bus et 19 lignes.
L'observatoire sur les impacts de ce processus, promis par Jean Castex, est resté lettre morte. Le projet avance sans évaluation sérieuse et sans égard pour les 70 000 signataires de la pétition Stop Galère ; il coûtera au bas mot 5 milliards d'euros aux usagers et usagères.
Rien n'oblige pourtant à cette privatisation fondée sur le moins-disant social. Cette logique imposée par IDF Mobilités, sourde aux revendications des élus locaux, des salariés et des usagers, n'a qu'un but : brader nos services publics d'intérêt général. Le pire reste à venir.
Avez-vous évalué les effets de la première vague de privatisation ? Allez-vous écouter ceux qui dénoncent la dégradation des conditions de travail et de l'offre de transport ? Comptez-vous mettre un terme à la vente à la découpe de la RATP et réaffirmer son statut public ? Bref, allez-vous suspendre ou cesser cette privatisation qui pénalise les villes et les quartiers les plus populaires, là où le service public garantit l'égalité en matière de desserte ?
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité . - Veuillez excuser Philippe Tabarot, retenu par la conférence Ambition France Transports.
L'ouverture à la concurrence des transports collectifs franciliens découle des engagements européens de la France. Des opérateurs privés de transport collectif sont déjà présents depuis des années dans de grandes métropoles françaises. L'ouverture à la concurrence a permis aux opérateurs français de conquérir de nouveaux marchés à l'international, ce qui implique un principe de réciprocité.
En Île-de-France, l'organisation des transports urbains relève non de l'État, mais d'Île-de-France Mobilités, qui s'est appuyée sur la première vague d'ouverture à la concurrence en grande couronne, le réseau Optile, pour préparer celle du réseau historique des bus parisiens.
L'attribution des lots mis en concurrence se fait sur la base de critères techniques, économiques et sociaux ambitieux, afin de garantir la qualité de service pour les usagers.
Les salariés de la RATP transférés aux nouveaux attributaires bénéficient d'un cadre social de haut niveau : la loi garantit le maintien de la rémunération nette, de la garantie d'emploi et du régime spécial de retraite de la RATP.
État des ponts
Mme Mireille Conte Jaubert . - En 2019, à la suite du drame de Gênes, une mission d'information du Sénat rendait un rapport alarmant sur nos ponts : plus de 25 000 étaient dans un mauvais état structurel, d'où un risque sécuritaire fort.
Le programme national Ponts Travaux, lancé en 2024, prolongé jusqu'en 2026 et doté de 55 millions d'euros, devait permettre aux collectivités d'engager les travaux nécessaires. Toutefois, les règles pour y prétendre s'avèrent toujours trop restrictives, interdisant à nombre de communes d'en bénéficier.
C'est le cas de la commune d'Hure, en Gironde, dont deux des quatre ponts nécessitent des travaux de consolidation. Le Cerema considère qu'elle est éligible, mais elle se heurte au critère financier : son devis, estimé à 12 200 euros, est inférieur au montant minimum des travaux, qui est de 40 000 euros. Selon l'Association des maires de France (AMF), les critères relatifs à la largeur des ponts, ou encore la complexité des montages des dossiers, empêchent également nos communes de recourir à ce dispositif.
Allez-vous assouplir les critères d'éligibilité et renforcer le soutien financier et humain pour nos communes ?
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité . - Le travail du Sénat sur la sécurité des ponts a mis en lumière le besoin d'accompagnement des petites communes. Le Gouvernement en a pris acte et a mis en place, en 2020, un programme national qui a permis à 14 800 communes de bénéficier d'une évaluation gratuite de leurs ouvrages, puis, en 2023, un guichet de subventions doté de 55 millions d'euros. Le montant des subventions accordées est à ce jour de 26,8 millions. Aucun dossier n'est donc bloqué faute de moyens.
La commune d'Hure n'a pas encore déposé de demande de subvention. Je l'incite à le faire : le Cerema peut l'aider grâce au dispositif SOS Ponts.
La constitution des dossiers et les critères d'éligibilité ont été assouplis, en lien avec l'AMF, pour être plus adaptés aux petites communes. Les demandes peuvent être déposées directement sur le site http://www.demarches-simplifiees.fr. Le seuil d'éligibilité a été réduit à 20 000 euros pour les murs de soutènement. Pour les ponts, il apparaît que les dossiers inférieurs à 40 000 euros sont parfois sous-estimés, ou ne relèvent pas de réparations structurelles, mais plutôt de réparations d'urgence. Néanmoins, le montant des travaux d'urgence peut être intégré au coût total de l'opération si des travaux de remise en état structurels sont engagés ensuite.
Sécurisation de la RN 248
M. Philippe Mouiller . - La portion de la RN 248 entre les communes deux-sévriennes de Granzay-Gript et Frontenay-Rohan-Rohan est très dangereuse : sur dix kilomètres, en ligne droite, quatre carrefours et deux intersections avec des départementales. Or les habitants sont amenés à traverser quotidiennement cet axe sur lequel le trafic est très dense.
Malgré 23 accidents, 13 décès, 31 blessés graves et 15 blessés légers au cours de la dernière décennie, rien n'a été fait. Pourtant, vos prédécesseurs ont reconnu le caractère prioritaire de cet axe, et le contrat de plan État-région (CPER) 2015-2020 préconise la sécurisation de la RN248 à hauteur de Frontenay-Rohan-Rohan, pour 16 millions d'euros - mais aucun aménagement n'a été entrepris.
À ma question orale du 22 février 2017, le ministre des transports de l'époque avait répondu être conscient de la nécessité d'un aménagement améliorant la gestion des flux des réseaux secondaires en organisant l'échange en un seul point avec la RN248 par un carrefour dénivelé. En 2018, Élisabeth Borne, à la tête du même ministère, disait avoir conscience des enjeux de sécurité et identifier deux carrefours avec le réseau secondaire départemental nécessitant des aménagements de sécurité.
Concrètement, que compte faire le Gouvernement pour faire avancer ce dossier ?
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité . - Vous connaissez l'attention que porte le ministre Philippe Tabarot à la sécurité des transports : c'est une priorité des services de l'État, gestionnaire des routes nationales. Des études sont régulièrement conduites pour décider d'éventuels aménagements en fonction des diagnostics et des priorités.
On déplore neuf accidents graves, dont trois mortels, sur la RN 248 au cours de la dernière décennie. Ils sont liés au comportement des conducteurs, non à l'infrastructure. Une étude de sécurité a néanmoins été réalisée et n'a pas identifié de besoin d'aménagement de sécurité majeur.
Le CPER 2015-2020 prévoyait en effet une opération d'aménagement de la RN248 sur la section comprise entre Granzay-Gript et Frontenay-Rohan-Rohan. Toutefois, dans le cadre d'un avenant à ce CPER, ce financement a été redéployé, en accord avec l'ensemble des partenaires, au profit d'autres opérations. Lors des discussions sur le CPER 2023-2027, cet axe n'a pas été jugé prioritaire, en accord avec la région Nouvelle-Aquitaine.
Néanmoins, l'État a réalisé depuis 2020 plusieurs travaux d'amélioration de sécurité : îlots, reprofilage de chaussée, renforcement de la signalisation, dispositifs de retenue, rénovation de chaussée, dispositifs d'alerte sonore. Le renouvellement de la signalisation directionnelle est également prévu. Soyez assurés de l'écoute du ministre Tabarot et de ses équipes.
Faits de violences sexistes et sexuelles au sein d'Air France
Mme Sophie Briante Guillemont . - Il y a trois mois, une enquête de Radio France révélait de graves faits de violences sexistes et sexuelles au sein de la compagnie Air France - des faits déjà connus de la direction d'Air France, des syndicats et de nombreux acteurs. Alors que l'État est actionnaire d'Air France à hauteur de 28 %, quelles mesures ont été prises ?
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité . - Le Gouvernement prend toute la mesure de la gravité des faits dénoncés. Dès le mois de février 2025, la direction d'Air France a été reçue au ministère des transports pour rendre compte de la situation et détailler les mesures correctrices qu'elle entendait mettre en oeuvre.
À l'issue de cette rencontre, la compagnie a annoncé un plan d'action renforcé : création d'une cellule d'écoute externe, confidentielle et accessible à tout moment ; rattachement direct à la direction des ressources humaines d'un service dédié à la lutte contre les discriminations, le harcèlement et les violences sexistes et sexuelles ; renforcement des dispositifs existants de prévention, d'accompagnement des victimes, mais aussi des sanctions disciplinaires ; enfin, généralisation d'actions de formation et de sensibilisation.
Ces mesures font l'objet d'un suivi. L'État, en tant qu'actionnaire, est très attentif au traitement des faits de violences sexistes et sexuelles, mais la responsabilité première incombe à l'employeur qui doit, conformément à la législation du travail, assurer la protection des victimes et prendre les mesures disciplinaires. Le contrôle du respect de ces obligations relève de l'inspection du travail.
Le Gouvernement est déterminé à garantir un environnement de travail respectueux et sûr pour l'ensemble des personnels d'Air France, comme pour les salariés de toute entreprise.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Si l'on peut se féliciter de ces mesures, j'espère qu'il ne s'agira pas de pure communication. Les victimes, nombreuses à me contacter depuis ma question écrite - restée sans réponse, d'où cette question orale - n'ont pas été valorisées mais plutôt incitées à se taire ; certaines sont en arrêt maladie, ou ont quitté la compagnie.
C'est aussi un sujet de sécurité aérienne. L'absence de protocole en cas d'agression sexuelle ou sexiste, en vol ou en escale, met aussi en péril les passagers.
Enfin, j'invite l'État et Air France à s'inspirer des pratiques d'EasyJet : le signalement de cas de harcèlement, dans le cadre du mécanisme Speak-Up, Speak-Out, provoque une mise au sol immédiate et une enquête interne.
J'aurai peut-être l'occasion de réinterroger le ministre des transports sur ce sujet.
Ligne nouvelle Paris-Normandie
M. Sébastien Fagnen . - Alors que se profile la fermeture complète, en 2028 ou 2029, de la ligne ferroviaire Paris-Évreux-Caen-Cherbourg, pour des travaux sur le remblai d'Apremont, symbole d'un sous-investissement ferroviaire chronique en Normandie, il est urgent de soutenir la ligne nouvelle Paris-Normandie (LNPN).
Ce projet d'intérêt national est vital. Le vieillissement des infrastructures et la densité du trafic entre les lignes normandes et franciliennes à partir de Mantes-la-Jolie rendent la liaison entre la Normandie et la capitale aléatoire, ce qui affecte les milliers d'usagers quotidiens.
La LNPN doit améliorer fréquence, régularité, ponctualité et temps de parcours. Elle permettra le désenclavement réel de la région et renforcera son dynamisme économique, notamment dans la vallée de la Seine, avec Haropa, et dans le Cotentin, avec le programme Aval du futur d'Orano.
Le projet revêt également un intérêt écologique majeur en favorisant le report modal vers des solutions décarbonées, tant pour les voyageurs que les marchandises. L'Île-de-France en bénéficierait également : les Yvelines dépendent déjà des trains normands. La libération du sillon ferroviaire améliorera la logistique et l'approvisionnement de la région.
Ce projet, soutenu par tous les gouvernements depuis quinze ans, a déjà mobilisé plus de 100 millions d'euros. Le 30 octobre 2024, le ministre François Durovray annonçait la nomination d'un nouveau préfet coordonnateur pour l'aménagement de la vallée de la Seine. Quelle impulsion le Gouvernement entend-il donner à ce projet structurant ?
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité . - Le Gouvernement reste pleinement engagé. La LNPN doit améliorer la desserte entre Paris, la vallée de la Seine et les grandes villes normandes, tant pour les voyageurs que pour le fret.
Les voies nouvelles libéreront de la capacité sur les lignes existantes, au bénéfice des mobilités du quotidien. Les préoccupations exprimées par la région Île-de-France sont légitimes et feront l'objet de réponses précises, conciliant besoins des usagers et qualité de vie des riverains.
La nomination par le Premier ministre de M. Serge Castel, délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine, a relancé la dynamique. Il a rencontré les élus concernés et présidera prochainement un comité de pilotage en présence du ministre des transports : ce sera un nouveau point de départ pour la LNPN.
Programme Petites villes de demain
M. Patrice Joly . - Le programme Petites villes de demain, lancé en 2020, a renforcé l'ingénierie territoriale des petites centralités et consolidé leur rôle structurant dans les territoires ruraux. Plus de 1 600 communes et intercommunalités, représentant 7 millions d'habitants, en ont bénéficié. Dans la Nièvre, près de 500 études ont été financées et 14 postes de chefs de projet créés grâce à un partenariat entre l'État, la Banque des territoires et le conseil départemental.
Pourtant, à l'heure où les collectivités rurales affrontent une crise financière aiguë - épargne brute en chute, endettement croissant, charges de centralité accrues -, l'avenir de ce programme reste incertain. Son arrêt est annoncé pour mars 2026, sans garantie de prolongation. Cette absence de perspective inquiète les élus locaux, car une interruption brutale compromettrait les avancées obtenues et fragiliserait durablement le dynamisme des petites villes.
Dans ce contexte de fortes contraintes budgétaires, le Gouvernement entend-il prolonger Petites villes de demain au-delà de 2026, et à quelles conditions ?
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité . - Le programme a été pensé dès l'origine pour s'achever en 2026, mais son utilité est reconnue. Il apporte un soutien essentiel en ingénierie, avec des chefs de projet financés à 76 % par l'État, des mesures thématiques cofinancées, un réseau d'échanges entre communes, et une dynamique de revitalisation locale. Plus de 353 000 logements ont ainsi été rénovés, pour un engagement de 3,7 milliards d'euros.
L'avenir du programme doit être construit collectivement. Une évaluation est en cours, menée par les sous-préfets à la ruralité et l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). Elle s'inscrit dans le cadre de mon tour de France de la ruralité. J'ai déjà rencontré les élus de 34 départements, dont le vôtre, pour nourrir cette réflexion.
M. Patrice Joly. - L'efficacité d'un programme repose sur la continuité de son financement. L'État doit éviter des économies de bouts de chandelle aux lourdes conséquences locales. La ruralité ne peut être une variable d'ajustement budgétaire. Elle incarne un pilier de la République et l'égalité des chances, que l'on vive en ville ou à la campagne.
Tombes abandonnées
Mme Else Joseph . - Ma question porte sur un sujet sensible : le respect dû aux morts, principe fondamental de notre civilisation, qui se traduit par l'entretien des lieux funéraires. C'est une mission obligatoire des communes, souvent lourde de contraintes, notamment lorsqu'il s'agit de reprendre des tombes abandonnées, faute de place dans les cimetières.
Ces reprises impliquent la construction d'ossuaires et des opérations d'exhumation. Or un flou juridique entoure les procédés admis pour le traitement des restes humains. Des entreprises utilisent des sacs à ossements, moins coûteux et moins encombrants que les reliquaires en bois, entièrement à la charge des communes. Cependant, un doute persiste sur la légalité de cette pratique, en raison de la confusion entre exhumations civiles, sur l'initiative des familles, et exhumations administratives, menées par les communes pour récupérer des concessions abandonnées.
Les élus souhaitent des instructions claires : ils veulent non pas cracher sur nos tombes, mais agir en conformité avec la loi, dans le respect des défunts, sans risquer ni irrégularités ni surcoûts ! Que prévoit le Gouvernement pour encadrer cette démarche essentielle, mais délicate ?
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité . - Vous évoquez un sujet à la fois sacré et complexe. Le droit en vigueur ne définit pas précisément les équipements autorisés lors des exhumations. Le code général des collectivités territoriales mentionne la possibilité de placer les corps dans un cercueil ou une boîte à ossements de dimensions appropriées lorsque le cercueil initial est détérioré. Aucune norme juridique ne régit spécifiquement les contenants utilisés.
Ainsi, les sacs à ossements, couramment employés par les opérateurs funéraires et certaines communes, ne sont pas interdits. Le Conseil national des opérations funéraires a estimé qu'ils peuvent être utilisés, à condition que la manipulation des restes se fasse dans le respect, la dignité et la décence.
Le dispositif n'est donc pas incompatible avec le droit. Nous pourrons envisager une communication plus claire à destination des maires.
Mme Else Joseph. - Merci pour ces précisions. Les contraintes pesant sur les maires ne cessent d'augmenter. Dans les Ardennes, la reprise de 17 sépultures a coûté 40 000 euros ; ailleurs, 50 tombes sont concernées. Votre soutien est indispensable.
Contrats d'assurances des collectivités territoriales
M. Pascal Martin . - Les collectivités territoriales et leurs syndicats rencontrent des difficultés croissantes pour assurer leurs bâtiments et flottes de véhicules. De nombreuses communes ne parviennent plus à souscrire de contrats d'assurance pour leurs biens publics, en raison de la montée des aléas climatiques, de la vétusté des infrastructures et de la hausse brutale des primes. Les bâtiments scolaires, infrastructures administratives ou techniques, véhicules de service ne sont parfois plus couverts. Des dizaines, voire des centaines de communes se trouvent plongées dans une précarité assurantielle préoccupante, remettant en cause leur fonctionnement quotidien et leur capacité à protéger leurs administrés.
Confrontées à cette situation ubuesque, les collectivités doivent être accompagnées, au moyen d'un fonds de soutien ou de réassurance publique, d'un assouplissement des règles de passation des marchés, ou d'une refonte des politiques tarifaires de l'assurance publique.
Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet qui affecte directement le coeur de l'action locale ?
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique . - Le 14 avril dernier, le Roquelaure de l'assurabilité des territoires s'est tenu sur l'initiative du Premier ministre, en présence d'élus locaux et d'assureurs, sur la base du rapport de MM. Dagès et Chrétien et du rapport d'information de M. Jean-François Husson.
Plusieurs facteurs expliquent les blocages : sous-tarification chronique du marché, faible culture du risque dans les collectivités, rigidité des appels d'offres, et hausse des sinistres liés aux événements climatiques.
Un décret et un arrêté limiteront prochainement les franchises en cas de catastrophe naturelle. Un guide d'achat d'assurances destiné aux collectivités sera publié avant l'été. Un réseau de référents locaux et des formations viendront renforcer la culture du risque. Enfin, une cellule d'accompagnement, présidée par le médiateur de l'assurance, sera mise en place dès cet été.
Des discussions sont également engagées sur un dispositif de partage du risque, afin de restaurer l'assurabilité des collectivités, renforcer l'attractivité du marché et contenir les coûts grâce à un retour de la concurrence.
M. Pascal Martin. - Il y a urgence. Les maires, sous contrainte budgétaire, attendent des dispositifs rapidement opérationnels.
Troisième programmation pluriannuelle de l'énergie
M. Jean-Gérard Paumier . - En février 2022, le Président de la République annonçait, à Belfort, une reprise en main de notre destin énergétique par la relance du nucléaire civil. La troisième programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), attendue pour 2023, devait concrétiser cet engagement. Pourtant, deux ans plus tard, le Gouvernement présente un texte par voie réglementaire, sans vote au Parlement.
Initialement, deux paliers étaient prévus : la construction de six, puis de huit nouveaux réacteurs. La PPE ne confirme aujourd'hui que le premier et reporte le second à une étude ultérieure, sans calendrier clair. Le Gouvernement souhaite-t-il vraiment relancer la filière nucléaire ?
Des territoires, comme la communauté de communes Chinon Vienne et Loire en Indre-et-Loire, attendaient avec impatience la publication de la liste des sites retenus, initialement prévue pour 2026. Ils déplorent le retard accumulé, source d'inquiétude pour la préparation des chantiers à venir.
Qu'est-ce qui motive ce recul ? Quelles sont les modalités de l'étude annoncée ? À quelle date sera publiée la liste des sites retenus ?
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique . - La stratégie énergétique du Gouvernement repose sur la relance du nucléaire civil. L'objectif reste la construction de six réacteurs, sur les sites de Penly, Gravelines et Bugey, et l'étude de huit réacteurs supplémentaires.
Sur les trois premiers sites, les débats publics sont achevés, les travaux préparatoires ont débuté à Penly en juillet 2024, et la décision finale d'investissement par EDF est attendue en 2026. Le soutien financier de l'État est en cours de finalisation et fera l'objet d'une notification à la Commission européenne.
La seconde phase est soumise à des études approfondies. Aucun site n'a encore été arrêté. Les critères retenus incluent l'acceptabilité locale, la faisabilité technique, la compatibilité avec le réseau électrique et la résilience au changement climatique. Ces études permettront de prendre une décision d'ici à 2026, sur la base d'une vision claire et soutenable.
M. Jean-Gérard Paumier. - L'annonce rapide des sites est essentielle. Les territoires concernés doivent pouvoir anticiper et se préparer, pour répondre à l'enjeu majeur de notre souveraineté énergétique.
Remise en cause des crédits de l'économie sociale et solidaire
M. Jean-Jacques Michau . - L'inquiétude est vive parmi les acteurs de l'économie sociale et solidaire (ESS). De 19,2 millions d'euros l'année dernière, les crédits destinés au soutien de ce mode de développement économique devaient augmenter de 30 %. Mais cette enveloppe, déjà sous-dimensionnée par rapport aux besoins des 200 000 entreprises du secteur, vient d'être remise en cause par le Gouvernement devant le Conseil supérieur de l'ESS, provoquant la colère des acteurs.
Ces crédits financent des structures de proximité qui soutiennent l'ESS : chambres régionales, dispositifs locaux d'accompagnement. Les collectivités territoriales sont aussi contraintes de réduire leurs financements. Résultat : les acteurs de l'ESS sont plongés dans l'incertitude, et 186 000 emplois sont menacés d'après l'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire. Un choc social est à craindre dès le second semestre de cette année.
Comment le Gouvernement entend-il répondre aux inquiétudes des acteurs de l'ESS devant ce qui s'apparente à un non-respect par l'État de ses engagements ?
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique . - Ma collègue Véronique Louwagie est très attachée à l'ESS, qui conjugue utilité sociale, ancrage local et innovation. Le 3 mars dernier, le Gouvernement a présenté une feuille de route sur neuf mois pour soutenir cette autre manière de faire de l'économie.
Dans un contexte budgétaire contraint, marqué par des gels importants sur tous les programmes, nous pouvons nous réjouir de la stabilisation des crédits de l'ESS pour 2025. Le projet de loi de finances initial prévoyait une baisse de 15 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 16,8 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Le texte issu de la CMP prévoyait une hausse de 10 millions d'euros, mais 7 millions d'euros de crédits gagés n'ont pu être levés.
Grâce à une gestion rigoureuse, le montant stabilisé pour cette année s'établit à 17,6 millions d'euros en AE et 20,5 millions d'euros en CP ; il permet de préserver des moyens d'action essentiels, dont le dispositif local d'accompagnement, qui soutient gratuitement 6 000 structures chaque année. Nous maintenons également les crédits des chambres régionales, qui jouent un rôle clé pour le secteur. La ligne budgétaire consacrée aux pôles territoriaux de coopération économique sera ajustée légèrement à la baisse, compte tenu de la sous-consommation historiquement constatée.
Malgré les contraintes, nous avons ainsi protégé les moyens de l'ESS. Mme Louwagie est à votre disposition pour approfondir avec vous la réflexion sur l'avenir du secteur.
Intégration des chambres d'hôtes dans le régime fiscal des meublés de tourisme
Mme Dominique Vérien . - La loi de 2024 relative aux meublés de tourisme soumet les chambres d'hôtes au régime fiscal des meublés de tourisme. Or cette assimilation ne tient pas compte des spécificités des chambres d'hôtes : elles ne proposent pas un logement entier, mais quelques chambres avec des prestations obligatoires, dans un cadre réglementaire strict.
L'abattement fiscal est abaissé de 71 à 50 % et le seuil de revenu annuel de 188 700 à 77 700 euros, ce qui menace la viabilité de nombreuses structures. C'est un frein pour le développement économique, l'attractivité et le désenclavement des zones rurales.
Une révision de ce dispositif est souhaitable, et le décret d'application à venir devrait introduire une distinction claire entre meublés de tourisme et chambres d'hôtes, permettant aux secondes de bénéficier d'un régime fiscal adapté à leurs spécificités économiques et réglementaires.
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique . - Par la loi du 19 novembre 2024, le législateur a souhaité mieux réguler l'offre de meublés de tourisme tout en permettant aux propriétaires de continuer à valoriser leur bien à travers des services spécifiques, grâce à une incitation au classement et à une reconnaissance du caractère particulier des activités de chambre d'hôtes.
Sur le plan fiscal, ces dernières bénéficient du régime micro-BIC dans la limite d'un chiffre d'affaires de 77 700 euros, avec un abattement de 50 %. Les gîtes ruraux, non définis en droit, sont considérés comme des meublés de tourisme ; ils bénéficient du même régime que les chambres d'hôtes lorsqu'ils sont classés. Les meublés de tourisme non classés bénéficient d'un abattement ramené de 50 à 30 % dans la limite d'un chiffre d'affaires de 15 000 euros.
Le Gouvernement a soutenu ce compromis trouvé en CMP, dans la mesure où il maintenait un abattement différencié pour inciter au classement. Le seuil de 77 700 euros paraît suffisamment élevé pour tenir compte de la situation des petits propriétaires de chambres d'hôtes ou de gîtes.
Les propriétaires de chambres d'hôtes ou de gîtes ruraux dont l'activité relève de la para-hôtellerie et qui supportent des charges supérieures à l'abattement de 50 % peuvent opter pour le régime réel.
Soucieuse de renforcer l'offre touristique, notamment en zone rurale, ma collègue Nathalie Delattre a lancé un groupe de travail sur le sujet. Par ailleurs, une mission parlementaire plus large sur l'agritourisme devrait être lancée.
Mme Dominique Vérien. - Je conteste l'assimilation des chambres d'hôtes aux gîtes. Dans les premières, un service hôtelier est rendu : ménage, petit-déjeuner. Les charges y sont très différentes de celles d'un gîte. Appliquer le même seul d'abattement me paraît donc injustifié. Quant au régime réel, il est beaucoup plus complexe, et les propriétaires de chambres d'hôtes rurales, qui s'occupent déjà de tout, n'ont pas besoin en plus de ce travail administratif.
Redevances liées aux concessions hydroélectriques
M. Stéphane Sautarel . - Nos 340 concessions hydroélectriques sont essentielles à notre mix énergétique.
Alors que des difficultés anciennes liées à la réglementation européenne se posent, le ministre Le Maire s'était engagé à trouver une issue avant la fin 2024. Il n'en a rien été. Un récent rapport parlementaire envisage trois orientations, le régime d'autorisation et la révision de la directive étant les plus prometteuses. Nous attendons avec impatience la position du Gouvernement.
S'agissant plus précisément des redevances, un système de délai glissant impose aux concessions échues, depuis 2020, de verser 40 % de leur bénéfice après impôt. Cette solution présente de nombreux inconvénients, notamment pour les investissements nécessaires sur les ouvrages, dont la programmation est perturbée et le financement rendu plus incertain. La disparition des délais glissants entraînerait celle de cette redevance spécifique, ce qui représenterait une perte directe non négligeable pour les collectivités territoriales. En 2023, le Gouvernement a modifié le calcul de la redevance, entraînant un manque à gagner et une imprévisibilité pour des collectivités déjà en proie à des difficultés financières croissantes.
Quel nouveau modèle de redevances et de répartition de leur produit allez-vous mettre en place et comment comptez-vous les valoriser au titre des aménités rurales ?
M. le président. - C'est une excellente question, qui se pose en Aveyron comme dans le Cantal...
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique . - Le code de l'énergie prévoit en effet une redevance spécifique pour ces concessions. Elle est calculée de façon forfaitaire, par rapport à un prix de marché.
La crise de l'énergie, en 2022, a entraîné plusieurs difficultés. Les prix sur le marché de l'électricité ont atteint des niveaux inédits, en sorte que les redevances dues ont été parfois décorrélées des revenus des producteurs. Des aménagements ont été mis en oeuvre par un arrêté du 3 août 2023.
L'État a mis en place un bouclier tarifaire pour protéger les consommateurs, dont les collectivités territoriales. La loi de finances pour 2023 a instauré un plafond pour la part reversée aux collectivités, fixé à 100 euros par mégawattheure, et les recettes supplémentaires ont été reversées au budget général pour participer à la protection de tous les consommateurs. Ce plafond a été calculé pour garantir aux collectivités un niveau de recettes stable à hydrologie constante, même dans les situations de marché les plus défavorables. Le manque à gagner reste donc théorique. Au reste, les prix de marché étant actuellement inférieurs au prix plafond, ce plafonnement ne joue plus.
S'agissant du renouvellement des installations, le code de l'énergie prévoit une affectation à hauteur d'un tiers pour les départements, un douzième pour les communes et un douzième pour leurs groupements. Il n'est donc pas exact de parler de perte directe non négligeable pour les collectivités.
M. Stéphane Sautarel. - Merci pour vos réponses. Selon les chiffres dont je dispose, les redevances versées aux collectivités ont baissé en 2023. Nous avons besoin de lisibilité et de prévisibilité.
Coordination régionale des classes de défense
Mme Gisèle Jourda . - Une coordination régionale des classes de défense paraît nécessaire. Ces classes sont des projets interdisciplinaires et pluriannuels menés à l'initiative d'une équipe enseignante en partenariat avec une unité militaire marraine. Elles sont une expression essentielle du lien armée-jeunesse. Dans l'Aude, la classe de défense du collège La Nadière de Port-La-Nouvelle est rattachée à la Marine nationale.
Le principal atout de telles classes est leur dimension citoyenne. Elles permettent aux élèves de mesurer l'importance des questions de défense et de sécurité nationale pour notre pays. Elles suscitent également des vocations.
Quelque 475 classes de défense regroupent 11 875 élèves et plus de 200 entités militaires. Mais il n'existe aucune coordination régionale entre ces structures. Or une telle coordination permettrait de créer un réseau territorial favorisant l'organisation d'événements, les retours d'expérience, l'échange de bonnes pratiques. Par ailleurs, il existe peu, voire pas, de données sur les classes de défense dans les lycées.
Comment pensez-vous favoriser la mise en place d'une coordination régionale de ces classes ?
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique . - Les classes de défense et de sécurité globale (CDSG) sont marrainées chacune par une unité militaire ou un corps en uniforme : c'est un dispositif emblématique de l'éducation à la défense.
Leur coordination est assurée par des trinômes académiques composés d'un représentant du rectorat, un de l'autorité militaire et un de l'IHEDN. Ce pilotage garantit la qualité du projet pédagogique et valorise les différentes unités qui maillent notre territoire et mènent par ailleurs bien d'autres actions d'animation territoriale - rallyes citoyens, formation d'enseignants à la défense.
Il existe donc bien une coordination à différentes échelles, et ces outils de pilotage peuvent encore être perfectionnés pour mieux accompagner les CDSG, en particulier dans la perspective de 2026, année des 400 ans de la Marine et du centenaire du Bleuet de France. Des réflexions sont en cours autour des synergies possibles.
Présidence de Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidente
La séance reprend à 14 h 30.
Mise au point au sujet d'un vote
Mme Sophie Briante Guillemont. - Lors du scrutin public n°289, Mme Véronique Guillotin souhaitait voter pour.
Acte en est donné.
Accord en CMP
Mme la présidente. - La commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
Convention internationale (Procédure simplifiée)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l'approbation de l'accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et les Nations unies portant sur les arrangements relatifs aux privilèges et immunités ainsi que d'autres questions afférentes aux réunions des Nations unies tenues sur le territoire français.
La conférence des présidents a retenu pour ce texte la procédure d'examen simplifiée. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à son adoption.
Le projet de loi est adopté définitivement.
Refondation de Mayotte (Procédure accélérée - Suite)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte et du projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte.
Demande de priorité
Mme la présidente. - La commission demande l'examen par priorité des articles 23 et 24, ainsi que des amendements portant article additionnel qui s'y rattachent, après les amendements portant article additionnel après l'article 10. Selon l'article 44, alinéa 6, de notre règlement, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
La priorité, acceptée par le Gouvernement, est ordonnée.
Discussion des articles
Article 1er (Rapport annexé)
Mme la présidente. - Amendement n°25 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Nous demandons un rapport dans les trois mois évaluant les multiples plans stratégiques auxquels ce rapport annexé a vocation à se substituer et dont le pilotage ne peut être jugé satisfaisant - je pense en particulier aux deux contrats de convergence. Ce travail serait l'occasion d'identifier les redondances, incohérences et lacunes dans la mise en oeuvre de ces plans. Il s'agit d'assurer la cohérence et la lisibilité de l'action publique à Mayotte.
Mme Agnès Canayer, rapporteur de la commission des lois. - Permettez-moi de prendre quelques instants pour exposer la position de principe de la commission des lois sur les amendements au rapport annexé, un document dépourvu de portée juridique et qui constitue la feuille de route du Gouvernement pour la période de refondation, soit jusqu'en 2031.
Nous avons émis un avis défavorable sur la grande majorité d'entre eux, soit qu'ils instaurent des mesures nouvelles non financées - et auraient été déclarés irrecevables s'ils avaient porté sur la partie normative du texte ; soit qu'ils fixent un calendrier de mise en oeuvre de telle ou telle mesure ; soit qu'ils demandent une étude sur la mise en oeuvre de tel ou tel engagement - pas moins de trente rapports sont demandés ; soit qu'ils alourdissent le processus de décision, notamment en prévoyant des consultations supplémentaires - n'entravons pas l'action de l'État, que nous souhaitons rapide.
Nous ne méconnaissons pas pour autant l'importance des sujets de fond soulevés. Il s'agit souvent d'amendements d'appel : le Gouvernement aura l'occasion d'apporter les précisions souhaitées.
Le présent amendement demande un état des lieux des plans stratégiques à Mayotte : conformément à notre position de principe, avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer. - Je reconnais dans cet amendement un attachement louable à l'évaluation de l'action publique. Mais l'heure n'est pas au bilan des stratégies passées. La Cour des comptes, dans son rapport de 2022 « Quel développement pour Mayotte ? », a déjà souligné déjà les lacunes - le mot est faible - des plans passés. La stratégie de refondation de Mayotte est en cours de définition sous l'égide du général Facon, qui rencontrera les quatre parlementaires de l'île. Je souhaite me concentrer sur l'action et souscris au cadre général posé par Mme la rapporteure pour notre discussion. Avis défavorable.
L'amendement n°25 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°114 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Le cyclone Chido a laissé la forêt mahoraise dévastée. Les trois quarts de sa surface sont ravagés, une surface qui avait déjà reculé de 24 % en trente ans. Plus de 40 % des espèces indigènes sont menacées, dont de nombreuses essences d'arbre.
La forêt représente encore 38,6 % de la surface de l'île, mais un effort de protection et de régénération s'impose, fondé sur un diagnostic écologique.
Or le rapport annexé ne comporte pas de garanties suffisantes en matière de préservation des espaces naturels et agricoles. L'environnement ne doit pas être sacrifié ou oublié. Il faut travailler avec le conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte et les associations locales à un diagnostic et une feuille de route pour protéger les zones boisées et reboiser celles qui doivent l'être.
Mme la présidente. - Amendement n°58 de Mme Guhl et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Chido a bouleversé les équilibres écologiques déjà fragiles de Mayotte. La forêt, en particulier, a subi des dégâts considérables. Les risques sont grands d'invasions biologiques, de déstabilisation des sols et d'appropriations illégales.
La tentation est d'aller vite, de replanter partout, de faire du chiffre. Bien sûr, il faut reboiser, mais pas de manière précipitée et sans méthode. C'est pourquoi nous proposons un diagnostic écologique précis, distinguant notamment les zones aptes à se renouveler seules et celles qui ont besoin d'être reboisées, avec des essences endémiques adaptées. Cette stratégie devra s'accompagner d'un renforcement des moyens de la police de l'environnement.
C'est tout un écosystème qui doit être restauré ; faisons-le avec méthode et dans le respect du vivant.
Mme la présidente. - Amendement n°133 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Cet amendement reconnaît le rôle du conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte et souligne la nécessité de lutter contre les espèces exotiques envahissantes.
D'autre part, nous prévoyons un diagnostic écologique préalable à la définition de la stratégie de restauration des écosystèmes forestiers, qui devra reposer sur des essences endémiques, en lien avec les pépinières locales en cours de création.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Le cyclone et la tempête ont fortement endommagé la forêt mahoraise. Il convient de restaurer son équilibre, en liaison avec les spécialistes. Avis défavorable à ces trois amendements qui alourdissent les procédures.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je partage l'avis de la rapporteure, mais tiens à apporter quelques précisions.
Une grande partie de la forêt mahoraise a été ravagée, perturbant de nombreux écosystèmes ainsi que le grand cycle de l'eau.
Un comité de pilotage associant le conseil départemental, la Direction de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt (DAAF) de Mayotte, l'ONF et le conservatoire du Mascarin est à pied d'oeuvre pour élaborer une stratégie de reboisement. Il s'agit de ne replanter que là où c'est nécessaire.
La lutte contre les espèces exotiques envahissantes est une priorité bien identifiée par la préfecture, qui a renforcé les contrôles à l'aéroport alors que les risques sont accrus par les importations de matériaux végétaux pour la reconstruction.
Je sollicite le retrait de ces amendements ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n°114 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos58 et 133.
Mme la présidente. - Amendement n°26 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Nous avons besoin de précisions sur les moyens humains et techniques, ainsi que le calendrier, du « rideau de fer » annoncé en février 2024 par Gérald Darmanin, alors ministre de l'intérieur, pour renforcer la lutte contre l'immigration clandestine. Cette étude devra se fonder sur un rapport de la direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes du ministère de l'intérieur analysant les besoins de l'île en matière de surveillance et d'interception.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - La lutte contre l'immigration clandestine est centrale pour la refondation de Mayotte. Les moyens du « rideau de fer » sont donc un enjeu essentiel. Mais cet amendement est avant tout un appel au Gouvernement : avis défavorable, car il instaurerait des contraintes supplémentaires.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Monsieur Omar Oili, je donnerai un avis favorable à d'autres amendements que vous avez déposés... (Sourires)
Vous faites référence à un document technique préparatoire, non communicable ; celui-ci ne vous apprendrait rien de plus que ce qui figure dans ce rapport annexé. La direction des entreprises et des partenariats de la sécurité et des armes pourra vous recevoir pour répondre à vos questions.
Le « mur de fer » consiste à réaliser 35 000 éloignements, à renouveler nos radars, à assurer six navires à la mer par 24 heures, à renforcer les coopérations en matière de renseignement, à bâtir un centre de rétention administrative (CRA) de 140 places et à signer des accords internationaux sur les laissez-passer consulaires - c'est une énumération à gros traits. Bref, plus de moyens pour l'ensemble des services de sécurité intérieure.
Avis défavorable à votre amendement.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Si le rapport annexé est une feuille de route sans valeur normative, on s'attend à y voir figurer des moyens en regard des objectifs fixés - un peu plus loin dans le rapport, des moyens policiers sont d'ailleurs précisés. Alors que l'enjeu migratoire est central, il est normal de s'interroger sur les moyens humains et techniques qui seront mobilisés. C'est notre crédibilité qui est en jeu : ce rideau de fer ne doit pas se révéler un rideau de fumée ! (On apprécie la formule.) Certains membres du RDPI voteront cet amendement.
M. Saïd Omar Oili. - On nous a parlé d'une base navale pour assurer le rideau de fer. À la lecture du rapport annexé, il s'agirait plutôt d'un ponton. Les Mahorais ont besoin de clarifications sur les moyens engagés par l'État pour les protéger. Il faut aussi comprendre pourquoi, malgré les mesures prises, l'immigration ne baisse pas.
L'amendement n°26 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°150 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Nous devrions disposer depuis bien longtemps d'une évaluation objective des résultats des réformes passées. On nous a souvent expliqué que les restrictions de droits étaient nécessaires pour maîtriser les flux migratoires, mais aucune donnée n'établit cette relation de cause à effet. Nous avons encore durci les règles il y a quelques mois, sans même savoir s'il existe le moindre lien entre ces mesures dérogatoires et les objectifs visés. Cet amendement prévoit un rapport traitant des conséquences de ces réformes sur les droits des enfants.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Votre amendement est en grande partie satisfait par l'article 2 bis, introduit en commission : nous demandons un rapport sur les impacts des mesures de lutte contre l'immigration. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°150 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°140 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - L'immigration est une réalité qu'on ne peut ignorer, mais le volet préventif est essentiel. Or le rapport annexé n'insiste pas suffisamment sur cette dimension. Pourtant, le dernier rapport spécial du Sénat sur la mission « Aide publique au développement » estime qu'il ne faut pas découpler nos ambitions en matière de solidarité et notre politique migratoire.
Mme la présidente. - Amendement n°163 de Mme Canayer, au nom de la commission des lois.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Amendement rédactionnel.
Avis défavorable sur l'amendement n°140 rectifié. La France accorde à l'Union des Comores 150 millions d'euros par an depuis 2019 dans le cadre du plan France-Comores.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Avis favorable à l'amendement n°163.
Oui, l'aide publique au développement est un outil essentiel pour lutter contre les causes profondes de l'immigration, ainsi que les inégalités et la pauvreté. Elle est aussi un levier au service de notre politique migratoire : elle doit ainsi pouvoir être revue à la baisse en cas de mauvaise coopération. C'est le sens du courrier adressé en juillet 2024 par les ministres de l'intérieur et des affaires étrangères au directeur général de l'Agence française de développement (AFD).
La loi de finances pour 2025 ayant réduit les crédits, il est plus que jamais nécessaire de prioriser notre action ; la qualité de la coopération migratoire est un des critères en fonction desquels l'AFD doit ajuster la conduite de ses programmes.
Avis défavorable à l'amendement n°140 rectifié.
L'amendement n°140 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°163 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°27 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Mayotte est le seul territoire de la République où sont délivrés des titres de séjours territorialisés. Profondément dérogatoire au droit commun, cette exception n'est plus acceptable.
La concentration sur un territoire exigu de personnes en situation régulière mais soumises à une forme de confinement migratoire contrevient au principe d'égalité devant la loi et exerce une pression insoutenable sur les services publics.
La suppression de ce dispositif est un impératif républicain et humain. Elle est une revendication très forte des Mahorais et de l'ensemble de la classe politique de l'île. Ne pas en tenir compte serait une grave faute politique, qui ne ferait qu'alimenter la défiance.
En février 2024, alors que Mayotte connaissait des grèves violentes, Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur, s'était engagé sur le tarmac de l'aéroport à supprimer les cartes de séjour territorialisées si le droit du sol était durci. Le droit du sol a été durci : qu'attend-on pour supprimer l'aberration des titres territorialisés ?
M. Olivier Bitz, rapporteur de la commission des lois. - Avis défavorable. On ne peut revenir sur une disposition normative par un amendement au rapport annexé. Nous en débattrons lors de l'examen du titre II. En outre, la commission des lois a prévu, de manière plus ambitieuse, un rapport sur l'ensemble des mesures dérogatoires, d'ici trois ans - ce qui laissera le temps d'apprécier les effets des mesures récentes en matière de droit du sol. Alors que nous essayons de tarir les flux, n'envoyons pas de mauvais messages.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - En effet, nous reviendrons sur cette question à un stade ultérieur de la discussion.
Des mesures spécifiques ont été nécessaires pour réduire l'attractivité de Mayotte. Permettre de quitter rapidement l'île pour rejoindre le continent européen ou La Réunion ne ferait que renforcer cette attractivité, et la pression migratoire locale en serait exacerbée.
Les cartes de résidents ne sont pas concernées. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour peuvent solliciter une autorisation spéciale pour entrer dans l'espace Schengen. Certaines personnes sont dispensées de faire cette démarche.
Nous allons mener une évaluation globale de tous les dispositifs dérogatoires.
Je ne suis pas le meilleur porte-parole de l'ancien ministre de l'intérieur et des outre-mer, mon cher collègue Gérald Darmanin, mais sa déclaration faite sur le tarmac de l'aéroport est souvent tronquée. Il visait une réforme constitutionnelle du droit du sol - à laquelle, vous le savez, je suis pour ma part opposé.
Mme Corinne Narassiguin. - Le rapport annexé mentionne bien des objectifs politiques. Pourquoi ne pourrait-on pas y ajouter que la suppression des titres de séjour territorialisés fait partie des objectifs de la refondation de Mayotte ? On ne peut considérer que le régime dérogatoire actuel pourrait être maintenu ad vitam aeternam. La proposition de loi durcissant le droit du sol est récente, mais les titres territorialisés existent depuis longtemps ! Il n'est plus possible de repousser sans cesse cette évolution nécessaire.
Mme Salama Ramia. - Mayotte est le département le plus pauvre de France mais l'île la plus riche de la région, et ce sera toujours le cas. Invoquer le risque d'attractivité est donc un mauvais prétexte.
Par sa déclaration, le ministre de l'intérieur a donné un espoir à la population. Les choses ont été écrites noir sur blanc : durcissement de la loi, rideau de fer, suppression des visas territorialisés. Il faut respecter les Mahorais ! Ils se sentent aujourd'hui trahis.
L'amendement n°27 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°57 de Mme Guhl et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Le rapport annexé doit mentionner l'application du programme national de résorption des bidonvilles et des dispositions de l'instruction du 25 janvier 2018 dans les outre-mer, dont Mayotte. Il s'agit de dépasser la méthode centrée sur les évacuations pour privilégier l'accompagnement des habitants et l'accès aux droits. La résorption des lieux de vie informels dépend de la qualité de l'accompagnement et de l'accessibilité des logements sociaux. Les expulsions répétées répondent à une logique de court-terme contre-productive. Nous avons besoin d'un travail de fond, mené dans la durée, pour améliorer les conditions de vie et l'accès aux droits.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Il n'appartient pas au législateur d'entrer dans les conditions d'application d'une circulaire. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°57 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°87 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - La précarité des logements à Mayotte est un défi majeur. Les opérations Wuambushu et Place nette ont été peu efficaces pour résorber l'habitat illégal. Les élus mahorais doivent être associés à la mise en oeuvre de l'opération d'intérêt national (OIN) annoncée pour lever les blocages administratifs et stopper la prolifération des constructions illégales.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Associer les élus mahorais est fondamental et nous avons relayé votre demande auprès du Gouvernement, avec succès. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°87 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°91 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Le volcan sous-marin Fani Maore est à l'origine d'une activité sismique affectant Mayotte depuis sept ans. La veille est assurée pour l'heure par l'observatoire du Piton de la Fournaise. Compte tenu des risques pour la population, il faut une équipe spécifique à Mayotte.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Qu'en pense le Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Votre amendement est satisfait : le réseau de surveillance volcanologique et sismologique de Mayotte (Revosima) assure ce travail depuis plusieurs années et travaille à la définition d'indicateurs d'alerte. Dans le chapitre « Protéger Mayotte » du rapport du général Facon, les risques naturels sont pris en compte au même titre que les enjeux sécuritaires. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°91 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°92 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Tirons les conséquences des défaillances de l'organisation des premiers secours lors du cyclone Chido. Le pré-positionnement de moyens nationaux de sécurité civile est indispensable. Nous prévoyons donc la création sur l'île d'une réserve nationale de sécurité civile.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Il n'appartient pas au législateur de se prononcer sur le déploiement des moyens de l'État. C'est à lui d'obtenir les résultats que nous attendons de lui. Nous serons attentifs au respect des crédits prévus pour l'outre-mer par la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi). Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Pas moins de 111 sapeurs-pompiers et militaires de la sécurité civile ont été déployés 48 heures avant le cyclone. Ils ont déblayé les routes, ouvrant la voie à l'intervention des premiers secours, vacciné les populations. Je salue l'engagement de tous ces professionnels, dont le nombre a été jusqu'à 800. Plusieurs centaines de sapeurs-pompiers est encore présente sur place. La stratégie du général Facon intégrera pleinement la sécurité civile. Avis défavorable.
L'amendement n°92 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°93 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Nous proposons que le Gouvernement transmette au comité de suivi, avant le 1er mars prochain, un état des lieux des plans Orsec et des préconisations d'évolution.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Il faut tirer tous les enseignements de la crise Chido en matière de sécurité civile. La mise en place du plan Orsec cyclone est en cours ; des plans Orsec volcan et tsunami sont prévus. Nous devons aussi développer une culture de la prévention et de la gestion de crise à Mayotte, comme à La Réunion et aux Antilles. Avis favorable.
L'amendement n°93 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°28 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Le rapport annexé fixe un principe de mise en adéquation du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) avec les besoins exprimés par les autorités locales. Fixons un objectif calendaire, sans quoi cet engagement n'aura que peu de valeur. Les engagements pris doivent se traduire en actes, notamment pour renforcer la lutte contre la délinquance.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - La commission s'en remet à l'avis du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Que j'aime à entendre cette phrase ! (Sourires)
J'entends votre impatience à voir les conditions de sécurité s'améliorer à Mayotte. Je le rappelle, six escadrons de gendarmerie sont présents sur le territoire, en plus des forces habituelles, et adoptent une nouvelle approche. Cependant, le week-end dernier encore, des violences inacceptables ont eu lieu.
La prévention de la délinquance doit s'inscrire dans la durée. Le bon calibrage des moyens à mobiliser est difficile. Je laisse la main au préfet Bieuville sur ces questions.
Avis favorable.
L'amendement n°28 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°29 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Le Gouvernement prend des engagements si ambitieux en matière d'immobilier judiciaire qu'ils nous paraissent peu réalistes : cité judiciaire et centre éducatif fermé avec un début des travaux en 2025, et un deuxième centre pénitentiaire avec un début des travaux en 2027.
Cet amendement donnera l'occasion au Gouvernement de préciser les choses. Nous demandons de communiquer au comité de suivi un calendrier prévisionnel et une programmation budgétaire dans les trois mois suivant la promulgation de la loi.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - La commission a repris l'amendement que vous avez proposé sur la mise en place d'un comité de suivi, mais laissons ce dernier organiser son travail. Avis défavorable, même si nous partageons l'exigence d'un suivi rigoureux de la programmation.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°29 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°162 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Cet amendement prévoit la réalisation d'une étude identifiant un lieu propice à la maintenance, par la marine nationale, des navires intercepteurs.
Concernant la base navale, il s'agit bien de créer un ponton à Mtsamboro, d'un chantier naval et d'un soutien au poste de commandement de l'action de l'État en mer.
Voilà du concret. Il nous faut une étude supplémentaire.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Le Gouvernement précise lui-même sa feuille de route ; nous ne pouvons qu'y être favorables.
L'amendement n°162 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°30 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Nous précisons la durée d'engagement du bataillon temporaire de reconstruction de l'île, si précieux pour Mayotte. Celui-ci doit être maintenu jusqu'au 31 décembre 2026.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Cet amendement me donne l'occasion de saluer l'engagement extraordinaire des militaires. Avis défavorable, néanmoins, car il n'appartient pas au législateur de se prononcer sur la durée de déploiement des forces armées.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Par cet amendement, vous reconnaissez combien l'État, à travers ses forces armées, est mobilisé aux côtés des Mahorais. Ce bataillon a été un des symboles de cet engagement rapide.
J'ai entendu le maire de Mamoudzou dire qu'il ne voyait rien venir en matière de reconstruction - pourtant, quelques jours auparavant, j'étais à ses côtés pour voir le bataillon remettre en état une halle sportive ; il y a dû avoir un oubli...
Il n'y a pas lieu de borner ce déploiement. Faisons confiance à nos forces armées, qui resteront tant que leur présence sera nécessaire. Le ministre des armées saura assurer un déploiement cohérent des forces. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Rachid Temal. - Nous entendons ces arguments. Mais beaucoup à Mayotte s'interrogent sur les engagements de l'État. Symboliquement et politiquement, il serait important d'inscrire ce déploiement des militaires dans le rapport annexé.
L'amendement n°30 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°59 de Mme Guhl et alii.
M. Daniel Salmon. - L'on prévoit la construction d'une deuxième usine de dessalement. C'est utile, mais attention à respecter le temps de la concertation. L'implantation de l'usine ne peut se faire sans prendre en compte l'impact sur les milieux locaux et la population. Cette usine est située dans un lagon fermé, à proximité de deux sites marins à protection forte. La saumure rejetée sera deux fois plus salée que l'eau de mer, avec des conséquences sur les mangroves, les herbiers, les coraux et les animaux marins, tous très sensibles aux variations de salinités. Par précaution, il faut envisager un rejet en dehors du lagon. Les associations environnementales ont interpellé le préfet et regrettent de ne pas avoir été suffisamment associées.
Cet amendement a été travaillé avec Réserves naturelles de France.
Mme la présidente. - Amendement n°94 M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - La construction d'une seconde usine de dessalement vient de recevoir un avis négatif de l'autorité environnementale. Aussi faut-il envisager un site alternatif.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Il ne nous appartient pas de nous prononcer sur l'implantation de la seconde usine de dessalement. Nous n'avons pas les moyens d'arbitrer un tel point. Faisons confiance à la procédure administrative et aux recours possibles. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Vous semblez remettre en cause l'implantation de l'usine de dessalement à Ironi Bé.
Quelques précisions. Le dossier du projet a été mis en consultation en 2024. Le parc naturel marin de Mayotte a émis un avis conforme le 13 novembre 2024, avec des réserves, toutefois. Le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) a émis un avis défavorable le 12 décembre 2024.
En raison de la crise de l'eau, un arrêté d'urgence civile a permis de raccourcir les délais.
Pour garantir un démarrage des travaux en 2025, pour une mise en service au printemps 2027, un arrêté d'autorisation des travaux terrestres a été pris, indiquant que l'étude d'impact, qui concerne les enjeux marins et les rejets de saumure, sera complétée pendant les travaux par un état des lieux à jour avant travaux. L'arrêté a été consolidé par un avis conforme de la ministre de la transition écologique, le 17 mars 2025, à la suite de l'avis défavorable du CNPN.
Des arrêtés complémentaires permettront la mise en exploitation de l'usine de dessalement. Les compléments seront centrés sur les caractéristiques du projet avant exploitation.
Le dossier a été mis à la consultation du public du 20 mars au 4 avril dernier.
Conformément à l'avis conforme de la ministre, un comité de suivi devra être mis en oeuvre et répondra aux demandes complémentaires sur les impacts sur le milieu marin.
Avis défavorable.
M. Marc Laménie. - La biodiversité est un enjeu important. Mais le rapporteur et le ministre ont insisté sur le volet humain : 30 % de la population n'a pas accès à l'eau potable. Pas moins de 730 millions d'euros d'investissements sont programmés dans ce domaine. Le groupe Les Indépendants suivra l'avis du rapporteur.
M. Saïd Omar Oili. - Il y a une incompréhension : je n'ai jamais dit qu'il ne fallait pas de deuxième usine de dessalement. Je veux prendre des mesures de précaution au cas où elle ne pourrait être construite à Ironi Bé. Notre amendement est différent du précédent.
M. Daniel Salmon. - Il n'est pas question d'interférer dans une procédure en cours - avec l'A69, on a vu que d'autres n'avaient pas les mêmes précautions... Cet amendement est d'appel : évitons des catastrophes parfois annoncées.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je n'ai pas dit que vous étiez contre, monsieur le sénateur Omar Oili. Je suis d'accord avec vous : nous devons maîtriser ce processus.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Je suis surprise des avis tranchés sur ce sujet. Le besoin en eau des Mahorais est fondamental, et les associations écologistes crient au scandale.
Il existe des solutions alternatives, comme non pas rejeter le sel, mais l'utiliser pour réaliser du sel industriel, utile pour désinfecter les piscines de l'île Maurice à la place du chlore. Transformons un problème en opportunité !
L'amendement n°59 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°94.
Mme la présidente. - Amendement n°60 de Mme Guhl et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Nous précisons le plan Eau Mayotte dans le rapport annexé.
Aucune collectivité mahoraise n'a entamé le recensement des personnes sans accès satisfaisant à l'eau potable, diagnostic pourtant prévu par le code général des collectivités territoriales.
Environ 30 % des Mahorais ne sont pas raccordés à l'eau ; les bornes-fontaines deviennent essentielles, car elles sont le seul point d'accès pour les habitats précaires.
Il est indispensable de créer un maillage plus étroit des bornes-fontaines, avec plus de points de vente des cartes. Les seize structures France Services pourraient y contribuer.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'accès à l'eau est un sujet majeur ; le rapport annexé en fait un axe fort de l'action de l'État.
N'en rajoutons pas sur tous les sujets. À trop vouloir demander à l'État, nous risquons qu'il ne puisse pas tenir sa feuille de route.
Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°60 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°95 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Nous apportons des précisions sur le suivi du plan Eau Mayotte : il faut un calendrier des travaux de sécurisation de l'usine de dessalement, et le plan doit être concerté avec les élus locaux.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable à la multiplication des injonctions au Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°95 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°61 de Mme Guhl et alii.
Mme Mathilde Ollivier. - Nous réaffirmons une priorité : garantir l'accès à l'eau potable dans le respect des principes du service public. L'égalité territoriale exige un accès identique à ces services partout sur le territoire. Or à Mayotte, l'accès est très différencié.
Il faut garantir l'adaptabilité et la continuité du service. Or les tours d'eau organisent des coupures programmées. Les bornes-fontaines sont souvent hors service. Après le cyclone, les distributions de bouteilles ont été inéquitables. Les personnes précaires, faute de documents administratifs, en ont été exclues.
Face aux coupures, les habitants se tournent vers des sources dangereuses ou des rivières, sources de problèmes sanitaires graves.
Développons des solutions alternatives sécurisées d'accès à l'eau. Personne ne doit être laissé de côté.
Mme la présidente. - Amendement n°112 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Notre amendement rejoint le précédent, en prévoyant un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d'eau potable, pour satisfaire aux enjeux sanitaires, d'humanité et de respect des valeurs de la République.
Nous ne pouvons pas réduire l'habitat informel sans développer un habitat digne, avec un accès aux infrastructures. Pas moins de 40 % des logements sont en tôle et 95 % d'entre eux manquent de toilettes, de douches ou d'eau courante. Quand tout fonctionne, on produit entre 43 000 et 44 000 m3 d'eau ; il manque entre 3 000 et 4 000 m3 pour satisfaire aux besoins.
Dans quel département, dans quel territoire du continent accepterait-on de distribuer aux citoyens des cartes prépayées pour accéder à l'eau ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Nous estimons que le plan Eau Mayotte satisfait une grande partie de vos demandes. Pour ce qui ne serait pas satisfait, avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le plan Eau Mayotte prévoit un financement des investissements par l'État à hauteur de 210 millions d'euros pour 2024-2027, sur un total de 500 millions d'euros.
Les sixième et septième campagnes de forage auront lieu, fournissant 12 000 m3 par jour. L'usine d'Ironi Bé fournira 10 000 m3 par jour. La construction de l'assainissement de Koungou est en cours, et nous rénovons ou construisons des stations d'épuration.
Une mission d'inspection interministérielle est en train d'évaluer les dégâts de Chido et le montant des investissements à consentir.
Il faudra avancer sur l'objectif « un foyer, une cuve de récupération des eaux de pluie », là où les raccordements n'existent pas.
Des études sont lancées sur l'utilisation de solutions alternatives, comme la récupération de l'eau atmosphérique et les unités mobiles de chloration, pour garantir l'accès à l'eau en cas de sécheresse aggravée.
Il y aura encore des tensions, jusqu'en 2027, en attendant l'usine de dessalement et la retenue collinaire. Nous devrons rester très vigilants.
Mentionner dans le rapport annexé la récupération d'eau de pluie et les solutions alternatives me semble pertinent. Mais je m'interroge sur le plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d'eau potable, alors que le plan Eau Mayotte existe déjà.
Sagesse sur l'amendement n°61 et demande de retrait de l'amendement n°112.
M. Saïd Omar Oili. - Monsieur le ministre, il est normal que les acteurs de l'eau soient destinataires du rapport final de la mission d'inspection. La transparence doit être une règle impérative en la matière, notamment avec les collectivités locales.
Nous n'avons jamais eu le rapport...
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Monsieur le sénateur, je suis attentif à la transparence. Glasnost et perestroïka pour Mayotte - pour ceux qui ont une culture soviétique... (M. Patrick Kanner sourit.)
M. Rachid Temal. - Cela s'est mal terminé !
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le rapport est en cours de finalisation. Il n'y a aucune raison qu'il ne soit pas disponible.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, les amendements nos61 et 112, mis aux voix par assis et levé, ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°96 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Nous proposons que le Gouvernement établisse une étude sur l'enfouissement du réseau électrique de Mayotte, pour le rendre plus résilient. Cette étude sera transmise au comité de suivi prévu par le projet de loi.
Il faudra articuler cet enfouissement du réseau électrique avec la mise en place du très haut débit.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Après l'accès à l'eau, voici l'accès à l'électricité. Le rapport annexé prévoit des études au cas par cas. Une étude généralisée alourdirait les procédures. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°96 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°24 de Mme Jacques.
Mme Micheline Jacques. - Cet amendement complète le volet pêche et agriculture du rapport annexé. La création d'un comité régional des pêches et des élevages marins est une demande forte du secteur. L'association préfiguratrice est une première étape que l'État doit soutenir.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis favorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'État soutient la demande des professionnels, car la structuration de la filière pêche est indispensable.
Cette structuration implique la création d'un tel comité à l'horizon 2027, et l'État soutiendra la structure préfiguratrice.
Le comité devra d'abord recenser les pêcheurs professionnels et poursuivre leur professionnalisation.
L'amendement n°24 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°123 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Cet amendement prévoit que les recettes liées aux redevances des armateurs seychellois constituent des fonds prioritaires pour le développement de la filière pêche mahoraise.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Comme je l'ai dit à Micheline Jacques, l'aide à la constitution de la filière pêche est une priorité du Gouvernement. Les fonds seront par exemple orientés vers la formation. Il est urgent que les professionnels produisent une expression des besoins détaillée.
Votre amendement va dans le bon sens et mérite d'être soutenu, même si d'autres aides doivent être mobilisées, comme le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture (Feampa). Avis favorable.
L'amendement n°123 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°117 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Cet amendement met fin aux classes itinérantes. Le droit à la scolarité est mis à mal à Mayotte ; il manque 1 200 classes et des maires refusent des inscriptions. Quelque 9 % des mineurs ne sont pas scolarisés. Sans scolarisation, on ne pourra les sortir de la précarité.
L'État a bricolé pour pallier le manque de classes : système de rotations scolaires, soit deux jours d'enseignement par semaine, et des classes itinérantes, qui représentent une demi-journée de classe par semaine et par élève. L'accueil des enfants français est priorisé, ce qui est une atteinte au principe d'égalité. L'État a été condamné à ce titre. Faisons en sorte que d'ici à 2031 il n'y ait plus de classes itinérantes.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - La question scolaire est centrale et primordiale. Le rapport annexé prévoit de mettre fin aux rotations des classes d'ici à 2031 ; votre amendement ajoute la fin des classes itinérantes. Avis favorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Nous traiterons de ce sujet à l'occasion d'un autre amendement.
Plus de 900 emplois d'enseignants du premier degré ont été créés entre 2019 et 2024 ; près de 80 postes de professeurs des écoles seront créés à la rentrée scolaire de 2025.
Je n'ignore pas que le nombre d'écoles nécessaires à la scolarisation de tous les enfants n'est pas suffisant. Je précise que le premier degré relève de la compétence des communes.
L'État a signé une convention quadripartite en juin 2021 pour accompagner les communes dans la construction d'écoles. Les classes itinérantes sont un dispositif d'urgence qui n'a pas vocation à perdurer. Quelque 1 200 classes sont nécessaires pour sortir des rotations dans le premier degré ; c'est 700 au collège, 800 au lycée. L'effort à fournir pour atteindre nos objectifs en 2031 est très important.
Sagesse.
L'amendement n°117 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°119 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Cet amendement lutte contre les pratiques de certains maires, qui refusent l'inscription de jeunes enfants n'ayant pas la nationalité française. Il s'agit de faire appliquer le décret du 29 juin 2020. Des pièces administratives sont nécessaires à cette inscription, et les associations déplorent des exigences abusives de la part de certains maires. L'État doit lutter fermement contre ce phénomène qui aggrave la non-scolarisation à Mayotte et met à mal le principe fondamental de non-discrimination.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Vous rappelez une obligation définie par le décret du 29 juin 2020. Nombre de contentieux existent sur ce sujet. Il appartient au juge de faire respecter les obligations réglementaires.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - La loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance a instauré l'instruction obligatoire de 3 à 16 ans. L'État doit veiller à sa pleine application. À Mayotte, le rectorat et le préfet y sont attentifs et rappellent chaque année leurs obligations aux maires. Appliquer le droit en vigueur ne peut être considéré comme un engagement, aussi cela n'a pas vocation à figurer dans le rapport annexé. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°119 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°99 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Par cet amendement, nous souhaitons qu'on construise non seulement des classes, mais aussi des réfectoires. Il faut que la scolarisation s'effectue dans de bonnes conditions. Il est impossible pour un enfant d'étudier le ventre vide. Or c'est bien souvent le cas à Mayotte. Parfois ce sont les enseignants qui distribuent des casse-croûte. Seul un élève sur cinq mange un repas chaud. Pour les autres, c'est jus d'orange, chips et biscuits. Ici, ce serait un scandale ! Il faut mettre fin à ces traitements indignes et injustes.
Mme la présidente. - Amendement identique n°118 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Défendu.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable à ces deux amendements. On voit bien l'ambition en matière de construction de classes, mais la restauration scolaire est une compétence facultative qui incombe aux collectivités territoriales.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - C'est un vrai sujet. Je me suis entretenu avec Anne Rubinstein, déléguée interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, pour flécher des crédits vers la restauration scolaire. Chaque enfant a droit à un repas. Ce problème ne concerne pas que Mayotte.
Il faut s'appuyer sur des espaces mutualisés comme des salles polyvalentes. Dans le premier degré, les communes développent des solutions répondant aux besoins. La restauration scolaire doit être une priorité. Le Gouvernement privilégie des réponses adaptées aux situations locales, pour garantir une restauration scolaire de qualité.
Avis défavorable, même si sur le fond nous partageons l'objectif.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous sommes plusieurs à avoir participé à des conseils d'administration d'école ou de lycée : les parents d'élèves y mobilisent souvent la communauté éducative au sujet de la restauration scolaire. Bien manger pour bien étudier est une préoccupation des parents. Je ne vois pas pourquoi les parents mahorais ne pourraient avoir la même exigence.
Les amendements identiques nos99 et 118 ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°124 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - L'accès à une éducation de qualité à Mayotte est un enjeu majeur. Mayotte se caractérise par la jeunesse de sa population et des infrastructures inadaptées à une pression démographique scolaire inédite.
L'État s'est engagé à mettre fin aux rotations scolaires d'ici à 2031. Les engagements annoncés doivent s'accompagner de dispositifs concrets et visibles. Disposer de précisions détaillées permet d'assurer l'action de l'État et de garantir la tenue des objectifs.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. La pression scolaire - on note une hausse de 17 % d'élèves depuis 2020 - impose de renforcer la fidélisation des enseignants. Votre amendement propose un rapport supplémentaire, aussi avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°124 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°116 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Cet amendement précise que le Gouvernement développera une offre de formation adaptée dans les filières générales, technologiques et professionnelles.
Nous en reparlerons à l'article 26, qui institue le passeport mobilité pour les lycéens, qui compense l'absence d'une offre adaptée de formation en permettant aux lycéens de faire leurs études ailleurs. Envoyer des lycéens mahorais en métropole poursuivre leurs études n'est pas satisfaisant : l'État doit garantir une offre de formation adéquate sur place. Seul Saint-Pierre-et-Miquelon était doté d'un tel passeport.
La capacité d'accueil des filières n'augmentera pas au même rythme que la croissance démographique. Certains lycéens ne peuvent pas poursuivre leurs études chez eux, c'est inacceptable. Il faut des solutions de long terme.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. L'article 26 encourage déjà la mobilité des lycéens mahorais. Il ne s'agit pas de limiter l'offre de formation à Mayotte. L'enjeu est de prévoir l'orientation vers des formations dans d'autres parties du territoire, en attendant leur développement à Mayotte.
Votre amendement est donc en partie satisfait.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°116 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°88 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Le centre hospitalier de Mayotte est le principal offreur de soins. Mais le nombre de lits disponibles est en dessous du ratio moyen de l'Hexagone. En médecine-chirurgie-obstétrique, on compte 1,56 lit pour 1 000 habitants, c'est 40 % de moins que la moyenne nationale.
Mayotte dépend donc fortement de La Réunion, et les évacuations sanitaires sont passées de 500 en 2010 à 1 452 en 2021.
Il est donc crucial de développer l'offre de soins à Mayotte, avec des calendriers d'investissement pour le centre hospitalier de Mamoudzou, les centres médicaux de référence et la création du deuxième site hospitalier.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le développement de l'offre de soins à Mayotte est un objectif partagé. Cela concerne le centre hospitalier de Mayotte (CHM), les quatre centres territoriaux de référence et les dispensaires - où nous cherchons à mobiliser l'offre libérale.
Le programme a été validé, avec 244 millions d'euros pour le site de Mamoudzou et 148 millions d'euros pour l'acquisition du foncier du deuxième site hospitalier, à Combani. Les marchés seront passés au premier semestre 2026 et un calendrier précis sera transmis d'ici au 31 décembre 2025. Avis favorable à votre amendement qui le précise.
L'amendement n°88 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°89 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Cet amendement précise les objectifs en matière de sexualité et de procréation, avec un plan d'investissement et un calendrier.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Avis favorable. L'ARS va renforcer les initiatives en la matière. L'accès aux contraceptifs sera développé en lien avec les centres de protection maternelle et infantile (PMI). Outre l'immigration, les infrastructures, l'eau, nous devons nous mobiliser sur la question des violences intrafamiliales et de la sexualité - notamment autour du phénomène des très jeunes filles enceintes.
L'amendement n°89 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°90 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - La convergence totale avec l'Hexagone est fixée pour 2036, mais il faut aller plus vite. Le taux de pauvreté est de 77 % à Mayotte, contre 14 % dans l'Hexagone ; le PIB par habitant, le plus faible des départements français, représente le quart de la moyenne nationale ; le taux de chômage est de 37 %.
Le Smic horaire est de 11,88 euros partout en France, sauf à Mayotte où il est de 8,98 euros, soit un différentiel de 439 euros par mois. Pourtant, Oliver Dussopt avait appelé à accélérer la convergence, en revalorisant le Smic. Il aurait suffi de relever le Smic brut de 4 % au lieu de 2 %. L'échéance de 2031 pour la convergence est trop lointaine : il faut viser 2027.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Cela risque de renchérir le coût du travail et d'encourager le travail illégal. Mme Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, le confirmera.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'alignement du Smic net est prévu au plus tard en 2031. La valeur travail doit être placée au coeur de ce processus de convergence, car la bataille contre la pauvreté ne se gagnera qu'avec la réduction du chômage, bien trop élevé à Mayotte.
Mais il faut être attentif à la situation des entreprises, pour éviter tout effet de bord. Avec Catherine Vautrin, nous allons expertiser cette question afin de ne pas déstabiliser l'économie, l'emploi ni le pouvoir d'achat. Nous avons besoin de ce temps d'expertise et d'écoute des acteurs. Retrait, sinon avis défavorable.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - Selon la Direction de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DEETS) de Mayotte, 80 % de l'économie mahoraise n'est pas déclarée. Les cotisations et contributions sociales qui y sont recouvrées seront alignées progressivement sur le niveau de droit commun. Cela augmentera le coût du travail, ce qui justifie de rehausser progressivement le Smic brut, afin de ne pas inciter davantage au travail dissimulé. Le Gouvernement envisage également d'étendre à Mayotte le dispositif d'exonération dit Lodéom.
L'amendement n°90 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°138 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Supprimons l'alinéa 187 du rapport annexé, qui prévoit que la convergence en matière d'AAH et le RSA n'interviendra qu'après celle du Smic et qui écarte les prestations familiales de la convergence. Cette hiérarchisation entre prestations contributives et prestations universelles de solidarité n'a aucun sens. Les salariés ont tout autant besoin de prestations familiales ; le risque famille n'est pas couvert par une cotisation contributive ; la solidarité universelle est attachée aux citoyens, pas aux travailleurs.
À Mayotte, le montant du RSA et de l'AAH n'est que de 50 % de celui des autres régions. Ces disparités alimentent et expliquent le niveau élevé de pauvreté, car la fonction redistributive des prestations est entravée. À Mayotte, 94 % des familles monoparentales sont pauvres et les ménages pauvres ont davantage d'enfants que les ménages non pauvres à Mayotte.
Mme la présidente. - Amendement n°139 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Il s'agit ici de n'intégrer à la convergence sociale que les prestations familiales. Mayotte souffre d'un régime dérogatoire et de règles spécifiques qui entravent la lutte contre la pauvreté des familles.
Les écarts de montants de prestations familiales sont importants : 223,89 euros à Mayotte pour une famille avec trois enfants, contre 338 euros dans l'Hexagone ; le complément pour enfant supplémentaire est de 21,69 euros à Mayotte, contre 190,29 euros ailleurs. L'allocation de soutien familial n'est pas même versée à Mayotte...
La réglementation spécifique à Mayotte ne tient pas compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, pour objet de nos engagements internationaux. Et je n'évoque pas le fort taux de non-recours.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable, au regard de la démographie mahoraise et de la situation migratoire. Nul besoin de soutenir la natalité. Mme Christine Bonfanti-Dossat le confirmera.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Le Gouvernement ne renonce pas à tout alignement des prestations familiales, il indique simplement que cela n'est pas prioritaire. Dès lors que la moitié de la population mahoraise a moins de 20 ans et que plus de 10 000 naissances ont été recensées en 2022, la politique familiale n'est pas la priorité...
Mme Raymonde Poncet Monge. - Je m'étonne de cette position de la droite, qui s'occupe sans cesse du ventre des femmes. On a même parlé de...
M. Rachid Temal. - Réarmement !
Mme Raymonde Poncet Monge. - C'est ça. Mais on dit à Mayotte ; « vous en faites trop », alors stop à la politique familiale ! Soit dit en passant, la politique familiale n'est pas faite pour inciter les femmes à faire plus d'enfants, mais pour diminuer la pauvreté des familles.
Que l'on prive Mayotte de prestations familiales parce qu'elle fait trop d'enfants, c'est savoureux quand on entend la droite dire le contraire s'agissant de la France hexagonale...
Mme Corinne Narassiguin. - Le groupe SER votera ces amendements, car la convergence sociale doit être la plus rapide possible.
Arrêtez avec le fantasme selon lequel on ferait des enfants pour les allocations familiales... Comment aider des familles entières à sortir de la précarité ? Voilà la question ! Nous devons nous assurer que les familles vivent dignement, pour tenir la promesse de notre pacte social.
L'amendement n°138 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°139.
Mme la présidente. - Amendement n°135 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Pas moins de 88 % des ménages demandeurs de logement social ont des ressources inférieures au plafond du logement locatif très social, alors que le parc est constitué à 59 % de logements intermédiaires. Il faut donc fixer des objectifs de production de logements locatifs très sociaux à Mayotte.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - La commission s'en remet à l'avis du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'augmentation de l'offre de logements très sociaux à destination des ménages les plus modestes est au coeur des enjeux de cohésion sociale à Mayotte.
Dans le prolongement de l'expérimentation du locatif très social adapté, nous réfléchissons à sa pérennisation. Les chiffres de l'an dernier - seulement 73 logements - m'inquiètent, mais ils devraient être meilleurs cette année. Avis favorable.
L'amendement n°135 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°134 M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Le Conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte, ainsi que les naturalistes et gestionnaires des aires protégées, doivent être associés à la révision du schéma d'aménagement régional (SAR).
M. Olivier Bitz, rapporteur. - La commission est opposée à l'ajout de consultations obligatoires. Cela ralentirait la reconstruction de Mayotte. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°134 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°136 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Plusieurs dispositifs doivent permettre de mieux mobiliser le foncier : création d'un nouvel établissement public, politique volontariste de titrisation et meilleure identification des zones à bâtir. Le rapport annexé s'engage également à régulariser le cadastre. Mais sans moyens supplémentaires, tout cela restera lettre morte. Le rapport annexé doit donc préciser les moyens concrets qui seront affectés.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable : le rapport annexé contient déjà une régularisation du cadastre. N'alourdissons pas la feuille de route.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°136 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°125 M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Le taux d'enfouissement des déchets est de 100 % à Mayotte, contre 15 % à l'échelle nationale. Le rapport sénatorial de 2022 sur la gestion des déchets dans les outre-mer souligne que la cote d'alerte est atteinte. L'État doit débloquer les moyens supplémentaires pour mettre en oeuvre rapidement les plans structurels de rattrapage, selon un calendrier ambitieux. Notre amendement demande à l'État d'en préciser les objectifs, investissements et calendriers dans le rapport annexé.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable à cette production de documents supplémentaires. Le comité de suivi jouera son rôle.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Avis défavorable. Nous devons faire de la catastrophe de Chido une opportunité. Près de 7 millions d'euros d'investissements seront réalisés d'ici à 2029 par l'État. Mais l'objectif de zéro enfouissement en 2031 n'est pas réaliste, car il restera toujours des déchets ultimes à mettre en décharge. Fixons-nous des objectifs atteignables et adaptés aux réalités de Mayotte.
L'amendement n°125 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°62 de Mme Guhl et alii.
Mme Mélanie Vogel. - La politique de gestion durable des déchets est défaillante à Mayotte : les tôles métalliques, très peu valorisées, font l'objet de dépôts sauvages ; l'enlèvement systématique des déchets végétaux nuit à la biodiversité ; des sites de stockage sont situés sur des pentes près d'écosystèmes fragiles.
Des mesures doivent être prises : interdiction du brûlage ; recyclage des matériaux métalliques ; gestion écologique des déchets végétaux avec une valorisation sur site ; et enfin, protection des milieux naturels tels que les cours d'eau et les eaux stagnantes. C'est essentiel pour garantir la qualité de l'eau potable et réduire les risques sanitaires.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - C'est effectivement un enjeu important, comme en témoigne le rapport annexé. Mais l'intérêt des mesures ajoutées par cet amendement n'est pas évident. Il est en outre compliqué d'annoncer des mesures réglementaires dans un rapport, qui n'oblige en rien le Gouvernement. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°62 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°129 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Cet amendement propose que le syndicat mixte de collecte et de traitement des déchets ménagers de Mayotte soit éligible à la DETR, à la DSIL et au fonds vert.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable. Un rapport annexé ne peut définir les critères d'éligibilité aux dotations de l'État.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°129 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°128 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Pas moins de 25 000 jeunes Mahorais ne sont ni en formation ni en emploi et 13 000 sont inscrits à la mission locale. Alors que l'insertion de ces jeunes devrait être une priorité, cette politique est sous dotée. Nous prévoyons que les moyens de la mission locale soient proportionnés au nombre de jeunes à accompagner et aux difficultés du territoire.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable : c'est une dépense supplémentaire.
Ancienne présidente d'une mission locale, j'ai échangé avec le sénateur Omar Oili à ce sujet : la priorité est d'aider la mission locale de Mayotte à se structurer, avec l'appui de l'Union nationale des missions locales (UNML).
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°128 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°127 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Avec la crise de l'eau de 2023, qui a imposé la distribution de bouteilles d'eau en plastique, et le cyclone Chido, de nombreux déchets en plastique se sont accumulés. Nous proposons la mise en place d'une consigne avec gratification.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. C'est une mesure nouvelle non financée. De plus, cela a été essayé sur le territoire métropolitain, et abandonné.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°127 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°126 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - La transition énergétique nécessite une transformation structurelle du système énergétique en faveur d'une production locale plus décarbonée. Cet amendement complète le rapport annexé, en fixant un objectif de réduction de 50 % des importations d'énergies fossiles à horizon 2035. L'amendement prévoit aussi la transmission au comité de suivi d'un calendrier de développement du photovoltaïque d'ici au 31 décembre 2025.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - C'est louable, mais conformément à notre doctrine, avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Les objectifs de la programmation pluriannuelle viennent d'être approuvés par le conseil départemental. Ne fixons pas d'autres objectifs. Retrait, sinon avis défavorable.
L'amendement n°126 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°130 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - La localisation de la piste longue est un débat ancien, qui date des années 1980. La Commission nationale du débat public a été saisie et a lancé une concertation, avec un premier rapport en 2022. Un second rapport de 2024 compare deux sites, l'un à Petite-Terre, l'autre à Grande-Terre. Mais aucune donnée scientifique liée au volcan Fani Maoré n'a été prise en compte. Nous demandons donc la reprise d'une concertation et la constitution d'un comité de suivi.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable : il ne nous appartient pas de nous prononcer sur les modalités de la concertation. Mais nous avons noté avec satisfaction la prochaine réunion du comité de pilotage et la transmission des études de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC).
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Ce projet de piste longue est très attendu. À l'amendement n°158 après l'article 19, le Gouvernement propose une consultation du public, avec mise à disposition d'un dossier présentant les solutions alternatives et leur évaluation sur une série de critères. Cette consultation sera menée par voie électronique, mais aussi physique dans les maisons France Services et les mairies. Elle sera rapide pour répondre aux attentes des Mahorais. Le comité de pilotage, sous la conduite du préfet, sera réuni le 28 mai prochain.
Retrait, sinon avis défavorable.
M. Saïd Omar Oili. - Je ne comprends pas. J'ai reçu un courrier du ministre des transports qui évoque une reprise de la concertation en septembre, alors que vous nous dites que cela se fera tout de suite. Où est la vérité ?
Ici, nous avons délibéré il n'y a pas si longtemps sur l'A69. (Sourires) La réglementation doit être respectée jusqu'au bout. L'implantation de la piste doit être choisie après avoir fait ce qu'il fallait - qu'on ne vienne pas ensuite remettre en cause le projet !
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Plus transparent, ça va devenir difficile... Vous connaissez la blague de Coluche...
Ce débat dure depuis des années. De nombreux élus ont demandé au Gouvernement de prendre ses responsabilités. Nous allons faire des mécontents, nous le savons. Nous avons de nombreuses études.
Le ministre des transports parle sans doute de la fin de la concertation - vous ne réussirez pas à nous opposer. (Sourires)
L'amendement n°130 n'est pas adopté.
Présidence de Mme Sylvie Robert, vice-présidente
Mme la présidente. - Amendement n°159 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - La piste longue, très attendue, est nécessaire pour garantir la desserte internationale de Mayotte. Nous en sommes tous d'accord, car l'aéroport actuel est soumis à trop de risques - montée des eaux due au réchauffement climatique et risque sismovolcanique.
Grâce à nos trois amendements, nous pourrions entamer les travaux deux ans plus tôt qu'avec une procédure classique. Ce premier amendement choisit une implantation préférentielle et fixe un calendrier ambitieux. Le prochain comité de pilotage se tiendra le 28 mai et le débat public se déroulera en septembre - comme l'a évoqué le ministre des transports.
Cela devra s'accompagner d'un projet pour l'attractivité de Petite-Terre, qui a - je n'en doute pas - les moyens d'envisager l'avenir sans l'aéroport. Deux autres amendements, après l'article 19, concerneront la consultation du public et l'acquisition des terrains.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis favorable. Nous nous réjouissons d'entrevoir la réalisation dans un délai raisonnable d'un équipement dont Mayotte a tant besoin.
Mme Salama Ramia. - Les Mahorais attendent une piste longue depuis vingt ans ! Je me félicite de la relance du comité de pilotage, qui n'avait pas été réuni depuis 2022. Le conseil départemental a délibéré en faveur d'une piste longue à Petite-Terre. Dans un esprit d'apaisement avec la population et les élus, il faudrait écouter les arguments des uns et des autres.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Mais cela fait vingt ans ! Quand j'interrogeais les élus, dans des fonctions précédentes, j'avais autant d'avis que d'élus. Personne ne voulait prendre ses responsabilités.
Il y aura le comité de pilotage et le débat public. Le chef de l'État a pris ses responsabilités, car il fallait maintenir le lien de Mayotte avec son environnement régional et avec l'Hexagone, grâce à la construction de cette piste longue.
Nous n'empêchons pas les débats, mais le Gouvernement traduit ce qui a été annoncé aux Mahorais, en toute transparence. Vous connaissez mieux que moi la capacité de délibération des élus, madame la sénatrice. Le débat aura lieu et continuera peut-être même après la livraison de la piste...
On accusait l'État de fuir ses responsabilités, à juste titre. Désormais, il en va autrement, pour le port comme pour l'aéroport, avec des compensations pour Petite-Terre. Il fallait décider.
M. Saïd Omar Oili. - Je ne peux pas accepter ces propos. Les élus mahorais n'auraient pas pris leurs responsabilités, dites-vous ? C'est faux ! Quand vous êtes venus à Mayotte, vous nous avez demandé de prendre nos responsabilités : le conseil départemental a donc voté, à l'unanimité, en faveur d'une piste longue sur Petite-Terre.
On dit toujours qu'il faut écouter les élus locaux, que ce sont ceux qui connaissent le mieux leur territoire... Qu'est-ce que cela signifie, alors, prendre ses responsabilités ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Voici mon avis, purement personnel : ce problème de piste est lié à un problème volcanique. Or les scientifiques sont dans l'incapacité de dire ce qui se passera à l'avenir. Ils ont décelé des points chauds à 1 500 mètres sous le niveau de la mer, mais il leur manque 5 millions d'euros - ce n'est pas faramineux - pour poser des capteurs, comme cela se fait à La Réunion, en Martinique et en Guadeloupe.
Il faudrait agir avec plus de pragmatisme. Est-il plus judicieux de maintenir les infrastructures existantes ou de déployer des infrastructures nouvelles sur 375 km2, ce qui représente une perte de terrains agricoles ? J'appelle à la vigilance.
L'amendement n°159 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°155 rectifié bis du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je crains que l'avis de la commission ait été mal compris sur le vote précédent...
Mme la présidente. - L'avis de la commission était favorable. La mise aux voix a été claire.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement tient parole : les crédits affichés dans ce tableau sont issus du contrat de convergence et de transformation (CCT) signé en 2024 et des plans ministériels et interministériels. Il sanctuarise des crédits et en ajoute de nouveaux.
Il prévoit un abondement de l'enveloppe d'amorçage pour les collectivités, qu'il porte à 300 millions d'euros sur 2025-2027. Au total, il s'agit de près de 4 milliards d'euros pour soutenir des projets essentiels.
En matière d'eau et d'assainissement, cela permettra de financer l'usine de dessalement d'Ironi Bé, la troisième retenue collinaire, des campagnes de forage, des travaux d'assainissement non collectif, etc.
Sur le plan sanitaire, des travaux au centre hospitalier de Mayotte conduiront à l'ouverture d'un service de psychiatrie, de six blocs opératoires et d'un second site hospitalier à Combani.
En matière de lutte contre l'immigration clandestine, nous améliorons nos capacités de détection, de reconnaissance et d'interception par voies maritimes et aériennes.
Le système judiciaire et carcéral sera renforcé, avec un deuxième établissement pénitentiaire, une cité judiciaire et un centre éducatif fermé.
L'effort de construction d'établissements scolaires sera poursuivi, avec de nouvelles salles de classe et des lits en internat, notamment.
En matière d'enseignement supérieur, la reconstruction et l'extension de l'université seront soutenues. Idem pour les gymnases.
En matière culturelle, nous aiderons le musée de Mayotte et la résidence des gouverneurs et créerons des centres culturels dans le Nord et en Petite-Terre. Il sera aussi question de protection du patrimoine.
La construction de nouveaux logements, l'aménagement des ZAC et la résorption de l'habitat insalubre sont aussi prévus.
Outre l'aéroport, déjà évoqué, l'État accompagnera un certain nombre de projets routiers, dont la remise à niveau du réseau routier national, ainsi que les mobilités alternatives : Caribus, pistes cyclables, navettes maritimes.
Sur le plan environnemental, des crédits seront mobilisés pour la gestion des déchets et le développement de l'économie circulaire : déchetteries, observatoire des déchets, centre de gestion multifilière, unités de recyclage, valorisation du réemploi et de la réutilisation.
Le réseau de fibre optique sera déployé dans le cadre d'une délégation de service public.
Les évaluations des dommages et des besoins seront affinées en lien avec les ministères concernés, via la mission interministérielle.
Un amendement adopté en commission prévoit la remise d'un rapport au Parlement avant la fin de l'année 2025 pour préciser la ventilation des crédits.
La programmation des investissements sera précisée sur une base pluriannuelle.
Je sais les méfiances, les critiques, mais c'est la première fois qu'une telle précision est apportée. L'effort financier est porté de 3,2 milliards d'euros à 4 milliards. Je m'en réjouis. Nous poursuivons notre action, pour répondre à l'attente forte des Mahorais.
Mme la présidente. - Amendement n°131 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Cet amendement détaille les opérations prévues en matière de gestion de déchets. Le rapport annexé évoque 26 millions d'euros, or on ne retrouve ici que 6,9 millions.
Mme la présidente. - Amendement n°132 de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Il s'agit de préciser le total des engagements de l'État au titre du programme d'investissement pluriannuel à Mayotte.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Nous nous réjouissons du dépôt de l'amendement du Gouvernement qui précise la ventilation des investissements prioritaires et le calendrier de mise en oeuvre. Les crédits sont portés de 3,2 à 4 milliards d'euros. Avis favorable.
Le travail ne s'achève pas aujourd'hui. Nous avons ajouté, dans le rapport annexé, l'obligation pour le Gouvernement de déposer avant la fin de l'année une programmation annuelle, qui suppose des arbitrages ministériels. Vous apportez des premiers éléments de réponse aux Mahorais, nous attendons avec impatience la suite. Avis défavorable aux deux autres amendements, qui tomberont si celui-ci est adopté.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'amendement du Gouvernement a précisé les engagements de l'État. Il reprend les crédits inscrits au CCT et dans différents plans d'action ministériels ou interministériels.
Pour les déchets, nous prévoyons 6,9 millions d'euros en AE sur la période 2025-2029, qui contribueront au rattrapage structurel et au développement de l'économie circulaire. Les fonds européens viendront en complément. Les dommages et les besoins seront affinés en lien avec les ministères concernés. Il est important de recueillir l'avis des acteurs locaux. Les montants devront être par ailleurs précisés afin d'identifier l'origine des crédits.
Aussi je demande le retrait de l'amendement n°131, sinon avis défavorable. Même avis sur l'amendement n°132.
Mme Christine Lavarde. - Cet amendement n'a pas été examiné par notre commission des finances. Quelle est l'origine des crédits annoncés ? Sont-ils fléchés sur les budgets des différents ministères ou pré-engagés sur le budget des outre-mer pour les exercices à venir ? Sont-ils prélevés sur les budgets des fonds de cohésion - alors que le cadre financier pluriannuel n'est pas encore fixé ?
On sait combien le cadre budgétaire est contraint...
Mme Lana Tetuanui. - J'ai presque envie d'applaudir notre ministre des outre-mer. Je lui dis merci pour les Mahorais. Pour les autres territoires, dont la Polynésie française, il faudrait un gros cyclone pour obtenir ce que nous réclamons depuis des années... Blague à part, je ne sais pas de quoi sera fait le lendemain des programmations. Imaginons qu'un nouveau ministre soit nommé : la parole de l'État sera-t-elle tenue dans ce cas ? Chaque ministre présente sa propre copie et jette celle de son prédécesseur. Aurons-nous l'assurance que ce que nous votons aujourd'hui ne sera pas défait demain ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Les 4 milliards d'euros sont contractualisés dans le CCT. Les montants présentés sont rattachés au budget des ministères concernés. S'agissant des déchets, il y a aussi les crédits de l'Ademe. Les choses sont claires.
Madame Tetuani, je m'efforce d'assurer la pérennité de nos engagements dans le temps, quels que soient les aléas de la vie politique, aussi bien pour la Nouvelle-Calédonie que pour Mayotte ; c'est pourquoi j'ai convaincu le Premier ministre de mettre en place une cellule interministérielle, dirigée par le général Facon, auprès de mon cabinet. Un dispositif similaire est prévu pour la Nouvelle-Calédonie, qui a bénéficié en 2024 de 3 milliards d'euros.
Mon amendement a pour objet de sortir des effets d'annonce et de nous engager dans la durée. Au-delà de Chido - ne souhaitons pas de nouveaux cyclones ! -, il s'agissait d'attentes fortes des Mahorais.
Je vous invite à faire campagne pour que, quoi qu'il arrive, je reste ministre d'État en charge des outre-mer (sourires), pour que vous puissiez me rappeler l'engagement de l'État envers l'ensemble de ces territoires - nous en reparlerons prochainement en Polynésie.
Derrière votre trait d'humour, vous rappelez chacun à ses responsabilités. Mayotte avait pris beaucoup de retard, nous étions loin de la promesse d'égalité républicaine. L'effort de la nation est cohérent. Je remercie le Premier ministre d'avoir arbitré en ce sens. Nous avons une obligation de résultat, partout. J'y veillerai.
L'amendement n°155 rectifié bis est adopté.
Les amendements nos131 et 132 n'ont plus d'objet.
Mme la présidente. - Amendement n°110 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Les habitants de Mayotte, les élus locaux et les professionnels de la justice réclament la création d'une cour d'appel à Mayotte, actuellement seulement dotée d'une chambre d'appel. Les appels de décisions des juges d'instruction et des juges des libertés et de la détention (JLD) sont portés devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion.
Pourtant, les besoins sont nombreux ; s'ajoutent les nombreux dossiers d'état civil. Alors que la population ne cesse de croître, la distance géographique avec Saint-Denis de La Réunion impose la création d'une cour d'appel à Mayotte dans les cinq prochaines années.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable. Ne multiplions pas dans le rapport annexé les engagements non financés.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°110 n'est pas adopté.
L'article 1er, modifié, est adopté.
Article 1er bis
M. Marc Laménie . - Cet article 1er bis consacre l'autorité du préfet de Mayotte sur l'ensemble des services déconcentrés de l'État et de ses établissements publics. Cette faculté a été créée par la Lopmi en cas de circonstances exceptionnelles. Le passage du cyclone Chido a donné lieu à sa mise en oeuvre, du 14 décembre 2024 au 14 mars 2025, ce qui a permis au préfet de Mayotte de mobiliser tous les services de l'État - y compris les forces armées, l'ARS, les douanes et le rectorat - pour la reconstruction et la gestion des conséquences immédiates de la crise.
Face à l'ampleur de la crise, démographique, migratoire, sécuritaire, économique et sociale, la tâche est immense. Cet article 1er bis garantit la continuité et la cohérence de l'action de l'État jusqu'au 31 décembre 2030 : l'État parlera d'une seule voix.
Le groupe Les Indépendants votera cet article.
Mme la présidente. - Amendement n°64 de Mme Narassiguin et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - La gouvernance de la reconstruction est un enjeu central. Les acteurs locaux doivent identifier leurs interlocuteurs et les chaînes de responsabilité.
La loi d'urgence pour Mayotte a prévu de transformer l'établissement public foncier et d'aménagement en un établissement public chargé de coordonner les travaux de reconstruction. Cet article, introduit en commission, jette donc le trouble. Quelle gouvernance pour la reconstruction de Mayotte ? Quels interlocuteurs pour les élus locaux ? Il y va de la réussite de ce projet.
Mme la présidente. - Amendement identique n°120 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - En temps de crise, il peut être utile de conférer certains pouvoirs aux préfets, mais ce dispositif dérogatoire au droit commun doit être limité dans le temps. Il nous paraît déraisonnable de poursuivre une telle dérogation six ans de plus.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Je remercie Marc Laménie de son soutien. Avis défavorable aux deux amendements de suppression. Madame Vogel, nous sommes toujours en période de crise à Mayotte : au-delà de la crise paroxystique, la situation reste très difficile et nécessite une unité de commandement et une capacité de coordination. L'État doit parler d'une seule voix.
Ces mesures exceptionnelles ne sont pas illimitées dans le temps ; le dispositif est borné au 31 décembre 2030, le temps de la refondation.
Il est indispensable de mieux organiser l'État local et de lui permettre d'intervenir dans tous les champs de l'action publique.
Quant à l'établissement public, monsieur Omar Oili, un amendement n°48 de Mme Ramia vise à l'exclure de la tutelle du préfet.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Cet article ne figurait pas dans la version initiale du texte ; il émane de vos rapporteurs. Je le trouve pertinent et utile. Pour être efficace, il faut des synergies, une coordination entre les acteurs territoriaux. Le préfet a vocation à assurer la coordination interministérielle et entre les différents partenaires de la reconstruction. Il existe une très bonne synergie entre la mission interministérielle du général Facon et les services du préfet.
Il s'agit de gagner en efficacité et en temps, dans la logique de l'article 27 de la Lopmi, déjà mise en oeuvre lors de Chido.
Les modalités d'application seront fixées par décret en Conseil d'État.
Nous oeuvrerons dans un souci de concertation avec les élus locaux. Je donnerai un avis favorable à l'amendement de Mme Ramia sur l'établissement public.
Avis défavorable aux amendements de suppression.
M. Saïd Omar Oili. - Il y a deux semaines, à Mayotte, j'ai rencontré un membre de la mission de M. Facon, pour demander à avoir une discussion sur les pêcheurs. Que m'a répondu mon interlocuteur ? Qu'il doit d'abord demander l'autorisation au préfet ! Qui donc est le pilote de l'avion ? Le général Facon ? Le préfet ? On s'y perd. Dites-nous à qui nous devons nous adresser lorsqu'il s'agit de la reconstruction !
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Monsieur le sénateur, ce n'est pas de votre niveau.
Je suis là, il y a un préfet, le général Facon est joignable. Vous avez même une collègue sénatrice qui est en mission auprès de la mission interministérielle - vous pouvez nous parler ! Je vous respecte énormément, et je vous connais depuis longtemps. Je comprends les interrogations et les méfiances à l'égard de la parole de l'État. Mais un ministre de l'outre-mer suit attentivement le dossier de Mayotte, le général Facon est à votre disposition, le préfet sur place agit, coordonne le travail interministériel. Je rencontre les sénateurs et les députés mahorais, je dîne tout à l'heure avec le président du conseil départemental de Mayotte. J'ai multiplié les rencontres, sur place et en visioconférence, mon équipe aussi.
Les règles sont claires, vous savez qui pilote l'avion.
Les amendements identiques nos64 et 120 ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°48 de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - La gouvernance du futur établissement public chargé de la reconstruction sera assurée collégialement avec les collectivités du département. Son conseil d'administration sera présidé par le président du conseil départemental de Mayotte. Il n'y a pas lieu que le préfet dispose d'une autorité hiérarchique ou fonctionnelle sur l'établissement.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Je remercie Mme Ramia de sa vigilance. Ce point nous avait échappé. Avis favorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Avis favorable.
L'amendement n°48 est adopté.
L'article 1er, modifié, est adopté.
Article 2
Mme la présidente. - Amendement n°7 rectifié de Mme Narassiguin et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - Cet article durcit encore les conditions d'accès au séjour à Mayotte puisqu'il conditionne l'obtention des titres « parents d'enfants français » et « liens personnels et familiaux » à une entrée régulière sur le territoire. Concrètement, un étranger parent d'un enfant mineur français ne pourra jamais être régularisé s'il est entré à Mayotte sans visa. Cet article multipliera les cas de ni-ni - ces étrangers qui ne peuvent être ni régularisés ni expulsés. Il précarisera des familles et privera des milliers de personnes de toute perspective.
Comment penser refonder ainsi Mayotte ? Comment considérer qu'un parent étranger d'un enfant français, qui contribue à l'entretien et à l'éducation de son enfant, doit être maintenu dans la précarité ou expulsé ? Vous ne réglerez rien, et vous aurez gâché des vies.
L'article décale également de deux ans la délivrance d'une carte de résident pour les parents étrangers d'enfants français. C'est indigne.
Mme la présidente. - Amendement identique n°80 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous nous opposons fermement au durcissement de l'accès aux titres de séjour à Mayotte. Cet article fait écho aux mesures votées en mars dernier pour durcir le droit du sol ; or aucun rapport n'a montré un quelconque effet sur les flux migratoires. Cet article maintiendra de nombreuses familles en situation d'irrégularité : les enfants en seront les premières victimes. L'absence d'accompagnement de ces familles vers le droit commun fait obstacle aux droits des enfants reconnus par la Convention internationale des droits de l'enfant.
Dans son rapport, le Défenseur des droits indique que cette restriction des droits maintient les étrangers de Mayotte dans une situation d'insécurité juridique et de précarité administrative, freinant leurs perspectives d'intégration et pesant sur le développement de l'île.
S'en prendre aux familles, c'est tourner le dos à nos valeurs humanistes. Nous ne voulons pas devenir un État qui déteste les étrangers, même enfants !
Mme la présidente. - Amendement identique n°144 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Défendu.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. La situation à Mayotte est intenable. En 2024, sur les 320 000 habitants estimés par l'Insee, la moitié est étrangère - dont une moitié en situation irrégulière. Sans inflexion majeure, la population pourrait doubler d'ici 2050 pour atteindre 760 000 habitants, majoritairement étrangers. Trois-quarts des enfants nés à la maternité de Mamoudzou, première de France en nombre de bébés, ont une mère étrangère.
L'immigration familiale depuis les Comores constitue l'un des principaux flux migratoires. En 2024, plus de 15 000 titres « parents d'enfant français » ou « liens personnels et familiaux » ont été délivrés : c'est 80 % des titres délivrés à Mayotte, contre 17 % en métropole. Ils alimentent une immigration clandestine massive, dans l'espoir d'une régularisation rapide. Il faut freiner ce flux en limitant les possibilités de régularisation ; l'article 2 y contribue.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le caractère exceptionnel de la situation migratoire à Mayotte justifie d'adopter des mesures pour limiter l'attractivité des titres de séjour « parents d'enfants français » et « liens personnels et familiaux ». La mesure envisagée ne porte pas atteinte de manière disproportionnée à l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, s'agissant d'une formalité déjà mise en oeuvre dans les postes consulaires. Le Conseil d'État le souligne dans son avis. La condition de résidence vise à renforcer l'intégration de l'étranger dans le pays ; l'administration reste en droit de délivrer un titre de séjour et de régulariser le séjour d'un étranger lorsque sa situation le justifie, dans des cas exceptionnels. Tout refus de séjour assorti d'une OQTF tient compte de la durée de présence sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté des liens avec la France et de considérations humanitaires. Conditionner la délivrance d'un titre de séjour « liens personnels et familiaux » ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale.
Oui, plusieurs dispositions de ce texte visent à lutter contre une immigration clandestine massive, qui déséquilibre la société : mise en place de dispositifs de sécurité, de prévention et de détection, évolution de la relation avec la République des Comores. Avis défavorable.
Mme Corinne Narassiguin. - On présuppose que le durcissement des conditions de régularisation réduira les flux migratoires illégaux, ce qui n'est pas démontré. Des milliers de personnes préfèrent vivre dans l'irrégularité à Mayotte que rester dans leur pays. Le fameux appel d'air n'a jamais été prouvé.
L'administration conserve certes la possibilité de régulariser, mais la pression politique l'en empêchera.
Les amendements identiques nos7 rectifié, 80 et 144 ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°32 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
M. Michel Masset. - Cet amendement rétablit une possibilité de régularisation fondée sur des motifs exceptionnels. Selon le Conseil d'État, l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et le préambule de 1946 imposent de prendre en compte la vie privée et familiale, et la jurisprudence conduit à des régularisations fondées sur l'intérêt supérieur de l'enfant ou des attaches fortes. Ce paradoxe alimente l'opacité et l'insécurité juridique.
Nous proposons une nouvelle rédaction, claire, pour répondre humainement à certains cas.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Ce n'est pas opportun eu égard à la situation migratoire exceptionnelle de Mayotte. Cela renforcerait l'attractivité encore de Mayotte pour les candidats à l'immigration irrégulière, que nous voulons endiguer. Enfin, le préfet peut toujours régulariser à titre discrétionnaire, si nécessaire.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°32 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°33 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
M. Michel Masset. - Nous introduisons une voie de régularisation humanitaire en autorisant l'admission exceptionnelle au séjour, tout en maintenant les restrictions proposées par l'article 2 initial. On ne peut compter uniquement sur le pouvoir discrétionnaire du préfet pour éviter des atteintes disproportionnées à la vie privée et familiale. Au reste, l'exigence d'une présence ininterrompue sur l'île ne tient pas compte des réalités de vie, de l'instabilité des parcours migratoires ou des obstacles administratifs. Évitons une rigidité excessive.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Il y a un décalage entre l'objet de l'amendement et ses effets réels : vous supprimez les mesures introduites par la commission, notamment le renforcement du mécanisme de double contribution lorsque le demandeur n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité, et l'exigence d'une résidence ininterrompue. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°33 rectifié n'est pas adopté.
L'article 2 est adopté.
Article 2 bis
Mme la présidente. - Amendement n°10 de Mme Narassiguin et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - Notre groupe est favorable au rapport prévu par cet article 2 bis, afin d'évaluer les dispositions dérogatoires en matière d'immigration et de nationalité, qui se sont multipliées ces dernières années. Nous avions demandé un tel rapport lors de l'examen de la proposition de loi visant à renforcer les conditions d'accès à la nationalité française à Mayotte - il y a manifestement les bons rapports demandés par la majorité, et les autres...
Le délai de trois ans nous paraît trop lointain, c'est pourquoi nous demandons un rapport d'étape avant le 31 décembre 2026.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Votre demande n'était pas assez ambitieuse ! (Mme Corinne Narassiguin sourit.) Elle ne portait que sur le droit de la nationalité, le rapport que nous prévoyons porte sur tous les dispositifs dérogatoires dans le domaine migratoire et la nationalité. Dix-huit mois, c'est insuffisant pour avoir le recul nécessaire. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°10 n'est pas adopté.
L'article 2 bis est adopté.
Après l'article 2 bis
Mme la présidente. - Amendement n°104 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous voulons mettre fin à la territorialisation des titres de séjour à Mayotte, qui impose de demander un visa pour se rendre dans un autre département. Cette dérogation limite la circulation vers l'Hexagone des enfants français de parents étrangers et complexifie le parcours de nombreux jeunes majeurs qui souhaiteraient poursuivre leurs études ailleurs mais sont piégés à Mayotte. La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) a dénoncé la situation de ces jeunes « doublement sanctionnés », malgré un parcours scolaire exemplaire.
Cette revendication des élus mahorais se heurte à un refus obstiné du Gouvernement : à nous, parlementaires, de prendre nos responsabilités.
Mme la présidente. - Amendement n°6 rectifié de M. Omar Oili et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - La territorialisation des titres de séjour bloque les détenteurs à Mayotte et génère une pression migratoire sur le département, dont les capacités d'absorption sont dépassées. Cela contribue à la prolifération des bidonvilles et à la saturation des services publics. La fin de ce confinement migratoire aurait dû être un préalable à la refondation de Mayotte.
Pourtant, le Gouvernement refuse de supprimer les visas territorialisés, au prétexte de l'attractivité. Mais aussi pauvre soit-elle, Mayotte reste plus riche que ses voisins. Est-ce à dire que ces visas ne seront jamais supprimés ? Chaque jour, un nouveau prétexte pour ne pas abroger ce régime. La République a un devoir de solidarité avec notre territoire, l'État ne peut pas nous laisser seuls en première ligne.
Mme la présidente. - Amendement identique n°19 rectifié bis de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Un mot : équité. Le titre de séjour territorialisé crée une situation unique dans la République : des personnes en situation régulière sont assignées à résidence sur un territoire en proie à d'immenses difficultés. Cette situation est intenable et contreproductive : elle entrave la mobilité, fragilise les parcours d'insertion, alimente une impasse sociale. Nous ne pouvons pas défendre une République une et indivisible et accepter qu'une catégorie de résidents soit assignée à un territoire. À ceux qui s'inquiètent d'un éventuel appel d'air, je répondrai que le développement de Mayotte ne peut passer par l'enfermement de ses résidents. Il doit passer par le contrôle et la sécurisation des frontières et par la coopération régionale.
Cette situation pèse sur les Mahorais. Ce sont eux qui doivent quitter leur île pour soigner un proche ou poursuivre leurs études, qui voient leur hôpital, leur école, leurs services publics saturés.
La solidarité nationale ne peut s'arrêter à la porte de l'océan Indien. Supprimer ce titre, c'est rétablir la normalité républicaine, c'est permettre à Mayotte de se projeter. C'est une proposition de justice et d'efficacité qui peut dépasser les clivages.
Mme la présidente. - Amendement identique n°151 rectifié de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Les visas territoriaux sont une exception au droit commun : des personnes en situation régulière se trouvent confinées sur un territoire. Elle a un effet pervers : ces personnes - en situation régulière, j'y insiste - sont coincées sur l'île de Mayotte, alors même que la tension démographique a de nombreux effets négatifs, comme on l'a encore rappelé. Quel paradoxe !
Ce dispositif a été remis en cause dès 2017 par la CNCDH ; en 2025, il est temps d'y mettre fin.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable. Nous souhaitons maintenir le titre territorialisé. Il existe depuis 1990 et n'autorise le séjour qu'à Mayotte - des autorisations spéciales peuvent toutefois être délivrées pour rejoindre une autre partie du territoire national, et de nombreuses exceptions sont prévues, au bénéfice notamment des conjoints, ascendants et descendants de Français.
Le Sénat a refusé de supprimer ce régime dérogatoire en 2018 et en 2023. Nous craignons en effet que cette suppression ne règle rien. Les candidats au départ, qu'ils viennent de l'Afrique des Grands Lacs ou des Comores, se saisiraient de Mayotte comme point d'appui pour rejoindre une autre partie du territoire national, mais cela implique un séjour sur l'île - d'où l'effet d'appel d'air, confirmé par les auditions. Les Comoriens iraient principalement à La Réunion, risquant de déstabiliser un autre territoire d'outre-mer.
N'ouvrons pas dans l'esprit des candidats au départ la perspective de pouvoir rejoindre la France métropolitaine ou un autre territoire d'outre-mer à partir de Mayotte, sinon nous n'arriverons jamais à tarir le flux. Gardons-nous d'envoyer des messages contradictoires.
Nous entendons toutefois le message des Mahorais, relayé ici par leurs deux sénateurs. Aussi avons-nous prévu un bilan d'étape dans trois ans, qui nous permettra de constater, je l'espère, une amélioration de la situation, et d'ouvrir la voie à une réforme du titre territorialisé.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je me situerai dans la ligne des propos pleins de sagesse du rapporteur.
Nous avons discuté avec les élus mahorais et les citoyens membres des collectifs. Je vous confirme cependant l'opposition du Gouvernement à cette suppression.
Il y a des dispositifs qui sortent du droit commun à Mayotte afin de s'adapter à la situation migratoire spécifique de l'île ; c'est le cas des titres de séjour territorialisés.
La possibilité de quitter rapidement l'île pour rejoindre La Réunion et l'Europe renforcerait l'attractivité de Mayotte. Les procédures risqueraient d'être détournées et la pression migratoire serait encore plus élevée.
Dans cette situation, au regard de la relation que nous avons avec les Comores, supprimer ce titre serait dangereux.
Mais vos rapporteurs, avec l'article 2 bis, ont trouvé un compromis. J'espère que, dans trois ans, la situation permettra de reconsidérer le dispositif. Mais ne le faisons pas au milieu du gué. Avis défavorable.
M. Saïd Omar Oili. - À Mayotte, des joueurs de football et de basket ayant des cartes de séjour d'un an demandent des autorisations pour accompagner leur équipe à l'extérieur. Celles-ci leur sont refusées. Pis : on nous accuse de favoriser l'immigration clandestine !
Engagez-vous à donner des instructions claires aux préfectures à autoriser ces joueurs à venir dans l'Hexagone. Ceux qui sont venus ici ne se sont ensuite pas évaporés dans la nature : ils sont tous revenus à Mayotte.
L'amendement n°104 n'est pas adopté.
À la demande du groupe SER et du RDPI, les amendements identiques nos6 rectifié, 19 rectifié bis et 151 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°290 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Pour l'adoption | 118 |
Contre | 210 |
Les amendements identiques nos6 rectifié, 19 rectifié bis et 151 rectifié ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°103 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Sur l'ensemble du territoire, le document de circulation pour étrangers mineurs (DCEM) est délivré de plein droit si l'un des parents dispose d'un titre de séjour. Ce n'est pas le cas à Mayotte : l'enfant doit en plus être né en France. Cet amendement supprime cette dérogation.
Il est fréquent que les parents soient en situation régulière, mais que leurs enfants soient nés à l'étranger. Résultat : les mineurs se retrouvent bloqués à Mayotte, alors que la famille doit pouvoir parfois quitter l'île pour des raisons familiales. Cette spécificité contrevient à l'intérêt supérieur de l'enfant : supprimons cette mesure discriminatoire.
Mme la présidente. - Amendement n°154 rectifié de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Défendu.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable : c'est la traduction pour les mineurs du visa territorialisé. Il faut éviter que le déplacement des mineurs permette aux majeurs ascendants de les rejoindre. Cet amendement détournerait l'esprit du titre territorialisé, dont nous venons de rejeter la remise en cause par scrutin public.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°103 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°154 rectifié.
Mme la présidente. - Amendement n°53 de Mme Aeschlimann.
Mme Marie-Do Aeschlimann. - Nous adaptons la mise en oeuvre du regroupement familial à Mayotte, en proie à une intense pression migratoire et à une grave crise sanitaire, économique et sociale.
L'article L 434--7 du Ceseda subordonne le regroupement familial à la condition que l'étranger dispose d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable dans la même région géographique.
Or les cases en tôle dépourvues d'eau potable, sources de problèmes d'hygiène et de troubles à l'ordre public, sont légion à Mayotte et sont occupées aux deux tiers par des étrangers.
Plus de 80 % des titres de séjour délivrés à Mayotte le sont au titre du regroupement familial.
Cet amendement prévoit donc que sur ce territoire, le regroupement familial ne peut avoir lieu si l'étranger réside dans un logement occupé sans droit ni titre ou relevant de l'habitat informel.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis favorable. Je remercie notre collègue de l'avoir déposé. Il permet l'adaptation de la règle de droit commun au contexte mahorais et à la typologie d'habitat que sont les bidonvilles.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - C'est un amendement de bon sens. Le Conseil d'État a déjà exclu les occupants sans droit ni titre. Le droit européen autorise l'État membre à conditionner le titre de séjour à un logement salubre.
Vous inscrivez donc un critère prévu par la jurisprudence et conforme au droit européen ; avis favorable.
Mme Corinne Narassiguin. - C'est extraordinaire ! Dès qu'il s'agit de réduire le droit des étrangers, la dérogation est bienvenue, mais pas quand cela leur est favorable ! (Mme Raymonde Poncet Monge renchérit.)
L'amendement n°53 est adopté et devient un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°152 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Nous demandons un rapport sur le contrat d'intégration républicaine (CIR) entré en vigueur tardivement, le 1er janvier 2022, à Mayotte et de manière allégée, voire dégradée par rapport aux dispositifs proposés dans l'Hexagone.
Le Gouvernement pourrait-il en faire le bilan ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Nous sommes réservés sur les demandes de rapports, d'autant que celle-ci est satisfaite par le rapport à trois ans que nous venons d'adopter. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°152 n'est pas adopté.
Article 3
Mme la présidente. - Amendement n°81 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - L'article 3, qui organise la discrimination, doit être supprimé. Il aura pour conséquence une inégalité devant les services publics en fonction de la zone d'habitation. Les personnes habitant de l'autre côté de l'île seront dissuadées d'aller à Mamoudzou pour y déposer leur reconnaissance de paternité ou de maternité.
Cela contrevient au droit à l'identité de l'enfant.
Ce sont les plus vulnérables qui ont le plus de mal à accéder à leurs droits. Ce sont ceux-là dont on veut réussir à se débarrasser facilement.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable : nous ne prévoyons pas les mêmes effets. La centralisation à Mamoudzou répond à un intérêt général : mieux détecter les fraudes.
Pas moins de 78 % des naissances ont déjà lieu à Mamoudzou et 25 % des déclarations de reconnaissance ont lieu concomitamment à la déclaration de naissance. Les parents peuvent à tout moment établir leur filiation à l'égard de l'enfant en se rendant à Mamoudzou.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
M. Saïd Omar Oili. - La mairie de Mamoudzou aura-t-elle une compensation financière induite par ce surcroît de travail ? Ne risque-t-on pas d'avoir des enfants sans acte de naissance ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - C'est une compétence régalienne : nul besoin de prévoir une compensation.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Une interrogation : à quelle réalité statistique renvoie la déclaration de maternité frauduleuse ?
L'amendement n°81 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°34 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Nous autorisons des délégations ponctuelles de l'officier d'état civil de Mamoudzou dans les communes les plus éloignées.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable, cela viderait le dispositif de sa substance. En cas de difficulté de transport, sachez que la reconnaissance de paternité peut avoir lieu à tout moment.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°34 rectifié n'est pas adopté.
L'article 3 est adopté.
Article 4
Mme la présidente. - Amendement n°98 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous supprimons l'article 4, qui allonge le sursis à l'enregistrement de la reconnaissance d'un enfant prononcé par le procureur de la République.
Cela bloque les possibilités d'accès aux droits sociaux de l'enfant, et compromet ainsi sa sécurité physique et psychique. Cela renforce la précarité et l'errance administrative des parents.
Encore une fois, pouvez-vous m'apporter des précisions sur les actes frauduleux de reconnaissance de maternité ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. L'allongement de ce délai poursuit un but d'intérêt général, car il permet de lutter contre les fraudes, qui nuisent à l'intérêt de l'enfant - car les fraudeurs n'assumeront pas leurs obligations parentales.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°98 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°66 de M. Hochart et alii.
M. Joshua Hochart. - Cet amendement renforce la lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité. Nous portons à quatre mois le sursis lorsqu'il y a un doute et à six mois lorsque des vérifications à l'étranger sont nécessaires.
Ces reconnaissances frauduleuses permettent à des personnes de rester sur le territoire, de toucher des aides sociales et parfois d'obtenir la nationalité française.
Cet amendement ne remet pas en cause les garanties procédurales, mais permet au parquet de travailler efficacement. C'est ainsi que l'on rétablira l'ordre républicain à Mayotte.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable : allonger ainsi le sursis serait disproportionné au regard de l'article 73 de la Constitution et au droit à mener une vie familiale. Les enquêtes à l'étranger sont fréquentes et les délais sont renouvelables une fois. Restons-en au texte, qui est équilibré.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°66 n'est pas adopté.
L'article 4 est adopté.
L'article 5 est adopté.
Après l'article 5
Mme la présidente. - Amendement n°76 de M. Szczurek et alii.
M. Joshua Hochart. - Défendu.
L'amendement n°76, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°102 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Il s'agit d'automatiser l'enregistrement d'une première demande de titre de séjour mention « jeune né en France » pour tous les enfants qui remplissent les conditions classiques de l'acquisition de la nationalité française, mais qui s'en voient empêchés du fait des nouvelles dérogations.
L'obtention d'un titre de séjour dure jusqu'à un an. Pendant ce temps, certains deviennent majeurs, ils obtiennent leur baccalauréat, mais dépassent les délais prévus par Parcoursup, ce qui les condamne à une année blanche.
La préfecture et le rectorat ont créé un canal de régularisation bénéficiant à 450 jeunes chaque année. Or plus du triple deviennent bacheliers : ouvrons-leur ce dispositif et ne maintenons pas ces jeunes dans l'errance administrative.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable à cette délivrance automatique d'un titre de séjour : cela risquerait de créer un appel d'air.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°102 n'est pas adopté.
L'article 6 est adopté.
Article 7
Mme la présidente. - Amendement n°8 rectifié de Mme Narassiguin et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - Nous n'aurions pas imaginé qu'à l'occasion d'un texte de refondation de Mayotte, on nous reparle de la rétention des mineurs - dont nous avons voté l'interdiction lors de la loi Immigration. Malgré les efforts du Gouvernement pour éviter ce terme, c'est bien une forme de rétention des mineurs que cet article 7 permettrait ; certains seraient ainsi placés dans un centre de privation des libertés.
M. Darmanin avait assuré qu'il ne reviendrait pas sur la décision historique d'interdire l'enfermement des mineurs, y compris à Mayotte. Le reniement est total, car vous prolongez en plus le dispositif jusqu'en juillet 2028.
Que ces centres soient indépendants des CRA ne change pas grand-chose. D'ailleurs, l'étude d'impact précise que ces établissements auront un dispositif de surveillance plus strict que l'assignation à résidence. Nous nous y opposons frontalement.
Mme la présidente. - Amendement identique n°105 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Supprimons cet article qui permet l'enfermement des enfants en rétention. Depuis 2012, la France a fait l'objet de huit condamnations de la Cour européenne des droits de l'homme. L'enfermement des enfants est interdit dans l'Hexagone ; à Mayotte, ce sera seulement le 1er janvier 2027.
La détention d'un enfant au motif du statut administratif de ses parents est une violation des droits de l'enfant. Qui décide à sa naissance du statut de ses parents ? Votons contre cette disposition indigne du pays qui se veut celui des droits de l'homme !
Mme la présidente. - Amendement identique n°145 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Lors des négociations sur le Pacte européen sur la migration et l'asile, le Gouvernement avait tenté de trouver une majorité pour autoriser l'enfermement des enfants. Heureusement, cette tentative a échoué. Depuis 2024, la loi l'interdit : c'est une bonne chose.
Les unités familiales sont l'inverse de ce que le Parlement a voté l'an dernier. Il n'existe aucune raison valable justifiant que les enfants ne disposent pas des mêmes droits à Mayotte.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable à ces trois amendements. Contextualisons : en 2023, 2 143 familles comprenant 2 909 mineurs accompagnants ont été placées en rétention à Mayotte pour une durée inférieure à vingt-quatre heures, soit 97 % des mineurs en rétention sur tout le territoire national.
Certes, la loi Immigration interdit la rétention des mineurs, mais cette disposition ne sera applicable à Mayotte qu'à partir du 1er janvier 2027. Le Conseil d'État a validé ces mesures dérogatoires.
Ces familles sont retenues dans des lieux spécialisés. Supprimer cet article serait un frein à l'éloignement des étrangers en situation irrégulière.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - La suppression du placement des familles dans les centres de rétention est une mesure forte, promue par le précédent gouvernement.
À Mayotte, le législateur a choisi de laisser un peu de temps à l'exécutif, compte tenu de la situation particulière de l'île. Le Gouvernement n'a pas renoncé à interdire à terme le placement en rétention des mineurs à Mayotte.
Le CRA de Pamandzi comptait 2 220 mineurs accompagnant leurs parents en 2023, contre 87 pour la France hexagonale. C'est la preuve que nous devons disposer d'infrastructures spécifiques pour éloigner les familles.
Madame Narassiguin, vous comparez ces structures aux CRA. Je connais votre engagement, je le respecte. Mais il n'en sera rien. Les unités familiales seront indépendantes des CRA et l'intimité des familles sera préservée. Le régime de surveillance y sera plus léger : pas de grillage ni de barbelés, pas de présence policière, pas de haut-parleurs. Ces unités familiales n'accueilleront pas l'ensemble des familles, mais offriront une alternative plus sécurisée que l'assignation à résidence.
Il est faux de prétendre que ce dispositif violerait nos engagements internationaux. Le 12 juillet 2016, cinq arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme ont rappelé que la rétention des familles avec mineurs était acceptable en dernier ressort, si aucune autre mesure n'apparaît suffisante pour mettre en oeuvre le retour.
En outre, ce dispositif est conforme à l'article 17 de la directive Retour.
Il est compatible avec l'intérêt supérieur de l'enfant prévu par la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE).
Supprimer cet article compliquerait à l'extrême de nombreux éloignements à Mayotte.
Dès lors, avis défavorable à ces amendements.
Madame Corbière Naminzo, les reconnaissances frauduleuses de paternité concernaient près de 7 % des dossiers en 2023 ; en 2022, 20 % de la fraude détectée sur les demandes de titres de séjour.
Les amendements identiques nos8 rectifié, 105 et 145 ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°35 rectifié Mme Briante Guillemont
Mme Sophie Briante Guillemont. - Cet amendement vise à interdire la rétention des mineurs à Mayotte. Le RDSE souhaite voter ce texte qui comporte de nombreuses mesures importantes, mais cela nous sera difficile si l'article 7 est maintenu en l'état.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable à cet amendement irréaliste qui empêcherait chaque année plusieurs milliers d'éloignements à Mayotte.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°35 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°36 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Amendement de repli prévoyant que le JLD autorise la rétention familiale.
Mme la présidente. - Amendement n°67 de M. Hochart et alii.
M. Joshua Hochart. - Cet amendement porte de 48 à 96 heures la durée maximale de placement dans les structures adaptées pour les familles étrangères accompagnées d'enfants. Il s'agit de donner à l'État les moyens d'agir : le délai actuel est trop court et paralyse l'action de l'administration.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°36 rectifié : cette exigence, disproportionnée par rapport à l'objectif, n'a pas d'équivalent.
Avis défavorable à l'amendement n°67 : cet allongement ne paraît pas nécessaire au regard de la durée moyenne de rétention dans ces structures, qui est de 24 heures. Ce n'est que lors de situations très particulières, dues par exemple à des phénomènes météorologiques, que nous prévoyons un prolongement de 24 heures.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis aux amendements nos36 rectifié et 67.
Monsieur Hochart, l'intérêt supérieur de l'enfant exige que la rétention en milieu contraint soit la plus réduite possible, conformément aux dispositions de la Cour européenne des droits de l'homme.
L'article 7 limite la durée du placement à 48 heures dans tous les cas de figure. Nous ne souhaitons pas aller au-delà, conformément à la décision du 6 septembre 2018 du Conseil constitutionnel.
Porter la durée de rétention à 96 heures risquerait de mettre en péril ce compromis.
L'amendement n°36 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°67.
Mme la présidente. - Amendement n°44 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Cet amendement de repli supprime le durcissement introduit en commission et revient à la rédaction initiale du texte.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Cet amendement supprime une disposition pragmatique.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°44 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°146 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Cet amendement de repli vise à faire des unités de vie familiale (UVF) une solution transitoire jusqu'à l'interdiction de l'enfermement des enfants au 1er janvier 2027.
Mme la présidente. - Amendement n°156 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'amendement du Gouvernement reporte au 1er janvier 2028 l'entrée en vigueur des UVF au lieu du 1er janvier 2027.
Les UVF doivent accueillir des personnes dans le respect de la vie familiale et de l'intérêt supérieur de l'enfant, comme je l'ai précisé.
Les délais pour construire les UVF ne sont pas compatibles avec une mise en service au 1er janvier 2027. En outre, les tensions pesant sur le secteur du BTP à Mayotte doivent être prises en compte. La reconstruction de l'archipel a mis sous pression l'ensemble du secteur. Les unités familiales ne seront vraisemblablement pas prêtes en 2027. Par coordination, cet amendement repousse aussi la mise en rétention des mineurs à la même date.
En 2024, le CRA de Mayotte a accueilli 1 395 personnes étrangères accompagnées de mineurs, dont 1 234 de nationalité comorienne.
L'information circulerait vite, si les personnes ne pouvaient plus être placées en rétention ou en unité familiale le 1er janvier 2027. Nous risquerions d'être confrontés à un trafic d'enfants et à un nombre de mineurs isolés encore plus important. Nous proposons le maintien en CRA des majeurs en situation irrégulière accompagnés de mineurs jusqu'à la création des unités familiales.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°146. Les unités familiales doivent être des structures pérennes.
Avis favorable à l'amendement n°156. Nous avons compris que la mise en oeuvre des unités familiales ne sera pas effective au 1er janvier 2027. Cela dit, monsieur le ministre, nous vous invitons à accélérer les choses : ces unités sont le meilleur cadre dans l'attente de la mise en oeuvre des mesures d'éloignement. (M. Manuel Valls acquiesce.)
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Avis défavorable à l'amendement n°146.
L'amendement n°146 n'est pas adopté.
L'amendement n°156 est adopté.
L'article 7, modifié, est adopté.
Article 8
Mme la présidente. - Amendement n°9 rectifié de Mme Narassiguin et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - En matière migratoire, l'imagination du Gouvernement est sans limite : l'article 8 permet de retirer le titre de séjour à un parent en raison du comportement de son enfant. C'est contreproductif pour lutter contre l'insécurité, et, de surcroît, inutile. Nous risquons de précariser les familles en excluant les parents du bénéfice des prestations sociales.
En outre, cela nous paraît aller au-delà de l'article 73 de la Constitution.
Cette mesure n'a pas de lien direct avec les caractéristiques propres de Mayotte.
Nous savons combien les outre-mer peuvent être des laboratoires de remise en cause des droits, avant la généralisation des mesures à l'ensemble des outre-mer, puis à tout le territoire national. C'est dangereux. Supprimons l'article 8.
Mme la présidente. - Amendement identique n°37 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Cet amendement supprime une disposition qui introduit une confusion dangereuse entre protection de l'enfant et politique migratoire.
La mesure prévue fait peser une responsabilité pénale disproportionnée sur les épaules des parents. Elle instrumentalise le droit au séjour comme une sanction indirecte, en rupture avec nos principes fondamentaux.
L'encadrement de la responsabilité parentale relève de l'action sociale et judiciaire, non de la préfecture.
Lutter contre la délinquance des mineurs est indispensable, mais cela passe par des mesures éducatives et préventives.
Mme la présidente. - Amendement identique n°106 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Supprimons cet article. Comme avec le texte relatif à la justice pénale des mineurs que nous avons examiné hier, il s'agit de punir les parents pour les actes commis par leurs enfants. C'est contraire au principe constitutionnel selon lequel « Nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ».
Quoi qu'il en soit, comment prouver que l'acte du mineur découle d'une défaillance éducative parentale et non d'autres facteurs ? Cet article suppose une relation mécanique entre la faute éducative et la délinquance, c'est faux !
La notion de menace pour l'ordre public ne fait pas l'objet d'une définition claire. Le répressif plutôt que l'éducatif, cela ne fonctionne pas ! Le département de Mayotte souffre de carences systémiques dans le déploiement des dispositifs de protection de l'enfance. La priorité doit aller à la prise en charge des enfants vulnérables et à la prévention. Supprimons cet article indigne.
Mme la présidente. - Amendement identique n°147 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Les dispositions de cet article sont dures à avaler... Celui-ci permettrait le retrait d'un titre de séjour en raison du comportement d'un tiers ; c'est sans précédent.
Cela remet en cause un principe fondamental du droit : on ne peut être condamné que pour des faits que l'on a commis soi-même. Il n'y a pas de lien entre les faits commis par un enfant et le titre de séjour d'un parent.
La confusion est totale. D'autant plus que l'on pourrait s'interroger sur les effets d'une telle mesure. Que cherchez-vous ? La situation des enfants sera-t-elle meilleure lorsque l'on aura retiré le titre de séjour de leurs parents ?
Nous faisons entrer dans le droit, via la brèche ouverte par Mayotte, des mesures qui violent des principes fondamentaux de la République, et qui bientôt s'étendront à d'autres parties du territoire. C'est inacceptable.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Que cherchons-nous, madame la sénatrice ? Eh bien, la responsabilisation des parents des enfants délinquants ! Pas moins de 44 % des mineurs condamnés à Mayotte sont étrangers, contre 15 % en métropole. (Mme Mélanie Vogel proteste.)
Ce n'est pas un système de faute automatique ; le lien de causalité devra être prouvé entre la défaillance des parents et l'acte délictueux. Je précise que les actes devront être réitérés dans un délai de six mois pour que le titre de séjour soit retiré.
Pour le préfet, c'est une disposition essentielle.
Les élus locaux mahorais ont soutenu cette mesure. Ils ont simplement regretté qu'elle soit temporaire : nous avons donc supprimé cette limite.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Entre 2019 et 2024, la part des mineurs étrangers condamnés a augmenté de 110 % à Mayotte, tandis qu'elle baissait, sur la même période, de 12 % dans l'Hexagone. Quelque 44 % des mineurs délinquants sont étrangers.
Mme Mélanie Vogel. - C'est parce qu'il y a plus d'étrangers à Mayotte !
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Il y a donc un problème.
Le législateur, sans méconnaître les principes fondamentaux du droit, doit prendre les mesures nécessaires. Il doit adapter les règles relatives au séjour et à l'entrée des étrangers à Mayotte, afin de lutter contre la pression migratoire sans précédent subie par le département. C'est une réalité que nous ne pouvons que constater, hélas, à Mayotte.
L'article 8 prévoit qu'un avertissement préalable est envoyé au détenteur de l'autorité parentale. Cela offre aux parents la possibilité de mettre fin au comportement de leur enfant portant atteinte à l'ordre public.
En cas d'échec de la période probatoire, l'efficacité de la mesure est renforcée par la possibilité de procéder à l'éloignement des parents détenteurs de l'autorité parentale et des mineurs troublant l'ordre public. Les parents sont sanctionnés s'ils n'ont pas tout mis en oeuvre pour faire cesser ces comportements délictueux.
Il faut agir et trouver les dispositifs qui doivent s'adapter tout en restant conformes à notre ordre constitutionnel - le Conseil d'État a confirmé la constitutionnalité du dispositif. Nous adaptons les dispositions législatives à la réalité de Mayotte, tout en préservant notre État de droit.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Arrêtez de nous assommer de statistiques ! Vous prétendez que 44 % des enfants délinquants sont étrangers : dans la mesure où il y a 48 % d'étrangers sur l'île, ils sont sous-représentés ! (Mme Evelyne Corbière Naminzo apprécie.) Vous qui aimez les statistiques, pourquoi je ne vous entends jamais dire que les trois quarts d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je l'ai mentionné à de nombreuses reprises.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Votre projet de loi est idéologique. Lorsque la droite vous propose un amendement qui durcit des mesures qui relèvent de la xénophobie, vous le prenez. Et vous refusez tout ce qui vous rappelle au droit, à l'intérêt supérieur de l'enfant, aux conventions et à nos engagements internationaux. Votre démonstration ne tient pas.
M. Guy Benarroche. - Ce débat me rappelle celui que nous avons eu lors de l'examen de la loi visant à aménager le code de la justice pénale des mineurs, notamment sur la comparution immédiate des mineurs de 13 ans ou la mise en prison de mineurs pour des peines courtes. Je doute de la constitutionnalité de ces mesures, monsieur le ministre. M. Darmanin lui-même en expliquait les limites ; pourtant, Les Républicains du Sénat ne l'ont pas écouté.
Loi après loi, vous ajoutez des articles idéologiques, qui ne répondent pas aux problèmes des Mahorais. Vos statistiques cachent l'absence d'arguments réels.
Hélas, je connais trop de familles étrangères qui disposent de titres de séjour, très bien intégrées dans la vie locale et nationale, et dont les enfants, mineurs donc, sont des délinquants. Lorsque cet article viendra à s'appliquer en métropole - oui, cela arrivera -, leur titre de séjour sera supprimé !
Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois. - Aux attaques permanentes de xénophobie, racisme ou de discrimination, je réponds que nous respectons toutes les règles. Vouloir supprimer le titre de séjour de parents d'enfants qui se comportent mal, pour beaucoup de Français, c'est une mesure de bon sens. C'est une manière de rappeler que lorsqu'un pays accepte un étranger sur son territoire - compétence régalienne - il a le droit de les éloigner s'ils se comportent mal. (Applaudissements sur quelques travées à droite ; Mmes Christine Bonfanti-Dossat, Jacqueline Eustache-Brinio et Micheline Jacques renchérissent.)
Mme Mélanie Vogel. - J'entends que les accusations de xénophobie et racisme sont difficiles à entendre de manière répétée, quoique nous ne les ayons pas totalement formulées. (On en doute au banc des commissions.)
Monsieur le ministre, vous êtes intelligent, vous distinguerez facilement la corrélation de la causalité : s'il y a plus de mineurs étrangers à Mayotte, ils sont forcément plus nombreux à être délinquants.
Hormis la volonté de sanctionner les étrangers et de les expulser, il n'y a aucune raison de priver de titre de séjour une personne pour des faits commis par ses enfants. (M. Guy Benarroche renchérit.)
Mme Corinne Narassiguin. - Je n'aurai pas grand-chose à ajouter. Personne ne conteste la réalité des problèmes à Mayotte. Mais les mineurs délinquants sont à la fois français et étrangers.
L'influence du ministre de l'intérieur a été grande dans ce projet de loi, on le voit. Nous passons beaucoup plus de temps sur l'immigration que sur les infrastructures, l'éducation, le social, qui seraient les bons vecteurs pour aider ces mineurs à sortir de la délinquance.
Madame la présidente de la commission, ces mesures relèvent de tout sauf du bon sens.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Les termes de racisme et de xénophobie ont été employés, c'est inacceptable. Mais bon, passons... Vous prétendez que nous sommes dans l'idéologie, mais en utilisant de tels mots, c'est plutôt vous qui agissez ainsi. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio renchérit.)
Nous cherchons, de façon pragmatique, à répondre aux problèmes de Mayotte. Ce texte aborde tous les dossiers ; c'est vous qui vous concentrez sur les dispositions relatives à l'immigration. Nous prenons à bras-le-corps - l'amendement à 4 milliards d'euros en témoigne - l'ensemble des problèmes révélés par le cyclone Chido.
Au-delà des investissements nécessaires à la reconstruction, la priorité est la convergence sociale. Attendue depuis longtemps - au nom de l'égalité républicaine -, elle est enfin inscrite dans la réalité.
Si nous ne traitons pas la question de l'habitat illégal et de l'immigration irrégulière, rien de ce que nous prévoyons ne sera possible. (On ironise sur les travées du GEST.)
Nous travaillons avec pragmatisme, sans idéologie. Les sujets, notamment la violence des mineurs étrangers, sont très complexes. Pourquoi ai-je fait référence à des statistiques ? Pour montrer la nécessité d'adapter la loi à la réalité de Mayotte. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles.
Vous avez le droit de contester l'avis du Conseil d'État, mais le Gouvernement, pour préparer le projet de loi, doit s'appuyer dessus ; or il est précisé que nous respectons le cadre constitutionnel.
Nombre d'enfants mineurs étrangers sont scolarisés ; le Gouvernement ne mettra jamais en cause cela. Nous faisons en sorte que l'école puisse donner une chance à tous les enfants, y compris ceux des bangas.
Si le Gouvernement n'apportait pas de réponse à ces réalités, les Mahorais nous en tiendraient rigueur.
C'est vous qui faites de l'idéologie. (On ironise sur les travées du GEST.)
Le Gouvernement agit avec célérité et pragmatisme. C'est le ministre de l'outre-mer qui vous le dit et l'ancien ministre de l'intérieur. Beaucoup regrettent aujourd'hui la circulaire Valls, les mêmes qui la mettaient en cause il y a quelques années...
Les amendements identiques nos9 rectifié, 37 rectifié, 106 et 147 ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°38 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
M. Michel Masset. - Cet amendement de repli renforce les garanties procédurales prévues par l'article, en conditionnant le retrait du titre à une décision d'un juge des enfants. Seule l'autorité judiciaire spécialisée dotée d'une connaissance fine des dynamiques familiales peut juger de la responsabilité des parents dans les actes délinquants du mineur.
Nous introduisons un filtre afin de protéger les familles du pouvoir discrétionnaire de la préfecture.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Votre amendement est contraire à la Constitution, en vertu d'une décision du 28 juillet 1989 relative à la séparation des pouvoirs.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°38 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°148 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Cet amendement de repli exclut du dispositif les personnes titulaires d'une carte de résidence ou de résidence temporaire.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Le texte prévoit déjà des dérogations pour ces titulaires, qui ne peuvent faire l'objet d'un retrait de titre de séjour que si le comportement du mineur constitue une menace grave pour l'ordre public. Un autre document de séjour, certes moins protecteur, leur sera délivré de plein droit.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°148 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°107 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Cet amendement de repli vise à empêcher le retrait du titre de séjour pour le parent titulaire de l'autorité parentale sur d'autres mineurs.
Cet article, qui contrevient au principe d'individualisation des peines, aurait des conséquences sur toute la fratrie. Si les parents se voient retirer leur titre de séjour, qu'adviendrait-il des autres enfants de la fratrie ? Une sanction serait appliquée à des enfants innocents.
C'est contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant. Nous ne pouvons légiférer à la légère. On ne peut pas mettre tout le monde dans le même sac et les jeter à la mer !
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Cette mesure est non pas une sanction, mais une mesure de police administrative. Votre amendement créerait une immunité pour les familles ayant plusieurs enfants, vidant de son sens le dispositif proposé. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
M. Guy Benarroche. - Le terme d'immunité me choque. Un exemple : une famille parfaitement intégrée de quatre enfants. Le dispositif aurait des conséquences sur les frères et soeurs uniquement parce que l'un des frères, un mineur de 17 ans peut-être, constituerait une menace pour l'ordre public.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Il s'agit d'un amendement de repli qui protège des enfants innocents. Je l'entends, vous souhaitez protéger le territoire d'une prétendue submersion migratoire... Simplement, je demande au Sénat de protéger des enfants innocents !
L'amendement n°107 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°149 de Mme Vogel et du groupe CRCE-K.
Mme Mélanie Vogel. - Rétablissons la limitation dans le temps prévue par le projet de loi initial.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable : la suppression de cette limite est une demande des élus mahorais.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°149 n'est pas adopté.
L'article 8 est adopté.
Modification de l'ordre du jour
Mme la présidente. - Par lettre en date de ce jour, M. Mathieu Darnaud, président du groupe Les Républicains, a demandé le remplacement du débat sur le thème « Quelles réponses apporter à la crise du logement ? », inscrit à l'ordre du jour du mardi 27 mai 2025, par un débat sous forme de questions-réponses sur le thème « Comment nos politiques publiques peuvent-elles contribuer à relever les défis auxquels sont confrontées les zones rurales de notre pays ? ».
Il en est ainsi décidé.
La séance est suspendue à 20 heures.
Présidence de M. Loïc Hervé, vice-président
La séance reprend à 21 h 30.
Refondation de Mayotte (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
Après l'article 8
M. le président. - Amendement n°31 rectifié quinquies de Mme Goulet et alii.
L'amendement n°31 rectifié quinquies n'est pas défendu.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Je le reprends.
M. le président. - Amendement n°167 de Mme Canayer, au nom de la commission des lois.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Cet amendement reprend les dispositions de l'article 48 du projet de loi Immigration, censuré par le Conseil constitutionnel au motif qu'il s'agissait d'un cavalier législatif.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Sagesse.
L'amendement n°167 est adoptéet devient un article additionnel.
Article 9
M. le président. - Amendement n°1 de Mme Narassiguin et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - Nous supprimons l'article 9 qui vise à lutter contre les filières des passeurs, car le dispositif prévu n'empêchera pas les flux financiers frauduleux et pourrait même aboutir à augmenter les bénéfices des filières illégales.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis défavorable. Lutter contre les transferts d'argent liquide est une étape importante. Cet article n'empêchera pas la criminalité organisée, mais tel n'est pas son objectif. Je ne comprends pas votre opposition, sauf à considérer les flux issus de la diaspora comorienne en situation irrégulière comme une aide au développement déguisée.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Cette mesure est capitale pour entraver les flux financiers des passeurs et les flux illégaux depuis Mayotte, mais aussi pour lutter contre l'immigration irrégulière.
L'article vise les opérations les plus concernées par la criminalité financière. Les virements bancaires seront encore possibles, mais feront l'objet de contrôles poussés par les opérateurs. Parallèlement, les forces de l'ordre poursuivent et intensifient le démantèlement des organisations criminelles. Avis défavorable.
L'amendement n°1 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°39 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Cet amendement introduit une limite raisonnable au contrôle des transferts d'argent, en fixant un seuil de 300 euros. La mesure initiale risque de pénaliser les personnes les plus précaires, qui envoient 30 ou 50 euros à leur famille restée au pays. Concentrons les moyens de contrôle là où ils sont nécessaires.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Cela viderait l'amendement de sa substance, car les personnes concernées pourraient fractionner les transferts d'argent.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°39 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°164 de Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission des lois.
L'amendement rédactionnel n°164, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 9, modifié, est adopté.
Article 10
M. le président. - Amendement n°63 de Mme Guhl et alii.
M. Daniel Salmon. - L'article 10 renforce les pouvoirs de police spéciale dans la lutte contre l'habitat informel à Mayotte. Il réduit le délai d'exécution de l'ordre d'évacuation des bidonvilles, met fin à l'obligation pour le préfet de proposer un hébergement d'urgence et réduit le droit de recours. Il s'agit de détruire plus facilement les bidonvilles à Mayotte en dehors du droit commun, mais sans régler le problème de l'habitat insalubre. Supprimons cet article !
M. le président. - Amendement identique n°82 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - C'est un des points noirs de ce projet de loi. Refonder oui, mais pas au détriment des fondements de notre République. Le Conseil d'État le note dans son avis : il n'y a pas assez de places pour héberger ou reloger les personnes dont vous voulez détruire l'habitat insalubre.
Quelque 77 % des Mahorais vivent sous le seuil de pauvreté et 40 % dans des logements en tôle. Détruire les bidonvilles sans offrir de solution de relogement revient à reproduire la situation d'après-Chido. Personne n'habite un habitat de fortune par choix.
Enfin, créer une dérogation au droit commun pour dix ans est contraire au Préambule de 1946.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Avis défavorable. Le renforcement des pouvoirs de police administrative en matière d'évacuation et de démolition répond à la demande des élus. Il serait irresponsable de supprimer cet article, que la commission a sécurisé.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Avis défavorable. L'habitat illégal et informel est l'un des fléaux qui ronge Mayotte. La destruction d'habitations illégales n'est ni techniquement ni humainement facile, mais c'est une décision fondée sur le droit. Il y va de la sécurité, de la salubrité publiques et de la dignité humaine. On peut se questionner sur l'efficacité de ces politiques au regard de la reconstruction rapide de ce type d'habitat après Chido, mais je réfute l'expression « point noir ».
La démolition prévue de 73 cases, en avril, à Dzoumogné, permettra de construire une école de 26 classes et de s'attaquer à un foyer de délinquance. La coopération avec les associations qui réalisent des enquêtes sociales et qui proposent des solutions de relogement n'est pas remise en cause.
Ne caricaturez pas les opérations conduites dans le cadre de la loi Élan. Le terme « décasage » est réducteur, car ces opérations supposent un fin travail préparatoire, associant élus, forces de sécurité intérieure et associations. En 2024, six opérations ont eu lieu.
Dès le lendemain du passage de Chido, les élus ont demandé la destruction des bidonvilles - certains en demandaient même l'interdiction, alors que par principe ils sont interdits...
Oui, nous devons mener un travail de fond sur le relogement. Mais, de grâce, nous avons besoin de cet article. Nous sommes attendus sur sa mise en oeuvre, pas sur sa suppression.
Mme Antoinette Guhl. - Dire que nous allons détruire les bidonvilles à Mayotte n'a pas de sens : Chido l'a déjà fait. Résultat : ils sont déjà tous reconstruits. La solution est de développer le logement et de réaménager l'île pour en faire un espace polycentré.
Rendre les conditions de vie encore plus indignes n'arrangera rien. Je conteste l'efficacité et l'humanité de la mesure.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous voulons donner à l'État les moyens de reloger les personnes. Il n'est pas question, après Chido, qu'un cyclone Macron ou Valls rejette à la rue des personnes en situation de précarité ! Mettons en place une vraie politique de relogement.
M. Saïd Omar Oili. - On vote des textes symboliques qui ne s'appliquent pas. Après avoir voté l'interdiction de la tôle dans la loi d'urgence, j'ai demandé un bilan de la vente de la tôle, désormais soumise à la présentation d'une pièce d'identité avec enregistrement dans chaque magasin... Faisons d'abord ce bilan, avant de parler des bidonvilles.
Les amendements identiques nos63 et 82 ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°113 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - L'habitat informel est presque la norme à Mayotte : 40 % des logements de Mayotte sont en tôle, même si tous ne sont pas illicites et ne seront pas détruits.
Avant d'envisager la démolition, voyons s'ils ne peuvent être améliorés en les raccordant aux réseaux, par exemple. Autorisons des modifications temporaires mais vitales, plutôt que de procéder à des expulsions. Si l'hébergement ou le relogement ne sont pas possibles, soyons pragmatiques, sans oublier le besoin de constructions neuves, car nous devons loger les 77 % des habitants vivant sous le seuil de pauvreté.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Avis défavorable. Pourquoi ajouter une charge administrative à un État qui manque déjà de moyens ? Ces habitats de fortune sont souvent édifiés sur des terrains non constructibles, au terrassement sommaire, ce qui les expose à des risques graves. Les épidémies - choléra, typhoïde, poliomyélite, hépatite A - liées à ces mauvaises conditions de vie expliquent 10 % des passages à l'hôpital.
Si vous aviez, comme nous, visité ces bidonvilles, vous n'auriez pas la même vision. (Mme Antoine Guhl le conteste.) Leur évacuation est ordonnée à cause de ces risques.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°113 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°13 de Mme Artigalas et du groupe SER.
Mme Viviane Artigalas. - Cet article 10 prévoit deux dispositions pour lutter contre l'habitat informel.
Le premier permet d'agir immédiatement pour empêcher l'extension des bidonvilles existants ou la création de nouvelles zones d'habitat informel, en augmentant le délai de flagrance et en élargissant la liste des agents habilités à constater les infractions.
Le second vise à traiter de larges zones d'habitats informels, installés parfois depuis plusieurs années, en supprimant pendant dix ans l'obligation de relogement ou d'hébergement et en ramenant le délai accordé pour évacuer et démolir les locaux à quinze jours au lieu d'un mois. Ces deux exceptions ne paraissent ni justifiées ni opérantes pour lutter contre l'habitat informel installé de longue date. Voyez les opérations d'évacuation et de destruction, inefficaces ! Sans accompagnement, les familles n'ont d'autre choix que de s'installer dans de nouveaux lieux informels dans des conditions toujours plus précaires.
Maintenons une proposition de relogement ou d'hébergement et des délais raisonnables pour accompagner les familles. Nous rétablissons aussi tous recours.
M. le président. - Amendement n°40 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°83 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - Voilà ce qu'aurait dû comporter l'article 10 : l'interdiction des bidonvilles, avec relogement systématique des personnes qui y vivent. Nous comprenons le trouble créé par les bidonvilles, mais c'est avant tout un drame pour ceux qui y vivent.
Notre amendement tend à régler le problème à la source, en éradiquant le mal-logement. Mais il faut commencer par respecter le principe d'égalité : l'État doit respecter son obligation de relogement.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Avis défavorable aux trois amendements.
La commission souhaite le maintien de délais réduits, pour répondre au sentiment d'impuissance des élus. Elle a encadré l'assouplissement des obligations de relogement, qui doivent être justifiées au regard des circonstances locales. Le parc d'hébergement, avec seulement 1 241 places, est en suroccupation chronique à 130 %. Cette dérogation est aussi circonscrite dans le temps : dix ans, c'est long, mais cela correspond à la réalité du terrain, car Mayotte est dans une situation économique et sociale dramatique. À Saint-Martin, sept ans après l'ouragan Irma, tout n'est pas reconstruit... La commission a limité le recours suspensif au référé-liberté, qui permet un délai de réaction rapide du juge, sous 48 heures.
Ce sont des évolutions équilibrées.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - J'ajoute : pour lutter contre l'habitat informel, il faut augmenter les pouvoirs de police administrative spéciale. Ensuite, il faut effectivement plus de logements adaptés, pour reloger. Mais avec ces amendements, vous démunissez l'État. Bien entendu, il s'agit aussi d'humain, les services sociaux sont là pour ça. Mais nous devons démontrer que nous voulons mettre fin à ce phénomène - et ce sera long, car c'est ancré dans une réalité locale. Avis défavorable.
L'amendement n°13 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos40 rectifié et 83.
L'article 10 est adopté.
Après l'article 10
M. le président. - Amendement n°45 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Le sujet de l'assurabilité des biens est primordial pour la refondation durable de l'île. Après un sinistre, l'assurance favorise la résilience d'un territoire et de ses habitants. Nous devons donc améliorer la couverture assurantielle à Mayotte.
Aujourd'hui, seuls 6 % des logements sont assurés à Mayotte, contre 96 % en métropole et 50 % dans les autres outre-mer. Cette situation tient à deux dynamiques : un faible réflexe assurantiel et une intensification des risques. Attaquons-nous à une partie du problème en diffusant une culture assurantielle sur l'île.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Je partage votre préoccupation, relayée à plusieurs reprises par la délégation sénatoriale aux outre-mer. Je pense notamment à notre rapport de 2022, qui préconisait d'autoriser l'assurance des opérations d'autoconstruction et d'autoréhabiliation.
Mais le caractère normatif de votre amendement, à la formulation très générale, n'est pas évident. Il accroît la charge de l'État à Mayotte, alors que ses moyens y sont structurellement déficitaires ; la commission des affaires économiques l'a constaté lors de son déplacement début mai. Je suis favorable à une réforme plus structurelle, prenant en compte les spécificités assurantielles ultramarines.
Demande de retrait, sinon avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°45 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°72 rectifié de M. Hochart et alii.
L'amendement n°72 rectifié n'est pas défendu.
L'article 23 (appelé en priorité) est adopté.
Après l'article 23 (Appelé en priorité)
M. le président. - Amendement n°47 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
M. Henri Cabanel. - L'amendement prévoit une évaluation au terme de la période 2026-2031 pendant laquelle Mayotte bénéficie d'un régime fiscal et de zonage quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) dérogatoire.
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Il faut certes mieux évaluer les effets du classement en QPV, mais ne multiplions pas les demandes de rapports. Le comité de suivi de la loi de programmation en rendra compte au Parlement et un rapport intermédiaire sera remis d'ici au 1er juillet 2028. Pour éviter les doublons, je demande le retrait de cet amendement, sinon avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°47 rectifié est retiré.
L'article 24 (appelé en priorité) est adopté.
Article 11
M. le président. - Amendement n°108 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous vous invitons à interdire la retenue des mineurs dans le cadre des visites domiciliaires pour la recherche d'armes. Vous prévoyez que le mineur doit être assisté par son représentant légal, sauf impossibilité dûment justifiée - ce qui manque de clarté. Gare aux dérives ! C'est contraire aux exigences constitutionnelles sur la clarté de la loi et sur la justice des mineurs qui implique l'atténuation de leur responsabilité pénale.
M. le président. - Amendement n°153 de Mme Vogel et alii.
M. Daniel Salmon. - Cet article prévoit un régime de retenue administrative à domicile. Prévu en matière de terrorisme, il serait étendu ici de manière très large. Nous voulons prévoir la présence obligatoire des représentants légaux des mineurs, car la mesure, coercitive, est déséquilibrée.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Nous parlons de trouble grave à l'ordre public et de personnes jugées dangereuses.
La retenue des mineurs serait soumise à autorisation du JLD et à la présence du représentant légal, sauf impossibilité dûment justifiée.
L'amendement n°108 évoque une possible inconstitutionnalité. Or une décision du Conseil constitutionnel du 29 mars 2018 a validé le principe tel qu'il est ici proposé.
La présence des parents demeure le principe, mais si elle n'est pas possible, elle ne doit pas pouvoir faire échec à la visite domiciliaire.
Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le projet de loi encadre la retenue d'un mineur : accord exprès du JLD et présence du représentant légal. La retenue ne peut concerner que la personne ayant justifié la visite.
Ce n'est pas une mesure judiciaire, mais administrative. Les jurisprudences citées sont donc inopérantes : il ne s'agit pas de sanctionner, mais de retenir une personne susceptible de fournir des renseignements sur les armes recherchées ou découvertes.
C'est la reprise à l'identique du cadre des visites domiciliaires en matière de terrorisme, que le Conseil constitutionnel a jugé conforme à notre loi fondamentale. Avis défavorable à l'amendement n°108.
Même chose pour l'amendement n°15, car pour faire échec à la mesure, il suffirait pour le parent de se rendre injoignable.
L'amendement n°108 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°153.
L'article 11 est adopté.
L'article 12 est adopté.
Article 13
M. le président. - Amendement n°109 Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous avons, nous, un regard bienveillant sur la jeunesse, axé sur la prévention et l'éducation ; vous, vous privilégiez la sanction, tous les textes récents le montrent.
Cet article autorise la traversée des bangas qui enclaveraient les locaux professionnels afin de renforcer la lutte contre l'emploi de personnes en situation irrégulière, et ce pour quinze jours. C'est disproportionné au regard du droit à la vie privée et familiale et du droit à la tranquillité. Cet amendement réduit la durée d'autorisation de traversée à deux jours.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Sur réquisition du procureur de la République, les agents compétents, officiers de police ou Urssaf, peuvent contrôler les locaux listés dans la réquisition. En métropole, le délai est d'un mois. Quinze jours, c'est proportionné.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°109 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°41 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - L'ordonnance du JLD doit reposer sur des indices sérieux, afin de prévenir les dérives liées à des contrôles exploratoires. Il faut maintenir un haut niveau de justification des interventions, car les opérations de police administrative dans les quartiers précaires peuvent exacerber les tensions.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Les interventions du JLD sont toujours pour des raisons sérieuses et préservent les droits des personnes.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°41 rectifié n'est pas adopté.
L'article 13 est adopté.
Article 14
M. le président. - Amendement n°77 de M. Szczurek et alii.
L'amendement n°77 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°121 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Le recensement de la population est nécessaire ; il doit aussi être l'occasion d'identifier les personnes en état de précarité, notamment hydrique, car l'accès à l'eau est un enjeu essentiel. Nous proposons ici d'articuler le recensement général avec un diagnostic territorial d'accès à l'eau.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Le diagnostic territorial d'accès à l'eau pourra être réalisé par les collectivités immédiatement après le recensement. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°121 n'est pas adopté.
L'article 14 est adopté.
Article 15
Mme Silvana Silvani . - Depuis 2011, Mayotte est le cent unième département français, mais les Mahoraises et les Mahorais ne bénéficient toujours pas des mêmes droits sociaux que les Français de métropole. Les règles applicables ne sont pas les mêmes : le Smic équivaut à 75 % de celui de la métropole, le RSA à 50 % et l'aide médicale de l'État (AME) ne s'applique toujours pas.
Ce système à double vitesse est ancien. La Cour des comptes estimait en 2022 que l'État dépensait à Mayotte 6 000 euros par habitant et par an, moins que dans tous les autres départements d'outre-mer. Pour le journaliste Rémi Carayol, c'est le signe que la situation coloniale perdure.
Le Gouvernement propose d'accélérer le processus de convergence des droits de 2036 à 2031 - c'est un petit pas. Nous souhaitons que cette avancée s'accompagne d'une généralisation de l'ensemble des droits pour enfin sortir les Mahorais de la précarité.
Mme Evelyne Corbière Naminzo . - La commission des affaires sociales a exclu l'AME des prestations sociales pour lesquelles le Gouvernement s'est engagé à harmoniser les conditions d'accès. C'est contraire aux recommandations du rapport d'information de 2021, qui préconisait d'étendre à Mayotte la protection universelle maladie (PUMa), la CMU et l'exonération du ticket modérateur, et de réfléchir à la prise en charge des frais de santé des personnes en situation irrégulière, ainsi qu'à la possibilité de l'AME.
Mme Annie Le Houerou . - À Mayotte, l'égalité des droits est encore lointaine. Les allocations familiales perçues par une famille mahoraise sont trois à quatre fois inférieures à celles perçues à La Réunion ou en métropole, d'où un taux de pauvreté élevé et des inégalités importantes. Ainsi, 94 % des familles monoparentales, surtout des mères isolées, sont pauvres.
L'allocation de soutien familial n'est pas versée à Mayotte. La prestation d'accueil du jeune enfant ne l'est que partiellement ; la prime de naissance ou d'adoption ne le sont pas. Les montants versés sont inférieurs à ceux pratiqués ailleurs. Comment supporter de telles inégalités, s'agissant de moments de vulnérabilité comme la naissance et la petite enfance ? Laisser des familles françaises dans de telles situations est inacceptable. Il faut vraiment accélérer la convergence des droits sociaux et des prestations sociales.
Mme Raymonde Poncet Monge . - Sur les trente-quatre articles du texte, seuls quatre concernent les affaires sociales. La refondation de Mayotte appelait portant des mesures sociales fortes, plutôt que des mesures antimigratoires... L'égalité des droits n'est pas la priorité du Gouvernement.
Selon l'Insee, le système de redistribution publique ne réduit le taux de pauvreté à Mayotte que de deux points, contre sept dans l'Hexagone et dix dans les autres outre-mer. La convergence est repoussée aux calendes grecques.
La commission a adopté un amendement pour exclure l'AME, en invoquant le risque d'appel d'air. Quantité de rapports démontrent pourtant que c'est un mythe. Dans quel but, au nom de quelle idéologie le véhiculez-vous ? La France a une responsabilité. Le régime d'exception à Mayotte doit cesser.
Mme Audrey Bélim . - J'insiste sur la nécessité de poursuivre l'engagement de l'État. Mayotte a besoin d'un regard bienveillant.
La loi pour l'égalité réelle outre-mer, que vous avez portée avec Ericka Bareigts, monsieur le ministre, comportait un titre entier sur Mayotte : accélération du rythme de convergence des allocations familiales vers le montant pratiqué dans les DOM, complément familial et complément de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, minimum contributif pour revaloriser les petites retraites... Malheureusement, cette loi, adoptée à l'unanimité en 2017, a été peu ou mal appliquée. Les plans de convergence se résument à de simples plans État-région, élaborés sans concertation.
Ces mesures sont pourtant indispensables. Nous le devons à Mayotte, qui a besoin d'un véritable soutien de la nation française.
M. le président. - Amendement n°15 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - Mayotte est le seul département où l'AME ne s'applique pas, alors que ce territoire compte la plus forte proportion de personnes vulnérables. Selon l'Insee, un habitant sur neuf s'estime en mauvaise santé. La mortalité infantile atteint 9,6 %, contre 3,8 % dans l'Hexagone. La malnutrition touche 10 % des enfants de 4 à 10 ans et l'espérance de vie est inférieure de huit ans à celle de la métropole.
Il y a donc urgence à lutter contre le renoncement aux soins en généralisant la PUMa et les exonérations de ticket modérateur.
Les personnes immigrées renoncent souvent aux soins pour des motifs économiques : la participation forfaitaire demandée pour consulter au centre hospitalier de Mayotte, de 10 ou 25 euros, est une vraie barrière. D'où l'intérêt de généraliser l'AME à Mayotte.
Les droits sociaux sont constitutifs de la citoyenneté. L'argument de la maîtrise de l'immigration ne saurait justifier le maintien de droits différenciés selon le territoire.
M. le président. - Amendement identique n°43 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°85 de Mme Le Houerou et du groupe SER.
Mme Annie Le Houerou. - L'article 15 prévoit la convergence des droits à Mayotte d'ici à 2031 - à l'exception de l'AME.
Mayotte est le seul département exclu de l'AME, alors qu'il concentre la plus forte proportion d'étrangers en situation irrégulière. Depuis le 1er janvier 2005, l'accès aux soins n'est gratuit que pour les affiliés à la sécurité sociale ; les non-affiliés - souvent les personnes en situation irrégulière, donc les plus précaires - doivent payer un forfait.
Avec 89 médecins pour 100 000 habitants, Mayotte est le plus grand désert médical de France. Privés d'accès à la médecine de ville, ces patients se tournent massivement vers les urgences du CHM, qui assure 72 % de l'offre de soins - et creuse son déficit.
Nous ne souhaitons pas que Mayotte devienne le laboratoire de ce qui pourrait arriver sur le reste du territoire. Toute personne dont la santé est en danger doit pouvoir être soignée. N'excluons pas l'AME de la convergence des droits. La République est une et indivisible ; tous ses habitants doivent bénéficier des mêmes aides pour vivre dignement.
M. le président. - Amendement identique n°141 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'AME est une mesure essentielle de santé publique : en garantissant l'accès aux soins vitaux des personnes en situation irrégulière, on préserve la santé de tous les habitants du territoire.
Refuser l'AME à Mayotte, c'est porter atteinte au principe constitutionnel d'égalité, à la solidarité nationale, et aggraver les coûts sanitaires à terme. C'est une aberration financière, médicale et un manque d'humanité. Mettons donc fin à cette différence de traitement discriminatoire à l'égard des résidents de Mayotte.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable à ces amendements qui réintroduisent la possibilité d'étendre l'AME à Mayotte, supprimée en commission. La convergence doit tenir compte des spécificités mahoraises. Or le fort afflux de migrants déstabilise l'ordre public et la reconstruction à l'oeuvre. Ne créons pas d'effet incitatif supplémentaire.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Ce texte est équilibré, fort et dynamique. Le réduire aux questions migratoires et sécuritaires serait passer à côté de l'essentiel - voire montrer qu'on ne l'a pas lu. L'article 1er, c'est 4 milliards d'euros d'engagements, des investissements attendus depuis dix ans. Cela n'avait jamais été fait jusqu'ici !
Mme Bélim a évoqué la loi que nous avons portée avec Victorin Lurel puis Ericka Bareigts. Sept ou huit ans après, me voilà à nouveau devant vous pour essayer de mettre en oeuvre ses objectifs.
Le présent texte est le fruit d'un travail interministériel, d'une concertation avec les élus mahorais et la société civile, de la proposition de loi de la députée Estelle Youssouffa, du travail de mes prédécesseurs. Il comporte une programmation financière, des outils pour lutter contre l'habitat illégal et contre l'immigration irrégulière.
La convergence sociale s'appuiera sur la négociation avec les partenaires sociaux ; nous la mettrons en oeuvre à partir du 1er janvier 2026, à partir du rapport que me remettront le général Facon et le préfet Bieuville.
La commission a exclu l'AME du champ des prestations sociales pouvant être étendues par ordonnance. Aujourd'hui, l'AME n'est pas applicable à Mayotte. La prise en charge des étrangers est principalement assurée par le CHM, grâce au dévouement des soignants. Une prise en charge par la médecine de ville est peu réaliste, l'offre de ville étant embryonnaire ou saturée. L'extension de l'AME sera appréciée après 2031, en tenant compte de la situation de l'offre de ville et d'une éventuelle évolution du dispositif national d'AME d'ici là.
Avis défavorable aux amendements.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Même s'il y a des problèmes de temporalité ou de conditionnalité, rien n'obligeait à exclure l'application de l'AME à Mayotte. Vous avez bien reporté la convergence de nombreuses prestations aux calendes grecques ; pourquoi cette démarche active d'exclusion ?
Que le panier de soins soit revu, c'est une chose, mais plusieurs rapports ont conclu à la nécessité de maintenir l'AME. Vous l'avez dit vous-même, les malades ne disparaissent pas : ils vont à l'hôpital, dont on aggrave le déficit, leurs dépenses de santé n'étant pas remboursées.
Exclure l'AME, c'est un fil rouge idéologique, ce n'est pas rationnel.
Mme Silvana Silvani. - Je vous rassure : nous avons lu le texte et reconnu un certain nombre d'avancées. Votre position est incompréhensible. Les Mahorais sont-ils français ou pas ?
Les amendements identiques nos15, 43 rectifié, 85 et 141 ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°137 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Cet amendement harmonise les conditions de durée de séjour entre Mayotte, la métropole et les autres départements d'outre-mer.
Une personne étrangère résidant dans l'Hexagone peut obtenir l'Aspa avec un titre de séjour de dix ans, contre quinze ans à Mayotte. Le RSA n'est pas accessible aux personnes régularisées depuis moins de quinze ans. La condition de régularité du séjour est plus excluante qu'ailleurs et l'attribution de prestations familiales à des familles étrangères est exceptionnelle, dit le Haut Conseil de la famille. La moitié des personnes étrangères n'ont pas de titre de séjour.
La redistribution ne réduit la pauvreté que de deux points à Mayotte, contre dix points dans les autres outre-mer, car la majeure partie de la population pauvre n'est pas éligible aux prestations sociales. Levons ces restrictions, sources de pauvreté et de précarité.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable. À Mayotte, certaines prestations sont soumises à des durées de séjour plus strictes, car la moitié de la population est étrangère. Il faut tenir compte de cette spécificité démographique.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°137 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°84 de Mme Le Houerou et alii.
Mme Annie Le Houerou. - À Mayotte, le taux de pauvreté atteint 77 %, contre 14 % en France métropolitaine, le PIB par habitant est le plus faible de France, le taux de chômage atteint 37 %. Au regard de cette situation, il est impératif d'accélérer le calendrier de convergence des droits sociaux.
Le rapport annexé prévoit une convergence pour le RSA et l'allocation aux adultes handicapés (AAH) à l'horizon 2031. C'est trop lointain. Nous proposons de fixer la date butoir au 1er janvier 2027.
M. le président. - Amendement n°16 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Silvana Silvani. - La délégation aux outre-mer a publié un rapport sur la lutte contre la vie chère outre-mer. Selon l'Insee, le taux de pauvreté est de 77 % à Mayotte, contre 36 % à La Réunion et 14,5 % en métropole. Les enfants sont exposés à la malbouffe et on compte 1 600 évacuations sanitaires annuelles vers La Réunion.
Les gouvernements ont toujours été réticents à accorder les mêmes droits à Mayotte qu'en Vendée, par exemple. Le processus de convergence entamé en 1996 devait aboutir en 2036 - le Gouvernement prévoit de l'accélérer à 2031 ce qui est déjà positif. Face à l'urgence, nous proposons d'avancer au 1er janvier 2028 la publication des dernières ordonnances de convergence des droits.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable : l'habilitation prévoit que les ordonnances sont prises dans les douze mois suivant la promulgation de la présente loi, soit avant le 1er janvier 2027 et le 1er janvier 2028.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - J'ai été sensible à la référence à la Vendée. Vous pensiez sans doute à Clemenceau, et à son grand livre de 1895, La Mêlée sociale...
L'amendement n°84 propose d'anticiper la convergence au 1er janvier 2027, dans dix-huit mois ; l'amendement n°16, au 1er janvier 2028. Or le texte fixe déjà la date limite de publication des ordonnances à douze mois suivant la promulgation de la loi.
Surtout, vos propositions ne tiennent pas compte de la situation socio-économique du territoire ni de la capacité à tenir de tels délais.
La convergence sociale porte à la fois sur les droits sociaux et sur les obligations, donc les prélèvements sociaux, qui doivent être soutenables pour les entreprises et les salariés. La hausse importante attendue des minima sociaux ne doit pas entraîner d'inflation, déstabiliser l'économie locale ou pénaliser l'emploi. C'est pourquoi je souhaite une convergence progressive, privilégiant l'activité, soutenable pour la compétitivité des entreprises. Je m'engage sur ce qui est possible, pas sur des promesses irréalistes. C'est une question de considération vis-à-vis des Mahorais.
Je préfère donc un calendrier crédible et opérationnel jusqu'en 2031 ; si l'on peut aller plus vite, plus loin, tant mieux. Donnons-nous ces cinq années pour réussir cette convergence sociale. Avis défavorable.
L'amendement n°84 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°16.
L'article 15 est adopté.
Après l'article 15
M. le président. - Amendement n°70 de M. Hochart et alii.
M. Christopher Szczurek. - Défendu.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable à cet amendement qui prévoit des conditions de durée de séjour dérogatoires pour le versement des prestations non contributives telles que le RSA, l'AAH et les allocations familiales. Il semble inopportun de nous substituer au Gouvernement. Au demeurant, cet amendement comporte un risque d'inconstitutionnalité.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°70 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°75 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'écart persistant entre les droits sociaux à Mayotte et le reste du pays nourrit un sentiment d'injustice et bafoue le principe constitutionnel d'égalité.
L'information de la représentation nationale est parcellaire. Il serait souhaitable d'éclairer le débat par un rapport analysant les trajectoires possibles de convergence, ses coûts et bénéfices. Il faut éviter l'inflation et la déstabilisation de l'économie, dites-vous ? Statuons sur des bases objectives, pour que l'égalité de droits se traduise en égalité de fait.
Nous appelons le Gouvernement à clarifier l'objectif de convergence intégrale entre les prestations sociales versées à Mayotte par rapport à celles versées dans l'Hexagone et les autres départements d'outre-mer.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Conformément à sa doctrine, la commission a émis un avis défavorable à cette demande de rapport.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°75 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°115 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Il ne faut pas que la doctrine devienne doctrinaire : encore une fois, nous demandons un rapport sur les trajectoires pour aligner le Smic mahorais sur le Smic de droit commun.
Vous l'avez dit, monsieur le ministre, il faut éviter les effets de bord ; eh bien, qualifions-les !
L'égalité de rémunération demeure un impératif. Des dérogations durables ne sauraient être justifiées que sur la base d'éléments chiffrés.
Nous partageons la soutenabilité économique ; partagez aussi le progrès social pour tous les Mahorais.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°115 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°142 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'extension de l'AME à Mayotte est un enjeu décisif pour l'efficacité de nos politiques de santé publique et pour l'égalité réelle entre les territoires. Son exclusion est une aberration financière, médicale et humaine. Le Parlement a besoin d'une analyse chiffrée pour décider en connaissance de cause - je ne comprends pas ce qui a justifié la décision de la commission. Cet amendement charge donc le Gouvernement de remettre un rapport dans un délai de six mois évaluant les coûts et les bénéfices de la convergence du dispositif. Quid de l'impact potentiel sur les urgences, aujourd'hui sursollicitées ?
Ce rapport permettra de dépasser les représentations approximatives, voire fantasmatiques, et fera prévaloir l'égalité.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Avis défavorable pour les mêmes raisons.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Notre groupe votera cet amendement : l'objectif de Mme Poncet Monge est simplement de nous documenter. Nous n'arrêtons pas d'entendre que Mayotte est un territoire exceptionnel qui appelle des exceptions. Nous avons ici l'occasion d'aller au fond des choses, mais la commission donne des avis défavorables... Va-t-on continuer à légiférer à l'aveugle, au doigt mouillé ?
Sénatrice d'un territoire ultramarin, je pense aussi que nous devrions avoir à notre disposition plus d'informations sur la santé. Lorsque nous acceptons que des monopoles s'installent, on abîme la santé de la population.
Nous devons savoir quels éléments combattre en matière de santé publique. Votons cet amendement qui ne mange pas de pain.
Mme Silvana Silvani. - Très bien.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. - Je vous propose de saisir les commissions qui peuvent sans difficulté mener ces enquêtes. On sait bien que 90 % des rapports prévus dans les textes ne sont pas réalisés. Vous avez raison de mettre ce sujet sur la table, c'est un point essentiel.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - C'est le moins que l'on puisse faire !
Mme Lana Tetuanui. - Cela fait deux jours que j'entends : il faut des rapports... À quoi servons-nous, nous les parlementaires ? À demander à chaque fois des rapports au Gouvernement ? Prenons notre rôle au sérieux !
Ma chère collègue de La Réunion, moi, si j'étais plus près de Mayotte, je prendrais la pirogue pour aller voir sur place.
Un adage dit : qui paie contrôle. C'est à nous de contrôler. Prenez vos responsabilités : vous êtes parlementaire...
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - C'est fait !
Mme Raymonde Poncet Monge. - Mais oui, enfin, prenez votre pirogue, madame Corbière Naminzo !
Mme Lana Tetuanui. - Allez vous-même sur place. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; M. Stéphane Fouassin applaudit également.)
Mme Muriel Jourda, présidente de la commission. - Il nous appartient, dans le cadre de notre pouvoir de contrôle, de vérifier ce que nous voulons connaître. Le Parlement ne peut pas donner d'ordre au pouvoir exécutif (Mme Christine Bonfanti-Dossat le confirme), ce serait inconstitutionnel : aussi ne pouvons-nous pas lui demander de rapport.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Lorsque vous avez supprimé l'AME, c'est donc que vous avez pris la pirogue pour connaître sur place les données épidémiologiques pour justifier une telle décision. La démagogie a ses limites ! (Applaudissements à gauche ; Mmes Evelyne Corbière Naminzo et Silvana Silvani renchérissent.)
M. Saïd Omar Oili. - Je peux témoigner que Madame Corbière Naminzo est venue me voir en pirogue à Mayotte. Nous avons fait le tour de l'île.
Mme Lana Tetuanui. - (Écartant les bras) Donc il n'y a plus besoin de rapport ! (Rires ; applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)
Mme Silvana Silvani. - Soyez sérieux, nous parlons de Mayotte !
L'amendement n°142 n'est pas adopté.
L'article 16 est adopté.
Article 17
M. le président. - Amendement n°86 de Mme Le Houerou et du groupe SER.
Mme Annie Le Houerou. - L'objectif de cet article est d'assurer une meilleure couverture des besoins en santé, notamment en augmentant le nombre d'officines de pharmacie, qui jouent un rôle crucial en fournissant médicaments, mais aussi conseils de santé, vaccinations, dépistages... Étendons les services à un plus grand nombre de personnes et réduisons le temps de déplacement et d'attente.
Mais cet article prévoit la délivrance d'une licence de pharmacie d'officine sur avis conforme de l'ordre des pharmaciens ; nous craignons qu'il soit un frein, supprimons-le.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Les deux syndicats représentatifs et l'ordre des pharmaciens étaient opposés à une dérogation, ...
Mme Corinne Narassiguin. - Évidemment ! C'est bien là le problème !
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - ..., jugeant qu'elle pourrait déstabiliser le réseau officinal.
Dans l'archipel, de nombreux médicaments sont distribués par l'hôpital. La commission a prévu que l'ARS ne pourrait user de telles dérogations qu'avec l'accord de l'ordre (Mme Annie Le Houerou ironise.). La commission demeure attachée à cet équilibre. Avis défavorable, dès lors.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement s'est engagé à augmenter le nombre de pharmacies, car développer l'offre de soins de ville est essentiel. C'est l'un des rares désaccords que j'ai avec Mme la rapporteure pour avis.
Cet amendement supprime l'avis conforme de l'ordre, qui peut s'apparenter à un veto. Sagesse, car une rédaction plus large serait préférable.
Une voix à gauche. - Quel courage !
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Oui, la sagesse, c'est le courage.
L'amendement n°86 n'est pas adopté.
L'article 17 est adopté.
Après l'article 17
M. le président. - Amendement n°49 de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Cet amendement toilette le code de la sécurité sociale en supprimant la référence à l'ARS de l'océan Indien, car Mayotte dispose depuis janvier 2020 de sa propre ARS.
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - En effet, la référence est obsolète : avis favorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°49 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°78 de M. Szczurek et alii.
L'amendement n°78 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°143 de Mme Poncet Monge et alii.
Mme Raymonde Poncet Monge. - L'article 17 prévoit la prise en compte de l'intercommunalité comme référence pour l'autorisation des ouvertures d'officines de pharmacie, afin de lutter contre les inégalités dans l'accès au médicament.
Nous y ajoutons une possibilité de faire sa première année d'études en santé sur l'archipel. L'article 3 de la proposition de loi de Guillaume Garot, adoptée le 7 mai à l'Assemblée nationale, prévoit cette possibilité dans tous les départements - éventuellement en distanciel. En attente de la navette, nous souhaitons inscrire cette mesure pour Mayotte. Cela permettrait d'augmenter le nombre de professionnels de santé.
L'amendement n°143, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Article 18
M. le président. - Amendement n°65 de Mme Imbert.
Mme Corinne Imbert. - Cet amendement réécrit l'article 18 en précisant que les représentants des professionnels exerçant à Mayotte siègent au conseil d'administration de l'union régionale de professionnels de santé (URPS) de l'archipel. Quoi de plus logique quand Mayotte dispose d'une ARS ?
Dans votre texte, monsieur le ministre, vous précisez que le décret en Conseil d'État serait pris après avis des organisations représentatives des professionnels. Ils se sont déjà exprimés : ils réclament une URPS.
Je connais votre réticence : la densité serait insuffisante. Et alors ?
Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis. - Les représentants des professionnels de santé et de l'ARS ont formulé cette demande. Toutefois, le faible nombre des professionnels risque de rendre délicate la création d'une URPS dédiée. Sagesse bienveillante.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Vous proposez la création d'une URPS à Mayotte plutôt que d'améliorer la représentation des professionnels au sein de l'URPS de l'océan Indien. Madame Imbert, je reprends l'argument que vous redoutiez : créer une URPS à Mayotte pèserait sur les ressources médicales disponibles.
Retrait, sinon avis défavorable... avec un peu de sagesse. (Sourires)
Mme Micheline Jacques, rapporteur pour avis. - Il faut cesser de raisonner en comptable dans les territoires ultramarins. Chaque territoire a ses spécificités, je voterai l'amendement de Mme Imbert.
Mme Corinne Imbert. - Il y a une profession dont la densité est importante : les sages-femmes. Ne faisons pas de caricatures sur le nombre de professionnels de santé : cette mesure est dans l'intérêt de Mayotte.
M. Alain Milon. - J'ai eu l'honneur d'être le rapporteur de la loi Hôpital, patients, santé et territoires, qui a créé les URPS, pour que les professionnels de santé puissent participer au conseil de surveillance de l'ARS.
Après la création de l'ARS à Mayotte, il faut créer une URPS. Les professionnels de santé sont peut-être en nombre insuffisant, mais, au moins, respectons la loi.
M. Philippe Mouiller, président de la commission. - J'ai organisé une rencontre voilà deux mois avec les professionnels de santé mahorais. Avec ce système, il ne peut y avoir que des représentants de La Réunion au conseil de surveillance de l'ARS. (Mmes Evelyne Corbière Naminzo et Silvana Silvani protestent.)
L'amendement n°65 est adopté et l'article 18 est ainsi rédigé.
Article 19
M. le président. - Amendement n°14 de Mme Narassiguin et du groupe SER.
M. Saïd Omar Oili. - Le projet de loi prévoit d'accélérer les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique, via une procédure dérogatoire permettant de prendre possession des terrains dès que la déclaration d'utilité publique (DUP) a été prise, même si les propriétaires n'ont pas été identifiés.
Cette mesure inquiète la population mahoraise. Les élus locaux y sont totalement opposés.
Nous refusons toute mesure d'exception sur ces sujets sensibles pour deux raisons : le désordre foncier perdure à Mayotte et plus de 50 % du foncier relève du domaine public. Supprimons l'article 19.
M. le président. - Amendement identique n°18 rectifié de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - L'article 19 est perçu à Mayotte comme un moyen de faire main basse sur le foncier détenu par la population. Supprimons cet article et recourons à une procédure d'expropriation classique, qui sécurise les droits des propriétaires.
M. le président. - Amendement identique n°42 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
Mme Sophie Briante Guillemont. - La dérogation prévue par l'article 19 viderait de sa substance le principe pluriséculaire de l'expropriation qui veut qu'une personne ne puisse être expropriée que pour utilité publique, moyennant une juste et préalable indemnité.
Cette dérogation générale pour dix ans, excessive, créerait une rupture d'égalité qui fragiliserait l'État face à des procédures contentieuses.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Nos collègues relaient une inquiétude répandue à Mayotte, mais qui ne nous paraît pas fondée. L'article ne change rien ni à l'identification des propriétaires ni à la nécessité de passer par une procédure de déclaration d'utilité publique.
Il s'agit simplement d'aller plus vite pour réaliser les infrastructures dont Mayotte a besoin.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Cet article a pour objet d'accélérer les procédures d'expropriation sans en élargir le champ. Il permet le recours à la prise de possession accélérée pour réaliser les infrastructures urgentes : transports, eau, hôpital. La liste a été resserrée à la demande des élus.
C'est pourquoi je ne comprends pas ces demandes de suppression. L'article tient compte des difficultés pour identifier les propriétaires à Mayotte. Il permet de prendre possession des terrains pour ne pas bloquer les travaux, tout en garantissant les droits attachés à la propriété privée.
La maîtrise foncière est un enjeu crucial pour réaliser ces aménagements utiles à la population. Compte tenu du morcellement urbain, il est impossible de mobiliser uniquement le foncier urbain. Cette mesure de prise de possession anticipée a déjà été utilisée en Guyane ou pour la construction de réacteurs nucléaires, entre autres.
Il s'agit non pas d'élargir le champ de l'expropriation ou ses conditions de justification, mais d'accélérer les choses.
Nous ne modifions en rien la procédure de la DUP. Celle-ci est mise en oeuvre de façon protectrice pour les personnes qui pourraient revendiquer ces terrains. Elle concerne uniquement des projets déclarés d'utilité publique. L'autorisation de possession anticipée intervient uniquement en cas de difficulté. Elle est autorisée par un décret après avis conforme du Conseil d'État. Le juge peut prononcer une indemnisation spéciale. Une indemnité prévisionnelle d'expropriation est versée au propriétaire - si l'on ne peut identifier ce dernier, celle-ci est consignée. Enfin, cette disposition est valable pour un délai de dix ans : la mesure est donc extrêmement encadrée.
Dès lors, avis défavorable à ces amendements. Je vous invite à faire preuve de responsabilité collective. Le Parlement ne peut pas voter des crédits, attendus par les élus et la population, pour réaliser des infrastructures essentielles et ne pas se donner les moyens juridiques de le faire rapidement.
Je comprends l'histoire de Mayotte, et les peurs. C'est pourquoi je suis précis, afin de lever les inquiétudes ; je m'adresse non seulement aux élus, mais aussi à tous les Mahorais qui pourraient nous écouter.
M. Saïd Omar Oili. - L'objet de cet article est le même que celui de l'article 10 de la loi d'urgence.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Non !
M. Saïd Omar Oili. - Les Mahorais n'en veulent pas. Mme Ramia et moi-même avons transmis leurs demandes. Si l'on ne nous écoute pas, qui écoutera-t-on ?
À la demande du groupe SER, les amendements identiques nos14, 18 rectifié et 42 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°291 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l'adoption | 135 |
Contre | 206 |
Les amendements identiques nos14, 18 rectifié et 42 rectifié ne sont pas adoptés.
L'article 19 est adopté.
Après l'article 19
M. le président. - Amendement n°157 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement souhaite que le projet de piste longue de l'aéroport bénéficie du dispositif de DUP foncière, qui permet une acquisition rapide des terrains nécessaires à la réalisation d'une opération d'aménagement.
L'aéroport actuel est exposé à des risques naturels. Cette procédure permet de conduire l'enquête publique sans étude d'impact, alors que le projet n'est pas encore complètement défini.
Toutefois, celui-ci fera bien ultérieurement l'objet d'une nouvelle enquête publique. Cette DUP foncière devra ensuite être complétée par une étude d'impact. Il s'agit d'accélérer la maîtrise du foncier en gagnant deux ans par rapport à une procédure de DUP classique.
Sans l'adoption de ce dispositif, ces travaux ne pourront pas débuter avant fin 2028.
M. le président. - Amendement n°158 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Cet amendement précise les conditions de clôture de la concertation avec le public.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Le Gouvernement nous propose de lui donner les moyens pour réaliser un équipement dont Mayotte a besoin rapidement : avis favorable.
Les amendements nos157 et 158 sont adoptés et deviennent des articles additionnels.
L'article 20 est adopté.
Article 21
M. Marc Laménie . - L'article 21 concerne le recours aux marchés de conception-réalisation pour la construction d'établissements scolaires et universitaires et de résidences universitaires à Mayotte. Ces marchés permettent de gagner du temps.
À la rentrée 2024, plus de 115 000 élèves sont scolarisés sur le territoire, dont 23 700 dans le premier degré, 50 000 dans le second et 1 230 dans l'enseignement supérieur.
Le territoire compte 220 écoles primaires, 22 collèges, 11 lycées, autant d'infrastructures saturées, alors qu'entre 6 000 et 10 000 enfants sont déscolarisés.
Notre groupe votera cet article, qui facilite la construction d'infrastructures scolaires et universitaires.
M. le président. - Amendement n°111 de Mme Corbière Naminzo et du groupe CRCE-K.
Mme Marianne Margaté. - Les lauréats des marchés de conception-réalisation auront beaucoup de travail pour reconstruire ce qui a été détruit par Chido, mais aussi pour combler ce qui manquait avant le passage du cyclone.
Avec cet article, le Gouvernement souhaite désigner un seul lauréat via un marché unique pour les bâtiments scolaires et universitaires. En effet, cela accélérera les constructions.
Mais répondre à l'urgence ne doit pas conduire à l'aggravation de la situation économique de l'île, en offrant un monopole de la reconstruction à de grands groupes, alors que de nombreuses entreprises locales ou d'artisans pourraient participer aux travaux. C'est là l'occasion de corriger le retard de développement de Mayotte.
Il faut veiller à la bonne répartition des emplois et des salaires qui vont avec. Cet amendement reprend une disposition intégrée au projet de loi d'urgence prévoyant un montant minimum de 30 % pour les micro-entreprises, les PME et les artisans, afin d'éviter que les grandes entreprises ne captent ces marchés.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - La commission considère qu'il s'agit d'un dispositif proportionné : avis favorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°111 est adopté.
L'article 21, modifié, est adopté.
Après l'article 21
M. le président. - Amendement n°161 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'amendement complète l'article 17 de la loi du 24 février 2025 d'urgence pour Mayotte. Les établissements scolaires et universitaires de Mayotte ont besoin d'infrastructures temporaires pour accueillir les élèves. Les constructions modulaires ne sont pas nécessaires à la reconstruction stricto sensu et ne peuvent donc pas bénéficier de la dérogation prévue par la loi d'urgence, mais elles restent nécessaires à la continuité des services publics d'enseignement. Les besoins temporaires ne sont pas tous identifiés, et des marchés seront passés dans les mois à venir.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - Avis favorable.
L'amendement n°161 est adopté et devient un article additionnel.
Article 22
M. le président. - Amendement n°3 de M. Lurel et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - Cet amendement prolonge pour cinq ans le dispositif proposé par l'article 22 qui crée une zone franche globale à Mayotte. En portant de cinq à dix ans l'expérimentation, nous donnerons plus de visibilité aux acteurs de Mayotte.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis de la commission des finances. - Avis défavorable : la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027 préconise de limiter les dépenses fiscales à trois ans. Il serait préférable d'évaluer le dispositif au bout de cinq ans avant d'envisager sa prolongation. Mayotte bénéficiera d'une zone franche d'activité nouvelle génération existant dans d'autres outre-mer.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°3 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°2 de M. Lurel et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - Cet amendement introduit une évaluation de dispositions fiscales introduites par l'article 22, dans l'hypothèse d'une suppression ou d'une prorogation. Le groupe SER votera cet article, mais il nous faut une information utile pour jauger du futur de ce dispositif.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Avis défavorable, comme c'est l'usage en matière de rapports.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°2 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°46 rectifié de Mme Briante Guillemont et alii.
M. Henri Cabanel. - L'impact budgétaire du dispositif de l'article 22 s'élève à 90 millions d'euros. Aucun dispositif de pilotage n'est prévu pour ce dispositif. Sans feuille de route définie, le cap de reconstruction sera difficile à suivre. Mettons en place un comité de suivi ad hoc sous l'autorité du préfet.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Une année, c'est un peu court. Il serait plus pertinent de dresser un bilan en 2030. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°46 rectifié n'est pas adopté.
L'article 22 est adopté.
Après l'article 22
M. le président. - Amendement n°4 rectifié bis de Mme Malet et alii.
Mme Viviane Malet. - En attendant la refonte du dispositif de charges patronales applicable à Mayotte, nous proposons un rehaussement du plafond du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) de 2,5 à 3,5 Smic. Le plafond actuel dissuade les employeurs d'augmenter les employés. Cet amendement a été travaillé avec la Fédération des entreprises des outre-mer (Fedom).
M. le président. - Amendement identique n°23 rectifié bis de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Cet amendement permet aux entreprises mahoraises de bénéficier du CICE pour les salariés qui ne dépassent pas le plafond de 3,5 Smic.
La zone franche prévue à l'article 22 bénéficie uniquement aux entreprises qui font des bénéfices, ce qui n'est pas le cas des petites entreprises.
Les outre-mer bénéficient du dispositif Lodéom, qui autorise des charges patronales réduites. Les entreprises mahoraises, elles, paient des charges salariales plus importantes que tous les autres territoires outre-mer ; aucun dispositif ne les accompagne.
M. le président. - Amendement n°22 rectifié bis de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Amendement de repli : nous proposons de limiter le dispositif dans le temps.
M. le président. - Amendement identique n°55 rectifié de Mme Malet.
Mme Viviane Malet. - C'est un amendement de repli qui borne la mesure au 31 décembre 2026.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Quel est l'avis du Gouvernement ? La convergence des droits sociaux implique l'augmentation des cotisations patronales. Comment le Gouvernement compte-t-il pallier les conséquences de l'augmentation du Smic prévue pour 2026 ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement partage votre préoccupation : nous devons accompagner les entreprises mahoraises.
Alors que nous menons un chantier de convergence, il paraît contre-intuitif de renforcer un dispositif dérogatoire à Mayotte, à savoir le CICE. Je préconise d'autres leviers pour atteindre l'objectif.
Retrait, sinon avis défavorable.
Les amendements identiques nos4 rectifié bis et 23 rectifié bis ne sont pas adoptés, non plus que les amendements identiques nos22 rectifié bis et 55 rectifié.
M. le président. - Le Gouvernement nous a fait savoir qu'il demanderait une courte seconde délibération. Afin d'achever l'examen des amendements, j'appelle chacun à la concision.
M. le président. - Amendement n°5 rectifié bis de Mme Malet et alii.
Mme Viviane Malet. - Nous supprimons l'effet cliquet du CICE.
M. le président. - Amendement identique n°21 rectifié bis de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°20 rectifié bis de Mme Ramia et du RDPI.
Mme Salama Ramia. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°54 rectifié de Mme Malet.
Mme Viviane Malet. - Défendu
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis que tout à l'heure : retrait, sinon avis défavorable.
Les amendements nos5 rectifié bis, 21 rectifié bis, 20 rectifié bis et 54 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°56 de Mme Malet.
Mme Viviane Malet. - Défendu.
M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis. - Le dispositif de soutien aux entreprises est pertinent et bien ciblé. Les pertes d'activité sont chiffrées à 484 millions d'euros. Le Gouvernement était passé par le décret, et il envisage de faire de même pour les mois de février et mars. Il est préférable de procéder ainsi. Retrait, sinon avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°56 est retiré.
L'article 25 est adopté.
Article 26
M. le président. - Amendement n°73 de M. Hochart et alii.
L'amendement n°73 n'est pas défendu
M. le président. - Amendement n°79 de M. Szczurek et alii.
L'amendement n°79 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°122 de Mme Vogel et alii.
Mme Mélanie Vogel. - Défendu.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Même avis.
L'amendement n°122 n'est pas adopté.
L'article 26 est adopté, de même que les articles 27, 28 et 39.
Article 30
M. le président. - Amendement n°165 de Mme Canayer et M. Botz, au nom de la commission des lois.
L'amendement rédactionnel n°165, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 30, modifié, est adopté.
Article 31
M. le président. - Amendement n°11 de M. Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. - Il s'agit de procéder à une élection avec liste unique sans sections, conformément au voeu unanime des membres du conseil départemental. Cela permet de choisir un projet politique pour Mayotte et d'assurer une gouvernance plus stable.
Les déséquilibres constatés entre les données démographiques et le nombre d'inscriptions sur les listes électorales n'assurent pas une bonne représentativité.
M. le président. - Amendement n°12 de Mme Narassiguin et du groupe SER.
Mme Corinne Narassiguin. - M. Omar Oili a défendu la position des élus de Mayotte. Le groupe SER dépose un amendement de repli pour revenir à cinq sections. Il n'est pas justifié d'établir un découpage en treize sections, qui morcellent excessivement le territoire. Restons cohérents avec les règles en vigueur en Guyane et en Martinique, qui ont respectivement huit et quatre sections.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable sur ces deux amendements. Nous préférons treize sections, conformément aux travaux de notre ancien collègue Thani Mohamed Soilihi. Cela permettra aux cantons actuels de disposer d'au moins autant d'élus qu'aujourd'hui et de dégager une majorité claire pour conduire les politiques au sein du département.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement avait imaginé, après discussion avec les élus, un scrutin basé sur une circonscription unique et cinq sections. Nous respectons le travail du Sénat et des rapporteurs : sagesse sur l'amendement n°12 et avis défavorable sur l'amendement n°11.
L'amendement n°11 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°12.
L'article 31 est adopté, de même que l'article 32.
Article 33
M. le président. - Amendement n°166 de Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission des lois.
L'amendement rédactionnel n°166, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 33, modifié, est adopté.
L'article 34 est adopté.
Seconde délibération
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Sur le fondement de l'article 43, alinéa 4, du règlement, le Gouvernement demande une seconde délibération sur l'article 1er et son rapport annexé.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis favorable.
La seconde délibération est ordonnée.
M. le président. - Conformément à l'article 43, alinéa 5, lorsqu'il y a lieu à une seconde délibération, le texte est renvoyé à la commission qui doit présenter un nouveau rapport.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. - La commission y est prête.
Article 1er (Rapport annexé - Seconde délibération)
M. le président. - Amendement A1 du Gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Chacun l'a compris, cet amendement concerne la réalisation de la piste longue à Mayotte, attendue et nécessaire à la continuité territoriale.
M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'avis de la commission était favorable lors du premier vote ; il le reste.
M. Saïd Omar Oili. - C'est un scandale : le Sénat a voté de manière éclairée sur l'article 1er. Nombre de nos amendements ont été rejetés, mais nous n'avons pas demandé une seconde délibération. La population de Mayotte, que Mme Ramia et moi-même avons défendue, sera témoin de cette procédure. Nous le ferons savoir ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER)
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Le Sénat, chambre des territoires, a entendu les arguments des deux sénateurs de Mayotte. Nous avions déjà dénoncé cette procédure sur le projet de loi de finances ; nous le faisons ici encore.
Mme Salama Ramia. - La demande des élus mahorais n'a pas été respectée. (Applaudissements à gauche)
Mme Frédérique Puissat. - Il y a 34 articles dans ce projet de loi.
Nous délibérons à nouveau sur un article, car il y a eu une erreur manifeste d'appréciation. (Fortes protestations à gauche)
Nous avons travaillé jusqu'à minuit quatorze avec sérieux, dans l'intérêt des Mahorais, que certes vous représentez, mais que nous représentons tous dans cet hémicycle.
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement peut demander une seconde délibération, le Sénat en décide. Le mot de scandale est excessif.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Nous ne sommes pas à l'Assemblée nationale !
M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je suis au Sénat, que je connais bien et que je respecte.
Il s'agit d'un projet majeur d'aéroport, qui implique un engagement fort de l'État et qui sera un élément de développement pour Mayotte. S'ajoutent des projets de compensation pour Petite-Terre. Je m'y suis engagé sur place, le Président de la République aussi.
Tout le monde sait qu'il y a un débat dans l'archipel ; je demande donc une seconde délibération. Chacun est libre de voter comme bon lui semble dans cette assemblée qui a toujours manifesté son indépendance. (Mme Evelyne Corbière Naminzo proteste.)
L'amendement n°A-1 est adopté.
M. Guy Benarroche. - On peut revoter ?
L'article 1er, modifié, est adopté.
Mme Silvana Silvani. - Mascarade !
Département-Région de Mayotte (Procédure accélérée - Suite)
M. le président. - Nous passons à la discussion des articles du projet de loi organique.
Discussion des articles
L'article 1er est adopté, ainsi que les articles 2, 3 et 4.
Article 5
M. le président. - Amendement n°1 de Mme Canayer et M. Bitz, au nom de la commission des lois.
L'amendement n°1 de coordination, accepté par le Gouvernement, est adopté et l'article 5 est ainsi rédigé.
M. le président. - Les explications de vote et le vote sur l'ensemble du projet de loi et du projet de loi organique se tiendront le mardi 27 mai à 18 h 30.
Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 21 mai 2025, à 15 heures.
La séance est levée à minuit vingt.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du mercredi 21 mai 2025
Séance publique
À 15 heures, à 16 h 30 et le soir
Présidence : M. Gérard Larcher, Président du Sénat, Mme Anne Chain-Larché, vice-présidente, M. Didier Mandelli, vice-président
Secrétaires : Mme Sonia de La Provôté, Mme Nicole Bonnefoy
1. Questions d'actualité
2. Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi renforçant la lutte contre les fraudes aux aides publiques (texte de la commission, n°570, 2024-2025)